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Textes des chrétiens des premiers siècles

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Message par jaimedieu Sam 16 Aoû 2014 - 20:42

Rappel du premier message :

N.B. Si une personne désire émettre un commentaire, une critique ou une suggestion, il serait préférable de la poster sous "Annonces et Suggestions" ou tout autre fil, et ce, afin d'éviter de "briser" la continuité des posts mis en ligne. Merci de votre compréhension et de votre collaboration.

Ce choix de textes a été préparé par la communauté de Taizé pour soutenir une recherche des sources de la foi.

"Les "Pères de l'Église", ces témoins des premiers siècles, étaient emplis du désir d'exprimer la nouveauté de la foi au Christ dans leurs sociétés. Par là, ils rejoignent souvent nos préoccupations d'aujourd'hui.

L'un d'entre eux, dont le nom est inconnu, écrivait au IIe siècle que les chrétiens étaient appelés à être dans les cités du monde ce que l'âme est dans un être humain.

Écoutons-les: loin de rester des personnages du passé, ils deviennent comme ces amis qui nous prennent par la main et nous entraînent à la rencontre du Christ."

(Source: "Soyons l'âme du monde"; textes choisis des chrétiens des premiers siècles, éd. Les Presses de Taizé, 2e édition, 1998, 189p.)
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Message par jaimedieu Jeu 19 Fév 2015 - 4:34

Bernard de Clairvaux

"... que veut dire le Seigneur lorsqu'il nous commande de nous tourner vers lui [cf. Jl 2, 12] ? Car il est partout, il remplit tout, en même temps qu'il embrasse la totalité de ce qui est. Quelle direction prendre pour me tourner vers toi, Seigneur mon Dieu ? Si je monte au ciel tu es là ; que je descende aux enfers, t'y voici [Ps 138, 8]. Qu'attends-tu de moi ? Où me tourner pour me tourner vers toi ? En haut ? en bas ? à droite ? à gauche ?

A moins de vous convertir et de devenir comme ce petit enfant, non, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux [Mt 18, 3]. Je sais donc où il veut que nous nous tournions : vers le petit enfant. Voilà ce qui nous est nécessaire, de manière à apprendre de lui qu'il est doux et humble de coeur [Mt 11, 29]. C'est dans ce dessein que, petit enfant, il nous a été donné [Is 19, 5].

Voyons maintenant comment nous tourner vers ce petit enfant - vers ce Maître de douceur et d'humilité. Tournez-vous vers moi, dit-il, de tout votre coeur
[Jl 2, 12). Frères, s'il avait dit : "Tournez-vous", sans rien ajouter d'autre, nous prendrions peut-être la liberté de lui répondre : "C'est fait ; propose-nous maintenant un autre commandement." Mais la conversion spirituelle à laquelle il nous exhorte, si je l'entends bien, ne s'accomplit pas en un seul jour. Puisse-t-elle tout au moins s'achever au cours de la vie que nous menons dans ce corps."
(2e sermon de Carême)

"Vous me demanderez comment j’ai pu connaître sa présence. C’est qu’il est vivant et actif : à peine était-il en moi qu’il tira du sommeil mon âme assoupie. Mon cœur était dur comme la pierre et malade : il l’a secoué, amolli et blessé. Il se mit aussi à sarcler, à arracher, à construire, à planter, à arroser les terres arides, à illuminer les endroits obscurs et à ouvrir les chambres closes, à embraser les parties glacées ; mieux encore, il redressa les voies tortueuses et aplanit les terrains raboteux, tant et si bien que mon âme bénit le Seigneur et que tout moi-même se prit à chanter les louanges de son saint nom."
(Homélies sur le Cantique des Cantiques, 74, 6).

"Frères, vous à qui le Seigneur, comme à des petits, révèle ce qui est caché aux sages et aux habiles, vous devez appliquer votre pensée à ce qui concerne vraiment le salut et trouver le sens de cet avent : Cherchez donc quel est celui qui vient, d'où et de qui il vient, cherchez aussi le motif de sa venue. Cette curiosité est sans aucun doute louable et salutaire : l'Église ne célèbrerait pas le présent Avent avec tant de ferveur s'il ne recélait en lui quelque grand sacrement. Et tout d'abord, avec l'Apôtre stupéfait et plein d'admiration, regardez vous aussi celui qui fait son entrée : Il est, au témoignage de Gabriel, le Fils du Très-Haut, Très-Haut lui-même. Vous avez entendu, frères, quel est celui qui vient, écoutez, maintenant, d'où il vient et où il va. Il vient du coeur de Dieu le Père dans le sein de la Vierge Mère. Il vient du plus haut des cieux jusqu'aux régions inférieures de la terre."
(1er sermon pour l'Avent, 1 ).

"Il doit en être du pécheur par rapport à son Créateur, comme du malade par rapport à son médecin, et tout pécheur doit prier Dieu comme un malade prie son médecin. Mais la prière du pécheur rencontre deux obstacles, l'excès ou l'absence de lumière. Celui qui ne voit ni ne confesse point ses péchés est privé de toute lumière; au contraire celui qui les voit, mais si grands qu'il désespère du pardon, est offusqué par un excès de lumière : ni l'un ni l'autre ne prient. Que faire donc? Il faut tempérer la lumière, afin que le pécheur voie ses péchés, les confesse, et prie pour eux afin d'en obtenir la rémission. Il faut donc d'abord qu'il prie avec un sentiment de confusion, c'est ce qui a lieu quand le pécheur n'ose point encore s'approcher lui-même de Dieu et cherche quelque homme saint, quelque saint pauvre d'esprit qui soit comme la frange du manteau du Seigneur, et par qui il puisse s'approcher de lui."
(107e sermon "sur les sentiments qu'il faut avoir dans la prière")

"...qui pourra se faire une juste idée de la gloire au sein de laquelle la reine du monde s'est avancée aujourd'hui, de l'empressement plein d'amour avec lequel toute la multitude des légions célestes s'est portée à sa rencontre ? Au milieu de quels cantiques de gloire elle a été conduite à son trône, avec quel visage paisible, quel air serein, quels joyeux embrassements, elle a été accueillie par son Fils, élevée par lui au-dessus de toutes les créatures avec tout l'honneur dont une telle mère est digne, et avec toute la pompe et l'éclat qui conviennent à un tel Fils ? Sans doute, les baisers que la Vierge mère recevait des lèvres de Jésus à la mamelle, quand elle lui souriait sur son sein virginal, étaient pleins de bonheur pour elle, mais je ne crois pas qu'ils l'aient été plus que ceux qu'elle reçoit aujourd'hui du même Jésus assis sur le trône de son Père, au moment heureux où il salue son arrivée, alors qu'elle monte elle-même à son trône de gloire, en chantant l'épithalame et en disant : "Qu'il me baise d'un baiser de sa bouche." Qui pourra raconter la génération du Christ et l'Assomption de Marie ? Elle se trouve dans les cieux comblée d'une gloire d'autant plus singulière que, sur la terre, elle a obtenu une grâce plus insigne que toutes les autres femmes. Si l'œil n'a point vu, si l'oreille n'a point entendu, si le cœur de l'homme n'a point connu dans ses aspirations ce que le Seigneur a préparé à ceux qui l'aiment, qui pourrait dire ce qu'il a préparé à celle qui l'a enfanté, et, ce qui ne peut être douteux pour personne, qui l'aime plus que tous les hommes ? Heureuse est Marie, mille fois heureuse est-elle, soit quand elle reçoit le Sauveur, soit quand elle est elle-même reçue par lui; dans l'un et dans l'antre cas, la dignité de la Vierge Marie est admirable, et la faveur dont la majesté divine l'honore, digne de nos louanges." (1er Sermon sur l'Assomption de la Vierge Marie, 4)

"Les actions du Seigneur proclament bien haut le motif de sa venue. Il est venu du haut des montagnes chercher la centième brebis qui était errante. Et pour que nous rendions grâces au Seigneur car il est bon, pour que nous chantions ses merveilles pour les fils des hommes, il est venu pour nous. Grandeur inouïe de Dieu qui cherche, grandeur aussi de l'homme cherché !" (1er Sermon pour l'Avent)

"L'amour se suffit à lui-même, il plaît par lui-même et pour lui-même. Il est à lui-même son mérite, il est à lui-même sa récompense. L'amour ne cherche hors de lui-même ni sa raison d'être ni son fruit : son fruit, c'est l'amour même. J'aime parce que j'aime, j'aime pour aimer." (Homélies sur le Cantique des Cantiques, 83, 4)

"C'est vraiment le miel que tu as trouvé, en trouvant la sagesse. Pourtant n'en mange pas trop, pour ne pas la vomir d'écoeurement. Manges-en de manière à rester toujours sur ta faim. Car c'est elle qui dit : Ceux qui mangent auront encore faim. Ne va pas estimer comme une grande quantité ce que tu as ; ne t'en gorge pas pour ne pas la vomir : cela même que tu parais avoir te serait enlevé, car avant qu'il ne soit temps tu te serais arrêté dans ta recherche. Or, tant qu'on peut la trouver, tant qu'elle est proche, il ne faut cesser de la chercher et de l'appeler. sinon il en sera comme de celui qui mange beaucoup de miel : Salomon lui-même le dit bien : Cela ne lui vaut rien, car celui qui aura cherché sans discrétion la majesté sera écrasé par la gloire." (Homélie pour la Toussaint, 2)

"De même qu’une petite goutte d’eau versée dans une grande quantité de vin semble ne plus exister, prenant le goût du vin et sa couleur ; et de même que le fer rougi à blanc est parfaitement semblable à du feu, ayant dépouillé sa forme première et propre ; et de même que l’air traversé par la lumière du soleil revêt l’éclat même de la lumière, au point qu’il semble non seulement illuminé mais lumière même, ainsi faudra-t-il que dans les Saints le sentiment humain se fonde, d’une certaine manière qu’il n’est pas possible de dire, se fonde tout entier dans la volonté de Dieu. Autrement, comment Dieu serait-il "tout en tous" si quelque chose de l’homme restait en l’homme ? Sa substance, certes, restera, mais en une autre forme, une autre gloire, une autre puissance." (Traité de l’Amour de Dieu, X, 28)

"Voici que la paix n'est plus promise mais envoyée, non plus remise à plus tard mais donnée, non plus prophétisée mais proposée. C'est comme un couffin plein de sa miséricorde que Dieu le Père a envoyé sur la terre ; oui, dis-je, un couffin que la Passion devra déchirer pour laisser se répandre ce qu'il contient : notre paix ; un couffin, peut-être petit, mais rempli. Un petit enfant nous a été donné, mais en lui habite toute la plénitude de la divinité. Lorsqu'est venue la plénitude des temps est venue aussi la plénitude de la divinité. Elle est venue dans la chair, afin de se faire voir même de ceux qui sont charnels, et que son humanité ainsi manifestée permette de reconnaître sa bonté. En effet, dès que l'humanité de Dieu se fait connaître, sa bonté ne peut plus rester cachée." (Sermon pour l'Épiphanie, I, 1)

"Que ton amour se convertisse de sorte que tu n'aimes rien sinon le Seigneur ou bien que tu n'aimes rien que pour Dieu. Que ta crainte se tourne aussi vers lui car toute crainte qui nous fait redouter quelque chose en dehors de lui et non pas à cause de lui est mauvaise. Que ta joie et ta tristesse se convertissent à lui ; il en sera ainsi si tu ne souffres ou ne te réjouis qu'en lui. Si donc tu t'affliges pour tes propres péchés ou pour ceux du prochain, tu fais bien et ta tristesse est salutaire. Si tu te réjouis des dons de la grâce, cette joie est sainte et tu peux la goûter en paix dans l'Esprit Saint. Tu dois te réjouir, dans l'amour du Christ, des prospérités de tes frères et compatir à leurs malheurs selon cette parole : "Réjouissez-vous avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent.""(2e Sermon pour le premier jour du Carême).

"Dans notre coeur, là où le Christ fait sa demeure, conduisons-nous avec jugement et intelligence, de manière à ne pas mettre notre confiance dans notre propre vie et à ne pas prendre appui sur un fragile rempart." (Homélie sur Habaquq, 2, 1)

"La mesure de l'amour de Dieu c'est de l'aimer sans mesure" (Saint Bernard, Traité de l'amour de Dieu, chap. I.)
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Message par jaimedieu Sam 21 Fév 2015 - 5:00

Catherine de Sienne

Dans des dialogues entre l'âme et Dieu... l'âme se demande où elle peut acquérir l'amour de Dieu et du prochain :
"Dans la cellule de la connaissance d’elle-même, par la sainte oraison, comme Pierre et les disciples, qui, en se renfermant dans les veilles et la prière, perdirent leur imperfection et acquirent la perfection. Par quel moyen ? Par la persévérance unie à la sainte foi.
Mais ne pense pas qu’on reçoive cette ardeur et cette force divine par une prière purement vocale. Beaucoup me prient plutôt des lèvres que du coeur. Ils ne songent qu’à réciter un certain nombre de psaumes et de Pater noster. Dès qu’ils ont rempli leur tâche, ils ne pensent pas à autre chose ; ils mettent toute leur piété dans de simples paroles. Il ne faut pas agir de la sorte ; quand on ne fait pas davantage, on en retire peu de fruit et on m’est peu agréable. Faut-il quitter la prière vocale pour la prière mentale, à laquelle tous ne semblent pas appelés ? Non, mais il faut procéder avec ordre et mesure.
Tu sais que l’âme est imparfaite avant d’être parfaite sa prière doit être de même. Pour ne pas tomber dans l’oisiveté, lorsqu’elle est encore imparfaite, l’âme doit s’appliquer à la prière vocale ; mais elle ne doit pas faire la prière vocale sans la faire mentale ; pendant que les lèvres prononcent des paroles, elle s’efforcera d’élever et de fixer son esprit dans mon amour, par la considération de ses défauts en général et du sang de mon Fils, où elle trouvera l’abondance de ma charité et la rémission de ses péchés."
(Traité de la prière, LXVI, 3-5)
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Message par jaimedieu Dim 22 Fév 2015 - 5:32

Curé d'Ars (1786-1859)

"Sans le Saint-Esprit nous sommes comme une pierre du chemin. Prenez dans une main une éponge imbibée d'eau, et dans l'autre un petit caillou; pressez-les également. Il ne sortira rien du caillou, et de l'éponge vous ferez sortir de l'eau en abondance. L'éponge, c'est l'âme remplie du Saint-Esprit, et le caillou, c'est le coeur froid et dur où le Saint-Esprit n'habite pas.
C'est le Saint-Esprit qui forme les pensées dans le coeur des justes et qui engendre les paroles dans leur bouche. Ceux qui ont le Saint-Esprit ne produisent rien de mauvais; tous les fruits du Saint-Esprit sont bons."
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Message par jaimedieu Lun 23 Fév 2015 - 5:10

Guerric d'Igny (né entre 1070 et 1080, mort en 1157)

"... lorsque tu invites Jésus, prends garde à ne pas inviter le Dieu de Majesté dans une hôtellerie sordide et indigne, où tu ne peux toi-même habiter dans le calme à cause d'une épouse acariâtre, ou de la fumée, ou de la pluie qui pénètre [Prov. 19, 13 ; 27, 15]. Sa demeure ne peut être ailleurs que dans la paix [Ps 75, 3], et seuls la justice et le jugement lui préparent un trône [Ps 88, 15]. "Voici, est-il écrit, qu'ils me cherchent de jour en jour et veulent connaître mes voies, comme une nation qui aurait pratiqué la justice et n'aurait pas abandonné le droit de son Dieu." [Is 58, 2] "La justice et le droit, est-il encore écrit, lui préparent un trône." Ne cherche pas à t'excuser, disant qu'il est trop coûteux et trop au-dessus des ressources de ta pauvreté de préparer une demeure à un hôte si noble et si puissant. Tu as sous la main ce qu'il te faut pour cela. Je ne dirai rien qui dépasse les forces humaines, en raison de l'infirmité de ta chair [Rm 6, 19], ou plutôt de l'étroitesse de ton esprit. Fais des aveux complets pour le passé, et aie bonne volonté pour l'avenir, puisque la paix est promise aux hommes de bonne volonté [Lc 2, 14] ; et par ce jugement et cette justice, tu auras préparé un trône au Très-Haut."
(Sermon pour l'Avent, III, 4).

"Combien misérable, combien stupide et sot, mieux encore, combien hostile et nuisible à soi-même, l'animal qui se laisse frustrer de ce jour qui est bon et laisse échapper une parcelle du don qui est bon ! Par là, il se rend étranger à la grâce céleste qui lui est proposée, et laisse passer, le coeur triste et à jeun, le jour de la réfection et de la joie parfaite. C'est comme si la plénitude surabondante du temps n'était pas encore venue, comme si le pain céleste n'avait pas encore empli les crèches des simples et des humbles. La Sagesse vise un tel homme, hostile et nuisible à soi-même, ingrat et insolent vis-à-vis de Dieu, lorsqu'elle dit : "L'oeil mauvais se tourne vers le mal et ne sera pas rassasié de pain. Il restera affamé et triste devant sa table" [Siracide 14, 10]. Pourquoi son âme ne sera-t-elle pas rassasiée de pain ? Parce que son oeil se tourne vers le mal. Et son oeil ne se retournera pas non plus pour voir le bien, pour contempler avec piété et avec foi les mets qui lui sont servis à la large table du riche. "Funeste en effet, est-il écrit, l'oeil de l'envieux : il détourne sa face et méprise son âme." [Sir. 14, 8].

"N'en doutons pas, mes frères, si nous ne détournons pas notre face de la contemplation de celui qui gît dans la crèche, nous pouvons, par le seul regard, être bienheureusement nourris, et nous dirons : "Le Seigneur me nourrit et rien ne me manquera ; il m'a placé ici dans un vrai pâturage" [Ps 22, 1-2]. Alors nous saurons clairement qu'est venue la toute désirable plénitude du temps auquel Dieu a envoyé son Fils, grâce à qui nous sommes déjà remplis d'une telle plénitude de biens..." (4e Sermon pour la Nativité, 5).

"... si tu as préparé au Seigneur une voie immaculée, il daignera souvent y poser ses pas et allongera tes propres pas, pour que, le coeur dilaté, tu coures dans la voie des commandements, dont tu te plaignais peut-être de trouver étroite l'entrée. C'est que la Sagesse, selon son propre témoignage, se promène sur les sentiers de la justice ; et "qui se saisit de la justice, la trouvera, et elle viendra à sa rencontre comme une mère très honorée" [Sir 15, 1-2]. Elle s'en va partout à la recherche de ceux qui sont dignes d'elle, et "sur ses sentiers elle leur montre un visage joyeux, allant au-devant d'eux en toute prudence." [Sag 6, 17]. Si tu as à te plaindre de ce qu'elle ne vient à toi que rarement ou jamais, examine si tu n'aurais pas corrompu ta voie..." (Sermons pour l'Avent, III, 3).

« ... puisqu’il ne faut pas que le délai imposé à l’espérance attiédisse notre foi ou rende inquiète notre patience, et que nous devenions alors semblables à ceux qui croient pour un temps et qui se retirent au moment de la tentation, voilà ce que nous crie du haut du ciel celui qui donne la foi, puis l’ayant donnée, l’éprouve, et enfin, l’ayant éprouvée, la couronne : "Que celui qui croira ne soit pas pressé" [Is 28, 16], à savoir : de contempler l’objet de sa foi. En effet, si nous espérons une chose que nous ne voyons pas encore, nous l’attendons avec patience. [...] Oui, attendre vraiment le Seigneur, c’est lui conserver notre foi, et quoique privés de la consolation de sa présence, ne pas suivre le séducteur, mais demeurer suspendu à son retour."
(Sermons pour l’Avent, I, 3).

"... Sois prêt; véritable Israël, à aller à la rencontre du Seigneur ! Non seulement sois prêt à lui ouvrir lorsqu'il sera là et frappera à la porte, mais encore va-t'en allègrement et joyeusement à sa rencontre tandis qu'il est encore loin, et ayant pour ainsi dire pleine confiance pour le jour du jugement, prie de tout coeur pour que son règne vienne. Si donc tu veux alors être trouvé prêt, prépare-toi avant le jugement une justice comme le conseille le Sage. Sois donc prêt à accomplir toute bonne oeuvre [Tite 3, 1], et ne le sois pas moins à endurer tous les maux, afin que ta bouche puisse chanter, sans que ton coeur le démente : "Mon coeur est prêt, ô Dieu, mon coeur est prêt !" Prêt avec ton secours à accomplir toute justice, et prêt à supporter toute injustice ; si bien prêt aux deux, que je chanterai et que je psalmodierai dans ma gloire [Ps 107, 2], c'est-à-dire que pour l'un et l'autre je me répandrai en louange et me glorifierai." (Sermons pour l'Avent, III, 2)

"Si donc tu t’es enfui au loin et t’es fixé au désert [Ps 54, 8], restes-y, et attends là celui qui te sauvera de la pusillanimité d’esprit et de la tempête [Ps 54, 9]. Quelles que soient les guerres qui fondront sur toi en tempête, quelle que soit la pénurie dont tu auras à souffrir au désert, même en fait de nourriture, ne retourne pas en Égypte par la pensée, cédant à la pusillanimité d’esprit. Le désert te nourrira mieux avec la manne, je veux dire avec le pain des anges, que l’Égypte avec des marmites pleines de viande [Ex 16, 3-4]. Au désert, Jésus, lui, jeûna ; mais quant à la multitude qui le suivait dans la solitude, il l’y a nourrie plusieurs fois et d’une façon merveilleuse [Mt 4, 1-2 ; 14, 13-21 ; 15, 32-38]. Plus souvent et plus merveilleusement encore, il t’y rassasiera, toi qui l’y as suivi avec d’autant plus de mérite que ton propos était plus saint. Au moment où tu croiras qu’il t’a depuis longtemps abandonné, lui, n’oubliant pas sa bonté, te consolera et te dira : « Je me suis souvenu de toi, ému de pitié au souvenir de ta jeunesse et de l’amour de tes fiançailles, quand tu m’as suivi au désert [Jér 2, 2]. » Alors, en vérité, il fera de ton désert un paradis de délices [Is 51, 3] [...] ainsi tout passage de l’Écriture qui auparavant te paraissait stérile et aride regorgera soudain, à la bénédiction de Dieu, d’une étonnante abondance de richesse spirituelle." (IVe Sermon pour l’Avent, 1,).

"Même si le temps paraît long à celui que la peine ou l’amour oppressent, c’est vrai qu’il est court. Il vient, il vient le Seigneur ; notre crainte et notre désir, le repos et la récompense de ceux qui peinent, la douceur et la satiété de ceux qui l’aiment." (Sermon I pour l’Avent, 4).

""Voici que vient le Roi, accourons tous au-devant du Sauveur." A celui qui annonce sa venue, à celui qui apporte les eaux qu’il a puisées dans la joie aux sources du Sauveur, qu’il soit Isaïe ou un autre Prophète, nous répondons avec les mots d’Élisabeth, car c’est du même Esprit que nous sommes abreuvés: "D’où vient que mon Seigneur vienne à moi ? Voici, en effet, qu’à peine ton salut eût frappé mes oreilles, mon esprit a tressailli en mon cœur, bondissant de joie au-devant de Dieu son Sauveur." Et c’est vrai, frères, qu’il faut courir dans l’exultation de nos esprits au-devant du Christ qui vient. Que le voyant venir de loin, nous l’adorions le saluions et l’acclamions en disant : "Salut, toi qui viens nous sauver, béni sois-tu, toi qui viens nous bénir. Viens Seigneur, sauve-moi et je serai sauvé, montre ta face et nous serons sauvés. Nous t’avons espéré, sois notre bras et notre salut durant le temps d’épreuve."" (Sermon II, 1 pour l’Avent).

"Préparez le chemin du Seigneur. Le chemin du Seigneur, frères, qu'il nous est demandé de préparer se prépare en marchant. On y marche dans la mesure où on le prépare. Même si vous vous êtes beaucoup avancés sur ce chemin, il vous reste toujours à le préparer, afin que, du point où vous êtes parvenus, vous soyez toujours tendus au-delà. Voilà comment, à chaque pas que vous faites, le Seigneur à qui vous préparez les voies vient au-devant de vous, toujours nouveau, toujours plus grand. Aussi est-ce avec raison que le juste prie ainsi : Enseigne-moi le chemin de tes volontés et je le chercherai toujours. On donne à ce chemin le nom de vie éternelle, peut-être parce que bien que la providence ait examiné le chemin de chacun et lui ait fixé un terme jusqu'où il puisse aller, cependant la bonté de celui vers lequel vous vous avancez n'a pas de terme." (Guerric d'Igny : Sermon V pour l'Avent).

"Et toi Seigneur, tu nous as préparé un chemin, si seulement nous consentons à nous y engager. Tu nous as enseigné le chemin de tes volontés en disant : "Voici le chemin, suivez-le sans vous égarer à droite ou à gauche". C'est le chemin que le Prophète avait promis: "Il y aura une route droite et les insensés ne s'y égareront pas." J'ai été jeune, maintenant je suis vieux et, si j'ai bonne mémoire, je n'ai jamais vu d'insensés sur ton chemin, Seigneur, c'est tout juste si j'ai vu quelques sages qui aient pu le suivre tout au long. Malheur à vous qui êtes sages à vos yeux et qui vous dites prudents, votre sagesse vous a éloignés du chemin du salut et ne vous a pas permis de suivre la folie du Sauveur." (Sermon V pour l'Avent)

"De même qu'ils [les mages] commencèrent par la vision de l'étoile, progressèrent jusqu'à celle de l'enfant, puis parvinrent à celle de Dieu, ainsi notre foi naît de la prédication des luminaires célestes, se fortifie à la vue de certaines images qui nous montrent dans un miroir et en énigme [1 Co 13, 12] Dieu comme incarné, et parviendra à sa consommation quand les réalités véritables, présentes et dévoilées, seront vues par ceux qui contempleront face à face ce que l'on n'atteint maintenant que d'une manière peu distincte, fugitive, en énigme ; quand la foi elle-même se changera en connaissance, l'espérance en possession, le désir en jouissance." (IIe Sermon pour l'Épiphanie, 5).

"On peut constater [...] que le Verbe de Dieu s’est fait pour nous non seulement visible et palpable, mais encore perceptible au goût et à l’odorat. [Ps 33, 9, Cant. 4, 11]. C’est ainsi par toutes les portes des sens qu’il s’est frayé un accès jusqu’à notre âme : de même que la mort avait pénétré par les sens, la vie à son tour revenait à travers eux. Si donc le Verbe s’est fait chair, c’est pour nous, qui tout entiers sommes chair, que cela s’est fait : pour que nous, qui auparavant ne pouvions qu’entendre le Verbe de Dieu, nous puissions le voir maintenant fait chair, le goûter, et faire appel à tous nos sens pour confirmer le témoignage de l’ouïe. De la sorte, c’est d’un commun accord et d’une seule voix que tous nos sens peuvent proclamer : « Ce que nous avons entendu, nous l’avons vu. » [Ps 47, 9]." (Ve Sermon pour la Nativité)

"Frères, "ayez la paix entre vous", nous commande le Maître pacifique et doux ; mais il précise auparavant : "Ayez du sel en vous" (Mc 9, 49). Il sait en effet que la douceur de la paix est la nourrice des vices si la rigueur du zèle ne les a pas auparavant saupoudrés du piquant du sel. Ainsi en est-il pour les viandes, qu’un temps clément fait grouiller de vers si le feu du sel ne les a pas desséchées. Ayez donc la paix entre vous, mais une paix qui soit assaisonnée du sel de la sagesse. Recherchez la douceur, mais une douceur qui brûle du zèle de la foi." (4e Sermon sur St Benoît, 2)
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Message par jaimedieu Mar 24 Fév 2015 - 4:34

Guigues II le Chartreux (mort en 1188 ?)

"Un jour, pendant le travail manuel, je commençai à penser à l'exercice spirituel de l'homme, et tout à coup s'offrirent à la réflexion de mon esprit quatre degrés spirituels : lecture, méditation, prière, contemplation. C'est l'échelle des moines, qui les élève de la terre au ciel.

Certes, elle a peu d'échelons ; elle est immense pourtant et d'une incroyable hauteur. Sa base repose sur la terre, son sommet pénètre les nuées et scrute les secrets des cieux [Gn 28, 12]. Les degrés sont divers en noms et en nombre, et ils sont distincts également en ordre et en importance.

Si quelqu'un étudie avec soin l'efficacité de chacun d'eux sur nous, leurs mutuelles différences et leur hiérarchie, il y trouvera tant d'utilité et de douceur qu'il estimera court et facile tout le labeur et l'application [Gn 29, 20] dépensés sur cet objet.

La lecture est l'étude attentive des Écritures, faite par un esprit appliqué. La méditation est une opération de l'intelligence, procédant à l'investigation studieuse d'une vérité cachée, à l'aide de la propre raison. La prière est une religieuse application du coeur à Dieu pour éloigner des maux ou obtenir des biens.

La contemplation est une certaine élévation en Dieu de l'âme attirée au-dessus d'elle-même et savourant les joies de la douceur éternelle. Ayant décrit les quatre échelons, il nous reste à voir leurs offices à notre égard." (Lettre sur la vie contemplative (l'Échelle des Moines), II)
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Message par jaimedieu Mar 3 Mar 2015 - 6:28

Jean de la Croix

"Entrez en compte avec votre propre raison, afin d'accomplir ce qu'elle vous dicte dans la voie de Dieu ; ce qui vous profitera beaucoup plus devant Dieu que toutes les oeuvres que vous faites sans cette réflexion, et plus que toutes les saveurs spirituelles que vous recherchez."
(Les Maximes, 62)

"Puisque Dieu est inaccessible, veillez à ne vous reposer en aucune des choses que vos puissances peuvent comprendre et que vos sens peuvent sentir, de peur que vous ne vous contentiez de ce qui est moins que Dieu et que votre âme ne perde la légèreté qui est requise pour aller vers lui."
(Les Maximes, 74)

"Malgré tous les mystères et toutes les merveilles que les saints docteurs ont découverts ou que les saintes âmes ont pu contempler ici-bas, la plus grande partie en reste encore à dire et même à concevoir. Ce qui est dans le Christ est inépuisable ! C'est comme une mine abondante remplie d'une infinité de filons avec des richesses sans nombre ; on a beau y puiser, on n'en voit jamais le terme ; bien plus, chaque repli renferme ici et là de nouveaux filons à richesses nouvelles ; ce qui faisait dire à saint Paul du Christ : Dans le Christ se trouvent cachés tous les trésors de la sagesse et de la connaissance de Dieu. Mais l'âme ne peut y pénétrer ni les atteindre, si, comme nous l'avons dit, elle ne passe pas d'abord et n'entre pas dans la profondeur des souffrances extérieures et intérieures ; il faut, de plus, qu'elle ait reçu de Dieu une foule de faveurs intellectuelles et sensibles, et qu'elle se soit exercée longtemps dans la spiritualité ; ces faveurs sont en effet d'un ordre inférieur : ce sont des dispositions pour arriver aux cavernes élevées de la connaissance des mystères du Christ, la plus haute sagesse à laquelle on puisse parvenir ici-bas." (Le Cantique spirituel, 36.35).

"Le Père n'a dit qu'une parole : ce fut son Fils. Et dans un silence éternel il la dit toujours : l'âme aussi doit l'écouter en silence." (Maxime n° 147)
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Message par jaimedieu Mer 4 Mar 2015 - 5:58

Pierre de Cava (XIIe siècle)

"Jouir de la lumière à l'intime de nous-mêmes, cela ne dépend pas de nos efforts, mais du bon vouloir divin.
Souvent, au travers d'un long silence, de supplications instantes, de gémissements répétés, nous implorons d'entrer dans le resplendissement de la lumière intérieure, et nous n'obtenons pas d'être admis à ses délices.
Souvent nous ne faisons rien de tout cela pour l'obtenir, et tout à coup la grâce divine vient au-devant de nous, elle nous prend au plus profond de notre faiblesse et nous relève, elle nous emporte très haut et, au moment où nous l'attendions le moins, nous fait voir le resplendissement de sa lumière.
Car ce n'est pas par nos propres efforts que nous pouvons accéder à la contemplation des réalités célestes, mais au gré de Dieu, selon qu'il en a disposé pour nous."

Commentaire sur le 1er Livre des Rois, I, 65).
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Message par jaimedieu Jeu 5 Mar 2015 - 5:59

Pierre le Vénérable (1054-1156)

"Aujourd’hui, frères très chers, le jour resplendit plus clair que de coutume car sur terre brille la lumière du ciel. La lumière véritable éclaire les ténèbres des mortels, et la splendeur de Dieu se montre visiblement, que dis-je, corporellement, dans le monde des hommes. Aujourd’hui, le soleil éternel, dévoilant quelque peu la ténèbre de la faiblesse charnelle, resplendit de ses rayons dans son corps encore mortel, par un miracle nouveau et stupéfiant. Aujourd’hui, le Verbe fait chair montre, dans la clarté de son visage et de ses vêtements, la divinisation de la chair qu’il s’est unie. Aujourd’hui, nous avons vu sa gloire, gloire qu’il tient de son Père, comme Fils unique lorsque la voix de majesté transmet cette parole : celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute ma faveur, écoutez-le..." (Pierre le Vénérable : Homélie pour la Transfiguration du Seigneur, PL 207, col. 779-790).
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Message par jaimedieu Lun 20 Avr 2015 - 4:40

Teilhard de Chardin, Pierre

"Jadis, on traînait dans votre temple les prémices des récoltes et la fleur des troupeaux. L’offrande que vous attendez vraiment, celle dont vous avez mystérieusement besoin chaque jour pour apaiser votre faim, pour étancher votre soif, ce n’est rien moins que l’accroissement du Monde emporté par l’universel devenir.
Recevez, Seigneur, cette Hostie totale que la Création, mue par votre attrait, vous présente à l’aube nouvelle. Ce pain, notre effort, il n’est de lui-même, je le sais, qu’une désagrégation immense. Ce vin, notre douleur, il n’est encore, hélas ! qu’un dissolvant breuvage. Mais, au fond de cette masse informe, vous avez mis – j’en suis sûr, parce que je le sens – un irrésistible et sanctifiant désir qui nous fait tous crier, depuis l’impie jusqu’au fidèle : "Seigneur, faites-nous un". (La messe sur le monde)

"La fleur que je tenais s’est fanée dans mes mains, un mur s’est dressé devant moi au tournant de l’allée… une flamme a consumé la feuille qui portait ma pensée… L’épreuve est venue… et je n’ai pas été définitivement triste… pourquoi donc Seigneur ? Parce que, dans cette faillite des supports immédiats que je risquais de donner à ma vie, j’ai expérimenté, d’une manière unique, que je ne reposais plus que sur votre consistance…" (Ecrits du temps de guerre, Œuvre, Seuil, tome XII, p. 167)

... notre pire faiblesse est de ne pas oser croire, ni assez longtemps, ni assez vaste. Un seul élément excepté de notre foi [...] - une seule minute de "pas assez" dans l'exercice de cette foi et tout l'édifice branle." (Etre plus, Seuil, "Points", p. 95)

"L’attente, - l’attente anxieuse, collective et opérante d’une Fin du Monde, c’est-à-dire d’une Issue pour le Monde, - est la fonction chrétienne par excellence, et le trait le plus distinctif peut-être de notre religion.
Historiquement, l’attente n’a jamais cessé de guider, comme un flambeau, les progrès de notre Foi. […] [Après la première venue du Christ], nous devons l’attendre encore et de nouveau, - non plus un petit groupe choisi seulement, mais tous les hommes – plus que jamais. Le Seigneur Jésus ne viendra vite que si nous l’attendons beaucoup. C’est une accumulation de désirs qui doit faire éclater la Parousie." » (Pierre Teilhard de Chardin, Epilogue du Milieu divin, "L’attente de la Parousie").

"Il suffit pour la Vérité d'apparaître une seule fois dans un seul esprit, pour que rien ne puisse jamais plus l'empêcher de tout envahir et de tout enflammer…" (Le coeur de la matière, 117), p. 118.
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Message par jaimedieu Sam 23 Mai 2015 - 16:14

L'ESPRIT-SAINT

Syméon le Nouveau Théologien (949 -1022)
Catéchèses, 33, SC 113, 255-261.

La clé de la connaissance n'est pas autre chose que la grâce du Saint-Esprit. Elle est donnée par la foi. Par l'illumination, elle produit très réellement la connaissance et même la connaissance plénière. Elle ouvre notre esprit enfermé et obscurci, souvent avec des paraboles et des figures, mais aussi avec des affirmations plus claires.

Faites donc bien attention au sens spirituel de la parole. Si la clé n'est pas bonne, la porte ne s'ouvre pas. Car, dit le Bon Pasteur, c'est à lui que le portier ouvre (Jn 10,3). Mais si la porte ne s'ouvre pas, personne n'entre dans la maison du Père, car le Christ a dit: Personne ne va vers le Père sans passer par moi (Jn 14,6).

Or, c'est l'Esprit Saint qui, le premier, ouvre notre esprit et nous enseigne ce qui concerne le Père et le Fils. Le Christ nous dit cela aussi: Quand il viendra, lui, l'Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur, et il vous guidera vers la vérité tout entière (cf. Jn 15,26; 16,13). Vous voyez comment, par l'Esprit ou plutôt dans l'Esprit, le Père et le Fils, inséparablement, se font connaître. Et Jésus dit encore: Si je ne m'en vais pas, le Défenseur ne viendra pas à vous; mais lorsqu'il viendra, lui, il vous rappellera toute chose (Jn 16,7). Et encore: Si vous m'aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur, qui sera toujours avec vous: c'est l'Esprit de vérité (cf. Jn 14,15-17).

Si l'on appelle le Saint-Esprit une clé, c'est parce que, par lui et en lui d'abord, nous avons l'esprit éclairé. Une fois purifiés, nous sommes illuminés par la lumière de la connaissance. Nous sommes baptisés d'en haut, nous recevons une nouvelle naissance et devenons enfants de Dieu, comme dit saint Paul: L'Esprit Saint intervient pour nous par des cris inexprimables (Rm 8,26), et encore: Dieu a envoyé en nos coeurs son Esprit qui crie: Abba, Père (cf. Ga4,6)!

C'est donc lui, l'Esprit, qui nous montre la porte, cette porte qui est lumière. Et cette porte nous enseigne que l'habitant de la maison est, lui aussi, lumière inaccessible (cf. 1 Tm6,16).
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Message par jaimedieu Mer 3 Juin 2015 - 3:56

Thérèse d'Avila

"A nous, le Seigneur ne demande que deux choses : l'amour de Dieu et l'amour du prochain. Aimons-nous Dieu ? Nous ne pouvons le savoir, quoiqu'il y ait cependant de grands signes pour en juger. Mais pour ce qui est de reconnaître si nous aimons le prochain, oui, nous le pouvons. Soyez-en certaines, autant vous aurez fait de progrès dans l'amour du prochain, autant vous en aurez fait dans l'amour de Dieu. L'amour que notre Seigneur nous porte est si grand, qu'en récompense de celui que nous avons pour le prochain, il fait croître de mille manières celui que nous avons pour lui-même : je n'ai aucun doute là-dessus. Puisque la chose est pour nous d'une si grande importance, essayons de bien voir où nous en sommes, et cela jusque dans les plus petites choses, et puis, ne faisons aucun cas de certaines idées - très grandes - qui se présentent à nous en foule dans la prière, sur tout ce que nous propososn de faire et d'entreprendre en faveurdu prochain et pour le salut d'une seule âme. Si nos oeuvres n'y répondent pas, il est à croire que tout cela restera sans effet."
(Thérèse d'Avila : Le château intérieur, Ve demeures, ch. 3, in Oeuvres Complètes, t. I, Cerf, 1995, pp. 1051-1052).
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Message par jaimedieu Jeu 3 Sep 2015 - 20:00

ACTES DU MARTYRE DE CYPRIEN

Saint Cyprien meurt le 14 septembre 258, victime des persécutions romaines.
Sous Valérien, successeur de Dèce, la persécution mollit. Cet empereur pratiqua d’abord une politique de tolérance, qui s’interrompit brusquement en 257 sous l’influence de Macrien, ministre des Finances. Mystique païen, celui-ci abhorrait le christianisme, et, de surcroît, il vit dans la reprise des persécutions une façon de renflouer les finances de l’Empire, alors désastreuses. Clercs et laïcs de haut rang furent l’objet de ses spoliations.

La persécution fut sanglante. Un premier édit, en 257, interdit, pour la première fois, le culte des chrétiens. Cyprien fut exilé, ce qui ne l’empêcha pas de veiller encore sur son Église, par l’envoi de ses lettres et de consolations matérielles. Un an plus tard, un second édit exigea la mise à mort de tout le clergé réfractaire aux sacrifices romains. La mesure frappa aussitôt Cyprien. Son martyre, exemplaire de fermeté et de sobriété, fit de lui une des figures les plus vénérées de l’Afrique.


Sous le quatrième consulat de Valérien et le troisième de Gallien, trois jours avant les Calendes de septembre (30 août), à Carthage, dans la salle d’audience, le proconsul Paternus dit à l’évêque Cyprien : « Nos très saints empereurs Valérien et Gallien ont daigné me faire savoir par courrier que ceux qui ne pratiquent pas la religion romaine sont néanmoins tenus de prendre part à ses cérémonies. J’ai donc ouvert une enquête à ton sujet. Qu’as-tu à me déclarer ? »

L’évêque Cyprien : « Je suis chrétien et évêque. Je ne connais pas d’autre Dieu que le Dieu unique et véritable, qui a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu’ils contiennent. Ce Dieu, nous le servons, nous les chrétiens, nous le prions jour et nuit, pour nous, pour tous les hommes et pour le propre salut des empereurs. »

Paternus : « Persévères-tu dans ta croyance ? »

Cyprien : « Une croyance juste, qui connaît Dieu, est immuable. »

Paternus : « Tu es donc prêt à l’exil, selon l’arrêté de Valérien et Gallien ? Tu partiras à Curubis »

Cyprien : « Je pars. »

Paternus : « Le courrier qu’ils m’ont envoyé ne concernait pas seulement les évêques, mais aussi les prêtres. Je te prie donc de me donner les noms des prêtres domiciliés dans notre ville. »

Cyprien : « Vos lois ont assez de sagesse et de tenue pour condamner les délateurs. Aussi ne révélerai-je pas l’identité de ces prêtres. Vous les trouverez bien dans leurs cités. »
Paternus : « Aujourd’hui même, je les fais rechercher dans notre ville. »
Cyprien : « Notre règle interdit que l’on se livre soi-même aux autorités ; à toi aussi, sans doute, ce zèle semblerait de mauvais aloi. Ils ne vont donc pas se dénoncer les premiers. Mais, en les cherchant, tu les trouveras.

Paternus : « Oui, je les trouverai. L’édit impérial défend aussi que l’on tienne des assemblées en quelque lieu que ce soit et que l’on pénètre dans les cimetières. Qui enfreindra cette saine mesure sera puni de mort.

Cyprien : « Exécute les ordres que tu as reçus. »
Alors le proconsul Paternus fit déporter le bienheureux évêque Cyprien, qui demeura longtemps en exil.

Cependant, le proconsul Galère Maxime succéda au proconsul Aspasius Paternus. Le nouveau venu rappela l’évêque de son bannissement et demanda à ce qu’il comparût devant lui. Le saint martyr Cyprien, l’élu de Dieu, revint donc de la ville de Curubis, où l’avait envoyé le proconsul précédent, Aspasius Paternus, et un rescrit sacré l’autorisa à séjourner sur ses terres. Là, il s’attendait tous les jours à une nouvelle arrestation, dont un songe l’avait averti. C’est donc dans cette retraite que le jour des Ides se septembre (13 septembre), sous les consulats de Tuscus et Bassus, deux officiers firent irruption. L’un était l’écuyer d’état-major du proconsul Galère Maxime, le successeur d’Aspasius Paternus, l’autre, écuyer de cavalerie, servait dans le même état-major. Ils le firent monter dans leur char, le placèrent entre eux deux, et le conduisirent à Sexti,où le proconsul Galère Maxime s’était retiré pour des raisons de santé.

Galère Maxime préféra remettre au lendemain son entrevue avec Cyprien. Le bienheureux évêque fut alors emmené chez l’officier qui était l’écuyer d’état-major de l’illustre Galère Maxime, et qui le reçut sous son toit dans un quartier appelé Saturne, entre la rue de Vénus et la rue Salutaire. Tout le peuple de ses frères vint s’attrouper à cet endroit. Quand Cyprien s’en aperçut, il ordonna que l’on mît les jeunes filles en sécurité car la foule était massée dans la rue, devant la porte de l’officier, son hôte.

Le lendemain, dix-huitième jour des calendes d’octobre (14 septembre), au matin, l’ordre du proconsul Galère Maxime avait produit son effet : Sexti regorgeait de monde. Le proconsul ordonna que Cyprien comparût devant lui, à l’atrium Sauciolum, où il siégeait. On introduisit le prisonnier.

Proconsul Galère Maxime : « Est-ce toi, Thacius Cyprianus ? »

Evêque Cyprien : « C’est moi. »

Galère Maxime : « C’est bien toi qui te fais appeler père par ces bandes d’impies ? »

Cyprien : « C’est moi. »

Galère Maxime : « Nos très saints empereurs te somment de participer aux sacrifices. »

Cyprien : « Je n’en ferai rien. »

Galère Maxime : « Prends garde à toi. »

Cyprien : « Exécute les ordres que tu as reçus. Dans une affaire aussi simple, tu n’as pas à hésiter. »

Galère Maxime délibéra avec son conseil et rendit, mais à contrecœur, la sentence : « Depuis longtemps tu professes des opinions sacrilèges, tu as rassemblé autour de toi des groupes de conspirateurs criminels, et tu t’es fait l’ennemi des dieux romains et de leurs cultes sacrés. Les pieux et très saints empereurs Valérien et Gallien, nos Augustes, et Valérien, le très noble César, n’ont pas pu te ramener à l’observance de nos cérémonies. La preuve est faite que tu es l’instigateur et le porte-parole d’actions particulièrement répréhensibles. Tu serviras donc d’exemple à ceux que tu as pris pour complices de ton crime : ton sang sera versé, conformément à la loi. »
Il lut ensuite le verdict sur ses tablettes : « Thascius Cyprianus périra par l’épée. Tel est notre jugement. » L’évêque Cyprien dit : « Grâces soient à Dieu ! »

Après cette sentence, le peuple des frères s’écriait : « Qu’on nous décapite avec lui ! » Il s’ensuivit parmi eux une grande agitation, et en foule ils escortèrent le saint.

Cyprien fut conduit dans un champ très près de Sexti. Là il se dépouilla de son manteau de bure, mit genoux à terre et d’abîma dans la prière. Puis il enleva sa dalmatique et la remit aux gardes. Debout, en tunique de lin, il attendit le bourreau. Quand celui-ci fut arrivé, le martyr ordonna à ses frères de lui verser vingt-cinq pièces d’or. Et déjà les chrétiens plaçaient devant lui des linges et des toiles de lin. Puis le bienheureux Cyprien se banda lui-même les yeux et, comme il ne pouvait se lier tout seul les mains, il se fit aider par le prêtre Julien et le sous-diacre Julien. Alors le bienheureux Cyprien souffrit sa passion.

Son corps fut emporté non loin de là, pour le soustraire à la curiosité des païens. La nuit venue, on vint le prendre, à la lueur des cierges et des torches, et on l’emporta&, au milieu des prières et en grand triomphe, au cimetière du proconsul Macrobius Candidatus, situé sur la route de Mappala, près des piscines.

Le proconsul Galère Maxime mourut peu de jours après.

Le bienheureux Cyprien fut martyrisé le dix-huitième jour des calendes d’octobre (14 septembre), sous les empereurs Valérien et Gallien, ou plutôt sous le règne de notre Seigneur Jésus-Christ à qui sont honneur et gloire aux siècles des siècles. Amen.

Sources :
Bruno Chenu et alii, Le livre des martyrs chrétiens, Centurion, Paris 1988, p. 95-98.
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Message par jaimedieu Ven 4 Sep 2015 - 14:57

Nous sommes à Smyrne en l’an 156. La persécution, sous les Antonins, était modérée et venait moins d’une politique systématique que des dénonciations de païens, qui répandaient force calomnies sur les cultes nouveaux. Les autorités, sans être dupes, mettaient à mort les chrétiens arrêtés ; à leurs yeux, ils commettaient au moins un crime de lèse-majesté en ne sacrifiant pas aux dieux, c’est-à-dire en ne reconnaissant pas la souveraineté absolue des Césars.
Le martyre de Polycarpe émane ainsi de pressions populaires, et des autorités locales, mues par un esprit de démagogie et la volonté de faire un exemple. Ce supplice représente cependant un cas relativement isolé à cette période.

Polycarpe, qui nous a laissé une épître (peut-être deux) aux Philippiens, était, dit-on, un disciple de saint Jean. Évêque de Smyrne, il avait fréquenté Ignace d’Antioche et Irénée de Lyon. À une telle école, le martyr ne se contente pas d’être un témoin du Christ, il veut être son imitateur, jusqu’à revivre lui-même les souffrances et la mort de son Maître qui le mettront en communion étroite avec son corps. Entre l’Évangile et la passion de Polycarpe, les coïncidences affluent, de noms, de lieux, de circonstances, mais plus profondément retentissent les grands mots évangéliques de la Passion, les « il faut », les « je suis », les métaphore du « pain » que dore le feu du supplice.

C’est le plus ancien récit de martyre qui nous soit parvenu. Il fut diffusé dans toute la chrétienté et servit de modèle à d’autres « imitateurs du Christ ».

Récit du martyre de Polycarpe

L’Église de Dieu qui réside à Smyrne à l’Église de Dieu qui est à Philomélion et à toutes les communautés que l’Église sainte et universelle a partout établies. Que Dieu notre Père et notre Seigneur Jésus-Christ vous remplissent de miséricorde, de paix et d’amour !Frères, c’est pour vous que nous rédigeons les actes des martyrs et du bienheureux Polycarpe, dont le supplice sembla achever la persécution en la frappant de son sceau. En presque tous les événements qui précédèrent sa mort, le Seigneur nous montre un martyre tout entier évangélique. Polycarpe a attendu d’être livre, comme le Seigneur, afin qu’imitant son exemple, nous regardions moins notre intérêt que celui de notre prochain. L’amour, quand il est vrai et fort, n’incline pas à se sauver seul, il aspire au salut de tous les frères.

Bienheureux et vaillants, tous ces martyrs qui firent honneur à Dieu ! Ayons en effet assez de foi pour attribuer à Dieu cette liberté au sein de tant d’épreuves ! Qui n’admirerait le courage de ces hommes, leur patience, l’amour qu’ils portaient à leur Maître ? Lacérés par les fouets qui mettaient à vif leurs veines et leurs artères, ils ne fléchissaient pas, alors que les assistants ne pouvaient réprimer des cris de douleur et de pitié. Mais chez eux, l’on n’entendait ni gémissement ni soupir, et leur vaillance prouva qu’à l’heure où on les suppliciait, ces admirables témoins du Christ avaient déjà quitté leur corps, ou plutôt que le Seigneur était là et s’entretenait avec eux.

Ravis par la grâce du Christ, ils n’avaient que mépris pour les tortures infligées, puisqu’une heure leur gagnait la vie éternelle. Le feu de leurs bourreaux inhumains leur semblait froid. Un autre feu les inquiétait, qu’ils voulaient fuir, éternel celui-là, destiné à ne jamais s’éteindre. Ils considéraient avec leurs yeux du cœur les bienfaits que Dieu réserve au courage, que l’oreille n’a pas entendus, que l’œil n’a pas vus, et qui ne sont pas montés au cœur de l’homme (1 Co 2, 9). Mais le Seigneur les leur découvrait puisqu’ils n’étaient plus des hommes mais déjà des anges.

Ceux que l’on avait condamnés aux bêtes supportèrent aussi d’abominables tourments : on les étendait sur des coquillages hérissés de pointes, on les soumettait aux tortures les plus raffinées, espérant, par la variété et la longueur de ces supplices, qu’ils finiraient par renier leur foi. Le Diable contre eux déploya toutes sortes de ruses. Grâce à Dieu, il n’en vainquit aucun. L’un des plus résolus, Germanicus, fortifiait les plus faibles par son intrépidité : son combat avec les bêtes fut admirable. Le proconsul essayait de le convaincre, il le suppliait d’avoir pitié de sa jeunesse, mais lui, impatient d’en finir avec ce monde d’injustice et de cruauté, provoqua le fauve qui se jeta sur lui. Alors la foule, déchaînée par le courage des chrétiens et par la foi de cette race ardente, hurla : « A mort, les impies, qu’on cherche Polycarpe ! » Un seul défaillit, à la vue des bêtes. C’était un Phrygien, arrivé depuis peu de son pays ; il se nommait Quintus. Il s’était de lui-même dénoncé, entraînant avec lui quelques compagnons. Le proconsul, à force d’insister, réussit à le faire abjurer et il sacrifia. Aussi n’y a-t-il pas lieu de féliciter ceux qui vont au-devant du martyre ; un tel zèle n’est pas évangélique.

Polycarpe, le plus admirable de tous, ne se laissa pas d’abord émouvoir par les rumeurs de persécution. Il voulait rester en ville. Mais comme son entourage le pressait d’aller se mettre à l’abri, il gagna une petite maison non loin de Smyrne et il l’habita avec quelques amis, ne faisant qu’y prier jour et nuit, pour tous les hommes et toutes les Églises de ce monde, selon la coutume. C’est au cours de sa prière que, trois jours avant d’être arrêté, il eut une vision : son oreiller prenait le feu et était entièrement consumé. Alors il se tourna vers ses compagnons : « Il faut que je sois brûlé vif. » Cependant on le recherchait activement. Il dut gagner une seconde cachette ; à peine y arrivait-il que les gens lancés à sa poursuite firent irruption dans la première maison. Ne l’y trouvant pas, ils saisirent deux jeunes esclaves, en torturèrent un, qui parla. Polycarpe désormais ne pouvait plus leur échapper, puisqu’il avait été dénoncé par un des siens. L’irénarque qui répondait au nom d’Hérode, était pressé de le conduire au stade. Ainsi Polycarpe accomplirait-il sa destinée, en ne faisant qu’un avec le Christ, tandis que ceux qui l’avaient livré subiraient le châtiment de Judas. Ils emmenèrent le jeune esclave. C’était un vendredi, vers l’heure du dîner. Les policiers, à pied et à cheval, armés jusqu’aux dents, se mirent en chasse, comme s’ils couraient après un brigand. Tard dans la soirée, les voilà qui trouvent la maison et se lancent à l’assaut. Il était couché à l’étage supérieur. Une fois encore, il aurait pu s’échapper, mais il refusa : « Que la volonté de Dieu soit faite », dit-il.

Quand il sut qu’ils étaient là, il descendit et engagea la conversation. Son âge et sa sérénité les frappèrent et ils ne comprenaient pas qu’on ait mis tant de police sur le pied de guerre pour arrêter un si noble vieillard. Mais lui, malgré l’heure tardive, les invita aussitôt à manger et à boire à satiété, il leur demanda seulement de lui laisser une heure pour prier en paix. Ils le lui accordèrent. Alors, debout, il se mit à prier, si intensément pénétré de la grâce de Dieu que deux heures durant il ne cessa de parler et d’impressionner ceux qui l’écoutaient. Beaucoup se repentaient d’être venus arrêter un vieillard aussi saint. Quand il eut achevé sa prière, où il avait fait mémoire de tous ceux qu’il avait rencontrés dans sa vie, petits ou grands, illustres ou obscurs, et de toute l’Église catholique, répandue dans le monde entier, l’heure du départ était arrivée. On le jucha sur un âne et on le conduisit à la ville : c’était le jour du grand sabbat. L’irénarque Hérode, ainsi que son père Nicétès, vinrent au-devant de lui et le firent monter dans leur carrosse. Assis à ses côtés, ils essayèrent de le fléchir, disant : « Quel mal y a-t-il à dire Seigneur César, à sacrifier et à observer notre religion pour sauver sa vie ? » Mais lui ne leur répondit d’abord pas et, comme ils insistaient, il leur déclara : « Je ne suivrai pas vos conseils ». Humiliés par leur échec, ses interlocuteurs l’accablèrent d’injures et le poussèrent si brutalement de la voiture qu’en descendant il s’écorcha la jambe. Mais il n’en parut pas troublé, et il marcha d’un pas résolu, comme s’il ne sentait rien, vers le stade où on le conduisait. Du stade montait une énorme rumeur et nul ne pouvait s’y faire entendre. Quand Polycarpe en franchit les portes, une voix retentit du ciel : « Courage, Polycarpe, et sois un homme ». Nul ne vit qui avait parlé, mais ceux des nôtres qui étaient présents entendirent la voix. On fit entrer Polycarpe. Quand la foule apprit qu’il avait été arrêté, les clameurs redoublèrent.

Le proconsul le fit comparaître devant lui et lui demanda s’il était Polycarpe. « Oui », répondit celui-ci. Alors il essaya de le faire abjurer : « Respecte ton âge », disait-il. Suivaient toutes les paroles que l’on tenait en pareil cas : « Jure par la fortune de César, rétracte-toi, crie : à mort les impies ! » Alors Polycarpe jeta un œil sombre sur cette populace de païens massée dans le stade, et pointa sa main vers elle. Puis il soupira, et, les yeux levés au ciel, il dit : « A bas les impies ! » Le proconsul le pressait de plus belle : « Jure donc et je te libère, maudis le Christ ! » Polycarpe répondit : « Si tu t’imagines que je vais jurer par la fortune de César, comme tu dis, en feignant d’ignorer qui je suis, écoute-le donc une bonne fois : je suis chrétien. Voilà quatre-vingt-six ans que je le sers et il ne m’a fait aucun mal. Comment pourrais-je insulter mon roi et mon sauveur ? Si le christianisme t’intéresse, donne-toi un jour pour m’entendre ». Le proconsul lui dit : « Essaie de convaincre le peuple ». Mais Polycarpe répliqua : « Avec toi, je veux bien m’expliquer. Dieu nous demande de respecter comme elles le méritent les autorités et les hautes fonctions qu’il a lui-même instituées, du moment que cela ne nous porte pas préjudice. Mais ces gens-là ont trop peu de dignité pour que je défende ma foi devant eux ».

Le proconsul reprit : « J’ai des fauves, je t’y ferai jeter si tu ne changes pas d’opinion ».
- Fais-les venir ! Quand nous changeons, nous, ce n’est pas pour aller du bien au mal. Nous ne consentons à changer que pour devenir meilleurs. Le magistrat s’irritait : « Je t’envoie au bûcher si tu ne crains pas les fauves. Apostasie donc ». Polycarpe répliqua : « Tu me menaces d’un feu qui brûle une heure, puis s’éteint rapidement. Tu ignores donc le feu du jugement à venir et du châtiment éternel gardé pour les impies. Mais pourquoi tardes-tu ? Va, donne tes ordres ».

Telles furent ses paroles, et bien d’autres encore. Il rayonnait de courage et de joie, et la grâce inondait sa face. Il ne s’était pas laissé démonter par cette confrontation, c’était au contraire le proconsul qu’elle plongeait dans le désarroi. Cependant, ce dernier envoya son héraut au milieu du stade pour claironner trois fois : « Polycarpe a avoué qu’il est chrétien ! » La déclaration du héraut mit en fureur toute la foule des païens et des Juifs qui résidaient à Smyrne. Les cris éclatèrent : « C’est lui, le maître de l’Asie, le père des chrétiens, le fossoyeur de nos dieux, c’est lui qui incite les foules à ne plus sacrifier ni adorer ! » Au milieu de leurs hurlements, ils demandaient à l’asiarque Philippe de lâcher un lion sur Polycarpe. Mais il objecta qu’il n’en avait plus le droit, parce que les combats de fauves étaient clos. Alors d’une seule voix, ils réclamèrent que Polycarpe pérît par le feu. Il fallait en effet que s’accomplît la vision qui lui avait montré son oreiller en flammes, tandis qu’il priait, et qui lui avait arraché devant ses amis ce mot prophétique : « Il faut que je sois brûlé vif ».

Les événements se précipitèrent. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, la foule se rua dans les ateliers et dans les bains pour ramasser du bois et des fagots. Les Juifs s’acquittaient de la besogne avec leur zèle habituel. Quand le bûcher fut prêt, le martyr retira lui-même tous ses vêtements, il détacha sa ceinture, puis commença à se déchausser, geste dont les fidèles le dispensaient toujours : dans l’impatience où ils étaient de toucher son corps, tous se précipitaient pour l’aider. Bien avant son martyre, la sainteté de sa conduite inspirait cette unanime révérence.

Rapidement, on disposa autour de lui les matériaux rassemblés pour le feu. Mais, quand les gardes voulurent le clouer au poteau : « Laissez-moi comme je suis, leur dit-il. Celui qui m’a donné la force d’affronter ces flammes me donnera aussi, même sans la précaution de vos clous, de rester immobile sur le bûcher. » Ils ne le clouèrent donc pas et bornèrent à le lier. Les mains derrière le dos, ainsi attaché, il ressemblait à un bélier magnifique, pris dans un grand troupeau pour être offert en sacrifice à Dieu et à lui seul destiné. Alors, il leva les yeux au ciel et dit : « Seigneur, Dieu tout-puissant, Père de Jésus-Christ, ton Fils béni et bien-aimé, à qui nous devons de te connaître, Dieu des anges, des puissances, de toute la création et du peuple entier des justes qui vivent sous ton regard, je te bénis parce que tu m’as jugé digne de ce jour et de cette heure, et que tu me permets de porter mes lèvres à la coupe de ton Christ, pour ressusciter à la vie éternelle de l’âme et du corps dans l’incorruptibilité de l’Esprit Saint. Accueille-moi parmi eux devant ta face aujourd’hui ; que mon sacrifice te soit agréable et onctueux, en même temps que conforme au dessein que tu as conçu, préparé et accompli. Toi qui ne connais pas le mensonge, ô Dieu de vérité, je te loue de toutes tes grâces, je te bénis, je te glorifie au nom du Grand Prêtre éternel et céleste, Jésus-Christ, ton Fils bien-aimé, par lequel la gloire soit à toi comme à lui et à l’Esprit Saint, aujourd’hui et dans les siècles futurs. Amen ! »

Quand il eut prononcé cet « amen », qui achevait sa prière, les valets allumèrent le feu. Une gerbe immense s’éleva et nous fûmes les témoins d’un spectacle extraordinaire qui ne fut donné à voir qu’à ceux qui avaient été choisis pour ensuite faire connaître ces événements. La flamme s’arrondit. Semblable à la voilure d’un navire que gonfle le vent, elle entoura comme d’un rempart, le corps du martyr. Ce n’était plus une chair qui brûle, c’était un pain que l’on dore, c’était un or et un argent incandescents dans le creuset, et nous respirions un parfum aussi capiteux qu’une bouffée d’encens ou quelque autre aromate de prix.

À la fin, voyant que le feu ne pouvait consumer son corps, les scélérats ordonnèrent au bourreau de l’achever d’un coup de poignard. Il s’exécuta. Un flot de sang jaillit de la plaie et éteignit le feu. Toute la foule s’étonna de la grande différence qui sépare les incroyants des élus.

L’admirable Polycarpe était l’un de ces élus, maître de notre temps, apôtre, prophète, évêque de l’Église catholique de Smyrne. Toute parole sortie de sa bouche s’est vérifiée et se vérifiera.

Le Diable, le jaloux, l’ennemi de la race des justes, voyant la grandeur de son martyre, l’irréprochable conduite qui fut la sienne dès son enfance, la couronne d’incorruptibilité posée sur son front, et la récompense incontestée qu’il remporta, essaya de nous empêcher de retirer son corps que beaucoup étaient, en effet, impatients de reprendre, ne fût-ce que pour toucher cette chair sacrée. Il souffla donc à Nicétès, le père d’Hérode et le frère d’Alcé, de persuader le magistrat de ne pas rendre le corps. Car, disait-il, ils vont oublier leur crucifié pour se mettre à adorer celui-ci. Les Juifs appuyaient frénétiquement ces discours. Ils nous avaient épiés quand nous avions tenté de le reprendre sur le bûcher. Ils ne savaient pas que jamais nous ne pourrons renoncer au Christ qui a souffert pour le salut du monde entier, immolant son innocence à nos péchés ; Nous n’en adorerons jamais un autre. Nous vénérons le Christ parce qu’il est le Fils de Dieu, et nous aimons les martyrs parce qu’ils sont les disciples et les imitateurs du Seigneur. Leur ferveur incomparable envers leur roi et leur maître mérite bien cet hommage. Puissions-nous aussi être leurs compagnons et leurs condisciples.

Quand il vit la querelle que déchaînaient les Juifs, le centurion exposa le corps au milieu de la place, comme c’est l’usage, et le fit brûler. C’est ainsi que nous revînmes plus tard recueillir les cendres que nous jugions plus précieuses que des pierreries et qui nous étaient plus chères que de l’or. Nous les déposâmes en un lieu de notre choix. C’est là que le Seigneur nous donnera, autant que cela se pourra, de nous réunir dans la joie et la fête, pour y célébrer l’anniversaire de son martyre et pour nous souvenir de ceux qui ont combattu avant lui, fortifiant et épaulant ceux qui le feront après.

Telle est l’histoire du bienheureux Polycarpe. Il fut le douzième d’entre nos frères de Philadelphie à souffrir à Smyrne. Son souvenir reste plus vivant que tous les autres et il est le seul dont les païens chantent partout les louanges. Il fut un maître prestigieux, un martyr hors pair, dont tous aimeraient imiter la passion, si fidèle à l’Évangile du Christ. Son courage a eu raison d’un magistrat inique et lui a mérité la couronne d’incorruptibilité. Il partage désormais la joie des apôtres et de tous les justes, il glorifie dieu, le Père tout-puissant, et bénit notre Seigneur Jésus-Christ, le sauveur de nos vies et le guide de nos corps, le pasteur de l’Église catholique répandue dans le monde.

Vous désiriez avoir un rapport détaillé de ces événements. Nous nous bornons ici au récit succinct qu’en a fait notre frère Marcion. Quand vous aurez lu cette lettre, transmettez-là) de proche en proche à nos frères, afin qu’eux aussi rendent gloire au Seigneur, qui choisit ses élus parmi ses serviteurs.

À celui qui, par sa grâce et sa bonté, a le pouvoir de nous conduire tous à son Royaume éternel, par son Fils unique Jésus-Christ, gloire, honneur, puissance, grandeur dans les siècles !

Saluez tous les chrétiens. Ceux qui sont avec nous vous envoient leurs salutations, j’ajoute les miennes et celles d’Évariste le scribe, ainsi que de sa famille.

Source :
Bruno Chenu, Claude Prud’homme, France Quéré, Jean-Claude Thomas, Le livre des martyrs chrétiens, Centurion, Paris 1988, p. 42-49.
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