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SERMON SUR LA RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST - le père Bourdaloue - 17 ème siècle

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SERMON SUR LA RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST  -  le père Bourdaloue - 17 ème siècle Empty SERMON SUR LA RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST - le père Bourdaloue - 17 ème siècle

Message par MichelT Sam 30 Mar 2024 - 20:17

SERMON SUR LA RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST  -  le père Bourdaloue - 17 ème siècle Jesusdescanso

SERMON SUR LA RÉSURRECTION DE JÉSUS-CHRIST.

Source : Sermon du Père Bourdaloue – année 1719 – devant le Roi de France - (Extrait)

Louis Bourdaloue (1632-1704) Jésuite français,est l'un des plus grands prédicateurs du siècle de Louis XIV.

L'Ange dit aux femmes : Ne craignez point , vous cherchez Jésus de Nazareth , qui à été crucifié: il est ressuscité, il n'est plus ici : voici le lieu où , on l'avait mis. (Marc 16,6)

SIRE,

Ces paroles sont bien différentes de celles, que nous voyons communément gravées sur les tombeaux des hommes. Quelque puissant  qu'ils aient été, à quoi se réduisent ces magnifiques éloges qu'on leur donne, et que nous lisons sur ces superbes mausolées que leur érige la vanité humaine?A cette triste inscription : Hic jacet (Ci-gît), ce Grand, ce conquérant, cet homme tant vanté dans le monde , est ici couché sous cette pierre et  enseveli dans la poussière, sans que tout son pouvoir et toute sa grandeur l'en puisse tirer. Mais il en va bien autrement à l'égard de Jésus-Christ. A peine a-t-il été enfermé dans le sein de la terre, qu'il en sort dès le troisième jour, victorieux et tout brillant de lumière : en sorte que ces femmes dévotes qui le viennent chercher, et qui ne le trouvant pas , en veulent savoir des nouvelles , n'en apprennent rien autre chose, sinon qu'il est ressuscité et qu'il n'est plus là. Voilà selon la prédiction et l’expression du prophète Isaïe, ce qui rend son tombeau glorieux. Au lieu donc que la gloire des Grands du siècle se termine au tombeau , c'est dans le tombeau que commence la gloire de ce Dieu-homme. C'est là, c'est pour ainsi parler, dans le centre même de la faiblesse, qu'il fait éclater toute sa force, et jusqu'entre les bras de la mort qu'il reprend par sa propre vertu une vie bienheureuse et immortelle.

Admirable changement, Chrétiens, qui doit affermir son Église, qui doit consoler ses disciples et les rassurer, qui doit servir de fondement à la foi et à l’espérance chrétienne, car tels sont , ou tels doivent - être les effets de la résurrection du Sauveur, comme j'entreprends de vous le montrer dans ce discours. Saluons d'abord la Sainte Vierge Marie , et félicitons-la, en lui disant : Regina cœli.

Oui, , Chrétiens, un des plus solides fondements et de notre foi et de notre espérance , c'est la glorieuse résurrection de Jésus Christ. Je le dis après saint Augustin ; et m'attachant à sa pensée, je trouve en deux paroles de ce Père, le partage le plus juste, et le dessein le plus complet. Car selon la belle remarque de ce saint Docteur , le Fils de Dieu dans sa résurrection nous présente tout à la fois et un grand miracle et un grand exemple. Un grand miracle, pour confirmer notre foi, et un grand exemple, pour animer notre espérance. En effet, c'est sur cette résurrection du Sauveur des hommes que sont établies les deux plus importantes vérités du christianisme , dont l'une est comme la base de toute la religion , savoir que Jésus-Christ est Dieu; et l'autre est le principe de toute la morale évangélique , savoir que nous ressusciterons un jour nous-mêmes comme Jésus-Christ. Ainsi mes chers Auditeurs , sans une plus longue préparation, voici ce que j'ai aujourd'hui à vous faire voir. Miracle de la résurrection de Jésus Christ, preuve incontestable de sa divinité ; c'est par là qu'il confirme notre foi, et ce sera la première partie. Exemple de la résurrection de Jésus-Christ, gage assuré de notre résurrection future ; c'est par là qu'il anime notre espérance , et ce sera la seconde partie. Deux points d'une extrême conséquence. Dans le premier, Jésus-Christ par sa résurrection nous apprendra ce qu'il est ; dans le second Jésus-Christ par cette même résurrection nous apprendra ce que nous serons. L'un et l'autre renferme ce qu'il y a dans le christianisme de plus sublime et de plus relevé. Plaise au ciel qu'ils servent également à votre instruction et à votre édification.


Partie 1

C`est une grande parole , Chrétiens , et qui mérite d'être écoutée avec tous les sentiments , de respect, que la religion est capable de nous inspirer, quand saint Paul nous dit que l'auguste mystère de la résurrection a établi dans le monde la foi de la divinité de Jésus Christ (Romains 1,4).  Ainsi parlait l'Apôtre, persuadé, rempli , pénétré de cette vérité , nous adorons , mes Frères , un Sauveur , qui a été prédestiné Fils de Dieu en vertu de sa résurrection glorieuse. Au lieu de prédestiné, le texte Grec et le Syriaque portent, manifesté et déclaré , mais saint Ambroise concilie ces deux versions en disant que Jésus-Christ qui était un Dieu caché dans son incarnation , devait selon l'ordre de sa prédestination éternelle, être un Dieu révélé, et un Dieu connu dans sa résurrection. Je ne sais, mes chers Auditeurs , si vous avez jamais fait réflexion à une autre proposition bien remarquable du même Apôtre , dans cet excellent discours qu'il fit au peuple d'Antioche, et qui est rapporté au livre des Actes des Apôtres.

Voici comment s’expliquait le Docteur des Gentils (Saint-Paul - le mot Gentils veut dire - païens où non-juifs): «Nous vous annonçons l’accomplissement d'une grande promesse, que Dieu avait faite à nos Pères , et qui a été durant tant de siècles le sujet de leur espérance et de leurs vœux. Dieu a voulu que nous qui sommes leurs enfants , eussions l'avantage de la voir enfin consommée ; et l’exécution de cette promesse, est qu'il a ressuscité Jésus , selon ce qui est écrit dans le psaume : vous êtes mon  Fils et c'est aujourd'hui que je vous ai engendré.» (Actes des Apôtres 13,30) Que signifie cela, Chrétiens , et de quel jour St Paul prétendait-il parler?  Si c'était de celui où Jésus Christ comme Fils de Dieu et comme Verbe incréé, et engendré de son Père. Pourquoi l'appliquait-il au mystère de  sa résurrection ? et s'il l’entendait du jour où Jésus-Christ, comme Dieu homme, est ressuscité selon la chair , pourquoi faisait-il mention de sa génération éternelle ?  Quel rapport de l'un à l'autre ? Ah ! répond à St Ambroise , il est admirable , et jamais l'Apôtre n'a parlé plus conséquemment; pourquoi ? parce qu'en effet la résurrection de  Jésus-Christ a été pour lui une seconde naissance , mais bien plus heureuse et plus avantageuse que la première ; puis qu'en renaissant, pour ainsi dire du tombeau , il a fait éclater visiblement dans sa personne ce caractère de Fils de Dieu, dont il était revêtu. Et c'est pour cela que le Père éternel le reconnaît singulièrement dans ce mystère, et lui adresse ces paroles dans un sens particulier :  Oui mon Fils, c'est en ce jour que je vous engendre pour la seconde fois, mais d'une manière qui justifie  parfaitement la grandeur de votre origine, et la vérité de cet être divin que vous avez reçu de moi.

Comme s'il lui disait : tandis que vous avez été sur la terre , quoique vous fussiez sans contestation Fils de Dieu , on ne vous a considéré que sous la qualité de Fils de l'homme. Mais maintenant que vous triomphez de la mort, et que vous êtes régénéré à la vie de la gloire , vous vous rendez à vous-mêmes un témoignage si authentique de la divinité qui habite en vous , qu'elle ne peut plus désormais vous être disputée ; et quoique j'ai toujours été votre Père dans le temps et dans l'éternité , je ne laisse pas de m'en faire : aujourd’hui un honneur spécial, distinguant ce jour bienheureux entre tous les autres jours qui ont composé votre destinée , et le choisissant pour déclarer à tout l'univers que vous êtes mon Fils. Mais venons au fond de la question , et pour nous instruire d'une vérité aussi essentielle que celle-ci, voyons dans quel sens et comment il est vrai que la résurrection de Jésus Christ établit particulièrement la foi de sa divinité.

Car vous me direz : le Sauveur du monde pendant le cours de sa vie mortelle, n'avait il pas fait des miracles qui l’autorisaient dans la qualité qu'il prenait de Fils de Dieu. Les démons (anges déchus) chassés, les aveugles guéris, les morts de quatre jours ressuscités , n’était-ce pas autant de démonstrations, mais de démonstrations palpables et sensibles, du pouvoir tout divin qui résidait en lui. Quel effet plus singulier devait avoir sa résurrection , pour confirmer cette créance? Écoutez-moi, Chrétiens , voici le nœud de la difficulté et comme le point décisif du mystère que je traite. Je dis que la révélation de la divinité de Jésus-Christ était surtout attachée à sa résurrection; pourquoi ? pour quatre raisons , ou plutôt , pour une seule renfermée dans ces quatre propositions parce que la résurrection de Jésus-Christ était la preuve, que cet homme Dieu devait expressément donner aux juifs pour leur faire connaître sa divinité : parce que cette preuve était en effet la plus naturelle et la plus convaincante de sa divinité; parce que de tous les miracles de Jésus Christ faits par la vertu de sa divinité, il n'y en a pas un qui ait été si avéré, ni d'une évidence si incontestable , que celui de la résurrection de son corps : et parce que c'est celui de tous qui a le plus servi à la propagation de la foi et à établissement de l’Évangile , dont la substance et le capital  est de croire en Jésus-Christ et de confesser sa divinité. D'où vient que les Chrétiens des premiers siècles , voulant exprimer dans un mot l'idée qu'ils se formaient de la résurrection du Sauveur , par un usage reçu entre eux , l`appelaient simplement le témoignage,  l'Empereur romain chrétien Constantin ( 4 eme siècle) ayant bâti dans la nouvelle Jérusalem un superbe temple sous le titre de Jésus Christ ressuscité, lui donna le nom de martyrium, c'est-à-dire, testimonium (témoignage).

Et Saint Cyrille Patriarche de la même ville en apporte la raison , savoir, que ce temple était consacré à un mystère , que Dieu avait lui-même choisi, pour être le témoignage solennel de la divinité de son Fils.  C'est ce que vous verrez, Chrétiens, dans l'exposition de ces quatre articles que je vais vous : développer. Car, premièrement, n'est ce pas une remarque bien solide, qu'autant de fois que Jésus Christ se trouve dans l’Évangile pressé par les juifs sur le sujet de sa divinité, et qu'ils lui en demandent des preuves, il ne leur en donne jamais d'autre que sa résurrection, dont il se sert, ou pour convaincre leurs esprits , ou pour confondre leur incrédulité. «Cette nation infidèle, disait-il, veut être assurée par un miracle, de ce que je suis; et elle n'aura point d'autre miracle que celui du Prophète Jonas, où , plutôt , que celui dont le Prophète Jonas fut la figure , savoir, qu’après avoir été enfermé : trois jours dans le sein de la terre, j'en sortirai comme Jonas sortit du ventre de la baleine.» (Matthieu 12,39 - le Christ a été trois jours dans le tombeau) Vous me demandez , ajoutait-il en s’adressant aux Pharisiens, par quel miracle je vous montre , que j'ai droit d'user du pouvoir absolu , et de l’autorité indépendante que je m’attribue. Or voici par où je veux que vous en jugiez : c'est qu’après que vous aurez détruit par une mort cruelle et violente ce temple visible, qui est mon corps, je le rétablirai dès le troisième jour dans le même état , et dans un état même plus parfait.

Prenez garde, s'il vous plaît, Chrétiens : il pouvait leur produire cent autres miracles, qu'il opérait au milieu d'eux ; mais il les supprime tous et vous diriez qu'en les faisant, il ne se proposait rien moins que de faire connaître aux hommes sa divinité. Car s'il change l'eau en vin aux noces de Cana, c'est par une déférence comme forcée à la prière de Marie. S'il délivre la fille de la Cananéenne, c'est pour se délivrer de l'importunité de cette femme. S'il ressuscite le fils de la veuve , c'est par une pure compassion dans la plupart même de ces actions surhumaines, après avoir laissé agir sa toute- puissance, il recommande le secret à ceux qui en ont ressenti la vertu. Et quand il découvre aux trois disciples la gloire de sa transfiguration , où le Père céleste parlant en personne le reconnaît pour son Fils bien-aimé, il leur défend d'en rien publier, jusqu'à ce qu'il soit ressuscité d'entre les morts.

Pourquoi cela ? par la raison qu'en apporte saint Chrysostome ; que dans le dessein de Dieu la résurrection de Jésus-Christ ayant été ordonnée pour être le signe de sa filiation divine ; c’était elle qui devait mettre le sceau à tous les autres miracles , et qui en devait consommer la preuve. De là dépendait la foi de tout le reste. Car ce Sauveur des hommes ayant dit, je suis égal à mon Père , et Dieu comme lui , et  pour faire voir que je le suis ; je ressusciterai trois jours après ma mort : s'il n'eut pas été tel qu'il prétendait, il était impossible qu'il ressuscitât,  parce que Dieu alors en concourant au miracle de sa résurrection , eût autorisée l'imposture et le mensonge. Si donc après cette déclaration, il est ressuscité , il fallait aussi par une suite nécessaire qu'il fût Dieu. Étant Dieu, tous ses autres miracles subsistaient , puisqu'il est naturel à un Dieu de faire des miracles. Et au contraire s'il n'était pas ressuscité, la créance de sa divinité se trouvait détruite par sa propre bouche; sa divinité détruite, ses miracles ne devaient plus avoir de force, ses paroles , n'étaient que fausseté, sa vie qu'artifice et illusion, toute la foi chrétienne qu'un fantôme,  et voilà le sens littéral de ce passage de saint Paul (1 Corinthiens 15,13) cela encore une fois, parce que Jésus-Christ avait marqué la résurrection de son corps , comme le caractère distinctif de sa divinité.

Mais pourquoi choisissait-il celui-là préférablement à tous les autres ? Ah ! Chrétiens, en pouvait-il choisir un plus éclatant et plus , sensible , que de se ressusciter lui - même ?
Le miracle , dit saint Augustin , est pour les créatures intelligentes le langage et la voix de Dieu et le plus grand de tous les miracles est la résurrection d'un mort, mais entre toutes les résurrections, quelle est la plus miraculeuse ? n'est-ce pas , poursuit ce saint Docteur, de rendre la vie à soi même , et de se ressusciter par sa propre vertu ? Ce n'est donc point sans raison que Jésus-Christ s'attachait spécialement à ce signe, pour vérifier qu'il était Dieu et Fils de Dieu. En effet, il n’appartient qu'à un Dieu de dire comme lui : «J'ai le pouvoir de quitter la vie , j'ai le pouvoir de la reprendre.» (Jean 10,18) ; l'un m'est aussi facile que l'autre , et comme je ne la quitterai que quand je voudrai , aussi je la reprendrai-je quand il me plaira. ll n'y a, dis je, qu'un Dieu qui puisse s'exprimer de la sorte.

Avant Jésus-Christ, ne perdez pas cette réflexion de saint Ambroise également solide et ingénieuse, avant Jésus Christ on avait vu dans le monde des hommes ressuscités, mais ressuscités par d'autres hommes. Élisée par le souffle de sa bouche avait ranimé le cadavre du fils de la Sunamite (2 Rois 4,32 – Ancien Testament); et par la prière d’Élie, l'enfant de la veuve de Sarepta mort de défaillance et de langueur ( 1 Rois 17,21 – Ancien Testament), avait été rendu à sa mère désolée plein de vigueur et de santé. Mais, comme remarque Saint Ambroise, ceux qui étaient alors ressuscités , ne recevaient la vie, que par une vertu étrangère ; et ceux qui opéraient ces miracles , ne les faisaient que dans des sujets étrangers. La merveille inouïe , c'était que le même homme fît tout à la fois le double miracle , et de ressusciter, et de se ressusciter. Car c'est ce qu'on n'avait jamais entendu ; et voilà le miracle que Dieu réservait à son Fils, afin de déclarer au monde, qu'il était tout ensemble homme et Dieu ; homme, puisqu'il était ressuscité; et Dieu, puisqu'il s'était ressuscité.  Mystère adorable que saint Jérôme, par ce don qu'il avait pour bien entendre les écritures , observe dans ces paroles du psaume , qui selon la lettre même conviennent à Jésus Christ et ne se peuvent rapporter qu'à lui : « Je suis mis au nombre de ceux qui descendent dans la fosse, je suis devenu semblable a un homme sans force. Au milieu des morts j`ai ma couche, comme celle des tués qui gisent dans un sépulcre.» (Psaume 87,5)

On m'a mis au rang des morts et on a crû qu'en mourant je ne devais point avoir d'autre sort , que le commun des hommes: mais il a y eu néanmoins entre eux et moi, deux grandes différences; l'une que j'ai été libre entre les morts, et l'autre, que parmi les morts je n'ai eu besoin du secours de personne. Que veut-il dire Chrétiens ? c'est à dire, que Jésus-Christ est entré dans le royaume de la mort, non pas comme son sujet, mais comme son souverain ; non pas comme esclave, mais comme vainqueur ; non pas comme dépendant de ses lois , mais comme jouissant d'une parfaite liberté. De sorte que pour en sortir par la voie de la résurrection, il ne lui a fallu que lui-même; point de Prophète qui priât pour lui, qui lui, commandât de se relever, qui le tirât par violence du tombeau, parce qu’étant Dieu il ne devait être aidé que de sa vertu toute-puissante. Paroles, ajoute saint Jérôme, que le saint Esprit semble avoir dictées, pour, composer l'épitaphe de Jésus-Christ qui devait ressusciter.

Il est donc vrai que la résurrection de cet homme-Dieu , était la preuve la plus authentique qu'il pouvait donner de sa divinité , et c'est pourquoi toute la Synagogue conjurée contre lui , fit de si puissants efforts , pour empêcher que la créance de cette résurrection ne fût reçue dans le monde. Tous les chefs des juifs étaient persuadés que si l'on croyait une fois , et s'il était constant que Jésus-Christ fut ressuscité, dès-là il se trouverait dans une pleine possession et de la qualité de Messie et de celle de Fils de Dieu. Mais qu'est-il arrivé par une conduite toute merveilleuse de la providence , de tous les articles de notre religion, ou plutôt de tous les miracles sur quoi est fondée notre religion, il n'y en a aucun, dont le fait ait été si avéré, ni dont l'évidence soit si incontestable : en sorte , dit saint Augustin,  qu'un païen même et un infidèle examinant sans préoccupation toutes les circonſtances de ce miracle , est forcé d'en reconnaître la vérité. Et ce qui est encore plus étonnant, continue ce saint Docteur, c'est que les deux choses, qui naturellement auraient dû être des obstacles à la foi de cette résurrection, savoir, la haine des Pharisiens et l’incrédulité des Apôtres, sont justement les deux moyens,que Dieu a employé pour l'appuyer et pour la fortifier.

Les ennemis de Jésus-Christ les plus passionnés ont malgré eux contribué par leur haine, même à vérifier le miracle de la résurrection de son corps, et par conséquent à
établir notre foi. Car prenez garde, Chrétiens
; à peine Jésus Christ est-il expiré, qu'ils  s’adressent à Pilate et que lui représentèrent-ils ? «nous nous souvenons que ce séducteur a dit, lorsqu'il était encore vivant, je ressusciterai trois jours après ma mort ; il s'y est publiquement engagé, et il a voulu qu'on éprouvât par là s'il était fidèle et véritable dans ses paroles. Tout le peuple est dans l'attente du succès de cette prédiction ; et si son corps venait maintenant à disparaître, il n'en faudrait pas davantage, pour confirmer une erreur aussi pernicieuse que celle-là. Il est donc important d'y pourvoir et nous venons à vous pour le faire avec plus d’autorité. Allez, leur répond Pilate , vous avez des gardes, usez-en comme il vous semblera bon, je vous donne tout pouvoir.» : aussitôt le sépulcre est investi de soldats, la pierre qui en ferme l'ouverture est scellée, on n'omet rien pour une entière sûreté. Quel effet de cette prévoyance! Point d'autre que d'écarter jusqu'aux moindres doutes et jusqu'aux plus légers soupçons sur la résurrection de Jésus-Christ.

Car malgré toutes leurs précautions et tous leurs soins, le corps du Sauveur après trois jours- de sépulture , ne s'étant plus trouvé dans le tombeau, que pouvaient dire les Pharisiens ? Que ses disciples l`avaient enlevé à la faveur de la nuit, et tandis que la garde était endormie ? mais reprend saint Augustin, comment a t-on pû approcher du sépulcre , lever la pierre , emporter le corps , sans éveiller aucun des soldats ? d'ailleurs si la garde était endormie; d'où a t-elle sû qu'on l'avait enlevé, et qui l'avait enlevé, et si elle n'était pas endormie, comment a-t-elle souffert qu'on l'enlevât ?

Quelle apparence que les disciples, qui étaient la faiblesse et la timidité même , soient devenus tout à coup si hardis ; et qu'au travers des gardes, avec un danger visible de leurs personnes , ils aient osé ravir un corps mis en dépôt sous le sceau public ? De plus, quand ils l'auraient osé, à quel dessein voudraient-ils faire croire aux autres une chose dont la fausseté leur aurait été clairement connue ? Que pourraient - ils espérer de là ?  

Car s'ils avaient enlevé le corps, il leur était évident que Jésus-Christ n'était pas ressuscité, qu'il les avait trompés , et comme ils s'étaient exposés pour lui à la haine de toute leur nation, il était naturel que se voyant ainsi abusés , bien loin de soutenir encore ses intérêts, ils le renonçassent, déclarant aux Magistrats que c'était un imposteur. Témoignage que toute la Synagogue eût reçue avec un applaudissement général , et qui leur eût gagné l'affection de tout le peuple au lieu que publiant sa résurrection, ils ne doivent attendre que les traitements les plus rigoureux, les persécutions, les prisons, les fouets, la mort même.

Cependant, voilà l'unique défaite des chefs des juifs pour éluder le miracle de la résurrection de Jésus-Christ. Ce n'est pas seulement de l'Évangéliste que nous l'apprenons, mais de Saint-Justin martyr ( 2 eme siècle) lequel ayant été juif de religion , était mieux instruit que personne de leurs traditions. Ils répendirent, dit-il, dans le monde que le sépulcre avait été forcé. Mais le mensonge était si visible que la résurrection du Sauveur ne laissa pas de passer pour constante parmi le peuple. Flavius Joseph (de l`an 38 a 100 Ap J.C. - écrivain juif – auteur de L`Antiquité des Juifs et de la Guerre des Juifs) lui-même n'en a pû disconvenir, quelque intérêt qu'il eût à obscurcir la gloire du Fils de Dieu , et afin que la gentilité ( les non-juifs) aussi bien que le judaïsme , rendît hommage à ce Dieu ressuscité; Pilate selon le rapport de Tertullien , bien informé de la vérité, et déjà chrétien dans sa conscience , en écrivit à l`empereur romain Tibère. Sur quoi ce Père n'a pas craint d’ajouter, que les Empereurs auraient crû dès lors en Jésus-Christ s'ils n'avaient été comme Empereurs , nécessaires au siècle ; ou si les chrétiens , qui renonçaient au siècle , avaient pû être Empereurs.

Mais ce qui me surprend au-delà de tout le reste, et ce que nous ne pouvons assez admirer, c'est de voir les Apôtres qui pendant la vie de leur Maître ne pouvaient pas même comprendre ce qu'il leur disait de sa résurrection, qui dans le temps de sa passion en avaient absolument désespéré,et qui rejetaient après sa mort comme des fables et des rêveries ce qu'on leur racontait de ses apparitions : de voir, dis-je, des hommes si mal disposés à croire , ou plutôt si déterminés à ne pas croire, devenir les prédicateurs et les martyrs d'un mystère, qui jusques-là avait été le plus ordinaire sujet de leur incrédulité ; aller devant les tribunaux et les juges de la terre confesser une résurrection , dont ils s'étaient toujours fait une matière de scandale; ne pas craindre de mourir pour en confirmer la vérité , et s'estimer heureux , pourvu qu'en mourant ils servissent à Jésus - Christ glorieux et triomphant de témoins fidèles.

Qui fit ce changement en eux , et qui était capable de le faire, sinon l’assurance et la foi de sa résurrection ? Mais une foi si ferme après une incrédulité si obstinée,n’était-elle pas un coup de la main du Très-Haut ? est-ce en vertu de cette foi , je dis de la foi d'une résurrection si miraculeuse, que le christianiſme s'était multiplié, que l’Évangile a fait dans le monde des progrès inconcevables , et que la divinité du Sauveur malgré l'enfer et toutes ses puissances a été crue jusques aux extrémités du monde.Nous n'avons qu'à considérer l'origine et la naissance de l’Église. Jamais les Apôtres ne prêchaient Jésus-Christ dans les Synagogues , qu'ils ne produisissent la résurrection comme une preuve sans réplique; c'est celui , disaient ils sans cesse , qui est ressuscité le troisième jour; celui que le Dieu de nos Pères a glorifié, en le délivrant de la mort ; celui que vous avez crucifié, mais qui depuis s'est montré dans l'état d'une vie nouvelle. On dirait que c'était là le seul article qui rendait leur prédication efficace et invincible.

Car en quoi faisaient-ils paraître la force de ce zèle Apostolique dont ils étaient remplis ? à rendre témoignage de la résurrection de Jésus-Christ. En cela consistait tout le soin et tout le fruit de leur ministère ? jusques-là mêmes, que lorqu'il fallut procéder à l'élection d'un nouveau disciple en la place du perfide Judas, la grande raison qu'ils apportèrent, fut qu'ayant vu ce qu'ils avaient vu , et qu'étant au Sauveur du monde ce qu'ils lui étaient , ils devaient s'associer quelqu'un pour être avec eux témoin de la résurrection. Comme si leur Apostolat eût été réduit à ce seul point. Et en effet, ajoute saint Luc, tout le monde se rendait à la force de ce témoignage. Les Juifs n'y pouvaient résister, les gentils (non-juifs) en étaient persuadés , le nombre des chrétiens croissaient tous les jours, et nous apprenons de Saint Chrysostome, qu’immédiatement après la profession de foi que faisaient les catéchumènes, en reconnaissant que Jésus Christ était ressuscité, on leur conférait le baptême.

Pourquoi cela ? parce que professer la résurrection de Jésus-Christ, c’était professer qu'il était Dieu et professer qu'il était Dieu , c'était embrasser sa religion, puisqu'il est certain que toute la religion chrétienne est fondée sur la divinité de Jésus-Christ, et que la divinité de Jésus-Christ ne nous a été authentiquement révélée que par le miracle de sa résurrection.  Arrêtons-nous ici, et pour répondre au dessein de Dieu dans ce mystère, élevons-nous par les sentiments de la foi au dessus de notre bassesse. Entrons, si j'ose m'expliquer de la sorte , dans le sanctuaire de la divinité de Jésus Christ qui nous est ouvert ; et profitant de la fête que nous célébrons, disons avec les vieillards de l'Apocalypse prosternés devant le trône de l'Agneau : «L`agneau qui a été immolé est digne de recevoir la puissance, la richesse, la sagesse, la force, l`honneur, la gloire et la louange.» (Apocalypse 5,12) Oui l'Agneau sacrifié pour nous, mérite de recevoir l'hommage, que toute l’Église lui rend aujourd’hui. En adorant son être divin, faisons à ce Sauveur la même protestation que lui fit saint Pierre : «vous êtes le Fils du Dieu vivant.» ( Matthieu 16,16),  ou pour la concevoir dans les termes d'autant plus forts et plus énergiques qu'ils sont plus simples et plus naturels, servons nous de l'expression de saint Thomas : « mon Seigneur et mon Dieu.» (Jean 20,28) expression qui confondait autrefois l’impiété Arienne, et qui fermera éternellement la bouche à l’infidélité des libertins.

Au lieu qu'avant la résurrection du Fils de Dieu : et Thomas et les autres Apôtres se contentaient de lui dire ,Seigneur , Maître , maintenant qu'il est ressuscité,faisons-nous un devoir de lui répéter cent fois, Dominus meus , et Deus meus , vous êtes mon Seigneur et mon Dieu, et vous me le faites connaître si évidemment dans votre résurrection , que j'aurais presque lieu de craindre , qu'elle ne fit perdre à ma foi une partie de son mérite. Car je sens mon âme toute pénétrée des vives lumières qui sortent de votre humanité sainte,et qui sont comme les rayons de la divinité qu'elle renferme : Je ne comprenais pas ce que Saint Paul voulait faire entendre aux Hébreux, quand il leur disait que le Père éternel avait commandé aux Anges d'adorer son Fils dans le moment qu'il ressuscita et qu'il fit sa seconde entrée dans le monde (Hébreux 1,6).  Mais j'en vois maintenant la raison : c'est que Jésus Christ en ressuscitant, montra à tout l'univers qu'il était Dieu, et que l'adoration est le culte propre de Dieu et uniquement affecté à Dieu.

Voilà pourquoi le Père éternel voulut que ce culte fût rendu solennellement à Jésus Christ par tous les esprits bienheureux : « Que tous les anges de Dieu l`adorent.» (Hébreux 1,6). De savoir pourquoi il s'adressa aux Anges et non pas aux hommes, pour leur donner cet ordre ; ah mes Frères, dit Saint Jérôme, expliquant ce passage, c'est notre instruction d'une part, mais notre confusion de l'autre. Car il ne s’adressa aux Anges, que dans la connaissance anticipée qu'il eut de l'ingratitude, de la dureté , de l`insensibilité des hommes. Il ne s’adressa aux Anges que parce qu'il prévit que les homme seraient des esprits mondains qui bien loin d'adorer Jésus-Christ en vérité, l'outrageraient, le blasphémeraient, et par le dérèglement de leur vie le couvriraient de honte et d'opprobre. Il est vrai que les hommes, encore plus que les Anges , devaient adorer ce Dieu renaissant du tombeau , puisque c'était leur Sauveur , et non pas le Sauveur des Anges : mais les désordres des hommes , le libertinage des uns , l'hypocrisie des autres, l'orgueil de ceux-ci, la lâcheté de ceux-là , c'est ce qui détermina le Père céleste à recourir aux Anges , comme à des créatures plus fidèles , quand il voulut procurer à son Fils unique le tribut d'honneur qui lui était dû en conséquence de sa résurrection.

Comme s'il eût dit :que les Anges soient ses adorateurs , puisque les hommes sont des impies qui le scandalisent. Car c'est le reproche que chacun de nous a dû se faire aujourd'hui dans l'amertume de son âme. Reproche qui suffirait, pour nous tirer de l'assoupissement où nous sommes, et pour ranimer notre foi. Reproche qui par une suite nécessaire, produirait notre conversion et le changement des mœurs. En effet, cette foi de la divinité de Jésus Christ a sanctifié le monde ; et n'est-ce pas par cette même foi, que le monde qui nous enchante et dont les maximes nous corrompent, doit être sanctifié dans nous ? Si j'ai cette foi, ou je suis juste, ou je suis dans la voie de l'être : si je ne l'ai pas , il n'y a dans moi que péché et qu'iniquité. Qui est celui demande le bien aimé disciple saint Jean, qui triomphe du monde , sinon celui qui croit que Jésus-Christ est Dieu ? C'est-à-dire , quel est celui qui maître de ses passions, est réglé dans sa conduite , modéré dans ses désirs , continent, patient , charitable , sinon celui qui se laisse gouverner et conduire par la foi de ce Dieu Sauveur ?

Au contraire , quel est celui qui demeure toujours esclave du monde et de ses concupiscences , esclave de l'ambition , esclave de l’intérêt , esclave de la sensualité , si ce n'est pas celui qui a renoncé à cette foi, ou en qui,cette foi est languissante ?  Consultez l’expérience, et vous verrez avec quelle raison parlait l'Apôtre. La prudence humaine a cru pouvoir se maintenir indépendamment de cette foi, et en a voulu secouer le joug ; mais on sait de quelle manière elle y a réussi, et les tristes effets de cette indépendance criminelle,on a vu des chrétiens s'ériger en philosophes ; et laissant Jésus-Christ , s'en tenir à la foi d'un Dieu : mais par une disposition secrète de la providence , leur philosophie n'a servi qu'à faire paraître encore davantage l'égarement de leurs esprits et la corruption de leurs coeurs.


Il semble qu'avec la connaissance d'un Dieu; ils devaient être naturellement sages , et naturellement vertueux : mais parce qu'on ne peut être solidement vertueux et sage que par la grâce , que la grâce est attachée à Jésus-Christ, que Jésus-Christ ne nous est rien sans la foi , que la foi qui nous unit à lui est celle qui nous relève sa divinité ; de là vient qu'avec toutes ces belles idées de sagesse , ils ont été des insensés, des emportés; qu'ils se sont laissés entraîner au torrent du vice, qu'ils ont succombé aux plus honteuses passions, qu'ils se sont, comme dit Saint Paul, évanouis dans leurs propres pensées, et qu'affectant d’être philosophes , ils ont mêmes cessé d’être des hommes. Au contraire, où a-t-on trouvé l'innocence et la pureté de la vie dans cette sainte et divine foi, qui nous apprend que Jésus-Christ est vrai Fils de Dieu ? Voilà ce qui nous justifie , voilà ce qui nous ouvre le trésor des grâces et des vertus ; voilà ce qui nous donne accès auprès de Dieu , pour avoir part un jour à cette bienheureuse résurrection qui nous est promise.

Résurrection de Jésus-Christ, preuve incontestable de sa divinité , c'est par là qu'il confirme notre foi. Résurrection de Jésus-Christ, gage assuré de notre résurrection future : c'est ainsi qu'il anime notre espérance, comme vous l'allez voir dans la seconde partie.


Partie 2

De tous les articles de notre religion, il n'y a aucun, dit Saint Augustin , qui ait été plus contredit que la résurrection des hommes, parce qu'il n'y en a point qui les retienne plus dans le devoir, et qui les assujettisse davantage aux lois divines. Car si les hommes doivent ressusciter, il y a donc une autre vie que celle-ci, toutes nos espérances ne se terminent donc pas à la mort, nous avons donc un sort bon ou mauvais à attendre dans l'éternité ; Dieu nous réserve donc à d'autres récompenses, ou à d'autres peines que celles que nous voyons  notre grande affaire est donc de travailler ici à mériter les unes , et à éviter les autres ; il faut donc rapporter nos actions à cette fin , et tout le reste doit donc être indifférent ; nous sommes donc bien condamnables de nous troubler des misères de cette vie, et de nous laisser surprendre à l'éclat des prospérités humaines ; la vertu seule est donc sur la terre notre bien solide, et mêmes notre unique bien. Car toutes ces conséquences suivent nécessairement du principe de la résurrection des morts. C'est pourquoi Tertullien commence l'excellent ouvrage qu'il a composé sur cette matière, par ces belles paroles : Fiducia christianorum , resurrectio mortuorum. Au contraire, dit saint Paul, si nous ne devons pas ressusciter, et si c'est au bonheur de ce monde que nos espérances sont bornées, nous sommes les plus misérables de tous les hommes : car tout ce que nous faisons est inutile.

C'est en vain que nous nous exposons à tant de dangers , en vain que j'ai soutenu tant de combats à Éphèse pour la foi, il n'y a plus de conduite , plus de règle à garder, et l'on peut donner à ses sens tout ce qu'ils demandent , le devoir et la piété sont des biens imaginaires, et   l’intérêt présent est le seul bien qui nous doive gouverner. Prenez garde Chrétiens, de cette erreur que les hommes ne ressusciteront pas, l’Apôtre tirait toutes ces conclusions, par un raisonnement théologique , dont il y a peu de personnes encore aujourd’hui qui comprennent toute la force : mais que Saint Chrysostome a très bien développé, en observant contre qui saint Paul avait alors à disputer.

Ce n’était pas , remarque ce Père, contre des hérétiques , qui reconnaissant l'immortalité des âmes, ne voulussent pas reconnaître la résurrection des corps , son argument eût été nul : mais il combattait les libertins et les athées,qui nient la résurrection des corps, parce qu'ils ne veulent pas croire l'immortalité des âmes, ni une vie future. Car quoique ces deux erreurs n'aient pas entre elles une connexion absolument nécessaire, elles sont néanmoins inséparablement jointes dans l'opinion des impies, qui tachant d'effacer de leurs esprits l'idée des choses éternelles , afin de se mettre en possession de pécher avec plus d'impunité, veulent abolir premièrement la foi de la résurrection des corps et par un progrès d’infidélité qui est presque inévitable , s'aveuglent ensuite jusqu'à se persuader mêmes que les âmes ne sont pas immortelles. Et voilà pourquoi Saint Paul se sert des mêmes armes pour attaquer l'une et l'autre de ces deux impiétés. Quoi qu'il en puisse être, je dis, Chrétiens, pour m'en tenir précisément à mon sujet, que dans la résurrection de Jésus-Christ , nous avons un gage sensible et assuré de notre  résurrection: comment cela ? parce que dans cette résurrection du Sauveur nous trouvons tout à la fois le principe, le motif, et le modèle de la nôtre.

Le principe par où Dieu peu nous ressusciter, le motif qui engage Dieu  à nous ressusciter , et le modèle sur lequel Dieu veut nous ressusciter : Ceci demande toutes vos réflexions. Je prétends d'abord que nous trouvons dans la résurrection du Fils de Dieu le principe de la nôtre : pourquoi ? Parce que cette résurrection miraculeuse est de la part de Jésus Christ l'effet d'une force souveraine et toute puissante. Car s'il a pû par sa toute-puissance se ressusciter lui-même, pourquoi ne pourra-t- il pas faire dans les autres ce qu'il a fait dans sa personne ? C'est l'invincible raisonnement de saint Augustin. Il y en a, dit ce Père, qui croient la résurrection du Sauveur , et qui se rendent là-dessus au témoignage incontestable des Écritures. Mais fidèles sur ce point, ils corrompent d'ailleurs leur créance, et donnent dans une erreur grossière, ne comprenant pas,ou ne voulant pas comprendre , comment il s'ensuit de là que nous puissions un jour ressusciter nous-mêmes. Or reprend ce Saint Docteur , Jésus-Christ ressuscité dans une chair semblable à la mienne , et ressuscité par sa propre vertu, n'est-ce pas une preuve évidente que je puis un jour , non pas me ressusciter moi-même comme lui ; mais être ressuscité par lui ? Si selon les fausses idées des Manichéens, poursuit saint Augustin, il n'avait pris en venant sur la terre , qu'un corps fantastique et apparent ; s'il avait laissé dans la corruption du tombeau , cette chair formée dans le sein de Marie, et dont il s'était revêtu pour vivre parmi les hommes ; si reprenant une vie , il avait repris un autre corps que le sien, un corps d'une substance plus déliée et composé de qualités plus parfaites, je pourrais peut-être douter de ma résurrection.

Mais aujourd'hui il renaît avec la même chair , avec le même sang dont il fut conçu dans les chastes flancs d'une Vierge, et ce que je vois s'accomplir en lui , quelle raison aurais je de croire qu'il ne puisse pas l'accomplir en moi? Car est-il moins puissant en moi et pour moi , qu'il ne l'est en lui-même et pour lui même ; et si c'est toujours la même vertu , ne sera-t-elle pas toujours en état d’opérer les mêmes miracles. C'est donc par cette suprême puissance qu'il ira dans les abîmes de la mer, dans les entrailles de la terre , dans le fond des antres et des cavernes , dans les lieux du monde les plus obscurs et les plus cachés, recueillir ces restes de nous-mêmes que la mort avait détruits , rassembler ces cendres dispersées, et toutes insensibles qu'elles seront, leur faire entendre sa voix et les ranimer. Ainsi le comprenait Saint Paul, parlant aux premiers fidèles : Jésus-Christ est ressuscité, mes Frères, leur disait ce Maître des nations ; on vous l'annonce, et vous le croyez : mais ce qui m'étonne, ajoutait le grand Apôtre , c'est que ce Dieu homme étant ressuscité , il s'en trouve encore parmi vous qui osent contester la résurrection des hommes : «Or si l`on vous prêche que Christ est ressuscité des morts, comment quelques-uns parmi vous disent-ils qu`il n`y a point de résurrection des morts?» (1 Corinthiens 15,12).

Car l'un n'est-il pas une conséquence de l'autre ; et ne sera-ce pas ce Dieu ressuscité qui réparera les ruines de la mort, et qui rétablira nos corps dans leur première forme et leur premier état ? « qui transformera le corps de notre humiliation en le rendant semblable au corps de sa gloire.» (Épître aux Philippiens 3,21). Mais encore par où opérera-t-il ce miracle ? sera - ce seulement par l'efficace de son intercession ? sera - ce seulement par la vertu de ses mérites ? non , remarque saint Chrysostome ; mais l'Apôtre nous fait entendre que ce sera par le domaine absolu , qu'a l'homme-Dieu sur toute la nature « par le pouvoir qu`il a de s`assujetir toute chose.»  (Épître aux Philippiens 3,21).

Ainsi mêmes l'avait compris le Patriarche Job , cet homme suscité de Dieu , trois mille ans avant Jésus-Christ, pour en parler dans des termes si précis et si forts, et pour prédire si clairement la résurrection du Sauveur et la nôtre. Oui, je crois, s'écriait - il , pour s'encourager lui-même et pour se soutenir dans ses souffrances, je crois et je sais que mon Rédempteur est vivant, et que je dois après les peines de cette vie, et après avoir payé le tribut à la mort , ressusciter dans ma propre chair ; . Voyez - vous la liaison qu'il met entre ces deux résurrections, celle de Jésus-Christ son Rédempteur (Job 19,25 Ancien Testament)  Qu'aurait - il dit, s'il eût vécu de nos jours, et qu'il eût été témoin comme nous de cette résurrection glorieuse du Fils de Dieu, où nous ne trouvons pas seulement le principe de la nôtre, mais encore le motif ?  Car il est naturel que les membres soient unis au chef, et quand le chef se ressuscite lui même, n'est-ce pas une suite qu'il doit ressusciter ses membres avec lui ? Or notre chef, s'est Jésus - Christ et nous sommes tous les membres de Jésus-Christ. Je puis donc bien appliquer à ce mystère ce que saint Léon disait de la triomphante Ascension du Sauveur au ciel, que là où le chef entre ses membres l'y doivent suivre et de mêmes que Jésus Christ, selon la pensée de ce grand Pape,n'est pas seulement rentré dans le séjour de sa gloire pour lui-même, mais pour nous,c'est à dire, pour nous en ouvrir les portes et pour nous y appeler après lui ; par la même règle et dans le même sens, n'ai-je pas droit de conclure, que c'est pour nous-mêmes qu'il a brisé les portes de la mort, pour nous-mêmes qu'il est sorti du tombeau et qu'il est ressuscité ?

Et certes il veut en qualité de chef que ses membres agissent comme lui , souffrent comme lui , vivent comme lui , meurent comme lui : pourquoi ne voudra-t-il pas qu'ils ressuscitent comme lui ? N'est-il pas juste que nous faisant part de ses travaux , il nous fasse part de sa récompense et puisqu'une partie de sa récompense est la gloire de son corps, parce que ce corps adorable est entré en participation de mérites avec son âme, n'est il pas engagé par là même à récompenser pareillement en nous et le corps et l’âme ? C'est la belle et consolante Théologie de saint Paul; et voilà pourquoi ce grand Apôtre l'appelle les prémices des morts «le premier né d'entre les morts» (1 Corinthiens 15,20),  Des prémices supposent des suites ; pour être le premier né ou, si vous voulez, le premier ressuscité d'entre les morts, il faut que les morts doivent pareillement renaître à la fin des siècles et reprendre une nouvelle vie. Vérité si incontestable dans la doctrine du Maître des gentils, (St-Paul) qu'il ne fait pas difficulté de dire, que si les morts ne doivent pas ressusciter après la résurrection de Jésus Christ, et en vertu de cette bienheureuse résurrection , il s'ensuit que ce n'est qu'une résurrection imaginaire et supposée.

Il est donc vrai, mes chers Auditeurs, que nous ressusciterons par Jésus-Christ, ou plutôt par la toute-puissance de Jésus-Christ , il est vrai que nous ressusciterons , parce que Jésus-Christ est ressuscité ; et pour mettre , le comble à notre espérance, j'ajoute que nous ressusciterons encore semblables à Jésus Christ , et que sa résurrection est le modèle de la nôtre. Car , demande saint Augustin, pourquoi Dieu a t il voulu que la résurrection de son Fils fût si sensible, et pourquoi le Fils unique de Dieu a t il tant cherché lui même à la faire connaître et à la rendre publique ? Ah, répond ce saint Docteur, c'est afin de nous découvrir sensiblement dans sa personne la vaste étendue de nos prétentions, c'est afin de nous faire voir dans ce qu'il est, ce que nous devons être, ou ce que nous pouvons devenir. Je n'ai donc qu'à me représenter ce qu'il y a de plus brillant dans le triomphe de mon Sauveur. Je n'ai qu'à contempler cette humanité glorifiée, ce corps , tout matériel et tout corps qu'il est revêtu de toutes les qualités des esprits , tout éclatant de lumière, et couronné d'une splendeur éternelle: voilà l'heureux état où je dois être moi-même élevé, et ce que la foi me promet. Espérance fondée sur la parole même de Dieu, puisque c'est sur la parole de son Apôtre. Car, dit l'Apôtre, quand Dieu viendra tirer nos corps de la poussière et les ranimer de son souffle , ce sera pour les conformer au divin exemplaire qui nous est proposé dans la résurrection de Jésus – Christ (Philippiens 3,21). - Amen

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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