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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mar 18 Oct 2016 - 2:15

Le catéchisme du Bon Pasteur  - Livre pour les familles catholiques

JOHN ANSELM MANNOCK

Traduit de l`anglais

Angleterre - France - Année 1860


Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques 1273020
La Ville de Douai en France


Commandez ces choses, et enseignez-les. (1. Timothée 4,11.)

Appliquez-vous tous à la lecture,  à l'exhortation, à l'instruction, (1. Timothée, 4, 13.)

Le juste vit de la foi. (Romains, 1, 17.)


APPROBATION de Mgr. GUERRIN, évêque de Langres.

NOUS, Évêque DE LANGRES , Vu le rapport de notre chanoine théologal sur un livre intitulé : Le Catéchisme du Bon Pasteur, ou le Livre des familles catholiques, etc., ouvrage traduit de l'anglais par les soins de deux professeurs de notre Grand Séminaire ; Considérant que la doctrine en est parfaitement saine et orthodoxe , et qu'elle est exposée avec une précision et une brièveté remarquables ; que les exhortations substantielles et nourries de l'Écriture Sainte, qui accompagnent chaque article, sont éminemment propres à faire goûter et pratiquer les vérités enseignées , et par conséquent à former les mœurs chrétiennes ; Non-seulement Nous approuvons ledit ouvrage, et Nous en permettons l'impression et la publication , mais encore Nous aimons à en recommander la lecture aux fidèles de notre Diocèse , qui y puiseront sans fatigue et même avec un certain attrait une instruction solide sur les choses de la Religion ; et Nous le signalons aux Pasteurs eux-mêmes, comme un des meilleurs livres auxquels ils puissent recourir, pour donner à leur peuple l'enseignement qu'ils lui doivent.

John-Anselm Mannock naquit vers la fin du 15 eme siècle. Jeune encore, il fut envoyé par ses parents au collège anglais de Douai, où, pendant quelques années, il poursuivit ses études ecclésiastiques. L'ouvrage que nous publions sous le titre de Catéchisme du bon Pasteur, parut en 1752 avec celui de «the poor man's catechism».


Ce Catéchisme est écrit dans un style simple et familier, qui le met à la portée des lecteurs que Mannock a spécialement en vue; mais en même temps il renferme un tel fonds d'instruction , que les personnes même les plus instruites ne peuvent le lire sans profit. C'est un cours de théologie morale et pratique, renfermant tout ce qu'il faut pour perfectionner le chrétien et le catholique dans la science de leurs devoirs. Les réflexions spirituelles, les pieuses maximes, les exhortations affectueuses et ferventes dont il abonde , tout conspire à vivifier la foi, à ranimer l'espérance , à enflammer la charité, à transporter l'âme de la terre au ciel, à la familiariser avec la beauté des tabernacles éternels, avec l'excellence et l'utilité des augustes commandements de Dieu ; tout, en plaçant sous les yeux de cette âme , la dignité et la gloire de ses destinées immortelles, concourt à détacher ses affections des jouissances éphémères de ce monde, pour les concentrer sur les trésors impérissables de la vie qui l'attend par-delà le tombeau.


DU NOM ET DE LA DIGNITE DU CHRÉTIEN.

D. Quelle est votre religion ? — R . Par la grâce de Dieu je suis chrétien.

Instruction. Le mot chrétien vient du mot Christ. Il désigne un disciple de Jésus-Christ, et une personne qui fait profession de sa doctrine et de sa loi ; ou celui qui est baptisé selon l'institution divine, au nom de la sainte Trinité , c'est-à-dire au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit; qui par là, purifié du péché originel et de tout péché quelconque, est devenu enfant de Dieu et héritier du ciel, membre de l'Église du Christ ou chrétien, et temple vivant du Saint-Esprit. Ainsi , ce que le Christ est par nature , le chrétien le devient par la grâce du baptême : le Christ est par nature le Fils éternel de Dieu; le chrétien est par la grâce le fils adoptif de Dieu, et il reçoit dans une certaine proportion, par la régénération spirituelle, ce que le Fils de Dieu reçoit par la génération éternelle : Voyez quel amour le Père nous a accordé de vouloir que nous portions le nom d'enfants de Dieu et que nous le soyons en effet. ( 1 Jean, 3, 1 .) Par l'adoption, en vertu de l'adoption, nous appelons Dieu notre Père, comme enfants de Dieu et héritiers de son royaume. (Romains, 8, 15.)

Avant le baptême , nous sommes dans le péché , nous sommes des infidèles indignes de la faveur de Dieu, nous n'avons aucun droit au ciel : Nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit-Saint. (Jean, 3, 15.) Les premiers fidèles ont reçu le nom de chrétiens dans la ville d'Antioche. (Actes, 11, 26.) Auparavant ils portaient le nom de disciples et de frères. On les appelait disciples , parce qu'ils suivaient la doctrine du Christ , et frères à cause de la grande, de l'admirable charité qui les unissait entre eux. Ils n'avaient qu'un cœur et qu'une âme. (Actes, 4, 32.) Enfin ils prirent le nom de chrétiens, de celui du Christ , pour signifier qu'ils croyaient à sa loi et la professaient, de même qu'ils participaient à l'onction de sa grâce.

Exhortation. Apprenez à vous estimer vous-même ce que vous êtes par la grâce du Sauveur , chrétien , disciple de Jésus-Christ. Quoi de plus excellent qu'une profession
qui dérive du nom du Christ? Par elle , vous entrez eu part de ses mérites ici-bas, et de sa gloire dans l'autre vie. Considérez donc votre vocation, comme l'Apôtre vous le recommande ( 1. Corinthiens 1, 26), et ayez pour sa grandeur le respect qu'elle mérite, en vivant d'une manière digne d'elle ; si vous portez le nom du Christ , ressemblez-lui
aussi par votre vie et vos vertus , puisque le caractère du chrétien est un caractère de sainteté ; ne le profanez point par une mauvaise conduite, à l'exemple de tant d'autres
qui ne sont chrétiens que de nom : Celui qui commet le péché est esclave du péché. (Jean, 8, 34.)

Ainsi, lorsque vous péchez mortellement, vous cessez d'être le serviteur de Dieu et le disciple de Jésus-Christ pour être celui de l`ange déchu ; vous perdez votre droit et votre titre au royaume des cieux, et, aussi longtemps que vous restez dans cet état d'impénitence, vous êtes privé de la grâce et de la faveur de votre Dieu et Rédempteur. 0 péché ! tu es incompatible avec les sentiments et le nom d'un chrétien qui a été oint de l'onction de la grâce divine avec l'huile de l'allégresse au-dessus de ses coassociés. (Psaume, 44, 8.)

HISTOIRES.

Constantin avait écrit à saint Antoine pour implorer ses prières et ses conseils. Peu touché de cet hommage, l'humble solitaire ne songeait pas même à y répondre. Sur les instances de ses frères, il le fit en ces termes : « Je me réjouis de ce que vous êtes chrétien; mais pour votre dignité d'empereur attachez-y peu de prix , et ne vous glorifiez pas d'une puissance dont vous aurez à rendre un compte si terrible. » (Ribadeneira.)

Une femme pauvre voyant s'élever dans son pays une magnifique église , fut jalouse de contribuer à cette excellente œuvre. Mais à la vue de sa misère, le prêtre à qui elle faisait son offrande, fruit de ses longues économies, hésitait à la recevoir. « Un écu! c'est trop, ma fille , vous êtes pauvre. — Moi pauvre ! s'écria cette admirable femme avec un accent plein de foi, eh ! ne suis-je pas chrétienne, fille d'un grand roi, héritière d'un grand royaume! » ( Œuvres de Boudon .)

Un prêtre sur le point d'administrer le viatique à un grand du monde, à un ancien ministre de Napoléon, commençait par ces mots : « Monsieur le Comte — Mon cher Curé, lui dit le malade en l'arrêtant tout court, les titres ne sont plus rien pour moi : Je ne conserve , je n'apprécie que celui de chrétien. » ( Correspondance d'un ancien Directeur de Séminaire. )

Je suis chrétien ! C'était le cri des martyrs, le cri des Lucien , des Quentin, des Blandine et de mille autres : ils y trouvaient leur force, leur consolation, leur gloire.

DES OBLIGATIONS DU CHRÉTIEN.

D. A quoi un chrétien est-il obligé par sa profession?

R. Il est obligé à croire intérieurement et à confesser extérieurement la doctrine et la loi du Christ : Il faut croire de cœur pour être justifié et confesser de bouche pour obtenir le salut. (Romains 10)

Instruction. Un chrétien doit croire dans son cœur tout ce que le Christ a enseigné et ce que son Église professe. Il doit le croire d'une foi sincère et réelle. Dieu veut être servi avec sincérité et vérité , sans artifices , dissimulation ni hypocrisie ; toutes choses, même nos plus secrètes pensées, sont à nu devant lui, et il n'y a rien de caché qui ne
doive être révélé au dernier jour. Un chrétien doit encore professer la foi et la loi du Christ extérieurement et ouvertement. Il le doit pour l'honneur de Dieu. Ainsi, appelé en présence des rois et des princes, ennemis de votre foi, s'ils vous demandent quelle religion vous professez , vous devez courageusement déclarer que vous êtes chrétien, catholique; et si à cause de cette confession vous aviez à souffrir, vous devriez souffrir jusqu'à la mort , comme les apôtres et les martyrs , plutôt que de renier votre foi. Il faut toujours obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes (Actes, 5, 29) , et cette obéissance sera récompensée : Celui qui me confesse devant les hommes, je le confesserai devant mon Père qui est dans les Cieux ( Matthieu, 10 , 32 ) ; au contraire la désobéissance sera punie : Celui qui me reniera devant les hommes, je le renierai devant mon Père qui est dans les Cieux. Un chrétien doit professer sa foi extérieurement pour son propre bien, en renouvelant fréquemment les actes et les œuvres de la foi. Enfin il y est obligé pour le bien du prochain, qu'il rappelle par là de l'erreur à la vraie foi et à la véritable Église de Jésus-Christ.

Exhortation. Rendez grâces à Dieu de ce qu'il vous a appelé à la vraie foi, de ce qu'il vous a fait chrétien et catholique. Voyez jusqu'à quel point vous avez suivi ou démenti votre foi ; si vous en avez fait une profession ouverte lorsqu'il en était besoin ; si enfin vous y avez joint les bonnes œuvres, et par là vous avez fait briller sa lumière devant votre prochain. N'ayez jamais honte de professer l'Évangile , ou de pratiquer ce qui vous conduira à votre bonheur éternel ; rougissez au contraire, humiliez- vous de vous être si peu conformé à ses maximes , d'avoir si souvent quitté le chemin qui mène à Dieu, pour suivre les voies du monde qui aboutissent au désespoir et à la confusion.

HISTOIRES.

Une personne n'osait faire le signe de croix dans une circonstance où il était commandé par l'usage. « Eh quoi! lui dit un chrétien plus courageux , vous rougissez de former sur vous le signe du salut ! J. -C. a-t-il rougi de mourir pour vous sur la croix? » Gardons-nous, en effet, de rougir de J.-C. devant les hommes, si nous ne voulons pas qu'il rougisse de nous devant son Père. ( Catéchisme de l'Empire. )


DU SIGNE DE LA CROIX.

D. Pourquoi vous enseigne-t-on à faire sur vous-même le signe de la Croix ?

R. C'est afin de nous rappeler la pensée de la Sainte-Trinité, de l'Incarnation et de la mort de Notre- Seigneur.

Instruction. Le signe de la Croix est une marque qui distingue les chrétiens des infidèles. C'est un symbole abrégé par lequel nous professons les deux principaux mystères
de la foi chrétienne : c'est-à-dire l'unité et la trinité de Dieu, l'Incarnation et la mort de notre Sauveur. Lorsque nous prononçons ces paroles : Au nom du Père, et du Fils , et
du Saint- Esprit ,
nous professons notre croyance à un seul Dieu en trois personnes, et en traçant sur nous le signe de la croix, nous professons notre croyance au Christ crucifié: Dieu me garde de me glorifier en rien, si ce n'est en Jésus et en Jésus crucifié! ( Galates., 6, 14. )

Nous commençons et nous finissons nos prières par le signe de la croix , pour marquer que nous ne pouvons rien obtenir de Dieu , si ce n'est par la médiation et les mérites
de Jésus crucifié. L'Église fait également un fréquent usage du signe de la croix dans l'administration des sacrements, pour montrer que leur vertu vient de la passion et de la
mort du Christ. Au baptême on a marqué de la croix notre front et notre poitrine , pour nous apprendre, selon saint Paul, à porter cette croix dans nos corps toute notre vie. Ce
signe sacré est un moyen de nous défendre des malins esprits, qui disparaissent devant lui. Saint Laurent, par le signe de la croix, a rendu la vue à un aveugle et beaucoup de miracles ont été ainsi opérés. Ce signe nous arme contre les tentations ; il nous défend contre les attaques de l'ennemi de notre âme. Quelle vénération la primitive Église
n'a-t-elle pas eu pour cette pieuse coutume ! On le voit clairement dans ces paroles de Tertullien : « Lorsque nous nous mettons en voyage, lorsque nous sortons de la maison ou que nous y rentrons, lorsque nous nous habillons, enfin dans nos principales actions, nous marquons nos fronts du signe de la croix. » (De Coron, militis, c. 3.) Saint Chrysostôme dit aussi : « Que le signe de la croix soit dans nos maisons, sur nos fenêtres, sur nos fronts, dans nos âmes ; ayons pour lui une grande dévotion. » Si on nous demande l'origine de cet usage, nous répondrons que la tradition l`a toujours enseigné, que l'antiquité l'a consacré, et que la foi l'a constamment pratiqué.

Exhortation. 0 chrétien , rendez donc au signe sacré de la croix le culte qui lui est dû. Pouvez-vous trop penser à Jésus crucifié ? Pouvez-vous lui rendre un honneur trop
grand ? Le signe de la croix vous rappelle naturellement sa passion : comment le feriez-vous donc trop souvent dès lors que par ce moyen vous honorez sa mort , vous confessez et adorez la Sainte-Trinité? Tel est le but, tel est le pieux objet de cet usage , ainsi que tout catholique l'a appris dans son enfance. Au dernier jour du monde, le signe
de la croix paraîtra dans les cieux, pour la joie des bons qui l'auront honoré sur la terre, pour l'éternelle angoisse des méchants qui l'auront méprisé. Autrefois elle apparut dans
les airs à Constantin-le-Grand , avec cette inscription : « Tu vaincras par ce signe. » Je vous dirai de même : « Par ce signe , ô chrétien ! vous triompherez des ennemis de votre âme , et gagnerez une victoire qui sera couronnée par la gloire éternelle. »

HISTOIRES.

Assaillie, mille fois par l`ange déchu, sainte Humiliène en triomphait toujours par le signe de la croix. Un jour Satan , voyant qu'il ne pouvait la troubler dans sa prière, revêtit sa forme de prédilection et déroula aux yeux de la servante de Dieu les replis d'un horrible serpent. Humiliène recourut à son arme ordinaire et le somma de se retirer : à l'instant il disparut , laissant après lui une affreuse infection. (Bolland., 4e tom. de mai, p. 391 et 4H.)

A toutes les suggestions du démon , César de Bus opposait la croix qu'il portait sur sa poitrine , en s' écriant : « Fuyez, ennemis de mon salut et de mon Dieu , fuyez, démons ! Voilà la croix du Seigneur, qui a brisé les portes de l'enfer; par les mérites de votre croix , ô mon Sauveur , délivrez-moi de mes ennemis. » ( Heureuse année. )

Qu'elle est puissante, qu'elle est douce la consolation de la croix ! Aux jours désastreux de la révolution, la duchesse d'Espares laissa son crucifix à Madame d'Agen : elle avait écrit dans son testament : Il m'a consolé ! ( Méraut, enseignement de la Religion. )

Sainte Marguerite d'Ecosse, touchant à ses derniers moments, se fit apporter la croix noire ; c'était une croix qu'elle avait en grande vénération. Comme on ne pouvait la retirer facilement de son étui , « ah malheureuse ! s'écriait - elle en gémissant , je n'aurai pas le bonheur de voir encore la sainte croix ! » Enfin on la lui présenta; elle la reçut avec vénération, la serra contre son cœur, et, après l'avoir couverte de baisers, elle en signa son front et ses yeux. Déjà son corps était glacé, et son cœur palpitait encore d'amour , et sa bouche ne cessait de réciter le miserere , tandis que de ses deux mains elle tenait la croix devant ses yeux. Tout-à- coup son fils arrive de la funeste bataille. Marguerite ramassant tout ce qui lui reste de forces , lui demande des nouvelles de son père. Mais le bon fils ne répond que par des paroles pleines d'embarras et d'hésitation. « Au nom de cette sainte croix , lui dit l'héroïne mourante, je t'adjure de dire la vérité ! » Lorsque le fils eut révélé le fatal secret, Marguerite remercia avec effusion le Seigneur de la mort de son mari , et mourut elle-même , en invoquant le Christ qui a vivifié le monde par sa mort. On l'inhuma en face de l'autel, et l'on plaça sur sa tombe le signe auguste de la croix qu'elle avait fait préparer. ( Bolland., 3» tom. de juin, p. 333 et 334. )


DES TROIS VERTUS THÉOLOGALES.

D. Quelles sont les trois vertus théologales? — R. Ce sont la foi , l'espérance et la charité.

Instruction. Ces trois vertus sont appelées théologales, parce qu'elles ont Dieu pour objet immédiat. Ainsi , c'est Dieu que nous croyons en toute matière de foi ; c'est en lui
que nous espérons la grâce et la gloire ; c'est lui seul que nous aimons par-dessus toutes choses. Ces trois vertus sont infuses dans nos âmes par le baptême , et sont absolument
nécessaires pour notre saint. Elles élèvent et perfectionnent ainsi l'édifice de la vie spirituelle qui est fondé sur la foi , soutenu par l'espérance et couronné par la charité. Elles sont les clefs pour entrer dans la vie éternelle : par la foi , nous considérons Dieu comme notre suprême félicité ; par l'espérance , nous sommes excités à tendre vers elle ; par la charité, nous parvenons à la posséder , en nous unissant à Dieu. Ces trois vertus commencent et achèvent toutes nos bonnes œuvres, qui sans elles ne sont d'aucune utilité pour le salut. Car sans la foi il est impossible de plaire à Dieu ou de diriger nos actions vers notre dernière fin ; sans l'espérance nous ne pouvons jamais être récompensés ; et nos meilleures actions, si nous n'avons la charité , ne méritent aucunement la vie éternelle. Ces trois grandes vertus doivent donc nous accompagner durant toute notre vie, et, lorsque nous serons parvenus à notre fin dernière , à la félicité, la foi et l'espérance cesseront réellement, tandis que la charité subsistera toujours pour être la vie de l'âme, la joie et la gloire des saints.

Exhortation.
Considérez, ô chrétien , quel progrès vous avez fait jusqu'à présent dans la perfection de ces vertus théologales. Avez-vous , par sa foi , fixé votre cœur en Dieu
comme votre suprême félicité ? Avez-vous, par l'espérance, placé votre confiance en lui, par-dessus tout ce qui existe? L' avez-vous, par la charité, aimé plus que toutes choses,
du moins jusqu'à lui donner l'amour de préférence sur toutes les créatures? Hélas !je crains que votre foi n'ait été bien faible, sinon morte, tant vous tombez fréquemment
et facilement dans le péché. Votre espérance aussi a été peu ferme, puisque les adversités vous font tomber si souvent dans l'impatience, les murmures et les plaintes. Votre charité a été froide, puisque vous êtes si négligent dans le service de Dieu, que vous devez honorer de toutes vos forces. Priez pour que ces trois vertus divines jettent de profondes racines dans votre cœur. Soyez plus zélé pour l'affaire de votre salut que vous ne l'avez été jusqu'ici, après avoir reçu du ciel tant de secours surnaturels, tant de, dons divins qui découlent immédiatement de Dieu lui-même.

HISTOIRES.

« Je ne puis assez louer les formules actuelles des vertus théologales qui expriment si bien les vertus et les choses concernant la foi, l'espérance et la charité, et qui sont d'une si grande utilité pour les fidèles. » ( Palavicini, Le Prêtre sanctifié. )


DE LA FOI.

D. Qu'est-ce que la Foi? — R. C'est un don de Dieu, une vertu surnaturelle infuse dans nos âmes, par laquelle nous croyons fermement toutes les choses que Dieu nous a révélées et que l'Église nous propose à croire.

Instruction. La Foi est la première vertu requise du chrétien, parce qu'elle est le fondement et le principe de la vie chrétienne : Sans la foi, il est impossible de plaire à Dieu. ( Hébreux, 11, 6. ) Sans elle tout le bien que nous faisons est sans effet pour le salut. Par la foi, nous posons la base de toute vertu véritable. Le juste vit de la foi. ( Romains, 1, 47.) Par la foi les justes ont vaincu des royaumes, fait des œuvres de justice, obtenu l'effet des promesses. (Hébreux, 11, 33.) La foi est un libre don de Dieu; il nous le donne gratis, sans que nous l'ayons mérité. Il nous a été mérité par la mort et la passion du Christ. Au baptême il est infus dans nos cœurs avec d'autres vertus et d'autres dons de la grâce.

Il s'y accroît et s'y perfectionne par les pieuses lectures et les instructions spirituelles : la foi vient par l'ouïe, et l'on entend par la parole du Christ. (Romains, 10, 17.) Regardez ce que vous entendez maintenant, comme si cela venait immédiatement de Dieu , pour perfectionner et éclairer votre foi. La foi est comme une lumière pour l'âme. De même
qu'on ne peut voir le soleil sans la lumière du soleil , de même on ne peut voir Dieu ou les choses surnaturelles sans la lumière de la foi qui, procède de Dieu. Comme les yeux
sont nécessaires pourvoir la lumière, et comme les aveugles sont dans les ténèbres relativement à tous les objets de ce monde , ainsi la lumière intérieure de la foi est nécessaire pour voir la vérité des choses divines, et sans elle l'homme demeure dans les ténèbres pour tout ce qui regarde l'autre monde. C'est donc une grande grâce que la foi divine!

Exhortation. Remerciez Dieu chaque jour, ô chrétien ! de vous avoir retiré des ténèbres de l'ignorance , de l'aveuglement de l'erreur et de l'infidélité, et de vous avoir appelé à son admirable lumière, la lumière de la foi. (1 Pierre, 2 , 9. ) Faites un bon usage de ce don éminent de Dieu. Songez que c'est par cette divine lumière que vous évitez le mal et faites le bien ; considérez à l'aide de la foi l'énormité du péché et le bonheur de la vertu. Ce qui cause la réprobation d'un grand nombre , c'est qu'ils ferment leurs yeux à cette divine lumière. Ils la méprisent et la rejettent : Ils ont préféré les ténèbres à la lumière , c'est pourquoi leurs œuvres sont mauvaises. ( Jean, 3, 9. ) Considérez ensuite, au flambeau de la foi, l'immensité de Dieu et adorez-le ; songez à sa bonté et aimez-le; réfléchissez à sa miséricorde et invoquez-le; contemplez sa puissance et craignez-le ; mesurez la durée sans fin de l'éternité et assurez votre avenir par une bonne vie ; voyez la vanité des créatures et méprisez-les ; méditez sur les joies du ciel et les tourments de l'enfer ; aspirez à celles-là et mettez tout en œuvre pour éviter ceux-ci : Votre parole, Seigneur, est une lumière pour mes pas. (Psaume. 118, 105. )

Histoires.

Saint Grégoire Thaumaturge doit ce nom aux miracles opérés par la vivacité de sa foi. C'est par la foi qu'il obtient une connaissance parfaite des mystères de la religion ; c'est par la foi qu'il chasse les démons d'un temple où depuis longtemps ils rendaient leurs oracles ; c'est par la foi qu'il ordonne à un énorme rocher de passer d'un endroit à un autre, et convertit un prêtre des idoles qui s'attache, comme disciple , à l'illustre Thaumaturge. (St. Grégoire de Nysse, Vie de saint Grégoire Thaumaturge, etc.)

Fort de sa foi , saint Martin s'offrait d'affronter seul , armé du signe de la croix , les bataillons ennemis , et bravait le glaive qu'un brigand tenait suspendu sur sa tête. Le saint Évêque de Tours avait déjà renversé bien des idoles , bien des temples , bien des arbres sacrés. Un jour qu'il voulait couper un pin, à quelques pas d'un temple renversé par ses ordres , les païens n'y consentirent qu'à la condition qu'il resterait immobile du côté où l'arbre menaçait de tomber. Saint Martin l'accepta. Déjà la foule accourue au spectacle le croyait écrasé sous le poids du pin penché sur sa tête , lorsque , par le signe de la croix , expression de sa foi ,l'homme de Dieu le repoussa et le fit tomber du côté opposé. Un grand cri s'éleva dans les airs et une foule d'idolâtres embrassèrent la foi de J.-C. (Sulpice Sévère, Vie de saint Martin.)

Faut-il nous étonner que Théodose-le-Grand, sur son lit de mort, ait si instamment exhorté ses deux fils, Arcade et Honorius, à ne rien omettre pour conserver pure et intacte la doctrine de la foi et de la piété, « s'est le seul, c'est l'unique moyen, disait-il, d'assurer la paix , de triompher à la guerre, d'élever des trophées, d'obtenir le bonheur pour soi , et pour l'état la prospérité. » (Nicéphore, Hist. Ecclésiast. liv. 1. ch. H.)

Voyez les prodiges de zèle, de dévouement, de patience héroïque, etc. enfantés par la foi, au rapport du grand Apôtre. (Hébreux, chap. 11.)


DES QUALITÉS D'UNE FOI ORTHODOXE ET FÉCONDE.

D. Quelles sont les qualités requises pour une foi par faite ?

R. I. La foi doit être ferme ; II. Elle doit être entière ; III. Elle doit être agissante.

Instruction. 1. Notre foi doit être ferme. Vous ne devez avoir ni doute ni hésitation sur aucun des points qu'elle renferme ; car vous vous reposez à l'égard de sa vérité sur Dieu et son Église. II est votre autorité; et, comme il est la vérité elle-même, il ne peut ni vous tromper ni se tromper. Votre foi doit être si ferme et si constante que rien ne puisse la diminuer ni l'affaiblir : ni les richesses, ni les honneurs, ni les plaisirs, ni la prospérité. Rien ne doit l'ébranler : ni les orages des afflictions , des tentations , des tribulations , ni la persécution des hommes. Nous devons toujours persévérer dans une foi ferme, et nous y maintenir résolument malgré tous les dangers, même en face de la mort.

2. Votre foi doit être entière. Vous devez croire en général et en particulier tous les articles , tous les points que l'Église catholique vous oblige à croire. En vous opiniâtrant dans l'erreur , en niant un seul article de votre foi , vous détruisez cette foi tout entière; vous préférez votre volonté propre à la volonté et à l'autorité de Dieu. De même que la charité est détruite par un seul péché mortel, ainsi la foi est anéantie par un seul acte d'infidélité. Car, selon saint Jacques , celui qui viole la loi en un seul point est coupable comme l'ayant violée tout entière. (Jacques, 2, 10.)

3. Votre foi doit être agissante. Votre conduite doit être conforme à votre croyance; et vous devez joindre les bonnes œuvres à la foi. La foi sans les bonnes œuvres est une foi morte, et, au dernier jour, elle tournera à votre confusion. Dieu alors n'examinera pas seulement comment vous avez cru, mais encore comment vous avez vécu. De même que le corps sans l'âme n'est qu'un cadavre, la foi est morte, sans la charité et les bonnes-œuvres : Quand même votre foi serait assez forte pour transporter les montagnes , sans la charité elle n'est rien. ( 1 Corinthiens , 13 , 2. )

Exhortation. Examinez votre vie passée et voyez jusqu'à quel point vous avez correspondu au don de la foi. Vous êtes-vous soumis en général et en particulier à toutes les vérités qu'elle enseigne ? Êtes-vous resté ferme dans cette foi , malgré toutes les épreuves ? Le respect humain n'a-t-il pas entravé votre marche, ou ne vous a-t-il pas empêché plus d'une fois de professer votre foi ? Avez-vous été fidèle à la pratiquer ? Il n'en est que trop, hélas ! qui la trahissent et qui ne sont chrétiens que de nom ! Si vous êtes de ce nombre , repentez-vous et réformez votre vie. Que la lumière de la foi ne brille pas en vain sur vous , mais qu'elle vous porte, au contraire, à toutes les bonnes œuvres, et alors le règne de la vertu s'établira en vous :  Ne recevez pas en vain la grâce de Dieu, cette grâce ineffable de la foi divine, cette unique lumière qui vous conduit sûrement à travers les ténèbres de ce monde, à la claire vue et à la possession de Dieu.

HISTOIRES.

L'empereur Valens, soit par lui, soit par les siens, avait tout mis en œuvre pour amener saint Basile à l'arianisme. « Pourquoi n'êtes-vous pas de la religion de l'empereur, lui dit le préfet? — C'est parce que sa religion n'est pas celle que Dieu a établie. — Réfléchissez-y bien. — Je serai demain ce que je suis aujourd'hui : créature, je n'adorerai point une créature comme mon Dieu. Je ne suis, je ne serai jamais de votre parti, parce que jamais je ne foulerai aux pieds ma foi au vrai Dieu, pour complaire aux hommes. La confiscation, l'exil les tortures, la mort, dont vous me menacez, tout cela ne m'effraie point. La confiscation m'enlèvera quelques haillons, quelques cilices, quelques livres, voilà tout; l'exil ne peut m'atteindre , moi qui ne suis en ce monde qu'un voyageur aspirant à une autre région; aux premières tortures, ce corps épuisé succombera. » A ces paroles, le préfet resta consterné; puis, descendant de son tribunal, il alla dire à l'empereur : « Seigneur, nous sommes vaincus! Les promesses, les menaces, tout est impuissant sur Basile. (Nicéph., Hist. ecclés, chap. 18.)

C'est la fermeté d'une foi entière et agissante, qui a inspiré à Joseph la fuite du péché ; à Tobie, une fidélité précoce au service du Seigneur; aux trois enfants de la fournaise, le refus d'adorer la statue de Nabuchodonosor ; à Daniel, le courage qui lui mérita d'échapper aux lions ; aux Machabées, le mépris des souffrances et de la vie ; aux Mages , cette prompte visite à l'enfant de Bethléem ; à Pierre, cette belle confession : Vous êtes le Christ, fils du Dieu vivant, etc.


DE LA TRADITION.

D. Suffit-il de croire à l'Écriture seulement ?

R. Non; nous devons encore croire aux traditions de l'Église. —

D. Quelles sont ces traditions ? —

R. Ces traditions concernent des points de foi et de discipline, que les apôtres n'ont pas consignés par écrit, mais qu'ils ont seulement prêché et enseignés de vive voix, et que l'Église a soigneusement transmis de bouche en bouche à travers les âges jusqu'à nous.

Instruction. Ce n'est pas assez de croire à l'Écriture seulement, nous devons encore accepter les traditions universelles de l'Église. Car comment savons-nous que la Bible
est la parole de Dieu écrite ? par la tradition. La tradition est donc le fondement nécessaire de notre foi aussi bien que l'Écriture. Comment savons-nous que le Symbole vient des apôtres ? l'Écriture n'en dit rien, mais nous l'apprenons de la tradition. Comment savons-nous que le sabbat a été changé par les apôtres et transféré du samedi au dimanche ? par la tradition . Comment savons-nous que l'on doit baptiser les enfants , sinon par la tradition ? Avant Moïse, l'Écriture n'existait nullement. Depuis le commencement du monde jusqu'à lui, la religion a été transmise par les patriarches à leurs familles au moyen de la tradition.

Et après Jésus-Christ, l'Église a subsisté un temps considérable avant qu'aucune partie du Nouveau-Testament fût écrite. Sa doctrine était alors conservée par la tradition seule. Et le Christ n'a point dit à ses apôtres : Allez par toute la terre et écrivez, mais : Allez et enseignez toutes les nations. Ils l'ont fait par la parole, par la prédication, et ainsi le monde a reçu la foi du Christ par la tradition seule. Comment l'aurait-il autrement reçue avant que les Écritures existassent, ou avant que l'imprimerie fût inventée, et quand un si petit nombre savait lire ou écrire ? Et où trouve-t-on dans l'Écriture que nous ne sommes obligés de croire que ce qu'elle renferme ?

Exhortation. Témoignez donc, ô chrétien, le respect et la vénération qui est due aux traditions des apôtres et de l'antiquité ecclésiastique. La parole de Dieu est toujours
la parole de Dieu ; elle est également vraie , qu'elle nous vienne par la bouche de l'Église ou par l'Écriture. Écoutez cette exhortation de l'Apôtre : Demeurez fermes, et gardez les traditions que vous avez apprises , soit par notre parole soit par notre lettre. (II Thessaloniciens, 2, 14.) On ne peut douter que les traditions dont il parle ici , n'aient été
fidèlement conservées jusqu'à nous par l'Église. Soumettez donc votre jugement à toutes et à chacune d'elles , et suivez-les selon l'esprit de l'Église. Saint Augustin déclare que c'est une folie de repousser les traditions, pour suivre le sens privé et des opinions personnelles. Préservez-vous d'un tel égarement. Ne rejetez pas ce qui a été universellement reçu et ne peut être désapprouvé. Ces traditions vous sont recommandées et affirmées par l'autorité de la même Église qui vous a enseigné les Écritures et le christianisme.


HISTOIRES.

L'apôtre saint Jean étant en exil, rendit la vue à un enfant. A ce miracle, hommes, femmes, Juifs, Grecs, tous accoururent. Saint Jean leur adressa la parole, et en finissant il leur dit : « Mes petits enfants, rappelez-vous mes paroles, et gardez les traditions que vous avez reçues de ma bouche, afin que vous soyez des enfants d'obéissance et que le Christ règne en vous. » (Prochor, discip. de J.-C, sa vie, chap. 47.)

Saint Antoine allait quitter ce monde pour la céleste patrie , lorsque, mandant près de lui ses chers disciples, il les prémunit contre le schisme et l'hérésie. Pour cela il ne trouva rien de mieux à leur recommander que la fidélité aux traditions de la sainte Église. « Gardez la vraie foi en Jésus-Christ, et les religieuses traditions des pères, que ma faiblesse, vous a enseignées dans mes fréquentes exhortations. » (S. Athanase, Vie de saint Antoine.)

Jérémie recommande la tradition, lorsqu'il loue la fidélité des Réchabites aux préceptes de leur père (Jérémie 35) ; Moïse, lorsqu'il renvoie les Juifs à leurs ancêtres et aux jours anciens (Deutéronome 32, 7 ) ; David , lorsqu'il s'écrie : Dieu ! nous avons entendu de nos oreilles : nos pères nous ont annoncé l'œuvre que vous avez accomplie en leurs jours , aux jours anciens (Psaume 43, 1 )


Dernière édition par MichelT le Ven 1 Sep 2017 - 19:36, édité 4 fois

MichelT

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mar 18 Oct 2016 - 19:57

DU SYMBOLE DES APOTRES.

D. Qu'est-ce que le symbole? — R. C'est le sommaire de notre croyance. — D. Par qui le symbole a-t-il été composé ?

— R. Par les douze apôtres. — D. Que renferme-t-il ? —

R. Les principales choses que nous sommes obligés de croire de la part de Dieu et de son Église.

Instruction. Le symbole a été composé par les douze apôtres avant leur séparation pour aller prêcher l'Évangile à toutes les nations, comme un moyen de réunir tous les fidèles dans une seule et même croyance. On nous l'a enseigné dès notre enfance, et nous devons le répéter souvent pour nous confirmer dans notre foi à la sainte Trinité, à l'Incarnation , à la mort et aux autres mystères de notre Sauveur. Tout chrétien doit s'appliquer à le comprendre, autant que sa capacité le lui permet, et les pasteurs sont tenus à ne rien épargner pour en expliquer la doctrine et l'inculquer à l'esprit du peuple.

Les douze apôtres ont établi notre foi. Ils l'ont reçue du Christ, l'ont propagée dans toutes nations et l'ont confirmée au prix de leur sang. La conversion du monde, ainsi commencée par eux, a été continuée par les autres hommes apostoliques qui leur ont succédé. Dans l'élection des apôtres, fondateurs de notre foi, Dieu a fait éclater sa puissance infinie , en choisissant quelques pêcheurs illettrés pour confondre l'orgueil et la sagesse du monde , et pour le convertir en grande partie à la foi du Christ ; et cela dans un court espace de temps , sans le secours du pouvoir, des armes ni de l'éloquence, mais seulement par la prédication et les miracles.

Persuader à un monde corrompu de croire des choses qui paraissent aussi incompréhensibles à la raison que la passion, la mort et la résurrection de Jésus ; aussi contraires à la nature que le renoncement de nous-mêmes, la mortification de nos passions et la pénitence, c'est une chose qui ne peut être que l'œuvre d'une infinie sagesse, d'une puissance mystérieuse. Les gouvernements des rois et des conquérants de la terre ont leurs limites ; mais la foi de Jésus-Christ s'est propagée dans toutes les parties du monde connu : c'est une œuvre incomparable, c'est l'œuvre de Dieu seul. La sagesse des anciens philosophes était grande; mais plus grande encore fut celle des apôtres. La première était resserrée dans les bornes de l'entendement humain, des choses naturelles et des besoins de cette vie ; mais l'autre embrasse la science divine, les connaissances surnaturelles et les moyens d'assurer à notre âme la vie éternelle. Il n'est pas un article du symbole des apôtres qui n'ait été attaqué de temps en temps par les ennemis de notre foi ; et cependant ni la puissance de l'homme, ni celle de l`ange déchu, n'ont été capables de l'ébranler, encore moins de la détruire. Cela manifeste de plus en plus la protection de la providence de Dieu sur son Église, et c'est ainsi que s'est vérifiée cette promesse de l'éternelle vérité : Les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. (Matthieu 16, 18.)

Exhortation. Apprenez, ô chrétien, à vénérer la mémoire des douze apôtres et de tous les autres hommes apostoliques à qui , après Dieu , vous êtes redevable de votre foi. Rendez sans cesse grâces au Seigneur de ce qu'il vous a uni à la sainte Église catholique. Répétez souvent votre symbole, car il est le bouclier de votre foi, votre armure et votre rempart contre Satan et contre ses œuvres. Répétez le avec une foi ferme et une vive espérance, de manière qu'il vous fasse progresser dans la connaissance et l'amour de Dieu - c'est pourquoi il convient que celui qui approche de Dieu croie qu'il est notre créateur , notre rédempteur , notre sanctificateur, notre dernière fin, comme le symbole nous l'enseigne. Pratiquez ce que vous croyez; car les bonnes œuvres sans la foi ne vous serviront de rien.

Quel avantage tireriez-vous de croire en Dieu, sans l'aimer, sans le craindre, ni le servir? de croire en Jésus-Christ, sans suivre sa doctrine , ni régler votre vie sur ses enseignements ? de croire au Saint-Esprit, sans recevoir sa grâce vivifiante et sans garder votre cœur pur de péché ?

A quoi vous servirait-il de croire à la sainte Église catholique , si vous ne suivez pas sa doctrine, ses préceptes , ses commandements ? inutile de croire à la communion des saints, si vous ne vous rendez digne de leur intercession maintenant et de la participation à leur gloire dans l'autre vie. Inutile de croire à la Résurrection et à la vie future , si vous n'assurez votre éternité , pendant que vous en avez le temps , en pratiquant toutes les vertus, en évitant le péché, en gardant la pureté de conscience.

Glorifiez Dieu pour l'œuvre admirable de votre vocation et la conversion de tous les peuples; adorez en cela sa puissance, sa sagesse, sa bonté , sa providence. Dieu est admirable dans toutes ses voies, admirable dans ses saints, admirable dans toutes ses œuvres !

HISTOIRES.

Soit en vous levant, soit en vous couchant, n'oubliez pas de réciter chaque jour le symbole de votre foi, nous dit saint Augustin. Ne vous habillez-vous pas tous les jours? Hé bien! la prière de votre profession de foi, c'est le vêtement de votre âme ; qu'elle n'en soit jamais dépourvue. Ne dites pas : je l'ai récité hier, avant-hier, tous les jours je le répète, je le sais. Mais y êtes-vous bien fidèle? Lisez dans le symbole, comme dans un miroir, votre devoir de chaque jour, et votre symbole sera pour vous un guide et une consolation. (S. Augustin, passim 1 dit symbole.)


ARTICLE I. — SECTION I.

Le premier article du symbole.

D. Quel est le premier article du symbole ?

R. Je crois en Dieu le Père tout -puissant , créateur du ciel et de la terre.

Instruction. La première chose que nous sommes obligés de croire, c'est, l'existence de Dieu qui nous a créés, nous et tout l'univers. Que Dieu existe, la nature elle-même l'enseigne, les païens le confessent, et l'Écriture nous dit qu'on ne peut le nier à moins d'être insensé. Qu'il y ait un être suprême, c'est une vérité gravée dans le cœur de tous les hommes : 0 Dieu, la lumière de votre visage est marquée sur nous. ( Psaume 4, 7. ) Toutes les créatures rendent le témoignage qu'elles ne se sont pas faites elles-mêmes; qu'elles ont toutes un commencement, un premier principe , une première cause qui est Dieu. Pour nous convaincre qu'il y a un Dieu, saint Paul nous renvoie à ses œuvres : Les choses invisibles de Dieu, dit-il, se manifestent et sont connues par les choses visibles qu'il a faites. ( Romains 1, 20. ) L'insensé a dit dans son cœur: Il n'y a pas de Dieu (Psaume 13, 1 ); il le croirait volontiers si le remords, suite du péché, et la paix de la conscience, fruit de la vertu, ne prouvaient l'existence d'un Dieu, qui récompense le bien et punit le mal.

Nous croyons que Dieu est un. C'est l'enseignement de Moïse et des prophètes contre les idolâtres qui adoraient plusieurs dieux. Les philosophes païens eux-mêmes, quand ils parlent sérieusement , conviennent qu'il ne peut y avoir qu'un Dieu suprême. La raison suffit à démontrer l'unité de Dieu, puisqu'il est impossible qu'un être souverainement parfait , comme est Dieu , qu'un être infiniment bon et qui possède toutes les perfections possibles, ait pour compagnon un autre Dieu, infini comme lui. De même, en effet , que la souveraine perfection suppose la supériorité sur tous les autres êtres, et qu'un monarque absolu n'a pas d'égal dans son royaume, mais seulement des inférieurs, de même Dieu, souverain Seigneur de toutes choses , est au-dessus de tout et ne peut conséquemment avoir d'égal.

Nous croyons qu'il y a en Dieu trois personnes : le Père , le Fils et le Saint-Esprit , qui ont une seule et même nature, une seule et même essence. Il y en a trois qui rendent témoignage dans le ciel, le Père, le Verbe et le Saint-Esprit. ( 1 Jean, 5, 7.) Comme la trinité existe dans les personnes et l'unité dans la nature ou essence, il n'y a pas de contradiction dans ce mystère. Ce n'est pas dans le même sens et sous le même rapport que l'on dit trois et un , en appliquant ces nombres à Dieu : trois s'applique aux personnes ; un s'applique à l'essence. Dieu est un en divinité, en sagesse, en bonté, en volonté, en puissance et en opération extérieure. On voit une image de la trinité dans l'âme de l'homme qui est une et qui a cependant trois puissances : la volonté, la mémoire et l'intelligence. Il est vrai que toute comparaison est défectueuse, parce qu'il ne peut y avoir exacte ressemblance et parfaite proportion entre une créature et la Sainte-Trinité.

Ces mots Je crois en Dieu impliquent trois choses : 1° qu'il y a un Dieu ; 2° que tout ce qu'il a révélé est vrai et doit être cru d'une foi divine ; 3° que nous devons mettre notre espérance en lui, l'aimer par-dessus toute chose et le regarder comme notre bien par excellence, comme le seul bien essentiel.

Exhortation. L'insensé a dit dans son cœur: Dieu n'existe pas ; et ils sont devenus corrompus et abominables. ( Psaume 13, 1.) La croyance en Dieu conduit à la vertu, à la religion, à la sainteté, mais la négation de Dieu, mais l'athéisme est la source de toute perversité et de tout péché. Ainsi , dans un royaume , où le peuple vient à s'apercevoir qu'il n'y a ni roi, ni juge, ni justice, il ne met bientôt plus de bornes à ses crimes. Pour vous, ô chrétien, qui croyez à l'existence d'un Dieu, votre souverain Seigneur et maître de toutes choses , prosternez-vous , adorez-le , reconnaissez qu'il est le roi de votre cœur, en l'aimant , en le craignant, en lui obéissant. Faites-le régner sur votre vie et vos actions, en n'agissant que pour sa gloire. Soumettez-vous à tout ce qu'il vous a révélé et enseigné, soit par ses prophètes et ses apôtres, soit par son Église. Dans les événements de votre vie, ne cessez jamais d'espérer en lui. Aimez-le comme votre premier principe et votre dernière fin. Renoncez à tous les faux biens , ces idoles que vos passions adorent : l'idole de l'orgueil, l'idole de la cupidité, l'idole de la luxure, etc. Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et ne serviras que lui seul. (Deutéronome 6 , 13.)  

Rendez tout honneur et toute gloire à la très-sainte Trinité, qui est un seul Dieu en trois personnes. Glorifiez Dieu le Père à cause de votre création ; Dieu le Fils à cause de votre rédemption ; Dieu le Saint-Esprit , à cause de votre sanctification ; trois personnes qui, réellement distinctes, sont cependant un seul et même Dieu. Comme il est votre premier principe , tâchez qu'il soit votre dernière fin ; glorifiez-le maintenant pour le glorifier dans toute l'éternité : Saint, Saint, Saint est le Seigneur le Dieu des armées !

HISTOIRES.

Il y a un Bien. — L'ordre admirable de l'univers suffit pour nous convaincre de l'existence de Dieu. Un homme d'esprit, bien que gâté par l'impiété, se trouvant dans une société de philosophes, qui, à force de faire de l'irréligion, finissaient par dire qu'il n'y a point de Dieu, garda le silence quelque temps. On se tourna vers lui comme pour lui dire : Qu'en pensez-vous? Dans ce moment l'horloge sonna onze heures. L'habile philosophe, la montrant du doigt, improvisa ces deux vers : «Pour ma part plus j'y pense et moins je puis songer,» Que cette horloge existe et n'ait point d'horloger. » On se regarda, on fit semblant de croire qu'il était tard, et on se retira tout honteux. (Récompenses hebdomadaires, n 1, p. 7.)

A la suite d'une crise qui devenait menaçante pour sa vie, un illustre moribond parut s'éveiller comme pour dire d'une voix solennelle : Je meurs chrétien, je meurs catholique, je crois en Dieu le Père, je crois en Dieu le Fils, je crois en Dieu le Saint-Esprit. Cet homme, et c'était Le Sueur, membre de l'Institut et compositeur célèbre, savait bien que la première condition pour être chrétien et catholique, c'est de croire en la sainte Trinité. Aussi reçut-il les sacrements avec une grande édification. (L'Univers, 10 octobre 1837.)

SECTION II.

Des attributs de Dieu.

D. Quelles sont les perfections ou attributs de Dieu?

R. Dieu étant infini , ses perfections sont également infinies.

Instruction. I. Dieu est l'être infini, dont les perfections n'ont pas de bornes , et c'est de lui que tous les êtres reçoivent leur existence et leurs perfections.

II. Dieu est éternel, car il existe par lui-même; c'est-à-dire aucune cause ne lui a donné l'existence ; il existe parce que c'est sa nature et son essence d'exister toujours. De même qu'il n'a pas de commencement, il ne peut avoir de fin et son éternité embrasse toutes les parties du temps. Pour lui, le passé et le futur sont comme le présent ; il n'y a pour lui ni choses passées ni choses futures, mais tout est présent.

III. Dieu est incompréhensible. Il est si grand que nul , excepté lui, ne peut comprendre pleinement ce qu'il est. Bien que les saints le contemplent tel qu'il est, bien qu'ils le voient clairement et le possèdent, il surpasse encore leur compréhension, parce que leur intelligence est limitée, et que ses perfections sont infinies. Si profonde que soit la contemplation de la grandeur divine, elle leur découvrira éternellement de nouveaux aspects, de nouvelles connaissances ; et c'est pourquoi ils se réjouissent sans mesure de ce que Dieu est encore plus grand qu'ils ne le peuvent concevoir.

IV. Dieu est immense. Il est impossible d'imaginer aucun lieu, aucun point où il ne soit pas tout entier, par son essence, par sa présence, par sa puissance. Il est en tous lieux par son essence ; il donne l'être à tout ce qui existe, la vie à tout ce qui est vivant, le mouvement à tout ce qui se meut : En lui , dit saint Paul , nous avons la vie , le mouvement et l'être. ( Actes., 17, 28.) — Il est en tous lieux par sa présence ; il voit toutes les actions bonnes ou mauvaises. Il est présent partout par sa puissance , attendu que toutes choses dépendent de lui et qu'il est l'auteur de tous les êtres. Ainsi Dieu par son immensité remplit le ciel, la terre et tous les lieux. Où irai-je pour échapper à votre esprit ? Et par où fuir votre face ? Si je monte au ciel , vous y êtes, si je descends aux enfers vous y êtes encore. (Psaume 138, 7, 8.)

V. Dieu est immuable. Toutes les choses créées peuvent changer, c'est dans leur nature. Dieu seul est éternellement le même, toujours sage, toujours bon, toujours juste, toujours saint. Il est impossible qu'il devienne jamais sous quelque rapport inférieur à lui-même : car alors il cesserait d'être Dieu. Il est impossible qu'il se transforme en restant égal à lui-même ; car il n'y a rien qui l'égale. Et il ne peut devenir supérieur à lui-même , puisqu'il excelle en toute perfection : Pour vous , Seigneur, vous êtes toujours le même , et votre durée ne défaille point. ( Psaume 101, 28.)

VI. Dieu est tout-puissant. Sa toute-puissance éclate dans la création des cieux et de la terre. Il pourrait augmenter indéfiniment le nombre et la grandeur des créatures, et cela par son seul pouvoir, sans le secours d'aucune cause secondaire. Nous n'avons vu qu'une petite partie de ses œuvres, dit l'Écriture, (Ecclésiastique, 43 , 36) ; c'est-à-dire un petit nombre par comparaison avec ce qu'il peut faire ou avec ce qui nous échappe dans les merveilles de l'univers. Comme il a fait toutes choses par sa puissance , il peut aussi changer et modifier à son gré les œuvres de ses mains : car, dit encore l'Écriture, le Tout-Puissant est au-dessus de ses ouvrages. (Ibid. 30.) Par sa puissance il a arrêté le soleil, au temps de Josué ; il l'a fait retourner en arrière, sous le règne d'Ezéchias. Il fait ce qui lui plaît dans les cieux, sur la terre et sur les mers , comme le prouve l'histoire de Moïse ; il exerce son empire sur toutes les créatures, comme le montre la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ : c'est pourquoi nous ne devons conserver aucun doute sur tout ce qu'il a révélé, ni sur les miracles et les prodiges qu'il a opérés. Mais bien que Dieu soit tout-puissant et qu'il n'y ait rien d'impossible pour lui, nous avons une entière certitude qu'il ne peut faire ce qui est mal et criminel ; car cela suppose l'imperfection , et Dieu est infiniment parfait.

VII. Dieu est omniscient, il sait tout. Il connaît toutes choses.  Il se connaît lui-même, par une pleine compréhension de son être infini et il embrasse l'étendue sans borne de sa toute-puissance. Ayant tout créé par son propre pouvoir, il a une idée parfaite de la nature de chacun de ses ouvrages et il les comprend infiniment mieux que l'artiste ne connaît la disposition des œuvres qui sont le produit de sa propre invention. La science des hommes et des anges est limitée ; la science de Dieu est sans limite. Il est la source de la science. Toutes nos connaissances nous viennent de Dieu et par Dieu. De sa sagesse procèdent originairement toutes les bonnes et admirables inventions, et toutes les sciences qui aient jamais existé dans ce monde : car le Seigneur est le Dieu des sciences, dit l'Écriture. ( 1 Rois, 2,3.) Il connaît toutes les choses passées , les bonnes et les mauvaises actions de chacun de nous ; il se souvient du mal pour le punir, du bien pour le récompenser. Il sait tout ce que chaque individu fait actuellement d'un bout du monde à l'autre ; il démêle toutes les intrigues de leurs cœurs et voit comment elles finiront. Il prévoit toutes les choses futures, ce que chacun fera librement en bien ou en mal, et quelle sera la fin de tout. Et sa science embrasse non-seulement le temps mais l'éternité : Seigneur, vous avez longtemps d'avance pénétré mes pensées. (Psaume 138, 2.)

VIII. Dieu est bon et bienfaisant. La bonté consiste à vouloir communiquer aux autres le bien que l'on possède. C'est ce que Dieu a fait pour tous les êtres qu'il a tirés du néant. Mais sa bonté pour l'homme est du caractère le plus élevé; car, ayant aimé l'homme en vue de lui procurer le bonheur éternel, il lui a prodigué les dons les plus excellents , soit dans l'ordre de la nature, soit dans l'ordre de la grâce. Ainsi sa bonté par rapport à l'homme est charité ou amitié. Dieu est charité, dit l'Écriture. (1 Jean, 4, 3. ) — Car, comme un ami souhaite à son ami la vie et l'existence , ainsi Dieu nous a donné l'existence et la vie ; et à la fin il se donnera lui-même à nous avec tous les biens qu'il possède ; et il veut que nous jouissions de ce bonheur éternellement. De plus , sa bonté s'étend à tout ; il offre sa grâce à chacun de nous ; dans la profondeur de sa sagesse et de sa puissance il tire le bien du mal que les uns ont voulu faire aux autres.

IX. Dieu est miséricordieux. Il considère les misères spirituelles auxquelles nous sommes exposés dans cette vie et dans l'autre ; et comme elles sont opposées au bien et au bonheur qu'il nous a destinés , il les prévient, ou nous délivre de celles que nous éprouvons, soit par notre faute soit par la malice des autres : voilà en quoi consiste sa miséricorde. Il l'a manifesté sans mesure dans tout ce qu'il a fait pour l'homme : en le créant dans la grâce , avec le pouvoir d'arriver à la vie éternelle : en le rachetant de l'enfer, par l'incarnation et la mort de son Fils unique, après que le péché l'eut privé de ses droits au ciel ; en le délivrant du malheureux état du péché par la grâce sanctifiante de l'Esprit-Saint, alors qu'il en était le plus indigne. Ce que vous êtes , ce que vous avez , ce que vous espérez , vous devez tout à sa miséricorde. Vous avez donc bien raison de dire: sa miséricorde est sur toutes ses œuvres.  Elle s'étend à la fois au corps et à l'âme , mais surtout à l'âme : en nous épargnant malgré le nombre et la gravité de nos fautes; en nous sollicitant au repentir aussitôt que nous avons péché; en nous attendant avec patience, et en ne nous refusant jamais le pardon, si nous sommes vraiment repentants ; en nous soulageant dans nos besoins, lorsque nous recourons à lui ; en nous inspirant de prier, quand nous oublions ce devoir ; enfin en nous accordant souvent des bienfaits sans que nous les ayons demandés. Les souffrances même de cette vie sont les effets de sa miséricorde; car par elles il se propose de nous retirer du péché et de nous rattacher à son amour. Disons donc avec le psalmiste : Je chanterai éternellement les miséricordes du Seigneur. (Psaume 88,.1 )

X. Dieu est juste et saint dans toutes ses œuvres : saint dans le ciel, saint sur la terre et saint même dans l'enfer. Il est juste envers les bons et envers les méchants; car il punit les uns et récompense les autres, selon leurs mérites, sans acception de personne. Il a fait autrefois éclater les vengeances de sa justice sur les méchants, dans un grand nombre d'événements racontés par les Écritures : sur les anges rebelles, sur Adam pécheur, sur la race humaine au déluge ; dans l'incendie de Sodome, dans les fléaux, les famines, les guerres , etc., qui ont ravagé la terre depuis le commencement. Mais les œuvres de sa miséricorde surpassent celles de sa justice : car vous devez observer que sa miséricorde marche la première, qu'il a mille fois par donné au pécheur et l'a prévenu de se convertir , avant de laisser un libre cours à sa justice. La miséricorde ensuite accompagne la justice et mitigé le châtiment qui est toujours moindre que la faute.  Enfin elle suit la justice, car lorsque celle-ci frappe le pécheur, c'est ordinairement dans un but de miséricorde. Dans l'autre monde, à la vérité, les pécheurs subiront en enfer une peine éternelle; car les crimes des hommes ont rendu cette punition nécessaire, attendu qu'il n'est pas d'autre frein capable de réprimer les méchants ; mais c'est encore une sollicitation de la miséricorde, qui s'adresse aux vivants dans le but d'en arrêter une multitude au bord de cet abîme, s'ils veulent assez réfléchir à ces avertissements divins.

Exhortation. Adorez Dieu, ô chrétien, dans tous ses attributs et divines perfections. Puisque vous croyez en un Dieu créateur de toutes choses, apprenez de lui à faire du bien aux créatures qui partagent avec vous l'existence, et qui sont comme vous l'œuvre de ses mains , soumises au même Seigneur, enfants du même Père, et appelées à la même fin. Puisque vous croyez en la sainte Trinité, un seul Dieu en trois personnes , soyez ferme dans votre foi au milieu de l'aveuglement et de l'infidélité de ces temps. Ne prétendez pas sonder le fond des mystères inaccessibles à l'intelligence humaine : Que les jugements de Dieu sont incompréhensibles , et ses voies impénétrables ! (Romains 11, 33.)

Mais plus incompréhensible encore son être en lui-même, plus inscrutable sa divinité ! Adorez-le comme l'être éternel et infini , l'être des êtres. Adorez-le comme présent partout, spécialement dans les églises où il manifeste sa présence par ses bienfaits, et dans le ciel où on le voit, non pas comme ici-bas à travers les voiles de la foi , mais dans sa gloire.  Réjouissez-vous d'avoir un Dieu dont la puissance et la sagesse sont infinies , qui peut combiner mille moyens pour vous sauver et vous délivrer de tous les maux; ne cessez jamais d'invoquer sa munificence et sa bonté infinies , dont vous avez reçu d'inappréciables bienfaits, soit en l'ordre de la nature soit en celui de la grâce : Vous ouvrez votre main, Seigneur, et vous remplissez de votre bénédiction tous les vivants (Psaume 144, 16. ), spécialement l'homme à qui vous vous donnez vous-même et tous les biens avec vous.

En retour, ô chrétien, Dieu vous demande de l'aimer par-dessus toutes choses; c'est le plus grand de ses commandements et ce qui vous importe essentiellement. Quelle envie alors devez-vous éprouver pour tous ces biens extérieurs, qui sollicitent les affections de votre cœur? Ce cœur, placez-le plutôt dans celui qui possède éminemment tout ce qu'il y a de bon dans ses créatures, et qui lui seul peut vous procurer tout le bonheur qui est en leur pouvoir, et même un bonheur infiniment plus grand. Adorez Dieu dans son immense miséricorde. Si vous avez de justes raisons de craindre sa justice, vous en avez plus encore d'espérer dans sa miséricorde. Redoutez sa justice afin de ne pas tomber dans l'excès de la présomption ; mais aussi confiez- vous dans sa miséricorde, afin de n'être pas découragé et terrifié outre mesure à la pensée de sa justice. Adorez-le même dans sa justice : que deviendraient tous les gens de bien, s'il n'y avait pas un Dieu équitable pour discerner la cause du juste de l'impie? Qui protégerait le pauvre, l'offensé, le persécuté, l'opprimé s'il n'y avait pas un Dieu juste pour appeler le méchant à son tribunal? Que deviendrait la vertu si la justice ne défendait pas ses droits ? La justice de Dieu est le soutien de tout ce qu'il y a de bon au ciel et sur la terre.

HISTOIRES.

Infinité. — Comment servez-vous Dieu, ne sachant pas que ce c'est que Dieu? disait-on à un bon chrétien. — Je sais ce que c'est que Dieu, répondit-il; car il a dit ce qu'il est. Il a dit : Je suis Celui qui suis, je suis le premier et le dernier, le commencement et la fin. Mais il est incompréhensible, parce qu'il est infini. Et comment l'esprit de l'homme qui est fini, embrasserait-il l'être des êtres? Une chambre quelconque pourrait-elle renfermer le soleil? (Catéchisme de l'empire.)

Éternité. — Pourquoi pleures-tu près de ton foyer, dit un jour saint Jean Climaque à un cuisinier. — Je pense, répondit-il, au feu éternel de l'enfer. Homme d'un jour, je ne puis allumer mon petit feu que pour quelques heures; mais Dieu, qui vit à jamais, peut en allumer un qui durera éternellement. — Pensons au feu de l'enfer et nous ne pécherons jamais. (Lohner, biblioth.)

Incompréhensibilité. — Par là même que Dieu est incompréhensible, il est plein de mystères et sa religion aussi. Faut-il s'en étonner, lorsque tout est mystère dans la nature et dans l'homme lui-même? — Un jeune enfant de douze à treize ans, voyageant en diligence, passa devant une église et se découvrit. « Tiens ! dit un avocat, je suis sûr que tu vas au Catéchisme ; voyons, qu'y as-tu appris? —

Monsieur, j'y ai appris les principaux mystères; » et sur une nouvelle question, l'enfant se mit à les énumérer, à les définir. « Comment ! dit le prétendu philosophe, tu crois cela ? Vois-tu, on ne doit croire que ce que l'on comprend. — Vous faites donc comme cela, Monsieur? — Oui, mon ami, et tous les gens d'esprit font de même. — Alors, Monsieur, dites-moi donc pourquoi votre petit doigt remue quand vous voulez le remuer? — Cela est tout simple, il remue, parce que je veux le remuer. — Cependant vos oreilles ne remuent pas quand vous le voulez. — Ah ça! petit garçon, tu es trop jeune pour me donner des leçons, laisse-moi tranquille. » C'est la réponse de ceux qui n'en ont pas ; le philosophe était battu par son petit doigt. (L'abbé Gridel, Soirées chrétiennes).

Immensité. — Où est Dieu, demandait un jour Fénelon à une petite fille de cinq à six ans? — Monseigneur, répondit-elle, que votre Grandeur me dise d'abord où il n'est pas, et je lui dirai où il est. (Cossart.)

Immutabilité. — Rien ne nous donne une plus belle ni une plus juste idée de l'immutabilité de Dieu que ce passage du roi-prophète : « Seigneur,, vous avez dès le commencement fondé la terre, et les cieux sont les ouvrages de vos mains. Ils périront, mais vous subsisterez toujours; ils vieilliront comme un vêtement, vous les changerez comme un habit dont on se couvre, et ils seront changés. Mais pour vous, vous êtes toujours le même , et vos années ne passeront point».(Psaume 101, 26, 27, 28)

Toute-puissance. — Clotaire , parvenu à la 50e année de son règne, réunissait sous son sceptre tous les pays de la monarchie mérovingienne. C'était un puissant roi. Mais tout-à-coup, au retour d'une partie de chasse, il se voit en proie à une fièvre brûlante. Sentant diminuer son courage avec ses forces, il se tourne vers ceux qui l'entouraient, et leur dit : « Qu'en pensez-vous? ne faut-il pas que le Roi du ciel soit bien puissant pour abattre ainsi les plus grands monarques du monde ? » (Baronius, t. 7 des Annales.)

Toute science de Dieu. — Une femme païenne allait commettre un grand crime, lorsqu'elle aperçut le portrait d'un homme renommé par sa vertu. Accablée de confusion et de honte, elle sortit aussitôt de la maison. Il lui avait semblé que ce personnage jetait sur elle un regard sévère et menaçant. — Hélas ! combien est plus terrible le regard de Celui qui sonde les plus secrètes pensées ! (Lohner, biblioth.)

Bonté de Dieu. — Une petite fille de cinq à six ans dit un jour à sa mère : « Maman, vous me dites tous les jours que le bon Dieu est bon , cependant il ne me donne jamais rien. — Eh quoi  répondit l'intelligente mère , n'est-ce pas Dieu qui fait croître les grains, les fleurs, les fruits? N'est-ce pas lui qui a créé les animaux, les poissons, les oiseaux ? » Elle poursuivit cette énumération, et montra sans peine que la bonté de Dieu est la source des innombrables bienfaits dont nous sommes comblés. (Cossart.)

Miséricorde. — Nul trait ne représente mieux la miséricorde de Dieu que l'histoire du Samaritain (Luc,10), la parabole du bon Pasteur (Luc, 15), ou, mieux encore, la touchante parabole de l'enfant prodigue. C'est le Dieu des miséricordes peint par lui-même. (Luc, 15.)

Justice, etc. —Valérien avait été le maître du monde : prisonnier de Sapor, roi des Perses, il devint le jouet de ses insolents caprices. Chargé de chaînes, mais toujours revêtu de la pourpre impériale, il suivait partout le vainqueur. Au premier signe de Sapor, Valérien tombait à genoux lorsque son maître montait à cheval, et se courbait pour servir de marchepied au roi des Perses. Cruel, mais aussi juste châtiment! Valérien avait persécuté les chrétiens! Valérien s'était baigné dans leur sang ! (Histoire ecclésiastique.)


Suite des attributs divins : la Providence.


Dieu gouverne par une providence universelle toutes ses créatures, mais surtout l'homme, sa créature privilégiée et pour le salut duquel il a principalement établi l'ordre de cette providence. S'il a créé le monde, quel autre que lui devait en prendre soin ? A quel autre a-t-il commis le gouvernement de la terre, ou qui a-t-il préposé au monde qu'il a créé? (Job, 34, 13. ) Sa toute-puissance nous a donné l'être et sa providence conserve tout ce qui existe. Il connaît en effet tous les besoins des êtres selon leur nature ; les moyens de les conduire à leur fin , les obstacles à ces moyens et la manière de les lever ; les misères auxquelles chacun est exposé , les moyens de nous délivrer du mal et d'assurer notre bien. Comme d'une part il veut mettre les créatures en possession du bien pour lequel il les a tirées du néant, et que, de l'autre, il peut exécuter sa volonté, sa providence veille suffisamment sur toute créature : elle entoure chaque individu et le monde entier.


La même providence qui règne là-haut sur les anges , s'étend sur la terre au plus vil insecte. 0 Père ! c'est votre providence qui gouverne. ( Sagesse, 14, 3. ) Mais les êtres doués de raison étant seuls capables du bonheur, vous comprenez pourquoi les yeux de la providence sont principalement fixés sur l'homme, et comment elle étend sa sollicitude sur le corps et sur l'âme, pour procurer notre bonheur dans le temps, mais surtout dans l'éternité. De là découlent les bénédictions spirituelles pour l'âme , et puis les bénédictions temporelles qui nous apportent les agréments de cette vie.

C'est encore la sollicitude de la divine providence qui souvent nous préserve des accidents malheureux, ou nous délivre de ceux dans lesquels nous sommes tombés. Ainsi tous doivent être assurés que , de la part de Dieu , rien ne peut leur manquer sous une providence qui prodigue ses soins à tous ceux qui, eux-mêmes, ne négligent pas leurs propres intérêts, temporels et éternels.


Exhortation. Adorez, glorifiez Dieu, ô chrétien, dans sa divine providence sur vous et sur toutes les créatures. Quel serait le sort du monde , si la providence n'existait pas? Que de bénédictions ne recevez-vous pas chaque jour de sa main? Que de malheurs ne détourne-t-elle pas chaque jour de votre tête? Admirez le règne de Dieu dans le sage gouvernement de l'univers. Considérez avec quelle douceur il gouverne, non comme un tyran, mais comme un Père, qui vous attire à lui par l'attrait des récompenses. Il ne nous contraint pas , mais il nous incline au bien. Cependant son gouvernement est plein de force, et sa domination atteint de l'origine des choses à leur dernière fin. Et en même temps sa providence est juste et ne se propose d'autre but que de nous communiquer le bien qu'il possède, de nous conserver et de nous conduire à la parfaite possession de lui-même. Ah ! plaise au ciel que ceux qui gouvernent, au-dessous de Dieu, prennent pour modèle son propre gouvernement : douceur et non despotisme, énergie et non pas négligence, justice et non partialité, qu'ils agissent non par intérêt personnel ni par ambition, mais pour le bien de leurs sujets et la gloire du suprême gouverneur de l'humanité !

Efforçons-nous nous-mêmes de nous rendre dignes de la protection et de la sollicitude spéciale de sa providence en persévérant, par la grâce, dans la pratique des vertus et des bonnes œuvres qui nous garantissent l'héritage du bonheur éternel : Cherchez avant tout le royaume de Dieu et sa justice (Matthieu, 6, 33. ); et puis vivons paisibles dans la ferme confiance que sa providence fera tout coopérer à notre bien , et quelle ne permettra rien finalement de préjudiciable à notre salut.

HISTOIRES.

Depuis 60 ans saint Paul, ermite, vivait d'un demi pain qu'un corbeau lui apportait chaque jour. Un incident fit ressortir la sollicitude de la Providence à son égard. Un nouvel hôte lui étant sur venu dans la personne de saint Antoine , le corbeau apporta un demi pain. Allons ! s'écria saint Paul, plein d'une pieuse allégresse, voilà que la bonté miséricordieuse de notre Dieu nous envoie à dîner! Depuis 60 ans je reçois un demi-pain, aujourd'hui que vous êtes arrivé, il double la ration de ses soldats.
( St. Jérôme, Vie de saint Paul ermite. )

Les frères de saint Camille de Lellis, fondateur des clercs destinés au service des malades, étaient dans la dernière pénurie : accablés de fatigues, dévorés de faim, ils n'avaient pas un seul morceau de pain. Saint Camille tombe au pied de son crucifix et dit : «Secourez-moi, vous le pouvez, secourez cette pauvre famille ! » Il avait à peine achevé qu'on entendit sonner à la porte; c'était un inconnu qui, se dirigeant vers saint Camille, lui demanda s'il avait besoin d'argent. L'homme de Dieu lui exposa la nécessité où il se trouvait. «Combien vous faut-il, dit l'inconnu; — trois cents écus. — Il sortit, revint un instant après lui compter cette somme, et disparut sans qu'on sût jamais qui il était, d'où il venait, qui l'avait envoyé. C'était à coup sûr le messager de la Providence. ( Lohner , Bibliothèque. )

Saint Ignace de Loyola revenait d'un pèlerinage qu'il avait fait à Jérusalem. Trois vaisseaux étaient au port; l'un appartenait aux Turcs , et il ne fallait pas y compter ; l'autre aux Vénitiens , et c'était un beau, un bon, un superbe vaisseau; le troisième était petit, vieux, à moitié démonté. Plusieurs voyageurs pressèrent le capitaine vénitien de recevoir à son bord l'homme de Dieu, l'homme à miracles. «Dans ce cas, dit-il ironiquement, qu'il marche sur les eaux comme saint Pierre, je ne reçois personne gratis. » — Saint Ignace fut donc réduit à monter dans le chétif bateau. Mais qu' arriva- t-il? Il s'éleva une furieuse tempête qui engloutit le vaisseau turc ; le superbe navire vénitien alla se briser contre un banc de sable, et la petite nacelle arriva heureusement au port. — La providence veillait sur son serviteur. ( Schmid et Belet, Catéchisme historique. )

Rien n'arrive que par l'ordre ou la permission de la Providence : M. de Chantai, l'époux de sainte Jeanne-Françoise de Chantai, consolait ainsi l'ami imprudent qui venait de lui porter à la chasse un coup mortel : « Mon ami , le trait était parti d'en haut, avant de partir de ta main. » ( Vie de Ste. Jeanne-Françoise de ChantaL.)

C'est dans le même sens que madame de Sévigné , parlant de la mort de Turenne, a dit : « Le canon qui tua ce grand homme, était chargé de toute éternité. » ( Lettres de madame de Sévigné.)

SECTION 3.

De ces paroles : « le Père Tout-Puissant. »

D. Que signifient ces mots : Le Père tout-puissant ?

R. Que Dieu le Père, la première personne de la sainte Trinité , est par nature le père de la seconde personne , par grâce et adoption le Père de tous les bons chrétiens , et par
création le Père de toutes les créatures.

Instruction. I. Dieu le Père est la première personne de la Sainte-Trinité, parce qu'il ne procède d'aucune autre. Le Fils est la seconde, parce qu'il procède du Père par une éternelle génération. Le Saint-Esprit est la troisième, parce qu'il procède du Père et du Fils. Mais on ne doit supposer entre eux aucune inégalité; ils ont une seule et même essence, une seule et même puissance, une seule et même grandeur. II Comme nous disons d'un homme qu'il est père d'une famille, parce que ses enfants descendent de lui, parce qu'ils tiennent de lui l'éducation et sont ses héritiers , ainsi et à plus forte raison, Dieu est le père commun de tous les hommes : car tous ont reçu de lui l'existence : Nous sommes, selon saint Paul, la race de Dieu ( Actes, 17, 28. ), et sa providence universelle nous embrasse tous ; et puis, en qualité de chrétiens , par une grâce et un privilège singulier dont la passion et la mort du Christ sont la source, nous sommes les fils adoptifs de Dieu les héritiers du royaume des cieux : de cette sorte, nous sommes autorisés à nommer Dieu notre père , parle droit de l'adoption, que ne possèdent pas les autres hommes.

III. Nous l'appelons Tout- Puissant. Ce titre marque une puissance illimitée pour faire toutes choses, puissance infiniment plus grande que nous ne la saurions comprendre.
Aussi est-ce une grande folie de nier ce que Dieu a révélé, sous prétexte que cela paraît étrange et incompréhensible. Cette toute-puissance de Dieu, étant le fondement de notre foi et de notre espérance, a été mentionnée au premier article du symbole. Comment en effet pourriez-vous révoquer en doute aucun mystère de foi , dès lors qu'il repose sur l'autorité d'un être tout-puissant, et comment désespérer en pensant à sa miséricorde infinie ?

Exhortation. Avec quel profond respect , ô chrétien ! ne devez-vous pas réciter le Credo , par lequel vous professez votre croyance au Dieu infini et éternel ! Avec quel amour
l'appelez-vous votre Père et le grand créateur du ciel et de la terre? Apprenez à craindre sa puissance souveraine. La crainte est le commencement de la sagesse. Qu'elle accompagne toujours votre foi ; c'est le meilleur moyen de vous conserver dans une humble soumission à ses mystères. Qu'elle accompagne toutes vos actions, afin que vous évitiez le péché et pratiquiez la vertu. Qu'elle accompagne vos pensées pour bannir tout mal de votre esprit. Appliquez-vous par-dessus toutes choses à aimer Dieu, dont vous faites profession d'adorer l'Être , lui que vous appelez votre Père , votre créateur et qui nous a donné l'existence et la vie.

Vous êtes, par la grâce, fils adoptifs de Dieu et héritiers du ciel. Que votre âme , donc , habite le ciel ; et , tandis que votre corps reste sur la terre, souvenez-vous que le ciel est
votre demeure, votre patrie, votre félicité, votre dernière fin : c'est ainsi que l'Apôtre disait : Pour nous, nous vivons déjà dans le ciel. (Philippiens 3, 20. )

HISTOIRES.

Le Père. Dieu s'est montré le Père de J.-C. au baptême du Sauveur (Matthieu 3, 17 ), et à la transfiguration. (Jean, 12, 28,) Il s'est montré notre Père, à nous, dans la parabole du Prodigue ( Luc, 15.) — Tout-Puissant. « Votre main toute-puissante, toujours une, toujours la même , a créé les anges dans le ciel, sur la terre, des vermisseaux; elle n'est point supérieure en ceux-là, elle n'est point inférieure en ceux-ci. Nul autre n'a créé un ange, nul ne pourrait créer un vermisseau ; nul autre n'a créé le ciel , nul ne pourrait créer la moindre feuille ; nul n'a fait le corps humain , nul ne pourrait rendre blanc ou noir un cheveu de sa tête. Mais à votre puissante main tout est également possible. En effet, il ne lui est pas plus facile de créer un vermisseau qu'un ange , pas plus difficile d'étendre les cieux qu'une feuille ; pas plus aisé de faire un cheveu qu'un corps , pas moins aisé d'établir la terre sur les eaux que les eaux sur la terre. » (St. Augustin, Soliloques, ch. 9.)

Section 4

De la création du ciel et de la terre.

D. Qui a fait le ciel et la terre ? —  R. C'est Dieu. —  D. De quoi les a-t-il faits? — R. Il les a tirés du néant par sa seule parole. — D. Pourquoi les a-t-il faits ? — R. Pour manifester sa puissance, sa sagesse et sa bonté. D. Dans quel es pace de temps a-t-il fait toutes choses? — R. En six jours. ( de Dieu)

Instruction. La foi en un seul Dieu, créateur du monde, est la base de la vraie religion : car le symbole et l'Écriture commençant par la création, comme premier point de la doctrine divine , nous enseignent expressément que le monde n'existe pas de toute éternité, qu'il n'a pas été fait d'une matière préexistante et incréée, mais que la souveraine puissance de Dieu en a créé la matière et lui a donné ses formes; enfin que cet ouvrage n'a pas été fait tout entier d'un seul coup , mais par parties et dans l'espace de six jours. Au premier jour est marquée la création des éléments , des cieux, de la terre, des eaux, et de la lumière ; aux jours suivants appartient la création distincte des ornements qui conviennent à chaque élément : comme le soleil, la lune et les étoiles pour les cieux ; les animaux , les arbres, les plantes, pour la terre ; les oiseaux pour l'air , les poissons pour la mer. Cet univers paraît avoir été fait avec le dessein d'inspirer à nos âmes l'adoration d'un seul Dieu , en nous convainquant que, non-seulement le ciel et la terre, mais chaque espèce de créatures qu'ils renferment , sont l'ouvrage immédiat du Dieu tout-puissant, et non d'aucun autre. Ainsi est ruinée l'idolâtrie des païens qui ado
raient les créatures de diverses espèces au lieu de leur créateur.

Le premier jour Dieu a créé le ciel et la terre. Il a peuplé les cieux d'innombrables esprits lumineux que nous appelons les Anges. La terre était sans ornements et sans production, couverte par les eaux, créées aussi le premier jour, et toute entière enveloppée de ténèbres. Dieu dit alors : Que la lumière soit et la lumière fut. (Genèse, 1,3. ) Si elle se répandit sur une seule partie de la terre ou sur un seul hémisphère, alors ce seul hémisphère fut éclairé, comme le soleil le fait à présent ; et si la terre tournait sur elle-même il y eut dès lors une alternative de lumière et de ténèbres, et cette alternative forma le premier jour. Le second jour il fit le firmament et sépara les eaux qui étaient sous le firmament de celles qui étaient au-dessus. On peut entendre par le firmament ou l'étendue, selon le terme hébreu, tout l'espace qui s'étend de la terre aux plus hautes étoiles; ou bien la masse d'air qui alors contenait une immense quantité d'eau dans les nuages, autour de la terre, pour l'arroser selon les saisons. Le troisième jour Dieu réunit dans un immense bassin, préparé dans ce but, les eaux encore répandues sur la terre, et elles produisirent les mers. Les eaux s'y étant rendues, le sol apparut desséché, et ce fut la terre. Dieu lui commanda de produire toutes sortes d'arbres et de plantes. Le quatrième jour il fit et disposa les corps célestes, les étoiles, le soleil et la lune, ces deux grands luminaires de la terre ; l'un plus grand , l'autre plus petit, pour régler le jour et la nuit, pour marquer le cours des temps et des saisons. Ainsi notre jour et notre nuit dépendent de l'apparition du soleil sur l'horizon, notre année , de sa révolution annuelle , et , par les variations de sa marche aux différentes parties de l'horizon , il détermine les quatre saisons. Le cinquième jour, Dieu fit les poissons , ces habitants des eaux, et les oiseaux qui volent dans l'air. Le sixième jour, il fit toutes les créatures qui vivent sur terre , c'est-à-dire tous les animaux , soit domestiques soit sauvages , tous les reptiles ou animaux rampants; les uns destinés à notre nourriture, d'autres à notre habillement et d'autres à porter des fardeaux. Le sixième jour aussi , et en dernier lieu , il fit l'homme , car le monde créé pour devenir le palais ou l'habitation de l'homme, devait être d'abord meublé de tous ses ornements, pour que l'homme , tout en arrivant à l'existence, eût les yeux charmés par le spectacle de la création , les oreilles par le chant des oiseaux , le goût par les mets délicats que Dieu avait préparés pour sa nourriture ; de sorte que son cœur glorifiât le créateur de toutes ces merveilles-tirées du néant pour la conservation et le bonheur de sa vie.

Exhortation. Adorez , ô chrétien ! la puissance infinie de Dieu dans la création. Remerciez-le sans cesse de la grande bonté avec laquelle il vous prodigue de tels bien
faits , à vous et à toutes les créatures. Ses œuvres sont incompréhensibles. Ne scrutez donc, pas la nature des choses que vous ne pouvez comprendre, mais étudiez-vous à vivre bien , car une bonne vie est de beaucoup supérieure à la science. Efforcez-vous d'atteindre le but de votre création , qui est de glorifier et de posséder votre créateur , pour l'éternité. Pourriez-vous contempler ces corps célestes , le soleil, la lune et les étoiles, sans admirer et révérer sa puissance ! Et alors comment la défiez-vous, cette puissance ? Si le plus petit de ses ouvrages surpasse votre conception, qu'en doit-il être de leur auteur? Et quand la lumière des étoiles qui brillent au firmament éclaire de si loin, est si belle et si splendide , quelles doivent être la gloire et la beauté de Dieu lui-même ! L'esprit en est frappé de stupeur. Toutes les fois donc que vous levez le regard vers les cieux , élevez-y aussi votre cœur et louez Dieu de toutes les merveilles que vous, y contemplez comme de celles que vous admirez sur la terre. Et dites : Béni soit notre Dieu, dans le firmament du ciel , qu'il soit exalté et glorieux à jamais. ( Daniel 3, 56.)

HISTOIRES.

La plus belle histoire sur la création du monde est l'histoire de cette création même que l'on vient de lire. Après cela rien de plus capable de nous en donner une juste idée que la description de la puissance créatrice par le Saint-Esprit lui-même. Qui a mesuré les eaux dans le creux de sa main? Qui, de sa main étendue a pesé les cieux ? Qui soutient de trois doigts la masse de la terre (Isaïe, 40, 12). C'est lui qui a affermi la terre à jamais, lui qui l'a remplie de bêtes et de troupeaux. Il envoie la lumière et elle part, il l'appelle et elle lui obéit avec effroi. Les étoiles ont répandu la lumière chacune à son poste, et elles se sont réjouies. Elles ont été appelées et ont dit : « Nous voici ! et elles ont brillé avec plaisir à la gloire de Celui qui les a faites. » (Baruch, 3, 32,33, 34, 35). Son cœur est sage, son bras est fort. Il transporte les montagnes, il remue la terre, et les colonnes en sont ébranlées ; il commande au soleil, et il ne se lève pas, il enferme les étoiles comme sous un sceau. C'est lui seul qui a étendu les cieux et qui marche sur les flots de la mer; c'est lui qui fait sans nombre des choses grandes, merveilleuses et incompréhensibles. » (Job, 9, 4-10.)

SECTION V.

De la création des anges.

D. Que sont les Anges ? — R. Ce sont de purs esprits d'une nature spirituelle et intellectuelle. —

D. Quand Dieu a-t-il créé les Anges? — R. Il les a créés le premier jour, selon l'opinion la plus probable, lorsqu'il fit les cieux pour être leur demeure. —

D. Comment les Anges sont-ils divisés?

R. En bons et mauvais Anges. — D. Quels sont les bons ? —

R. Ce sont ceux qui ont persévéré dans la grâce , que Dieu a établis dans la gloire et préposés à la garde des hommes.

— D. Quels sont les mauvais ? — R. Ceux qui se sont ré voltés contre Dieu et qui ont été précipités en enfer. On les appelle démons, malins esprits, puissances des ténèbres, tentateurs des hommes.

Instruction. Lorsque Dieu fit les cieux, il créa des êtres spirituels , les Anges , et les y plaça. Ils furent créés dans la grâce , avec la liberté de choisir entre le bien et le mal. Ils n'étaient pas encore dans l'état de gloire. Tous ne persévérèrent pas longtemps dans l'état de grâce, car un grand nombre se révolta contre Dieu. C'est pourquoi il les bannit du ciel et fit pour les punir un enfer où ils sont retenus dans- des tourments éternels. Les bons qui ont soutenu la cause de Dieu, ont été confirmés par lui dans la grâce et la gloire. Le prince de cette armée céleste était Michel, et le prince des anges rebelles , Lucifer.

Dieu permet à ces mauvais esprits de nous tenter; mais il donne à tous les hommes une grâce suffisante pour leur résister. Saint Paul nomme ces démons les principautés , les puissances et les gouverneurs de ce siècle ténébreux. ( Éphésiens 6, 12. ) Il en est qui habitent l'air, traînant toute fois leur enfer avec eux. Ils nous suivent partout où nous allons, nous écartant de l'amour de Dieu, et nous attirant par des pensées coupables dans l'abîme de leur éternel malheur. Les bons anges , au contraire , sont les protecteurs des hommes; chacun de nous a son ange-gardien. Ils suggèrent à nos esprits les bonnes pensées et ils écartent le mal. Ils portent à Dieu nos demandes, présentent nos âmes, après la mort, devant le tribunal du Christ et les conduisent à la place qu'elles ont méritée, soit au ciel, soit en enfer, soit en purgatoire. Lazare fut transporté par les anges dans le sein d'Abraham. Chaque nation a son ange tutélaire. Ils sont les gouverneurs du monde, sous les ordres de la Providence, et ils seront ses messagers au dernier jour pour amener tous les hommes au jugement. Alors les bons seront séparés des méchants; les anges conduiront les premiers dans la gloire et ils jetteront les autres dans l'abîme de
l'éternel malheur.

Neuf chœurs d'anges dont parle la sainte Écriture se distinguent par différents degrés de gloire. Ce sont les Séraphins, les Chérubins, les Trônes, les Dominations, les Vertus , les Puissances, les Principautés , les Archanges et les Anges. Les uns chantent incessamment les louanges de Dieu, d'autres exécutent les décrets éternels, d'autres sont nos gardiens ; tous jouissent actuellement de la vision béatifique et ils adorent avec crainte, avec un saint tremblement
leur Dieu bien aimé.

Exhortation. Bénissez et célébrez la puissance de Dieu dans la création des Anges, la plus noble de toutes ses créatures. En considérant les épouvantables suites d'un seul péché dans la chute des Anges, voyez quelles doivent être les conséquences de vos innombrables prévarications. 0 horrible péché ! Repentez-vous donc, tandis que le pardon de Dieu, qui leur a été refusé, vous est actuellement offert. Renoncez à vos péchés, pour ne jamais plus y retomber, de peur que le sort des anges rebelles ne soit aussi le vôtre. Hélas ! est-il rien d'aussi terrible que le châtiment du péché ?

Considérez, au contraire, les heureux effets de la vertu dans la récompense des bons anges, qui ont persévéré dans l'adoration de Dieu : il les a confirmés en grâce et établis dans la gloire. Que leur exemple vous encourage à persévérer dans la vertu, afin que vous obteniez la même couronne et jouissiez avec eux de l'éternelle félicité. A chaque moment vous êtes exposé à la tentation : soyez donc continuellement sur vos gardes. Veillez et priez; car le démon, semblable à un lion rugissant, cherche nuit et jour à vous dévorer. Levez vers le ciel vos yeux et votre cœur, appelez Dieu à votre secours ; et alors vous n'aurez point à craindre les plus violents assauts du tentateur. Puisque Dieu vous a confié à la protection des bons Anges , ayez une dévotion spéciale à votre ange gardien et dites-lui chaque jour, matin et soir : « Ange de Dieu , vous aux pieux soins duquel j'ai été confié, éclairez-moi, défendez-moi, et gardez-moi aujourd'hui , ( ou cette nuit , ) de tout péché et de tout péril. »

De même qu'il y a divers degrés de gloire entre les saints Anges , il y en aura aussi plusieurs entre les saints, partie bienheureuse de l'humanité, selon le mérite de leurs œuvres et leur dévotion au service de Dieu. Heureux encouragement à la vertu ! 0 chrétien , persévérez donc de toutes vos forces dans la pratique de vos devoirs, afin d'être couronnés de la gloire éternelle dans l'assemblée des saints.

HISTOIRES.

Nombre et ordre des Anges. — Selon saint Denys l'aréopagite, on distingue communément parmi les anges neuf chœurs rangés en trois hiérarchies, la première renferme les anges, les archanges et principautés : protéger les royaumes, les villes, les individus, est leur emploi. Dans la deuxième, nous trouvons les dominations, les puissances et les vertus. C'est par leur ministère que Dieu opère les miracles. Dans la troisième, de toutes la plus élevée, nous voyons figurer les trônes, les chérubins et les séraphins, dont la principale fonction est de célébrer par des transports d'amour et d'allégresse, la puissance, la grandeur et la majesté du Très-Haut. ( S. Denys, Hiérarchie. )

Les bons anges et leur office. — Saint Grégoire de Tours était encore enfant, lorsque son père tomba dangereusement malade. Pressé par sa piété filiale, le petit Grégoire demandait chaque jour la guérison de son père. Une nuit son bon ange lui apparut et lui dit : « Vous voulez soulager votre père ; eh bien ! écrivez le nom de Jésus sur un petit morceau de bois, et, sans rien dire, glissez-le dans l'oreiller sur lequel repose la tête de votre père ; Grégoire obéit; mais, ô prodige! sur-le-champ son père se trouva guéri. Le pieux enfant remercia de tout son cœur et Dieu et son bon ange. ( Saint Grégoire de Tours. )

Les mauvais anges et leur emploi. — Égaré par son orgueil qui le portait à s'égaler à Dieu, et, selon de graves auteurs, à refuser ses hommages au Verbe incarné, Lucifer se révolta contre le Très-Haut, et entraîna une grande partie des anges dans sa révolte. Aussitôt saint Michel s'écria : Qui est comme Dieu? Les anges, restés fidèles, se rangèrent sous ses ordres, et une grande bataille eut lieu dans le ciel. Michel combattait contre le dragon, et le dragon avec ses anges combattaient contre lui. Ceux-ci furent les plus faibles, et ils ne parurent plus dans les cieux. Et le grand dragon, l'ancien serpent, qui est appelé Diable et Satan, fut précipité en terre et ses anges avec lui. (Apocalypse, chap. 12.)

Maintenant quel est le rôle des anges déchus par rapport aux hommes? — Jaloux de leur bonheur, ils les tentent et cherchent à les entraîner dans l'abîme. Mais semblable à un chien enchaîné, le démon ne peut mordre que l'imprudent qui s'approche trop près de lui. Si donc vous n'approchez pas de lui par les convoitises et les pensées terrestres, il ne pourra rien sur vous. Il aboiera, il entrera en fureur, et voilà tout. Il peut mendier notre assentiment, mais le forcer, jamais! ( S. Augustin, serm. 197. )


Dernière édition par MichelT le Lun 31 Oct 2016 - 22:23, édité 4 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Jeu 20 Oct 2016 - 12:50

SECTION VI.

La création et la fin de l'homme.

D. Quand est-ce que l'homme a été créé? — R. Il a été créé le sixième jour. — D.

Comment a-t-il été créé? — R. Son corps a été fait d'argile ; son âme a été créée de rien
et faite à l'image et à la ressemblance de Dieu. —

D. En quoi consiste cette ressemblance. — R. Elle consiste en ce que l'homme, quant à l'âme, est spirituel et immortel, impérissable à jamais, capable de la gloire et du bonheur éternel, dans la possession de Dieu, qui est et le principe et la fin de la création de l'homme.

Instruction. Ayant formé le ciel, la terre et tout ce qu'ils renferment, Dieu procéda à la création de l'homme, comme le terme et le couronnement de l'œuvre de ses mains. Le sixième jour, donc, il façonna son corps avec du limon de la terre et il souffla sur sa face un souffle de vie ; c'est-à-dire il lui donna une âme spirituelle et immortelle , et l'établit le maître de toutes les autres créatures vivantes. Par un privilège spécial, l'homme était créé immortel, ne devant jamais mourir ni souffrir; il était pur de tout péché et doué de la justice originelle , qui rendait tous les mouvements de ses sens parfaitement soumis à la raison, et la raison parfaitement soumise à Dieu. Il dépendait de lui de persévérer autant qu'il le voudrait en cet heureux état.

Dieu ayant plongé Adam dans un profond sommeil, il lui retira une de ses côtes , et il en forma la femme pour être sa compagne. Adam et Ève étaient nus , mais ils n'en avaient pas honte , parce qu'ils étaient complètement innocents et insensibles an mal. Dieu se promenait et conversait avec eux dans le paradis, délicieux séjour où étaient réunies toutes les choses qui pouvaient contribuer à leur bonheur et où toutes les créatures vivantes étaient à leur service. Ils étaient créés pour aimer et glorifier leur créateur dans ce paradis , durant un temps , et pour être ensuite transportés dans le ciel , sans passer par la mort ; et cette heureuse destinée devait être celle de leur postérité.

Exhortation. Adorez Dieu profondément dans le grand et admirable ouvrage de votre création. Rendez-lui l'hommage de l'obéissance et des devoirs auxquels l'homme est tenu envers son créateur.  Efforcez- vous de répondre à votre vocation, et n'oubliez pas que vous êtes créés pour vivre à jamais avec Dieu dans la gloire. Toute chose dans la nature marche fatalement à sa fin, l'homme excepté. Repentez-vous donc de vos péchés et corrigez-vous pour l'avenir, puis que votre bonheur dans l'autre vie dépend de votre bonne conduite en celle-ci. Estimez-vous vous-même plus que toutes les choses de ce monde : beauté , richesses, puissance, noblesse, tout cela aura bientôt une fin. Estimez au-dessus de tout ce qui anime votre corps, votre âme immortelle, faite à l'image et à la ressemblance de Dieu. Ayez soin de la conserver sans tache , et si elle est souillée par le péché, purifiez-la de nouveau par les larmes du repentir et une sincère contrition. Oh ! ne souffrez pas que la gloire du ciel soit sacrifiée à la terre et que vos péchés ravalent au-dessous de la brute la beauté des anges qu'embellit votre âme.

HISTOIRES.

De quoi l'homme est-il formé ? — « Vos mains m'ont formé, elles ont façonné tout mon corps. Vous m'avez pétri comme un vase d'argile, vous m'avez fait comme un lait qui se caille, comme un lait qui s'épaissit et se durcit. Vous m'avez revêtu de peau et de chairs, vous m'avez affermi par des os et des nerfs (Job, 10, 8,9, 10, 11). Dieu a créé l'homme de terre, il l'a fait à son image. Il lui a marqué le temps et le nombre de ses jours, et il lui a donné pouvoir sur tout ce qui est sur la terre; il lui a donné l'empire sur les bêtes et sur les oiseaux. Il a créé de sa substance un aide semblable à lui ; il leur a donné la raison, une langue, des yeux, des oreilles, un esprit pour penser, et les a remplis de la lumière de l'intelligence. Il a créé en eux la science de l'esprit, il a rempli leur cœur de sens, il leur a fait voir les biens et les maux. Il a fait luire son œil sur leurs cœurs, pour leur faire voir la grandeur de ses œuvres, et glorifier son saint nom. » (Ecclésiastique 17, 1 à 7.)

De quoi est-il composé? — De corps et d'âme. Pour le corps, personne n'en doute. Mais notre âme pour être invisible n'en existe pas moins.

SECTION VII.

De la chute de l'homme.

D. Comment Adam est-il tombé ? — R. En désobéissant a Dieu. — D. Quelle en a été la conséquence? —

R. Adam a été chassé du paradis avec toute sa postérité ; il est devenu sujet à toutes les misères de la vie et à la mort.

— D. Qui l'a entraîné au péché ? — R. L`ange déchu revêtu de la forme d'un serpent. —

D. Comment l`ange déchu l'a-t-il tenté? — R. En persuadant à Ève par ses suggestions de manger du fruit défendu , l'assurant qu'après en avoir mangé, ils ne mourraient pas , mais seraient comme des Dieux.

Instruction. Hélas ! l'heureux état de l'homme dans le paradis fut d'une courte durée. Dieu permit à Adam et à Ève de manger de tous les fruits délicieux qui étaient dans le paradis , excepté d'un seul , celui de l'arbre appelé l'arbre de la science. Pour éprouver leur obéissance il leur défendit d'y toucher sous peine de mort. Mais le démon , caché sous la forme d'un serpent, s'approcha d'Ève, et la flatta en l'assurant que s'ils mangeaient du fruit que Dieu avait défendu , ils ne mourraient nullement , mais seraient comme des dieux, connaissant le bien et le mal. Ève voyant ce fruit beau à la vue et agréable au goût , le prit , en mangea et le donna à Adam qui suivit son exemple.

Aussitôt leurs yeux s'ouvrirent ; ils s'aperçurent qu'ils étaient nus et exposés à l'ignominie ; ils furent saisis du remords de la conscience et de la crainte du jugement de Dieu. Au bruit de sa voix ils s'enfuirent , et ils essayèrent de se cacher dans les bosquets du paradis. Mais ils furent bientôt découverts , jugés et condamnés à mourir. Plusieurs peines furent prononcées contre l'homme et la femme , avec une éternelle malédiction sur le serpent, c'est-à-dire l`ange déchu, qui avait séduit Ève. En un mot ils furent chassés du paradis et exposés à toutes les souffrances sur la terre. Ainsi nos premiers parents perdirent le paradis comme les anges rebelles avaient perdu les cieux. Considérez les funestes effets du péché ! Avant le péché l'homme est heureux ; après le péché il est malheureux. Avant le péché il vit et converse avec Dieu ; après le péché il n'ose paraître en sa présence ; avant le péché il est immortel ; après le péché il est sujet à la mort et chaque moment le menace de ses terreurs ; avant le péché l'existence lui est douce ; après le péché il est condamné à labourer la terre et à gagner son pain à la sueur de son front. Avant le péché il a droit au ciel; après le péché il est destiné à l'enfer.

Exhortation. Considérez en Adam l'heureux commencement et la misérable fin de l'homme, et que son exemple vous détourne du mal. Si pour un seul péché, Dieu l'a puni si sévèrement, que devez-vous attendre après le nombre pour ainsi dire incalculable de vos fautes! Puisque vous voyez la fatale conséquence du péché, ayez plus de soin qu'Adam de votre fin dernière. Appliquez-vous à remplir les commandements de Dieu et à éviter les plaisirs défendus. Vous avez de grands secours pour vous encourager. La grâce de Dieu vous est donnée abondamment dans les sacrements. Défiez-vous des tentations et des embûches de Satan. Toutes les séductions de ce monde sont par rapport à vous ce qu'était pour Adam le fruit défendu dans le paradis : agréables à la vue, douces pour les sens, mais trompeuses et amères à la fin. Nul jamais ne s'y est livré sans être forcé de dire avec Salomon que tout est vanité et affliction d'esprit. Créé pour un autre monde, songez, que vous ne trouverez point votre bonheur ici-bas ; créé pour Dieu vous ne serez jamais heureux, sans lui. Regardez-vous comme un étranger sur la terre; vous n'avez pas ici de demeure permanente, votre demeure est dans les cieux. Aussi saint Paul nous le rappelle- t-il souvent : N'ayez de goût que pour les choses du ciel et non pour celles de la terre. ( Colossiens 3, 2.)

Marchez sans cesse en présence du Seigneur et ne le perdez point comme Adam par le péché. Acceptez les peines temporelles, effets du péché originel, avec patience et résignation, comme l'héritage de la postérité d'Adam. Vous êtes condamné par votre naissance à beaucoup de misères, endurez-les toutes patiemment, puisque telle est la volonté du ciel ; et puisque vous êtes condamné à mourir, l'heure étant proche , humiliez- vous vous-même sous la main de Dieu qui vous frappe, et remettez votre âme, au nom de votre bien-aimé Sauveur, entre les mains de votre Père céleste.

HISTOIRES.

La chute de l'homme entraîne des misères auxquelles il faut absolument se résigner. Telle n'était pas d'abord l'intention d'un pieux solitaire nommé Jean et surnommé le Nain , à cause de sa petite taille. «Je voudrais bien être comme les anges , dit-il un jour à son frère aîné : ils vivent sans inquiétude, sans avoir besoin de travailler, et louent Dieu sans cesse. » Là-dessus il s'en va au fond d'un désert où il passe les jours et les nuits à chanter les louanges de Dieu. Au bout d'une semaine, il s'en revient frapper à la porte de son frère. « Qui est là ? — C'est moi ! — Qui moi ? — Je suis Jean, votre frère; ouvrez-moi, je meurs de faim. — Oh! Jean n'est plus un homme comme les autres : c'est un ange qui prie Dieu sans cesse ; les anges n'ont pas faim , ils ne mangent jamais. — Pardonnez-moi , mon frère, j'ai eu tort. Je le vois bien, tant que nous vivrons sur la terre, nous serons sujets aux misères de l'humanité. » (Michel-Ange Marin , Vies des Pères du désert.)

Seigneur, tenez-moi bien, s'écriait saint Philippe de Néri, je suis un traître; si vous m'abandonnez un seul instant, je vais vous trahir. Lorsqu'il sortait, même pour faire des bonnes œuvres, il disait : « Je sors chrétien, je reviendrai peut-être juif. » Un jour qu'il se croyait seul, il s'écriait : « Je suis perdu ! je suis perdu!» Quelqu'un l'ayant entendu, l'aborda et lui dit : « Je vous en prie, ne vous laissez pas aller au désespoir. » — Je ne désespère point , au contraire, j'espère beaucoup. Mais je suis perdu, je suis damné, si Dieu me laisse à moi-même. » ( Vie de St. Philippe de Néri. )

Un chrétien éprouvait une crainte continuelle. «Pourquoi cette frayeur? lui dit quelqu'un. — Hélas! répondit-il, je crains de succomber à la tentation. Lucifer et des milliers d'esprits célestes sont tombés dans le ciel , Adam et Ève en paradis , Judas dans la société de Jésus-Christ. Qui comptera le nombre des damnés? Eh bien ! ils le sont tous, parce qu'ils ont succombé à la tentation. » Rien de plus vrai. Mais que faut-il faire pour ne pas succomber à la tentation ? D'abord fuir les occasions ; est-on tenté , faire le signe de la croix, songer à l'enfer, invoquer les noms de Jésus et de Marie, etc. (Catéchisme de l'Empire. )

ARTICLE II. — SECTION I.

Et en Jésus- Christ, sont Fils unique, Nôtre-Seigneur.

D. Que signifie cet article ? — R. . Il signifie que nous croyons et plaçons toute notre confiance en Jésus-Christ , vrai Dieu et vrai homme, la seconde personne de la sainte
Trinité. —

D. Quelle est la signification du nom de Jésus ? — R. Il signifie Sauveur. —

D. Pourquoi devons-nous honorer son nom ? — R. Parce que nous lui sommes redevables de tout bien. —

D. Quelle est la signification du nom de Christ? — R. Il signifie oint, ou sacré. —

D. Que veulent dire ces paroles : Son Fils unique Notre-Seigneur?— R. Elles veulent dire que Jésus-Christ est par nature le Fils unique de Dieu le Père , engendré de lui de toute éternité, et qu'il est notre Seigneur et notre Dieu.

Instruction. Le premier article du symbole se rapporte à Dieu le Père, première personne de la sainte Trinité et à l'œuvre de la création ; le second et plusieurs des articles suivants se rapportent à Dieu le Fils , la seconde personne de la sainte Trinité et au grand œuvre de notre Rédemption. Croire en Jésus-Christ, c'est croire que la seconde personne de la Trinité s'est faite homme pour nous sauver et qu'elle est à la fois Dieu et Homme; vrai Dieu, engendré du Père de toute éternité; vrai homme non en apparence seulement mais en substance, ayant la nature humaine, un corps, une âme, avec toutes les puissances qui leur appartiennent.

Le saint nom de Jésus lui a été donné non par un homme, mais par l'ange Gabriel, selon l'ordre de Dieu, et avant qu'il fût conçu dans le sein de sa mère. Ce nom est au-dessus de tous les autres noms. À ce nom toute créature doit se prosterner, les anges au ciel , les anges déchus aux enfers et l'homme sur la terre. Il signifie Sauveur : Jésus est venu en effet pour racheter son peuple du péché et de l'enfer qui en est la punition. Tout le bien que nous avons reçu nous est venu par son nom. Par Jésus , notre foi et notre religion nous ont été données ; par lui nous espérons la rémission de nos péchés et la vie éternelle ; par lui nous aimons Dieu et obtenons ses faveurs et son amitié. Tous les mérites que nous acquérons par nos prières, nos jeûnes, nos bonnes œuvres sont dus au nom de Jésus : car il n'y a pas sous le ciel d'autre nom donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés. (Actes 4, 12.) Grande est la puissance de ce saint nom pour mettre en fuite les anges déchus et opérer des miracles. Au nom de Jésus, dit Pierre à l'aveugle, lève-toi et marche. Il a toujours, pour nous secourir, la même vertu qu'autrefois. Il nous rappelle notre rédemption, à laquelle nous ne pouvons trop souvent réfléchir.

Toutes les fois que nous l'entendons ou que nous le prononçons, c'est notre devoir de l'honorer et de le glorifier, aussi bien par un sentiment d'adoration intérieur que par un acte extérieur de respect : Au nom de Jésus tout genou doit fléchir. (Philippiens 2, 10.)

2° Nous lisons dans l'Écriture que les rois, les prêtres et les prophètes étaient consacrés avec l'huile et appelés à cause de cela les oints du Seigneur. De même le nom de Christ qui signifie l'Oint , a été donné au Fils de Dieu fait homme avec celui de Jésus , parce que le Christ est roi , prêtre et prophète. Il est roi : toute puissance lui a été donnée dans le ciel et sur la terre ; il est assis pour toujours sur le trône de David et son règne n'aura pas de fin. (Luc, 1, 33.) Il est notre Grand-prêtre : il a offert le grand sacrifice de la rédemption , en s'immolant lui-même pour les péchés des hommes ; il est prêtre à jamais selon l'ordre de Melchisédech. Il était aussi prophète , et même le prophète par excellence , celui dont tous les autres ont reçu leur science prophétique. C'est donc dans la signification la plus stricte, qu'il a été nommé Christ, étant sacré roi , prêtre , prophète , non avec l'huile , mais par une grâce sans mesure, par la divinité elle-même.

Nous l'appelons Notre -Seigneur, et il l'est véritablement comme Dieu et comme homme. Il est Notre-Seigneur et Seigneur de toutes choses ; car il est notre Dieu par la création . Seigneur de l'homme en particulier par le droit de rédemption , il nous a conquis au prix inestimable de son sang. Écrions-nous donc avec l'apôtre : Mon Seigneur et mon Dieu !

Exhortation. 0 chrétien ! Adorez Jésus-Christ , vrai Dieu et vrai homme , un seul et même Dieu avec le Père : Moi et le Père, dit-il, nous sommes un (Jean, 10, 30), un seul Dieu . Un seul être suprême. Confiez-vous en sa puissance par laquelle vous vivez; en sa bonté à laquelle vous devez tous les biens de la nature et de la grâce ; dans les mérites de sa passion et de sa mort , par lesquels vous obtenez le pardon de vos péchés et la vie éternelle. Jésus ! Que ce saint nom auquel vous êtes redevable de la vie et du salut soit toujours profondément gravé dans votre cœur. Il est notre consolation dans les peines, notre assistance à la mort, notre joie dans la gloire. Puissé-je adorer sans cesse votre saint nom, ô Jésus! au milieu de la corruption de ce siècle ! Je ne fléchis pas seulement le genou devant vous, je mets aussi mon cœur à vos pieds. Je me réjouirai et je tressaillerai d'allégresse en Dieu, mon sauveur.

Comme vous avez plus ou moins participé à la plénitude de sa grâce ( 1 Jean, 1, 16 ), ayez soin de conserver un si précieux trésor dans votre âme , en évitant le péché , en persévérant dans la pratique de la vertu : Ne recevez pas la grâce de Dieu en vain, et ne rendez pas inutiles les bénédictions du ciel ; mais, puisque vous reconnaissez Jésus pour votre Seigneur , servez-le de tout votre pouvoir , par l'amour, la crainte et l'obéissance.

HISTOIRES.

Nom de Jésus. Le comte Armogaste, fils de Genseric lui-même, ce cruel propagateur de l'hérésie arienne , refusa persévéramment de renoncer à la vraie foi. On lui lia tous les membres avec des cordes, et on le jeta en prison. Armogaste prononça le nom de Jésus, et ses liens tombèrent comme une toile d'araignée. On le pendit à un pieu la tête en bas. Mais , ô prodige ! à peine eut-il prononcé ces paroles : Jésus-Christ est Dieu! qu'il s'endormit sans douleur, comme sur un lit de repos. Voilà quelle est la puissance du nom de Jésus! ( Victor de Vite, Histoire de la persécution des Vandales. )


SECTION II

Explications plus amples de l'Incarnation.

D. Qu'entendez-vous par l'Incarnation? — R. J'entends le mystère par lequel Dieu le Fils , seconde personne de la Sainte-Trinité, s'est fait homme. —

D. Comment s'est-il fait homme ? — R. Il a pris un corps et une âme semblables aux nôtres , et qui subsistent unis à la nature divine dans la seule et même personne du Fils de Dieu. —

D. Quand s'est-il fait homme? — R. A l'instant où il a été conçu dans le sein de sa bienheureuse Mère , lorsqu'elle donna son consentement, en disant: Voici la servante du Seigneur; qu'il me soit fait selon votre parole. —

D. Pour quelle fin s'est-il fait homme? — R. Pour racheter la race humaine, perdue par le péché d'Adam.—

D. Comment nous a-t-il rachetés ? — R. En mourant pour nous, et en payant la dette due à Dieu pour nos offenses. —

D. Quel profit avons-nous retiré de la rédemption ? — R. Nous avons été rétablis dans la grâce et faits héritiers du royaume des Cieux.

Instruction. L'unité et la trinité de Dieu, que nous concevons en ce sens qu'une seule et même nature divine subsiste en trois personnes réellement distinctes , et l'incarnation du Fils de Dieu dans laquelle les deux natures divine et humaine ont été unies en une personne, sont les deux principaux mystères de la foi chrétienne et le fondement sur lequel repose notre religion. Selon le plan divin , l'incarnation était absolument nécessaire au salut du genre humain; car, d'après les décrets de Dieu, l'homme ne pouvait pas être autrement racheté du péché originel : c'était en effet l'œuvre d'une satisfaction infinie, et nul, si ce n'est un être infini , ne peut expier l'offense faite à l'infinie justice. Or, Jésus accomplit cette œuvre en prenant notre nature et en répandant son sang pour nous. Aussitôt après la chute de nos premiers parents , Dieu promulgua le décret de la rédemption de l'homme, lorsqu'il dit au serpent que la postérité de la femme lui écraserait la tête. Quelle était cette postérité de la femme sinon le Christ né d'une Vierge?

Un être infini se présente pour expier une offense infinie. Il répare notre faute , il nous délivre du châtiment éternel qui lui est dû, il nous rend plus grand que nous n'étions avant le péché , en nous adoptant pour ses frères , et en partageant avec nous l'héritage de son propre royaume. Enfin après la mort il établit notre âme, et après la résurrection, notre corps réuni à notre âme, dans la gloire éternelle avec les anges. Un tel ouvrage ne peut être que celui de Dieu, et il faut dire que l'incarnation est le pur effet de son amour infini pour l'homme : Dieu a tellement aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique. (Jean, 3, 16.)

Exhortation. Adorez, ô chrétien ! le mystère de l`Incarnation du Fils de Dieu. Si ce fut un grand ouvrage de vous tirer du néant par la création , c'en est un plus grand encore de vous avoir délivré du mal du péché et de la peine de l'enfer : le premier fut un effet de l'infinie puissance de Dieu , celui-ci est le chef-d’œuvre de son amour. Ce mystère est tellement sublime et incompréhensible que nous avons toute raison de nous écrier avec saint Paul : 0 profondeur des richesses de la sagesse et de la science de Dieu ! Que ses jugements sont incompréhensibles et ses voies impénétrables! (Rom. 11, 33.) Comment refuserions nous de croire implicitement à tous les autres mystères de la religion chrétienne, lorsque nous croyons que le Fils de Dieu s'est fait homme , qu'il est né d'une Vierge , qu'il a vécu dans la pauvreté et qu'il a souffert une mort ignominieuse pour l'amour de nous?

HISTOIRES.

Nature de l'Incarnation. Un hérétique voulant amener un jeune homme à ses erreurs, lui dit : « Je le sais, Jésus-Christ est Dieu et homme; mais en lui les deux natures sont tellement unies qu'elles n'en font qu'une. Soudez ensemble un gros et un petit morceau de fer , et vous n'en aurez bientôt qu'un. — C'est vrai, répondit l'enfant; mais prenez un gros lingot d'or et un petit morceau de fer, puis fondez -les ensemble : le morceau ne sera t- il que de l'or ? n'y trouverez- vous pas l'or d'un côté , le fer de l'autre? » Le lingot, c'est la divinité de Jésus-Christ, le fer, son humanité; unies toutes les deux dans la personne du Verbe, elles restent parfaitement distinctes. Le docteur de l'erreur se montra très-mécontent du jeune homme et des maîtres qui l'avaient si bien instruit. Il était vaincu ! ( Filassier, Dictionnaire d'éducation. )

But de l'Incarnation. Un jour que saint Antoine était en prière dans son monastère, il entendit frapper à la porte. Il y va et voit un homme d'une taille gigantesque. « Qui es-tu? — Je suis Satan. — Comment ! et que viens-tu faire ici ? — J'y viens me plaindre à toi : tes solitaires , et les bons chrétiens n'ont pour moi que des malédictions. — Tu ne leur fais que du mal! — Moi! Je suis sans force, sans puissance, j'ai été désarmé, et il ne me reste plus un seul endroit où je commande en maître. Qu'ils cessent donc de me
maudire ; s'ils veillent bien sur eux , il m'est impossible de leur nuire. » A ces mots il disparut, et saint Antoine alla dire à ses religieux, comment Notre- Seigneur nous a délivrés du démon , et par suite du péché et de l'enfer. ( St. Athanase, Vie de saint Antoine. )

ARTICLE III. — SECTION I.

Qui a été conçu du Saint-Esprit.

D. — Comment Notre-Seigneur a-t-il été conçu ? — R. Il a été conçu non par la génération humaine, mais par le pouvoir et la vertu du Saint-Esprit. —

D. Quand a-t-il été conçu? — R. A l'instant où la vierge Marie donna son consentement, en disant : Voici la servante du Seigneur ; qu'il me soit fait selon votre parole.

Instruction. La Conception de notre Sauveur est une œuvre singulière de Dieu, une œuvre qui dépasse la portée de notre intelligence. C'est un miracle et un mystère ; elle
diffère totalement de la conception ordinaire des autres hommes par la génération humaine. En un mot, elle a été l'œuvre immédiate du Saint-Esprit.  Que son corps ait été formé de la substance de sa mère, c'est conforme à l'ordre de la nature, car tous les hommes sont formés de cette manière; mais qu'une Vierge qui n'a jamais connu aucun homme, conçoive un fils, que la nature humaine de ce fils subsiste dans une personne divine, que sa mère en restant vierge soit aussi mère , mère de Dieu et mère de l'homme, ce sont des mystères qui surpassent la portée de notre nature et la capacité de notre entendement ; des mystères que Dieu seul peut comprendre.

Chose admirable ! que Dieu et l'homme, le maître et l'esclave soient si étroitement unis qu'ils deviennent une seule et même personne ! C'est réellement au-dessus de notre intelligence , mais ce n'est pas moins la vérité : 0 profondeur des richesses et de la sagesse de Dieu ! Une comparaison peut , jusqu'à un certain point, nous faire concevoir ce mystère : ainsi, bien que deux greffes, parfaitement distinctes tout en reposant sur une même tige, portent différents fruits, elles ne cessent pas pour cela de former un seul arbre , par là même qu'elles reposent sur un seul et même tronc.

Exhortation. Admirez , ô chrétien ! les œuvres étonnantes que Dieu a faites en votre faveur, et, sans chercher à pénétrer le mystère , adorez la Conception de notre Sauveur, comme l'ouvrage non pas de l'homme , mais de la Toute-Puissance elle-même. Conçu, né dans le péché et l'ignorance, avec une nature corrompue, pleine d'inclinations mauvaises que nous tirons de notre origine, humiliez-vous en présence du Père éternel , et glorifiez-le de la Conception de son Fils , dont les mérites vous ont délivré de tous les maux qui vous accompagnent dans ce monde. C'est par Jésus que vous êtes purifié du péché originel, éclairé de la foi et mis en possession de tout bien.

HISTOIRES.


Par un bref du 14 septembre 1724, Benoît XIII accorde à perpétuité une indulgence plénière, le jour qu'on choisira, pourvu qu'on remplisse les conditions ordinaires, aux personnes qui, chaque jour, à genoux et au son de la cloche, le matin, ou à midi, ou le soir, réciteront pendant un mois la prière qui nous rappelle si bien le grand mystère de l'Incarnation, c'est-à-dire l' Angélus. — De plus, cent jours chaque fois qu'on le récitera avec un cœur contrit et repentant. Pendant le temps pascal, au lieu de l'Angélus, on récite le Regina coeli, si on le sait. Si l'on n'entend pas sonner l`Angélus, on le récite à peu près à l'heure où on le sonne d'ordinaire. ( Mgr. Bouvier, Traité des Indulgences. )


SECTION II

Né de la Vierge Marie.

D. Quand Nôtre-Seigneur est-il né ? — R. A Noël , au milieu de la nuit. —

D. Où est-il né? — R. Dans une étable à Bethléem. —

D. De qui est-il né. — R. De la bienheureuse Vierge Marie. —.

D. Quelles merveilles ont signalé sa naissance? — R. Le chant des Anges, l'adoration des bergers, l'arrivée des Mages ou des trois Rois.—

D. Dans quelle condition est- il né? — R. Dans la détresse, la pauvreté et le dénuement ; il naquit dans une étable et fut couché dans une crèche.

Instruction. Les apôtres n'ont pas jugé que ce fût assez de nous avoir enseigné la Conception divine de notre Sauveur ; ils ont voulu nous apprendre encore ce que nous devons croire de sa nativité, et ils ont ajouté : né de la Vierge Marie: c'est que la naissance de Jésus, aussi bien que sa conception, est pleine de divins mystères , propres à notre instruction. Joseph et Marie , obligés de se rendre à Bethléem , lieu de leur naissance, pour faire inscrire leurs noms, conformément à l'édit de César-Auguste, ne trouvèrent pas de place dans l'hôtellerie et furent forcés de loger dans une étable. Là il arriva que la bienheureuse vierge Marie mit au monde son fils, après la naissance duquel elle resta toujours vierge, comme elle l'avait été auparavant. C'était dans la rigueur de l'hiver et à minuit. Jésus est né dans un temps où le monde, après de longues et de sanglantes guerres, goûtait une profonde paix , comme pour indiquer qu'il venait rétablir la paix entre le ciel et la terre, et réconcilier Dieu et l'homme. Il est né d'une vierge pour montrer combien il aime la pureté, et quelle doit être celle de nos âmes surtout lorsque nous le recevons dans la sainte communion, il est né dans une humble condition, comme la plus conforme au but de son incarnation, qui est de nous apprendre à mépriser l'orgueil et les pompes du monde : car ce qu'il veut que nous croyions il l'enseigne par ses exemples aussi bien que par sa doctrine. Toutefois, selon la remarque de saint Denis, dans la personne de Jésus-Christ les merveilles s'unissent à l'humilité : des anges descendent des cieux et chantent sa naissance ; des bergers de Judée accourent aussitôt l'adorer et ensuite les rois Mages, afin de marquer qu'il est né pour le salut des Gentils comme pour celui des Juifs.

Exhortation. Approchez de la crèche, ô chrétien! Avec un cœur plein de reconnaissance , d'adoration et d'amour. Adorez l'Enfant nouveau-né, avec les bergers et les rois ; glorifiez-le avec les anges ; aimez-le avec Marie et Joseph. Hélas ! ils sont rares ceux qui portent ces pieux sentiments dans leur cœur. Beaucoup dédaignent la nativité de leur
Rédempteur, comme si elle n'avait jamais été ; d'autres vivent dans un oubli total à ce sujet, et la célèbrent moins par de pieuses joies et avec dévotion que par des fêtes et des réjouissances mondaines. Pour vous , ô chrétien ! suivez l'exemple de Marie , conservez et méditez ces divins mystères dans votre cœur. Adorez en esprit et en vérité votre Rédempteur enfant, et que votre vie rende témoignage aux bénédictions que vous avez reçues. Répondez à la fin de votre création par la pratique de la sobriété, de la justice et de la piété en ce monde.  Oh ! puissiez-vous bénir et exalter la nativité de Jésus , dans le temps et dans l'éternité ! Puissiez-vous être humble comme il le fut à Bethléem ; mépriser, comme il l'a fait, toutes les pompes et les vanités de cette terre , et souffrir, comme il a souffert, afin d'entrer en partage de sa gloire.

HISTOIRES.

Ou Jésus-Christ est-il né? — La grotte de Bethléem , dans laquelle Jésus-Christ est venu au monde, se trouve renfermée dans l'enceinte de l'église de la Nativité. On y descend par un escalier de seize marches. C'est une caverne naturelle, dont une partie a été couverte de maçonnerie, et dont la voûte et les parois ont été revêtues de marbre par la piété des fidèles. Le pavé est lui-même tout composé de marbre blanc avec des incrustations en jaspe et en porphyre. Au milieu se trouve une étoile d'argent, posée
en 1777, et sur laquelle on a gravé en latin ces mots si simples et si touchants tout à la fois : C'est ici même que Jésus-Christ est né de la vierge Marie. Des rois, des empereurs, des princes, des patriarches, des milliers de pèlerins sont venus se prosterner, prier, adorer en cet endroit, où Jésus-Christ est né pour notre salut, et y ont laissé de riches
témoignages de leur munificence. (Mgr Mislin, Les saints lieux.)

A quelle heure est-il né? — C'était la grande fête de la Nativité du Seigneur. Pendant qu'on attendait les Matines, le petit Bernard baissa la tête et s'assoupit. A l'instant le saint enfant Jésus lui révéla le mystère de sa naissance, et lui apparut comme un époux qui sort de la couche nuptiale, et qui, retraçant à ses yeux sa naissance du sein de la Vierge-Mère, parut le plus beau des enfants des hommes. A dater de ce moment, la piété de saint Bernard prit un nouvel essor. C'était, pensait-il lui-même, l'heure de
la Nativité du saint enfant Jésus. (L'abbé Guillaume, Vie de saint Bernard.)

De qui est-il né? — Marie est mère de Dieu, puisqu'elle a enfanté Jésus-Christ, et que Jésus-Christ est Dieu. L'hérésiarque Nestorius, ayant osé lui refuser ce titre, l'univers catholique se souleva d'indignation. Le concile d'Éphèse fut réuni contre le blasphémateur, et, pendant qu'il délibérait, une population immense attendait l'issue de l'assemblée. Nestorius fut anathématisé , et Marie reconnue mère de Dieu. A cette nouvelle ce fut de toutes parts un enthousiasme indescriptible; chacun répétait : « Marie est vraiment mère de Dieu! sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous! On répandit des parfums sur les pas des évêques, on les reconduisit à la lueur des flambeaux. Pour Nestorius, un affreux ulcère se forma à sa langue impie, durant son exil, et la rongea jusqu'à la racine. Il mourut dans l'indigence, dans d'atroces douleurs, et, ce qu'il y a de plus effrayant, dans l'impénitence. ( Histoire de l'Église. Passim. )

En quel état ? — Saint François se mettait à table avec ses frères, lorsqu'il entendit le lecteur annoncer (c'était sans doute la veille de Noël), la retraite de la vierge Marie à l'humble grotte de Bethléem. Aussitôt il se lève, s'assied à terre et dit : « Pourrais-je, pécheur, méchant, serviteur inutile que je suis, rester assis à une table quand la mère de
Dieu ne trouve pas de place à l'hôtellerie, lorsque le Créateur, le Maître de ce monde, est né dans une étable et couché dans une crèche? A ces mots il se jette à terre, il mange son pain en gémissant. (Nar. Marul., Vie de saint François.)


SECTION III.

De la Vie du Christ.

D. Quelles sont les principales circonstances de la vie du Christ?

R. La circoncision, la présentation, la fuite en Égypte, la dispute avec les docteurs dans le temple , son enfance et sa jeunesse qui s'écoulèrent jusqu'à l'âge de 30 ans dans l'obéissance et le travail.

Instruction. Voici donc les particularités de la vie du Christ que l'Évangile a révélées depuis sa naissance à Bethléem jusqu'à l'âge de 30 ans. 1° Huit jours après sa naissance , il fut circoncis selon la loi de Moïse, et reçut le nom de Jésus. S'il n'eut pas été circoncis, les juifs auraient pu dans la suite le repousser, sous prétexte qu'étant incirconcis il n'était point conséquemment de la race d'Abraham. Le nom de Jésus lui a été donné à bon droit , puisqu'il est venu sauver non-seulement une nation , mais l'humanité
tout entière, en la délivrant non d'une ruine temporelle, mais de sa perte éternelle. 2° Après quarante jours, il fut présenté dans le temple de Jérusalem par sa mère, comme
son fils premier-né, selon le précepte de la loi de Moïse, et dans cette circonstance saint Siméon et la prophétesse Anne le proclamèrent le Rédempteur du monde. Sa naissance avait été révélée précédemment aux bergers par les anges , au moyen desquels Dieu avait coutume de parler aux Juifs ; elle l'avait été ensuite aux trois Rois Mages, par
une étoile miraculeuse ; ces mages s'appliquaient particulièrement à l'astronomie et , en Perse , on donnait leur nom à ceux qui se vouaient aux sciences et à la religion. De
même Dieu révéla la naissance du Sauveur à Siméon et à la prophétesse Anne, par inspiration, l'inspiration étant le moyen ordinaire (1) par lequel il éclaire ses saints. 3°

(1) Ce moyen , ordinaire pour les saints à miracles, à vertus héroïques, est extraordinaire pour nous.

Peu après la naissance de Jésus, saint Joseph averti par un ange que le roi Hérode voulait mettre à mort le Messie , prit l'Enfant et sa mère et s'enfuit en Égypte où il resta jusqu'à la mort d'Hérode. Cependant Hérode fut extrêmement alarmé à l'arrivée des trois rois ou mages venus pour adorer le roi des Juifs nouveau-né; il envoya ses soldats pour tuer tous les enfants mâles à Bethléem et aux environs, depuis l'âge de deux ans et au-dessous : ce furent les saints Innocents dont l'Église célèbre la fête le troisième jour après Noël. 4° A son retour de l'Égypte , Jésus revint avec ses parents et il habita Nazareth. A l'âge de douze ans , il se rendit avec eux à Jérusalem, selon la coutume, pour la fête de Pâques.

Et alors ses parents l'ayant perdu trois jours , ils le retrouvèrent enfin dans le temple , conférant avec les Docteurs, et les étonnant tous par la sagesse de ses réponses. Ils retournèrent ensuite à Nazareth et Jésus leur était soumis , et il croissait en sagesse, en âge et en grâces devant Dieu et devant les hommes. (Luc, 2, 52.) Car quoiqu'il possédât toute grâce et toute science dès sa conception, il n'en laissait toutefois paraître les signes extérieurs qu'à mesure qu'il avançait en âge.

Exhortation. De même que le Christ notre Seigneur s'est soumis à la loi de la circoncision, vous devez, ô chrétiens , obéir en tous points à la loi de Dieu. Si le Christ qui était sans péché, s'est soumis lui-même à la loi faite pour les pécheurs, combien plus , vous qui êtes pécheur, devez-vous vous soumettre à la loi de grâce? Poussière et cendre, apprenez à obéir à votre Dieu ! De même que le Christ a été présenté dans le temple, présentez- vous aussi dans les églises , et là faites l'offrande de vous-même à Dieu, auquel vous êtes redevable de toutes choses, de votre être même.

Adorez votre Sauveur avec les Rois, non plus dans la crèche , mais sur son trône de gloire. Adorez-le aussi sur l'autel avec la même foi qui leur fit adorer le vrai Dieu sous la
forme d'un enfant ; adorez-le vrai Dieu et vrai homme, sous les apparences du pain et du vin, en vous écriant comme saint Thomas , dans l'entraînement d'une conviction profonde : Ah ! mon Seigneur et mon Dieu ! offrez-lui l'or de vos aumônes pour les pauvres ; l'encens d'une dévote prière et la myrrhe d'un cœur mortifié. Songez aux
persécutions d'Hérode, et apprenez, à l'école du saint Enfant Jésus, à souffrir persécution pour la justice ; apprenez des saints Innocents à mourir pour Jésus. En venant avec ses parents à Jérusalem chaque année pour l'époque de la fête , il vous apprend à porter aux fêtes de l'Église le respect qui leur est dû , et à vous montrer ponctuel dans l'accomplissement des devoirs qu'elles vous imposent.

Aux fêtes des saints, remerciez Dieu de toutes les grâces que vous avez reçues par leur intercession. De même que Jésus-Christ de retour à Nazareth était soumis à ses parents ,soyez vous-même obéissant à vos supérieurs spirituels et temporels. Obéissez à ceux que Dieu a placés au-dessus de vous : enfants, obéissez à vos parents, serviteurs, à vos maîtres , chrétiens , à vos pasteurs. Que chacun de vous apprenne de Jésus à faire son devoir selon que son état le demande , en toute soumission et humilité, par le travail ,
la fuite des applaudissements et de la vaine gloire; car il s'est proposé de nous servir d'exemple dans toutes les circonstances de son enfance et de sa jeunesse.

HISTOIRES.

Signification de la Circoncision. — Quiconque a étudié l'antiquité, connaît les tauroboles et les criboles auquel donna lieu en Orient le culte de Mithra. L'effet de ces sacrifices consistait dans une parfaite purification, dans la disparition de tous les crimes, dans une régénération morale et complète.  Afin de renaître ainsi pour l'éternité, on descendait nu dans une fosse profonde, recouverte avec une planche percée d'une foule d'ouvertures. Sur cette planche on égorgeait un taureau ou un bélier, de manière à ce que leur sang, encore tiède, jaillit sur toutes les parties du corps du pénitent. Les anciens regardaient le sang comme un fluide vivant où résidait l'âme ; de là vient qu'ils pensaient que le ciel irrité contre la chair et le sang, ne pouvait être apaisé que par son effusion. Il est donc évident que la doctrine des sacrifices a un rapport intime avec la doctrine de la réconciliation du monde par l'entremise d'un divin Rédempteur. (De Maistre, Soirées de Saint-Pétersbourg, 9e entretien.)

Présentation. — Voici quelle est l'ancienne tradition de l'Église relativement à la consécration de la sainte Vierge au jour de sa Présentation au temple. « Le père de l'auguste Vierge, dit saint Grégoire de Nysse, homme vénérable, connu surtout par son exacte probité et par sa fidélité constante à l'observation de la loi, était arrivé à la vieillesse sans avoir d'enfants, à cause de la stérilité de son épouse. A l'imitation de la mère de Samuel, il pria Dieu de ne lui point refuser la bénédiction accordée par la loi à la fécondité, promettant de consacrer à son service l'enfant qui lui naîtrait. Sa prière ayant été exaucée, il eut une fille qu'il appela Marie. Aussitôt qu'elle fut sevrée, il la conduisit au temple et s'acquitta de son vœu, en la consacrant à Dieu. Après quoi les prêtres l'élevèrent dans ce saint asile comme autrefois Samuel. » (Saint Grégoire de Nysse.)

Fuite en Égypte. — Ce pays était plein de superstitions et d'idoles : on y adorait les bœufs, les béliers, les boucs, les chiens, les chats, les crocodiles, etc. Jésus-Christ y entra pour la délivrer de ces ignominies et la consacrer au vrai Dieu. Aussi une antique tradition rapporte-t-elle que les idoles tombèrent, comme Dagon, en présence de l'arche, à l'entrée de Jésus-Christ en Égypte. Près de l'endroit qu'habitait la sainte famille en Égypte, il y avait un jardin , arrosé par une fontaine petite mais abondante, où la sainte Vierge, dit-on, lava souvent l'enfant Jésus, et dans laquelle saint Joseph puisa plus d'une fois de l'eau pour lui et la sainte Vierge. Les habitants entourent cet endroit, et particulièrement cette fontaine, d'une grande vénération. (Adricomius, Description de la Terre-Sainte.)

Jésus parmi les docteurs, etc. — A l'imitation du saint enfant Jésus, une foule d'enfants chrétiens , tels que saint Bernardin de Sienne, saint Pierre de Luxembourg, saint Louis de Gonzague, sous l'Ancien Testament, les Tobie, les Samuel, etc., ont fait leurs délices de servir Dieu par la prière et l'étude des choses saintes.

Enfance et jeunesse de Jésus passées dans l'obéissance et le travail jusqu'à trente ans. Un enfant, nommé Joachim, n'avait reçu d'autre héritage de ses parents que la pauvreté et de mauvais exemples. Mais, grâce à un prêtre charitable et zélé, il apprit à devenir un enfant vertueux et soumis. A l'âge de quinze ans il fut envoyé au service, parce qu'on ne pouvait plus le nourrir.  Il eut le bonheur de rencontrer un maître qui le traita comme son propre fils. Bientôt, ses frères et ses sœurs s' étant mariés, les parents de Joachim le rappelèrent près d'eux pour en recevoir des soins. C'était un moment critique: eh bien! le respectueux, le docile enfant, n'hésita pas à quitter le meilleur des maîtres pour le plus détestable des pères.  « Reste, lui dit celui-là, j'aurai soin de tes parents, et puis ils ne méritent guère tes services. — Dieu les mérite, reprit le jeune homme; je ne veux pas les abandonner dans leur vieillesse, quelque durs qu'ils aient été pour moi, ils sont toujours les auteurs de mes jours et je suis toujours leur fils. — Va, mon cher ami, lui dit son maître, Dieu te bénira, parce, que tu es un enfant d'obéissance. » L'avenir ne démentit point la prophétie de l'homme de bien. ( Morale chrétienne. )

SECTION IV.

La manifestation , ou de la vie publique du Christ.

D. Quand Notre Seigneur se fit-il connaître lui-même au monde ? —

R. Vers l'âge de trente ans qui est l'âge parfait de l'homme. —

D. A qui s'est-il fait connaître? — R. D'abord aux Juifs, parce que la promesse du Messie leur avait été faite , à eux et à leurs ancêtres. —

D. Comment a-t-il été manifesté aux Juifs ? — R. Par son précurseur, saint Jean-Baptiste, par la voix de Dieu le Père disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, enfin par sa doctrine et ses miracles.

Instruction. Le temps était enfin venu où la divinité de notre Sauveur, qu'il avait cachée durant son enfance et sa jeunesse, devait être clairement manifestée. Parvenu à l'âge parfait de l'homme , il commence à prêcher sa loi et à opérer des miracles pour la conversion du monde. Dans ce dessein, Jean-Baptiste, le précurseur, est envoyé d'avance pour préparer les Juifs à le recevoir. Saint Jean était un personnage bien extraordinaire : il était né de parents qui étaient saints tous les deux, après avoir été conçu par sa mère, sainte Élisabeth, à un âge avancé, où elle ne pouvait espérer d'avoir naturellement un enfant ; sa naissance et sa grandeur future avaient été annoncées par un ange à son père Zacharie.

Sanctifié dès le sein de sa mère, il était venu au monde au milieu de l'allégresse du peuple. Outre ces prérogatives de saint Jean , sa vie mortifiée dans le désert , et son baptême de la pénitence par lequel il avait converti un grand nombre de Juifs, donnèrent lieu d'abord au peuple (Luc, 3, 15), puis au sanhédrin ou grand conseil de la nation, de soupçonner qu'il était peut-être le Messie. Ils lui députèrent en conséquence une ambassade de prêtres et de lévites pour savoir s'il l'était réellement , ou s'ils devaient en attendre un autre. Sa réponse fut prompte et claire : il déclara qu'il n'était point le Christ (Jean, 1), mais que Jésus de Nazareth était la personne qui leur avait été annoncée ; quant à lui, il n'était que son héraut, indigne de délier les cordons de sa chaussure. Pour obtenir le témoignage de Jean-Baptiste , pour recevoir surtout l'autorisation de Dieu le Père et donner l'exemple de la soumission aux conseils aussi bien qu'aux préceptes du Seigneur, le Christ, lorsque, pour la première fois il se manifesta aux Juifs, se présenta lui-même publiquement, afin de recevoir le baptême de Jean. En effet, à cette occasion les Cieux s'ouvrirent, on vit l'Esprit-Saint, sous la forme d'une colombe, descendre sur Jésus , et l'on entendit une voix céleste qui disait : Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui ,j'ai mis toutes mes complaisances (Matthieu 3, 17); et saint Jean rendait aux Juifs ce témoignage sur Notre-Seigneur : Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui efface les péchés du monde. (Jean, 1, 29.)

Immédiatement après son baptême , Jésus se retira dans le désert, où il jeûna quarante jours et quarante nuits, et alors il fut tenté par le diable (l`ange déchu). Et comme tous les genres de tentations qui viennent assaillir nos âmes, se rapportent aux plaisirs , aux honneurs ou aux richesses , le tentateur ne craignit pas de tenter le Seigneur par ces trois séductions accoutumées : Par le plaisir, lorsqu'il lui dit : Commandez que ces pierres deviennent des pains. ( Matthieu 4, 3.) Le pain dans l'Écriture est habituellement pris pour toute espèce de nourriture ; par l'orgueil, lorsqu'il lui suggéra de se précipiter du pinacle du temple, en cédant à un sentiment de vaine gloire et d'ostentation , pour être reçu dans les mains des anges ; par les richesses et à vrai dire par toutes ces tentations à la fois , lorsqu'il lui montra tous les royaumes de la terre et leur magnificence. Quoiqu'il ne pût commettre de péché, puisqu'il était Dieu et homme, Jésus a bien voulu être tenté personnellement, afin d'obtenir à l'homme, par cette complète victoire sur le tentateur de l'humanité , la grâce de surmonter toutes les tentations.

Quelque temps après, des noces eurent lieu à Cana en Galilée. Jésus, avec sa mère et ses disciples, y fut invité. Là le vin étant venu à manquer, il changea l'eau en vin à la prière de sa mère, et opéra par cette transsubstantiation son premier miracle. De ce moment, il commença à prêcher l'Évangile et fit des miracles innombrables à travers toute la Judée et la Galilée ; les Juifs accouraient en foule pour être témoins de ses miracles, et entendre ses discours , et dès-lors sa renommée se répandit dans les contrées voisines.

Exhortation. Apprenez, ô chrétien, par l'exemple de saint Jean-Baptiste, à mener une vie d'innocence, de pureté, d'humilité, de pénitence, afin d'augmenter en vous la grâce que vous avez déjà reçue. Apprenez du Christ, qui , après sa victoire sur le tentateur, a été servi par les mains des anges, que la mortification et le jeûne sont le moyen de vaincre les tentations des malins esprits, et aussi d'arriver à la société des saints anges. Observez donc les jeûnes de l'Église ; acceptez-les comme venant du Christ et en imitation de son propre jeûne, persuadé que c'est par la prière et le jeûne que l'on chasse les démons. Le premier miracle de notre Sauveur aux noces de Cana a été opéré dans le but de conférer une faveur, et à la demande de sa mère ; tous ses miracles ont été dans la suite de nombreux bienfaits. Considérez , ô chrétien , les miracles de grâces, les innombrables bénédictions spirituelles qu'il vous a prodiguées jusqu'ici , et priez-le qu'il daigne les augmenter par l'intercession de Marie , particulièrement celles dont vous avez le plus besoin. Ayez envers Marie une dévotion spéciale ; car, si elle jouissait d'une telle influence auprès de son Fils tandis qu'elle était sur la terre , assurément elle n'est pas moins puissante maintenant dans les cieux.

HISTOIRES.

Manifestation de Jésus-Christ. — Puisque Notre- Seigneur est venu se manifester au monde , c'est sans doute pour que nous pussions le connaître, le posséder. Saint Laurent Justinien étant âgé seulement de dix-neuf ans, et cherchant, selon l'inclination de son âge, son repos aux créatures, sans l'y pouvoir trouver, la sapience (sagesse) lui apparut en forme d'une vierge douée d'une incomparable beauté, majesté et splendeur, qui surpassait de beaucoup celle du soleil, et avec un visage très-gracieux et des paroles très aimables, lui dit : « Pourquoi, mon bien-aimé , vas-tu ainsi épandant les affections de ton cœur, et rôdant parmi les créatures pour y trouver ton contentement? Ce que tu cherches, c'est moi seul qui le possède , tu le trouveras infailliblement en moi, jouissant dès cette vie d'une paix incroyable et d'un merveilleux repos d'esprit, si tu me prends pour épouse. Là-dessus lui désirant savoir qui elle était, elle lui dit qu'elle était la sapience de Dieu qui avait pris chair humaine pour le salut des hommes, et qu'il ne fit point de difficulté de consentir. Ayant donc consenti et reçu des offres si avantageuses, elle lui donna le baiser de paix et d'un saint amour, puis disparut, laissant la flèche dans le cœur du jeune homme, qu'il porta tout le reste de ses jours , aimant d'un amour embrasé , tendre, fort, fidèle et constant cette divine épouse. (S. Laurent Justinien, In fascieulo amoris... Traduit par Saint-Jure.)



Dernière édition par MichelT le Dim 23 Oct 2016 - 22:23, édité 1 fois

MichelT

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Message par MichelT Dim 23 Oct 2016 - 22:22

SECTION V.

De la doctrine de Jésus-Christ.

D. La doctrine du Christ est-elle plus excellente que celle de Moïse ? —

R. Oui, elle est plus excellente. — D. En quoi ?

R. Elle révèle plus clairement les mystères de la foi, elle enseigne de plus grandes vertus et donne la grâce pour mettre la loi en pratique.

Instruction. La loi a été donnée par Moïse, mais la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ. (Jean 17.) Bien que l'ancien et le nouveau Testament soient de Dieu tous les deux , cependant le dernier est plus excellent que le premier, parce que la loi ancienne était donnée à un peuple qui est comparé aux enfants dans leur minorité , sous l'autorité de leurs tuteurs, et conséquemment incapables encore de la même perfection que l'homme ; tandis que la loi nouvelle a été donnée pour enseigner toute la perfection qu'il est possible d'atteindre en cette vie. L'ancienne loi n'était parfaite que relativement, eu égard au peuple et au temps où elle fut donnée ; mais elle n'avait pas, comme la nouvelle , une perfection absolue.

Dans la loi ancienne , les Juifs devaient croire à un seul Dieu, créateur du ciel et de la terre ; mais le mystère de la sainte Trinité n'était pas clairement et explicitement révélé. C'était réservé au Fils unique de Dieu , qui est dans le sein du Père , et qui , sans abandonner le sein du Père , est venu dans le monde , et a révélé ce mystère sublime de la divine nature subsistant en trois personnes distinctes. Ainsi , il a commandé à ses apôtres de baptiser tous les chrétiens au nom du Père , et du Fils , et du Saint-Esprit, déclarant par là que les trois personnes sont égales, puisque tout le peuple doit être consacré à Dieu au nom de toutes les trois. II nous enseigne aussi en termes clairs l'unité de Dieu : Moi et le Père nous sommes un. (Jean, 10, 30.)

Les vrais Juifs comprenaient par ces paroles qu'il se faisait égal à Dieu. Si le Fils est un avec le Père , parce qu'il procède du Père par génération , et que la nature divine lui est communiquée par cette procession ; si , d'autre part , le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, et possède avec eux la même nature divine, les trois personnes sont égales et ne font toutes trois qu'un seul Dieu. En outre, les Juifs dans l'ancienne loi, bien que pénétrés de la foi au Messie à venir, n'étaient pas certains que ce dut être un Dieu incarné ; et , comme rien alors n'était plus nécessaire, après la croyance en un seul Dieu, que la foi en Celui qui devait venir pour être le Rédempteur du monde, le mystère que Jésus révèle après celui de la Trinité, dans l'Évangile, c'est qu'il est lui-même le Messie prédit par Moïse et les prophètes, le Fils unique du Père, égal à lui, le même Dieu avec lui : Moi et le Père, dit-il, nous sommes un. (Jean , 10, 30. )

Il se déclare vraiment homme et il dit en cette qualité : Le Père est plus grand que moi. (Jean,14, 8. ) Et parce que beaucoup de Juifs, des membres du Sanhédrin aussi bien que les Sadducéens, niaient à cette époque l'immortalité de l'âme et la résurrection du corps, point sur lequel la vraie philosophie païenne fut toujours flottante , il révéla clairement de plus la dignité , l'immortalité, la véritable nature, la félicité de l'âme, la future résurrection des corps et la vie du monde à venir. Quant aux préceptes moraux de la loi ancienne, il n'était pas venu les abolir, mais les accomplir avec une plus parfaite exactitude. C'est pourquoi, au commencement de son évangile, il exprime son estime pour la loi de nature , contenue dans les écrits de Moïse et des prophètes, en déclarant que ceux qui la violent en quelque point seront les derniers dans son royaume, c'est-à-dire dans l'Église militante ou triomphante ; tandis que celui qui l'observe et qui l'enseigne aux autres , sera grand dans le royaume des cieux.

La loi de nature, sans la religion révélée, ne suffit pas pour nous donner la perfection exigée par notre situation dans l'ordre surnaturel ; également aucune religion ne saurait être non plus suffisante, si elle ne renferme la loi de nature et la sainteté de la morale. Jésus, dans son Évangile, a donc mis , comme une condition essentielle pour obtenir la vie éternelle , l'observation des commandements et spécialement des deux principaux : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre âme, de tout votre esprit, et de toutes vos forces, et votre prochain comme vous-mêmes (Marc, 12, 30, 31 ); déclarant ainsi que l'amour de Dieu est notre bien le plus essentiel et que l'unique moyen de le conserver dans notre cœur c'est d'accomplir chacun des autres préceptes de la loi.

Pour l'amour du prochain , il se manifeste par les œuvres de charité et de miséricorde, en nourrissant ceux qui ont faim, en donnant à boire à ceux qui ont soif et des vêtements à ceux qui sont nus , en rendant le bien pour le mal , en pardonnant les injures, en priant pour nos ennemis et persécuteurs, en faisant du bien aux bons et aux méchants , à celui qui est juste et à celui qui ne l'est pas, comme Dieu le fait à notre égard ; en faisant dans toute circonstance ce que nous voudrions que d'autres fissent pour nous, et en souhaitant à nos amis et à nos ennemis le même bonheur qu'à nous-mêmes.

Les païens eux-mêmes ont possédé la notion des vertus morales ; mais la connaissance de la vertu n'est pas la vertu , à moins que cette connaissance ne soit réduite en pratique ; et cela n'est pas possible tant que la nature qui nous en détourne violemment, n'est pas subjuguée. Aussi le Christ, dans l'Évangile , a-t-il souvent prescrit le renoncement à soi-même , la mortification , le jeûne, le courage à porter notre croix, de manière à vaincre la nature corrompue. Autrement nous ne serions vertueux qu'en spéculation et jamais en pratique. Si la divine loi du Christ enseigne toute vertu, elle défend aussi tout péché, même le moins grave ; et non-seulement elle condamne l'acte extérieur , mais encore les désirs cachés et les mauvaises pensées volontaires.

Elle représente le péché comme le plus affreux de tous les maux et l'œuvre du démon (l`ange déchu) , comme infiniment haï de Dieu et subversif de notre bien essentiel; il faut l'éviter au risque de tout perdre, même la vie ; il faut quitter tout ce qui donnerait occasion de le commettre, même un père, une mère , un frère , une sœur, une épouse , quand même cela nous serait aussi cher que notre œil , aussi nécessaire que notre main droite. L'amour du monde étant une source de péchés et de tentations, puisqu'il enflamme nos passions mauvaises, le Christ prononce de nombreuses malédictions contre le Juif riche mais charnel, qui borne ses espérances à cette terre ; il apprend à ses disciples le mépris de toutes les choses d'ici-bas et l'attachement du cœur à Dieu et aux joies du ciel : c'est là le comble de la sagesse ; il déclare que les degrés par lesquels nous devons nous élever à l'éternelle béatitude, sont précisément le contraire de ce que le monde appelle le bonheur.

Tout en réprouvant le péché comme la chose la plus détestable du monde et comme le malheur éternel de l'impénitent, Jésus-Christ représente Dieu comme infiniment miséricordieux, toujours prêt à pardonner lorsqu'on veut retourner à lui ; il déclare ouvertement qu'il est venu dans le monde chercher et sauver ceux qui ont péri ; et en preuve de cette vérité, l'Évangile nous représente plusieurs qui ont retrouvé le bonheur par la pénitence : la femme adultère pardonnée, la Madeleine purifiée, le publicain justifié, le prodigue réhabilité , Pierre rentré en faveur après sa chute, le paradis promis au larron au dernier instant de sa vie : par où l'on voit que , grâce à la victime immolée pour nous, le pénitent peut obtenir le pardon même au dernier moment.

Afin de nous déterminer à pratiquer sa doctrine, notre Sauveur nous propose les plus puissants motifs : une éternité de tourments dans l'enfer pour le pécheur, une éternité de joie dans le ciel pour le juste. Il représente l'enfer comme un lac de feu , un lieu de ténèbres , de gémissements et de grincements de dents ; un feu qui ne s'éteindra jamais , un ver qui jamais ne mourra. Il dépeint le ciel sous l'image d'un banquet, de noces, d'un royaume, d'un paradis où les délices et la joie se renouvelleront sans fin dans la vision et la jouissance de Dieu. Mais faibles comme nous le sommes , nés dans le péché et avec une nature corrompue , pouvions-nous , réduits à la lettre de la loi , privés de la grâce qui est un secours surnaturel découlant immédiatement de Dieu, éviter le mal ou rien faire de méritoire pour le ciel ? Non, et c'est la plus excellente propriété de la nouvelle loi de conférer la grâce par les sacrements qui sont peu nombreux, mais faciles à recevoir et puissants dans leur effet.

La loi et la religion du Christ étant destinées à subsister jusqu'à la fin du monde , et ne devant être remplacées par aucune autre, attendu qu'elles enseignent la plus haute perfection à laquelle il soit possible d'atteindre en cette vie, même à l'école du maître le plus habile, le Christ a institué en conséquence une Église , afin de les propager et de les conserver, Église à laquelle nulle autre Église ne doit succéder. Il a commandé expressément à tous de l'écouter et de lui obéir ; il lui a promis que les portes de l'enfer ne prévaudraient point contre elle , mais que la vérité demeurerait en elle à jamais et que lui-même l'assisterait toujours, jusqu'à la fin du monde.
Il a établi les apôtres premiers pasteurs de cette Église avec pouvoir d'ordonner leurs successeurs , et il a donné pour chef aux apôtres saint Pierre, avec la charge de paître le troupeau entier , brebis et agneaux , et d'exercer l'apostolat parmi les Juifs comme parmi les gentils. Il lui a remis les clefs du royaume des cieux avec le pouvoir de les transmettre à ses successeurs. Ainsi établie et fondée sur la foi du Christ, avec les sacrements d'institution divine, l'Église ne doit jamais éprouver de changement de la part d'aucune puissance humaine, pas même de la part des apôtres.

Les serviteurs de Dieu, depuis le commencement du monde, ayant toujours été persécutés par les méchants, le fondateur de l'Église nous a prévenus qu'elle grandirait à travers les tribulations, les vexations, les persécutions ; que parents, enfants, frères, seraient divisés l'un contre l'autre au sujet de cette divine religion, professée par celui-ci, haïe par celui-là ; mais il a ordonné de mépriser le respect humain, et , au lieu de craindre l'homme, de ne redouter que Dieu seul ; enfin de le confesser devant les hommes pour qu'il nous reconnaisse devant son Père. Il a promis à tous ceux qui le serviraient fidèlement que pas un cheveu de leur tête ne périrait, qu'il rendrait leur âme heureuse après la mort et que leur corps ressusciterait glorieusement de la poussière.

Il nous annonce qu'à la fin aura lieu le jour du jugement, où il viendra lui-même juger le monde; et alors les réprouvés seront condamnés à la peine éternelle en enfer, tandis que les justes auront en partage la vie éternelle dans son royaume. Cette loi du Christ, il ne l'a pas tracée lui-même par écrit, comme celle de Moise. Car il était plus convenable à la dignité d'un si grand personnage, d'un législateur tel que le Fils de Dieu fait homme, de graver sa loi dans l'âme et dans le cœur de l'homme.

Exhortation. Embrassez , ô Chrétien , la doctrine du Christ, qui est venu non-seulement en qualité de rédempteur pour payer la rançon de votre péché, mais aussi comme un maître pour vous montrer le chemin de la vie éternelle. A quoi vous servirait-il à la fin d'avoir cru, si vous n'avez pas vécu selon ses enseignements? Adorez la très-sainte Trinité qu'il vous a révélée ; vous ne pouvez obtenir le salut sans croire aux trois personnes divines , le Père , le Fils et le Saint-Esprit, ou sans les glorifier. Professez la foi au Christ, Fils de Dieu incarné, le même Dieu avec le Père et le Saint-Esprit ; reconnaissez qu'il est vraiment homme, non pas seulement en figure et en apparence , mais aussi en substance : ce sont les deux points cardinaux de son Évangile , et les deux principaux mystères de notre foi : pour celui qui n'y croirait pas , il n'y a pas de salut.

Que votre foi dans l'immortalité de l'âme et la résurrection future , si clairement révélée par Jésus-Christ , ne chancelle jamais aux objections des athées et des libertins, qui se moquent du bonheur éternel et qui espèrent l'anéantissement de leur âme après la mort. Rappelez-vous, Chrétien , les avertissements de Jésus-Christ et que le salut de votre âme immortelle soit pour vous l'unique chose nécessaire ! Méditez fréquemment sur les joies du paradis et sur les peines de l'enfer, sur l'éternité des unes et des autres.

Efforcez-vous d'entrer dans la vie par l' étroit sentier de l'observance des commandements , dans lequel si peu marchent avec assurance. Après l'amour de Dieu par-dessus toutes choses, ouvrez aussi votre cœur à l'amour du prochain , qui doit se manifester par les œuvres de la charité fraternelle : car il est impossible que vous soyez uni à Dieu, si vous avez de l'inimitié pour votre prochain. Pratiquez, aussi bien que les circonstances de votre vie le permettront, les conseils évangéliques, qui nous ont été donnés dans le seul but de faciliter l'observation plus parfaite des commandements de Dieu. Voyez le péché avec horreur, comme le plus grand de tous les maux , puisqu'il détruit votre plus grand bien. Et pourtant, si vous avez le malheur d'en de venir victime , ne désespérez pas; mais souvenez-vous que vous avez un avocat auprès de la majesté outragée du Père éternel, et ne perdez jamais de vue cette infaillible vérité : que les portes de la miséricorde sont toujours ouvertes au pénitent. Comme vous ne pouvez pas faire le bien ni éviter le mal sans la grâce , demandez-la sans cesse selon la recommandation de Jésus-Christ. Le Ciel vous préserve d'accueillir jamais la pensée d'abandonner la communion de l'Église catholique, qui, après avoir été établie par Jésus-Christ, et fait ses preuves contre les puissances de l'enfer, subsistera jusqu'à la fin du monde ! Ah ! quel malheur attend ceux qui ont déserté sa communion ! Préparez votre âme contre les tentations, les tribulations, les persécutions auxquelles le juste est exposé à chaque instant; apprenez à porter votre croix de la même manière que votre divin Sauveur, suivez la doctrine qu'il vous a enseignée et qui vous conduira à la vie éternelle.

HISTOIRES, CITATIONS ET AVEUX.

Mystères. — « C'est le caractère de l'infini de ne pouvoir être compris, et celui du fini de ne pouvoir comprendre celui qui le surpasse infiniment. » ( Fénelon, lettre 4e sur la Religion.)

Vertus plus grandes. « Ceux-là sont bien aveugles qui s'imaginent que le christianisme est fini. Le christianisme verra mourir bien des doctrines qui ont la prétention de lui succéder. Tout ce qui a été prédit de lui s'accomplira. (Jouffroy.)

Grâces plus puissantes. —  Pour mieux faire ressortir le mystère et la puissance de la grâce, retracez vigoureusement l'histoire de la conversion du monde par un crucifié. « Qu'était cet homme? qu'était la difficulté de sa tâche ? humainement parlant pouvait-il convertir le monde plongé dans l'erreur et la corruption? Non. Donc c'est l'effet d'une action supérieure, surnaturelle, surhumaine, donc » Dans le même but, retracez également certaines conversions particulières ; celles de saint Paul, de saint Norbert, etc.

SECTION VI.

Des miracles et des vertus du Christ.

B. Notre Sauveur a-t-il fait des miracles? R. Oui, il en a fait de plus grands que ceux qui avaient été opérés avant lui.

Instruction. La doctrine enseignée par le Christ renfermant beaucoup d'articles qui surpassent la raison humaine et des préceptes contraires à la chair et au sang , il fallait
qu'il en confirmât la vérité par des miracles incontestables. Sans cette preuve , qui aurait cru qu'il était Dieu, sous la forme d'un homme ? Il a donc fait des miracles publiquement , à la vue des Juifs , durant trois ans et demi , à travers la Judée et la Galilée. Il a montré sa puissance sur toutes les parties du monde et sur toute espèce de créature; sur les cieux, la terre , les airs, les eaux; sur tous les êtres raisonnables et privés de raison , spirituels et corporels ; sur les bons anges et les démons.; sur les vivants et sur les morts. Il a montré sa puissance non-seulement sur toute sorte de maladie , mais sur la mort même , soit en guérissant sans exception partout où il se trouvait, les malades qu'on lui présentait, ou qui même étaient absents, tels que boiteux, aveugles, sourds, muets , paralytiques , hydropiques, fiévreux, soit en rappelant des morts à la vie.

Il est vrai qu'en opérant plusieurs de ces miracles, il invoqua Dieu son Père , par la prière , afin d'indiquer qu'il était homme et comme tel soumis à son Père ; mais ordinairement il agissait par sa propre et seule puissance en faisant ces prodiges, puissance illimitée quant au temps, aux lieux, aux personnes, aux maladies. II guérissait toute personne et toute maladie à son gré, sans aucun contrôle, d'un mot de sa bouche , d'un attouchement de sa main , d'un signe de sa volonté ; sans préparation préalable de prière ni de jeûne , sans invocation d'aucune puissance supérieure à la sienne. De tels caractères rendent ses miracles bien différents de ceux qu'avaient autrefois opérés Moïse et les prophètes , et de ceux que ses disciples ont opérés depuis. Ils démontrent incontestablement qu'il est le Christ Fils de Dieu : car tous ces miracles ont été faits pour prouver chaque point de sa doctrine.

Mais de tous ses miracles , le plus grand était sa propre personne et sa vie, sa vie cet étonnant exemple d'humilité, de douceur, de bonté et de patience à l'égard des Juifs ; il
était pour les pécheurs d'une bénignité qui ravissait d'admiration, mais sévère lorsqu'il foudroyait l'hypocrisie des Scribes et des Pharisiens. Il enseignait la Voie de Dieu dans
la vérité sans considérer la qualité des personnes , et sans craindre qui que ce fût; mais en même temps il vivait dans une parfaite soumission à tous les pouvoirs établis , et observait ponctuellement depuis son enfance les cérémonies de la loi Mosaïque ; car ces cérémonies, types et figures du Christ lui-même, ne pouvant avoir leur entier accomplissement qu'à sa mort, devaient être en vigueur jusque là.  Il s'y conforma donc tant pour donner aux autres l'exemple d'une parfaite obéissance que pour ne pas fournir une occasion de scandale aux Juifs, qui, sans cela, l'eussent désavoué pour leur Messie; transgresseur de la loi de Moïse, il n'eut pas été à leurs yeux l'envoyé du Dieu qui est l'auteur de la loi de Moïse.

Exhortation. 0 chrétien ! étudiez , admirez , et imitez la vie de Jésus, car nul ne sera sauvé s'il ne lui ressemble. ( Rom. 8, 29. ) Soyez donc humble à son exemple , dans toute votre conduite, dans vos paroles, vos actions, vos conversations vos manières d'agir, soyez-le surtout au fond de votre cœur. Évitez, comme il l'a fait, la vaine gloire et
les louanges que se donne l'amour-propre. Rien de si opposé à un disciple du Christ que l'orgueil. L'orgueilleux ne trouvera pas plus de place au ciel que Lucifer. Conduisez-vous
vous-même, à l'imitation de Jésus, avec douceur, bonté et humanité à l'égard des autres hommes. Considérez vos propres infirmités et vos saurez mieux comment supporter celles des autres ; reconnaissez-vous dans leurs imperfections. Obéissez toujours, selon votre modèle, à tous les préceptes de la loi divine, aux commandements de l'Église , aux ordres légitimes de tous les pouvoirs établis et supérieurs. Appliquez votre âme, comme le Christ , à la prière et à. la sainte contemplation. Dites avec lui : Je suis venu non pour faire ma propre volonté , mais la volonté de celui qui m'a envoyé. (Jean, 6, 38.) La vie d'un chrétien n'est qu'une imitation de la vie du Christ. L'accomplissement de la volonté de Dieu en toutes choses , ce sera votre joie , votre gloire et votre couronne. Celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement. ( 1 Jean, 2, 17. )

AVEUX ET CITATIONS.

Miracles. — « Dieu peut-il faire des miracles, c'est-à-dire, peut-il déroger aux lois qu'il a établies? Cette question sérieusement traitée, serait impie, si elle n'était absurde. Ce serait faire trop d'honneur à celui qui la résoudrait négativement que de le punir; il faudrait l'enfermer. Mais aussi quel homme a jamais douté que Dieu pût faire des miracles? » (J.-J. Rousseau, Lettre de la mont., 3° lettre.)

Le grand saint Augustin témoigne avoir vu sur les reliques de saint Protais, à Milan, un enfant aveugle recouvrer la vue, et plusieurs autres miracles où il dit lui-même avoir assisté. De quoi accuserions-nous lui et deux saints évêques, Aurélius et Maximus, qu'il appelle ses recors? Sera-ce d'ignorance, ou de malice, ou d'imposture. Est-il homme en notre siècle, si impudent qui pense leur être comparable, soit en vertu et en piété, soit en savoir, jugement et suffisance ? (Montaigne, Essais, Liv. 1, ch. 16.)

Saint Augustin nous donne en ces mots la raison des miracles : « Dieu est invisible à nos yeux, et à force de voir des miracles continuels par lesquels il gouverne le monde et conserve ses créatures, nous n'en sommes plus touchés : à peine se trouve-t-il quelques méditatifs qui font attention aux merveilles de la végétation et de la reproduction des plantes.

Il a donc fallu que Dieu, par un trait de miséricorde, se réservât certaines œuvres singulières, inusitées et contraires au cours ordinaire de la nature pour réveiller l'attention des hommes, quand il le juge à propos, et leur faire entendre sa voix. C'est un plus grand miracle d'entretenir l'ordre et la vie dans l'univers entier, que de rassasier
cinq mille hommes avec cinq pains : nous ne sommes point étonnés du premier, parce qu'il est continuel; nous admirons le second, non parce qu'il est plus grand, mais parce qu'il est plus rare. ( S. Augustin, Traité 24, sur saint Jean, n° 1er.)

Vertus. — « Il n'est point de vertu dont Jésus ne nous ait donné le précepte et le modèle, et seul, entre tous les législateurs et les docteurs du monde, il instruit encore mieux par l'exemple de toute sa vie que par ses discours. » (Duvoisin, Dim. évang.)

« Son précepte par excellence, c'est l'humble, douce et bienfaisante charité... Jamais homme n'a parlé comme cet homme! Par tout sur son passage, a sa voix , naissent tes plus éclatants prodiges, et ces prodiges sont des bienfaits, car il passe en faisant le bien. Je ne sais quelle sublimité paisible de grandeur, de bonté, de génie, de puissance, éclate en lui, et révèle plus que l'homme, plus que l'ange... Tel est Jésus-Christ. » ( Le R. P. Ravignan.)

« Celui qui a pu faire adorer une croix, celui qui a offert pour objet du culte aux hommes, l'humanité souffrante, la vertu persécutée, celui-là, nous le jurons, ne saurait être qu'un Dieu. Son passage sur la terre est, humainement parlant, le plus grand événement qui soit jamais arrivé chez les hommes, puisque c'est à partir de la prédication de l'Évangile que la face du monde a été renouvelée. Il n'y a point de philosophes de l'antiquité à qui on n'ait reproché quelque vice; les patriarches même ont eu des faiblesses; le Christ seul est sans tache! (De Chateaubriand.)

ARTICLE IV. — SECTION I.

Qui a souffert sous Ponce-Pilate , a été crucifié, est mort et a été enseveli.

Entrée à Jérusalem. Institution de l'Eucharistie. Recommandations et Promesses.

Comment le Christ entra-t-il la dernière fois à Jérusalem, lorsqu'il y vint souffrir sa passion? —

R. Il y entra pour ainsi dire en triomphe. —

D. Comment fut-il accueilli ? –

R. Par le cri d'Hosannah et aux acclamations du peuple.

D. Qu'arriva-t-il ensuite? —

R. II mangea la Pâques ou l'agneau pascal , selon la coutume, avec ses disciples, la veille de sa passion. —

D. Que fit-il à ce dernier souper? —

R. Il se leva de table et lava les pieds à ses disciples. —

D. Que fit-il encore ? —

R. Il se mit de nouveau à table et institua la sainte Eucharistie. —

D. Quelles paroles adressa-t-il à ses disciples? —

R. Il leur parla de plusieurs choses qui arrivèrent ensuite. Ainsi, il leur dit que l'un d'eux le trahirait, que les autres l'abandonneraient, qu'un d'eux encore le renierait; il leur recommanda l'humilité, la charité et promit de leur envoyer le Saint-Esprit pour les consoler.

Instruction. Notre bien-aimé Sauveur va commencer à accomplir ce qu'il avait annoncé précédemment à ses disciples :Voilà que nous montons à Jérusalem, et que le Fils de l'homme sera livré aux princes des prêtres, aux scribes et aux anciens. Ils le condamneront à mort et ils le livreront aux Gentils. ( Marc, 10, 33. ) Le temps était arrivé où le Christ devait souffrir pour notre rédemption ; il fit à Jérusalem une sorte d'entrée triomphale , comme pour montrer qu'il allait mourir avec joie pour notre rédemption. Mais au milieu des acclamations du peuple, prévoyant la ruine de la cité sainte, il versa des larmes sur elle et déplora l'aveuglement des Juifs. Comprenons par là que nous ne devons pas nous enorgueillir des honneurs lorsqu'ils nous arrivent , mais plutôt considérer que nous vivons dans une vallée de larmes. Aujourd'hui le Christ est reçu aux acclamations du peuple et au retentissement de l'hosannah , et quelques jours après la foule s'écrie : « Otez-le ! Crucifiez-le. » Oh ! combien sont inconstantes les joies de ce monde ! Que les esprits des hommes sont mobiles ! Les ennemis du Sauveur ne purent supporter son triomphe. Ils rassemblèrent le grand conseil des Juifs et sa mort y fut décidée ; ils convinrent avec Judas, pour trente pièces d'argent, que celui-ci le livrerait entre leurs mains.

Alors Jésus ordonna à ses disciples de préparer une salle spacieuse, pour y faire avec eux la dernière cène. Il y institua l'adorable sacrement de l'Eucharistie, dans lequel il leur donna son corps et son sang , sous les apparences du pain et du vin, comme la plus grande preuve d'amour qu'il pût leur laisser avant de mourir. Mais auparavant il leur lava les pieds pour marquer avec quelle pureté ils devaient et nous devons le recevoir. Voici comment s'accomplit cette divine institution.

Après le repas, Jésus prit du pain, rendit grâces à Dieu, bénit le pain , le rompit et le distribua à ses disciples en disant : Prenez et mangez; ceci est mon corps. (Matthieu 26, 26; Marc, 14; Luc, 22.) Prenez et mangez ; ceci est mon corps qui sera livré pour vous. Faites ceci en mémoire de moi. ( 1 Cor. 11, 24.) De la même manière il prit le calice ou la coupe pleine de vin, et, lorsqu'il eut rendu grâces , il le donna à ses disciples en disant : Buvez de ceci vous tous , car ceci est mon sang, le sang du Nouveau Testament , qui sera répandu pour un grand nombre , pour la rémission des péchés. (Matth. 26, 27, 28; Marc, 14; Luc, 22. ) Saint Paul ajoute : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang; faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous la boirez. (1 Cor. 11, 25.)

En cette circonstance, il ordonne prêtres ses apôtres et leur communique le pouvoir de faire ce qu'il a fait, c'est-à-dire de consacrer ce sacrement sous deux espèces pour représenter son corps immolé et son sang versé sur la croix : c'est là proprement le sacrifice de propitiation pour le péché. Le pouvoir de l'offrir n'appartient qu'aux
prêtres, car, lorsqu'il le conféra, les apôtres seuls étaient présents. Il remplit ainsi la promesse qu'il avait faite auparavant, quand il leur disait : Je suis le pain vivant qui est
descendu des deux. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement. Et le pain que je vous donnerai , c'est ma chair, pour la vie du monde. (Jean, 6, 51,52.)

Ce divin sacrement est un mémorial perpétuel et impérissable de la mort du Christ, un monument de son éternel amour pour l'humanité , un gage éclatant de la gloire future, pour celui qui y croit humblement et le reçoit dignement. Celui qui mange ce pain, avec une foi ferme et un cœur pur, vivra éternellement. (Jean , 6, 59. )

Exhortation. Suivez, ô chrétien ! votre divin Sauveur avec admiration, amour , compassion et douleur à chacune des scènes de sa passion , depuis son entrée à Jérusalem jusqu'à son arrivée au sommet du Calvaire. A l'exemple de la bienheureuse vierge Marie , recueillez avec soin dans votre cœur tout ce que vous voyez ou entendez. Soyez humble comme Jésus aussi bien dans la prospérité que dans l'adversité. Fussiez-vous toujours heureux, n'oubliez pas les larmes de Jésus sur Jérusalem ; car en tout temps la pénitence est nécessaire. Et même, à raison de votre fragilité, plus vous êtes élevé , plus vous avez besoin de déplorer vos fautes, étant exposé davantage au péché. Que les vanités du monde ne vous fassent pas perdre le souvenir de Dieu ; apprenez au contraire à mépriser la brièveté et l'inconstance des choses de la terre. Le temps passe, mais la vérité qui est de Dieu demeure éternellement.

Adorez avec une humble soumission le mystère de la sainte Eucharistie, et admirez l'amour de Jésus pour, vous dans cette institution. Quoique les mystères de la foi soient
incompréhensibles aux sens et à la raison, nous pouvons cependant comprendre que si Dieu a pu créer quelque chose de rien, comme lorsqu'il tira le monde du néant , il peut
aussi aisément changer une chose en une autre ; et, si nous croyons qu'il est vrai Dieu sous la forme humaine , comment hésiterions-nous à croire qu'il est réellement Dieu
et homme sous l'apparence du pain et du vin , puisqu'il a dit lui-même , lui qui est la vérité éternelle : Ceci est mon corps , ceci est mon sang ?

De même qu'on a vu le Saint-Esprit sous la forme d'une colombe, de même aussi devons nous croire le Christ présent sous les espèces sacramentelles. Renouvelez votre foi dans ce mystère , en disant souvent avec saint Thomas : Oh ! mon Seigneur et mon Dieu ? Contemplez ce divin sacrement avec un respect profond, recevez-le fréquemment avec un cœur plein d'amour, de foi, de pureté, et dites quand le démon vous suggère des doutes : Je crois , Seigneur, fortifiez mon, peu de foi. (Marc, 9, 23. )

HISTOIRES.

Pour Jésus-Christ il n'y eut pas loin du Thabor à Gethsémani , du triomphe de son entrée à Jérusalem aux scènes déchirantes de la passion. Gardons- nous donc de compter
sur la faveur des hommes et sur la prospérité.

La cène, le lavement des pieds. Héraclius, par un dernier effort, venait de reconquérir, avec la gloire et les provinces perdues de l'empire, le précieux trésor de la sainte croix. Jaloux de reporter lui-même le bois sacré sur la montagne du Calvaire, il en chargea ses épaules et s'avança entouré de toute la pompe impériale. Mais tout-à-coup, ô prodige ! Héraclius se trouve arrêté par une force invisible. Le patriarche lui conseille de quitter les ornements impériaux pour revêtir des habits pauvres , et marcher nu-pieds. L'empereur, après s'être rendu à cette invitation, arrive sans peine au mont du Calvaire. Imitons l'humilité du Sauveur, et ce qui nous parait , ce qui est souvent insurmontable à la nature, nous deviendra facile. ( Mansi, Bise. 12, n° 6. )

L'Institution de l'Eucharistie. Il n'est pas de symbole qui figure, mieux que le pélican , l'immense amour que notre Rédempteur nous a témoigné dans sa passion. Le pélican faisant son nid à terre, les reptiles viennent porter à ses petits des blessures mortelles. Alors , tel qu'un habile médecin , il ouvre à coups de bec les veines de ses petits infectés du venin des serpents, et lorsqu'ils sont morts , après avoir perdu tout leur sang, d'un coup de bec le pélican s'ouvre à lui-même les entrailles, et répand sur les siens au prix de sa propre vie un sang abondant qui leur procure une nouvelle naissance. Tel est du moins le récit des anciens. C'est l'image de Jésus-Christ. L'antique serpent (l`ange déchu) nous a plongés dans la mort éternelle , en vomissant sur nous les noirs poisons du péché. Qu'a fait Jésus-Christ, il a versé sur nous les flots de son sang et nous a rendu la vie. ( Mansi, Disc. 18 , n° 2. )

Recommandations et promesses. Saint Jean l'Évangéliste, encore sur la terre , brûlait de voir la glorieuse mère de Dieu. Marie lui apparut, eut avec lui un long entretien sur les souffrances de Jésus-Christ et lui dit entre autres choses : « Mon Fils accordera trois prérogatives à quiconque méditera assidûment sa passion : 1° De pouvoir, avant la mort, formuler un acte de contrition fervente; 2° d'avoir à son agonie la mère de Dieu pour protectrice spéciale ; 3° d'obtenir par elle tout ce qu'il désirera. »
( Engelgr. Dim. de la Quinquag. p. 3. )

SECTION II.

Qui a souffert sous Ponce-Pilate.

Agonie. Prière. Trahison de Judas. Miracles, etc.

D. Que fit le Seigneur après la dernière cène ? —

R. Il sortit de Jérusalem et alla au jardin des Oliviers, nommé Gethsémani, accompagné de ses apôtres; puis il s'écarta pour prier, ayant seulement avec lui Pierre, Jacques et Jean. Là, il commença à être saisi de frayeur , de trouble et d'angoisse, ce qu'il exprima en ces termes : Mon âme est inondée de tristesse jusqu'à la mort; restez ici et veillez avec moi.

D. Qu'arriva-t-il ensuite? —

R. S'éloignant de ses disciples environ à la distance d'un jet de pierre, il tomba sur sa face et il sua, dans une agonie, des gouttes de sang qui coulèrent sur le sol. A trois reprises, il conjura Dieu le Père de retirer de lui cette coupe amère , c'est-à-dire les souffrances dont Dieu l'abreuvait alors ; mais à chaque fois il ajoutait : Cependant que votre volonté soit faite et non pas la mienne. En ce moment un ange descendit du ciel pour le conforter. —

D. Les disciples ne priaient et ne veillaient donc pas avec lui ? —

R. Non. Il s'approcha d'eux, trois fois dans le jardin. La première fois il les trouva endormis et leur adressa ce reproche : Quoi ! n'avez-vous pu veiller une heure avec moi ? Veillez et priez , afin de ne point entrer en tentation; car l'esprit est prompt, mais la chair est faible. La seconde fois, il les trouva si appesantis par le sommeil qu'ils ne surent que répondre ; à la troisième , il dit : Dormez maintenant et reposez-vous, voici l'heure qui approche , et le Fils de l'homme sera livré entre les mains des pécheurs. Levez-vous , allons ; celui qui doit me livrer est près d'ici. (Matthieu 26.) —

D. Qu'arriva-t-il immédiatement après? —

R. J.-C. avait à peine achevé ces paroles, que le traître Judas Iscariote parut avec une troupe de soldats envoyés par les Prêtres, les Scribes et les Pharisiens afin de saisir Jésus. Judas leur donna ce signal : «Celui que je baiserai, c'est lui-même. » S'approchant alors de Jésus, il dit : Maître , je vous salue , et il l'embrassa. ( Matthieu 26, 49.) Jésus, pour l'exciter au repentir , lui dit seulement : Mon ami, à quel dessein êtes-vous venu? Judas ! vous trahissez le Fils de l'homme par un baiser !

— D. Fut-il alors pris par les soldats ? —

R. Il vint d'abord à leur rencontre et leur demanda : Qui cherchez-vous? — Ils répondirent : Jésus de Nazareth. C'est moi , leur dit Jésus : Mais aussitôt qu'il leur eût dit : c'est moi , ils tombèrent à la renverse. ( Jean, 18, 4, 5, 6, ) Il répéta encore les mêmes paroles ; puis il se livra lui-même Ils le saisirent et le lièrent.

— D. Quelle fut la conduite des disciples, qui étaient au jardin avec lui? — R. Ils s'offrirent à le défendre par l'épée. Saint Pierre tira la sienne et coupa l'oreille de Malchus , un des serviteurs du grand Prêtre ; mais Jésus l'en reprit, lui commanda de remettre son glaive au fourreau et il guérit Malchus par un miraculeux attouchement de sa main. Nonobstant ces miracles, ils l'emmenèrent, et alors tous ses disciples s'enfuirent.

Exhortation. Apprenez de Jésus au jardin des Oliviers à prier avec un respect profond, avec ferveur, humilité et résignation.  Apprenez encore de Jésus au jardin comment on supporte patiemment l'adversité : c'est Dieu qui l'impose ; c'est le devoir de l'homme de s'y soumettre. Père, que votre volonté soit faite et non pas la mienne ! Puisse cette prière être toujours la vôtre ! L'ange consolateur vous donnera, dans les plus rudes épreuves, la force de supporter vos afflictions comme le juste châtiment du péché, et de vous soumettre aux coups de la miséricorde divine, afin de pou voir éviter les traits de la justice infinie. Gardez-vous de la cupidité qui a été la perte de Judas et qui est celle d'une multitude d'âmes. Êtes-vous comblés de biens, n'y attachez point votre cœur et servez-vous-en pour acquérir les richesses de l'éternité. Faites souvent la charité au pauvre, en compensation de vos excès dans la jouissance de la fortune. Ne rejetez pas l'invitation de Dieu, à l'exemple de Judas et des satellites pervers que n'ont pu ébranler les miracles opérés sur eux-mêmes. Mais cessez de commettre le péché et repentez-vous, tandis que le temps de la miséricorde dure encore. Votre perversité serait plus criminelle que la leur si, après tant de miracles faits pour votre conversion et celle du monde, si après les miracles de la sagesse et de la miséricorde divine qui brillent maintenant à vos yeux, vous demeuriez obstinés dans le péché. Ne vous fiez pas à vos propres forces , comme ont fait Pierre et les autres disciples ; mais veillez et priez afin de ne pas tomber dans la tentation : la tentation conduit au péché et le péché à l'enfer. Que celui donc qui se croit debout, prenne
garde de tomber. (Luc, 22. )

HISTOIRES.

Agonie au jardin de Gethsémani. « Ce jardin appartient actuellement aux Pères de la terre Sainte , aux Franciscains. On y remarque encore huit oliviers, d'une épaisseur extraordinaire; ils sont très-anciens, car il est reconnu que les oliviers vivent plusieurs siècles... Au fond de ce jardin est situé le lieu où les apôtres dormaient, pendant que le Seigneur priait. L'endroit où le Seigneur pria son Père d'éloigner de lui ce calice, est une grotte appelée la grotte des angoisses de la mort. Elle doit encore être dans le même état qu'elle était à l'époque de la passion du Sauveur. Elle forme une espèce de voûte formée par trois piliers de la même pierre. Lorsque la porte , dont les Franciscains ont la clef, est fermée, la lumière du jour pénètre par une ouverture pratiquée dans la partie supérieure et protégée par un épais grillage , afin d'arrêter les pierres que les Turcs pourraient y lancer. A la place où Jésus sua du sang est un autel , sur lequel se trouve un tableau représentant les angoisses de la mort du Sauveur. On y lit cette inscription : Ici la sueur devint comme des gouttes de sang qui tombaient sur la terre. » « On montre aussi le sentier que Judas suivit en venant trahir son Maître. Il a près de vingt pas de longueur sur deux de largeur. Les Turcs l'ont entouré d'un double mur comme étant un terrain maudit. » ( Géramb, Pèlerinage. )

Prière, l'ange conforte Jésus-Christ. Voici ce que sainte Thérèse écrit à son sujet : « Je tâchais de me représenter souvent Jésus , et je me trouvais bien dans la méditation des mystères où il était seul : il me semblait que dans une pareille affliction il ne pouvait m'empêcher de venir lui apporter des consolations. J'aimais surtout l'accompagner à sa prière au jardin ; là je considérais fréquemment son angoisse, sa sueur; je désirais, s'il était possible, essuyer sa face souillée de cette sueur, mais, je me le rappelle , je ne l'osai jamais , à cause de la multitude de mes péchés. Toutefois j'étais debout près de lui, le cœur oppressé de mille pensées. Depuis plusieurs années, même avant mon entrée en religion , je passais la majeure partie des nuits dans la méditation de ce mystère qui , je le crois , a singulièrement contribué
à mon progrès spirituel. » (Ribadeneira, Vie de sainte Thérèse.)

Trahison de Judas. Un clerc de Saint-Martin , nommé Brice , ne cessait de calomnier et de persécuter son maître. Notre saint le souffrit avec une telle patience, que les serviteurs s'étonnaient de ne pas voir châtier et dégrader un clerc aussi impie : « Jésus-Christ, leur dit-il, a supporté le traître Judas, et moi , je ne tolérerais pas Brice le calomniateur ! » Cette ineffable douceur convertit Brice , changea ses mœurs , et en fit un saint , qui , selon la prédiction du saint évêque , lui succéda sur le siège de Tours.
( Sulpice Sévère , Vie de saint Martin. )

Miracles du renversement des Satellites; de la guérison de Malchus. Jésus-Christ se montre homme par ses souffrances et ses faiblesses ; et Dieu par la liberté de ses actes et la puissance des miracles. Écoutons saint Ambroise. « Jésus est fatigué du voyage pour soulager les personnes fatiguées; il demande à boire pour donner à ceux qui ont soif une boisson spirituelle ; il a faim pour donner la nourriture du salut à ceux qui ont faim ; il meurt pour donner la vie; il est enseveli pour ressusciter; il est suspendu à un gibet tremblant pour raffermir ceux qui tremblent ; il couvre le ciel de ténèbres pour éclairer ; il ébranle la terre pour la consolider; il bouleverse la mer pour l'apaiser; il ouvre les tombeaux des morts pour montrer que c'est le domicile des vivants. Il naît d'une Vierge pour que l'on croie qu'il est né de Dieu; il feint de ne rien savoir pour instruire les ignorants ; il semble adoré comme juif pour être adoré comme vrai Fils de Dieu. » ( Ambroise, De la foi, liv. IV, ch. 2. )

SECTION III.

Qui a souffert sons Ponce-Pilate.


Interrogatoire chez Anne et Caïphe. Triple reniement et résipiscence de saint Pierre. Fin de Judas.

D. Que fit-on de Jésus après l'avoir pris dans le jardin?

— R. On le mena lié à Anne et Anne l'envoya à Caïphe qui était grand-prêtre cette année. —

D. Comment en usèrent-ils à son égard devant Caïphe? —

R. Les chefs des prêtres, les scribes et les anciens, réunis en conseil avec le grand prêtre, examinèrent Jésus relativement à sa doctrine et à ses disciples. Jésus leur répondit qu'il avait toujours enseigné publiquement et qu'il n'avait point donné d'enseignement secret. Pourquoi m' interrogez - vous ? Interrogez ceux qui ont entendu ce que je leur ai dit. Ils savent ce que j'ai enseigné. A ces paroles un des serviteurs du grand-prêtre frappa Jésus au visage en disant: Est-ce ainsi que tu réponds au grand - prêtre ? Jésus répartit avec une grande douceur : Si j'ai mal parlé, montrez ce que j'ai dit de mal. Mais si j'ai bien parlé pourquoi me frappez-vous ? (Jean, 18. )

D. Quels témoignage les ennemis du Sauveur produisirent-ils contre lui? —

R. Ils suscitèrent beaucoup de faux témoins , mais leurs dépositions ne parurent pas suffisantes.

D. Quelle question le grand -prêtre et le conseil lui ont -ils particulièrement posée ? —

R. Ce fut celle-ci : Si tu es le Christ, dis – le nous.— Il leur répondit : Si je vous le dis, vous ne m'en croirez pas. — Es répliquèrent tous : Tu es donc le Fils de Dieu ? — Il leur répondit : Vous dites vrai : je le suis . (Luc, 22. ) Le Grand-prêtre lui fit la même question et l'adjura, par le Dieu vivant, de leur dire s'il était le Christ, fils de Dieu. Jésus répondit : Vous l'avez dit. Alors le Grand - prêtre déchira ses vêlements , en disant : II a blasphémé. Qu'avons-nous encore besoin de témoin? Qu'en pensez - vous ? — Ils répondirent : Il mérite la mort ! (Matthieu 26 ), et ils le condamnèrent immédiatement.—

D. Comment le traitèrent-ils alors ? —

R. Ils lui crachèrent au visage, lui bandèrent les yeux, et lui donnèrent des
soufflets en disant par moquerie : Devine , O Christ, quel est celui qui t'a frappé. Et ils ajoutèrent une foule d'autres outrages et de blasphèmes. —

D. Que souffrit-il en outre dans la maison de Caïphe ? —

R. C'est là que Pierre le renia trois fois. Accusé la première fois par une servante d'avoir été compagnon et l'un des disciples de Jésus de Nazareth, il le nia. Il sortit du palais dans la cour et le coq chanta. Alors une autre servante dit : Cet homme était aussi avec Jésus de Nazareth, et, interrogé par ceux qui étaient avec lui auprès du feu , s'il n'était point l'un des disciples de Jésus, il le nia une seconde fois et assura qu'il ne connaissait point cet homme. Environ une heure après, un parent de Malchus dit à Pierre : Ne t'ai-je pas vu dans le jardin avec lui ? Pierre le nia une troisième fois avec malédiction, jurant qu'il ne savait pas ce qu'on disait. Et à ce moment le coq chanta une seconde fois. —

D. Pierre ne s'est-il point repenti? —

R. Jésus se retourna, jeta sur Pierre un regard et lui remit à l'esprit ce qu'il lui avait prédit : Cette nuit , avant que le coq chante deux fois, vous me renierez trois fois. Ce coup d'œil de Jésus était un regard de miséricorde , accompagné d'un mouvement secret de la grâce; il ouvrit les yeux à Pierre sur sa faute et toucha tellement son cœur qu'il sortit immédiatement et versa des larmes amères. —

D. Que devint Judas? —

R. Il renvoya l'argent, prix de son forfait, et il se pendit de désespoir, confessant qu'il avait trahi le sang innocent.

Exhortation. Suivez Jésus, ô Chrétien , dans la cour de Caïphe, et là, voyez ce que vous pouvez apprendre à son école. On rend contre lui beaucoup de faux témoignages.
Gardez-vous de vous souiller jamais des abominables péchés de parjure, de jugement téméraire , de calomnie ou de détraction : car vous auriez inévitablement à en rendre compte au tribunal de Dieu. ( Romains 2 , 3. ) Si votre prochain lance contre vous quelque fausse accusation, défendez- vous vous-même avec douceur, ne rendez pas le mal pour le mal, mais soyez vainqueur du mal par le bien.

Jésus, lorsqu'on attaquait sa propre réputation comme homme, garda le silence ; mais quand la gloire de son Père fut également offensée, il se déclara courageusement Fils de
Dieu. Soyez humble aussi à son exemple , si vous avez à souffrir des injures personnelles; mais soyez toujours prêt à défendre l'honneur de Dieu , ne rougissez jamais de professer et de pratiquer la vérité de son Évangile, pour lequel il est mort: Quiconque me confessera devant les hommes, moi aussi je le confesserai devant mon Père qui est dans les Cieux. (Matthieu 10, 32. )

Soyez frappé de stupeur par les insultes, les railleries et les blasphèmes de ceux qui ont railler le Christ; le ciel vous préserve de vous unir a eux pour profaner le saint nom de Jésus par des malédictions et des jurements. Considérez dans Pierre l'inconstance et l'infirmité de la nature humaine. Ayez confiance en Dieu et défiez-vous de vous-même. Si vous avez imité Pierre dans le péché , imitez-le dans sa prompte pénitence, lorsque Jésus se tourne vers vous par l'inspiration de la grâce divine.

Sous le poids de vos énormes péchés, ne tombez pas dans la présomption au sujet de la divine miséricorde, et ne désespérez pas non plus du pardon comme Judas; mais dites
avec le roi David : « Ayez pitié de moi , ô Dieu , selon votre grande commisération, et selon la multitude de vos miséricordes effacez mon iniquité.» ( Psaumes 1, 1. ) Dieu a le pouvoir et la volonté de nous pardonner, lorsque nous sommes vraiment humbles et repentants. Jamais il ne méprise un cœur contrit et humilié.

HISTOIRES.

L'escalier que monta le Sauveur pour se rendre au palais de Pilate, est connu sous le nom de scala sancta ( saint escalier). Il est maintenant à Rome , près de la Basilique de saint Jean de Latran. Notre-Seigneur l'a monté trois fois pendant sa passion ; la première pour son interrogatoire , la seconde en revenant de chez Hérode, et la troisième après sa flagellation. Il a vingt-huit marches ; il fut transporté à Rome par ordre de Constantin. Il a été tellement usé par les fidèles qui le montaient à genoux, qu'on a été obligé de le revêtir eu tables épaisses de bois de noyer, et on les a déjà renouvelées plusieurs fois. ( Mgr. Mislin, les saints Lieux.)

Reniement, résipiscence de saint Pierre. Après le troisième reniement de saint Pierre , Jésus jeta sur lui un regard qui pénétra son cœur et le convertit. Pénétré d'une vive douleur , Pierre quitta le théâtre de son crime , et donna un libre cours à ses larmes. Ce n'était pas parce qu'il avait renié un maître redoutable, mais parce qu'il avait renié celui qu'il aimait. ( Chrysostome ) Pierre ne mit point de bornes à sa contrition , et l'on dit que ses joues se cavèrent par les torrents de larmes qu'il ne cessa de répandre jus qu'à sa mort. Le prince des Apôtres apprit ainsi à ne pas compter sur ses propres forces, et à compatir aux faiblesses du prochain. D'autre part, la miséricorde divine fut si grande à son égard et la pénitence de saint Pierre si efficace, que malgré la profondeur de sa chute , il ne fut pas moins établi le prince des pasteurs, le chef du collège apostolique. Évitons le péché, mais si nous tombons, après avoir imité saint Pierre dans son péché , imitons-le dans sa pénitence. ( Voyez Godescard. Vies des Saints, 29 juin. )


Dernière édition par MichelT le Jeu 10 Jan 2019 - 22:21, édité 1 fois

MichelT

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Ven 28 Oct 2016 - 12:40

SECTION IV.

Qui a souffert sous Ponce-Pilate.

Jésus-Christ devant Pilate, devant Hérode. Barabbas préféré. Flagellation et couronnement. Tolle ! crucifige !

D. Qu'est-ce que les Juifs firent de Jésus le lendemain matin? —

R. Ils le conduisirent à Ponce Pilate qui était gouverneur de Judée pour l'empereur Tibère. Ils l'accusèrent devant Pilate d'être un séditieux qui avait excité le pays à la révolte, et détourné le peuple de payer le tribut à César. A ces fausses accusations Jésus ne répondit rien. Mais Pilate ne découvrant aucune preuve contre lui et apercevant clairement que les Juifs l'accusaient par méchanceté et par envie, il chercha tous les moyens de l'acquitter. Apprenant qu'il était Galiléen, il l'envoya à Hérode Antipas, fils d'Hérode-le-Grand et Tétrarques de Galilée. —

D. Quelle fut la conduite d'Hérode envers Jésus? —

R. Hérode était content de le voir et il s'attendait à être témoin de quelque miracle. Mais Jésus garda le silence à toutes les accusations de ses ennemis devant le tribunal d'Hérode, et il trompa son attente. Hérode le traita pour cette cause avec mépris , il le fit revêtir d'une robe blanche, par dérision, et le renvoya à Pilate. —

D. Que fit alors Pilate ? —

R. Ne voyant aucun sujet de condamner Jésus à mort, il imagina divers moyens pour le mettre en liberté. Il proposa d'abord à la foule de le flageller, et ensuite de l'acquitter. Cet expédient n'ayant pas réussi , il en chercha un autre : comme c'était la coutume à la fête de Pâques de relâcher un prisonnier, il proposa aux Juifs le choix entre Jésus et Barabbas; il pensait qu'ils préféreraient Jésus à Barabbas, celui-ci étant un insigne voleur et un assassin. —

D. Quel choix ont-ils fait?

— R. Le Prince des prêtres persuada au peuple de demander la vie de Barabbas et d'insister pour que Jésus fût mis à mort. —

D. Que fit alors Pilate ? —

R. Ayant reçu de sa femme un message par lequel elle le priait de ne pas se mêler de la mort de ce juste, parce qu'elle avait beaucoup souffert dans son sommeil, la nuit précédente, à son sujet, il s'efforça encore de le délivrer et il demanda une seconde fois aux Juifs sa mise en liberté. Mais ils crièrent de nouveau : Faites mourir celui-ci et délivrez-nous Barrabas. ( Luc, 23, 18. ) —

D. Que répondit Pilate? —

R. Il dit : Quel mal a fait cet homme ? Je ne lui trouve aucun crime qui mérite la mort. —

D. Que dirent les Juifs à cela ? —

R. Ils redoublèrent leur vocifération : crucifiez-le I crucifiez-le! (Luc, 23.)—

D. Pilate essaya-t-il encore de le sauver? —

R. Oui; pour toucher les Juifs de compassion, il donna l'ordre de flageller Jésus et l'abandonna aux soldats. Ceux-ci entrelacèrent une couronne d'épines et la posèrent sur la tête du Sauveur ; puis ils jetèrent sur ses épaules un manteau de pourpre et lui mirent pour sceptre un roseau à la main. Ensuite s'agenouillant ils le saluaient du titre de roi des Juifs, ils le frappaient à la tête avec un roseau et lui crachaient à la figure. —

D. Que fit Pilate après cela? —

R. Il produisit Jésus devant la foule et dit avec compassion : Voilà l'homme ! elle n'en cria pas moins : Crucifiez-le! Pilate le défendait en disant : Je ne lui trouve aucun crime. Les Juifs alléguaient qu'il était digne de mort parce qu'il s'était fait lui-même Fils de Dieu. Pilate n'en craignait que plus de le condamner à mort. Les Juifs s'en apercevant, insistèrent en dernier lieu sur ce que Jésus s'était déclaré roi, et comme c'était là une rébellion contre César, ils dirent à Pilate qu'il n'était pas l'ami de César s'il renvoyait Jésus. Pilate entendant cela et redoutant qu'ils n'adressassent à l'empereur une accusation contre lui, condamna enfin , pour les contenter, Jésus au supplice de la croix. Mais en même temps il se lava les mains en disant : Je suis innocent de la mort de ce juste: à vous d'en répondre. Mais tout le peuple s'écria : Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants. (Matthieu 27 - 24, 28. )

Voilà comment Pilate et les chefs des Juifs se rendirent coupables de la mort du Christ. Pilate en est convaincu par ses propres paroles : J'ai le pouvoir de vous crucifier, lui avait-il dit, et j'ai aussi le pouvoir de vous délivrer. (Jean,19,10. ) — Mais les Juifs qui le livrèrent aux mains de Pilate, commirent un plus grand crime : car ils connaissaient mieux sa doctrine et ses miracles; aussi le juste jugement de Dieu les poursuivit-il bientôt dans la destruction de leur cité, de leur temple, de leur nationalité; en un mot, le grand sacrifice de la croix mit fin à leur loi et à leurs sacrifices, qui, figures et types du premier, durent cesser leur cours lorsqu'ils furent une fois accomplis.

Exhortation. Apprenez ici , ô chrétien, par l'exemple de Jésus, à supporter toutes les calamités avec douceur, calme et résignation. Ne comptez pas, vous serviteurs, sur un sort meilleur que celui de votre maître : Tous ceux qui veulent vivre dans la piété selon Jésus-Christ souffriront persécution. ( 2 Timothée, 3, 12.) Si vous êtes calomnié, pensez alors aux fausses accusations dont il fut chargé devant Pilate. Si l'on vous traite avec mépris, rappelez-vous Jésus mis en parallèle avec Barabbas. Si l'on vous outrage , voyez Jésus souffleté, fouetté à la colonne et couronné d'épines.

Que jamais le respect humain ne vous détourne de votre devoir, comme Pilate , et ne vous porte à trahir la cause de Dieu : Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. Oh ! qu'ils sont nombreux ceux qui ont perdu comme lui le royaume des cieux en cédant aux funestes influences du monde ! Combien ont perdu l'amour de Dieu par la crainte de l'homme ! Combien sacrifient leur âme de peur que leur corps n'ait à souffrir! Pour vous, chrétien, rappelez- vous la différence qui existe entre les jugements de Dieu et ceux des hommes. Ne craignez pas l'homme, il ne peut nuire qu'au corps ; mais craignez plutôt Dieu qui peut détruire le corps et l'âme et les rendre malheureux durant toute l'éternité !

Ne soyez pas complice, ô chrétien , dans la mort de Jésus. Tous ceux qui tombent dans le péché mortel et ne s'en relèvent point par la pénitence ; les jureurs et les blasphémateurs, les débauchés et les impies, les ivrognes et les intempérants , les esclaves des passions violentes et des inclinations vicieuses de la nature corrompue, ceux qui se font un Dieu de leur ventre, en un mot tous les pécheurs impénitents , crucifient en eux-mêmes le Fils de Dieu. (Hébreux 6, 6.)

Réfléchissez aussi sur les châtiments temporels qui ont accablé les Juifs pour avoir crucifié Jésus-Christ, et n'oubliez pas les peines éternelles qui sont réservées à vos péchés si vous ne les effacez à temps par la pénitence.

HISTOIRES.

Barabbas préféré. — L'impie préfère Barabbas à Jésus, mais le vrai chrétien n'hésite pas à mettre au-dessus de Barabbas, du monde et de ses plaisirs, Jésus, et Jésus crucifié. Une jeune personne, d'une naissance distinguée, voulait entrer dans un ordre très-austère. Pour éprouver sa vocation, la supérieure lui fit une peinture affreuse des rigueurs du cloître. La jeune postulante, paraissant ébranlée, gardait un profond silence.— Ma fille, lui dit la supérieure, vous ne me répondez rien. — Ma mère, repartit vivement la demoiselle, je n'ai qu'une question à vous faire : Y a-t-il des crucifix dans votre maison ? trouverai-je une croix dans cette cellule où l'on est si étroitement logé, où l'on couche si durement ? dans ce réfectoire où la nourriture est si grossière ? dans ce chapitre où l'on reçoit de si sévères corrections ? — Oh ! oui, ma fille, il y en a partout. — Eh bien ! ma mère, j'espère ne rien trouver de difficile, puisque j'aurai un crucifix à côté de moi, dans tous les lieux et dans tous les instants où il faudra souffrir.
(Debussi, Nouveau mois de Marie.)

Flagellation, couronnement. — Un jour de Pâques, le saint vieillard Palémon dit à saint Pacôme, son disciple : « Puisque cette fête est générale, apprêtez-nous à manger. Pacôme prit contre son ordinaire un peu d'huile qu'il mêla avec du sel pilé, et à laquelle il ajouta quelques herbes. Après avoir fait la prière accoutumée, le saint vieillard s'approcha de la table, et voyant ce sel et cette huile, il dit, en portant la main à son front et en versant une abondance de larmes : « Mon maître a été crucifié, et je mangerais de l'huile! non, je n'en ferai rien; » et malgré les instances de Pacôme, il se contenta de prendre du pain et du sel. (Michel-Ange Marin, Vies des Pères des déserts.)

Le pieux roi Louis IX reçut de Baudouin II , empereur de Constantinople, la sainte couronne d'épines, en retour de secours en hommes et en argent. Il alla la recevoir à vingt kilomètres de Sens, suivi de toute sa cour et du clergé, et l'accompagna jusqu'à Paris avec toutes les marques de la componction et de l'humilité la plus profonde. Portée par saint Louis à l'église de Notre-Dame, et déposée à la chapelle de Saint-Nicolas qui tenait au palais, elle reposa dans la suite en la Sainte-Chapelle, que le pieux monarque fit bâtir tout exprès pour renfermer avec l'auguste relique, une partie de la vraie croix. Tous les ans il s'y rendait, le Vendredi- Saint, revêtu de ses habits royaux, la couronne sur la tête , et il exposait lui-même la vraie croix à la vénération du peuple. (Baillet, Vies des saints, 25 août.)

Crucifiez-le! crucifiez-le! - Pilate se lave les mains et condamne l'innocence. — Voici comment Eusèbe raconte la mort du faible, du coupable Pilate. « En proie à toutes sortes de malheurs, il se tua de sa propre main, au rapport des historiens de Rome. C'est à Vienne, dans les Gaules, qu'eut lieu ce drame sanglant. » Adon, évêque de cette ville, parle ainsi : « Pilate, qui avait porté contre Jésus-Christ la sentence de condamnation, fut condamné à un perpétuel exil ; enfin, fatigué des vexations de l'empereur Caligula, il se perça de son épée, et mit fin à tant de maux par une mort anticipée. » (Eusèbe, Adon, Baronius, S. Grégoire de Tours, etc. )


SECTION V.

Qui a été crucifié, est mort et a été enseveli.

Jésus console les filles de Jérusalem. Il est crucifié entre deux voleurs. Insultes. Marie et les saintes femmes. Prières et dernier cri de Jésus.

D. Quelle fut la conduite des chefs Juifs envers Jésus, après sa condamnation à mort ? —

R. Ils l'emmenèrent chargé de sa croix à la montagne du Calvaire pour y être exécuté. Mais comme il tombait sur le chemin , accablé par ce fardeau , ils angarièrent un homme de Cyrène , nommé Simon , à porter la croix à sa place. Jésus , voyant les femmes et le peuple qui le suivaient en pleurant sur son sort , leur dit : Filles de Jérusalem , ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous et sur vos enfants.... car, si on fait cela au bois vert, que ne fera-t-on point au bois sec? (Luc, 23 - 28, 31.)

D. Quel était le supplice de la croix ? — R. C'était le supplice réservé aux plus grands scélérats , c'était de tous les genres de mort le plus infâme et le plus cruel. —

D. Comment Jésus a-t-il été crucifié ? —

R. Ses mains et ses pieds furent percés avec des clous et fixés à la croix , et pour plus grande ignominie on le crucifia entre deux voleurs. Tandis qu'on l'attachait à la croix,
il priait pour ses bourreaux en disant : Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu'ils font. —

D. Les voleurs qui étaient crucifiés avec lui se sont-ils repentis? —

R. L'un des deux le fit, mais l'autre non. Celui qui était pénitent reprenait l'autre de ses blasphèmes et lui disait : Nous recevons le prix dû à nos actions ; mais cet homme n'a fait aucun mal ; et alors s'adressant à Jésus : Souvenez-vous de moi, Seigneur, lui dit-il, lorsque vous serez dans votre royaume. Et Jésus lui répondit : Aujourd'hui, vous serez avec moi dans le paradis. —

D. Combien de temps Jésus resta-t-il suspendu à la croix ? —

R. Durant trois heures, après quoi il rendit l'âme. —

D. Quelle fut, pendant qu'il était en croix, la conduite de ceux qui l'avaient crucifié ? —

R. La foule des spectateurs, le prince des prêtres, les scribes et les anciens, passaient devant la croix, faisant des reproches à Jésus , l'invitant à descendre et à se sauver lui-même, s'il était le Christ, le roi d'Israël et le Fils de Dieu. Les soldats aussi , après l'avoir insulté , partagèrent ses vêtements, et tirèrent au sort sa robe sans couture.

— D. Où était la sainte mère de Jésus pendant son supplice? —

R. Elle était debout au pied de la croix, avec Marie-Madeleine , une autre Marie , et Jean , fils de Zébédée.

— D. Que leur dit Jésus? — R. Il dit à sa mère : Femme , voilà votre fils ; et à son disciple Jean : Voilà votre mère. —

D. A quelle heure Jésus fut-il crucifié? —

R. Environ à la sixième heure , c'est-à-dire vers midi. Et vers trois heures le soleil retira sa lumière et les ténèbres couvrirent toute la terre. —

D. Quand expira- t-il et quelles furent ses dernières paroles ? —

R. Vers la neuvième heure, ou vers trois heures de l'après-midi ; alors il s'écria d'une voix forte : Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m'avez-vous abandonné? C'est-à-dire, pourquoi me laissez-vous souffrir ces cruels tourments ? Peu après , il dit : J'ai soif ; on lui donna à boire du vinaigre et du fiel. En ayant goûté, il dit : Tout est consommé ! puis il s'écria d'une voix forte : Père, je remets mon esprit entre vos mains; et baissant la tête , il rendit l'esprit. —

D. Qu'arriva-t-il à ce moment?

— R. La terre trembla, les rochers se fendirent, le voile du temple se déchira du haut en bas , les tombeaux s'ouvrirent et beaucoup de morts ressuscitèrent. —

D. Que devint le corps de Jésus après sa mort? —

R. Il fut descendu de la croix le même jour, avec l'autorisation de Pilate ; puis Nicodème et Joseph d'Arimathie, disciples de Jésus, l'ensevelirent honorablement dans un tombeau neuf, que Joseph avait pratiqué dans un jardin voisin du Calvaire.

Exhortation. Placez-vous vous-même, chrétien, au pied de la croix et réfléchissez : quel est Celui qui souffre ? C'est le Fils de Dieu fait homme qui souffre et meurt. Qui est-ce
qui le fait souffrir ? Toutes sortes de gens , de la plus haute jusqu'à la plus basse condition, des Juifs et des Gentils, des amis et des ennemis. Ne mettez donc pas votre confiance dans l'homme , qui n'est que déception ; confiez-vous à Dieu seul, parce que seul il est la vérité même. Et que souffre Jésus ? Toutes sortes de tourments ; il n'est qu'une plaie des pieds à la tête, il meurt enfin de la mort la plus atroce et la plus ignominieuse. Ne murmurez donc pas dans vos afflictions , mais regardez la face de Jésus crucifié. Pour qui souffre-t-il ? Pour vous et pour l'humanité entière, afin de rétablir vos droits à l'éternelle félicité dans le royaume des cieux. Que serait -il arrivé s'il n'était pas mort pour la rédemption des hommes ? Ils étaient perdus tous et pour toujours, comme les anges déchus. Quelle ingratitude de l'offenser après cela ! Comment souffre-t-il ? Avec une divine patience. Il ne murmure pas ; il ne se plaint pas, il est comme muet et n'ouvre pas la bouche. Voyez si votre conduite ressemble à la sienne. Comment souffre-t-il encore ? Avec une excessive charité : il prie pour ses ennemis , pardonne à ceux qui le torturent et promet le ciel au larron repentant ; il souffre avec la plus grande douceur, il ne répond point à l'outrage par l'injure, mais il supporte avec la plus incomparable patience les dérisions , l'insulte et la calomnie. Apprenez de lui à rendre le bien pour le mal et à prier pour ceux qui vous persécutent. Apprenez de lui à mourir. Il a dit en expirant : Père , je remets mon âme entre vos mains, et il s'est montré soumis à la loi de la mort. Appliquez-vous à vivre de la vie de Jésus, si vous voulez mourir de la mort de Jésus. Que l'amour parfait pour Jésus , la véritable contrition du péché , l'obéissance à Dieu , la résignation à sa volonté vous accompagnent jusqu'au tombeau !

HISTOIRES.

Jésus console les filles de Jérusalem. — Si Jésus nous console sur la voie douloureuse, nous devons, nous aussi, chercher notre consolation à sa suite. Madame d'Argicourt fut une des plus nobles victimes de la Révolution française, dans la ville de Bordeaux, en 1793. Sa faiblesse était telle en allant à pied à l'échafaud, qu'on lui offrit une voiture. Elle la refusa en disant : « Jésus-Christ , mon divin Maître , est allé de Jérusalem au Calvaire, chargé du bois pesant de sa croix ; si j'ai trop peu suivi ses traces pendant ma vie, j'espère qu'il m'accordera la force de l'imiter dans mes derniers moments. »
(Biographie des croyants célèbres, t. Ier, p. 128.)

Jésus-Christ est crucifié entre deux voleurs. — « D'où vient que vous ne vous fâchez jamais, et que vous n'êtes jamais ému, disait la vertueuse Delphine à saint Elzéar, son époux ! — Eh ! comment pourrais-je me fâcher ou me plaindre à la vue des ignominies et des tourments dont Jésus a été rassasié pour moi ? » Considérons Jésus élevé en croix au milieu de nous et pour nous, et bientôt, comme le bon larron, nous nous frapperons la poitrine de componction et d'amour. (Surius, rapporté par Cossart.)

Un novice de saint François, nourri autrefois dans toutes les délicatesses du monde, ne pouvait se résigner aux rigueurs de la règle, lorsqu'un jour, s'étant mis à genoux devant un crucifix, il fut ravi en extase. Alors le Sauveur lui apparut, et, haussant le bras droit, lui dit en lui montrant la plaie de son côté : « Mettez ici votre main, et trempez-la dans le sang qui en sort; puis, toutes les fois que les austérités du cloître s'offriront à votre pensée, rappelez-vous ce sang, rappelez-vous cette plaie, et bientôt tout vous deviendra doux et facile. » Le novice, revenu de son extase, se conforma aux recommandations du Sauveur, et de ce moment l'amertume des mortifications se convertit en douceur.
(Rodriguez, Perfection chrétienne)

Insultes des passants. — Si Jésus-Christ fut insulté sur la croix par les impies, mille fois il fut honoré par ses adorateurs. C'était sous Dioclétien : pendant qu'un soldat s'exerçait à tirer de l'arc, son habit entr' ouvert laissa voir sur sa poitrine une petite croix d'or. « Oreste, lui dit le général, encore livré aux superstitions païennes, pourquoi portez-vous cette croix? êtes- vous chrétien? — Oui, je le suis, et je m'en fais gloire, repartit le serviteur de Jésus-Christ. J'adore le Fils de Dieu mort pour moi sur la croix. »
On le jeta en prison, et quelque temps après il souffrit le martyre.
(Sumus, cité par Cossart.)

Marie et les saintes femmes au pied de la croix. — Où avez-vous puisé de si utiles connaissances, où avez-vous appris à parler avec tant d'onction, disait saint Thomas à saint Bonaventure ? — Au pied de mon crucifix, répondit-il; voilà mon livre, Jésus-Christ crucifié est mon maître. Des plaies du Sauveur, ajoutait-il, sortent des flèches embrasées, capables d'amollir les cœurs les plus durs et d'échauffer les âmes les plus glacées. (Vie de S. Bonaventure, passim.)

Un religieux, en méditant ces paroles du Christ attaché à la croix : Voilà votre mère! fondait en larmes, à tel point que depuis vingt ans il s'était consumé à force de pleurs, et s'était souvent abreuvé de ses larmes, Toutes les fois que se rappelant la passion de Jésus-Christ, il en venait à ces paroles, il disait à Marie : « Voilà, ô mère ! comme votre Fils est en croix ! puis à Jésus : Voyez, ô Fils ! comme votre mère, inondée de larmes et de douleurs, est debout toute délaissée ! » (Hudolphe de Saxe, Vie de Jésus-Christ, 2e partie.)

Prières et dernier cri de Jésus. — Un vaillant chevalier jura de tirer de l'un de ses compagnons d'armes une éclatante vengeance. Hildebrand , c'était son nom, s'étant levé au milieu de la nuit, se rendit seul et bien armé dans un endroit où il savait que son ennemi devait passer. Chemin faisant il trouve une chapelle ouverte, y entre et s'amuse à regarder les peintures à la lueur de la lampe du sanctuaire. Un premier tableau représentait le Sauveur avec son manteau d'écarlate et sa couronne d'épines; au bas on lisait ces mots : II n'a pas rendu outrages pour outrages. Au bas d'un second, rappelant la triste scène de la flagellation, on lisait ces mots : Lorsqu'il souffrait ainsi il ne menaçait point; un troisième enfin représentait Jésus-Christ en croix avec cette inscription : Mon Père , pardonnez - leur , car ils ne savent ce qu'ils font. Touché, vaincu, désarmé, Hildebrand tombe à genoux, et se relève pour courir pardonner à son ennemi du fond de son cœur. (Schmid et Belet, Catéchisme historique)

Les rochers se sont fendus au pied de la croix, les cœurs s'y sont ouverts au pardon, à la charité, témoin saint Jean Gualbert, qui, à la vue de son ennemi les bras tendus en croix, déposa l'arme qu'il allait plonger dans son cœur. Pourrions-nous contempler la croix sans émotion, sans profit, sans amour pour Dieu et pour nos frères?


ARTICLE V. — SECTION I.

Qui est descendu aux enfers, et, le troisième jour, est ressuscité des morts.

Jésus aux limbes. Pourquoi ? Comment ?

D. Où notre Seigneur est-il descendu après sa mort ? —

R. Dans le lieu des enfers appelé les Limbes. —

D. Pourquoi est-il descendu aux limbes ? —

R. Pour délivrer les âmes des justes qui y étaient retenues. —

D. Quelles étaient ces âmes? —

R. C'étaient les âmes des patriarches, des prophètes et des saints, morts avant la venue de notre Sauveur.—

D. Comment y est-il descendu ? —

R. Ce ne fut ni par impuissance ni en subissant, comme les autres, l'empire de la mort ; mais ce fut par sa volonté. Ce n'était point un captif qui allait partager la captivité des autres , mais un conquérant, triomphant du démon, du péché , de l'enfer et libre entre les morts (Psaume 87, 6) , ainsi qu'il convenait au Fils de Dieu fait homme.

Instruction. C'est une erreur et une impiété de croire , avec quelques-uns, qu'ici l'enfer signifie le tombeau ; d'ailleurs le quatrième article du symbole exprime suffisamment la mort du Christ et son ensevelissement au sépulcre; le cinquième , donc , en disant qu'il est descendu aux enfers, nous apprend que, durant le séjour de son corps au tombeau , son âme est allée dans un autre endroit ; non pas certes, comme on l'a dit par une impiété plus grande encore , dans cette partie de l'enfer où les âmes des damnés souffrent des tourments éternels et la privation de la vue de Dieu ; car l'âme de Jésus, toujours unie à la personne divine, ne pouvait pas plus souffrir cela que la divinité unie
à la nature humaine. Mais de même que son corps resta sans corruption dans le tombeau , ainsi son âme fut dans les enfers sans douleur et sans flétrissure : Vous ne laisserez point mon âme dans l'enfer et vous ne souffrirez point que votre saint soit sujet à la corruption. ( Psaume 15, 10. )

Ici donc par l'enfer où le Christ est descendu, il faut entendre non le lieu des supplices éternels , mais l'endroit où se trouvaient retenues , pour un temps , les âmes de ceux
qui étaient morts dans la grâce de Dieu, depuis le commencement du monde ; soit qu'elles eussent encore quelque reste de péché à expier, soit qu'elles fussent en repos
dans le sein d'Abraham, selon le langage de l'Écriture. Elles attendaient que le Sauveur du monde vînt les introduire dans la gloire du paradis, dont les portes étaient fermées pour Adam et toute sa postérité jusqu'à l'arrivée du Rédempteur. Il ne faut pas s'imaginer que Jésus ne descendit là que par sa puissance ; son âme même , toujours unie à sa divine personne, y est descendue, pour montrer le pouvoir qu'il a obtenu comme homme par sa passion et sa mort : au nom de Jésus , en effet , tout genou doit fléchir, non-seulement au ciel et sur la terre, mais encore dans les enfers dont il délivra les âmes pures et affligées qui s'y trouvaient détenues jusqu'à son arrivée.

Exhortation. Adorez, ô chrétien, chaque mystère de votre Sauveur et Rédempteur. Adorez sa descente aux enfers , puisqu'il y est allé pour vous empêcher d'y descendre
vous-même à l'avenir. Aussi les âmes des saints, maintenant, ne descendent plus dans ces profondes prisons de la mort, mais elles s'élèvent directement au ciel. Toutefois,
pénétrez en pensée dans ces régions ténébreuses et considérez les funestes effets du péché. Là, en purgatoire, voyez les effets du péché véniel et les restes du péché mortel qui doivent y être expiés par des peines excessivement graves , avant que les âmes puissent jouir de la vue de Dieu.

Repentez-vous en conséquence et assurez ici-bas votre pardon. Faites pénitence pour le passé ; évitez à l'avenir tout péché, même les fautes légères, afin que vos larmes d'aujourd'hui vous dispensent d'en verser plus tard. Ici des larmes de quelques instants peuvent délivrer votre âme des longues, des cruelles souffrances du purgatoire.

HISTOIRES.

Jésus-Christ est descendu aux limbes. — Limbes est un mot consacré parmi les théologiens pour signifier le lieu où les âmes des saints patriarches étaient détenues, avant que Jésus-Christ y fût descendu après sa mort et avant sa résurrection, pour les délivrer et les faire jouir de la béatitude. (Bergier, Dict. de théologie.)

Que pendant son séjour au sépulcre, Jésus-Christ soit descendu en âme aux enfers ou limbes, que sa divinité n'ait point cessé d'être hypostatiquement unie à l'âme qui était aux limbes et aux corps qui était au tombeau, etc.. ce sont là des vérités crues par les fidèles et attestées, du moins indirectement, par plusieurs prodiges. Au rapport de Pierre-le-Vénérable , chaque année, au jour du Samedi-Saint, un feu miraculeux descendait du ciel et allumait à la vue de mille spectateurs, les lampes disposées autour du saint Sépulcre. — Le moine Bernard, qui fit, en 870, le pèlerinage de la Terre-Sainte, affirme, dans son itinéraire, avoir été témoin de ce fait miraculeux. Il en est parlé dans l'ancien pontifical de l'église de Poitiers, écrit il y a plus de 800 ans (1). (Guillon, t. 25. — Martène ; Thesaurus anecdotorum.)

Saint Augustin raconte lui-même un miracle éclatant, opéré par un peu de poussière prise au tombeau de Jésus-Christ. La maison d'Hespérius, homme de qualité , était devenue comme un repaire de démons : par la malice de Satan , furieux de ne pas compter Hespérius parmi les siens, il s'y passait des choses à faire dresser les cheveux sur la tête. Au retour d'un pèlerinage en Terre-Sainte, un de ses amis lui donna un peu de terre recueillie au saint-sépulcre. Hespérius la mit dans un de ses appartements , y fit célébrer la messe, et obtint bientôt l'effet de ses prières. Cette merveille fit beaucoup de bruit dans le voisinage, et saint Augustin, qui rapporte ce trait, voulut voir lui-même la maison ensorcelée; c'était ainsi qu'on l'appelait. Sur la permission du saint évêque , Hespérius fit bâtir une chapelle en cet endroit, et, lorsque l'édifice fut achevé , un jeune homme , paralytique , s'y fit transporter et y trouva une guérison parfaite. Évidemment, le tombeau de Jésus-Christ, selon l'oracle d'Isaïe, a été couvert de gloire. ( Lassausse, Explication du Catéchisme de l'Empire. )


SECTION II.

Et le troisième jour, est ressuscité des morts.

- Quel jour Jésus -Christ est -il ressuscité? Pourquoi avec ses plaies? Apparitions diverses.

D. Combien de temps Notre-Seigneur resta-t-il dans le tombeau ? —

R. Il y resta trois jours, mais pas entiers. —

D. Quel jour est-il ressuscité ? —

R. Le dimanche, troisième jour après sa sépulture. —

D. Par qui sa résurrection fut elle révélée ? —

R. Par un ange. —

D. Pourquoi est-il resté si longtemps dans le tombeau ? —

R. Pour montrer qu'il était vraiment mort. —

D. Pourquoi conserva-t-il la cicatrice des plaies de ses mains et de ses pieds , et la marque du coup de lance à son côté, après sa résurrection? —

R. Pour prouver qu'il est ressuscité avec le même corps qui a été crucifié , et aussi pour montrer que ces plaies adorables plaident sans cesse notre cause devant Dieu. —

D. Quels avantages devons-nous recueillir de la résurrection de Jésus-Christ ?

— R. Elle confirme notre foi et notre espérance dans notre résurrection future. —

D. A qui Jésus apparut-il d'abord? —

R. Sa première apparition, mentionnée dans l'Écriture , fut à Marie-Madeleine ; la seconde, aux saintes femmes qui vinrent avec elle pour embaumer son corps ; la troisième à saint Pierre ; la quatrième aux deux disciples qui se rendaient à Emmaüs ; la cinquième à tous les disciples réunis , excepté saint Thomas qui était absent : toutes eurent lieu le jour de la résurrection. —

D. Jésus-Christ apparut-il encore en d'autres temps ? —

R. Oui, beaucoup d'autres fois jusqu'à son ascension. —

D. Quels entretiens eut-il avec ses disciples ? —

R. Il leur dit bien des choses sur le royaume de Dieu.

Instruction. Jésus-Christ étant mort sur la croix , son corps fut déposé dans le sépulcre le même jour ; c'était le vendredi , veille du sabbat des Juifs. Le troisième jour, qui était le dimanche, il ressuscita plein de vie et glorieux ; et les gardes que les Juifs avaient placés auprès du sépulcre furent frappés d'épouvante et restèrent comme morts : un effrayant tremblement de terre avait signalé l'heure de la résurrection. Alors descendit du ciel un ange dont l'aspect était éblouissant. Plusieurs des saintes femmes qui vinrent de grand matin pour embaumer le saint corps , furent saisies d'étonnement , en trouvant le sépulcre ouvert, et elles virent l'ange, qui leur dit : Vous cherchez Jésus de Nazareth qui a été crucifié. Il est ressuscité; il n'est point ici. Mais allez ; dites à ses disciples et à Pierre qu`il sera en Galilée avant vous; c'est là que vous le verrez, comme il vous l'a dit. (Marc, 16 , 6, 7. )

Les apôtres eurent de la peine à croire à la résurrection de Jésus ; et l'un d'eux en particulier ne put en être persuadé qu'après l'avoir vu et après avoir touché les cicatrices de ses mains , de ses pieds et de son côté. Pendant quarante jours qui s'écoulèrent de la résurrection de Jésus-Christ à son ascension, il se montra fréquemment à eux, il mangea et but avec eux, et leur donna des instructions concernant l'établissement de son Église. Il leur conféra le pouvoir de remettre les péchés et d'opérer des miracles ; il leur donna mission et autorité pour prêcher son Évangile à toutes les nations et les baptiser au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit.

Nous devons croire non-seulement que Jésus-Christ est ressuscité, mais qu'il s'est ressuscité lui-même par sa propre puissance. Car sa personne divine restant unie à son corps et à son âme , même lorsqu'ils étaient séparés par la mort , il est évident qu'il pouvait à son gré les réunir de nouveau : Il est en mon pouvoir, avait-il dit, de donner ma vie et il est en mon pouvoir de la reprendre. (Jean, 10, 18.) Il est vrai , Dieu le Père le ressuscitait comme homme , la sainte Écriture l'enseigne; mais comme Dieu, il se ressuscitait lui-même.

Le but de la résurrection n'était pas seulement de faire éclater la puissance et la gloire de Dieu, mais encore de manifester la puissance et la divinité du Christ; c'était pour
qu'il fût glorifié et exalté par ce triomphe sur la mort , lui qui avait été humilié dans sa passion ; c'était enfin pour confirmer notre foi en sa doctrine et l'espérance de notre
propre résurrection : si Jésus-Christ est mort, puis ressuscité , nous aussi , membres d'un corps dont il est la tête , nous ressusciterons un jour, et cela par la même puissance,
qui l'a ressuscité lui-même.  Béni soit Dieu , le Père de Jésus-Christ, Notre Seigneur, qui selon sa grande miséricorde , nous a régénérés par la résurrection de Jésus-Christ, en nous donnant l'espérance de la vie. (1 Pierre 1, 3.)

Exhortation. Au spectacle de la résurrection du Christ, prosternez-vous , ô chrétien? et adorez la puissance infinie de votre Sauveur. L'Agneau qui était immolé et qui est
maintenant ressuscité , mérite que toutes les créatures l'honorent, le glorifient et le bénissent sans mesure. Puisqu'il a confirmé sa doctrine, de cette sorte, c'est votre devoir d'embrasser les vérités et de pratiquer les vertus qu'elle enseigne : l'obéissance , l'humilité , la patience , la mortification, la pénitence. Autrement, votre foi s'élèverait contre vous au jugement. Puisque sa victoire sur la mort affermit en vous l'espérance de votre propre résurrection , il vous convient de la rendre glorieuse , en recherchant les choses d'en haut, en ayant votre conversation dans les cieux, en fixant votre cœur là où est Jésus-Christ, votre trésor, votre rédempteur , votre Sauveur , votre médiateur , votre Dieu, votre béatitude finale ; en veillant enfin pour n'être point enivré par les joies éphémères et fausses de ce monde. Le Christ ressuscité ne meurt plus ; vous aussi ressuscitez de la mort du péché à la vie de la grâce pour ne plus retomber. Menez une vie pénitente à cause du passé ; et que le péché n'ait plus aucun empire sur vous , comme la mort n'en a plus aucun sur Jésus-Christ.

HISTOIRES.

La résurrection de Jésus -Christ prouve sa divinité. — Jésus-Christ s'est ressuscité lui-même, donc il est Dieu. C'est là un argument que personne ne repousse, pas même les incrédules. En 1793, la Réveillère-Lepeaux établit un culte nouveau sous le nom de Théophilanthropie, c'est-à-dire, amour de Dieu et des hommes. En dépit de ce beau titre, en dépit des efforts de son auteur , et de l'argent qu'il répandait pour se faire des sectateurs , la Théophilanthropie ne faisait pas fortune. La Réveillère-Lepeaux en témoigna son chagrin à l'un des plus fameux révolutionnaires de l'époque : « Je n'en suis point surpris , répondit-il en riant ; je pourrais te donner à ce sujet un excellent conseil. — Lequel , interrompit aussitôt le nouveau Grand-Pontife ? — Le voici : Fais-toi tuer vendredi, qu'on t'enterre samedi, tâche de ressusciter dimanche, et je réponds qu'on croira tout de suite à ta nouvelle religion. » La Réveillère-Lepeaux ne jugea pas à propos de suivre ce conseil ; aussi et le fondateur et la secte tombèrent-ils bientôt dans un complet oubli. ( Claudius Hébrard, Journal des bons Exemples. )

Stigmates conservés du Sauveur. — Les stigmates de saint François d'Assise, de sainte Catherine de Sienne, etc., à l'imitation et par la vertu de celles de Jésus-Christ sont une preuve de l'existence de celles du Sauveur. (Voy. la vie de St. François, celle de Ste. Catherine, dans le Bréviaire, etc. )

Certitude incontestable de la résurrection de Jésus-Christ. — Nous trouvons dans le soldat Longin, un apôtre et un martyr de la résurrection de Jésus-Christ. De sa lance il avait percé le côté de Jésus. Lorsqu'il vit le soleil s'obscurcir, la terre trembler, etc., il reconnut, il confessa Jésus-Christ Fils de Dieu. Chargé avec d'autres soldats de garder le corps du Sauveur au tombeau, il fut témoin de sa résurrection , et sa foi devint si ferme qu'il ne craignit pas d'attester la vérité aux ennemis acharnés de Jésus. Vainement l'engagèrent-ils, par promesses et par argent, à publier que les disciples avaient enlevé le corps de leur maître, pendant que lui et ses camarades étaient endormis. Longin persista à dire, que le miracle de la résurrection de Jésus s'était opéré en sa présence et sous ses yeux. Pour se soustraire à la fureur des Juifs, il quitta le service militaire, et se retira en Cappadoce, où il devint un ardent apôtre de Jésus-Christ ressuscité, et couronna sa vie par un glorieux martyre. (Sébastien de Lyro , Exemples et Histoires traduites de l'Espagnol. )

Durant la persécution de Maximien, un officier chrétien, nommé Victor, exhortait vivement ses frères au mépris de la mort. On le saisit à Marseille, on le traîna devant les juges. A toutes les promesses, à toutes les menaces, il répondit : « Je sacrifie tout plutôt que de faillir à Jésus-Christ qui s'est ressuscité lui-même d'entre les morts. Quelque jours après, Victor eut la tête tranchée. La résurrection de Jésus-Christ était le pivot de sa foi, que son généreux martyre soit l'appui de la nôtre ! ( Vie de St. Victor. )


ARTICLE VI.

Qui est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant.

Comment y est-il monté? Pourquoi? Que signifie : Assis à la droite, etc. ?

D. Quand Notre-Seigneur est-il monté au Ciel ?

R. Après être resté quarante jours avec ses disciples, et les avoir confirmés dans la foi en sa résurrection.

D. D'où est-il monté au Ciel ?

R. Du sommet de la montagne des Oliviers.

D. Comment y est-il monté ?

R. En tenant les mains élevées et en bénissant ses disciples.  

D. Fut-il conduit au Ciel par les anges ?

R. Non ; car étant Dieu et homme , il prit lui-même son essor vers le Ciel par sa propre puissance et sa divinité.

D. Pourquoi est-il monté au Ciel?

R. Afin de prendre possession de ce royaume de gloire pour son propre compte et pour le nôtre ; afin d'attirer nos cœurs après lui par une foi solide en sa doctrine , par une espérance inébranlable en ses promesses, et un véritable amour de lui-même par-dessus toutes choses.

D. Que signifient ces paroles : Assis à la droite de Dieu ?  

R. C'est une expression figurée qui signifie la possession de la puissance suprême et de la gloire que le Christ a reçue du Père. Le mot assis, indique une possession et une jouissance inamissibles ; à la droite de Dieu indique la plus haute place d'honneur dans les cieux. Cela signifie aussi que le Christ, comme Dieu, est égal à son Père, et que, comme homme, il est élevé à la plus grande gloire et au plus grand bonheur dont soit capable la nature humaine, unie à la personne divine.

Instruction. Cet article, ô chrétien ! vous enseigne le mystère de l'Ascension que saint Luc a décrite d'une manière admirable. Tous les autres mystères ont une relation avec celui-ci , qui les complète et les perfectionne. Ils commencent à l'incarnation et se terminent à l'ascension , le plus glorieux de tous. Les autres font voir l'humilité et l'abaissement de Jésus ; mais celui-ci fait éclater sa gloire suprême et sa divine majesté. Notre bon Sauveur, ayant achevé l'œuvre de la rédemption par sa mort sur la croix et l'ayant confirmée par sa résurrection, resta quarante jours sur la terre avec ses disciples.

Il leur apparut à diverses reprises , les fortifiant dans la foi, s'entretenant avec eux du royaume de Dieu et du gouvernement de l'Église. En un mot, lorsqu'il eut terminé sur la
terre les affaires de son Père, il n'y prolongea pas son séjour, mais il monta au ciel prendre possession de l'état de gloire qu'il avait conquis pour l'humanité. Alors il emmena au mont des Oliviers ses disciples pour qu'ils fussent témoins de son ascension; là il leva les mains, les bénit et s'éleva dans le ciel à leurs yeux. Deux anges que l'Évangéliste appelle hommes, à cause de la forme qu'ils avaient revêtue, leur apparurent alors et leur dirent : Hommes de Galilée, pourquoi demeurez-vous les yeux attachés au ciel. Ce Jésus, qui en se séparant de vous s'est élevé au ciel , en viendra de la même manière que vous l'y avez vu monter. ( Actes 1, 14. )

Il s'éleva du sommet de la montagne des Oliviers pour que sa gloire parût dans tout son éclat, là où sa passion avait commencé. Il s'éleva aux regards de tous ses disciples, afin
que tous lui rendissent témoignage et prêchassent sa gloire au monde infidèle. Il s'éleva triomphant de satan et de l'enfer, conduisant toutes les âmes saintes au bonheur dont le péché d'Adam les avait privées ; et c'est ainsi qu'il rouvrit les portes du ciel à l'homme exilé.  Il s'éleva , non comme Elie porté par les anges, mais de sa propre puissance et par sa divinité. Il s'éleva dans les cieux , comme à la place la plus convenable à son âme et à son corps glorifiés, et aussi pour entraîner nos cœurs à sa suite : car son ascension confirme notre foi en ses doctrines, fortifie notre espérance en ses promesses, excite notre amour et enflamme notre désir de le posséder : Goûtez les choses d'en haut, non celles de la terre. Le chemin de la gloire, vous le voyez, c'est de souffrir par amour de la justice, a l'exemple du Christ : Il s'est humilié lui-même , s' étant fait obéissant jusqu'à la mort et à la mort de la croix. Aussi est-ce pour cela que Dieu l'a exalté. ( Philippiens 2 , 8, 9. )

Exhortation. Instruit dans la croyance à la glorieuse ascension de notre Sauveur, ô chrétien ! élevez vos yeux et votre cœur là où vous a devancé votre trésor, Jésus, le seul
trésor de l'âme chrétienne. Cette terre est un lieu de bannissement ; le ciel est votre seule demeure. Jésus l'a conquise pour vous à grands frais , et maintenant il en a pris
possession en son nom et au vôtre : car l'Homme-Dieu est la tête de toute l'humanité et nous sommes ses membres ; comme tels nous avons des droits à partager sa gloire, bien
que ce ne soit pas au même degré que lui. Suivez-le au ciel par une foi vivante et non pas morte : Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru! Suivez-le par l'espérance, plein de confiance dans ses mérites, ses promesses et sa grâce. Suivez-le par la charité, tenant vos cœurs intimement unis à lui par l'amour, et vos pensées fixées sur lui dans la gloire. Heureux celui qui ne perd jamais de vue notre bon Sauveur dans cette vallée de larmes.

Recueillez , ô chrétien ! trois leçons en rapport avec les trois grands mystères de notre rédemption. 1° Votre Sauveur est mort sur la croix pour vous apprendre à mourir
à toutes les choses de la terre, en tant qu'elles peuvent être préjudiciables à votre salut. 2° Jésus est ressuscité pour vous apprendre à passer, par la pénitence, de la mort du péché à la vie de la grâce et à la fuite de tout péché pour l'avenir. 3° Jésus est monté au ciel , pour vous enseigner que , durant le temps que votre corps mortel reste sur la terre, vous devez la mépriser, la fouler aux pieds, au lieu de vous attacher à la boue , aux chaînes, à l'exil; et que vos pensées , vos vœux, vos efforts doivent tendre à un bien plus solide , selon la parole de saint Paul : Pour nous, nous vivons dans le ciel. (Philippiens 3, 20. ) Puissent vos esprits et vos cœurs habiter en haut , avec Jésus , dans la gloire éternelle !

HISTOIRES.

Comment  Jésus-Christ est-il monté au ciel ? Outre la manière évidemment céleste dont Jésus-Christ est monté au ciel, nous trouvons dans l'empreinte de ses pas au sommet des Oliviers, un monument permanent de cette divine vertu qui le ravit dans les cieux. « Au centre du sommet de la montagne, dit le baron de Géramb, qui visita la Terre-Sainte en 1833, on voit, dans une espèce de chapelle, le vestige qu'imprima sur le rocher le pied gauche du Sauveur , au moment de quitter la terre pour s'élever dans les cieux. On assure que jadis on y voyait de même l'empreinte du pied droit, mais que les Turcs l'ont enlevée pour la porter dans la mosquée du temple. Quant à l'empreinte du pied gauche, elle existe de manière à ne laisser aucun doute , quoiqu'elle soit un peu usée par les baisers que les pèlerins n'ont cessé d'y donner depuis tant de siècles , et peut-être aussi par quelques pieux larcins qu'une surveillance sévère n'a pas pu toujours empêcher. Cette partie du rocher est aujourd'hui entourée de maçonnerie et confiée à la garde d'un Santon, espèce de moine turc. Cet homme est pourvu de petites pierres carrées qu'il fait toucher au vestige du pied de notre Seigneur , et qu'il offre ensuite aux pèlerins en échange de quelques petits présents. A en juger par la direction de cette trace, notre Seigneur devait avoir le visage tourné du côté du Nord quand il s'éleva au ciel. » (Géramb, Pèlerinage. Voyez aussi Mgr. Mislin, Les saints Lieux.)

Pourquoi y est-il monté? Etienne, plein de foi et du Saint-Esprit, faisait de grands prodiges et de grands miracles parmi le peuple. Les Juifs ne pouvant résister à la force de ses paroles , et ne voulant point se convertir à sa prédication, se livraient contre lui à des transports de dépit et de rage. Etienne levant les yeux au ciel s'écria : Je vois les cieux ouverts , et le Fils de l'homme à la droite de Dieu ! Les Juifs poussant de grands cris et se bouchant les oreilles, se jetèrent sur lui et le lapidèrent. Jésus-Christ est donc
au ciel pour nous y appeler, pour nous donner le courage et la force de l'y suivre. ( Actes des Apôtres , ch. 5, etc. )

Que signifient ces mots : Assis à la droite... Nous trouvons dans Saint Bernardin et dans saint François de Sales une histoire racontée à peu près en ces termes par un auteur moderne :« Au temps des Croisades, un gentilhomme des environs d'Autun, entreprit le pèlerinage de la Terre-Sainte. A peine débarqué, il courut visiter Nazareth, Bethléem, le Jourdain, le désert, enfin tous les lieux sanctifiés par le divin Sauveur. Mais il s'arrêta surtout aux endroits qui lui rappelaient les souffrances et la mort douloureuse de son bon maître. Il fut témoin, en esprit, de son agonie au jardin des Olives, de ses ignominies chez Caïphe, de sa flagellation et de son couronnement d'épines chez Pilate ; il le suivit pas à pas sur le chemin du Calvaire, essayant dans le fond de son cœur de lui aider à porter sa croix. Arrivé au sommet, il se prosterna la face contre terre, et faillit mourir de douleur. Après être resté plusieurs heures dans ce pieux exercice, il se rendit au saint sépulcre, puis il gravit la montagne des Oliviers, d'où Notre-Seigneur est monté au ciel. « 0 ! mon bon Jésus ! s'écria-t-il alors, je vous ai suivi sur la terre dans tous les endroits que vous avez sanctifiés par votre présence ; j'ai tout vu depuis votre berceau jusqu'à votre tombeau; me voici maintenant au lieu d'où vous vous êtes élevé dans le ciel. Où puis-je aller , Seigneur , si je ne monte à votre suite? Ah! permettez-moi de vous suivre en paradis. » A ces mots, il se sent mal, on le rapporte à Jérusalem, dans le couvent des Pères de la Terre-Sainte, et, deux jours après, il était au ciel. » ( Devoucoux, Légendaire d'Autun.)


ARTICLE VII. — SECTION I.

Et qui de là viendra juger les vivants et les morts.

Jugement particulier. Raisons du jugement général, pour J.-C, pour les bons et les méchants.

D. Quel est le sens de cet article? —

R. II signifie que le Christ, à la fin du monde , descendra des cieux pour juger tous les hommes selon leurs œuvres.  

D. Chacun ne doit-il pas être jugé à la mort?

R. Oui, certainement.

D. Pourquoi donc, en outre, un jugement général?

R. Afin que l'homme soit jugé non -seulement quant à l'âme, mais aussi quant au corps?

D. Pourquoi encore?

R. C'est afin que le Christ , qui a été sur la terre méconnu d'un grand nombre, soit reconnu et glorifié alors par toutes les créatures au ciel, sur la terre et dans les enfers;
c'est enfin pour la joie des bons et la confusion des méchants.

Instruction. De même que Notre-Seigneur, à son premier avènement, apparut dans un corps mortel pour nous racheter et nous sauver, de même il apparaîtra, lors de son second avènement, avec gloire et majesté, pour nous juger : aussi appelle-t-on ce jour là, le jour du Seigneur. Il y a deux jours de jugement : le jour de la mort est pour chaque homme le jour d'un jugement particulier ; car l'âme n'est pas plutôt séparée du corps qu'elle est immédiatement fixée , par la sentence du Juge de l'humanité, à la place que lui assignent ses mérites. Puis viendra le grand jour du jugement général où tous les hommes seront jugés corps et âme, et entendront la suprême et décisive sentence de salut ou de damnation. On distingue plusieurs raisons du jugement général. 1° Le monde y verra l'exacte justice rendue à chacun ; il verra combien Dieu est juste en récompensant les bons et en punissant les méchants. 2° Nos corps ayant participé au bien et au mal que nous avons fait, il faut qu'ils partagent la peine ou la récompense éternelle ; la sentence dernière ne peut donc pas être rendue avant que le corps soit ressuscité. 3° Le Christ ayant été rejeté par un grand nombre sur la terre , il convient qu'au dernier jour il soit glorifié en présence de tous.  Alors il sera reconnu Dieu et homme par les bons , pour leur consolation éternelle , et par les méchants pour leur éternelle confusion. .4° Enfin, la Providence divine sera manifestée dans toutes ses voies à travers les siècles : on verra pourquoi elle a permis que le juste fût souvent malheureux et le pécheur dans la prospérité. Et alors on glorifiera cette Providence qui a été dans cette vie le sujet de tant de plaintes.


HISTOIRES.

Certitude et idée du jugement universel. — Les prophètes nous ont décrit à l'envi le jour du jugement universel. Tantôt David s'écrie : « Le Dieu des dieux , le Seigneur a parlé, il a appelé toute la terre de l'Orient à l'Occident. Notre Dieu viendra ; il sera précédé d'un feu dévorant, et entouré d'un effroyable tourbillon. » (Psaume 29, 1, etc.. ) Tantôt Isaïe parle en ces termes : « Voici le jour du Seigneur, jour cruel, plein d'indignation, de colère et de fureur. Les étoiles les plus éclatantes du firmament ne répandront plus leur lumière , le soleil à son lever se couvrira de ténèbres , et la lune n'éclairera plus. J'ébranlerai le ciel même, et la terre sortira de sa place, à cause de l'indignation du Seigneur des armées. » (Isaïe, 13, 9, etc..) — Ailleurs c'est Malachie qui s'écrie : « Voici le jour où le Seigneur Dieu tout-puissant va venir. Qui pourra comprendre le mystère du jour de son avènement, ou qui en pourra soutenir la vue? Car il sera comme le feu qui sépare les métaux. Il viendra un jour de feu semblable à une fournaise ardente. Tous les superbes, et tous ceux qui commettent l'iniquité, seront alors comme la paille , et ce jour qui doit venir les embrasera sans leur laisser ni germe, ni racine. » (Malachie 3, 1 et suiv.) Voyez aussi la magnifique description que nous donne de ce terrible jour le prophète Daniel (7, 9, etc.).

Raisons du jugement général pour les bons et les méchants. — « Alors les justes s'élèveront avec une grande énergie contre ceux qui les auront affligés, et leur auront ravi le fruit de leurs travaux. A cette vue les méchants seront en proie à un trouble, à une frayeur horrible ; ils s'étonneront de voir, contre leur attente , les justes sauvés tout-à-coup. Ils diront en eux-mêmes, touchés de repentir, et gémissant dans l'angoisse de leur cœur. « Voilà ceux qui furent autrefois l'objet de notre dérision , et un sujet d'opprobre. Insensés ! leur vie était une folie à nos yeux , et leur mort dépourvue d'honneur. Et cependant voilà qu'ils figurent parmi les enfants de Dieu, et leur partage est d'être avec les saints. Ainsi nous nous sommes écartés de la voie de la vérité, la lumière de la vérité n'a pas brillé pour nous , et le soleil de l'intelligence ne s'est pas levé pour nous. Nous nous sommes lassés dans la voie de l'iniquité et de la perdition ; nous avons marché dans des voies difficiles et nous avons ignoré la voie du Seigneur. A quoi nous a servi notre orgueil , quel avantage nous a procuré la vaine ostentation des richesses. Toutes ces choses ont passé comme l'ombre.» ( Sagesse, ch. 5, 1 à 8. )

Un jour un solitaire dit à un saint vieillard : « Que faire , mon père , pour repousser tant de pensées immondes ? — Pensez à la mort , pensez aux tourments éternels préparés aux pécheurs dans l'autre vie ; ce sera comme une sainte amertume qui vous dégoûtera des plaisirs corrompus , et des pensées qu'ils suggèrent. »( Vie des Pères du désert. )


SECTION II.

Préparation au jugement.

Signes médiats. Signes immédiats. La Croix.

D. Quels signes annonceront le dernier jour du monde?

R. L'Antéchrist apparaîtra et séduira un grand nombre d'hommes.

D. Quels seront les précurseurs du juste Juge?

R. Énoch et Elie, qui sont encore vivants.—

D. Où sont-ils?

R. Ils vivent heureux dans un lieu inconnu. Quant à Énoch toutefois, nous savons par l'Écriture qu'il a été transporté dans le paradis. (Eccl. 44, 16.)

D. Que feront-ils alors? —

R. Ils amèneront un grand nombre d'hommes à la pénitence et mourront enfin pour leur foi.

D. Quels signes précéderont immédiatement la fin du monde ?

R. Il y aura, selon la sainte Écriture, des signes dans le soleil, la lune et les étoiles.

D. N'y en aura-t-il pas d'autres? —

R. Le signe de la Croix brillera dans les cieux, pour rassurer les bons et terrifier les méchants.

Instruction. De grands et terribles signes précéderont le dernier jour. Alors surgiront de faux christs et de faux prophètes. Ils feront des œuvres étranges et des prodiges ; ils
séduiront une foule d'âmes , et les élus mêmes n'échapperont qu'avec peine à leurs erreurs. Mais leur règne sera court; celui de l'antéchrist même ne durera que trois ans
et demi. Pour contrebalancer cette désolation, Énoch et Elie reviendront sur la terre; ils soutiendront la cause du Christ, combattront ces prédicateurs sataniques , et fortifieront les bons dans leur foi; ils feront une multitude de conversions, et enfin ils souffriront tous les deux le martyre. (Apocalypse, 11.)

On verra ensuite éclater des signes effrayants de la colère de Dieu, dans le soleil , la lune et les étoiles; le soleil et la lune se voileront de ténèbres , les étoiles tomberont des
cieux, la nature sera bouleversée, et l'univers entier détruit par les torrents d'un feu épouvantable. Le signe du Fils de l'homme, la Croix, apparaîtra alors dans les cieux, à la
grande confusion des infidèles qui auront refusé de croire en lui , à la confusion des hérétiques qui auront persécuté son Église , à la confusion de ceux qui par leurs mauvaises mœurs auront scandalisé les fidèles ; mais aussi à la grande joie et pour l'éternelle consolation de ceux qui ont confessé et glorifié le Christ par leurs vies et leurs actions. 0 doux Jésus ! accordez-nous une entière persévérance dans votre sainte Église et votre divine religion, afin que , comme les justes, nous reposions en vous avec confiance nos esprits et nos cœurs, au milieu des terreurs de ce redoutable jour.

HISTOIRES.

Signes médiats. — L'Antéchrist , c'est l'homme de péché , qui doit périr misérablement; qui, s' opposant à Dieu, s'élèvera au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu, ou qui est adoré, jusqu'à s'asseoir dans le temple de Dieu , voulant lui -même passer pour Dieu. Le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche , et perdra par l'éclat de sa présence cet impie, dont l'avènement sera accompagné de la puissance de Satan, de toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs, etc. ( H. Thessal. H, 3 à 9. )

On a toujours été persuadé que la mort d'Hénoch, comme celle du prophète Elie, n'est que différée ; néanmoins la vie qu'ils mènent dans le lieu où Dieu les garde, est exempte non-seulement de péché, mais encore des misères, des troubles, des nécessités où la nôtre se trouve réduite. Ce lieu , au sentiment de plusieurs saints Pères, n'est autre, peut-être, que le paradis terrestre; plusieurs pensent qu'ils y vivent comme Adam y aurait vécu, s'il fût demeuré dans l'innocence. Le ministère auquel ils sont réservés est la prédication de la pénitence. Hénoch serait destiné à la prêcher aux Gentils, Elie aux Juifs, durant le règne et la persécution de l'Antéchrist qui doit les faire mourir. Aussi ils sont appelés, d'après ce sentiment, témoins de Dieu, et, après divers prodiges faits pour attester la vérité et la puissance d'en haut , ils seront tués par la bête, pour ressusciter ensuite. ( Voy. Apocalypse. 11, 2 à 12. )

Signes immédiats. — Bouleversements de la nature, des cieux des mers, etc. Voyez dans le saint Évangile la prédiction de la ruine de Jérusalem et de la fin du monde, dont la première est la figure. ( Matthieu ch. 24. ) Le signe de la croix paraissant dans les nues.

L'an 1221, il y avait à Rome une jeune fille dont la conduite offrait un singulier contraste de légèreté et de piété ; tantôt sa vue seule était un piège, tantôt elle déroulait devant l'image de Marie le chapelet que lui avait donné saint Dominique. Un jour Jésus -Christ , sous la forme d'un gracieux jeune homme, la rencontre et lie conversation avec elle. Catherine, c'était le nom de la jeune fille, l'invite, le conduit ; le reçoit chez elle avec une rare politesse.

Mais, ô prodige, tout ce que le jeune homme touche, Catherine le voit rouge de sang :  est-il blessé ? est-ce une illusion ? Ce n'est rien de tout cela, répond l'étrange pèlerin;  puis, prenant un ton plus grave : « Hélas! dit-il, ne savez-vous pas que la nourriture, que la boisson du chrétien doivent être teintes du sang de Jésus- Christ. Oh! s'écrie la jeune fille, que vous me paraissez sérieux! c'est trop fort! — C'est vrai, et vous en aurez bientôt la preuve : à l'instant, le saint jeune homme paraît revêtu d'une longue robe
d'écarlate, et chargé d'une lourde croix, le côté, les mains, les pieds, tout le corps déchiré de blessures; de chaque plaie jaillit une lumière plus brillante que les étoiles. « Catherine, dit alors le Sauveur, reconnais- tu celui qui autrefois a souffert pour toi? Jusqu'à quand te rouleras-tu dans la fange du vice, me crucifieras-tu de nouveau, rendras-tu mon sang inutile? Ne mettras-tu jamais un terme à tes iniquités? »

A ces paroles, Catherine, couverte d'une immense confusion, éclate en sanglots, se prosterne aux pieds du Sauveur, lui demandant pardon, et protestant qu'elle va mener une vie meilleure. — Elle tint parole , et poussa si loin les austérités que la mère de Dieu, sous le patronage de laquelle elle s'était mise , fut obligée de modérer l'excès de sa pénitence. Redoutons ce Signe terrible de la croix ici-bas , pour ne pas avoir à le redouter plus tard. ( Pédagogue chrétien, etc. Voyez Lohner, Titre ex, n° 40. )


Dernière édition par MichelT le Dim 6 Nov 2016 - 13:34, édité 1 fois

MichelT

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mer 2 Nov 2016 - 12:49

SECTION III.

Arrivée du Juge.

Jésus-Christ arrive. Les anges l'accompagnent. Examen. Juges. Accusateurs.

D. Qu'arrivera-t-il à la suite de ces signes?

R. Le Fils de l`homme apparaîtra sur les nuées du ciel avec une grande puissance et une grande majesté, dans toute la gloire d'un Dieu incarné.

D. Et ensuite ?

R. Il enverra ses anges sonner de la trompette et appeler la race humaine au jugement.

D. Quel sera l'examen fait à ce jugement?

R. Ce sera l'examen de notre vie entière , même de nos pensées et de nos actions les plus secrètes.

D. Quel doit être le juge ?

R. Le Christ, Dieu et homme.

D. Quels seront nos accusateurs?

R. Les démons ( anges déchus) et nos propres consciences chargées de péchés.

Instruction. Quand les choses annoncées par le Christ et par les prophètes seront accomplies, alors Notre-Seigneur, qui a été établi par le Père Juge des vivants et des morts, apparaîtra sur les nuées , éclatant de gloire et de majesté. Il se fera précéder d'un ange qui sonnera de la trompette et dont la voix formidable sera entendue des hauteurs des cieux jusqu'au fond des enfers, des régions les plus reculées jusqu'aux profondeurs des mers. Et les morts dans leurs sépulcres entendront la voix du Fils de Dieu, qui, par le ministère des anges, réveillera toutes les générations depuis Adam jusqu'à ses derniers enfants, et elles se rendront à l'appel terrible : 0 morts , levez-vous et venez au jugement. Alors les livres seront ouverts, et la vie de chaque homme déployée en présence de l'univers entier. Dans ce jugement, toutes nos pensées, paroles, actions, seront étalées à la lumière : toutes les bonnes et aussi toutes les mauvaises, ainsi que tous nos péchés secrets , et tous ceux que nous aurons fait commettre aux autres. Tous les talents et les dons de la grâce seront passés en revue, pour voir comment nous en avons usé. Chacun sera examiné sur son état, sa charge et ses obligations .

Mais ce qui rendra ce jugement plus terrible , c'est que le Juge sera un Dieu, Jésus-Christ, Dieu et homme : un juge infiniment éclairé, auquel rien n'échappe ; infiniment juste, que rien ne peut corrompre ; d'une autorité souveraine, et dont la sentence ne souffre point d'appel. Et quels témoins se lèveront contre nous , pour nous accuser? Les démons (anges déchus) et nos consciences coupables. Le démon a été notre ennemi durant cette vie par les tentations mauvaises ; il sera notre accusateur alors, et rendra témoignage de nos péchés pour nous envelopper avec lui dans son propre malheur; nos consciences parleront contre nous, selon l'oracle du Tout-Puissant : Je vous convaincrai et vous placerai en face de vous-mêmes. Nous serons témoins contre nous-mêmes, et, condamnés par notre propre bouche, nous serons forcés de nous écrier : Je suis frappé par le juste jugement de Dieu !

HISTOIRES.

Arrivée du Juge accompagné des anges. — « Toutes les fois que je songe à ce jour, dit saint Jérôme, je tremble de tous mes membres. Soit que je boive, soit que je mange, soit que je fasse quelque autre chose, toujours semble retentir à mes oreilles l'éclat de cette trompette effroyable : Levez-vous , o morts , venez au jugement. » (Denys le Chartreux, Livre des remèdes aux tentations.)

Examen. — Un jeune homme, transporté en songe au tribunal de Jésus-Christ, fut si frappé de l'appareil du jugement, de la majesté du juge et des différentes interrogations , qu'il se réveilla couvert de sueur et tout frissonnant : ses cheveux étaient devenus tout blancs d'épouvante ! Alors il fit cette réflexion : « Ce que j'ai vu en songe se réalisera; ce sera bientôt, peut-être cette nuit. » Il remercia Dieu de ce que ce n'était pas réellement, mais en songe , qu'il avait apparu à son tribunal. Il invoqua la divine miséricorde, et prit la résolution d'expier ses péchés passés et de plutôt mourir que de pécher à l'avenir. ( Rapporté par Saint Vincent Ferrier. )

Sainte Élisabeth, reine de Hongrie, fréquentait les hôpitaux, visitait les malades couchés sur leurs lits de douleur, et les servait avec une tendre compassion. Ses suivantes , frappées de cet excès de charité , l'en reprenaient et s'efforçaient de modérer son zèle. Mais Elizabeth leur disait : « Je me prépare au jour du jugement , je me dispose à bien répondre à mon juge, lorsqu'il m'examinera. Je dirai à Jésus-Christ : Souvenez-vous que je vous ai servi avec tant de charité, vous malade dans les hôpitaux, que mes suivantes mettaient tout en œuvre pour me détourner de ce pieux office. » ( Mansi, Disc. 31, n° 2. )

Jésus-Christ Juge des vivants et des morts. Bogoris , roi des Bulgares , aimait passionnément la chasse , à tel point qu'il désirait jouir de ce plaisir même au sein de son palais. Ayant fait construire de nouveaux appartements, il voulut que le prêtre Méthodius, très-habile dans l'art de la peinture, l'ornât de sujets historiques. Bogoris ne détermina point les animaux qu'il dépeindrait; il se contenta de demander qu'on lui représentât des sujets terribles. Méthodius ne connaissant rien de plus effroyable que le jugement dernier, le représenta avec une vivacité de couleur et une chaleur d'expression qui ajoutèrent encore au sujet lui-même. A l'aspect de cette scène affreuse , à la vue de la foule des justes magnifiquement récompensés , et de la tourbe des pécheurs affreusement punis, Bogoris profondément ému , abjura l'idolâtrie et reçut le baptême. ( Georges Cédrenus, Histoire abrégée. )

Saint Bernard nous apprend par ces paroles , combien était grande en lui la crainte du jugement. « Je redoute l'enfer, je redoute le visage du Juge redoutable aux puissances angéliques elles-mêmes. Qui donnera à ma tête de l'eau, à mes yeux une source de larmes pour prévenir les pleurs par des pleurs ? » ( Saint Bernard, Serm. 10, sur le Cantique des Cantiques. )

Accusation des démons. (anges déchus) — Un vieux solitaire était sur le point d'expirer. Tout-à-coup , il parut hors de lui et jeta çà et là des yeux hagards , comme s'il était entouré d'ennemis. Alors les assistants furent témoins d'un étrange spectacle. Le moribond , semblait-il , répondait devant un tribunal aux diverses accusations portées contre lui. On ne voyait personne , mais on entendait distinctement ce qui se disait. « C'est vrai , disait le solitaire , j'ai commis ce péché , tu as raison ; mais pour cela , j'ai jeûné pendant trois ans au pain et à l'eau. — Ceci est encore vrai , je l'avoue, mais je m'en suis confessé, j'en ai fait pénitence. Quant à cet autre péché , je ne l'ai pas commis , tu mens , tu m'accuses à tort. Ici, je n'ai point d'excuse à alléguer, j'ai bien fait cette faute, mais je compte sur la miséricorde de Dieu. » Tel est le compte rigoureux demandé à un solitaire , resté 40 ans au désert !  Qui de nous se flattera maintenant de n'avoir point à redouter, les jugements de Dieu? Puissions-nous répondre au démon, comme ce solitaire : « Je n'ai pas fait cela ; ou bien : c'est vrai, mais j'en ai fait pénitence. » ( S. Jean Climaque , L'Échelle sainte , V degré.)


SECTION IV.

Jugement porté.

Sentences inexorables. Séparation pour la vie ou pour la mort.

D. Quelle sera la sentence rendue en faveur des bons? —

R. Venez, les bénis de mon Père, prendre possession du royaume qui vous a été préparé depuis le commencement du monde.

D. Quelle sera la sentence prononcée contre les méchants?

R. Retirez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel préparé pour le diable et ses anges. —

D. Qui prononcera cette sentence? —

R. Dieu lui-même qui est immuable et dont la parole est immuable aussi : sa vérité
demeure éternellement; les cieux et la terre passeront, mais sa parole ne passera pas.

D. Après la sentence, quel sera le sort du damné ?

R. Il tombera dans les peines éternelles.

D. Quelle sera la destinée du juste ?

R. Il entrera dans la vie éternelle.

D. Qu'entendez-vous par les vivants et les morts ?

R. Les vivants sont tous ceux qui seront en vie lorsque le dernier jour du monde commencera , mais qui mourront tous néanmoins dans la destruction du monde lui-même ; les morts sont tous ceux qui seront morts depuis Adam jusqu'à ce jour.

Instruction. La sentence heureuse , conséquence nécessaire des bonnes œuvres faites durant cette vie par les élus, sera entendue par eux avec de tels transports de joie que la langue de l'homme ni celle de l'ange ne sauraient les exprimer. Venez , les bénis de mon Père , prendre possession du royaume qui vous a été préparé depuis le commencement du monde ; car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, etc. Plus ils auront fait de ces bonnes œuvres, plus sera élevé le degré de leur gloire. 0 bonheur au-dessus de toute parole! être appelé par Dieu du travail au repos, de cette vallée de larmes à la montagne des célestes joies , de la misère de ce monde à la félicité éternelle ! Prenez possession du royaume. Et quel royaume? la claire vue et la jouissance de Dieu pour toujours ! l'union avec lui dans l'éternelle gloire ! Mais, ô sentence des réprouvés ! Retirez-vous, maudits! Et de quoi? De Dieu ! du ciel ! pour ne jamais entrer dans la société des élus ! c'est l'enfer de l'enfer , appelé la peine du dam; c'est non-seulement la perte de tous les biens, c'est encore la chute dans un abîme de tourments éternels, sans espoir de consolation : Peine des sens , à laquelle les plus grands pécheurs ne peuvent croire sans trembler. Et quand on ajoute à cette description de l'enfer le feu éternel, alors cette réunion de supplices devient inconcevable et surpasse toute expression. Ajoutez encore l'éternité des peines; elle nous est révélée de la bouche de Dieu, qui connaît tout et qui est la vérité même. Lorsque la sentence aura été ainsi portée sur le genre humain., les damnés iront en enfer, lieu de leur supplice, et les élus au ciel, au paradis, séjour d'éternelle félicité. 0 redoutable sentence qui fixe notre partage pour l'éternité !

Exhortation. Adorez maintenant, ô chrétien, votre Rédempteur qui un jour sera votre juge. Oh ! faites, par une vie vertueuse et sainte, comme il désire que soit toujours la vôtre, faites qu'il soit pour vous un miséricordieux Sauveur! Vivez ainsi maintenant, pour que la joie brille sur votre visage au terrible jour ! Détestez vos péchés passés, qui, s'ils ne sont effacés par le repentir, exciteront contre vous la colère et l'indignation du Christ , au lieu de sa miséricorde. Préparez -vous vous sérieusement à rendre après la mort un compte favorable de votre vie. Condamnez-vous maintenant vous-même , afin qu'alors vous ne soyez pas condamné. Confessez vos péchés maintenant, comme si vous étiez en présence du Christ avec la même humilité , la même sincérité que vous les confesserez au jugement. Oh! quelle douleur! quelle contrition! Quel ferme propos n'auriez-vous pas alors ! Glorifiez maintenant le Seigneur par vos bonnes œuvres , afin de recevoir alors la couronne de gloire.

Souvenez-vous de vos fins dernières. Placez chaque jour devant vos yeux les prodiges et l'effroi qui seront les avant-coureurs de la fin du monde. Lorsque vous êtes effrayés
par les orages, les ouragans, le tonnerre ou les éclairs, réfléchissez aux suprêmes et terribles convulsions de la nature expirante, dans le cataclysme de l'univers. Si vous
tremblez maintenant à la vue d'une maison en feu, quelle sera votre terreur au spectacle de la conflagration générale du monde. Soyez donc attentif à la voix de Dieu qui vous invite aujourd'hui à vous lever et à faire pénitence, afin que vous entendiez plus tard, pour votre éternelle consolation , la voix qui vous dira : Lève-toi et viens au juge ment. Hélas ! sous quel aspect apparaissent les richesses , les honneurs , les plaisirs des mondains, à l'heure où la mort les surprend, où le jugement les menace, où l'éternité les réveille ! Tout cela n'est plus qu'un vain songe , une bulle d'air à la surface de l'eau.

Repentez-vous donc à temps , ô mon âme ; mettez fin à votre déplorable égarement, et n'aggravez pas plus longtemps le terrible compte que vous aurez à rendre un jour en présence d'un juge qui est juste, qui voit tout, qui peut tout. Réparez les outrages que lui ont causés vos péchés par des bonnes œuvres, qui soient tout à la fois et un moyen d'expiation et une source de gloire, telles que des aumônes aux pauvres et des actes de pénitence pour vous.

Efforcez-vous de vous assurer cette bénédiction qu'il prononcera au dernier jour en faveur des élus : Venez , les bénis de mon Père. Cela dépend de vous à présent. Mais si
plus tard , hélas ! vous entendiez l'autre sentence , à qui pourriez-vous vous en prendre, si ce n'est à vous-même? Dieu vous donne le temps , les secours , la grâce pour faire
votre propre salut ; il vous assiste constamment ; mais si, après tant de faveurs, vous le méprisez et le délaissez, ne soyez point surpris qu'il vous abandonne à son tour, et ne
vous étonnez pas qu'il vous dise comme aux Juifs ingrats : Je m'en irai , vous me chercherez et vous mourrez dans votre péché. Perdre Dieu! perdre tout bien en perdant
Dieu! quelle chose épouvantable! Être jeté dans les flammes, quel tourment! Endurer sans fin ce malheur, quel désespoir! Ah! souvenez-vous de vos fins dernières et
vous ne pécherez jamais.

HISTOIRES.

Sentences inexorables. — Balthasar donnait une splendide festin à mille des principaux seigneurs de sa cour. Au milieu de l'ivresse de sa joie sacrilège, il fait boire sans pudeur ses officiers et ses courtisans dans les vases sacrés enlevés jadis par son père au temple de Jérusalem. Ce n'était partout qu'allégresse et transports. Tout à coup Balthasar pâlit, ses genoux s'entrechoquent. Qu'est-il donc arrivé ? Sur le mur de la salle une main mystérieuse a passé, écrivant ces trois mots chaldéens : « Mane, Thecel, Phares. » Personne que Daniel ne peut en donner le sens. L'homme de Dieu parle avec une courageuse franchise : « Mane, vos jours sont comptés, vous êtes à la fin; Thecel, on vous a pesé dans la balance et vous avez été trop léger; Phares, Dieu a divisé votre royaume, il l'a donné aux Mèdes et aux Perses. » La terrible prédiction ne tarda pas à s'accomplir : la nuit même où Balthasar se livrait à ses criminelles orgies , Cyrus prit Babylone , et du même coup mit fin au royaume , à la vie , aux impiétés de Balthasar.
( Daniel , ch. 5. )


Séparation des bons et des mauvais. — Un libertin qu'une vertueuse mère avait élevé , dès sa plus tendre jeunesse , dans des principes religieux , poursuivait le cours de ses désordres. Il avait perdu les mœurs , mais la foi restait encore.  Après un jour passé dans de déplorables excès , il eut un songe : pendant son sommeil, il se vit transporté au tribunal de Dieu. Dire sa confusion et son effroi est chose impossible. A son réveil il était inondé de sueur , en proie à une fièvre ardente , et tout hors de lui-même. « Laissez-moi, disait-il en sanglotant, laissez-moi seul : j'ai vu mon Juge ! pardon , ô mon Dieu ! » Ses amis de débauches vinrent le consoler : « Retirez-vous, leur cria-t-il, vous n'êtes plus mes amis, je ne vous verrai plus ; j'ai vu mon juge ! Quelle majesté ! quelle sévérité éclataient sur son visage ! que d'accusations auxquelles je n'ai pu répondre ! tous mes péchés sont écrits , je les ai lus. Ah ! quel nombre ! j'en connais l'énormité. Que de démons attendaient le signal du Juge pour m' enlever ! faux amis , retirez-vous pour toujours. Heureux si je puis apaiser par une rigoureuse pénitence mon terrible Juge ! Hélas ! bientôt je paraîtrai réellement à son redoutable tribunal. Pardon , ô mon Dieu ! pardon , miséricorde ! Ne me perdez pas, ayez pitié de moi! » Et de ce moment il rompit avec les compagnons de ses désordres. Séparons-nous des méchants pendant la vie , si nous voulons en être séparés au jugement de Dieu. ( Nouveau Traité de devoirs. )


ARTICLE VIII.

Je crois au Saint-Esprit.

D. Qu'est-ce que le Saint-Esprit?

R. C'est la troisième personne delà sainte Trinité.

D. De qui procède-t-il ?

R. Il procède du Père et du Fils.

D. Est-il égal à eux?

R. Oui , c'est le même Seigneur, le même Dieu, et il a les mêmes perfections divines que le Père et le Fils.

D. Pourquoi est-il appelé l'Esprit de vie ?

R. Parce qu'il donne à toutes nos actions la vie surnaturelle , et qu'il nous porte par sa grâce à faire ce qui est bon.

D. De quelle manière a-t-il apparu?  

R. Sous la forme d'une colombe, d'un nuage lumineux et de langues de feu.

D. Combien y a-t- il de dons particuliers du Saint-Esprit ?

R. Il y en a sept : la sagesse, l'intelligence, le conseil, la force, la science, la piété et la crainte de Dieu.

Instruction. Le premier article du symbole nous enseigne ce qu'il faut croire sur Dieu le Père et la création ; les six articles suivants, ce qu'il faut croire du Fils de Dieu fait homme et de tous les mystères relatifs à notre rédemption; le huitième article nous apprend ce que nous devons croire du Saint-Esprit, troisième personne de la sainte Trinité. Saint Paul donne à comprendre combien il importe d'être instruit à ce sujet : car étant venu à Éphèse, il y rencontra des disciples auxquels il dit : Avez-vous reçu le Saint-Esprit depuis que vous croyez ? Ils repartirent : Nous n'avons pas même ouï dire qu'il y ait un Saint-Esprit.

Et il dit : De quel baptême donc avez-vous été baptisés ? (Actes 19, 2,3.) Comme s'il eût dit : A quoi peut servir votre baptême, si vous n'avez point entendu parler du Saint-Esprit , si vous ne croyez pas en Celui dans lequel tous les chrétiens sont baptisés, et par lequel tous sont confirmés et fortifiés dans leur foi?

Ce n'est point assez de croire au Père et au Fils, si l'on ne croit encore au Saint-Esprit. Le symbole qui nous apprend à professer notre croyance au Père , qui est la première personne, au Fils, qui est la seconde personne, nous apprend aussi à professer notre croyance au Saint-Esprit, qui est la troisième personne de la sainte Trinité. Nous devons
croire que le Saint-Esprit est une personne distincte du Père et du Fils , qu'il procède des deux et qu'il est le même Dieu avec eux, comme on le voit clairement dans l'Écriture : Il en est trois qui rendent témoignage dans le ciel : le Père , le Verbe et le Saint-Esprit ; et ces trois sont une même chose. (1. Jean, 5, 7. ) — Ils sont un seul Dieu, ayant la même nature divine. Le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, par le mutuel amour de l'un pour l'autre. C'est pourquoi on l'appelle amour. Il est l'amour réciproque du Père et du Fils. Il est coéternel et consubstantiel avec eux.

On l'appelle aussi l'Esprit créateur, parce qu'il inspire nos âmes par sa grâce et vivifie toutes nos actions : L'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs, par le Saint-Esprit qui nous a été donné. ( Romains 5, 5. ) Le Saint-Esprit a été répandu dans nos âmes au baptême, et encore d'une manière plus spéciale à la confirmation. C'est par lui que nous faisons toute bonne œuvre; c'est le divin amour à qui toute âme doit la vie. Bien que l'Esprit-Saint soit un pur esprit , cependant il est apparu plusieurs fois sous diverses formes pour représenter les nombreux effets qu'il opère dans nos âmes. Ainsi, au baptême de notre Sauveur, il apparut sous la forme d'une colombe, pour signifier que le baptême nous rend purs et innocents comme la colombe.

Il est descendu sur les apôtres en forme de langues de feu , pour montrer que c'était par leur zèle et leur prédication que le monde devait être converti; sous la forme d'un nuage lumineux à la transfiguration du Sauveur, pour nous apprendre qu'en paradis nous serons entourés de gloire. Toutefois ces formes corporelles elles-mêmes n'étaient pas le Saint-Esprit, mais seulement des figures qui marquaient sa présence et ses effets.

Il y a sept dons spéciaux du Saint-Esprit, énumérés par le prophète Isaïe, savoir : la sagesse, qui dirige nos actions à notre dernière fin ; l'intelligence , qui fait pénétrer dans
les mystères de la foi ; le conseil , qui découvre les embûches du démon; la force, qui surmonte les tentations, spécialement à l'heure de la mort; la science, par laquelle
nous discernons la volonté de Dieu ; la piété, qui nous excite à la mettre à exécution , et la crainte de Dieu , qui nous détourne du péché. Tels sont les effets de l'amour du
Saint-Esprit, qui est appelé le don de Dieu, parce que tous les dons de Dieu procèdent de l'amour, et qu'ils sont la preuve consolante de sa demeure en nous par sa grâce et de
notre demeure en lui. En un mot, ces dons du Saint-Esprit excitent nos âmes et nous facilitent la pratique des commandements et des conseils divins , spécialement celle
des huit béatitudes qui sont comme autant de degrés pour arriver au bonheur éternel.

Exhortation. Prosternez-vous , ô mon âme, et adorez la personne du Saint-Esprit, comme votre Dieu, un seul Dieu avec le Père et le Fils. Préparez-vous vous-même, par
l'amour, à le recevoir dans votre cœur. N'y donnez pas de place aux affections déréglées du monde ; car alors le Saint-Esprit , qui est l'amour mutuel du Père et du Fils, n'habiterait point en vous. Ah ! chrétien, combien de fois, par le péché mortel , n'avez-vous pas banni cet Esprit-Saint de votre âme ? Souvenez-vous que par le baptême vous êtes devenu membre de Jésus-Christ et le temple de Dieu : Si quelqu'un vient à profaner le temple de Dieu (par le péché), Dieu le perdra; car le temple de Dieu est saint et vous êtes vous-même ce temple. (1. Corinthiens 3, 17. ) Oh ! quelle bénédiction d'être, même en cette vie, la possession de Dieu et de son Saint-Esprit , et de le voir régner dans votre cœur par l'infusion de sa grâce!

Mais quel malheur pour un chrétien croyant de renoncer à sa félicité, de chasser Dieu de son cœur et d'y admettre le démon à sa place ! Et pourtant c'est ce que vous faites toutes les fois que vous offensez Dieu par un péché mortel. Puisque le Saint-Esprit est la vie de votre âme, et qu'il vous a prodigué ses grâces, ne les rendez pas stériles, mais
agissez selon ce que vous avez reçu, et fécondez les dons qui vous ont été départis. Que la sagesse dirige votre vie et vos actions à la gloire de Dieu et à votre propre salut;
que l'intelligence vous maintienne dans la soumission due à la foi ; que le conseil vous garde des illusions du monde et du démon; que la force soit votre armure contre les persécutions , et vous apprenne à mépriser tout danger pour l'amour de Dieu ; que la science vous conduise , en toutes choses , à la connaissance et à la pratique de la volonté de Dieu; que la piété vous anime à l'accomplissement de tous vos exercices de dévotion; que la crainte vous dirige dans la voie des divins commandements, dont l'observation est le chemin assuré de la vie éternelle.

« Venez, Esprit-Saint, enflammez mon cœur de l'amour de Dieu; que ce feu demeure inextinguible et brûle dans mon âme pour toute l'éternité ! »

HISTOIRES.

Procession, divinité du Saint-Esprit. — Un patriarche de Constantinople, nommé Macédonius, osa soutenir que l'Esprit-Saint n'est pas Dieu , mais une simple créature semblable aux anges , bien que d'un rang plus élevé. L'Église, rassemblée en concile œcuménique à Constantinople , condamna cette hérésie et prononça que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Nous professons solennellement cette vérité , lorsque nous chantons à la messe le Credo ou Symbole dressé dans ce Concile : Je crois au Saint-Esprit, qui est aussi Seigneur et qui donne la vie; qui procède du Père et du Fils; qui est adoré et glorifié conjointement avec le Père et le Fils; qui a parlé par les prophètes. Comme la plupart des hérésiarques , Macédonius périt misérablement.

Pourquoi l'Esprit-Saint est-il appelé esprit vivifiant ? Un serviteur de Dieu, intimement convaincu du besoin qu'il avait de l'Esprit-Saint et de ses grâces, récitait dévotement , au commencement de ses principales actions, la prière : Veni, Sancte Spiritus, reple tuorum corda fidelium, etc.; outre cela, sans cesse il répétait dans son cœur les trois premiers mots de cette prière : « Venez, Esprit-Saint, venez, Esprit-Saint... » ( Cossart. )

Sous quelles formes l'Esprit-Saint a-t-il apparu. — Le don des langues, la vertu de l'Esprit-Saint sur les apôtres et par les apôtres sur le monde entier , sont figurés par la descente de l'Esprit-Saint en forme de langues de feu. Effectivement, à peine sortis du cénacle, les apôtres parlent leur langue maternelle, et ceux qui ne savent que l'arabe, le grec, le latin, les entendent aussi bien que s'ils parlaient leur propre langue. Ce don des langues s'est renouvelé plus d'une fois : Saint Vincent Ferrier, ce grand missionnaire du xiv e siècle, prêchait toujours en espagnol ou en latin, et il était néanmoins compris des Français, des Bretons, des Grecs, des Allemands, des Anglais, des Hongrois, et
des autres étrangers qui affluaient à ses sermons. On raconte la même chose de saint Antoine de Padoue , et de saint François-Xavier , apôtres des Indes et du Japon. Nous trouvons à ce sujet un trait fort intéressant dans la vie de saint Dominique. En allant à Paris, il avait rencontré des Allemands qui lui avaient rendu toutes sortes de service; pour les récompenser, il aurait bien voulu leur adresser quelques bonnes paroles, mais il ne savait pas leur langue. «Mon frère, dit-il à son compagnon, prions Dieu de nous accorder de parler allemand, afin d'annoncer Jésus-Christ à ces braves gens. » Ils obtinrent ce qu'ils avaient demandé et pendant quatre jours ils s'entretinrent avec eux.
( Vies des Saints , passim. )

Gratuité des dons du Saint-Esprit. — Témoin des prodiges opérés par le Saint-Esprit , Simon osa aspirer au pouvoir d'imposer les mains, comme les apôtres, afin de faire des miracles à sa gloire et pour son propre compte.  Dans ce dessein, il offrit de l'argent aux apôtres et leur dit : « Donnez-moi le pouvoir que vous avez, afin que ceux à qui j'imposerai les mains, reçoivent le Saint-Esprit. — Que ton argent périsse avec toi, lui répondit Pierre, puisque tu as cru que le don de Dieu peut s'acquérir avec de l'argent. Fais pénitence. » Loin de suivre ce conseil, Simon s'abandonna aux désordres et devint l'ennemi des apôtres. Après avoir infecté la Samarie des erreurs les plus extravagantes, il vint à Rome, et voulant persuader à Néron qu'il était Dieu, il promit de s'élever au ciel devant tout le monde. Tout le monde accourt, et Simon s'élève assez haut par la puissance du démon. Mais saint Pierre prie, et, l'action du malin esprit cessant, le magicien tombe et se brise dans sa chute. Simon a donné son nom à la Simonie , ce péché détestable par lequel on vend ou l'on achète les dons du Saint-Esprit. ( Lassausse. )


ARTICLE IX. — SECTION I.

Je crois la sainte Église catholique, la communion des saints.

D. Qu'entendez-vous par cet article?

R. Il signifie que le Christ a établi une Église sur la terre ; que cette Église est une et que nous sommes obligés de la croire en tout ce qui regarde la foi.

D. Qu'est-ce que l'Église?

R. La réunion de tous les fidèles sous un chef invisible, qui est Jésus-Christ, et sous un chef visible, son vicaire sur la terre, qui est le Pape.  

D. L'Église est-elle visible?

R. Oui, elle est visible, elle l'a toujours été et le sera toujours.

D. Combien de temps doit-elle durer?  

R. Jusqu'à la fin du monde.

Instruction. L'Église à laquelle nous faisons profession de croire , comme établie par le Christ , propagée par ses apôtres et leurs successeurs, soutenue, non par la puissance
humaine, mais par la main de Dieu, est un article de notre symbole aussi bien que les précédents. L'Église est une réunion de personnes appelées par la grâce à la profession
de la vraie foi. Elle est composée de pasteurs et de peuple. Entre les pasteurs comme entre les anges, il y a une hiérarchie représentée par les évêques, les prêtres et les diacres. Le Christ qui a institué les apôtres, leur a donné pour chef saint Pierre , auquel il a confié les clefs du royaume des cieux, avec la charge de paître tout le troupeau, agneaux et brebis.

Comme les évêques de Rome sont les successeurs de saint Pierre, ils héritent de ses privilèges et de son pouvoir , et ils sont les chefs de toute l'Église , sous le Christ
qui est le chef suprême de tous les autres. Pour croire la sainte Église catholique, il est nécessaire de croire qu'elle a existé au temps passé , qu'elle existera dans l'avenir, qu'elle existe maintenant et sera toujours; enfin nous sommes obligés de la croire, de l'écouter, de lui obéir dans toutes les choses relatives à la foi. Ceux qui ne se soumettent point à sa doctrine et à son autorité, sont tous hors de sa communion.

L'Église est appelée le Corps du Christ (Éphésiens 1, 23.) parce que le Christ est son principal chef; l'Épouse du Christ, parce qu'elle est sans tache; le troupeau ou le Bercail du Christ, parce qu'il en est le Pasteur; la Maison de Dieu, parce qu'elle a été bâtie par lui sur le roc, à l'épreuve de tous les orages des persécutions, que les portes de l'enfer,
c'est-à-dire les puissances des ténèbres soulèvent contre elle. Elle est représentée dans la sainte Écriture sous la figure d'une ville située sur une haute montagne , et que rien ne peut cacher aux regards des hommes. Les apôtres sont la lumière du monde et ses membres ne doivent jamais cesser d'enseigner et de professer hautement et ouvertement leur foi. Aussi la véritable Église catholique doit - elle toujours être visible et en évidence pour tous ceux qui désirent la connaître.

HISTOIRES.

C'est Dieu qui a fondé l'Église. — Chaque page de l'histoire de l'Église nous offre une preuve de sa divinité : Ici c'est son établissement merveilleux par douze pêcheurs, en dépit du monde entier ; là sa perpétuité non moins prodigieuse encore. Plus loin ses martyrs, ses confesseurs, ses vierges ; ailleurs ses victoires au milieu de guerres haineuses, cruelles, perpétuelles. Voyez entre autres quelle fut la triste fin des persécuteurs de l'Église, des Néron , des Valérien, des Constance, des Valens, des Hunéric, etc. ( Histoire de l'Église, Baronius, an. 363,... 377,... 484.)

Qu'est-ce que l'Église? Nécessité d'être de l'Église , etc. — Victorin s'était rendu fameux par son éloquence , la réputation de ses élèves , l'étendue prodigieuse de ses connaissances ; pour tout dire en un mot, on lui avait élevé une statue sur la place publique de Rome! Cependant Victorin n'était pas chrétien : il prostituait aux idoles l'encens de ses adorations et de son éloquence. L'illustre orateur lut les saintes Écritures et la lumière commença à se faire. Il vint trouver le vénérable Simplicien, père spirituel de saint Ambroise, et lui dit : « Je suis chrétien! — Je n'en croirai rien, tant que je ne vous verrai pas à l'Église avec les fidèles.  Eh quoi ! est-ce une enceinte de pierres qui fait le chrétien ? » Et Simplicien répondait toujours : » Tant que je ne vous verrai pas à l'Église je n'en croirai rien. » Le respect humain enchaînait Victorin! Un jour faisant un effort suprême sur lui-même, il vint trouver Simplicien, et lui dit : « Allons à l'Église, je veux être, je veux paraître chrétien. » Simplicien, ravi de joie, le fait inscrire sur le catalogue des néophytes. Rome est dans l'étonnement, la joie dans l'Église. Le jour de la profession de foi arrivé, on veut en dispenser Victorin. Mais Victorin entend professer hautement, solennellement la doctrine du salut. Il paraît à la tribune et aussitôt de toutes parts on s'écrie : Victorin ! Victorin ! L'illustre néophyte prononça à haute et intelligible voix les vérités du salut; et combla tout le monde d'une joie indicible : Victorin était de l'Église. ( Confessions de Saint Augustin, liv. VIII. )

Pour jusqu'à la fin des temps! — « Gardez bien votre pape, car vous n'en aurez point d'autre, » disait, en 1793, un impie avec l'accent du triomphe. — Pie VI avait cessé de vivre; par l'ordre de Dieu le Nord vole au secours du Midi , le protecteur de l'Église grecque devient le défenseur de l'Église latine. Tous les obstacles sont écartés, toutes les voies préparées, le conclave s'assemble paisiblement, régulièrement à Venise, et d'un commun accord le sacré collège proclame Pie VII. A ce coup de la Providence , l'impiété est muette , et le catholicisme raffermi entonne l'hymne de la reconnaissance ! Non, Dieu ne permettra pas qu'il y ait aucune interruption dans la succession de ses pontifes, aucune persécution qui soit mortelle à son Église : Tu es Pierre et sur cette pierre j'établirai mon Église, etc. ( Tiré de Mgr. l'évêque d'Alais, Lettre à ses Vicaires généraux, en 1802. )

SECTION II.

Marques de la véritable Église.

D. Quelles sont les marques auxquelles on peut reconnaître la véritable Église ?

R. Ce sont l'unité dans la foi, la sainteté, la catholicité d'où elle tire son nom, la succession apostolique de ses pasteurs. La véritable Église est une, sainte, catholique et apostolique.

D. L'Église est-elle infaillible? — R. Oui, l'Église, en vertu des promesses du Christ, est infaillible dans tous les articles de foi dont elle est gardienne ou qu'elle a décidés contre les hérétiques, qui l'ont combattue dans tous les temps.

Instruction. 1° L'Église est une. Il existe de véritables marques de l'Église de Dieu, par lesquelles on la distingue de toutes les sectes hérétiques et schismatiques. Le Christ,
Notre Seigneur, n'a jamais établi qu'un seul peuple, enseigné qu'une seule doctrine : ses apôtres n'en ont pas enseigné d'autre; son Église professe un seul Seigneur, une seule
foi , un seul baptême. Or ceux qui se sont séparés d'elle et qui sont encore divisés entre eux, ne peuvent prétendre avoir l'unité dans la foi , ne former qu'un seul peuple , un
seul bercail; conséquemment ils ne peuvent être membres de l'Église de Dieu. S'agit-il au contraire des fidèles qui sont ses membres , ce sera une chose facile à constater.

Ils diffèrent de caractère, de génie, de nationalité, ils sont séparés par de grandes distances et souvent en opposition pour leurs intérêts temporels; toutefois, interrogez-les sur leur religion : tous professeront invariablement la même foi, la même doctrine, les mêmes sacrements, le même sacrifice ; tous reconnaîtront l'évêque de Rome pour successeur de St Pierre et comme chef suprême de l'Église, dans les choses spirituelles; tous à ce titre manifesteront leur obéissance envers lui.

2° L'Église de Dieu est sainte et la sainteté est un de ses caractères distinctifs. Sainte dans son premier fondateur et chef, qui est Jésus-Christ. Sainte dans sa foi, sa morale et sa discipline : dans sa foi , qui nous maintient dans la véritable humilité et la soumission à Dieu; dans sa morale, qui nous enseigne à sanctifier toutes les actions de notre vie;
dans sa discipline, qui met un frein au vice et favorise la régularité soit dans le clergé, soit parmi les laïques; dans ses sacrements, qui sont les sources de la grâce sanctifiante.
Elle est sainte dans ses membres qui sont tous appelés à la sainteté et dont une multitude sont réellement des saints. Oh! combien n'a-t-elle pas produit de millions de martyrs, de confesseurs, de vierges, qui dans tous les âges ont été éminents en sainteté! Et que sont donc toutes ses fêtes, ses heures de prières canoniales, ses jeûnes, ses mortifications, sinon autant de moyens de subjuguer la nature corrompue, d'arriver à la sainteté, d'enflammer la vertu? Par qui ces moyens sont-ils mis en pratique , si ce n'est par ceux qui appartiennent à l'Église catholique? Bien qu'il y ait dans l'Église des bons et des mauvais , ceux-ci ne dérogent en rien à la sainteté qu'elle enseigne; seulement Dieu les laisse, jusqu'à la mort, croître comme l'ivraie parmi le bon grain , dans l'espoir de leur conversion.

3° L'Église du Christ est catholique ou universelle , soit quant au temps, soit quant aux lieux. Quant au temps, elle commence avec le Christ pour subsister jusqu'à la fin du monde. Aucune autre Église ne doit venir après elle, aucune autre religion, aucun autre évangile, ni aucune autre réforme que les réformes effectuées par cette Église même. Quant aux lieux, sa foi a été et sera répandue dans toutes les parties de la terre : Allez par tout le monde et prêchez l'Évangile à toute créature. (Marc, 16, 15.) Au contraire , les sectes qui s'en sont séparées , sont confinées dans quelque coin du monde et le temps les voit bientôt retourner au néant. Ses ennemis même reconnaissent maintenant que son extension l'emporte sur chacune des sectes chrétiennes, et son nom de catholique lui est si évidemment propre que nulle secte n'ose le revendiquer.

4° L'Église du Christ est apostolique. La véritable Église doit nécessairement remonter jusqu'au temps du Christ et des apôtres, puisqu'elle a été fondée par le Christ, propagée par les apôtres et qu'elle a reçu d'eux sa doctrine ; puisqu'elle ne croit rien en matière de foi qui n'ait été clairement la croyance et la tradition de tous les âges jusqu'au temps des apôtres, et qu'elle a condamné toute innovation comme importée par les hérétiques. Si elle a rejeté l'ancienne doctrine des apôtres, si elle est tombée dans des erreurs, je désire savoir quand , où et par qui ces erreurs ont été inventées et publiées; par quel concile elle a été condamnée, quels Pères ont écrit contre elle, de quelle Église, plus ancienne qu'elle-même, elle s'est séparée. De plus, cette Église est nécessairement apostolique, dont les pasteurs, à toutes les époques, depuis les apôtres, ont été légitimement ordonnés par ceux qui avaient été de même ordonnés légitimement avant eux, par les successeurs légitimes des apôtres. Or, qui peut montrer une succession de pasteurs depuis les apôtres, si ce n'est la sainte Église catholique? Quant aux autres sectes, elles avouent que durant de longs âges il n'y a eu dans le monde entier ni pasteurs ni peuple de leur communion. Enfin l'Église du Christ doit être infaillible dans toutes ses décisions relatives à la foi, aux mœurs et à la discipline générale. Car bien que l'Église se compose d'hommes naturellement sujets à l'erreur, le Christ lui a promis néanmoins qu'il serait avec elle tous les jours jusqu'à la consommation des siècles. (Matthieu 28.) — Que le Saint-Esprit, l'Esprit de vérité lui enseignerait toute vérité et demeurerait avec elle à jamais. (Jean,14 et 16.) — Que les portes de l'enfer ne prévaudraient point contre elle. ( Matthieu 16. )

Nous pouvons être dans une pleine sécurité au sujet des promesses du Christ, sans avoir besoin de chercher où et chez qui réside en particulier l'infaillibilité ; il suffit que Dieu ne permette pas que son Église puisse jamais errer ; il suffit qu'elle puisse dire avec assurance dans toutes ses décisions de foi, comme le premier concile tenu à Jérusalem : Il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous. ( Actes 15, 28. ) D'une part, l'Église établie par Notre-Seigneur n'a jamais erré; d'autre part, c'est un fait incontestable que les catholiques, en aucun temps, n'ont quitté l'Église fondée par lui, tandis que toutes les autres sectes s'en sont séparées : donc il est facile de reconnaître la véritable Église du Christ.

HISTOIRES.

Unité. — Saint Pierre est représenté comme prince des apôtres et chef de l'Église par les anciens monuments du christianisme. Un des plus remarquables, est une lampe d'airain trouvée dans les fouilles du mont Coelius. Cette lampe, qui a la forme d'un navire, représente Pierre à la poupe, tenant en main le gouvernail, et Paul à la proue, ayant l'attitude de l'orateur, de chef de la parole, selon l'expression des Actes. Un personnage s'adressant au grand pape, Benoît XIV, lui disait : « Ce monument n'a-t-il pas, pour
établir la primauté de saint Pierre sur toute l'Église, la valeur d'un éloquent volume composé dans les temps antiques? » Rien de plus vrai. Or la preuve d'un chef unique est la preuve même de l'unité de l'Église. ( Annales de philosophie chrétienne, numéro de décembre 1840. )

Sainteté. — Le miracle est la preuve la plus saisissante, la plus irréfragable , la plus divine de la sainteté de l'Église dans la personne de ses membres. On reprochait aux ministres d'une ville protestante de ne produire aucun miracle à l'appui de leur doctrine. Pour y répondre, ils s'avisèrent d'un expédient qui leur parut in faillible : ce fut d'engager un homme à contrefaire le mort. Après lui avoir bien appris son rôle, et l'avoir placé dans un cercueil, ils le conduisirent à l'Église, afin d'accomplir à son égard les cérémonies en usage pour les défunts. Alors un ministre , inspiré d'en haut, disait-il , annonça qu'il allait opérer la résurrection de ce mort, assuré que Dieu l'exaucerait. « Au nom de Jésus, s'écria -t—il, en s' adressant au prétendu mort, levez-vous ! » Pas de réponse ! On ouvre le cercueil , persuadés qu'il est vivant, ressuscité ; mais à leur grand étonnement , il était mort ! Dieu n'accorde pas de lettres de créance à l'erreur. ( Cossart. ) Après le miracle , preuve divine de la sainteté , vient la vertu, preuve humaine, en ce sens qu'elle est communément admise comme telle par les hommes, mais d'ailleurs d'une valeur inférieure et quelquefois faillible. Eh bien ! demandez à l'Histoire ecclésiastique, aux ouvrages d'Audin, etc., quelle fut la vertu de Luther et de Calvin, de Henri VIII et de Théodore de Bèze?

Apostolicité .— Lors de son voyage en France, Pie VII fut partout entouré des hommages qui sont dus au successeur des apôtres. Un jeune homme pourtant se tenait debout, pendant que l'auguste pontife bénissait la foule. Il s'en aperçut et dit : « La bénédiction d'un vieillard ne saurait nuire à la jeunesse , trouvez bon que je vous
donne la mienne. » A l'instant, le jeune homme tombe à genoux et reçoit avec autant de soumission que de regret la bénédiction du pontife. Il comprenait enfin la vénération qui est due à l'autorité apostolique, et les bénédictions qu'elle est chargée de départir aux hommes. ( Extrait des Étrennes religieuses de 1805. )

Infaillibilité. — Dans les discours que Mgr. de Cheverus avait occasion d'adresser aux protestants, il leur disait souvent cette parole simple, mais qui produisait toujours un grand fruit : « Tous les jours , mes frères , je lis comme vous l'Écriture sainte , je la lis avec réflexion et prière, en invoquant l'Esprit-Saint, et cependant, presque à chaque page, je suis arrêté par des choses que je ne comprends pas; j'ai besoin de l'autorité de l'Église pour m'en indiquer le sens et fixer ma foi à ce sujet. » Et l'auditoire faisait aussitôt l'application : « Si Mgr. de Cheverus , qui est bien plus savant que nous, ne comprend pas toute l'Écriture sainte, comment nos ministres nous disent-ils qu'elle est pour chacun de nous une règle de foi parfaitement claire , intelligible par elle seule , sans aucun secours étranger? » Après cela, Mgr. de Cheverus n'avait plus qu'un pas à faire pour établir la sagesse et la nécessité d'une autorité infaillible professant , maintenant partout et toujours, la même doctrine sans aucune variation. ( Vie de Mgr. de Cheverus. )

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Lun 7 Nov 2016 - 18:16

SECTION III.

La communion des saints.

D. Que signifie cet article?

R. Il signifie que tous les fidèles sur la terre entrent en communion ou en partage
des prières et des bonnes œuvres faites par les autres.

D. Que signifie-t-il encore?

R. Que le fidèle sur la terre est aussi en communion avec les saints et les anges dans le
ciel.

D. Les pécheurs qui sont dans la communion de l'Église recueillent-ils quelque avantage des prières des fidèles?

R. Oui, et souvent par ce moyen ils obtiennent la grâce de la conversion.

D. Les suffrages de l'Église sont-ils de quelque utilité pour, les âmes détenues dans le purgatoire?

R. Oui, parce que ces âmes sont toujours membres avec nous du même corps mystique dont le Christ Jésus est la tête.

Instruction. Cette partie du neuvième article exprime l'union et la communication intime qui subsistent entre les différents membres de l'Église , tous unis par la même foi et la même espérance , recevant les mêmes sacrements et adorant Dieu d'une seule bouche et d'un seul cœur. L'étroite union qui existe entre eux , ressemble à celle des membres du corps humain. Ceux-ci remplissent des fonctions diverses; l'œil voit, l'oreille entend, etc.. ainsi, dans l'Église, il y a diversité d'offices : les uns instruisent , les autres administrent les sacrements ; les uns gouvernent, les autres obéissent ; d'autres se vouent aux œuvres de miséricorde. Mais tous ont en vue le même objet : arriver à la vie éternelle, et aider les autres à y parvenir également. De la sorte ceux qui sont incorporés à l'Église profitent de toutes les prières et bonnes œuvres qui sont faites dans son sein. Les âmes en état de grâce en profitent abondamment; celles qui sont dans le péché, en retirent néanmoins quelque secours , afin de pouvoir sortir de ce misérable état.

Cela vous fait voir combien grand est le malheur de ceux qui restent sous la sentence d'excommunication qui les retranche de l'Église comme des membres morts, et les prive de tous les avantages de la communion des saints.  Cette communication entre les membres de l'Église procédant de la charité qui jamais ne s'éteint, n'est point bornée à l'Église militante sur la terre ; mais elle s'étend encore à l'Église triomphante dans les cieux : car c'est la même Église, dans un état différent. Ainsi lorsque nous célébrons la gloire des saints , ils prient pour nous obtenir la grâce dont nous avons besoin; lorsque nous remercions Dieu de leur bonheur, ils se réjouissent de nos heureuses dispositions. Cette communion s'étend aussi aux âmes des défunts qui sont dans le lieu de souffrance, appelé communément le Purgatoire, où elles se purifient de leurs fautes sous la main du Dieu des justices, avant de pouvoir entrer dans le ciel. La mort qui consiste seulement dans la séparation du corps et de l'âme , ne saurait dissoudre l'union mystique entre les membres de l'Église et leur chef, Jésus-Christ. Ainsi étant toujours membres de la même Église, les défunts peuvent être assistés par les suffrages, les actes
de charité et les bonnes œuvres des fidèles qui sont sur la terre.  La charité envers les âmes des fidèles trépassés a été pratiquée avec zèle dans la primitive Église, et recommandée par les Pères, spécialement par saint Augustin en son livre De cura pro mortuis.

Exhortation. Rendez grâces à Dieu, chaque jour, ô chrétien ! de ce qu'il vous a fait membre de la sainte Église catholique. Oh ! quelle reconnaissance vous éprouveriez si vous sentiez bien le prix d'un tel bienfait.  Heureux Noé et sa famille d'avoir été seuls sauvés du déluge; mais plus heureux encore vous qui, de tant de millions d'hommes, être abrité dans l'arche de l'Église de Dieu et sauvé de la perdition ! Vivez donc comme il convient à un membre de l'Église de Dieu. Et d'abord croyez avec une entière soumission toutes les décisions, tous les articles de foi. Rejetez et abhorrez toutes les erreurs et les hérésies opposées à la croyance de l'Église. Obéissez à tous ses préceptes et commandements aussi parfaitement que si vous entendiez le Seigneur dire : Celui qui écoute l'Église m’écoute.

Vivez avec vos frères, dans une union, dans une concorde aussi parfaites que les fidèles de la primitive Église, dont il est dit : Ils n'avaient tous qu'un cœur et qu'une âme. Soyez saint, parce que Dieu est saint. La sainteté convient à la maison de Dieu et à tous ceux qui l'habitent. Que l'exemple de Jésus-Christ, votre chef, des saints apôtres, des martyrs, des confesseurs et des vierges dont la sainteté fut si éminente , vous excite à toutes les vertus. Oh! n'attirez pas sur vous-même cette terrible sentence : Celui qui souille le temple de Dieu, par une vie criminelle, Dieu le perdra. Puisque vous professez la croyance à l'Église catholique, que les persécutions, que la mort même n'ébranlent pas votre foi. Cette Église est celle que le Christ a établie lui-même ; restez donc ferme et constant dans votre fidélité envers elle jusqu'à votre dernier soupir, et mourez avec ces paroles sur les lèvres : Je crois en la sainte Église catholique.

Vous êtes dans la communion des saints ; unissez donc vos prières, vos bonnes œuvres, vos actes de charité à ceux de toutes les âmes saintes et fidèles; priez pour que tous participent à vos bonnes œuvres, et que vous participiez à toutes les leurs. Unissez- vous aux saints et aux anges pour louer Dieu, et implorez leur intercession auprès de Jésus-Christ Notre-Seigneur. N'oubliez point vos frères trépassés, mais pensez à eux chaque jour, en disant : Seigneur, ne vous souvenez pas de nos offenses ni de celles de nos parents. Les âmes du Purgatoire ne peuvent obtenir de soulagement que par les suffrages des fidèles. Oh! c'est une sainte et salutaire pensée de prier pour les morts, afin qu'ils soient délivrés de leurs péchés. (II. Mach. 12, 46. ) Qu'ils reposent en paix!

HISTOIRES.

Communication des prières et des bonnes œuvres entre les fidèles. — Saint Augustin visitait un homme de distinction appelé Innocent. Il était malade, et le lendemain on devait lui faire une opération dangereuse qu'il redoutait beaucoup ; il conjura le saint évêque d'y assister, afin, s'il mourait, d'avoir le secours de ses prières et de ses exhortations.  Saint Augustin le lui promit, lui donna d'excellents conseils et lui recommanda de s'unir aux prières que lui et ses prêtres allaient faire pour lui. On se mit à genoux, on pria avec ferveur. Le lendemain, les chirurgiens arrivent munis de leurs instruments ; ils examinent, et ils ne voient plus aucun vestige du mal qui les avait appelés. Dieu avait exaucé les prières d'Augustin, etc., en faveur d'Innocent. ( St. Augustin, Cité de Dieu, liv. 22. )

Voyez saint Pierre délivré par les prières des fidèles ( Actes 12 ), les lettres de communion , signe d'une charité mutuelle, dont parle si souvent de l'Église , et mille autres preuves de cette communication intime qui existe entre les fidèles.

Communication entre les fidèles est les saints du ciel. — Saint Fructueux ne cessait de prier pour toute l'Église. Condamné à la peine du feu, il allait souffrir ce cruel martyre, lorsqu'un chrétien, prenant la main du saint , lui dit : « Je vous supplie de vous souvenir de moi devant Dieu. — Je dois songer à toute l'Église catholique , de l'Orient à l'Occident , lui répondit le saint martyr. » Saint Polycarpe priait jour et nuit pour l'Église catholique, répandue sur toute la terre. Mais c'est surtout du haut du ciel que les saints font sentir l'effet de leurs prières et de leur intercession en notre faveur.

En 1089, une maladie contagieuse, connue sous le nom de feu sacré, ravageait plusieurs provinces de France. Des pèlerins vinrent à Arles prier devant les reliques de saint Antoine ; ils furent guéris, et le bruit de ce miracle attira devant les saintes reliques un immense concours. La France entière implora la protection de saint Antoine contre le redoutable fléau, et le nom de feu saint Antoine, sous lequel on désigna plus tard cette maladie , est un monument populaire du secours accordé à notre patrie par l'intercession de ce grand saint. ( Vie de St. Antoine. )

Communication entre les fidèles et les âmes du Purgatoire. — Au temps de saint François de Sales , les écoliers de l'université de Padoue avaient l'habitude de courir la nuit par les rues, avec des armes, de demander qui va là? et de tirer, si on ne répondait pas. Un écolier n'ayant pas répondu à ce cri, fut tué, et le meurtrier se réfugia aussitôt chez une bonne veuve dont le fils était son camarade de classe, lui faisant l'aveu du malheur qui venait de lui arriver. Quelques instants après, on apporta à l'infortunée mère le cadavre de son fils ; elle reconnut sans peine d'où le coup était parti. « Ah! malheureux, s'écria-t-elle toute éplorée, que vous avait fait mon fils pour le tuer si cruellement? » Apprenant qu'il avait tué son ami , le meurtrier poussa des cris déchirants et s'arracha les cheveux de désespoir, conjurant cette bonne mère, devant qui il était tombé à genoux , de le livrer à la justice , pour expier sur l'échafaud cet horrible crime. Touchée de tant de douleur, cette mère, éminemment chrétienne, lui promit son pardon, s'il voulait changer de vie. Le fils de cette respectable mère lui apparut bientôt, de la part de Dieu, pour l'assurer que le ciel, en considération de cet acte de clémence , l'avait délivré du purgatoire où il devait rester longtemps. Voyez ce que peuvent nos bonnes œuvres en faveur de ces pauvres âmes ! (Esprit de S. François de Sales.)

« Quand je ne serai plus, priez pour mon âme, n'oubliez point celle qui vous a tant aimé , songez à moi surtout quand vous monterez au saint autel..., disait sainte Monique à son fils. » Saint Augustin se montra fidèle à cette recommandation : « Dieu des miséricordes, s'écriait-il du fond de sa douleur, pardonnes à ma mère les péchés qu'elle a commis, n'entrez point en jugement avec elle, détournez vos yeux de ses iniquités... »
( Confessions de St. Augustin. )

Ceux qui ne participent pas aux biens de l'Église. — Un saint abbé,, nommé Théodore, rencontra dans un hôpital un solitaire infecté d'hérésie. Néanmoins il portait un rude cilice, ne prenait que du pain et de l'eau, gardait un silence perpétuel et priait sans cesse. Comment un homme d'une vie aussi austère pouvait-il être dans la voie de la perdition. Théodore avait peine à le concevoir. Il pria Dieu de l'éclairer à ce sujet, et il aperçut un volatile qui, par le mouvement de ses ailes, répandait une odeur insupportable. A ce signe , il reconnut que les œuvres les plus saintes sont inutiles à celui qui est séparé de la vraie Église. — Mais si nos propres œuvres dans ce cas nous sont inutiles, quelle puissance peuvent avoir celles des autres ? ( Pasteur apostolique.)

ARTICLE X.

La rémission des péchés.

D. Que signifie cet article?

R. Que Dieu a promis à tous les pécheurs qui se repentent, la rémission des péchés par les sacrements de baptême et de pénitence.

D. Quels sont les péchés remis par le baptême ?  

R. Ce n'est pas seulement le péché originel avec lequel nous sommes tous nés, mais encore les péchés qu'on aurait pu commettre avant le baptême et depuis l'usage de raison.

D. Quels péchés sont remis par la pénitence?

R. Tous les péchés commis après le baptême.

D. Quels sont les ministres du sacrement de pénitence?

R. Ce sont les évêques et les prêtres seulement.

Instruction. Cet article, dont la croyance est si nécessaire à notre salut, peut se fonder sur ces paroles de notre Sauveur. Il est écrit ainsi , et il fallait que le Christ souffrit de la sorte , qu'il ressuscitât le troisième jour, et qu'on prêchât en son nom parmi toutes les nations la pénitence et la rémission des péchés. ( Luc, 24, 46, 47. )

Cela nous apprend à croire que l'on obtient dans l'Église la rémission des péchés, et que le pouvoir de les remettre par les Sacrements à tous ceux qui se repentent, a été donné aux pasteurs de l'Église. La première rémission du péché que nous recevons au baptême, est celle du péché originel, péché dans lequel nous sommes tous nés , par suite de la faute d'Adam : Comme le péché est entré dans le monde par un seul homme et par le péché la mort , ainsi le mort a passé à tous les hommes , tous ayant péché dans un seul. ( Romains 5, 12. ) Pour ceux qui reçoivent le baptême à un âge plus avancé , les péchés actuels qu'ils ont commis depuis l'usage de raison , et la peine temporelle due à ces péchés sont entièrement remis, pourvu qu'ils soient vraiment pénitents , de sorte que, s'ils venaient à mourir immédiatement après, rien ne retarderait leur entrée dans le ciel.

Mais l'humaine fragilité nous rendant sujets au péché , après comme avant le baptême, nous avons toujours grand besoin d'un autre sacrement pour nous délivrer du péché et nous rétablir dans la faveur et l'amitié de Dieu : c'est pourquoi Notre-Seigneur a donné à ses apôtres le pouvoir d'absoudre les pécheurs au sacrement de pénitence , lors qu'il leur a dit : Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et les péchés seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez. ( Jean, 20, 23. ) Ce pouvoir, le Christ, comme homme , l'a exercé le premier , lorsqu'il a dit à l'homme malade et paralytique : Vos péchés vous sont pardonnés.

Les Juifs lui ayant alors demandé comment, étant homme , il pouvait remettre les péchés, il les reprit sévèrement et opéra un miracle sous leurs yeux pour les convaincre qu'il avait ce pouvoir, même comme homme :Afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a le pouvoir, sur la terre, de remettre les péchés, lève-toi, dit-il au paralytique, prends ton lit et retourne à ta maison. ( Luc, 5. ) Car, bien que le pouvoir de remettre les péchés soit propre à Dieu seul, qui est offensé par le péché, cependant il est clair par l'Écriture que Dieu exerce ce pouvoir sur la terre par le ministère des hommes. Il l'a exercé d'abord par notre Sauveur, comme homme, ensuite par ses apôtres, et il l'exerce maintenant par les évêques et les prêtres.

Ce pouvoir n'a été donné qu'à eux seuls, et il leur a été donné comme ministres de Dieu. Ils agissent non pas en leur propre pouvoir, mais avec le pouvoir du Dieu tout-puissant et comme simples instruments pour la rémission des péchés, lorsqu'ils donnent l'absolution dans le sacrement de pénitence. Les avantages qu'en retirent les âmes chrétiennes sont tels qu'il n'y a point de péchés , si nombreux ou si graves qu'ils soient, dont le pardon ne s'obtienne par ce sacrement. Ainsi c'est le comble de l'ingratitude de négliger la pénitence, et c'est la plus grande présomption que de la différer.

Exhortation. Adorez et remerciez, ô âme chrétienne, la divine miséricorde qui vous a doté de ces moyens souverains d'avancer et d'assurer votre salut; puisque vous avez été purifié du péché originel par le baptême, rendez grâce à la miséricorde infinie, et vivez selon les promesses que vous avez faites alors. Qu'une vie coupable n'oblige pas cette source de vie et de salut à s'élever un jour contre vous !

Mais si, par le péché, vous avez perdu votre innocence baptismale, le Christ a donné un autre remède souverain contre les péchés actuels que notre nature fragile est portée à commettre; hâtez-vous d'appliquer, avec une préparation convenable, ce remède à votre âme coupable , et n'oubliez point la promesse de Dieu qui s'engage à pardonner le pécheur à quelqu' heure qu'il se repente. Pensez a ceux qui ont péri éternellement par négligence , par de malheureux délais , par le défaut du véritable repentir. Considérez ces âmes infortunées déplorant en vain leurs péchés et leur lâcheté à faire pénitence, au milieu d'éternels tourments qu'elles subissent pour moins de péchés peut-être que vous n'en avez commis.

Profitez de leur avertissement et faites pénitence sous la main clémente de la divine miséricorde, afin de détourner les coups de la justice vengeresse. Réfléchissez à temps sur l'énormité du péché, sur les maux qui l'accompagnent et les funestes conséquences qui le suivent. Ne remettez point votre conversion de jour en jour; car les délais sont dangereux. Ne vous permettez pas d'offenser Dieu parce qu'il est miséricordieux ; cette présomption vous rendrait indigne de miséricorde ; mais recourez sans retard au tribunal de la pénitence : Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs. Repentez-vous et ne péchez plus , de peur qu'un plus grand mal ne vous arrive.

HISTOIRES.

Promesse de la rémission des péchés. — Les saintes Écritures, l'histoire de l'Église, la Vie des Saints, nous parlent sans cesse de la miséricorde de Dieu envers les pécheurs. Sans parler du prodigue qui ne connaît la parole de Jésus-Christ aux disciples qui demandent à faire descendre le feu du ciel sur Samarie , et les représentations de Dieu à Jonas irrité de son pardon aux Ninivites? Prenons seulement deux traits de l'Histoire ecclésiastique.

Au 4 e siècle, une grande pécheresse employait à la perte des âmes les talents et les faveurs qu'elle avait reçus de la nature. Dieu lui parle par la bouche d'un saint solitaire, et Thaïs met le feu à ses bijoux et à ses parures amoncelées, Thaïs se fait renfermer dans une étroite cellule où chaque jour on lui passe un peu de pain et d'eau par une petite fenêtre. La grande pécheresse répétait sans cesse ces paroles : 0 Vous qui m'avez créée , ayez pitié de moi ! Au bout de trois ans , Dieu fit connaître à son apôtre , saint Paphnuce, que l'héroïque pénitente avait trouvé grâce à ses yeux. On ouvrit sa prison volontaire, mais cette âme sanctifiée par la pénitence était mûre pour le Ciel : elle mourut quinze jours après, et fut honorée comme une sainte. (Godescard, Vies des Saints, 8 octobre. )

L'histoire de Thaïs nous rappelle celle d'un chef de brigands, appelé David. Dieu ayant touché le cœur de David , il vint heurter à la porte d'un monastère, demandant à grand cri d'y faire pénitence. On ouvre ; on lui donne l'habit, et, après s'être confessé, il se livre aux plus rudes austérités. Le jour , la nuit , il criait sans cesse : Miséricorde, mon Dieu! ayez pitié de moi! Il s'accusait de ses péchés passés tout haut, et avec tant de larmes et de repentir qu'on crut quelquefois qu'il en mourrait. Après avoir passé plusieurs années dans cette rude pénitence , une voix céleste lui dit un jour : David, tous tes péchés te sont remis ! (Bolland., Acta Sanctor., 26 juin)

Rien peut-être ne nous révèle mieux les dispositions miséricordieuses du Seigneur que l'histoire de Carpus. Un idolâtre avait fait apostasier un chrétien. Profondément affligé de ce malheur, l'Évêque pria le Seigneur de les écraser de sa foudre. A l'instant il vit le Ciel ouvert sur sa tête, et Jésus, entouré de plusieurs légions d'anges, assis sur un trône éclatant; sous ses pieds, la terre entr'ouverte , et les deux pécheurs debout sur le bord d'un affreux abîme, où des serpents enroulés autour de leurs pieds, ensanglantés de leurs cruelles morsures, faisaient effort pour les entraîner. Carpus, c'était cet évêque au zèle amer, ayant levé les yeux , vit Jésus, plein de douceur et de commisération , descendre de son trône au bord de l'abîme, et tendre aux pécheurs une main secourable, tan dis que ses anges les soutenaient afin de prévenir leur chute. (S. François de Sales, Traité de l'amour de Dieu.)


ARTICLE XI.

De la résurrection de la chair.

D. Que signifie cet article?

R. Que ces corps mêmes , dans lesquels nous vivons maintenant , ressusciteront au
jour du jugement dernier.

D. Quelle puissance les ressuscitera?

R. Ils ressusciteront par l'ordre tout-puissant de Dieu et le ministère des Anges.

D. Sont-ce les mêmes corps qui doivent ressusciter?

R. Oui, les mêmes en substance , quoique différents pour les qualités.

D. Comment un corps réduit en poussière peut-il ressusciter.

R. Par le même pouvoir qui l'a fait avec de la poussière , et qui dans l'origine a tiré toutes les créatures du néant.

D. Quelles seront les qualités des corps glorifiés ?

R. L'impassibilité, la clarté, l'agilité, la subtilité.

D. Combien faudra-il de temps pour que tout cela se fasse?

R. Cela sera dans un instant, dans un clin d'oeil. ( I Cor. 15, 52.)

Instruction. Cet article nous apprend que tous les morts doivent un jour ressusciter. Le même corps s'unira de nouveau à la même âme ; tous les enfants d'Adam reviendront
à la vie , et ils seront récompensés dans leur corps et dans leur âme, selon leurs actions. Et comme durant la vie, le corps a partagé avec l'âme le bien et le mal , après cette vie
il partagera également sa peine ou sa récompense. La résurrection du corps est clairement marquée dans Job : Je sais que mon Rédempteur est vivant et que je me relèverai de terre au dernier jour. Je serai de nouveau revêtu de cette peau, et je verrai mon Dieu, dans ma chair. ( Job , 19, 25. ) La résurrection du corps n'est pas moins évidente dans la comparaison avec la semence : Insensé, ce que vous semez ne prend point vie s'il ne meurt auparavant. Il en est de même de la résurrection des morts.
Le corps est semé dans la corruption et il ressuscitera incorruptible. ( 1 Corinthiens 15, 36, 42. )

Notre-Seigneur a prouvé cette vérité aux Sadducéens qui niaient la résurrection : Pour ce qui touche à la résurrection des morts, n'avez-vous point lu ce que Dieu vous a dit : Je suis le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac , et le Dieu de Jacob. Or , Dieu n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants. ( Matthieu 22, 31, 32. ) Il enseignait ainsi qu'on reviendra à la vie au dernier jour , quand sur l'ordre de Dieu , au son de la trompette et à la voix de l'Ange , toute l'espèce humaine sortira de ses tombeaux , par la même puissance qui lui a donné la vie une première fois, qui a créé de rien toutes choses et formé l'homme du limon de la terre. Ceci été l'effet de cette simple parole Fiat ! Cela sera l'effet de cette autre et simple parole : Surgite . Levez-vous l Comme tous meurent par Adam, de même tous recouvreront la vie par Jésus-Christ. ( 1 Corinthiens, 15 , 22. ) Mais la condition de tous ne sera pas semblable : Ceux qui auront fait de bonnes actions ressusciteront pour vivre , au lieu que ceux qui en auront fait de mauvaises ressusciteront pour être condamnés. ( Jean , 5 , 29. )

Selon l'Écriture , les corps glorifiés jouiront de quatre qualités : 1° De l'impassibilité. Ils ne seront plus sujets à la mort ni à la souffrance : Ce corps corruptible ressuscitera
dans l'incorruptibilité. (1 Corinthiens 15.) 2° De la clarté. Il sera rayonnant de gloire, sans tache ni flétrissure : Il est semé dans l'ignominie et il ressuscitera glorieux; mais cette gloire ne sera pas égale pour tous : Comme une étoile diffère en clarté d'une autre étoile , ainsi en sera-t-il à la résurrection des morts. 3° De l' agilité. Il se transportera au gré de l'âme avec une indicible rapidité : Il est semé dans la faiblesse et il ressuscitera plein de force. 4° De la subtilité. Le corps alors sera obéissant et soumis à l'âme : c'est en ce sens qu'il est écrit : Il est semé corps animal et il ressuscitera corps spirituel.

Quant à l'immortalité , après la résurrection , elle sera commune aux bons et aux méchants. Les mauvais , il est vrai, ne mourront plus , mais il n'en résultera aucun avantage en leur faveur. Leur immortalité , au contraire , sera leur plus grand tourment : ils appelleront la mort, comme un terme à leurs souffrances, mais la mort s'éloignera
d'eux éternellement. Leurs corps aussi ressusciteront entiers, mais ce sera seulement pour être punis dans tous les membres qui ont servi au péché.

Exhortation. Adorez, ô chrétien ! la puissance de Dieu, qui, au dernier jour, ressuscitera les corps de tous les hommes, depuis Adam jusqu'au dernier né de la race humaine. Ils surgiront de la poussière, animés de nouveau par les mêmes âmes qui les auront habités en cette vie. Oh ! que la perspective de ce jour redoutable vous excite à pratiquer la vertu , afin de vous assurer par là une résurrection glorieuse. Considérez combien sera terrible la résurrection des méchants pour le jugement, et que cette
prévision vous détourne du péché; considérez la confusion et le désespoir des réprouvés, qui alors conjureront les montagnes de tomber sur eux et de les mettre à couvert de la colère de Dieu. Si vous tremblez d'offenser en sa présence un prince en courroux, comment osez-vous pécher en présence d'an Dieu irrité?

Vivez donc dans l'innocence , et si vous avez eu le malheur de tomber dans le péché , relevez-vous par le repentir. Les péchés qui sont effacés par la confession et la pénitence, ne reparaîtront plus contre vous au dernier jour. Que la prévision d'une résurrection glorieuse vous encourage à pratiquer chaque vertu, à aimer Dieu qui est la bonté même, à espérer en Dieu qui est plein de miséricorde , à craindre Dieu qui est infiniment juste. Trouvez dans cette pensée la force de souffrir la persécution et la mort par amour de la justice, sachant bien que c'est un moyen de rendre votre âme heureuse à la mort , et votre corps glorieux à la résurrection des morts. Préservez maintenant votre corps de la corruption du péché et de l'impureté, afin qu'il ressuscite plus tard pour être incorruptible et posséder l'immortalité glorieuse, car ce que l'homme aura semé il le recueillera. (Galates. 6, 8.)

HISTOIRES.

Résurrection des corps. — Le cruel Antiochus prétendait, à force de supplices , faire renoncer les sept frères Machabées à leur religion ; mais l'espoir de la résurrection glorieuse les rendit plus forts que toutes les tortures. On venait d'arracher avec des tenailles la peau delà tête au second; lorsqu'il fut près d'expirer, il dit au roi :
Vous nous faites perdre la vie présente , mais le Roi des rois nous ressuscitera un jour pour la vie éternelle. Le quatrième tint à peu près le même langage : Il est plus avantageux d'être tué par les hommes, que de violer la loi , parce que Dieu nous rendra la vie en nous ressuscitant. Le plus jeune , fortifié par les exhortations de sa mère, marcha sur les traces de ses frères : Mes frères n'ont eu à souffrir qu'une douleur passagère, et maintenant ils sont entrés dans la vie éternelle. Le sacrifice de la généreuse mère mit le comble à l'holocauste. —Pensons à la résurrection, et nous serons plus forts contre le péché, plus ardents à la vertu. ( 2 Macchabés, ch. 7. )

Par quelle puissance ? — Un roi de Perse fit couper tous les membres, les uns après les autres , à saint Jacques-le-Mutilé. Pendant ce cruel martyre, qui dura neuf heures , le Saint, toujours armé d'une patience héroïque , disait à chaque fois qu'on lui coupait un membre : « Partez, mon pied, ma main, mon œil; le Créateur saura bien vous réunir un jour pour former un ensemble magnifique. » C'est ainsi que se consolait ce saint par la pensée de la puissance qui devait le ressusciter. (Lohner, Biblioth. )

Vos corps , les mêmes en substance , seront différents en qualités.-— Les mages, ayant fait couper les doigts des mains et des pieds au martyr Jonas, les semèrent de tous côtés et dirent ironiquement à la courageuse victime : « Vois-tu comme nous avons semé tes doigts? Tu n'as qu'à attendre la moisson, tu récolteras de cette semence un grand nombre de mains. » Ils tournaient en, dérision le dogme de la résurrection. Jonas ne chancela pas dans sa foi : « Je ne demande pas un grand nombre de mains, répondit-il; mais Dieu qui m`a créé, me ressuscitera au jour des rétributions générales, et me revêtira d'un corps nouveau et glorieux. ( Lohner , Biblioth. )

On a peine à concevoir le dogme de la résurrection des corps.— Comment cette matière, réduite en poussière, pourrait-elle redevenir un corps? 0 homme! jette les yeux sur toi-même, et tu n'auras plus de peine à croire. Qu'étais-tu avant d'être homme ? Rien ! Tu n'étais rien avant d'être ; pourquoi Celui qui t'a appelé du néant à l'existence ne pourrait-il pas t'y ramener encore ? Qu'y aurait-il de nouveau? Tu n'étais pas et tu es ; tu ne seras plus et tu recommenceras d'être. Explique-moi, si tu peux, comment tu es entré dans la vie, et puis tu me demanderas comment tu peux y revenir. Sera-t- il plus difficile de redevenir ce que tu étais déjà, que d'être ce que tu n'étais pas encore?... D'ailleurs la main de Dieu n'a-t-elle pas imprimé autour de toi les images frappantes de la résurrection future ? Ne vois-tu pas chaque jour la lumière expirer et renaître ; les astres s'éteindre et se rallumer ; le temps recommencer et fuir; les fruits passer et revenir; la semence ne se corrompre que pour se féconder, tout se conserver par sa destruction même, et se reproduire par sa propre mort. » (Tertullien, Apologétique. )

ARTICLE XII.

La vie éternelle.

D. Pourquoi est-ce là le dernier article du symbole ?

R. Parce que la vie éternelle est notre récompense finale, la dernière récompense que la foi nous fait attendre.

D. Que signifie cet article ?

R. Il signifie que le juste mort en état de grâce vivra avec Dieu dans la gloire éternelle , mais que le méchant demeurera pour toujours dans les tourments de l'enfer.

D. Tous les hommes sont-ils créés avec le pouvoir de se sauver?

R. Oui; Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. (1 Timothée 2, 4.) J'en jure par moi-même, dit le Seigneur Dieu, je ne désire point la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. ( Ézéchiel. 33, 11 .)

Dieu n'a fait personne pour être damné.

D. Pourquoi donc un si grand nombre le sont-ils ?

R. C'est à cause de leurs fautes propres et volontaires , à cause de l'impénitence de
leur cœur. Votre perte, Israël, est votre propre ouvrage.

D. En quoi consiste la vie éternelle?

R. Dans la claire vision et la possession de Dieu.

D. Quelles en seront les conséquences ?

R. Un amour de Dieu , une joie , un bonheur tels qu'aucune langue mortelle ne les peut exprimer, aucun esprit les concevoir.

D. Que signifie le mot Amen ?

R. Il signifie qu'il en soit ainsi. Nous déclarons par ce mot que nous croyons et souscrivons à chaque article du symbole.

Instruction. Nous terminons le symbole par cet article, parce qu'il met sous nos yeux la grande et glorieuse fin de la création et de la rédemption , c'est-à-dire la vie éternelle. La vie dont nous jouissons ici-bas ne peut être appelée vie, quand nous la comparons à la vie éternelle. Celle-ci est une félicité si parfaite et si complète , qu'il est impossible de la concevoir, encore moins de l'exprimer. Elle est appelée la vie éternelle , parce que ce ne serait pas le vrai bonheur, si elle était mêlée le moins du monde de la pensée que la mort y mettra un terme. Dans la sainte Écriture, elle est comparée à un banquet ou à une fête de noces pour en représenter la joie , à un royaume pour en montrer la gloire , à une perle pour marquer combien elle est précieuse. Elle consiste essentiellement dans la claire vue, la possession et la jouissance de Dieu , en qui se trouve renfermé tout ce qui est bien ; nous pouvons y ajouter les délices d'une société composée des saints et des anges, d'un séjour qui est le ciel , et le tout , accompagné de la certitude absolue d'une éternelle durée : c'est le repos goûté sans travail, la joie sans mélange de larmes, la lumière sans ténèbres , la vie sans la mort, la félicité sans fin. Heureux, Seigneur,
ceux qui habitent dans votre maison ! (Psaume 83, 5.)

Le contraire de tout cela , voilà la part des damnés en enfer. Là, ils seront tourmentés par un feu qui jamais ne s'éteindra, par un ver qui ne mourra jamais; là seront les
pleurs et les grincements de dents , la douleur, la rage et le désespoir. Pour obtenir la vie éternelle , nous devons vivre dans la vertu, garder nos âmes en état de grâce , de telle sorte que nous soyons toujours prêts à mourir dans la faveur et l'amitié de Dieu. En un mot , si vous voulez entrer dans la vie éternelle, observez les commandements. Chacun doit aspirer à ce bonheur, parce que tous ont été créés pour le posséder, et s'il en est qui ne l'obtiennent pas , ils ne doivent attribuer leur malheur qu'à eux-mêmes , à leurs transgressions volontaires de la loi de Dieu , à leur impénitence finale. Dieu accorde à chacun la grâce suffisante pour opérer son salut : La bonté de Dieu vous engage à faire pénitence. Mais par l'endurcissement et par l'impénitence de votre cœur, vous vous amassez un trésor de colère pour le jour de la colère et de la manifestation du juste jugement de Dieu (Romains 2, 4, 5.) Vous êtes les maîtres de votre volonté, pour vous sauver ou vous damner vous-même : Votre perte, ô Israël, ne vient que de vous. (Osée, 13, 9.)

Exhortation. Chrétien , aspirez de toutes vos forces , de tout votre cœur, de toute votre âme, à la bienheureuse fin pour laquelle vous avez été créé , quel que soit ce que vous avez à souffrir pour y arriver. Vous le savez , vos souffrances seront bientôt échangées contre un poids éternel de gloire , et la jouissance de la vision béatifique couronnera enfin vos travaux et vos douleurs. Unissez donc votre cœur à Dieu maintenant, afin que vous soyez ensuite absorbé dans l'amour de votre créateur pour toute l'éternité. Dieu est le seul trésor et l'unique centre d'une âme chrétienne. Sans lui , il est impossible qu'elle soit jamais heureuse. Consacrez donc le peu de vie qui vous reste à le louer et à le glorifier. Unissez-vous maintenant aux anges et aux saints, en chantant Saint, saint, saint est le Seigneur, le Dieu des armées, et un jour vous vous joindrez aux célestes chœurs pour redire avec eux cette hymne éternelle.

Et puis, que la considération des éternels tourments de l'enfer, qui sont le salaire des pécheurs, vous éloigne du péché. Comment pouvez-vous voir en esprit ce qu'ils endurent, et néanmoins oser pécher encore ? 0 aveuglement ! ô stupidité ! ô folie ! ô démence ! Bénissez Dieu, à l'exemple du saint roi David, de ce qu'il a daigné éclairer les ténèbres de votre intelligence, afin que vous ne vous endormiez pas dans la mort éternelle !

HISTOIRES.

Aspirer à la récompense finale. — On pressait sainte Félicité d'engager ses enfants à l'apostasie : « Mes fils vivront à jamais, s'ils ne sacrifient pas aux dieux, répondit-elle ; s'ils le font, ils tomberont dans la damnation éternelle. » Ensuite elle s'adressa à ses enfants et leur dit : « Regardez le ciel ; c'est-là que vous attend Jésus-Christ avec tous ses saints; combattez donc pour vos âmes, et persévérez dans l'amour de Jésus-Christ. » Ils obéirent, et, sou tenus par l'espoir de la vie éternelle, ils combattirent jusqu'à la
mort. (Dom Ruinart, Actes des Martyrs.)

Durant la dernière maladie de saint Martin, ses disciples le priaient de se retourner, afin de se soulager un peu. « Laissez-moi regarder le ciel plutôt que la terre, leur répondit-il; ne m'empêchez pas de contempler la voie que mon âme devra bientôt parcourir pour aller à Dieu. » ( Sulpice Sévère, Vie de saint Martin. )

En quoi consiste la félicité éternelle ? — « Quelle est ta destinée, se demandait à lui-même un grand serviteur de Dieu; et il répondait : « Ta destinée est de régner dans le ciel , d'y régner avec Dieu, d'y régner éternellement, d'orner ton front de la couronne de gloire, de t'enivrer au torrent des éternelles délices, etc.» ( SCHMID ET BELET. )

Sur le point de rendre le dernier soupir, le prince de Condé disait au prêtre qui l'assistait : « Jamais je n'ai douté des mystères de la Religion. Oui , assurément , nous verrons Dieu face à face. » C'est là l'essence, la source du bonheur éternel. ( Vie de Condé. )

« Quand j'arrivai en France , sur un vaisseau qui venait des Indes, dit Bernardin de Saint-Pierre, dès que les matelots eurent distingué parfaitement la terre de la patrie, ils devinrent incapables de manœuvrer. Les uns la regardaient sans en pouvoir détourner les yeux; il y en avait d'autres qui parlaient tout seuls, d'autres qui pleuraient... Que sera-ce donc lorsque nous verrons la patrie céleste , où habite ce que nous avons le plus aimé et ce qui mérite seul de l'être , c'est-à-dire Dieu , en qui se trouve dans un degré infini toutes les perfections et toutes les amabilités? » (Bernardin de Saint-Pierre. )

Amen! fiat! fiat ! Après trois mois d'une maladie épidémique, les médecins annoncèrent à saint Louis de Gonzague qu'il ne pouvait guère compter que sur huit jours de vie. Ravi de joie, Louis dit au jeune frère qui le premier entra dans sa chambre : « Savez-vous la bonne nouvelle qu'on vient de m'apprendre ? Je n'ai plus que huit jours à vivre : Disons , je vous prie, un Te Deum , pour remercier Dieu d'un si grand bienfait.» Ainsi pensent, ainsi parlent les saints. Imitons-les dans leurs sentiments, et nous les imiterons
mieux dans leurs vertus. ( Vie de saint Louis de Gonzague. )


DE L'ESPÉRANCE.

D. Après la foi , quelle vertu est nécessaire à notre salut?

R. L'espérance.

D. Qu'est-ce que l'espérance?

R. C'est un don de Dieu , et une vertu surnaturelle qui excitent en nos âmes une vive attente de la gloire éternelle.

D. Sur quoi l'espérance est-elle fondée ?

R. Sur la puissance de Dieu et sur les promesses et les mérites du Christ qui a assuré le ciel à ceux qui feront des bonnes œuvres avec foi, et la grâce pour faire ces bonnes œuvres.

D. Quels effets l'espérance produit-elle dans nos cœurs?

R. Elle nous encourage à la vertu, nous fortifie dans l'affliction, et éloigne les angoisses à la mort.

D. Nos bonnes œuvres sont-elles méritoires pour la vie éternelle ?

R. Elles le sont , par les mérites du Christ , lorsqu'elles sont faites en état de grâce et aussi avec quelque intention de plaire à Dieu ; car, lorsque par la grâce Dieu habite et
agit en notre âme , ses œuvres sont des œuvres de vie.

D. Pouvons-nous faire des bonnes œuvres qui méritent le ciel par elles-mêmes et par leur propre force?

R. Non , nous ne le pouvons pas. Leur mérite vient de la grâce de Dieu en nous et de notre coopération à cette grâce.

Instruction : L'espérance étant la seconde vertu théologale , a Dieu pour objet immédiat. Car la fin principale et propre de notre espérance, c'est l'éternel bonheur dans la possession de Dieu , et cette fin nous l'obtenons par le se cours de sa grâce.

L'espérance est infuse dans nos âmes , avec d'autres grâces , par le baptême. Elle les élève vers Dieu, et nous inspire, au milieu des misères de cette vie, une sainte confiance, une ferme assurance de parvenir enfin à la gloire éternelle , au moyen de tout le bien que nous faisons avec son assistance : Le Seigneur met sa complaisance en ceux qui le craignent et en ceux qui espèrent dans sa miséricorde. (Psaume 146, 11.)

Il ne nous est permis, en aucune manière, de placer en nous-même notre espoir et notre confiance, ni de compter sur quelques bonnes œuvres que nous pourrions faire par les propres forces de notre nature ; nous le savons , nous ne sommes par nous-mêmes que des serviteurs inutiles, incapables de rien faire pour le ciel , à moins que la grâce de
Dieu ne nous prévienne et ne coopère avec nous. C'est elle seule qui rend nos actions méritoires et nous conquiert le ciel. Pour tout le bien que nous faisons, il faut dire avec
saint Paul : Ce n'est pas moi, mais la grâce de Dieu avec moi. ( 1 Corinthiens 15, 10.) Aussi lorsque nous prions , jeûnons , faisons l'aumône ou accomplissons quelqu'autre bonne œuvre , il faut agir en état de grâce pour mériter une récompense au ciel. Nous sommes, dit saint Paul, les coadjuteurs de Dieu.

Nous travaillons avec lui et il travaille avec nous. Comme vertu théologale , l'espérance est par conséquent fondée sur la promesse du Christ, sur les mérites de sa passion et de sa mort qui nous ouvrent les portes du ciel, sur la puissance et la fidélité de Dieu qui nous a promis la grâce suffisante pour obtenir la gloire éternelle , bien que cela dépasse infiniment les forces de notre nature. Elle nous excite à la pratique des bonnes œuvres et sert comme une ancre à maintenir nos âmes fermes au milieu des tempêtes, des tentations, des afflictions et des persécutions ; elle nous entr'ouvre la perspective de l'heureux séjour du repos et du bonheur éternel, auquel nous devons bientôt arriver,
encore qu'il soit caché présentement à nos yeux.

Elle nous rend obéissant à la loi de Dieu, et nous dispose à souffrir de bon cœur pour son amour. En un mot, elle nous soutient à notre dernière agonie, et nous procure la couronne de la persévérance. Le saint homme Job éprouvait les heureux effets de l'espérance, lorsqu'il disait : Quand- Dieu me tuerais je ne laisserais pas d'espérer en lui- (Job 13,.15.) Le roi David ne les ressentit pas moins lorsqu'il disait : J'ai mis en Dieu ma confiance; je ne craindrai point tout ce que les hommes peuvent faire contre moi. (Psaume 55, 5.)

Exhortation. Conjurez Dieu, ô chrétien! d'accroître la grâce de l'espérance dans votre cœur. Ne mettez votre confiance ni dans le monde ni dans l'homme, ni en vous-même
ni dans aucune créature, mais en Dieu seul pour, qu'il vous conduise à la vie éternelle. Dieu, il est vrai, peut se servir des créatures, comme de causes instrumentales, qui, sous les ordres de Dieu., vous obtiendront par leur, intercession les moyens, nécessaires pour vous conduire à votre terme ; il vous est, permis , en ce sens, d'espérer en elles, en même temps que vous vous appuyez, pour votre salut, sur les mérites du Christ et sur le pouvoir et les promesses de Dieu.

Que votre espérance soit fondée aussi sur le témoignage d'une bonne conscience : Car l'espérance des méchants périra. ( Proverbe 10, 28.) D'un côté vous ne devez jamais désespérer, puisque le Christ est mort pour vous, puisque la puissance de Dieu suffit pour relever par la grâce sanctifiante les pécheurs les plus criminels, puisque enfin il a pardonné déjà à une multitude de coupables repentants. Mais, d'un autre côté, vous ne pouvez pas présumer que Dieu vous sauve sans l'observation de ses commandements , qu'il vous accorde la gloire éternelle sans bonnes œuvres , ou vous pardonne sans repentir ni conversion : c'est impossible de la part de Dieu. Vous avez raison, même quand vous êtes dans le péché, d'espérer avec l'intention de faire pénitence; mais pécher de propos délibéré dans l'espoir du repentir, c'est le dernier degré de la folie et de la présomption : car vous ne pouvez être assuré d'un seul instant de vie.

S'il faut renouveler fréquemment les actes de foi, faites souvent aussi des actes d'espérance. Accomplissez-vous une bonne action, espérez dans les promesses du Christ. Êtes-vous tenté, espérez en sa puissance ; êtes-vous affligé ou persécuté, espérez dans sa providence; vous livrez-vous au repentir et à la pénitence de vos péchés, espérez dans sa miséricorde. En un mot , que les plus vertueux ne placent point leur confiance en leurs propres actions et ne se reposent point sur leurs propres forces, mais sur les mérites du Christ. Et toute fois, bien que ce soit par lui seul, notre unique espérance, que nous puissions mériter ou attendre une récompense, il est certain que ses mérites seuls ne nous sauveront pas sans vertu et bonnes œuvres de notre part.

HISTOIRES.

Nature, de l`espérance, sa nécessité. — Les exécuteurs conduisaient au supplice un jeune héros de la foi, l'illustre Simphorien. A cette vue , sa mère, digne d'un tel fils, lui crie de toutes ses forces : « Armez-vous de courage et souvenez-vous du Dieu vivant; voyez , mon fils , voyez des yeux de la foi Celui qui règne dans les cieux. C'est vers lui, c'est à un bonheur éternel qu'on vous conduit. » Fortifié par un tel discours, Simphorien, à la fleur de l'âge, souffrit et mourut pour Jésus-Christ , échangeant contre cette vie périssable la vie immortelle du Ciel. (Dom Ruinart, et Histoire ecclésiastique. )

Dans une réunion solennelle, un Prélat s' adressant à l'illustre astronome Le Verrier, lui adressa ces délicates félicitations : «Monsieur , on ne peut pas dire de vous que vous vous êtes élevé jusqu'aux nues; vous avez mieux fait : vous vous êtes élevé jusqu'aux astres. — Monseigneur, répondit l'illustre interlocuteur, je veux encore monter plus haut. . . » Toute la société attendait avec anxiété l'annonce d'une nouvelle découverte astronomique , lorsque, s'inclinant gracieusement vers le Prélat, monsieur Le Verrier lui dit : « Je l'avoue , Monseigneur , j'ai l'ambition de m' élever au-dessus des astres; je veux aller au ciel. » ( Ami de la Religion, 9 novembre 1847. )

Motifs de l'espérance : la puissance, la richesse de Dieu. — Saint François d'Assise , parlant de sa communauté et de Dieu, disait : « Nous avons une mère qui est bien pauvre , mais notre père est très-riche.»

Aussi, lorsqu'il envoyait de ses frères prêcher dans une ville, il leur faisait cette  recommandation : Confiez au Seigneur votre sollicitude, et il vous nourrira. (Psaume 54, 23.)

Les mérites de Jésus-Christ. — « Je ne suis pas digne des grâces de Dieu, disait saint Bernard, mais Jésus-Christ me les a méritées ; il a dit : Demandez et vous recevrez. Je regarde le royaume des cieux comme chose qui m'appartient par suite du droit que mon Sauveur m'y a donné. »

La fidélité de Dieu à ses promesses , sa bonté , sa providence.— Saint François de Sales se reposait sur la divine Providence avec plus de sécurité qu'un petit enfant sur le sein de sa mère : « Dieu a promis de nous assister dans nos peines ; rien n'arrive que par sa permission, rien que pour notre salut. Qu'ai-je à craindre? »— En butte à une horrible calomnie , le saint Prélat ne perdit pas un instant la paix de l'âme. « On vient m' avertir de Paris qu'on déchire mes vêtements d'une belle manière , mais j'espère que Dieu
me les raccommodera, de sorte qu'ils seront meilleurs qu'auparavant, si cela est nécessaire pour son service. »

Effets de l'espérance. — C'est la source d'une confiance pleine d'abandon et de patience. Il existe dans le Chili, à Valparaiso, dit un auteur, un vénérable religieux qui a demeuré vingt-quatre ans parmi les sauvages. Toute la ville le respecte comme un saint; il vit dans une grande pauvreté, il n'a que ce qu'on lui donne. « Il y a vingt ans , disait-il un jour , que je ne pense jamais au lendemain. Le bon Dieu sait que je n'ai pas de quoi vivre, il doit donc me nourrir ; et s'il ne me donne rien pour ma subsistance , il me
donnera du moins la patience de souffrir. »

L'espérance donne du courage dans les tribulations et aux derniers moments de la vie. Saint Martin, apercevant avant de mourir l'ennemi du salut , lui dit : « Que viens-tu faire ici , monstre sanguinaire? Malheureux! tu ne trouveras rien en moi; je vais être reçu dans le sein d'Abraham. » — Sur le point de descendre au tombeau, saint Hilarion se rassurait en disant : « Sors, ô mon âme ! Pourquoi hésites-tu? il y a près de soixante-dix ans que tu sers Jésus-Christ, et tu crains la mort ! »


DU DÉSESPOIR ET DE LA PRÉSOMPTION.

D. Quels sont les péchés opposés à l'espérance?

R. Ce sont le désespoir et la présomption.

D. Qu'est-ce que le désespoir?

R. Une défiance de la puissance de Dieu et des mérites du Christ.

D. Qu'est-ce que la présomption?

R. Une espérance folle et téméraire d'être sauvé sans le secours de la grâce divine, ou sans s'être efforcé d'observer les commandements.

D. Le désespoir est-il un grand péché? —

R. Oui, car il est opposé à la puissance de Dieu, à la miséricorde et aux mérites du Christ.

D. La présomption est-elle un grand péché ?

R. Certainement, et parce qu'elle est un abus de la bonté et de la miséricorde divine, et parce qu'elle fait commettre le péché sans crainte.

D. Comment le désespoir et la présomption sont-ils opposés à l'espérance?

R. La présomption y est opposée par excès, le désespoir par défaut.

D. Comment tenir un juste milieu entre le désespoir et la présomption?

R. Par la crainte de Dieu qui empêche la présomption , et parle zèle à faire de bonnes œuvres, ce qui prévient le désespoir.

Instruction. Comme il n'y a point de vertu sans des vices qui lui soient contraires, le désespoir et la présomption sont opposés à l'espérance. Le désespoir est un péché très-grave car les péchés les plus graves sont les péchés contraires aux vertus théologales : tels sont par exemple, la haine de Dieu, le blasphème, etc , par rapport à la charité ou à l'amour de Dieu ; l'infidélité et l'hérésie par rapport à la foi ; le désespoir par rapport à l'espérance. La raison en est claire : c'est que ces péchés impliquent plus que les autres une grande aversion de Dieu. La haine de Dieu éteint l'amour de Dieu, notre bien le plus essentiel ; l'infidélité nous éloigné de Dieu et nous inspire de l'aversion pour les vérités qu'il a révélées; l'homme par le désespoir repousse la bonté et la miséricorde de Dieu, et, pensant que ses péchés sont trop grands pour être pardonnés , il abandonne l'idée et le soin de son salut. Le désespoir est donc un des péchés les plus dangereux et auxquels il faut le plus énergiquement résister : Mon péché est trop grand, dit Caïn désespéré , pour que je puisse en obtenir le pardon. Mais si Dieu, ô pécheur, est capable de ressusciter les morts, de transformer en enfants d'Abraham les pierres du torrent, comment ne pourrait-il , par la puissance de sa grâce , retirer de la mort du péché les pécheurs les plus invétérés? Il n'est pas d'homme aussi coupable que les grands pécheurs auxquels Dieu a pardonnés.


Lui-même nous donne cette assurance : En quelque jour que l'impie se convertisse, son impiété ne lui nuira point. ( Ézéchiel, 33, 12. ) Ne vous arrêtez donc pas à cause du nombre et de l'énormité de vos fautes, mais ayez confiance en Dieu qui peut aisément tirer votre âme de son malheur, et qui s'est engagé lui-même par une solennelle
promesse, à pardonner à tout pécheur repentant . La présomption aussi est un grand péché. Car s'imaginer que Dieu accorde le pardon à ceux qui persévèrent dans le
crime, et la gloire à celui qui ne recoure pas à la grâce, et qui avec elle, ne fait pas de bonnes œuvres, c'est la plus profonde illusion, c'est incompatible avec ses lois et par conséquent impossible.

Il n'est pas de péché plus dangereux, puis qu'il nous fait présumer à l'excès de sa bonté et nous ôte la crainte de sa justice : «Dieu est bon, dit un présomptueux et il nous pardonnera nos péchés, si grands, si nombreux qu'ils soient et en quelque temps que nous fassions pénitence. Ayons seulement la foi sans bonnes œuvres, nous dit un autre, cela suffit pour nous sauver; car le Christ par sa mort a effacé les péchés des hommes et nous a ainsi dispensé de faire pénitence. » Sous l'empire de cette fatale illusion , combien vivent et meurent sans crainte de Dieu ! Les uns sont coupables du péché de présomption parce qu'ils diffèrent la pénitence; d'autres parce qu'ils négligent d'aspirer à une plus haute perfection : bien qu'ils évitent les plus grands péchés, ils ne laissent pas d'en commettre de plus petits sans scrupule, s'imaginant qu'on peut gagner le ciel à tout prix.

Exhortation. Rappelez - vous, ô chrétien ! les avertissements de Dieu au sujet de ces péchés. Et d'abord au sujet du désespoir. Convertissez-vous à moi de tout votre
cœur, dit le Seigneur, dans le jeûne, les larmes et le deuil. Pensez aux Ninivites qui, quoique profondément ensevelis dans le péché, n'ont pas laissé que d'obtenir leur
pardon par la pénitence. 0 Dieu, vous ne mépriserez point un cœur contrit et humilié! Dans les plus grands malheurs de l'âme ou du corps, espérez en Dieu suivant l'exemple de Jonas, dont Dieu entendit la voix dans le sein de la baleine : J'ai crié au Seigneur du fond de mon affliction et il m'a exaucé. ( Jonas, 2, 3. ) Ainsi, que le pécheur plongé dans le péché aussi profondément que Jonas dans l'abîme de la mer appelle Dieu à son secours, et Dieu en aura pitié. A quelque heure que le pécheur se repente, Dieu
lui pardonnera l'impiété de son péché.

Maintenant, quant à la présomption, rappelez – vous toujours , ô chrétien ! que si Dieu est bon , il est juste aussi. Ne remettez pas votre conversion de jour en jour, de peur que sa vengeance ne vous frappe soudain : car rien ne la provoque davantage qu'un endurcissement habituel dans le péché. La présomption endurcit le pécheur dans le péché , jusqu'à ce qu'insensiblement il devienne insensible aux inspirations de Dieu et aux avertissements des hommes.

N'endurcissez pas vos cœurs. ( Psaume 94, 8.)
Ne vous reposez jamais sur la foi seule : car la foi sans les œuvres est morte (Jacques, 11) ; et ne vous en remettez pas si entièrement aux mérites du Christ , que vous ne coopériez avec lui ; car il est écrit qu'il a souffert , vous laissant l'exemple afin que vous suiviez ses traces. ( 1 Pierre, 2, 21.) Il n'a
nullement souffert pour nous exempter de faire pénitence , comme l'ont prétendu des hérétiques ; car il a répété : Quiconque dit : Seigneur, Seigneur, n'entrera pas pour cela
dans le royaume des deux ; mais celui-là qui fait la volonté de mon Père , y entrera. (Matthieu 7, 21.)


Et quelle est sa volonté ? Que vous pratiquiez l'abnégation , la mortification, la pénitence, l'humilité, toutes les vertus. Ne vous rassurez donc pas , pécheur présomptueux, sur le temps à venir, sur la grâce future ; mais comptez sur le présentqui vous est offert et qui est actuellement en votre disposition. Prenez garde qu'il ne vous soit dit comme aux cinq vierges folles , qui avaient perdu leur temps : Je ne vous connais pas ! Ne recevez pas la grâce en vain à cette heure ; mais soyez diligent et persévérez dans la pratique des bonnes œuvres : elles seront votre unique couronne.

Tenez, pour ainsi dire, la balance entre ces deux extrêmes: le désespoir et la présomption. Une crainte filiale d'offenser Dieu votre Père et d'être séparé de lui, vous
mettra à l'abri de la présomption; et le meilleur moyen d'éviter le désespoir, c'est de faire le bien et de combattre la paresse ? Car c'est la paresse qui porte le chrétien au désespoir, et lui fait regarder son salut comme impossible. Conduisez-vous comme Dieu l'a commandé, et alors vous marcherez avec confiance dans la voie du salut, et par la
confiance vous vous élèverez jusqu'au trône de Dieu.

HISTOIRES.

Désespoir : — Un jeune homme, orné de toutes les vertus de son âge, eut le malheur de s'unir d'amitié avec un condisciple livré aux mauvaises passions. Séduit par de perfides discours , entraîné par de coupables exemples , il tomba dans les plus grands désordres. A cette vue, on s'efforça de le ramener dans la bonne voie; mais les conseils, les prières, les larmes de ses meilleurs amis furent inutiles. L'heure de la divine justice ne tarda pas à sonner. Une nuit qu'il dormait profondément, il se réveille saisi d'une mortelle frayeur, et poussant des cris affreux. On accourt, on lui demande quel est son mal; il ne répond que par de nouveaux cris. On appelle un prêtre qui l'exhorte à demander à Dieu le pardon de ses péchés : c'est en vain. Le zélé pasteur redouble d'instance et joint les larmes aux plus touchantes paroles. Mais, pour toute réponse, le malade jette sur lui des yeux effarés, et s'écrie d'une voie lamentable : Malheur à celui qui m'a séduit! c'est en vain que j'invoquerai Dieu; je vois l'enfer ouvert pour me recevoir. ( Gerson. )


Le farouche Collot d'Herbois, l'ami, l'auxiliaire de Robespierre, s'était baigné à Lyon dans des flots de sang innocent. Il fut sacrifié par la Convention à l'opinion publique, et déporté à Cayenne. Là, abhorré de tous, appelé le bourreau de la religion et des hommes , il se vit condamné à un abandon qu'il regardait comme un enfer. Enfin une fièvre inflammatoire le saisit et le dévore. Il appelle Dieu et la sainte Vierge à son secours. « Hé! pourquoi t'en moquais-tu donc quelques mois auparavant, lui dit un soldat? — Ah ! répondait-il , ma bouche en imposait à mon cœur. » Puis il reprenait : « Mon Dieu ! mon Dieu ! puis-je encore espérer le pardon de mes crimes! envoyez-moi un consolateur, envoyez-moi quelqu'un qui détourne de mes yeux ce brasier qui me consume ; mon Dieu! donnez-moi la paix. » Le spectacle de ses derniers moments était si affreux , qu'on fut obligé de le transporter dans un appartement écarté, et, tandis qu'on cherchait un prêtre, il expira le 7 juin, 1797, les yeux entr' ouverts, les membres horriblement contournés , vomissant des flots de sang et d'écume. Voilà où conduisent le péché, l'impénitence et l'en durcissement dans le mal ! ( Debussi. )

Présomption. — Égaré par une vaine confiance en lui-même, saint Pierre se préféra aux autres , ne crut pas ce que Jésus lui disait, négligea les moyens de résister à la tentation, c'est-à-dire la vigilance et la prière, et se mêla à la compagnie des ennemis du Sauveur. Une grande chute lui apprit combien l'homme doit se défier de sa faiblesse : trois fois, à la voix d'une servante, etc., il renia lâchement son divin maître. Voilà le fruit de la présomption ! Mais , hâtons-nous de le dire, bientôt saint Pierre rentra en lui-même au regard pénétrant de Jésus, et devint un parfait modèle de pénitence. Si nous ne l'imitons que trop souvent dans son égarement, imitons-le au moins une bonne fois dans son retour. ( Saints Évangiles. )

Hélas! combien la présomption en a conduit au péché, à l' impénitence, à la perdition ! « II ne faut qu'un bon peccavi. — Oui,mais aurez-vous la grâce, aurez-vous la force, aurez-vous le temps de le prononcer, ce bon peccavi? — Le bon larron s'est converti, s'est sauvé à la mort. — Oui, mais il était à côté de Jésus-Christ, et comme inondé de son sang ; oui encore, mais le mauvais larron n'a pas eu la même faveur. En voilà un qui se sauve à la mort , ne désespérez pas ; n'en voilà qu'un , ne présumez pas. »
( St. Augustin.)

Remède à ces deux vices : la confiance, la crainte, la prière, les bonnes oeuvres. — La vénérable Langrené de saint François redoutait la mort, à cause des jugements de Dieu. Afin d'obtenir miséricorde au tribunal de son Juge, tous les soirs, devant le saint Sacrement, elle récitait la prose des morts et trois fois le verset : Requiem oeternam... Tous les vendredis, elle faisait l'amende honorable devant son crucifix, les pieds nus, la corde au cou; puis elle disait l'office de la sainte Croix. En retour de cette préparation,
sa mort fut douce devant le Seigneur. ( Heureuse année. )

Le bienheureux Benoît Joseph Labre témoignait ainsi à ses parents sa confiance dans le Seigneur : « Ne soyez point inquiets à mon égard; je me réjouis beaucoup de ce que le Tout-Puissant me conduit. » Le saint pauvre n'eut point à se repentir de cet abandon à la protection du Seigneur. Vers le milieu du jour, il se présentait à la porte d'une personne charitable, et demandait un peu de soupe pour soutenir ce qu'il appelait son cadavre ; mais oh le forçait de recevoir tant d'aumônes qu'il avait de quoi soulager beaucoup de pauvres. Son âme était inondée de consolation, et sa personne, souvent environnée de respect même pendant sa vie. ( Heureuse année. )


MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mer 9 Nov 2016 - 18:27

DE LA PRIÈRE.

D. L'espérance produit-elle encore d'autres effets ?

R. Oui, la prière est un effet de l'espérance.

D. Qu'est-ce que la prière?

R. C'est une élévation de notre âme à Dieu , pour lui demander tout ce qui est nécessaire à notre âme et à notre corps , en vue de notre salut ; elle est ordinairement accompagnée d'action de grâce et de louange à Dieu.

D. Comment devons-nous prier ?

R. Avec dévotion et persévérance.  

D. Où devons-nous prier ?

R. Partout, car Dieu est présent en tous lieux, mais principalement dans les églises, ou lieux consacrés au culte divin.

D. Pourquoi cela ?

R. Parce qu'il est présent dans les églises d'une manière spéciale , afin de nous accorder ses bienfaits.  

D. Qui devons-nous prier?

R. Dieu seul par notre médiateur Jésus-Christ.

D. Pourquoi donc alors prier les saints et les anges ?

R. C'est seulement pour leur demander qu'ils veuillent bien intercéder auprès de Dieu en notre faveur,' par la médiation du Christ. —

D. Pour qui devons-nous prier?  

R. Pour tous les hommes, même pour nos ennemis.

D. Quand devons-nous prier ?

R. En tous temps, comme l'Écriture l'enseigne et chaque jour de notre vie.  

D. Quand devons-nous particulièrement prier?  

R. Les dimanches et les fêtes, puisqu'ils sont des jours consacrés à Dieu.

D. En quel temps encore ?  

R. Le matin et le soir, toutes les fois que nous sommes tentés et affligés, enfin, lorsque nous sentons un besoin particulier de l'assistance divine.

D. Pourquoi devons-nous prier?  

R. Pour obtenir la grâce d'observer les commandements de Dieu et d'arriver à la vie éternelle.

Instruction. La prière, heureux effet de l'espérance , est une élévation de notre âme vers Dieu pour lui demander tous les biens et pour écarter tous les maux. La prière faite de bouche s'appelle prière vocale ; celle qu'on fait seulement d'esprit et de cœur, s'appelle prière mentale; c'est la plus parfaite et la meilleure des deux.

Par la prière , nous demandons toutes les choses nécessaires à notre corps et à notre âme , pour notre bien corporel et spirituel : car Dieu est l'auteur de la nature comme de la grâce , et de lui découlent tous les dons soit pour le temps soit pour l'éternité. Cependant il faut prendre garde de lui rien demander qui ne soit pour sa gloire et propre à nous conduire à la vie éternelle. Et lorsque nous implorons ses bénédictions, nous devons le glorifier et le remercier de celles que nous avons déjà reçues , lui faire l'offrande de notre corps et de nos sens , de notre âme et de ses facultés, enfin mettre tout ce que nous avons et tout ce que nous sommes à son service.

Quant à la manière d'accomplir ce devoir, si nous voulons que nos vœux soient exaucés, nous devons en premier lieu prier avec dévotion et une sérieuse attention au sens des paroles de la prière, ou du moins à la fin pour laquelle nous prions. Or, nous prions Dieu pour qu'il nous accorde ce qui procure notre salut ; de telle sorte que nous devons toujours fixer notre esprit sur Dieu et sur l'objet de notre prière. Nous devons ensuite prier avec révérence , nous recueillant en la présence de Dieu ; avec humilité, pénétrés jusqu'au fond du cœur de notre indignité, de notre absolue dépendance de lui et de sa grâce , aussi bien que de son entière indépendance par rapport à nous et à notre service.

Nous devons enfin persévérer avec constance dans notre demande , jusqu'à importuner le ciel de nos vœux, sachant que tout ce que nous demandons à Dieu par Jésus-Christ comme nécessaire à notre salut, Dieu finira certainement par nous accorder, si nous prions avec dévotion et persévérance : En vérité, en vérité je vous le dis, tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom , il vous l'accordera. (Jean, 16, 23.) Demandez et vous recevrez; cherchez et vous trouverez ; frappez et l'on vous ouvrira. (Matthieu 7, 7.)

Quant au lieu, nous pouvons prier partout; car Dieu étant présent à tous les lieux, voit et connaît toutes choses . Cependant l'église est l'endroit le plus favorable à la prière. Le respect et la vénération du lieu consacré au service du Seigneur est de nature à nous inspirer plus de piété ; d'ailleurs Jésus-Christ est là présent dans les saints mystères pour écouter nos prières et nous accorder ses bienfaits : Là où deux ou trois sont assemblées en mon nom , je suis au milieu d'eux. (Matthieu 18, 20.)

Toutes nos prières doivent être dirigées vers Dieu, et aboutir à Dieu, de qui nous attendons le secours dans nos besoins, la santé et le bonheur. Ainsi, bien que nous conjurions fréquemment la sainte vierge Marie , saint Jean-Baptiste , les saints apôtres Pierre et Paul et tous les saints de prier pour nous, ce n'est pas que nous les considérions comme auteurs de la grâce ; car nous savons que Dieu seul peut conférer la grâce et la gloire ; mais nous espérons obtenir plutôt l'objet de notre demande par leur intercession auprès du trône de la miséricorde que par nos propres et indignes prières. Conséquemment, toutes les fois que nous invoquons les saints , nous les supplions seulement d'intercéder pour nous ; c'est ainsi que nous désirons obtenir les prières de nos frères sur la terre. Cette pratique est recommandée en maints endroits des saintes Écritures. Dieu n'envoie-t-il pas Abimélech à Abraham en lui disant : C'est un prophète , il priera pour vous et vous vivrez. (Genèse, 20 , 7. ) Ne dit-il pas aussi aux amis de Job : Allez à mon serviteur Job ; offrez pour vous un sacrifice en holocauste ; Job mon serviteur priera pour vous ; je le regarderai et l` écouterai favorablement. (Job, 42, 8.)

Dieu est ainsi plus honoré , puisque les prières des saints réunies aux nôtres vont toutes aboutir à lui , pour être exaucées par les mérites de notre Sauveur, Jésus-Christ, notre immédiat intercesseur auprès du Père. Notre devoir ne se borne pas à prier pour nous-même , il faut encore prier pour tous les hommes : pour les fidèles en premier lieu, puis pour ceux qui ont le plus besoin de nos prières, enfin pour nos persécuteurs et plus grands ennemis, afin que Dieu convertisse leurs cœurs, et ne laisse pas peser sur eux le péché qu'ils ont commis contre la charité : Aimez vos ennemis ; faites du bien à ceux qui vous haïssent ; priez pour ceux qui vous persécutent et ceux qui vous calomnient. (Matthieu 5, 44. ) Le Christ a renouvelé cette instruction sur la croix en priant pour ses bourreaux : Père, pardonnez-leur ! Et saint Etienne, premier martyr, a dit, à son exemple, en priant pour ceux qui le lapidaient : Seigneur, ne leur imputez pas ce péché !

L'Écriture nous recommande de prier en tout, temps, sans discontinuer, conformément à cette parole du Sauveur : Il faut prier toujours et ne se lasser jamais, dans la maladie comme dans la santé, dans l'adversité comme dans la prospérité, dans l'indigence comme dans l'abondance. La prière est nécessaire le matin pour offrir à Dieu les prémices du jour, et lui demander ses bénédictions sur nos entreprises : Mes yeux se sont levés vers vous avant l'aurore, afin que je méditasse sur vos paroles. (Psaume 118, 148.) Nous devons prier le soir avant de prendre notre repos, afin de rendre grâces à Dieu pour tous les bienfaits du jour écoulé, afin d'implorer le pardon de toutes nos fautes, et sa protection pour la nuit suivante. Que notre prière du soir monte vers vous , ô Seigneur ! et que votre miséricorde descende sur nous. C'est une obligation pour chaque chrétien d'être fidèle à la prière du matin et du soir, de ne pas se lever ni se coucher, semblable aux animaux muets, sans penser à Dieu ou à la fin pour laquelle nous avons été créés.

En outre, toutes les fois que nous sommes tentés, affligés, persécutés ou injuriés, c'est le moment d'élever notre âme par une sainte prière : Lorsque j'étais dans la tribulation, j'ai crié vers vous , ô Seigneur, et vous m'avez entendu : c'est-à-dire vous m'avez donné la force et le courage d'endurer la souffrance. Plus nous sommes faibles , fragiles et inconstants par nature , plus nous avons besoin de nous adresser à Dieu pour obtenir sa grâce et la force au milieu de tous les maux de cette vie, afin que notre résignation et notre persévérance fassent éclater sa gloire. Mais bien que tous les temps puissent convenir à la prière, il est cependant des jours particuliers et des circonstances propices où il faut prier davantage, par exemple les dimanches et les jours de fête spécialement consacrés au service de Dieu. Car pourquoi le repos et la cessation du travail manuel ordonnés ces jours-là, si ce n'est pour appliquer davantage et avec plus de loisir nos esprits à la prière et à la contemplation. Quant à la langue dans laquelle nous devons prier, il n'y a pas d'obligation pour les personnes du monde de prier dans une autre langue que celle qu'elles comprennent.

Exhortation. La prière étant si essentielle à la vie chrétienne et si nécessaire au salut , on ne doit point manquer à l'accomplissement de ce devoir. Réfléchissons souvent à cette parole de notre Sauveur : Il faut prier sans cesse et ne se lasser jamais. Notre prière à Dieu ne doit finir qu'avec notre vie. Consacrez vous-même du temps non-seulement à la prière vocale , mais à la prière mentale et à la sainte méditation. Pensez fréquemment aux innombrables bénédictions que Dieu a répandues sur vous ainsi qu'à sa grandeur,
à sa puissance, à sa miséricorde et à sa justice. Élevez votre âme jusqu'à la contemplation de la félicité des cieux; abaissez vos regards et considérez les tourments de l'enfer ; que le spectacle du ciel vous excite à pratiquer le bien , et que la vue de l'enfer vous éloigne de commettre le mal.

0 divine contemplation , qui unit l'âme à Dieu ! Toutes les fois que vous priez, que votre cœur soit d'accord avec vos lèvres. Priez avec cette ardeur que vous auriez sur le point de périr dans une tempête; car vous naviguez maintenant sur un océan très-dangereux, vous êtes exposé aux tempêtes les plus violentes et au plus funeste naufrage. Bannissez de votre esprit, autant qu'il est possible , les préoccupations excessives de cette vie ; mais, puisque la nature y est tellement asservie , puisqu'elle est trop faible par elle-même pour les surmonter, redoublez vos efforts, priez avec recueillement et ferveur. N'abandonnez pas la prière ; soyez-y fidèle jusqu'à votre dernier soupir. Puisque Dieu a promis la grâce à ceux qui la lui de mandent, ceux qui persévèrent jusqu'à la fin dans la prière, persévéreront certainement aussi jusqu'à la fin dans la grâce et seront sauvés : La constante prière du juste est très puissante. (Jacques, 5, 16.)

Redoublez vos prières les jours consacrés à Dieu ; conjurez-le par l'intercession des saints et des anges, d'avoir pitié de vous. De même que Dieu pour l'amour d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, a souvent épargné leur postérité coupable, ainsi, grâce à l'intercession des saints , il sauve maintenant de la damnation un grand nombre d'âmes. Implorez en particulier la protection de la Mère de Dieu , du saint dont vous portez le nom et de votre ange gardien ; mais que toutes vos prières, selon la doctrine et la pratique constantes de l'Église catholique , s'appuient sur la passion et la mort du Christ qui rend les prières des fidèles sur la terre et celles des saints dans le ciel , dignes de monter jusqu'au trône de Dieu.

HISTOIRES

Nécessité de la prière. — « La prière est la porte par laquelle le Seigneur nous fait passer ses grâces. Si cette porte reste fermée, qu'allons-nous devenir ? Hélas ! j'en ai fait l'expérience : j'eus le malheur d'abandonner la prière ; ... si je n'eusse repris cet exercice, j'étais perdue. » (Ste. Thérèse, Sa Vie.)

Venait-on consulter l'abbé Pambon, il disait : « Donnez-moi du temps pour y penser; » et aussitôt il se mettait en prière. Si le Ciel l'éclairait , il faisait part de ses lumières ; sinon , il ne donnait aucune réponse. — Saint Ignace, l'illustre fondateur de la Compagnie de Jésus, ne terminait jamais une affaire de quelque importance avant d'avoir consulté Dieu dans la prière. — L'un et l'autre reconnaissaient donc le besoin que nous avons de la prière pour obtenir de Dieu les lumières et les secours nécessaires à notre ignorance et à notre faiblesse.

Puissance de la prière. — Avec des poignées d'hommes , Jean de Castro défit cent fois les innombrables ennemis du nom chrétien, et mérita de mourir entre les bras de saint François Xavier. A quoi dut-il ces faveurs? A sa ferveur dans la prière. Durant ses expéditions , rencontrait-il une croix plantée par les missionnaires, il tombait à genoux et adorait Jésus-Christ, bien qu'il fût souvent entouré de nobles et d'une cour nombreuse. ( Mafféo , Histoire des Indes. ) .

La puissance de la prière ! Elle est inscrite partout en caractères ineffaçables : Abraham prie , et, s'il y eût eu dix justes, les villes infâmes étaient sauvées ; Moïse prie au milieu des morts et des mourants, et le bras de Dieu est enchaîné, et le fléau de la vengeance divine cesse ; il prie encore , les bras étendus sur la montagne, et les enfants d'Amalec sont vaincus. Anne prie, et Samuel lui est accordé; David prie, et ses péchés lui sont remis; Salomon prie, et la sagesse lui est donnée ; Ezéchias prie, et ses jours sont prolongés ; Judith prie, et la tête d'Holopherne roule à ses pieds ; Esther prie , et le courroux d'Assuérus est apaisé ; Daniel prie , et la gueule des lions est fermée ; les Machabées prient , et d'innombrables victoires sont remportées; la Chananéenne prie, et sa fille est guérie ; le publicain prie; et il est justifié ; les sœurs de Lazare prient , et Lazare est ressuscité ; les apôtres et Marie prient , et le monde est converti. Qui a donné aux martyrs ce mépris héroïque des tortures et de la mort ? la prière. Qui a inspiré aux confesseurs cette inébranlable intrépidité qui leur fit confesser Jésus-Christ devant le monde et les juges ? la prière. Qui a fait triompher les vierges de la chair, du démon et du monde? la prière. Qui, dans Antoine, dans Marie d'Égypte et bien d'autres, a confondu les tentations de l'enfer? la prière. Qui a converti les Augustin, les Thérèse, les Romuald, etc.? la prière. Qui a procuré aux Thomas, aux Bonaventure leur science et leur onction? la prière. Qui, enfin, a revêtu le thaumaturge de la puissance des miracles , et enfanté tant de prodiges dans le christianisme? la prière encore, la prière toujours. Rien de grand , rien de puissant , rien de salutaire dans l'ordre du salut sans la prière. (la Bible, la Vie des Saints.)

Qualités de la prière. — Avant tout il faut avoir du goût pour ce saint exercice. Une femme célèbre de nos jours , se trouvant dans une société composée de philosophes qui fatiguaient son esprit par leurs argumentations à perte de vue , et leurs hypothèses chimériques , s'écria , vaincue d'ennui : Ma foi , Messieurs , j'aime mieux l'Oraison dominicale que tout cela. (Bellart, Biographie des croyants célèbres.)

Il faut se recueillir et prier avec attention. — Avant la prière saint Bernard disait : Éloignez-vous , pensées étrangères, je vais prier; il faut que je sois avec Dieu comme s'il n'y avait au monde que lui et moi. — Entrez dans le cabinet de votre cœur, et chassez-en toutes choses, à la réserve de votre Créateur, disait saint Augustin.

Saint Dominique priait dans une église : une pierre se détache de la voûte, et lui frise l'oreille en tombant, sans troubler en rien son profond recueillement. Saint Bernard, étant en voyage, rencontra un homme moins attentif à sa prière. « Aimez-vous bien le bon Dieu? lui dit le saint abbé. — Oh ! je m'en flatte, je l'aime de tout mon cœur. — Le priez-vous bien ? — Jamais je n'ai de distraction. — Eh bien ! mon ami , Si vous récitez le Pater sans distraction, je vous donne le cheval sur lequel je suis monté. » Aussitôt notre homme de réciter son Pater, sûr que le cheval était à lui. Mais à peine fut-il au milieu qu'il se prit à dire : « Mais me donnerez- vous aussi la bride ? — Ni l'un ni l'autre , puisque vous voilà distrait. » Le bon homme ouvrit les yeux. Saint Bernard par un ingénieux expédient venait de l'éclairer. Jusqu'alors il n'avait pas su ce que c'est que la distraction dans la prière. ( Vie de saint Bernard. )

Mais que serait l'attention de l'esprit sans la ferveur du cœur? Aussi les saints, en dépit de la pesanteur de la chair, de l'agitation du monde, de la malice du démon, n'ont-ils rien épargné pour rallumer, pour entretenir ce feu sacré dans leurs cœurs. Sainte Catherine de Sienne, voyant son oratoire renversé par la mauvaise humeur de sa mère , s'en éleva un nouveau dans le sanctuaire de son cœur; et là, se représentant son divin Époux comme assis sur son trône , elle s'élançait presque sans relâche vers lui par de brûlants soupirs , malgré les embarras du ménage dont on l'avait chargée. ( Vie de sainte Catherine de Sienne. )

Ce feu sacré, saint Dominique prenait à tâche de l'attiser en variant son attitude : tantôt il se tenait à genoux, tantôt il était prosterné à terre, tantôt il avait les mains jointes, un instant après il les étendait en forme de croix , ou il les élevait au ciel. Aussi ne demandait-il aucune grâce particulière sans l'obtenir. ( Sa Vie, passim. )

Le publicain nous offre le modèle d'une prière humble. Tandis que le pharisien se dressait avec orgueil au milieu du temple, lui , se tenant au loin, n'osait lever les yeux vers le ciel, et se frappait la poitrine en disant : Mon Dieu, ayez pitié de' moi, je suis un pécheur ! Il s'en retourna justifié, tandis que le superbe pharisien ne
devint que plus coupable. (Luc, 18, 10.)

Rien ne nous fait mieux comprendre la persévérance de la prière que le bel exemple d'Abraham suppliant pour les villes coupables (Genèse, 18), de Moïse fléchissant à diverses reprises la colère du Seigneur (Exode, 17; 22...), de la Chananéenne forçant enfin Jésus -Christ de s'écrier : 0 femme, votre foi est grande! qu'il vous soit fait selon vos désirs. (Matthieu 15, 22) ,- ou que ces belles paraboles d'une veuve obligeant le juge inique à lui rendre justice (Luc, 18), d'un ami contraignant un autre ami à se relever pour lui rendre service (Luc, 11, 1 ). Qui ne sait le triomphe des prières persévérantes de sainte Monique ? A force d'importuner la bonté suprême au sujet de la conversion de son fils , la bonté suprême s'est enfin rendue à la voix, ou plutôt aux gémissements de son cœur. ( S. Augustin , Confession liv. III , chap. xi. )

Où et quand prier? — Puisque Dieu est au ciel, sur la terre, en tout lieu , on peut le prier partout. Jérémie l'a prié dans la fange d'un affreux cachot, les trois enfants dans la fournaise, Daniel dans fosse aux lions, Jonas dans le sein de la baleine, Job sur le fumier, Ezéchias dans son lit , le bon larron sur la croix , saint Paul en prison , sainte Agnès au milieu des flammes , les vierges dans des lieux infâmes, etc. Susanne prie dans son angoisse, Isaac médite à la campagne, David se relève à minuit pour louer Dieu. Saint Ignace entendait- il sonner l'horloge, il se recueillait et priait ; même au milieu des champs, ou dans la compagnie de personnes de la première qualité, saint Vincent de Paul se découvrait en signe de religion, et faisait une pieuse aspiration. A table, en étudiant, au sortir de sa chambre, à sa rentrée chez lui, saint Thomas faisait des oraisons jaculatoires.  Saint Dominique s'occupait à méditer, à chanter des hymnes en voyage ; sa première visite en arrivant quelque part était celle du saint Sacrement ; pendant son séjour dans les couvents , il passait ordinairement la nuit sur le marchepied de l'autel. Saint Philippe de Néri ne connaissait d'autres récréations que de visiter les églises et les hôpitaux. On peut donc prier partout. (La Bible, Godescard, etc.)

Oui il faut prier partout. — Laudon , feld-maréchal des armées autrichiennes , un des plus grands capitaines du dix-huitième siècle , qui accomplissait avec tant d'exactitude les devoirs du catholicisme par lui embrassé , après avoir quitté le protestantisme , ne craignit pas d'établir la prière du matin et du soir au camp de Dubitza. — Charles XII , cet Alexandre du Nord , faisait réciter dans son camp la prière deux fois le jour, à sept heures du matin et à quatre heures du soir. Il ne manqua jamais d'y assister et de donner à ses soldats l'exemple de la piété.

II faut prier toujours. — Sainte Jeanne de Chantal insistait souvent devant ses filles sur la nécessité de la prière- continuelle. Elle mit par écrit une prière dont elle se servait dans le temps de sécheresse intérieure. Nuit et jour elle portait à son cou le papier où était cette prière, et elle le pressait souvent sur son cœur, comme pour exprimer son intention de répéter sans cesse les différents actes qu'il contenait. ( Sa Vie. )

Il faut prier surtout à la mort. — Instruit de sa fin prochaine, le grand Condé garda d'abord le silence ; puis il dit : 0 mon Dieu, vous le voulez , que votre volonté soit faite , je me jette entre vos bras : donnez-moi la grâce de bien mourir. Il reçut les consolations et accomplit les devoirs de la religion avec une piété ravissante. Avec quelle foi priait-il sans cesse le Sauveur des âmes, en baisant la croix, que son sang répandu pour lui ne le fût pas inutilement ! Il fit répéter trois fois les prières des agonisants, et remercia les un vrai chrétien ! médecins , en disant à la vue des prêtres : Voilà maintenant mes vrais médecins. -Aussi écouta-t-il leurs avis, continua-t-il leurs prières, les psaumes toujours à la bouche, la confiance toujours dans le cœur. (Bossuet, Oraison funèbre.)


DE L'ORAISON DOMINICALE.

D. Quelle est la prière la plus excellente?

R. C'est l'oraison dominicale. —

D. Par qui a-t-elle été composée ?

R. Par le Christ, Notre - Seigneur. ( Luc, 11 ; 1 . Matthieu 6, 9.)

D. Pourquoi l'a-t-il faite si courte et si facile? —

R. Afin que les hommes, même les moins instruits, fussent capables de la dire.

D. Que renferme cette prière?

R. Les principales choses que nous pouvons demander à Dieu et attendre de lui.

Instruction. L'oraison dominicale, ( Le Notre-Père) ainsi appelée à cause de Jésus-Christ, son auteur, est la plus excellente de toutes les prières; car, composée par Dieu lui-même, elle ne peut rien contenir qui ne lui soit agréable. Les anciens patriarches et les prophètes ont enseigné la prière à leurs enfants, et saint Jean - Baptiste l'a fait à l'égard de ses disciples; (Luc, 11, 1.) mais ici c'est le Christ lui-même qui nous l'enseigne. L'oraison dominicale est d'un sens si étendu, qu'elle renferme tout ce que nous pouvons désirer pour le bien du corps et celui de l'âme; elle est si succincte et si instructive, que sa récitation nous rappelle ce que nous devons croire, espérer, aimer, éviter ou pratiquer. En un mot, toutes les autres prières tirent leur valeur de leur ressemblance avec elle, et aucune ne saurait être bonne , si elle n'est fondée sur elle. Quoi de plus admirable que la divine méthode qu'elle nous enseigne à suivre en priant : on y voit 1° que tout honneur et toute gloire doivent être rendus à Dieu, qui a créé l'homme et l'univers entier; 2° que de lui viennent toutes les choses nécessaires et au corps et à l'âme; 3° quels sont les moyens par lesquels nous pouvons les obtenir; 4° enfin que nous pouvons être délivrés de toutes les misères auxquelles nous sommes sujets par le péché d'Adam.

Le principal objet de nos désirs et la première chose que nous devons demander dans nos prières, c'est notre dernière fin ou le bonheur; la seconde, ce sont les moyens qui nous conduisent à cette fin; la troisième l'éloignement de tout ce qui pourrait nous empêcher d'y parvenir. Maintenant, notre dernière fin, c'est Dieu, et conséquemment par la première demande, nous souhaitons que son nom soit glorifié uniquement pour son amour. Par la seconde, nous demandons d'entrer en partage de sa gloire et de son royaume. Par la troisième nous implorons la grâce de faire sa volonté, qui est le moyen direct de mériter le ciel. Par la quatrième, nous demandons la participation aux sacrements, spécialement à la sainte Eucharistie, d'où la grâce découle. Par la cinquième, nous prions Dieu de nous délivrer du péché qui nous exclut positivement du royaume des cieux. Par la sixième, nous sollicitons la force nécessaire pour résister à toutes les tentations du péché; et par la septième, nous demandons la délivrance de tous les maux, de toutes les misères qui sont le péché ou la peine du péché, et qui nous éloignent de la possession du bonheur éternel.

« L'oraison dominicale, dit saint Augustin , contient sept demandes. Nous demandons par la première, la gloire de Dieu; par la seconde, notre propre gloire; par la troisième, la grâce qui est la vie de l'âme ; par la quatrième, la nourriture, la vie du corps; par la cinquième, la délivrance du péché, lorsque par la fragilité humaine nous avons eu le malheur de perdre la grâce ; par la sixième, la délivrance de tout ce qui peut nous conduire au péché; par la septième, la délivrance du mal du péché et du mal de la peine qui est dû au pécheur.

Exhortation. Que chacun reconnaisse donc la valeur et perfection de cette prière et la préférence qu'on doit lui accorder sur toute autre formule. Elle est d'un usage général
dans l'Église, et assurément vous ne devez pas souffrir qu'un jour se passe sans adresser à Dieu vos supplications dans les termes mêmes de cette divine prière, afin d'obtenir les secours spirituels et corporels dont vous avez le plus besoin, et le pardon des péchés que vous commettez chaque jour. Répétez cette prière avec une attention, une dévotion, une ferveur en harmonie avec les choses que vous y demandez. Glorifiez Dieu, réclamez sa faveur en tout temps, mais sur tout le matin et le soir, selon la méthode toute divine qui nous est enseignée dans cette prière.

HISTOIRES.

Qui a enseigné le Notre Père ? — Un industriel à bel habit, à beau langage, à belles manières, l'un de ces hommes que l'on croit quelque chose parce qu'ils sont riches et affichent une certaine importance , entendant un jour parler du Pater , demanda avec une effrayante naïveté qui avait composé cette prière? Les voyageurs qui se trouvaient en diligence avec ce personnage, le regardèrent avec une profonde stupéfaction. Les uns rougissaient, les autres souriaient de pitié. (Un des traducteurs.) —

Qui a enseigné cette prière? Lisez-la avec attention, et vous saurez bientôt que ce ne peut être que l'œuvre d'un Dieu. Le Notre Père est le résumé de toutes les autres prières (Tertullien ); il n'est aucune prière qui ne soit contenue dans l'Oraison Dominicale (Augustin) ; c'est une prière profonde, mystérieuse, incompréhensible (Denis le Chartreux. ) ; quelle prière plus agréable au Père que la prière sortie de la bouche de son Fils ? ( Chrysostome. ) —

Saint Hugues, évêque de Grenoble, répétait plusieurs fois le jour l'Oraison Dominicale. Étant tombé malade, il ne fit autre chose, pendant toute une nuit, que de la réciter. « Cela vous fatigue ! lui dit le domestique qui le gardait. — Non, repartit le saint évêque, la récitation d'une si belle prière me fait un très-grand bien. »

Vous devez bien vous ennuyer d'être toujours seul par les champs, disait-on à un jeune berger. — Mon Pater ( Notre-Père) suffit à charmer mes ennuis et à abréger les journées, répondit-il. Il y trouvait une source intarissable de pieux sentiments et d'ineffables consolations. Aussi le savourait-il avec tant de soin qu'il lui fallait quelquefois une semaine pour le dire en entier.

Un enfant avait perdu son père et sa mère : pauvre petit orphelin, il versait sur leurs tombes un torrent de larmes , lorsque tout-à-coup ses yeux s'arrêtent sur une croix où était peint un ange : d'une main il indiquait le Ciel, de l'autre il tenait écrite celle belle prière : « Notre Père qui êtes aux cieux ! » A l'instant un rayon céleste brilla sur son front , et le baume de la consolation descendit dans son cœur. Une prière qui a tant de charme , de pro fondeur, et de vertu, est une prière évidemment divine ! ! !
( Cossart, Belet, etc. )

Pourquoi est-il si court ? — Parce que, selon la pensée des pères et des saints, la bonne prière ne consiste pas dans un flux de paroles, mais dans quelques élans de l'âme, qui, comme autant de traits perçants, pénètrent le cœur de Dieu. Une seule demande du Pater, faite du fond du cœur, valait mieux, aux yeux de sainte Thérèse, que la récitation d'une foule d'autres formules récitées précipitamment, etc.

Que renferme-t-il ? — Comme déjà nous l'avons vu , il renferme beaucoup de choses , il renferme tout. Saint Ignace recommande beaucoup l' Oraison dominicale , et indique la manière de la réciter avec fruit : « Assis ou à genoux , selon vos dispositions corporelles et spirituelles, fermez les yeux ou fixez-les sur un objet; et dans cette situation, pesez attentivement chaque mot de cette excellente prière , attachez-vous y , tant que vous trouverez de quoi vous occuper, que vous y aurez du goût et que votre cœur sera touché.» — Il n'y avait pas de prière dans laquelle se complût davantage saint François d'Assise : il en méditait, il en savourait tous les mots. Il en composa une paraphrase, afin que les religieux de son ordre la récitassent avec plus d'utilité. ( Voyez leurs Vies.)

Nous aussi, méditons, approfondissons, savourons cette admirable prière, ce trésor sorti du cœur de Dieu, et nous y trouverons un torrent de lumières et de consolations.


PRÉFACE DE L'ORAISON DOMINICALE.

Notre Père... qui êtes aux cieux.

D. Que signifient ces paroles : Notre Père?

R. Elles signifient que Dieu est notre Père, et que nous pouvons, avec une pieuse confiance, implorer ses faveurs et pour nous et pour les autres.

D. Que signifie : Qui êtes aux cieux?

R. Que Dieu étant au ciel, c'est là que nous devons élever nos cœurs, toutes les fois que nous prions.

Instruction. Dieu est notre Père, et nous sommes ses enfants : 1° Parce qu'il nous a créés non point comme les autres créatures, mais à son image et ressemblance ; 2° parce qu'il pourvoit à nos besoins, nous donne notre pain de chaque jour, et tout ce que nous possédons; 3° parce que c'est de lui que nous tenons notre droit à l'héritage du royaume des cieux.

Devenus, par le péché originel, esclaves du démon ( des anges déchus)  , nous avons été régénérés au baptême , principe de notre seconde naissance, adoptés comme enfants de Dieu et établis héritiers de son royaume. Voyez quelle charité le Père nous a témoignée , de vouloir que nous soyons appelés et que nous soyons en effet enfants de Dieu ! ( 1 Jean, 3, 1. ) Dieu est notre Père par création et par adoption.

Qui êtes dans les cieux. Par son immensité Dieu est partout ; mais le ciel étant le lieu où il se manifeste dans sa gloire, et où nous devons être plus tard éternellement heureux, notre Sauveur veut qu'à toutes nos prières nous élevions là-haut nos esprits et nos cœurs, et nous nous rappelions que le ciel est le principal objet de nos vœux.

Exhortation. Est-il un plus puissant motif, ô chrétien ! pour nous exciter à bénir, à glorifier l'adorable nom de Dieu ? Il est notre Père céleste, plein de compassion pour nos misères, et toujours prêt, par sa toute-puissance, à nous assister dans nos nécessités. Il est notre Père, nous sommes ses enfants et ses héritiers : Le ciel est donc notre partage.
Élevons-nous donc vers le ciel par les aspirations de la prière et les effets de la vertu.

HISTOIRES.

Notre Père! — Le père de saint François d'Assise ne pouvant empêcher son fils de se consacrer à Dieu , l'accabla d'outrages, et ne se calma que quand il lui eut promis de faire en présence de l'évêque la renonciation à tous ses biens. François fit cet acte selon les formalités prescrites, puis, se dépouillant de ses habits, il dit à l'auteur de ses jours : « Jusqu'alors je vous ai appelé mon père : maintenant je pourrai dire avec raison : Notre Père qui êtes aux cieux! » A ces mots, à ce spectacle, l'évêque fut attendri jusqu'aux
larmes. A l'exemple de S. François, reconnaissons Dieu comme notre véritable Père, notre trésor, notre espérance. ( Vie de saint François d'Assise. )

La grande pécheresse Thaïs, renfermée dans une cellule pénitentiaire, demanda à saint Paphnuce, qui l'avait convertie : « Quelle prière dois-je dire ! — Vos lèvres impures ne sont point dignes de prononcer le nom de Dieu ; bornez-vous à répéter ces paroles : 0 vous qui m'avez créée, ayez pitié de moi ! Pendant très-longtemps , elle continua cette prière avec larmes , n'osant appeler Dieu son Père, parce qu'elle avait perdu par ses crimes la qualité d'enfant de Dieu. Hélas! combien aujourd'hui devraient rougir en prononçant un nom si doux et si saint ! ( Vie des Saints. )

Qui êtes aux cieux! — Injustement chassé de son Église et de son pays par l'impératrice Eudoxie , saint Jean Chrysostome disait : « Partout où je vais , je vois le ciel au-dessus de moi ; c'est là qu'habite mon Père; c'est de là qu'il me prodigue, encore aujourd'hui, ses soins paternels. En tous lieux , je prie mon Père qui êtes aux cieux. » ( Vie et lettres de saint Chrysostome. )


PREMIERE DEMANDE.

Que votre nom soit sanctifié.

D. Que demandez-vous par ces paroles?

R. Je demande que Dieu soit connu , loué, servi , honoré par tous les hommes.

Instruction. Par cette demande nous souhaitons que toute gloire soit rendue à Dieu, que les chrétiens, que tous les autres hommes, parviennent à le connaître, à l'aimer, à le
servir, et à lui payer si bien le tribut de l'hommage qui lui est dû, qu'il ne soit pas seulement adoré lui-même, mais encore son propre nom.

Exhortation. Quel monstre d'ingratitude ô chrétien ! n'est donc pas celui qui, par des imprécations et des blasphèmes, profane le nom sacré du Dieu auquel il doit son existence, sa vie, son bonheur ! Si vous vous êtes rendu coupable de cette affreuse profanation , de cet exécrable crime du blasphème, vite repentez-vous-en, vite prenez la résolution et de vous amender vous-même sur ce point , et d'en corriger les autres. Ah ! joignez-vous plutôt aux chœurs des anges, à l'assemblée des saints pour proclamer la gloire de Dieu, et chanter ses louanges.

HISTOIRES.

Que votre nom soit sanctifié ! — « Tout à la plus grande gloire de Dieu, » telle était la devise de saint Ignace. Aussi fonda-t-il l'immortelle Compagnie de Jésus dans le but de propager par elle la connaissance et le culte du vrai Dieu. Un trait suffira pour montrer pleinement que la glorification du nom de Dieu était la sublime passion d'Ignace : « Si l'on vous donnait à choisir, disait-il un jour au père Laynez, d'aller au ciel, ou de rester encore sur la terre pour y faire une œuvre signalée à la gloire de Dieu, quel parti prendriez-vous? — J'aimerais mieux aller au ciel et assurer ainsi mon salut. — Et moi, non ! je préférerais contribuer à la gloire et au service de Dieu , sûr qu'en retour de mon dévouement, il ne manquerait pas d'assurer mon salut. » (Sa vie, Boixand. )

Le digne émule de saint Ignace, saint François-Xavier, ne pensait pas autrement. Ayant trouvé , à son arrivée au Japon, des négociants français, espagnols , etc., qui, pour faire fortune, n'avaient pas craint de traverser les mers, il s'écria : « Quoi ! se peut-il qu'on ait plus de zèle pour faire fortune, pour ramasser des biens périssables que pour gagner des âmes à Dieu , que pour travailler à faire connaître et à faire glorifier son saint nom ! Cette réflexion le plongeait dans une affliction profonde. ( Vie de saint François-Xavier. )

On conseillait au saint Pontife Pie V de modérer son zèle dans le soin des affaires, il répondit : «Qui plus que moi — je suis pape ! — doit s'intéresser à ce que le nom de Dieu soit sanctifié ? Ce n'est point dans mon intérêt personnel que la Providence m'a élevé sur le siège de Pierre; c'est pour que je fasse connaître et glorifier de plus en plus le saint nom de Dieu.  (Lohner, Biblioth., m, 510. )

Glorifier le nom de Dieu , c'est l'office des anges qui répètent sans cesse : Saint, saint, saint est le Dieu des armées ! C`est l'office des saints qui chantent à haute voix : « Gloire à notre Dieu qui est assis sur le trône , et à l'Agneau qui nous a sauvé ! » ( Apocalypse 7, 9.) C'est répéter, par nos louanges ou par nos œuvres, ces accents des Enfants de la fournaise : «Béni soyez-vous, Seigneur, Dieu de nos pères ; vous êtes digne de louanges , plein de gloire, exalté par-dessus tout à jamais ; béni soit le saint nom de votre gloire ; il est digne de louanges , il est exalté par-dessus tout à jamais. ( Daniel, 3, 52. )


DEUXIEME DEMANDE.

Que votre règne arrive.

D. Que demandons-nous par ces paroles?

R. Nous de mandons à Dieu de partager la félicité de son royaume, quand nous serons au terme des misères de cette vie. ..

Instruction. La première demande avait pour objet la glorification et l'honneur de Dieu ; par la seconde, nous demandons notre propre félicité dans sa plénitude. Elle consiste dans la jouissance de Dieu et de son royaume.

Exhortation. En obtenant le ciel , nous obtenons toute chose; nous parvenons à la fin sublime pour laquelle nous sommes créés. C'est ce que nous devons avoir principalement en vue dans nos prières, surtout lorsque nous considérons les peines de cette vie, journellement remplie de tant de maux et de misères ; vie d'exil dans un monde mauvais, où il faut lutter contre les tentations du démon et la violence de nos propres inclinations dépravées. Ah ! qui peut sérieusement y réfléchir, et ne pas demander fréquemment à être délivré d'un tel poids de misère ? Homme infortuné que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort? (Romains 7, 24.) Qui me délivrera des misères d'une vie que l'on appellerait plus justement une mort , en sorte que le règne du mal soit terminé, que celui de Dieu s'établisse sans obstacle et que nous partagions les joies de son royaume ?

HISTOIRES.

Que votre règne arrive.—Un solitaire, nommé Léon , soupirait sans cesse après le bonheur du ciel , et pour témoigner son désir de l'obtenir, il répétait souvent : Je régnerai un jour. Les personnes qui l'entendaient, n'étant point initiées au sens de ces paroles, lui faisaient observer que jusqu'alors personne de sa province n'avait porté la couronne ; mais il n'en répétait pas moins : Je régnerai un jour, voulant leur apprendre par là qu'il vivait dans l'attente de la gloire éternelle. Aussi, véritable enfant du royaume, il n'avait de goût que pour les choses d'en haut, et vivait déjà dans le ciel, tant par l'innocence de sa vie que par son ardent désir de régner avec Jésus-Christ, aux siècles des siècles. ( Pré spirituel, prologue. )

Six mois avant son trépas, saint Nicolas de Tolentino entendait chaque nuit les concerts des anges, et , sachant que sa fin approchait, il était transporté de la plus vive allégresse au point d`oublier les souffrances de sa dernière maladie. Il disait avec l'Apôtre : Je désire d'être affranchi de ce corps et d'être avec Jésus-Christ. Ses religieux voyant se refléter sur son front l'ivresse des consolations qui inondaient son âme , ne purent s'empêcher de lui dire : « Qu'est-ce donc , mon père , qui vous oblige d'être si joyeux ? » Il répondit : « Mon Seigneur Jésus , accompagné de sa glorieuse mère et de notre père saint Augustin, me convie par ces paroles : Courage, bon et fidèle serviteur, entrez dans la joie de votre Seigneur.» Le saint prononça cette prière : Seigneur , je remets mon âme entre vos mains , et son âme s'envola au royaume des cieux. ( Surius, Vie de saint Nicolas de Tolentino. )

Le jeune Colomban, neveu et disciple de l'abbé de ce nom, étant tombé malade, désirait vivement mourir. Un ange, environné d'une éclatante lumière, lui apparut et lui dit : « Les prières, les larmes, les gémissements de votre abbé vous empêchent de mourir et d'aller au ciel. » Une âme terrestre en eût été ravie de joie. Il en fut autrement du jeune et pieux religieux : « Pourquoi , dit-il au saint abbé, me retenez-vous dans cette vallée de larmes, et m'empêchez-vous d'aller au ciel? » Saint Colomban cessa, par ses prières, de s'opposer au bonheur de son neveu. Alors le saint jeune homme reçut les sacrements , embrassa ses frères , et s'endormit dans le Seigneur. Il prenait possession du royaume de son Père! ( Chronique de l'Ordre de saint Augustin. )

A quoi ont travaillé les saints ? à procurer par leurs prédications, leurs prières , leurs œuvres et leurs souffrances le règne de Dieu dans les âmes par la grâce, et le règne des âmes avec Dieu par la gloire : témoins les François-Xavier, les Vincent-Ferrier, les Vincent de Paul, les François de Sales, et tous les missionnaires zélés qui renoncent à leur patrie, etc., pour aller établir par la foi le royaume de Jésus-Christ parmi les idolâtres. Nous aussi travaillons à la même œuvre, selon la mesure de nos forces , et pour nous et les autres. N'oublions pas en particulier l'œuvre de la Propagation de la foi, et celle de la Sainte Enfance, qui nous associent à l'établissement et au développement du règne de Jésus-Christ en ce monde.


IIIe DEMANDE.

Que votre Volonté soit faite sur la terre comme au ciel.

D. Que demandez - vous par ces paroles?

R. Nous demandons que Dieu par sa grâce nous rende capables de faire
sa volonté en toutes choses.

D. Quelle est sa volonté?

R. Il veut être aimé de nous, craint, servi et obéi.

D. Que signifient ces mots : sur la terre comme au ciel ?

R. Ils signifient que nous voudrions être aussi prompts et aussi disposés à faire la volonté de Dieu sur la terre que les saints et les anges le sont dans le ciel.

Instruction. Puisque le règne de Dieu ne peut arriver, si nous ne le méritons par l'accomplissement de sa volonté, nous demandons conséquemment en premier lieu la grâce d'obéir à tous ses commandements et d'être aussi empressés et dévoués à son service que les saints et les anges. Considérez votre volonté perverse , toujours en opposition avec la volonté de Dieu , et vous sentirez la nécessité de lui adresser chaque jour cette demande : Que votre volonté soit faite. La source de notre volonté dépravée , c'est la concupiscence, qui est constamment opposée à la volonté de Dieu. Nous avons donc raison de demander la grâce nécessaire pour vaincre ce mal afin que notre volonté puisse se rendre conforme à la volonté et à la loi de Dieu.

Exhortation. Renoncez, ô chrétien, à votre volonté propre, en tant, du moins, qu'elle contredit la loi divine. Il n'est rien de plus offensant pour Dieu que notre volonté propre; ne souffrez donc pas qu'elle exerce plus longtemps sur vous sa tyrannie; affranchissez-vous-en pour toujours, et priez Dieu de vous aider par sa grâce à rendre votre volonté
soumise à la sienne en toute occasion : Celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement. ( 1. Jean, 2, 17. )

HISTOIRES.

Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel. — Détacher notre volonté des créatures, l'attacher uniquement au Créateur, de manière qu'elle ne respire que le seul et pur vouloir de Dieu ; c'est la fin, c'est le comble des vertus, disait sainte Thérèse. Elle ne comprenait pas comment une créature, qui n'est qu'un vil néant devant Dieu, peut ne pas aimer l'aimable et sainte volonté de Dieu. Sainte Madeleine de Pazzi prononçait souvent ces paroles : Volonté de Dieu ! Volonté de Dieu ! et alors elle éprouvait une
satisfaction inexprimable.  Elle répétait souvent , tout hors d'elle-même : Oh ! que la volonté de Dieu est aimable ! qu'elle est aimable ! ( Vies de sainte Thérèse et de sainte Madeleine. )

Comment faut-il prier? demandait-on un jour à saint Macaire. — Étendez les mains vers le ciel et dites : « Seigneur, que votre volonté soit faite, que votre bon plaisir s'accomplisse. » C'est la leçon renouvelée du Sauveur. (Ruffin, Vie des Pères, liv. m. )

Un religieux qu'on ne voyait ni jeûner, ni prier, ni veiller comme les autres, opérait une foule de miracles. Tout le monde en était surpris. Le supérieur, en particulier, voulut en avoir raison : « Toute ma vie, répondit l'humble religieux, je n'ai eu qu'un but : Faire la sainte volonté de Dieu, vouloir ce que Dieu veut. Étais-je malade, je disais : Mon Dieu ! que votre volonté soit faite! Étais-je obligé d'accomplir un ordre pénible de mes supérieurs , je répétais vite la troisième demande du Pater : Fiat voluntas tua ! Faire la volonté de ses supérieurs , c'est en effet accomplir la volonté de Dieu. De là cette parole d'une pénitente célèbre : «J'ai fait constamment un si mauvais usage de ma volonté, que je viens la remettre entre les mains d'un guide, pour ne plus en reprendre l'usage : tel est le but de l'obéissance religieuse. Faire la volonté de Dieu, en accomplissant ses commandements, ou ceux des personnes qui nous gouvernent sous lui, est notre premier devoir ; nous soumettre aux épreuves de sa Providence en est en second.

A la première nouvelle de la mort de la reine Blanche, sa mère, saint Louis versa un torrent de larmes. Revenu à lui-même, il se prosterna devant le souverain arbitre de la vie et de la mort, en disant : « Seigneur, je vous rends grâces de m'avoir conservé jusqu'ici une mère si digne de mon affection. Ce présent de votre miséricorde, que j'aimais si tendrement, vous le reprenez comme votre bien puisqu'il vous plaît de me l'ôter, que votre saint nom soit béni dans tous les siècles. » Touchante tendresse ! résignation sublime ! ( Velly , t. V. )

Sainte Élisabeth de Hongrie, ayant appris la mort de son époux, tué sur le champ de bataille , adressa cette prière au Seigneur : « Vous le savez , mon Dieu , j'eus préféré mon époux à toutes les délices de ce monde ; mais il vous a plu de me l'ôter ; je me soumets de tout mon cœur à votre volonté sainte. Pourrais-je le rappeler à la vie en donnant seulement un cheveu de ma tête, je ne le voudrais pas, si cela est contraire à votre volonté. » ( Histoire de sainte Élisabeth de Hongrie. )

Faire en toutes choses la volonté de Dieu , c'est imiter Jésus-Christ qui a dit : Que votre volonté soit faite et non pas la mienne ; c'est imiter Marie qui a dit : Voici la servante du Seigneur, qu'il me soit fait selon votre parole ; c'est imiter les saints qui ne se sont élevés à la perfection qu'en se conformant à la volonté de Dieu; c'est enfin mettre en pratique le grand secret de la sainteté et du bonheur. « Bon jour, disait un savant à un berger. — Tous mes jours sont bons , répliqua-t-il. — Et comment cela ? — Parce
que je ne veux que ce que le bon Dieu veut. » (Taulère. )

IVe DEMANDE.

Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour.

D. Que demandons-nous par ces paroles?

R. Nous demandons la nourriture et les choses nécessaires à la vie du corps et de l'âme.

Instruction. Dans cette quatrième demande nous reconnaissons que Dieu est le dispensateur de tous les biens soit temporels soit spirituels , et par là, nous le proclamons le Seigneur de toutes choses et notre souverain bienfaiteur. Nous le prions ainsi de nous accorder tout ce qui est nécessaire à la vie : la nourriture, le vêtement, le couvert; car pain dans les saintes Écritures prend souvent ces significations diverses. ( Genèse, 3, 19; 18, 5; Psaume, 13, 4; Isaïe, 2, 7; Proverbes 10, 5.) Quant aux richesses, à l'abondance, au superflu, nous ne les demandons pas : car Dieu n'a rien promis de semblable à ses serviteurs; il les a plutôt prévenus contre les richesses qui sont rarement un bienfait de sa main, et arrivent souvent par de mauvais moyens.

La nourriture de chaque jour, le nécessaire à la vie , voilà ce que nous demandons et ce dont il faut nous contenter : notre prière ne va pas au-delà de ce qu'exigent la gloire de
Dieu et notre propre salut. Nous demandons de pouvoir gagner honnêtement notre pain de chaque jour; car si nous l'obtenons autrement, il n'est pas le nôtre et Dieu ne nous le donne pas. En un mot nous demandons notre pain de chaque jour, pour montrer que tous, riches et pauvres, dépendent, même pour la nourriture quotidienne, de la divine providence. Le pain quotidien, suivant les interprétations de l'Oraison dominicale par les saints Pères, signifie aussi la parole de Dieu qui est la nourriture de l'âme, et la sainte Eucharistie qui est le pain de vie.

Exhortation. Considérez, ô chrétien, l'extrême besoin que vous avez de l'assistance divine, puisque c'est en Dieu que vous avez l'être, le mouvement et la vie. (Actes 17,
28.) C'est à sa bonté que vous êtes redevable de chaque moment de votre existence et de chaque battement de votre cœur. C'est parce que vous ne réfléchissez pas assez à cette vérité , que vous récitez si souvent cette divine prière avec une indifférence et une paresse extrêmes ; car si vous pensiez sérieusement à vos besoins , vous diriez avec la plus grande ferveur :  Donnez - nous aujourd'hui notre pain quotidien ! Méditez fréquemment ces paroles du psalmiste: Vous ouvrez votre main et vous comblez toutes les créa tures vivantes des dons de votre bonté. ( Psaume, 144,16.) «Doux Jésus! ouvrez votre main sur mes besoins et ma misère ; vous qui prodiguez à toute créature les bienfaits de la nourriture et de la subsistance. » Si nous servions Dieu avant tout, et si nous lui recommandions chaque jour nos affaires par une prière fervente, il est probable qu'un si grand nombre n'en viendrait pas à manquer de pain. Mais il faut lui adresser des vœux plus ardents encore pour nos besoins spirituels ; car la dignité de notre âme surpasse infiniment celle de notre corps, comme la gloire l'emporte sur la poussière, l'éternité sur le temps.

Ne demandez pas seulement la grâce , mais encore de coopérer à cette grâce , et de ne pas la recevoir en vain. Ne demandez pas seulement les salutaires enseignements de la parole de Dieu, mais encore de la réduire en pratique. Ne demandez pas seulement le pain de vie, la sainte Eucharistie, mais encore d'y puiser la vie par une digne communion.

HISTOIRES.

Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour..., pour notre corps d'abord. — Une immense multitude s'était attachée aux pas de Jésus. On était dans un désert dépourvu de tout. Jésus prit cinq pains et deux poissons , leva les yeux au ciel , rendit grâces, rompit les pains, et les donna à ses disciples pour les distribuer. La multiplication fut si abondante qu'elle suffit à nourrir cinq mille hommes. Image frappante de la multiplication lente et progressive qui se fait au sein de la terre ! Or , ce sont ces bénédiction du Ciel sur les fruits de la terre que nous appelons, par cette demande : Donnez-nous aujourd'hui et chaque jour notre pain ; profondément persuadés que sans la bénédiction d'en haut , nos efforts seraient impuissants. (Marc, 6, 41. ) Mais comme Dieu veut que nous coopérions par le travail, nous demandons aussi les forces nécessaires pour gagner notre vie. Jésus , notre modèle en toutes choses , n'a multiplié les pains que deux fois parmi la foule, et jamais à l'humble séjour de Nazareth. Il pourvoyait à sa subsistance en travaillant avec saint Joseph. Le grand Apôtre fit de même. (2 Thessaloniciens 3, 7 et 10. ) —

Un ermite vint un jour visiter l'abbé Silvain. Voyant travailler ses moines avec ardeur, il dit : Pourquoi se fatiguer ainsi pour une nourriture périssable? L'abbé, sans rien répondre, assigna une cellule à son visiteur et lui donna un livre. L'heure du repas étant passée, l'ermite ressentit l'aiguillon de la faim. Il vint trouver l'abbé et lui dit : Mon père , les moines ne mangent-ils pas aujourd'hui? — Tous ont mangé. — Comment se fait-il qu'on ne m'ait pas invité ? — Eh quoi! reprit saint Silvain en souriant, ne vivez-vous pas d'une nourriture toute spirituelle , vous qui trouvez le travail superflu? L'ermite se sentit confondu, et demanda pardon à l'abbé. ( Michel Ange Marin, Vie des Pères du désert. )

Demander son pain de chaque jour, c'est, lorsque le travail nous fait défaut , ou nous est impossible , et que d'ailleurs nous manquons des autres ressources, implorer le secours de l'aumône. Voilà pourquoi le pauvre récite cette prière à nos portes ,- voilà pourquoi tout cœur chrétien se hâte d'y répondre. — La tante de saint Bernardin de Sienne congédiait un pauvre sans rien lui donner. Le petit Bernardin , si rempli de compassion pour les malheureux, en fut vivement affligé. « Au nom de Dieu, ma tante, s'écria-t-il, faites-lui l'aumône! Tenez, j'aime mieux me passer de dîner aujourd'hui, que de le voir partir avec la faim.» — Saint Thomas de Villeneuve se privait souvent d'une partie de sa nourriture pour soulager les pauvres-. ( Leurs Vies. )

Demander son pain de chaque jour, c'est recourir à la Providence, directement , et lui demander des secours extraordinaires , lorsque les ordinaires nous font défaut. Daniel, précipité dans la fosse aux lions, ne perdit pas confiance au Seigneur, son Dieu. En retour, le Ciel, non content de fermer la gueule des lions, se chargea de pourvoir à sa nourriture. Habacuc , dans la terre de Judée, avait apprêté un potage qu'il apportait à ses moissonneurs. Porte ce dîner à Babylone , et donne-le à Daniel qui est dans la fosse aux lions, lui dit le Seigneur. Et aussitôt l'ange du Seigneur prit Habacuc par les cheveux, et le transporta avec la rapidité d'un esprit céleste sur le bord dé la fosse aux lions. Puis il s'écria : Daniel, serviteur de Dieu , recevez le dîner que Dieu vous envoie! Daniel reçut le secours du Ciel avec une vive reconnaissance ; en suite l'ange reporta Habacuc au lieu où il l'avait pris. ( Daniel, 14, 31 à 38.)

Donnez-nous notre pain de chaque jour, pour notre âme ensuite. — La nourriture de notre âme, c'est la parole de Dieu. Pour nous faire comprendre que nous devons nourrir notre âme des vérités divines , le Seigneur dit un jour au prophète Ézéchiel : Fils de l'homme, dévore ce livre, et va parler aux enfants d'Israël. Ézéchiel ouvrit la bouche, et se nourrit de ce livre, qui lui parut doux comme le miel. — Ces expressions et cette action figurées renferment pour nous une instruction qu'il nous importe de mettre
en pratique. (Ézéchiel, 3, 1 à 3. )

Notre pain substantiel par excellence, c'est le pain eucharistique. Ce n'est pas Moïse, mais bien Jésus-Christ, qui nous a donné le vrai pain, et ce vrai pain, c'est le corps et le sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il est lui-même et le convive et le festin. (S. Jérôme.) Ah ! désirons ce pain , recevons-le , savourons-le avec le bonheur et le profit qu'en retiraient les saints. Saint Éphrem faisait ses délices de la sainte eucharistie. Sainte Catherine de Gènes éprouvait, aux approches de la communion, des impatiences in exprimables. — Sainte Thérèse avait pour ce pain céleste une faim si vive, des désirs si brûlants, qu'elle eût bravé les foudres et les tempêtes pour aller à lui, pour s'unir au bien-aimé de son cœur. ( Leurs vies, passim.)

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Sam 12 Nov 2016 - 20:00

CINQUIEME DEMANDE.

Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés.

D. Que demandez-vous par ces paroles?

R. Que Dieu nous remette les péchés de notre vie passée et tous les châtiments qui leur sont dus.

D. Quelle est cette condition que vous ajoutez : comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offenses ?

R. C'est à cette condition que Dieu a promis le pardon du péché. Elle signifie que si nous pardonnons aux autres, nous serons pardonnés , et que si nous ne pardonnons pas aux autres, nous ne serons pas pardonnés nous-mêmes.

Instruction. Par cette demande, nous confessons que nous sommes pécheurs; et vraiment si nous disons que nous n'avons pas de péché, nous nous trompons nous-même et la vérité n'est pas en nous. (1 Jean, 1, 8. ) L'Oraison dominicale est un remède général à nous tous pécheurs. Lorsque nous la récitons avec un cœur humble et contrit, nous n'obtenons pas seulement la rémission des péchés véniels, mais encore la grâce nécessaire pour nous préparer à la rémission des péchés mortels par l'application des sacrements.

Par le péché nous devenons les débiteurs de Dieu, ( Nous sommes en dette devant Lui) et nous ne pouvons espérer notre pardon, qu'à la condition de par donner aux autres, même à nos plus grands ennemis ; toute fois nous pouvons légitimement réclamer le payement de ce qui nous est dû, et poursuivre la réparation du dommage qu'on nous a causé. Conséquemment, le commandement de Dieu , aussi bien que notre propre intérêt , nous oblige de pardonner à nos ennemis, puisque si nous agissons de la sorte. Dieu place pour ainsi dire en nos mains sa miséricorde, promettant d'être miséricordieux envers nous en proportion de la miséricorde et de la compassion que nous aurons témoignée aux autres.

Pourrions-nous dès-lors hésiter à pardonner une injure que nous aurions reçue du prochain, quand Dieu est prêt à nous pardonner nos grandes, nos innombrables offenses ? Tant que la charité règne dans nos cœurs , nous nous rendons dignes de sa miséricorde ; mais lorsque la charité est détruite par la colère , la malveillance, la méchanceté, la vengeance, alors notre prière : Pardonnez - nous nos offenses, est vaine et sans effet. De là cette exhortation : Lorsque vous offrez votre don à l`autel, allez d'abord vous réconcilier avec votre frère. (Matthieu 5, 23. ) Par cette demande nous implorons non-seulement le pardon de nos péchés, mais aussi la remise de la peine qui leur est due. Plus notre contrition sera grande, en récitant cette prière, plus complet aussi sera notre pardon, suivant cette parole de notre Sauveur au sujet de sainte Marie - Madeleine : Beaucoup de péchés lui sont pardonnés, parce qu'elle a beaucoup aimé. (Luc, 7, 47.)

Exhortation. 0 chrétien, imitez Dieu! Comme il vous pardonne dans sa miséricorde, pardonnez vous-même aux autres. Plus vos péchés sont grands, plus vos fautes sont nombreuses , plus vous devez répéter cette prière avec ardeur et confiance en Dieu : Pardonnez-nous nos offenses ! Pensez, ô mon âme, à ces inconcevables châtiments qui sont dus au péché! Conjurez Dieu de vous pardonner maintenant et faites des œuvres de pénitence, tandis que cela vous est possible. Déplorez vos fautes dans le temps avec des larmes de repentir, pour n'avoir pas à les pleurer en vain dans les supplices éternels.

HISTOIRES.

Pardonnez-nous nos offenses. — Saint Augustin attribue à cette cinquième demande la vertu d'effacer les fautes légères et journalières, sans toutefois la refuser absolument aux autres. Car le Pater ( Notre-Pere) est du nombre des sacramentaux , c'est-à-dire que quiconque le récite avec foi, confiance et douleur, obtient la rémission des péchés véniels. ( Traité sur le Pater.) ( le Notre-Père )

Nous demandons aussi que le Seigneur nous accorde la grâce du repentir, et toutes les dispositions nécessaires afin de recevoir par l'absolution le pardon de nos péchés , surtout des péchés mortels. C'est dans ce but que tous les pénitents les plus célèbres ont fait cette prière et d'autres semblables. J'ai péché ! s'écria David , et le prophète lui répondit : Le Seigneur a transporté votre péché, il ne pèse plus sur votre tête. David continua de demander son pardon dans les sentiments de la plus vive douleur : Ayez pitié de moi, Seigneur, selon votre grande commisération, et selon la multitude de vos miséricordes, effacez mon iniquité. Et le Seigneur le purifia de plus en plus de ses fautes. (Psaume 50, 1)

Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. — Le pardon du prochain, de notre part, est la condition de notre pardon de la part de Dieu. Plus d'une fois saint Jean l'Aumônier avait pressé un seigneur de se réconcilier avec son ennemi , mais toujours en vain. Un jour il le pria de venir à la messe qu'il allait célébrer dans sa chapelle où il ne laissa entrer que le servant. Puis, à l'Oraison dominicale que récitaient tous les assistants, selon l'usage de ce temps-là, il se tut, lui et son clerc, quand on fut à ces paroles : Pardonnez-nous nos offenses, etc., de sorte que ce Seigneur les prononça seul. Alors le Saint, se tournant vers lui, lui dit avec une fermeté mêlée de douceur : « Songez-vous bien, mon frère, à ce que vous venez de dire ? En demandant pardon à Dieu, vous avez protesté que vous pardonniez aux autres. Si donc vous refusez de pardonner , vous avez prononcé votre sentence. » Frappé comme d'un coup de foudre, ce seigneur tomba aux pieds de l'homme de Dieu, se montra disposé à faire ce qu'il désirait, et se réconcilia sur-le-champ avec son ennemi.

Personne n'ignore l'histoire de Nicéphore et de Saprice, ennemis d'abord irréconciliables. Plusieurs fois déjà le dernier avait rejeté les avances du premier, lorsqu'une persécution éclata à Antioche. Saisi, traîné devant les juges, Saprice confesse Jésus-Christ avec une fermeté inébranlable. Il est condamné à mort, et va mourir
dans les tortures. Nicéphore l'apprend : il court se jeter aux pieds de Saprice et le conjure de lui accorder sa grâce. L'inflexible Saprice détourne la tête et reste muet. Cependant il arrive au lieu de l'exécution. Là , son courage chancelle : il se met à genoux, demande la vie et sacrifie aux dieux. A cette vue , Nicéphore se proclame chrétien, et reçoit à sa place la couronne du martyre. — Le Seigneur avait abandonné l'ennemi de la charité fraternelle : incapable de pardonner, il ne méritait pas le ciel, prix du pardon et
de l'amour fraternels, aussi bien que de l'amour de Dieu. ( SUBIUS, RlBADENEIRA, etc. )


SIXIEME DEMANDE

Ne nous laissez pas succomber à la tentation.

D. Que demandez-vous par ces paroles?

R. Que Dieu ne permette pas que nous soyons tentés au - dessus de nos forces.

D. La tentation de pécher nous vient-elle de Dieu ?

R. Non, Dieu ne peut tenter et exciter personne au mal. (Jacques, 1, 13.)

D. Par qui sommes-nous tentés?

R. Par le démon, (les anges déchus) par le monde et par notre propre concupiscence.

D. Est-ce un péché d'être tenté? —

R. Non, s'il n'y a ni plaisir, ni consentement de notre part.

D. Pouvons-nous vivre dans ce monde sans éprouver de tentations?

R. C'est impossible : La vie de l`homme est un combat sur la terre.

D. Quel est le meilleur remède aux tentations ?

R. C'est d'éviter les occasions du péché , et de répéter souvent cette prière avec dévotion : Ne nous laissez point succomber à la tentation.

Instruction. Dans la demande précédente , nous prions pour être délivrés du mal du péché ; mais comme cette délivrance ne peut se réaliser comme il faut, si nous ne sommes exempts du péril de pécher, nous ajoutons : Et ne nous laissez point succomber à la tentation. Par cette prière , nous supplions Dieu d'éloigner les tentations qui nous entraînent au péché, ou du moins, de nous donner la force de les surmonter. La tentation ne vient pas de Dieu.

Dire que Dieu nous porte au péché, c'est un blasphème. II permet, à la vérité, que nous soyons tentés pour mettre notre patience à l'épreuve ; mais la tentation vient de la malice du démon (ange déchu) qui tenta Adam et Ève , au paradis , même dans l'état d'innocence. Elle vient du monde , composé de ces personnes mauvaises au milieu desquelles nous vivons , et qui travaillent à nous corrompre par leurs maximes perverses. Elle vient de notre propre nature dépravée, de la concupiscence, cette loi de nos membres qui lutte continuellement contre la raison et la loi de Dieu. Ah ! qu'elles sont nombreuses les fautes et les tentations causées par les révoltes de la chair ! ( Galates 5, 19, etc. )

Nul homme vivant n'est exempt de tentations : leur racine est née avec nous. La vie de l'homme se compose pour ainsi dire de tentations; mais elles ne sont point le péché, à moins que nous ne leur donnions ce caractère par un véritable consentement. Au contraire , elles rendent souvent nos bonnes actions plus méritoires par notre résistance et notre courage chrétien. Heureux l`homme qui souffre la tentation parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie. (Jacques, 1, 12.)

Trois degrés conduisent au péché : la pensée, la délectation, le consentement. La première s'élève dans l'âme et n'est point d'abord un péché , mais une suggestion du démon (ange déchu) qui nous excite à pécher. La seconde naît de la chair ou de la concupiscence , et ce n'est pas un péché , à moins que nous ne l'entretenions volontairement et avec complaisance. La troisième est le consentement ou l'assentiment de la volonté qui consomme la tentation et engendre la mort : c'est cela qui cause la mort à l'âme. Les moyens de prévenir ce malheur, c'est 1° de rejeter la tentation dès le commencement; 2° d'éviter les occasions dangereuses; 3 de
répéter souvent cette prière : Ne nous laissez point succomber à la tentation.

Exhortation. Souvenez-vous, ô chrétien , que vous êtes, dans ce monde, environné d'ennemis; et, puisque votre vie sur la terre est un combat, comprenez combien il vous est nécessaire d'adresser chaque jour cette prière à Dieu. Ce n'est pas contre la chair et le sang que nous avons à combattre, mais contre les principautés et les puissances; contre les maîtres de ce monde, de ce lieu de ténèbres; contre les malins esprits répandus dans l'air. (Éphésiens 6,12.) En outre, la mobilité de vos dispositions et la faiblesse de votre nature exigent que vous vous fortifiiez vous-même par cette prière, sachant qu'il vous est impossible d'éviter le mal , de faire le bien , de vous affranchir des maux qui vous pressent de toutes parts , sans le secours de Dieu , sans le plus grand soin à mériter et à obtenir l'accroissement de sa grâce. Puisque Dieu est votre tout-puissant protecteur et Jésus votre chef, agissez donc de votre côté : Résistez au démon (ange déchu) et il s'éloignera de vous. Évitez toutes les occasions de péché : par exemple, telle compagnie, tel lieu, telle conversation; mais surtout renoncez à votre volonté propre qui est la source de la tentation et du péché lui-même.

HISTOIRES.

Ne nous laissez point succomber à la tentation. — Informé qu'un jeune homme avait de nombreuses, de terribles tentations, un prêtre lui offrit d'en demander à Dieu la délivrance. « Oh! Je vous en conjure, répondit le jeune homme , ne priez pas pour que je sois exempt de tentations, mais seulement pour que j'aie la force de les surmonter. Avant mes tentations , je n'avais ni amour de Dieu, ni piété.  Elles m'ont réveillé de mon engourdissement. La tentation est une voix qui m'annonce l'heure du combat, et le moment de prouver à Dieu que je l'aime par-dessus toutes choses. » Effectivement c'est par la tentation que Dieu nous éprouve et nous perfectionne; c'est à la guerre, et non durant la paix que l'on connaît la valeur du soldat ; c'est dans l'infortune qu'on apprécie la fidélité d'un ami. Ainsi, il faut, selon cette sixième demande, implorer le secours de Dieu moins pour être délivré des tentations que pour en triompher. ( Schmid et Belet. )

Un jour que sainte Catherine de Sienne était violemment en butte aux mauvaises pensées, Jésus-Christ lui apparut et les dissipa par sa présence. Où étiez-vous, Seigneur, lui dit-elle avec l'accent d'une plainte amoureuse , quand il se présentait à moi de si horribles pensées? — Ma fille, j'étais au milieu de votre cœur, témoin de vos généreux combats , et prêt à vous prêter mon appui au besoin pour repousser la tentation.  Il est donc vrai que Dieu, si nous lui sommes fidèles , ne nous abandonne point à l'heure du péril. ( Vie de sainte Catherine de Sienne.)

Mais il ne suffit pas de demander la victoire ; il faut encore combattre pour l'obtenir, et c'est particulièrement cette force d'un vrai soldat de Jésus-Christ que nous demandons en recourant au Seigneur. Ainsi combattit Susanne, attaquée par les deux juges iniques ( Daniel, 13, 22 ) ; ainsi Eléazar, mourant pour éviter une transgression même apparente de la loi. (2. Macchabée, 6. ) Eh! Qui ne sait les rudes combats du solitaire de Bethléem contre les funestes images des délices de Rome. Tantôt il recourait, pour les dissiper, aux graves pensées de la foi , tantôt il tombait en esprit aux pieds de Jésus-Christ et les arrosait de ses larmes. Il passait des jours et des nuits entières, à implorer sa miséricorde, et à se frapper la poitrine jusqu'à ce qu'enfin Dieu lui eût rendu le repos, en calmant la tempête de ses passions. ( St Jérôme à Eustochius. )

Un trait frappant va nous montrer la vertu du Pater ( Notre Père) et en particulier de cette demande pour obtenir la délivrance de ces épreuves, ou du moins la grâce de les supporter. Un reclus, appelé Calupan, fut longtemps en proie au remords, au désespoir, au chagrin, aux peines intérieures de toutes sortes. Des démons (ange déchus) à formes hideuses, et d'horribles serpents venaient le tourmenter dans sa solitude. Il avait inutilement épuisé tous les remèdes pour vaincre ces cruelles épreuves. Il lui vint en pensée de réciter le Pater et notamment d'appuyer sur les deux dernières demandes : Ne nous laissez point succomber; délivrez-nous du mal, etc., et bientôt il recouvra le calme et la paix. Les serpents qui souvent l' étouffaient par leurs rudes étreintes , s'enfuyaient en criant : Cette prière est un tourment pour nous! (St Grégoire de Tours, Vie des Saints. )


SEPTIEME DEMANDE.

Délivrez-nous du mal.

D. Que demandez-vous par ces paroles?

R. Que Dieu daigne nous délivrer de tout mal, du péché et des autres misères.

D. D'où vient le mal du péché?

R. Il vient de la malice du démon ( anges déchus), de notre propre nature corrompue et de notre volonté perverse : il ne vient pas de Dieu , car en Dieu le péché n'existe pas.

Instruction. Par cette dernière demande, nous prions Dieu de nous délivrer de tout mal : par exemple , du démon (anges déchus), du péché et de tout ce qui met obstacle à notre salut ; mais quant aux peines de la vie, elles peuvent, par la grâce, de venir un instrument de notre bonheur éternel. Cependant nous en demandons aussi la délivrance , en tant qu'elles peuvent empêcher notre progrès dans la vertu, ou nous porter aux murmures et à l'impatience.

Exhortation. Lors donc que vous priez pour être délivré des maux qui sont éternels, priez aussi afin de pouvoir embrasser d'un cœur humble et résigné les peines temporelles, comme venant de la main de Dieu pour l'expiation de vos péchés. Celui qui vous les envoie vous donnera la force de les supporter. Il vous les envoie de peur que vous n'oubliez où vous êtes, ce que vous êtes, et pourquoi vous souffrez. Toutes les demandes de l'oraison dominicale ont pour but de nous rappeler la pensée de Dieu, la pensée de nous-mêmes, la pensée de notre entière dépendance de Dieu. 0 faiblesse de l'homme impuissant à rien faire de lui-même ! Mais ô puissance de Dieu, qui en fortifiant l'homme le rend capable de tout; Je puis tout en celui qui me fortifie. (Philippiens 4, 13.)

HISTOIRES.

Délivrez-nous du mal, d'abord du mal de la faute. — Le péché, en effet, est le plus grand de tous les maux, le mal réel et souverain. On demandait à un saint, au nom de l'empereur, défaire, une fois seulement, une chose condamnée par sa conscience. «Vous n'exigez de moi qu'une seule mauvaise action, dites-vous ; c'est comme si vous me disiez : Permettez-moi de vous couper une seule fois la tête. » En effet, le péché est la mort de notre âme; c'est notre perte, notre ruine éternelle. (S. Théodore, prêtre de Constantinople. )

Aussi la reine Blanche ne se lassait-elle pas de dire à son fils : Soit venez-vous qu'il n'y a pas sur la terre d'autre mal que le péché. Je vous aime tendrement , mon fils; eh bien! j'aimerais mieux vous voir mort à mes pieds que de vous savoir coupable d'un seul péché mortel. Qui a chassé Adam du paradis , et déchaîné la mort, et avec la mort tous les fléaux dans le monde? Le péché. Qui a inondé la terre sous les flots du déluge ? Le péché. Qui a fait descendre la vengeance céleste sur Sodome et sur Gomorrhe ? Le péché ? Qui a cloué à la croix la sainte Victime du Calvaire ? Le péché. Qui a creusé, qui remplit journellement l'abîme de l'enfer ? Le péché encore. L'histoire de ce monde est en grande partie l'histoire des ravages et des horreurs du péché.

Or, comment Dieu nous délivre-t-il de ce mal ? D'abord en nous en préservant. Susanne, plongée dans l'angoisse, avait recommandé sa cause à Dieu. Dieu lui fit la grâce de résister au mal. Déjà on la conduisait au supplice ; mais soudain arrive un jeune homme inspiré de Dieu : c'est Daniel. Aussitôt il s'écrie : « Êtes-vous donc assez insensés , enfants d'Israël , pour condamner ainsi l'innocence? Revenez au jugement. » On l'écoute. Le prophète du Seigneur confond les coupables vieillards , les livre au supplice et sauve Susanne. Après avoir sauvé Susanne du péché, il la sauve encore de la mort corporelle, comme pour montrer quelle récompense doivent attendre ceux qui sont fidèles au Seigneur. (Daniel, 13 , 42 à 63. )

La ville de Béthulie était à l'extrémité. L'inspiration divine parle au cœur de Judith ; Judith se rend au camp d'Holopherne, après avoir recommandé sa démarche au Seigneur; et quand , après un grand festin , elle voit l'Assyrien profondément assoupi , d'une main elle le saisit par les cheveux , de l'autre elle lui abat la tête d'un coup d'épée. Par cette action héroïque, elle a tout à la fois et sauvé son innocence et délivré Béthulie ; ou plutôt c'est Dieu qui, à sa prière et par son bras, a fait tout cela. (Judith, ch. 7)

Dieu nous délivre ensuite du mal, en nous faisant la grâce d'expier le péché par la pénitence et des œuvres satisfactoires , quand nous avons eu le malheur de le commettre. Cette faveur fut celle de David, de Manassès, de saint Pierre, de saint Paul, de saint Augustin , de saint Norbert et de mille autres. — Sainte Marie d'Égypte obtint la double grâce et d'expier ses péchés passés et de prévenir les fautes à venir. Pendant dix-sept ans, elle jeûna, pria, pleura dans la solitude ; pendant dix-sept ans, elle repoussa par la, prière et le secours de Dieu les imaginations impures qui la poursuivaient partout. , (Sa vie.)

Délivrez-nous ensuite du mal de la peine, c'est-à-dire des châtiments du péché , etc.
— Attila , le fléau de Dieu , avait pénétré dans les Gaules. Le feu, la flamme, la dévastation, digne escorte du redoutable conquérant , annoncèrent bientôt son approche aux habitants de Troye. Saint Loup rappelle à son peuple ces paroles du Seigneur : Poussez des cris vers moi dans le temps de la tribulation, et je vous délivrerai. (Psaume 49.) Il adresse lui-même une fervente prière au Dieu des armées , et marche courageusement au devant de l'ennemi. Attila, touché de la figure vénérable de l'homme de Dieu, sent son cœur s'émouvoir. Il promet d'épargner la ville, et tient parole. — Dieu avait délivré saint Loup et son troupeau d'un grand mal. (Histoire ecclésiastique. )

Cependant les maux que Dieu nous envoie sont parfois des faveurs plutôt que des châtiments. Gravement blessé au siège de Pampelune , Ignace fut obligé de rester plusieurs semaines sur un lit de douleur. Il demanda des romans pour charmer ses ennuis ; mais par un nouveau trait de providence, il ne s'en trouva point. On présente à Ignace la Vie de Jésus-Christ et les Fleurs des Vies des Saints. Ignace finit par y prendre goût. Bientôt à l'école des héros de la vertu chrétienne , il verse des larmes d'admiration et de repentir. Ignace est converti. Homme privilégié de Dieu, il devient le fondateur de la Compagnie de Jésus, et en même temps un grand saint. ( Vie de saint Ignace.)

Il importe donc de ne demander la délivrance de ces sortes de maux que conditionnellement , c'est-à-dire dans la supposition qu'ils nuisent à notre salut. Un aveugle s'étant fait conduire au tombeau de saint Thomas de Cantorbéry, y pria avec tant de ferveur qu'il obtint sa guérison. Mais un scrupule le prit : il avait oublié de ne demander cette faveur qu'autant qu'elle serait dans l'intérêt de son salut. Il retourne donc sur la tombe du saint, et demande de redevenir aveugle, si cela est avantageux au salut de son âme. C'est ce qui arriva. Dès-lors ce chrétien éclairé et généreux consacra sa vie au service de Dieu, et mourut de la mort des saints. ( Schmid et Belet. )


EXPLICATION DE L'AVE MARIA.

SECTION I.

Je vous salue, Marie , pleine de grâces, le Seigneur est avec vous.

D. Qu'est-ce que l'Ave Maria?

R. C'est une salutation et une sainte prière par laquelle nous demandons l'intercession de la bienheureuse vierge Marie, et exprimons notre joie au sujet de l'incarnation du Fils de Dieu.

D. En combien de parties l'Ave Maria se divise-t-il?

R. En trois parties : la première est la salutation de l'ange Gabriel à la bien heureuse Vierge, lorsqu'il lui annonça l'incarnation du Fils de Dieu, en disant : Je vous salue, Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous. La seconde se compose des paroles que sainte Élisabeth, inspirée par le Saint-Esprit, prononça lorsque la bienheureuse Vierge vint la visiter : Vous êtes bénie entre toutes les femmes et le fruit de vos entrailles est béni.  La troisième est celle qui a été ajoutée par l'Église contre l'hérétique Nestorius et sa secte, qui refusaient à Marie la maternité divine : Sainte Marie , Mère de Dieu, priez pour nous, pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort.

Instruction. La prière la plus excellente, après l'oraison dominicale , c'est la salutation angélique, communément appelée l'Ave Maria, à cause qu'elle commence par ces
mots : Ave Maria, gratia plena ; Je vous salue Marie, pleine de grâces. De même que l'Oraison dominicale a été composée par le Christ lui-même pour nous apprendre comment nous devons, par sa médiation, prier le Père éternel, ainsi l'Ave Maria nous a été enseigné, par inspiration divine, pour implorer l'intercession de Marie auprès de son
fils, Jésus, en faveur de nous autres pécheurs, et pour exprimer notre joie au sujet de l'incarnation du Fils de Dieu, source de tout notre bien.

Cette prière est courte, mais pleine de mystères. Elle reporte nos pensées sur nos anciennes misères, alors que nous étions privés, par le péché, de la lumière, de la grâce et de l'amour de Dieu. Elle excite notre reconnaissance pour le bienfait de l'incarnation. Elle honore Dieu en renouvelant la mémoire de ses ineffables miséricordes. En un mot cette prière est odieuse au démon, parce qu'elle montre comment son mauvais dessein a été déjoué et sa tête écrasée, par le pied de la femme.

La première partie de la salutation de la bienheureuse Vierge Marie par l'ange Gabriel exprime les grâces extra ordinaires dont elle fut comblée : Je vous salue Marie, pleine de grâces, le Seigneur est avec vous. Ces mots , Je vous salue équivalent à ces paroles : Réjouissez-vous , ô Marie , mère de Dieu! Quelle parole de joie ne doit pas être pour Marie, pour le ciel et pour la terre, une salutation qui rappelle le souvenir du mystère par lequel elle a conçu son divin Fils ! Pleine de grâces : ces paroles signifient que la bienheureuse Vierge est au-dessus de toutes les autres créatures honorée d'une prérogative spéciale dans l'ordre de la grâce , celle d'avoir été choisie de Dieu pour concevoir et porter dans son sein Celui qui est l'auteur de toute grâce pour l'humanité. Qu'on ne s'étonne donc pas si sa conception, sa nativité, sa vie entière ont été immaculées et n'ont jamais éprouvé l'atteinte du péché; ou de ce que Marie, qui devait être la mère de notre divin Rédempteur destiné à détruire le péché, ait été par sa grâce préservée de tout péché. Bien qu'il soit écrit d'autres saints, par exemple des apôtres et de saint Etienne, qu'ils ont été remplis de grâces, en vue de la mission à laquelle ils étaient réservés, cependant aucun d'eux n'a reçu la plénitude de la grâce , comme celle qui fut choisie pour être mère de Notre - Seigneur. Elle a été enrichie de grâces singulières qui l'ont rendue la plus pure de toutes les créatures , soit sur la terre soit au ciel.

Le Seigneur est avec vous : le Fils de Dieu, le maître de toutes choses, la seconde personne de la sainte Trinité, descend dans votre sein , s'y incarne, y revêt votre propre chair et devient votre fils. Il descend pour résider en vous , non-seulement par son amour et sa grâce, mais aussi par sa propre nature, de manière à être en même temps spirituellement conçu dans votre âme et physiquement dans votre sein. Aussi pouvons-nous dire en toute vérité que Dieu a opéré en Marie la plus grande de toutes ses merveilles, lorsqu'il fa rendue Mère de Dieu, pendant qu'elle est demeurée toujours vierge.

Exhortation. Portez, âme chrétienne , le respect qui lui est dû , à la salutation angélique et à la bienheureuse Vierge qui, dans cette prière, est honorée de Dieu, des hommes et des anges. Toutes les fois que vous la récitez, pensez avec joie à l'incarnation du Fils de Dieu. Pensez à l'ancienne misère de l'homme et à son bonheur actuel. Vous étiez autrefois esclaves du démon, vous êtes maintenant enfants de Dieu; autrefois enfants de colère, fils de l'enfer, maintenant cohéritiers du Christ dans sa gloire. 0 sainte prière ! digne d'être vénérée de tous les chrétiens au fond de leur cœur !

Vivez de telle sorte, ô chrétien , qu'à l'exemple de la bien heureuse Vierge, vous participiez aux faveurs particulières de Dieu. Suivez les pas de cette mère bénie, imitez sa vertu, sa pureté, son humilité, son obéissance, sa piété; et par la pratique de ces vertus, vous conserverez indubitablement la présence de Dieu dans votre cœur.

HISTOIRES.

Gloire à Marie. — Un fervent serviteur de Marie la saluait sans cesse par la récitation de l'Ave Maria. Passait-il près d'une image de Marie, il disait : Ave! sortait-il de chez lui, ou y rentrait- il, il disait : Ave! Cette prière fut pour lui une source de biens spirituels. Mais des camarades, comme il s'en trouve beaucoup, l'ayant détourné de cette dévotion , la piété de ce serviteur de Marie ( il se nommait Thomas à Kempis) se ralentit beaucoup. La sainte Vierge lui apparut en songe , et lui dit : « Que sont devenus ces Ave que tu m'adressais autrefois ? Retire-toi, ingrat, tu ne mérites plus ma protection. » Thomas se réveilla, pleura sa tiédeur, et reprit ses prières accoutumées. — Marie tient donc à ce qu'on l'honore par cette salutation. ( Debussi , Mois de Marie. )

Saint Liguori appelait l'Ave la parole délicieuse des saints. Il prononçait l'Ave Maria avec bonheur, le recommandait dans ses prédications , et ne le récitait presque jamais avant son office sans pleurer d'attendrissement et de joie. — Lorsque sainte Catherine de Sienne montait ou descendait un escalier , elle répétait l'Ave Maria à chaque degré. A l'âge de sept ans, elle récitait l'Ave Maria avec tant de ferveur, qu'on ne pouvait l'entendre sans en être touché et même converti. — Formé par sa mère aune grande dévotion à la sainte Vierge, saint Edmond se montra toujours très-zélé pour sa gloire. Il allait plusieurs fois par jour se prosterner devant une de ses statues ,- et à l'un des doigts de cette statue, il mit, en signe de son dévouement, un anneau dans lequel était gravée la Salutation angélique. Après la mort de saint Edmond, oh trouva cette même prière gravée sur son anneau épiscopal. On s'en servit dans la suite pour opérer de nombreuses guérisons. (Leurs Vies. — Annuaire de Marie, etc.)


Si le Ciel bénit ceux qui honorent Marie, il punit ceux qui l'outragent. C'était en 1649, lorsque les troupes allemandes étaient en Lorraine. Après avoir bu avec excès , et perdu beaucoup au jeu , un soldat se lève tout-à-coup en furie , et apercevant une image de Notre-Dame, attachée à la muraille, il s'en prend à elle, comme si elle eût été cause de sa perte , et lui donne plusieurs coups , en proférant mille blasphèmes. Au même instant il est renversé contre terre , avec un tremblement de tout le corps , et des douleurs si
violentes , qu'il lui est impossible de prendre aucune nourriture pendant plusieurs jours. Les troupes ayant reçu l'ordre de déloger, on le lie sur un cheval pour qu'il suive les autres. Mais à force de se tourmenter, il se jette à bas, et meurt sur le chemin, mordant la poussière et écumant de rage, à la vue de ses camarades, frappés eux-mêmes de stupeur et d'effroi. (Histoire d'une sainte et illustre famille de ce siècle.)

Au reste, la gloire de Marie ne se procure pas seulement par des hommages et des prières, mais encore et surtout par des sacrifices et des actes. Un jeune homme faisait un court trajet sur mer, avec un religieux et d'autres passagers. Il tenait en main un livre licencieux qu'il lisait de temps en temps, en disant à la compagnie par une espèce de bravade : «Voilà un livre charmant et plein d'esprit; j'en fais mes délices, je ne le donnerais pas pour un trésor. » Le religieux flétrit de tout son mépris ces productions honteuses qui versent à flots le poison dans les cœurs, et peignit en traits de feu le triste état d'une âme livrée aux passions ; en même temps il insinua qu'il n'y voyait guère d'autre remède que la dévotion à Marie. « Hélas ! dit alors le jeune homme en soupirant, je l'aimais tant autrefois! J'ai même porté ses livrées. Mais depuis... j'ai tout quitté; j'ai même rougi de lui appartenir. Puis -je encore espérer de recouvrer ses bonnes grâces ? — Oui , repartit le religieux , et pour cela il vous en coûtera peu : où est ce livre dont vous faisiez tout à l'heure un si magnifique éloge? — Oh ! mon père, n'en parlons plus ! — Au contraire, il faut en parler ; vous désirez regagner l'amitié de Marie ? eh bien, faites-lui le sacrifice de ce livre si cher à votre cœur. » Le jeune homme obéit : il fit cette offrande à la Reine des anges et jeta son livre à la mer. On ne saurait croire de quelles faveurs ce sacrifice fut la source pour cet intéressant jeune homme. Rentré dans sa famille, il se convertit, renonça à ses compagnons de plaisir, à ses passions, à ses biens, à sa famille, et entra dans un ordre religieux dont il fit l'édification et la gloire. ( Debussi , Mois de Marie, et Annuaire de Marie. )

Joie de l'Incarnation. — C'est pour remercier Dieu , c'est pour nous féliciter nous-mêmes de ce mystère , que nous récitons l'Ave Maria. L'Ave Maria, en effet, nous rappelle le message et la salutation de l'archange Gabriel envoyé de Dieu pour proposer à Marie de vouloir bien devenir la mère du Sauveur ; l'assentiment de la Vierge qui répondit : Voici la servante du Seigneur ; qu'il me soit fait selon votre parole ; et enfin la conception de Jésus-Christ dans le très -pur sein de Marie par l'opération du Saint-Esprit : Et le Verbe s'est fait chair, et il a habité parmi nous. C'était en 1456. Après un siège de quatre mois, le sultan fit livrer à Belgrade un assaut général. Épuisés par une lutte opiniâtre de vingt heures, les défenseurs de la ville allaient poser les armes. Tout-à-coup paraît un pieux, un intrépide franciscain.  Jean de Capistran, c'était son nom, se présente aux soldats, un crucifix à la main et cette prière à la bouche : « Hélas ! puissante Reine du Ciel, abandonnerez-vous vos enfants à la merci d'infidèles qui ne cessent d'outrager votre Fils ? » Et en parlant ainsi , il versait un torrent de larmes. Ces larmes, ces prières, ou plutôt la protection de Marie et le souvenir de son Fils incarné pour notre salut , raniment les soldats : ils s'élancent avec une impétuosité héroïque, repoussent , massacrent et dispersent les Turcs qui déjà pénétraient dans la ville ; ils avaient vaincu ! (Histoire de l'Église, Fleury, Béradlt, Rohrb.)

Un pécheur, en proie au désespoir, refusait les sacrements, et il allait mourir ! Saint Vincent de Paul accourt : « Eh quoi ! mon ami , Jésus-Christ s'est incarné , Jésus-Christ est mort pour vous, et vous doutez de sa miséricorde ! c'est offenser son amour. — Je veux mourir en réprouvé pour déplaire à Jésus-Christ. — Et moi, je veux vous arracher à la damnation pour réjouir son cœur. » Là-dessus saint Vincent invite les assistants à demander la conversion de ce malheureux par l'intercession de la Mère de notre Sauveur. Bientôt le cœur du pécheur endurci s'attendrit : il se convertit, et après une confession édifiante, il meurt en grâce avec Dieu. ( Schmid et Belet. )

Ah ! c'est que la Mère du Sauveur est la dépositaire, la trésorière, le canal de la grâce : gratia plena! Un homme, plein de dévotion à Marie , s'arrêtait toujours à ces paroles : Vous êtes pleine de grâces , lorsqu'il récitait l'Ave Maria. Il tomba malade et fut en proie à d'affreuses convulsions. Mais pendant qu'on faisait la recommandation de l'âme, Marie lui apparut et lui dit : « Je ne souffrirai pas qu'une bouche qui a tant célébré mes louanges , qu'un cœur qui a tant médité sur les grâces que Dieu m'a accordées , souffrent davantage : soyez guéri et continuez à me louer. » De ce moment le serviteur de Marie recouvra la santé , et passa le reste de sa vie à publier le bonheur que l'on goûte au service de la très sainte Vierge. ( S. Jean Climaque. )


SECTION II .

Vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus, le fruit de vos entrailles , est béni.

D. Quelles sont ces paroles?

R. Ce sont les paroles de sainte Élisabeth, lorsque la sainte Vierge alla la visiter quelque temps après la conception de son divin Fils.

D. Que signifient ces mots : Bénie entre toutes les femmes?

R. Ils signifient que Marie, ayant été choisie pour être la mère de Dieu, doit conséquemment être bénie et honorée plus que toutes les autres femmes.

D. Qu'entendez-vous en disant : Le fruit de vos entrailles est béni?

R. J'entends que Jésus est le vrai Fils de Marie, et que Marie étant, en lui et par lui, le canal de toute bénédiction pour nous, doit être conséquemment bénie des hommes et des anges.

Instruction. Ces paroles: Vous êtes bénie entre toutes les femmes , ont été prononcées d'abord par l'ange Gabriel, et ensuite par sainte Élisabeth. Lorsqu'elle reçut la visite
de la sainte Vierge , elle fut remplie du Saint-Esprit, et alors elle s'écria : Vous êtes bénie entre toutes les femmes, et le fruit de vos entrailles est béni ! D'autre part, aussitôt que la salutation de la bienheureuse vierge retentit aux oreilles de sainte Élisabeth , l'enfant qui était dans son sein , saint Jean-Baptiste, tressaillit de joie. On eut dit que les bénédictions ineffables qui pénétraient dans la maison d'Élisabeth, avec la sainte Vierge et au son de sa voix , étaient des gages des grâces et des faveurs extraordinaires dont Dieu se proposait de nous combler plus tard à la voix de l'intercession de Marie.

Bénie entre toutes les femmes , c'est-à-dire bénie plus que toutes les autres femmes dans, le passé et dans l'avenir ; bénie plus que toutes les créatures proprement dites, soit sur la terre, soit au ciel, comme ayant porté le Fils de Dieu incarné dans son sein ; bénie dans sa propre personne , comme pleine de grâces ; bénie par rapport à Jésus, le fruit de ses entrailles, source de bénédictions pour nous , et à qui nous devons la vie et le bonheur ; car il n'y a pas d'autre nom par lequel nous puissions espérer de plaire à Dieu ou de le posséder à jamais. De même que la première malédiction est tombée sur nous par la désobéissance d'Ève, de même a-t-elle été enlevée, et toute grâce nous a-t-elle été conférée, à l'aide de Marie, par Jésus, le fruit de ses entrailles, auquel elle dut elle-même d'être bénie et d'être choisie comme cause instrumentale de toutes bénédictions pour nous; ainsi l'honneur que nous rendons à la Mère , revient toujours à son Fils.

Exhortation. Avec quelle vénération ne devez-vous donc pas , ô chrétien , contempler cette bienheureuse Vierge qui règne maintenant avec son Fils dans la gloire, après toutes les bénédictions qui sont descendues par elle sur vous et sur l'humanité entière ! Oh ! répétez ces paroles avec le même esprit que l'ange et sainte Élisabeth , célébrant avec eux la souveraine puissance de Dieu , exaltant sa bienheureuse Mère , la plus sainte de toutes les créatures , la plus hautement honorée de la part de Dieu lui-même. Bénissez et louez Marie , au milieu de la corruption de ce siècle de libertinage et d'infidélité , vérifiant ainsi les paroles qu'elle prononça en parlant d'elle-même, sous l'inspiration divine : Voici que désormais toutes les générations m'appelleront bienheureuse. (Luc, 1, 48.)

HISTOIRES.

Vous êtes bénie entre toutes les femmes. — Par suite de ma dignité de mère de Dieu, toutes les nations m'appelleront bienheureuse (Magnificat), avait prophétisé à son sujet Marie elle-même. Rien de plus vrai. Le culte d'hyperdulie , ces riches sanctuaires, ces autels sans nombre , ces pèlerinages si fréquentés , ces images miraculeuses, ces confréries dotées de tant de faveurs, ces bénédictions inexprimables obtenues par l'intercession de l'auguste Vierge, tout nous prouve qu'elle est bénie , honorée , exaltée au-dessus de toutes les femmes , de tous les hommes , de tous les saints et de tous les anges eux-mêmes. — Saint Etienne, roi de Hongrie, plus célèbre encore par sa tendre dévotion à la sainte Vierge que par l'éclat de ses qualités royales , n'osait prononcer le sacré nom de Marie, tant il avait pour elle une vénération profonde : il l'appelait la Grande Dame. Les Hongrois , à son exemple , lui donnaient le même titre , et , s'il arrivait qu'en leur présence on prononçât le saint nom de Marie, à l'instant tous tombaient à genoux, et s'inclinaient jusqu'à terre , témoignant ainsi du respect profond qu'ils avaient pour un nom si auguste. (Paraphrase du Salve Regina, par S. Liguori.)

Un autre prince fut loin de montrer le même respect. L'iconoclaste Constantin Copronyme avait voué une haine toute spéciale à la Mère de Dieu et à ses images. Il avait défendu de l'invoquer, et de prononcer son saint nom à l'église. « Combien vaut cette bourse? demanda-t-il un jour à ses courtisans, après avoir retiré de sa poche sa bourse impériale. — Sans doute elle est d'une grande valeur, » répondit-on sans hésiter. Il jeta les pièces d'or qu'elle renfermait , et de nouveau il demanda ce qu'elle valait. «Rien, répondit- on. — Hé bien ! repartit l'habile théologien, il en est ainsi de la sainte Vierge. Quand elle portait le Fils de Dieu dans son sein , elle méritait de profonds hommages ; aujourd'hui elle n'en mérite pas plus que les autres femmes. » Le blasphème fut puni sur-le-champ : une cruelle maladie saisit le prince impie et l'emporta dans quelques jours. — Malheur à ceux qui outragent l'auguste Mère de Dieu ! (Histoire ecclésiastique.)

Sainte Lutgarde , étant une fois parvenue à cet endroit de son office, la sainte Vierge lui apparut avec un visage rayonnant d'allégresse, et lui exprima la satisfaction qu'elle éprouvait de ce que, dans ce verset , on faisait la commémoration de l'auguste mystère opéré dans son sein. Sainte Lutgarde fit part de cette vision à Thomas de Cantimpré, qui, dans la suite, s'inclina profondément, en l'honneur de Notre-Dame, toutes les fois qu'il prononçait ce passage du Te Deum. (Surius, Vie de Ste Lutgarde, 16 juin.)

Une pieuse femme priait tous les jours la sainte Vierge de lui montrer Jésus , le fruit béni de ses entrailles. Marie ne dédaigna ni ses prières ni ses larmes : elle lui apparut environnée de lumière, et lui remit entre les bras le saint Enfant rayonnant de gloire et de beauté. Cette bonne femme en ressentit d'ineffables délices. Cependant, tandis que le saint Enfant était entre ses bras, il lui dit de réciter le Pater, puis l'Ave. Lorsqu'elle eut commencé cette dernière prière , Jésus s'inclina du côté de sa mère ; puis , quand elle fut parvenue à ces paroles : Béni soit le fruit de vos entrailles, il dit : « C'est moi ; » et à l'instant il s'en retourna entre les bras de la sainte Vierge sa Mère. ( S. Anselme, Livre des miracles de la bienheureuse Vierge Marie. )




Dernière édition par MichelT le Mar 15 Nov 2016 - 13:16, édité 1 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Lun 14 Nov 2016 - 22:30

SECTION III.

Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort.

D. Qui a composé la dernière partie de cette sainte prière?

R. C'est l'Église catholique ; elle l'a composée contre Nestorius qui niait que la sainte Vierge Marie fût Mère de Dieu et lui donnait seulement le titre de Mère du Christ , prétendant que la personne du Christ se distinguait de la personne du Fils de Dieu.

D. Comment Marie est-elle Mère de Dieu.

R. Parce que son Fils Jésus , qui est vraiment né d'elle , n'étant pas une autre personne que le Fils de Dieu, est vraiment Dieu.

D. Que signifient ces paroles : Priez pour nous pécheurs ?

R. Elles signifient qu'étant pécheurs, nous avons besoin de l'intercession de la Vierge auprès de son Fils , Jésus.

D. Pourquoi ajoutez-vous : Maintenant et à l'heure de notre mort?

R. Parce qu'étant à chaque heure en danger, nous avons besoin à chaque heure de sa puissante protection, mais sur tout à nos derniers moments, pour qu'elle nous défende contre notre ennemi et soit notre avocate au jugement.

D. Pourquoi les catholiques disent-ils la salutation Angélique , après l'Oraison dominicale?

R. C'est afin que la sainte Vierge, unissant son intercession à nos prières , nous obtenions plus facilement ce que nous demandons par l'Oraison dominicale.

D. Pouvons-nous également demander les prières d'autres saints ?

R. Oui , de tous les saints mais particulièrement du saint dont nous portons le nom et de notre ange gardien.

Instruction. Cette dernière partie de la salutation angélique est très-ancienne, et elle a été en usage dans toute l'Église depuis que le concile d'Éphèse, conformément à l'Écriture et à la tradition , a décrété contre Nestorius et ses sectateurs que la Vierge Marie est véritablement Mère de Dieu. Car il n'y a pas deux personnes dans le Christ, mais une seule, la nature divine et la nature humaine subsistant en Jésus , seconde personne de la sainte Trinité , vraiment Fils de Marie et Fils de Dieu. La même personne en Jésus-Christ étant Dieu et homme, il s'ensuit clairement que Marie est réellement Mère de Dieu. Élisabeth l'a proclamée Mère de Notre-Seigneur ( Luc , 1, 43 ) , et l'ange lui a dit : Le saint qui naitra de vous, sera appelé Fils de Dieu. ( Luc, 1 , 35.)

Toutefois nous ne rendons pas à la Vierge le culte d'adoration, qui n'appartient qu'à Dieu, mais nous l'honorons seulement du culte qui est dû à la plus pure des créatures, comme elle l'est en effet. Nous la considérons donc comme notre plus puissante patronne, et notre plus sûre avocate auprès du Christ ; nous mettons une grande confiance en son intercession , tant à cause de sa haute dignité et de son titre de Mère de Dieu, que pour son excellence, son extraordinaire sainteté et son mérite auprès de Dieu, maintenant qu'elle est assise dans la gloire, toujours pleine de grâce , au-dessus des anges et des saints. Puisqu'elle a eu tant de crédit et de pouvoir auprès de son Fils sur la terre , nous ne pouvons douter qu'elle n'en ait autant et plus auprès de lui dans les cieux. Voilà pourquoi nous demandons qu'elle prie pour nous maintenant, c'est-à-dire à chaque heure, parce qu'étant à chaque heure en danger, nous avons à chaque heure besoin de son aide. Nous en avons besoin surtout à nos derniers moments, pour qu'elle nous défende et soit pour nous une mère , soit quand nous rendrons le dernier soupir, soit quand nous paraîtrons au tribunal du souverain Juge.

C'est en vertu de semblables raisons que nous implorons l'intercession de tous les saints. Sachant que leurs prières furent toujours agréées de Dieu pendant leur séjour au milieu de nous, en cette vallée de larmes, nous croyons que leur puissance n'a fait que s'accroître , maintenant que leurs âmes sont dans la gloire ; et nous ne pensons pas que leur sollicitude et leur zèle pour notre salut ait diminué , puisqu'ils sont, comme nous, membres de la même Église, bien que dans un état différent. Si les mauvais esprits entendent les vœux des misérables qui se livrent à eux, comment pourrions-nous douter que les saints connussent nos besoins et le sujet de nos prières ? Ils jouissent de la claire vue de Dieu qui connaît toutes choses ; et de même qu'ils implorent le pardon des pécheurs qui se repentent , de même , comme nous le lisons dans l'Évangile , ils se réjouissent de notre conversion.

Comme Dieu envoie ses anges pour nous garder et nous protéger contre une foule de maux de l'âme et du corps auxquels nous sommes journellement exposés, et que le nom de quelque saint nous est donné au baptême, c'est une pieuse coutume pour chacun de nous d'invoquer l'ange spécialement député à sa garde et le saint dont il a emprunté le nom. Par là nous honorons Dieu, qui a chargé les saints et les anges de notre protection.

Exhortation. En récitant souvent la salutation angélique, obtenez, ô chrétien, que la Mère de votre Sauveur soit votre puissante avocate auprès de son Fils. Honorez-la ainsi, comme l'ont fait, avant vous, tous vos religieux ancêtres. Que la ferveur de vos prières soit proportionnée à vos besoins, et à la puissance de l'intercession de la Vierge auprès de son Fils. En invoquant Marie, vous invoquez en effet Jésus , car elle lui offre vos prières , et quand vos yeux sont fixés sur elle, votre cœur s'élève jusqu'à Dieu. Répétez souvent cette prière , tandis que vous êtes en santé , et prévenez le temps où la souffrance et l'agonie vous en rendront incapables : Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous maintenant et à l'heure de notre mort ! On ne saurait trop souvent redire une si excellente prière. Apprenez donc à réciter le rosaire ou le chapelet, qui se composent de l'Oraison dominicale et de la Salutation angélique , et tâchez de gagner les indulgences attachées à la pratique de cette dévotion. Dès votre enfance, on vous a appris à aimer et à honorer particulièrement la bienheureuse Vierge Marie ; honorez-la durant tout le cours de votre vie : chaque année, à ses fêtes ; chaque mois, par les mystères du Rosaire ; chaque semaine, le samedi ; chaque jour, par la fréquente récitation de l'Ave Maria. N'oubliez jamais de vous recommander matin et soir à la protection du saint dont vous portez le nom et de votre ange gardien. Adressez-leur chaque jour une prière telle que celle-ci : « Ange de Dieu, ou bienheureux saint , sous la sainte garde duquel je suis placé, éclairez-moi, défendez-moi ce jour, ou cette nuit, contre tout péril et tout péché. Oh ! soyez avec moi maintenant et à l'heure de ma mort. A Dieu honneur et louange de la part de tous ses saints sur la terre et au ciel ! Amen !»


HISTOIRES.

Marie, Mère de Dieu. — Nous avons, à ces paroles du Symbole : Est né de la Vierge Marie,  montre la maternité divine de Marie, et par l'exposé de la doctrine, et par l'histoire du concile d'Éphèse et de Nestorius. Mais Marie n'est pas seulement la mère naturelle de Jésus, elle est aussi la mère adoptive des fidèles , membres mystiques de son divin Fils. Voyant debout au pied de la croix Marie sa Mère avec le disciple qu'il aimait, Jésus dit à la première : Voilà votre fils ; ensuite au disciple : Voilà votre mère. Et de ce moment le disciple la prit pour sa mère (Jean, 19, 26, 27). Or saint Jean représentait tous les hommes. Tous les hommes en saint Jean ont donc été adoptés par Marie. Mais si Marie se montre notre Mère, nous devons nous montrer ses enfants. Voilà pourquoi tant d'âmes pieuses se sont plu à lui payer le tribut d'une piété toute filiale. Sainte Thérèse perdit à douze ans une mère qui, par une pieuse éducation, lui avait appris à reconnaître, à servir une autre mère.
Aussi, lorsqu'on eut dit à Thérèse : Votre mère est morte , elle courut se prosterner devant une image de Notre-Dame, et dire à Marie, les larmes aux yeux : « 0 Vierge sainte, je vous supplie de me tenir lieu de mère ! » Par cette prière sortie du fond de son cœur, elle se consacrait au service de Marie. Elle n'eut pas lieu de s'en repentir. « Toutes les fois que je me suis recommandée à Marie , disait-elle , j'ai ressenti les effets de sa puissante protection. » (Baillet, Vie des Saints.)

Prix de l'intercession de Marie. — Saint Jean Damascène avait écrit de belles pages en faveur des saintes images. Sur l'instigation des iconoclastes de Constantinople, le prince des Sarrasins, parmi lesquels vivait le pieux auteur, lui fit couper la main droite. Jean alla se prosterner devant une image de Marie , et lui dit , les yeux baignés de larmes : « 0 ma bonne souveraine ! ô Mère très -pure de mon Sauveur et de mon Dieu ! vous savez pourquoi je viens de perdre cette main. Venez à mon secours , ô vous par l'intercession de laquelle la droite du Très-Haut, incarné en votre sein, opère tant de merveilles. Rendez-moi cette main, afin que je puisse travailler encore à votre gloire et à celle de votre divin Fils. Vous pouvez tout ce que vous voulez. Vous êtes la Mère de Dieu ! » Tandis qu'il parlait ainsi , il s'endormit , et vit en songe la Vierge Marie , qui , le regardant avec douceur, lui dit : « Voilà que votre main est guérie ; allez maintenant et faites ce que vous avez promis. » Jean se réveilla et trouva sa main parfaitement rétablie. (Baronics, tom. VI, an. 727.)

Personne n'ignore la faveur que reçut saint François de Sales par l'intercession de Marie. L'esprit malin lui avait persuadé que Dieu l'avait mis au nombre des réprouvés. Cette pensée lui causa une maigreur, une désolation qui bientôt allait le conduire au tombeau. Son précepteur ne savait quel parti prendre. Un jour que , selon sa coutume, François priait dans l'église de Saint -Etienne des- Grés, ses yeux se portèrent sur un tableau de la sainte Vierge : un rayon d'espérance pénétra dans son cœur. Alors s'adressant à Marie : « Vierge sainte , dit-il , obtenez-moi de Dieu de l'aimer de tout mon cœur sur la terre , si je dois après ma mort , en punition de mes péchés, le haïr à jamais. » A ces mots son trouble disparut. Il recouvra la paix et la confiance, et avec elles la santé et la vie. (Marsollier, Vie de S. François de Sales.)

Protection de Marie à la mort. — Sainte Brigitte avait perdu son fils, alors qu'il servait comme soldat : elle éprouvait une grande inquiétude sur son salut. Notre -Seigneur la consola par la vision suivante. Elle vit Notre-Dame à côté du tribunal du souverain Juge. Le diable comparut et dit : « Votre mère m'a fait tort de deux manières : la veille de la mort de Charles , elle est entrée dans sa chambre et l'a soutenu à son dernier combat , sans me permettre de le tenter. Ensuite , au lieu de me laisser , comme officier de votre justice , introduire l'âme de ce jeune homme devant votre tribunal, et l'accuser, votre mère l'a reçue entre ses bras et portée à votre jugement. Voilà deux grands torts qu'elle m'a causés : ordonnez donc , pour y remédier , que l'âme de Charles rentre dans son corps. — Bien que le démon soit le père du mensonge, dit Marie, il vient de dire la vérité ; mais Charles m'ayant servie toute sa vie , jusqu'à donner son sang pour moi , s'il l'eût fallu , j'ai dû l'assister d'une manière toute spéciale à la mort et au jugement. Ma mère commande en reine et en souveraine dans mon royaume, reprit Jésus, et elle peut à son gré dispenser de mes lois. Dans cette circonstance, elle a bien fait d'en agir ainsi. » Il imposa donc silence au diable, et sainte Brigitte fut parfaitement rassurée
sur le salut de son fils. (Révélations de sainte Brigitte.)

Pourquoi joindre l'Ave au Pater? Un enfant bien né salue son père et sa mère à son lever et à son coucher. Également le chrétien, enfant de Dieu et de Marie , doit , matin et soir, saluer son Père et sa Mère qui sont dans les cieux. De là cette union si fréquente du Pater et de l'Ave , notamment dans le chapelet , et les cinq Pater et cinq Ave en l'honneur des cinq plaies de Notre-Seigneur. — C'étaient ces cinq Pater et Ave que récitaient les anciens Suisses, lorsqu'ils allaient commencer le combat. Puis ils se précipitaient sur leurs ennemis, toujours supérieurs en nombre, les culbutaient, priaient encore pour rendre grâces, restaient trois jours sur le champ de bataille, afin que le vaincu pût prendre sa revanche, s'il la voulait, et rentraient ensuite chez eux, modestes, modérés, fidèles après la victoire comme avant le combat. (Veuillot, Pèlerinage en Suisse.)

Peut -on prier son Ange gardien, son patron? — C'était une pieuse pratique de Sousi, jeune homme plein de sagesse, de se figurer continuellement son ange gardien à ses côtés , et de le saluer comme s'il l'eût vu. Il parlait souvent à ses amis des avantages de la dévotion aux saints Anges et aux saints patrons. ( Les pieux écoliers. )

Les néophytes indiens, dit un missionnaire, ont une dévotion tendre et affectueuse aux saints. Ceux qu'ils invoquent le plus souvent , sont leurs anges gardiens, leurs patrons, saint Joseph, saint Jean-Baptiste, saint Michel, etc. C'est surtout à leur ange gardien qu'ils se recommandent, lorsqu'ils entreprennent quelque voyage. « Avant de me mettre en chemin , disait un néophyte , j'y mets mon ange gardien, et je le suis en esprit, comme le jeune Tobie suivait l'ange Raphaël. » ( Lettres édifiantes. )


DE LA CHARITÉ.

D. Qu'est-ce que la, charité ?

R. La charité est une vertu que le Saint-Esprit répand dans notre cœur, par laquelle nous aimons Dieu par-dessus toute chose et notre prochain comme nous-mêmes.  

D. Qui est notre prochain?

R. Tous les hommes, spécialement les catholiques.

D. Pourquoi tous les hommes ?

R. Parce que tous ont été faits à l'image de Dieu et rachetés par la mort du Christ.

D. Pourquoi spécialement les catholiques ?

R. Parce qu'ils sont avec nous membres de l'Église.

D. Qu'est-ce qu'aimer Dieu par-dessus toutes choses ?

R. C'est être disposé à tout sacrifier plutôt que de perdre l'amour et la grâce de Dieu par le péché mortel.

D. Qu'est-ce qu'aimer notre prochain comme nous-mêmes?

R. C'est lui vouloir le même bien qu'à nous-mêmes , et ne lui causer aucun tort.

D. Où se trouve ce commandement ?  

R. Il est à la fois dans l'ancienne Loi et dans la Nouvelle : Vous aimerez le prochain comme vous-même. (Matthieu 12, 38.)

D. Quel est le plus grand acte de charité ?

R. C'est de donner sa vie pour la gloire de Dieu et pour le salut de notre prochain.

D. Quels sont les effets de la charité ?

R. Elle efface les péchés et donne à l'âme la vie spirituelle : Celui qui n'aime point , demeure dans la mort ( 1 Jean 3, 14; ) la charité efface la multitude des péchés, etc..

Instruction. La divine charité n'est pas un amour naturel mais surnaturel ; car elle procède directement de Dieu qui est la charité même , et elle est infuse au baptême par le Saint-Esprit dans nos cœurs. Elle est la plus excellente de toutes les vertus , car elle donne la vie à toutes les autres comme l'âme donne la vie au corps. De sorte que, le bien que je fais ne me sert de rien, si dans ce moment la charité n'habite en mon âme. Quand j'aurais toute foi possible , jusqu'à transporter les montagnes, si je n'ai point la charité, je ne suis rien. ( 1 Corinthiens 13 , 2.J Ainsi en est-il de tous les autres dons et vertus. « Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre âme , de toutes vos forces et de tout votre esprit, et votre prochain comme vous-même.» (Luc, 10, 27; Matthieu 22, 37.) Tels sont les deux grands commandements ou préceptes de charité par lesquels nous accomplirons la loi et les prophètes ; la vie éternelle en est la récompense. Aimer Dieu de tout votre cœur, c'est l'aimer sincèrement. L'aimer de toute votre âme , c'est employer à son service toutes vos facultés intérieures. L'aimer de toutes vos forces, c'est le servir par toutes nos puissances extérieures et nos actions.

L'aimer de tout notre esprit ; c'est tenir notre esprit constamment fixé sur lui dans une sainte contemplation et penser que nul n'est aussi aimable que lui. A cet amour nous devons joindre une pieuse crainte ; nous devons l'aimer comme un père et le craindre comme notre Dieu. Pour aimer notre prochain comme nous-mêmes, il faut le regarder comme un autre nous-même , comme un ami fait à l'égard de son ami. Il faut lui vouloir le même bien qu'à nous , et agir envers lui comme nous voudrions qu'on agît envers nous. En un mot, nous devons trouver dans notre amour pour nous-même la règle de notre amour pour notre prochain.

Cette charité universelle pour l'humanité repose sur divers motifs ; 1° C'est le grand commandement de Dieu ; 2° Tous les hommes sont créés à l'image de Dieu, et comme Dieu veut que chacun de ceux qu'il a créés soit sauvé, nous devons avoir le même désir au fond de nos cœurs ; 3° Le Christ est mort pour tous les autres hommes aussi bien que pour nous ; 4° Tous ont été créés pour la même fin , et doivent se réunir au sein d'une commune gloire. Ce sont là certainement de puissantes raisons pour montrer que notre charité doit s'étendre à tous les hommes, juifs, samaritains, chrétiens, amis et ennemis. Nous devons aimer toute l'humanité pour l'amour de Dieu, puisque tous les hommes sont ses créatures, et que souvent même ceux que nous taxons d'ennemis peuvent jouir de l'amitié et de la faveur de Dieu. Mais en premier lieu, selon l'ordre de la charité, nous devons aimer ceux qui sont le plus rapprochés de nous et leur faire du bien lorsqu'ils sont dans le besoin , préférablement à tous autres : ainsi en est-il de nos père et mère, de nos frères et sœurs, etc.

Après eux, nous devons aimer et secourir de préférence tous ceux qui partagent notre foi, les membres de notre famille religieuse ; enfin, il faut aimer notre prochain quel qu'il soit, mais principalement celui qui a le plus besoin de notre assistance soit corporelle, soit spirituelle. Nous devons témoigner notre amour, non pas en paroles seulement , mais par les actes et en réalité. C'est à ces signes et à eux seuls que nous pouvons reconnaître avec assurance que la charité règne dans nos cœurs ; car si elle y réside , notre vie la manifestera par les œuvres ; et si elle n'agit pas , il faut en conclure que nous ne l'avons pas. Car la divine charité , dit saint Grégoire, opère de grandes choses là où elle existe. De même qu'un homme se juge à ses actions, l'amour de Dieu se reconnaît à l'observance des commandements, et l'amour du prochain , par le soulagement qu'on apporte à ses peines corporelles et spirituelles , en donnant du pain à celui qui a faim, de l'eau à celui qui a soif, un vêtement à celui qui est nu, etc.; en corrigeant les pécheurs, en instruisant les ignorants, en empêchant qu'ils ne perdent leurs âmes.

Voilà ce que nous enseigne la divine charité , et là où existe cette charité , elle efface une multitude de péchés et d'imperfections ; elle donne la vie spirituelle à l'âme , elle nous conduit de la mort à la vie éternelle. Dieu a dit : Fais cela et tu vivras.

Exhortation. 0 chrétien, la charité est donc un don précieux, une vertu que nous devons cultiver par-dessus toute autre. C'est une des infinies perfections de Dieu ; car Dieu est charité. Rien ne nous élève plus près de Dieu que le divin amour ; rien ne nous unit plus étroitement à lui : Celui qui demeure dans la charité, demeure en Dieu. (1 Jean, 4, 16.) Vous n'avez autre chose à faire dans la vie spirituelle , que d'acquérir et d'augmenter cette vertu qui élève toutes les autres perfections avec elle ; car elle est la vie de l'âme et l'âme de toute vertu. Sans la charité , vous restez mort à Dieu et sans espérance du bonheur futur. Que l'amour de Dieu avant tout possède donc votre cœur. Ne faites rien , ne dites rien , n'ayez aucune pensée qui lui déplaise ; car pour que son amour entre dans votre âme, il faut que le péché en soit banni. Que votre charité embrasse le prochain; l'amour de Dieu et celui du prochain sont inséparables. Que l'amour de Jésus pour vous soit la règle de votre amour pour le prochain, et vous ne risquerez jamais de vous égarer sur ce point.

HISTOIRES.

L'amour de Dieu ; ses caractères. — Pour bien aimer Dieu, il faut que le cœur cesse d'être attaché aux créatures. « Détachez votre cœur des choses de la terre, disait sainte Thérèse, et vous trouverez Dieu. » Saint François, dans son style pittoresque, exprime cette même pensée d'une manière aussi juste que saisissante : « Quand une maison est en feu, on jette tout par les fenêtres. Il en est ainsi d'une âme que l'amour de Dieu enflamme : elle se détache de tout ce qui est créé. » (Esprit de S. François de Sales.)

Voilà la puissance de l'amour divin ; en voici la douceur. « Seigneur, disait un solitaire à Dieu , dans sa naïve simplicité , vous m'avez trompé! Je n'envisageais, à votre suite, que de lourdes croix à porter, je ne voyais devant moi que des jours de pénitence et de deuil; et voilà que j'éprouve la joie la plus vive et la consolation la plus douce : vous m'avez trompé! » ( Vies des Pères du désert.)

L'amour du prochain. — Pour avoir été cité mille fois , il est un trait qui ne laisse pas d'unir à un vif intérêt un caractère frappant de vérité. L'apôtre de la charité, saint Jean, parvenu à une extrême vieillesse , ne pouvait plus marcher ; il se faisait porter par ses disciples à l'assemblée des fidèles , et là , au lieu de longs discours, il se contentait de répéter : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres. » Ennuyés de l'entendre répéter éternellement cette même sentence , ses disciples lui dirent : « Maître , pourquoi nous dites-vous donc toujours la même chose? » Jean leur fit une réponse digne de l'apôtre que le Seigneur aima d'un amour de prédilection : La charité est le précepte du Seigneur; si on l'observe bien , seul il suffit pour le salut. Saint Paul a dit aussi : Celui qui aime le prochain accomplit la loi. ( St Jérôme. )

Cette charité si bien recommandée par l'Apôtre , les saints l'ont pratiquée souvent avec un héroïsme qui étonne la nature. Un saint, appelé Sérapion, ayant rencontré un pauvre couvert de haillons , lui donna son manteau ; plus loin , il en trouve un autre glacé de froid : il se dépouille de son habit de dessous, et le lui donne. Son disciple le voyant assis dans cet état, tenant en main le saint Évangile , lui dit : « Mon père , qui vous a dépouillé de la sorte? — Celui-ci, » répondit-il, en montrant le livre des Évangiles. Peu de temps après, il rencontre un pauvre, et vend son livre pour lui faire l'aumône. « Mon père , où est donc votre Évangile? lui demanda son disciple. — Mon fils, reprend le saint vieillard, j'y ai lu ces paroles de mon Sauveur : Vends ce que tu as, et donne -le aux pauvres , et j'ai obéi. » Sérapion fit plus : Il se livra à une pauvre veuve , pour qu'en le vendant elle eût de quoi nourrir ses enfants mourants de faim. ( Histoire ecclésiastique. — Vies des Saints. )

Quel est notre prochain, et qu'est-ce qui nous porte à tant faire pour lui ? Le prochain , c'est notre frère selon la nature , et plus encore selon la grâce ; c'est la créature privilégiée de Dieu ici-bas, son image vivante, le prix du sang de Jésus-Christ; et si le prochain est dans la grâce , le membre vivant de Jésus-Christ. Maintenant nous comprendrons sans peine ces admirables paroles de Dieu à sainte Catherine de Gènes. « Mon Dieu , vous voulez que j'aime mon prochain, mais je ne puis aimer autre chose que vous, » lui disait-elle. Le Seigneur lui répondit : Ma fille, celui qui m'aime, aime ce que j'aime ; en aimant le prochain pour moi, il me prouve qu'il m'aime. ( Vie de sainte Catherine de Gènes. )

Œuvres de la charité. — Attendri au spectacle des galériens dont les misères morales et physiques navrent son cœur , Vincent de Paul obtient de leur faire des missions: il part, subjugue ces galériens par la puissance de sa charité : tantôt il les assiste dans leurs besoins, tantôt il baise leurs fers ; et à force de charité et de tendresse , il fait de ce repaire de tous les vices un temple , où sans cesse retentissent les louanges de Dieu dans des bouches vouées naguère au blasphème. Cependant parmi ces forçats qu'il soumet à la Providence , il en trouve un dont le désespoir lui résiste. C'est un jeune homme condamné par des lois fiscales à trois ans de captivité sur les galères, et inconsolable de la misère où il a laissé sa femme et ses enfants. Vincent de Paul ne peut tarir ses larmes , il va briser ses fers ; il profite de l'obscurité dans laquelle il s'est
caché pour déployer toute la charité qui l'enflamme. Il sollicite , il obtient la liberté de cet infortuné par un moyen que l'imagination n'oserait prévoir : à l'exemple du saint évêque de Nole, saint Paulin, qui, pour rompre la chaîne d'un esclave en Afrique, se réduisit volontairement en esclavage , Vincent de Paul se met lui-même à la place de ce jeune forçat. Le bruit d'un si étonnant sacrifice s' étant répandu, Vincent de Paul quitte Marseille, et trop heureux de trouver un refuge contre l'admiration publique qui le poursuit, cet humble héros du christianisme court ensevelir avec joie son importune réputation dans l'obscurité de la cure de Clichy. ( Le Card. Maury, Panégyrique de saint Vincent de Paul. )


Il est bon d'entendre les exhortations de l'apôtre de la charité, et d'admirer les exemples des Sérapion et des Vincent de Paul, mais il vaut mieux encore les mettre en pratique. — Un jeune homme ayant entendu, en théologie, expliquer ce passage de l'Écriture : Vous aimerez le Seigneur de tout votre cœur, etc...., se leva subitement et partit. Maîtres, disciples, tous s'empressent de lui demander le motif de cette démarche : Avant de continuer à écouter, je veux mettre en pratique ce que je viens d'entendre, répondit-il ; et à dater de ce moment il renonça au monde pour entrer dans un ordre austère. ( Schmid et Belet. )


DES COMMANDEMENTS EN GÉNÉRAL.


D. Combien y a-t-il de commandements?

R. Dix.

D. Quelle est la principale fin des commandements ?

R. C'est de nous enseigner l'amour de Dieu et du prochain : Celui qui aime a accompli la loi.

D. Qui a donné les commandements?

R. Dieu lui-même les a donnés dans l'ancienne loi et le Christ les a confirmés dans la nouvelle.

D. Pourquoi Dieu a-t-il donné les commandements à Moïse au milieu des tonnerres et des éclairs?

R. Pour avertir les Israélites d'être attentifs à les observer.

D. Est-il possible de les observer tous?  

R. Oui, cela est possible, avec le secours de la grâce de Dieu.

D. Sommes – nous obligés, sous peine de l'enfer, d'observer les commandements?

R. Oui, car Jésus a dit : Si vous voulez entrer dans la vie, gardez les commandements. (Mathieu 19, 17)

Instruction.
Le Décalogue ou les dix commandements ont été donnés à l'homme par l'autorité de Dieu lui-même, comme une règle pour gouverner ses actions extérieures,,
aussi bien que ses pensées et ses affections intérieures, conformément à la volonté de son créateur.  Et il n'y a sur la terre aucune loi aussi excellente : 1 - Sous le rapport de son auteur, c'est le doigt de Dieu qui l'a écrite : lors de la création du monde, Dieu imprima une loi naturelle dans l'âme de l'homme ; il lui donna lumière et connaissance pour le diriger dans ce qu'il devait faire et ce qu'il devait éviter. Mais, par une longue habitude du péché, la loi s'obscurcit en quelque sorte dans son cœur; pour que personne, par une feinte ignorance, ne pût s'excuser de vivre dans ce triste état, Dieu voulut que ce qui était écrit auparavant dans les âmes fût visiblement gravé sur la pierre et placé sous les yeux ; 2° cette loi est la plus excellente de toutes si l'on considère le contenu du décalogue et la perfection de ses préceptes ; elle rend l'homme agréable à Dieu et un véritable objet de complaisance à ses yeux, puisqu'elle commande la pratique de la vertu et défend de commettre aucune action mauvaise.

3° Quant à sa fin elle n'a rien de transitoire , mais au contraire elle a pour objet la vie éternelle. Les commandements sont divisés en deux tables : la première comprend les trois premiers commandements et renferme nos devoirs envers Dieu; la seconde se rapporte à nos devoirs envers le prochain. L'accomplissement de ces commandements nous obtient la vie éternelle. Le premier commandement nous prescrit d'être vrais et fidèles serviteurs de Dieu , et, comme tels, de ne rendre à aucun autre le culte qui lui est dû, de n'avoir aucune relation avec ses ennemis, mais de l'aimer et de l'honorer de tout notre cœur. Le second nous ordonne de ne rien dire d'injurieux contre lui , mais au contraire de le révérer et d'adorer même son nom. Le troisième nous commande de lui rendre un culte public et de| consacrer à son service un jour chaque semaine; nous reconnaissons par là sa souveraineté sur nous et le remercions de ses bienfaits.

La seconde table nous apprend comment nous devons nous conduire à l'égard de notre prochain. La charité et la justice exigeant que l'on rende à chacun ce qui lui est dû, le
quatrième commandement nous ordonne d'aimer, d'honorer nos parents et nos supérieurs tant spirituels que temporels et de leur obéir. De plus, suivant les mêmes lois, il faut agir envers chacun comme nous voudrions que l'on agît envers nous et par conséquent ne faire de tort à personne. Le cinquième commandement nous défend de tuer ou de blesser volontairement notre prochain. Le sixième nous défend de commettre l'adultère ou d'outrager l'époux dans la personne de l'épouse. Le septième nous défend de voler, ou de causer du dommage au prochain dans ses biens. Le huitième nous défend de rendre de faux témoignages ou de blesser le prochain dans sa réputation. Enfin, comme la charité nous oblige à souhaiter aux autres , sincèrement et du fond du cœur , toute sorte de bien, le neuvième et le dixième commandements nous défendent d'accueillir aucune mauvaise pensée contre lui dans nos cœurs : Tu ne convoiteras point la femme de ton prochain; tu ne convoiteras point les biens de ton prochain.

Quoique la loi de Moïse soit abolie, nous sommes obligés de suivre ces commandements , car Dieu , le suprême législateur les a imprimés comme loi de nature dans l'âme de l'homme, avant de donner la loi mosaïque; et d'ailleurs ils sont dans l'Évangile renouvelés et confirmés par l'autorité du Christ. Ils ont été donnés à Moïse sur le Sinaï au milieu des foudres et des éclairs pour porter le peuple par la sévérité et la crainte à les observer fidèlement; ils sont confirmés par le Sauveur qui nous excite à les suivre par sa grâce et son amour.

Les commandements ne sont pas impossibles à observer, comme quelques-uns l'ont faussement affirmé : car Dieu n'exige pas l'impossible, et beaucoup les ont effectivement observés, comme Zacharie et son épouse Élisabeth : Tous deux étaient justes devant Dieu, marchant dans la voie de tous les commandements et de toutes les lois du Seigneur, sans qu'on leur pût rien reprocher. (Luc, 1, 6.) Et le Seigneur n'a-t-il pas dit : Mon joug est doux et mon fardeau léger. ( Matthieu 11, 30. ) Il n'est donc personne qui ne puisse les accomplir avec le secours de la grâce de Dieu et une volonté bien disposée : Je puis tout, disait l'Apôtre, en celui qui me fortifie.

Exhortation. Imprimez profondément, ô chrétien, les dix commandements dans votre âme, et faites-en le sujet de vos sérieuses réflexions, de vos pieuses méditations, puis
qu'ils vous ont été tracés par l'autorité de Dieu pour être la règle de votre vie et de vos actions. Encouragés par la perspective de la glorieuse couronne préparée à votre obéissance , demandez sans cesse le secours de la grâce pour les accomplir parfaitement. Faites cela et vous vivrez, dit notre divin législateur. Appliquez - vous donc , en premier lieu, à observer le commandement qui se rapporte immédiatement à Dieu même, et ne rendez pas à un autre les hommages qui lui sont dus. Aimez -le par - dessus toutes choses, révérez-le , adorez-le , car saint et redoutable est son nom. Adorez-le chaque jour ; mais surtout le jour consacré à son service. En second lieu, aimez votre prochain comme vous-même. Rendez honneur à qui est dû l'honneur, c'est-à-dire à vos parents et supérieurs. Ne faites de tort à personne, ne méditez aucun mal contre les autres, ni dans vos pensées, ni surtout dans votre cœur. Tels sont les devoirs indispensables de tout chrétien, qui désire plaire à Dieu, accomplir sa volonté et vivre éternellement avec lui dans la gloire.


LES COMMANDEMENTS DE DIEU.

Récitez les commandements de Dieu, tels qu'il les a donnés à Moïse.

1° Je suis le Seigneur, votre Dieu , qui vous ai tiré de la terre d'Égypte ; vous n'aurez point d'autre Dieu devant moi.

2° Vous ne prendrez point le nom du Seigneur votre Dieu en vain.

3° Souvenez-vous de sanctifier le jour du Seigneur.

4° Honorez votre père et votre mère, afin que vous viviez longtemps sur la terre.

5° Vous ne tuerez point.

6° Vous ne commettrez point d'adultère.

7° Vous ne déroberez point.

8° Vous ne porterez point de faux témoignage.

9° Vous ne désirerez point la femme de votre prochain.

10° Vous ne désirerez point sa femme, ni son serviteur, ni sa servante.

Récitez les mêmes commandements selon l'usage.

Un seul Dieu tu adoreras , Et aimeras parfaitement.
Dieu en vain tu ne jureras , Ni autre chose pareillement.
Les Dimanches tu garderas. En servant Dieu dévotement.
Tes père et mère honoreras, Afin de vivre longuement.
Homicide point ne seras, De fait ni volontairement.
Luxurieux point ne seras De corps ni de consentement.
Le bien d'autrui tu ne prendras Ni retiendras à ton escient.
Faux témoignage ne diras Ni mentiras aucunement.
L'œuvre de chair ne désireras, Qu'en mariage seulement.
Biens d'autrui ne convoiteras, Pour les avoir injustement.

HISTOIRES.

Commandements de Dieu en général : ce qu'ils renferment. Lors de la persécution de Dioclétien , il y avait un homme très-recommandable par sa foi et sa vertu. On le traîna au tribunal du gouverneur, qui dans son impiété et son ignorance, tourna en raillerie notre religion sainte. « Ceux-là sont faibles et légers, répond Pollion, qui abandonnent leur Créateur pour suivre de misérables superstitions. Quant aux nôtres, ils sont si fermes dans leur foi que rien ne peut les porter à transgresser les commandements du
Roi éternel. — De quel roi, de quels commandements me parlez-vous, dit le gouverneur. — Des commandements du Roi éternel , répliqua le martyr de Jésus-Christ. — A quoi vous obligent-ils? — A n'adorer qu'un seul Dieu maître du ciel.

Ils apprennent que le bois et les pierres ne sauraient être des dieux ; ils corrigent les méchants ; ils fortifient les justes ; ils enseignent aux vierges à tendre à la perfection de leur état, aux personnes mariées à vivre selon les règles de la chasteté conjugale ; ils portent les maîtres à commander avec douceur , et les esclaves à obéir en conscience et
avec amour ; ils ordonnent aux sujets d'obéir aux puissances dans les choses justes et raisonnables. Ils nous enseignent qu'il faut honorer son père et sa mère, servir ses amis, pardonner à ses ennemis, exercer l'hospitalité envers les étrangers, assister les pauvres , avoir de la charité pour tous les hommes , ne faire de mal à personne, souffrir patiemment l'injustice; n'avoir aucune attache au bien qu'on possède, ne pas même désirer celui d'autrui, croire enfin qu'une éternité bienheureuse sera le partage de celui qui aura le courage de mépriser la mort que vous pouvez donner. » Voilà le sommaire des commandements de Dieu ! Une si belle profession de foi eût touché le cœur d'un juge moins endurci ; mais celui-ci ne sut que condamner Pollion à être brûlé vif.

Qui les a donnés, ces commandements? — C'est Dieu sur le Sinaï , au milieu des foudres , des tonnerres et des éclairs ( Exode ch. 19); c'est Jésus - Christ , pendant sa vie mortelle; l'Esprit-Saint à sa descente sur les apôtres, etc. (L'Évangile, surtout Discours sur la montagne) Voyez dans ces symboles et ces appareils divers le caractère propre à la loi ancienne , et à la loi nouvelle , quoique substantiellement les mêmes. L'une est gravée sur la pierre, l'autre dans les cœurs; l'une est une loi de terreur et de servitude , l'autre , d'amour et de liberté; l'une a pour sanction les punitions et les faveurs temporelles, l'autre, les châtiments et les récompenses spirituelles; l'une dépourvue de grâce , s'appelle la loi écrite , l'autre, soutenue puissamment par ce secours divin, s'appelle la loi de grâce. ( voyez saint Paul )

Maintenant qui a confirmé cette loi. C'est Dieu toujours et par des miracles sans nombre , et par une providence souvent sensible sur les bons et les méchants, et par
des œuvres qui caractérisent, à ne s'y tromper jamais, et les vrais serviteurs de Dieu, et les transgresseurs de sa loi. (Voir la sainte Bible, l'Histoire Ecclésiastique, la Vie des saints, etc.)

Peut-on observer les commandements de Dieu? Oui, assurément : Dieu n'impose pas à nos faibles épaules des fardeaux intolérables. Aussi , lorsque les passions d'Augustin le retenaient par la robe de sa chair, en lui criant : « Tu nous as abandonnées ! de ce moment nous ne serons plus jamais avec toi ? Et de ce moment telle et telle chose ne te sera plus permise?... Mais pourras -tu vivre sans nous, sans ces plaisirs?» La chasteté, lui apparaissant avec un front serein et pur , lui adressant de douces et d'attrayantes paroles , lui-disait, en lui montrant des enfants et des vieillards, des vierges et des jeunes gens : Ne pourras-tu pas ce qu'ont pu ceux-ci et celles - là? Et ce qu'ils ont pu, est-ce par eux-mêmes? n'est-ce pas dans le Seigneur leur Dieu ? etc. ( St. Augustin, Confess. liv. VIII, chap. 11. )

Nous pouvons observer les commandements par l'énergie de notre volonté. — « Comment pourrais-je aller au ciel, demandait un jour une sœur de saint Thomas à son frère? — En le voulant, répondit le Docteur angélique. Oui , si vous le voulez , vous marcherez dans la voie du salut ; si vous le voulez ; vous y ferez des progrès rapides. » Ne rejetez donc pas vos désordres sur le manque de grâces , mais bien sur la défaillance de votre volonté à la grâce qui ne lui manque jamais. ( Vie de saint Thomas, Godescard, etc. )

Nous le pouvons surtout en Celui qui nous fortifie, et opère par sa grâce des miracles de piété et de ferveur. Je veux surpasser les hommes les plus célébrés , disait Henri IV à son précepteur. — Quel gage m'en donnez- vous ? — Eh ! ma parole, doutez-vous de ma sincérité ! — Voilà de terribles engagements ? — Tout dépend du cœur qu'on y met : quand j'apporte de l'ardeur au jeu de paume , j'y réussis toujours. — Donc les grands hommes pouvaient éviter ces faiblesses , disons le mot , ces affreux désordres que nous remarquons en eux? — Bien sûr, repartit vivement le jeune prince.» Alors le précepteur prit un ton grave et dit : « Apprenez, mon cher enfant, que vous raisonnez en païen et non en chrétien : sachez donc que par lui-même, tout homme est incapable, je ne dis pas de pratiquer une bonne action, mais d'en former le désir. Ainsi , c'est Dieu , sans doute, qui vous inspire cette noble pensée de surpasser les grands hommes de tous les siècles, de tous les pays. Mais c'est lui seul aussi qui peut vous donner la force de l'exécuter. » ( Péréfixe, Vie d'Henri IV. )

Est-on absolument obligé d'observer les commandements de Dieu? Oui, nous y sommes obligés pour la gloire de Dieu. Un seigneur arien, puissant auprès de l'empereur, comme chef de ses armées, lui demanda une église pour ses coreligionnaires. « J'y consens, répond Arcade , si vous pouvez déterminer Chrysostome. » Alors on mande le patriarche au palais , et on le presse d'accorder une église. Jamais, répondit-il, non, jamais ! Pour intimider le prélat, l'arien fait approcher, fait pénétrer ses troupes. Mais un de ses officiers l'arrête et lui dit : « C'est en vain que vous cherchez à épouvanter Chrysostome; je le connais : il ne craint ni la confiscation, ni l'exil, ni la mort; il ne redoute que d'offenser Dieu, que de commettre le péché? » Ah! il savait, ce grand homme, glorifier et faire glorifier le Seigneur en observant ses commandements ! ( Vie de St. Chrysostome, Histoire de l'Église. )

Nous y sommes obligés pour notre propre bonheur. — Car en dehors du service de Dieu, il n'y a que dégoût et souffrance. Salomon, après avoir bu à la coupe de tous les plaisirs, s'écrie: Vanité des vanités , tout n'est que vanité , excepté aimer Dieu et ne servir que lui seul. Saint Paul surabonde de joie dans toutes ses tribulations, François-Xavier, inondé de délices, s'écrie : Assez! assez! Seigneur. Au reste , lisez au Deutéronome, chapitre 28, la frappante description des châtiments dont sont menacés les violateurs de la loi, et des récompenses réservées aux fidèles observateurs des divins commandements. Puis, sur l'invitation de l'homme de Dieu, Moïse, choisissez la malédiction, ou la bénédiction, la mort ou la vie. Votre bonheur et présent et futur dépend de l'observance des commandements de Dieu. Donc soyez-y fidèle.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mer 16 Nov 2016 - 12:28

PREMIER COMMANDEMENT DE DIEU.

Je suis le Seigneur votre Dieu.

SECTION I.

D. A quoi sommes-nous obligés par ce commandement ?

R. A aimer, servir et adorer le seul Dieu vivant et véritable, lui seul et aucun autre.

D. Que nous défend ce commandement?

R. Il nous défend d'adorer des idoles ou de rendre à une créature l'honneur dû à Dieu.

D. Quel est l'honneur dû à Dieu?

R. C'est un honneur suprême par lequel nous le reconnaissons et l'adorons comme notre créateur, notre rédempteur et notre dernière fin.

Instruction. Dieu a dit : Je suis le Seigneur, votre Dieu, qui vous ai tiré de la terre d'Égypte et du séjour de la servitude. (Exode, 20.) Ces paroles où l'on voit une figure de notre délivrance de l'esclavage du démon (ange déchu), sont comme le préambule des commandements. Dieu y déclare qu'il est notre Dieu et notre souverain Seigneur ; que nous sommes, en conséquence, obligés de le servir en toute diligence et dévotion, et d'observer inviolablement toutes ses lois.

Le premier commandement est celui-ci : Vous n'aurez point d'autre Dieu devant moi. L'honneur que nous sommes obligés par là de rendre à Dieu seul , est appelé Latrie, et l'on ne peut sans idolâtrie le rendre à un autre : car c'est par ce culte que nous adorons Dieu comme notre créateur, notre rédempteur et notre dernière fin. Aussi était-il sévèrement défendu aux Israélites de fabriquer aucune idole, dans la crainte que ce ne fût pour eux une occasion d'abandonner le culte du vrai Dieu. Vous ne fabriquerez pour vous aucun ouvrage de sculpture , c'est - à - dire aucune idole , selon l'interprétation des Septante. Ce commandement établit donc la vraie religion et proscrit les religions fausses. Car Dieu ne nous ordonne pas seulement de le servir par le véritable culte de Latrie; mais, de plus, il nous interdit de rendre ce culte à nul autre : Vous n'aurez point d'autre Dieu que moi, vous confesserez que moi seul je suis Dieu et vous m'honorerez comme tel ; vous n'en honorerez ou adorerez aucun autre comme Dieu.

En outre, bien qu'il nous soit prescrit de rendre honneur à qui l'honneur est dû, nous ne devons cependant honorer personne, si ce n'est par rapport à Dieu; il est si jaloux de cet honneur suprême qu'il menace de punir sévèrement, jusqu'à la troisième et quatrième génération, ceux qui l'adressent à un autre, ce qu'il appelle le haïr. Il promet, au contraire, de récompenser et de couvrir de sa miséricorde ceux qui l'aimeront, l'adoreront et seront fidèles à ses commandements.

Exhortation. Souvenez - vous donc, ô chrétien, que le premier et le plus grand de tous les commandements, c'est de croire au vrai Dieu, d'espérer en lui et de l'aimer par dessus toute chose. Si donc vous voulez adorer Dieu, vous devez d'abord croire, avec une parfaite soumission, tous les mystères de foi qu'il a révélés. Vous devez vous attacher à lui avec une ferme confiance, et reconnaître, dans toutes les voies de sa providence, que sans lui tout espoir dans les créatures est une déception. L'observation de ses commandements est la meilleure preuve que vous l'aimez par-dessus toutes choses. Gardez- vous d'un amour excessif pour les créatures qui souvent, sans même que nous nous en apercevions, nous entraînent à la haine et au mépris de Dieu.

HISTOIRES.

Ce que prescrit le premier commandement : l'adoration. — Voici comment saint François de Sales adorait Dieu , parfois des nuits entières : « Qui êtes-vous, Seigneur, et qui suis-je ? Ah ! que vous êtes grand , et que je suis peu de chose ! Vous êtes le Créateur de l'univers, et je ne suis qu'une chétive créature ; vous êtes le maître absolu de toutes choses, et je ne suis qu'un serviteur très-indigne; vous êtes tout et je ne suis rien ; et, pour tout dire en un mot, vous êtes Celui qui est, et moi je suis comme si je n'étais pas. Comment , vous étant ce que vous êtes , et moi , ce que je suis , oserais-je paraître devant vous ? » ( Cossart. )

On adore Dieu par les trois vertus théologales , conformément à la pratique suivante que nous a léguée un martyr : « Je n'adore que le Dieu véritable, disait-il à ceux qui voulaient le contraindre à sacrifier aux idoles : je l'adore par la foi , croyant son existence et ce qu'il a dit ; je l'adore par l'espérance , j'espère en sa bonté , et ce n'est qu'en lui que j'espère ; je l'adore par l'amour, je l'aime de tout mon coeur, et je n'aime rien que pour lui. » ( Catéchisme de l'Empire, )

Ce que défend le premier commandement : l'idolâtrie, la superstition, etc. — Des Indiens convertis au christianisme avaient donné à leur fils une éducation solidement chrétienne. Un jour que cet enfant se trouvait dans une compagnie des principaux du lieu , l'un d'eux se mit à plaisanter sur la religion : l'enfant défendit sa croyance. Après quelques altercations de part et d'autre, on lui dit de montrer son Dieu : Mon Dieu, , répondit l'enfant , le Dieu que j'adore, est le Créateur de l'univers : il est un pur esprit, et je ne puis vous le montrer ; mais je vous montrerai bientôt le vôtre. A l'instant il prit une pierre sur laquelle il barbouilla une figure humaine ; puis, l'ayant posée à terre, avec un air de cérémonie, d'un coup de pied il la repoussa loin de lui , en disant : Voilà le Dieu que vous adorez! Pouvait-on mieux montrer la folie du culte idolâtrique , défendu par le premier commandement de Dieu ? (Lettres édifiantes, etc..)

La superstition est injurieuse à Dieu, funeste à l'homme, absurde en elle-même. — Les trois traits suivants vont nous le prouver. Le roi d'Israël, Ochosias, étant tombé du haut d'une fenêtre, envoya consulter Beelzébub, faux dieu d'Accaron, pour savoir s'il relèverait de-cette maladie. Le prophète Elie alla, de la part de Dieu, dire aux envoyés de ce prince : « N'y a-t-il pas de Dieu à consulter en Israël ? C'est pourquoi , voici ce que dit le Seigneur à l'adresse de votre maître : Vous ne relèverez point du lit où vous êtes étendu, mais vous mourrez certainement. » (IV Rois, 1, 3 à 6.)

SECTION II.

Vous n'aurez pas de dieux étrangers devant moi.

D. Ce commandement nous défend-il d'honorer les saints et les anges?

R. Nullement, il nous défend seulement de leur rendre les honneurs divins.

Instruction. Il n'y a certainement personne d'assez peu sensé pour croire que l'Église nous enseigne à croire que les anges et les saints sont Dieu, ou que nous les honorons
comme nous honorons Dieu. Toutefois, il est vrai qu'un certain honneur leur est dû ; car saint Paul n'eût pas dit : Vous rendrez honneur à qui l'honneur est dû. A qui donc est dû l'honneur? Aux rois et à ceux qui gouvernent sous leur autorité. Honorez le roi., parce que son pouvoir est de Dieu.

S'il est vrai encore, selon la parole de saint Paul, que l'on doive honorer et glorifier quiconque travaille bien, s'il est vrai que l'on accorde légitimement aux hommes en cette vie des honneurs civils proportionnés à leur rang et à leur dignité, à combien plus forte raison l'honneur n'est - il pas dû aux hommes vertueux et saints, et plus encore aux bienheureux du ciel, en considération de leur étroite union avec Dieu , qui les place dans l'état le plus éminent qu'il soit possible de concevoir ! Toutefois cette glorification retourne entièrement à Dieu, auquel les saints sont redevables de toutes les grâces qu'ils ont reçues en cette vie, comme de la gloire dont ils jouissent maintenant; il est donc clair que l'hommage rendu aux bienheureux se rapporte totalement à Dieu à qui ils doivent leur excellence.

Louez le Seigneur dans ses saints , dit l'Écriture. C'est pour cela que nous invoquons leur intercession, ne doutant pas qu'ils ne voient en Dieu tous nos besoins, que, dans leur état de béatitude, ils n'aient plus de crédit auprès de lui pour nous procurer ce que nous demandons et de charité pour l'exciter en nous : car la charité subsiste toujours. (1 Cor. 13, 8.) Le culte des reliques des saints, cette pratique aussi ancienne que l'Église même, repose sur les mêmes fondements : leurs corps ont été les membres du Christ et les temples du Saint-Esprit; dans ces sanctuaires d'innombrables sacrifices d'amour et d'adoration ont été offerts à Dieu ; enfin ils ressusciteront un jour dans la gloire. Aussi de tout temps les habitants des villes ou centres dépopulations chrétiennes ont-ils estimé comme un grand trésor la possession des corps des saints et des martyrs qui reposent au milieu d'eux. Ils les considéraient comme très-précieux pour le corps et pour l'âme. Pour le corps, à cause des fréquentes guérissons opérées par les saintes reliques. Pour l'âme , car le spectacle des corps sacrés, déposés dans les chasses, était le monument le plus frappant qu'ils pussent conserver de ces saints personnages, et il leur rappelait sans cesse les bons exemples qu'ils en avaient reçus de leur vivant , la foi et la doctrine qu'ils avaient enseignées, leurs vertus, leur mortification, leur charité, leur
humilité, leur pureté, etc..

Comment donc pourrions-nous refuser de vénérer ces saintes reliques, du moment que nous voyons Dieu s'en servir, comme d'instruments, pour opérer dans l'Église tant de miracles et de prodiges, en guérissant les malades et même en rappelant les morts à la vie? Les mouchoirs et les linges que Paul avait touchés ne chassaient-ils pas les démons et ne guérissaient-ils pas les malades? (Actes, 19, 12. ) Un mort n'est-il pas ressuscité par le simple contact des ossements du prophète Élisée. (4 Rois, 13, 21) Ils sont donc aveuglés par d'étranges préjugés, ceux qui croient découvrir quelqu' idolâtrie dans ces pieuses pratiques. Les martyrs ne sont -ils pas morts pour renverser l'idolâtrie , et les saints ne l'ont- ils pas ardemment combattue? Ceux donc qui vénèrent leurs reliques ne sont assurément pas idolâtres ; au contraire ils proclament par là qu'ils partagent la foi des saints qu'ils honorent; en vénérant le saint, ils manifestent leur haine de l'idolâtrie , et honorent les restes mortels de ceux à qui ils doivent, après Dieu, leur foi et leur religion.


HISTOIRES.


Honneur aux anges et aux saints. — Une femme idolâtre se convertit au christianisme et conçut une vive dévotion pour saint François Xavier, à tel point qu'au baptême elle fit donner ce nom à son fils bien aimé entre tous , sûre que le glorieux apôtre veillerait sur les jours et l'innocence d'une tête si chère. Un an après , le tonnerre tomba sur lui et ses deux compagnons pendant qu'ils gardaient les troupeaux. Les mères idolâtres firent tout bonnement enterrer leurs enfants. Mais la femme chrétienne porta le corps glacé de son petit Xavier devant l'image de son patron , et lui dit avec une simplicité pleine de foi : « N'y aura-t-il aucune différence entre ces mères idolâtres et moi qui fais profession de servir le vrai Dieu de tout mon cœur ? Et puis, n'êtes-vous pas le protecteur de mon fils? Ne vous est -il pas spécialement recommandé? Ah ! je vous en conjure, consolez cette mère affligée : après avoir ressuscité tant de morts, vous pouvez bien encore ressusciter celui-ci. » Elle n'avait pas encore fini sa prière, que les femmes chrétiennes, là présentes, crurent remarquer quelque mouvement dans le corps de Xavier. Un moment après il ouvrit les yeux , et sa mère l'embrassa plein de vie. ( Lettres édifiantes.)

Si l'honneur rendu aux saints n'était pas agréable à Dieu , Dieu le récompenserait-il par de pareilles faveurs? Jeanne d'Orviéto perdit ses parents dans un âge bien tendre encore. Une femme vertueuse déplorait cette perte qui rendait cette pauvre enfant orpheline. Jeanne sourit, et montrant l'image de son ange gardien : « Ignorez-vous, lui dit-elle, que mon ange gardien me sert de père et de mère, et qu'il m'aimera bien plus encore que ne m'ont aimée les bons parents que le Père céleste m'a ravis? » Elle avait raison , et les nombreuses faveurs qui relevèrent à une haute sainteté montrent que la dévotion au saint ange gardien est bénie du Ciel. (D'après Hunold.)

SECTION III

Vous ne vous ferez pas d'images sculptées , etc.; vous ne les adorerez point et ne leur vouerez aucun culte.

Ce commandement ne défend-il pas toute vénération d'images, quelle qu'elle soit? —

Non; il défend seulement de fabriquer des idoles et de les adorer.

Instruction. Les saintes images qui décorent nos églises, sont celles de notre Sauveur, de sa bienheureuse Mère, des saints et des anges, etc.; pour autoriser cette pratique,
nous avons à la fois la parole et l'exemple du Seigneur lui-même , qui a commandé de sculpter deux chérubins d'or battu et de les placer sur l'arche d'alliance , dans son propre sanctuaire. C'est par son ordre aussi que le serpent d'airain fut fabriqué et dressé dans le désert, comme une figure du Christ sur la croix , pour la guérison de ceux qui avaient été mordus par le serpent de feu.

Mais les chérubins ne furent point faits pour être adorés comme Dieu ; leur image avait seulement pour but de rappeler au souvenir du peuple les esprits angéliques qui entourent le trône de Dieu. Que les images et les peintures aient toujours été admises dans la nouvelle loi, c'est ce que prouve évidemment le second concile de Nicée , dont l'autorité est reconnue des églises grecque et latine ; il anathématisa les iconoclastes ou briseurs d'images , qui détruisaient les saintes images par mépris et sous le prétexte qu'on leur rendait un culte d'adoration. Ce concile déclara , en même temps , que les images du Christ et des saints étaient l'objet d'un respect religieux, mais qui n'a point la signification du culte suprême de latrie , exclusivement réservé à la nature divine.

Le concile de Trente en a aussi marqué le caractère en ces termes : « Il faut rendre aux images l'honneur et la vénération qui leur sont dus , non parce que l'on croit en elles
quelque divinité, ou quelque vertu, pour laquelle il faut les honorer, ou qu'il faut leur demander quelque chose et placer en elles quelque confiance , comme le faisaient autrefois les païens qui mettaient leur espérance en leurs idoles , mais parce que l'honneur qu'on rend aux images se rapporte aux originaux , ou personnes qu'elles représentent. » (Concile de Trente, session 25, décret sur les saintes images. )

La doctrine de l'Église est donc que l'on doit respecter les saintes images et les peintures, à raison seulement des personnes qu'elles représentent , dans le but de nous exciter à la dévotion et à l'imitation de leur sainte vie et de leur bienheureuse mort. Elles sont comme des livres qui représentent vivement à l'ignorant tous les mystères de notre Sauveur : sa nativité , sa mort, sa résurrection, son ascension ; et qui rappellent la Vierge Marie, les anges et les saints ; elles aident l'esprit à se préserver des vaines distractions au temps de la prière. C'est donc un grand avantage d'en user, selon l'esprit de l'Église catholique. Lorsque je prie, tout en regardant une image, une peinture , mon cœur est fixé sur Dieu. Pouvez-vous contempler un crucifix, la représentation de notre Sauveur mourant sur la croix, sans penser à l'auteur de la vie, à celui auquel vous êtes redevable de votre rédemption et de votre salut? C'est en lui que nous mettons toute notre espérance , non point dans une image qui ne peut ni voir, ni entendre, ni nous secourir.

Ce n'est donc pas ce salutaire usage des saintes images que le commandement réprouve ; mais la fabrication et l'adoration des idoles : car le mot hébreu pesel , traduit en
anglais par graven thing , chose sculptée , signifie en grec idole. Les septante ont traduit le même mot hébreu en plus de quarante autres endroits par ouvrages sculptés , et ils le traduisent ici par idoles. Quelle raison ont-ils eu d'en agir ainsi , sinon parce qu'ils savaient que le mot pesel en cet endroit a toujours été pris pour idole ou image de faux
dieux ? Aussi le commandement ajoute : Vous ne les adorerez point et ne les servirez point, pour indiquer que la proscription porte sur les idoles, non sur les saintes images. On doit aussi honorer les lieux saints , la Terre-Sainte , par exemple , où le Christ est né et où il a souffert. Et c'est une louable et pieuse coutume de faire un pèlerinage à
des lieux tels que le mont du Calvaire , le mont des Oliviers, etc....

Le roi David le disait en prophétie : Je me prosternerai sur la trace de ses pieds ( Psaume 131 ) ; et Isaïe : Son sépulcre sera glorieux. Si le sol où se trouvaient Moïse et Josué , lorsque les anges leur apparurent, est déclaré dans la Bible saint et digne de vénération , combien plus la terre sur laquelle notre divin Sauveur vécut et mourut pour
nous ! C'est ce qui a porté tant de pèlerins à entreprendre vers ces lieux de si longues et si pénibles voyages. Si la simple pensée de ces lieux vénérés animait à ce point leur foi et enflammait ainsi leur amour, quel effet ne devait pas produire sur eux la vue des saints lieux eux-mêmes ? En résumé , quiconque aime vraiment Dieu , doit à un certain degré honorer tout objet qui a rapport à Dieu et qui est consacré à son service : comme ses temples, ses autels, son saint nom , les sacrements , les vases sacrés , etc., et il est impossible de concevoir qu'il n'y ait pas d'impiété à les dés honorer ou à les profaner.

HISTOIRES.

Honneur aux saintes images. —  Un jour, raconte sainte Thérèse, entrant dans mon oratoire, j'y remarquai une image toute neuve qui représentait Notre -Seigneur souffrant. La vue de cette image fut comme un glaive qui me perça le cœur. Je me jetai à genoux , versai des larmes brûlantes , et suppliai Notre-Seigneur de me faire la grâce de ne plus le blesser par le péché, et de m' associer à ses souffrances. J'ajoutai, ce me semble, que je ne me relèverais point qu'il n'eût exaucé ma prière. Cette faveur me fut accordée. De ce moment je devins plus ferme dans le bien , plus patiente dans les souffrances. ( Marchantius, Hortus pastorum. )

Si l'honneur rendu aux saintes images produit tant de bien, le mépris , les outrages dont elles sont l'objet, sont des sources de malédiction. Au sortir de la grande révolution, un respectable ecclésiastique exerçait son zèle dans un hôpital , prodiguant aux malades et aux blessés les secours, les consolations de la religion sainte. On lui parla d'un soldat dont la vie paraissait un prodige dans l'état de mutilation où il était. Curieux de le voir, il s'approche, il aperçoit un homme dont la figure portait l'empreinte d'un  grand calme. « Mon ami, on m'a dit que vos blessures sont graves. » Le malade sourit. « Monsieur, répond-il , levez un peu la couverture. » Il la lève, il recule d'horreur, en voyant que cet infortuné n'a plus de bras. « Quoi ! lui dit alors le blessé, vous reculez pour si peu de chose ? Levez la couverture aux pieds. » Il la lève , et voit qu'il n'a plus de jambes. « Ah ! mon enfant, s'écrie le charitable ministre , combien je vous plains ! — Ne me plaignez pas , mon père ; je n'ai que ce que je mérite : c'est ainsi que j'ai traité un crucifix.... Dieu sans doute punit mon sacrilège en ce monde pour m'épargner en l'autre. » ( Retraite du P. Slnescalchi. )

Raisons de cet honneur. — Saint François de Paul avait toujours dans sa chapelle une image de la Mère de Dieu, auprès de laquelle il se réfugiait dans tous ses besoins temporels et spirituels. (Lohner.)

Saint Charles Borromée fit mettre une croix sur toutes les églises de son diocèse , et recommanda aux fidèles de porter sur eux une Image ou une médaille de la Vierge , afin que la vue de cet objet les encourageât à l'imitation des vertus de Marie. ( Lohner. )

Saint Chrysostome , pénétré d'une si profonde vénération pour saint Paul, tenait les regards fixés sur son portrait, pendant qu'il lisait ses Épîtres. Cette vue l'enflammait d'un zèle nouveau pour l'œuvre de la prédication. ( Marchantius. )

Un jour l'iconoclaste Constantin Copronyme fit venir le pieux solitaire Etienne, et lui demanda ironiquement s'il persistait dans son idolâtrie : c'est ainsi qu'il appelait le culte des saintes images. « Eh ! quel est l'homme assez peu instruit parmi nous, dit-il, pour adorer les pierres, l'or ou l'argent? Nous honorons Jésus-Christ et les saints dans leurs représentations , nous élevant ainsi , à l'aide de leurs images, aux objets qu'elles nous rappellent. Et vous, vous n'avez pas honte d'appeler idoles la figure de Jésus-Christ et
de sa mère, de les fouler aux pieds et de les brûler, etc. ? — Homme stupide, esprit lourd et bouché, repartit l'empereur, est-ce qu'en foulant aux pieds des images , nous foulons Jésus-Christ ? »  Alors l'ingénieux solitaire tirant de sa poche une pièce de monnaie , demanda s'il serait puni pour avoir jeté et foulé à terre cette image du prince. « A coup sûr, s'empressent de répondre tous les courtisans, ce serait là un crime de lèse-majesté impériale. » Alors Etienne poussant un profond soupir : « Hommes aveugles, s'écria-t-il, vous punissez de mort quiconque foule aux pieds l'image d'un roi, d'un homme périssable, et vous foulez aux pieds l'image de Jésus-Christ, Roi des rois ! » On ne répondit que par le silence à cette réflexion si juste et si forte. (Hist. ecclés., an 764.)

Quant à la vénération des saintes reliques, elle remonte aux premiers siècles. La sœur de saint Grégoire de Nysse, sainte Macrine, portait sur son cœur une croix en fer avec un anneau creux, dans lequel reposaient des reliques de la vraie croix. Après sa mort, saint Grégoire conserva cette croix comme un précieux héritage. (S. Grégoire de Nvsse, Vie de sainte Macrine.)

Personne n'ignore la guérison miraculeuse opérée devant tout le peuple de Milan, le jour de la translation des reliques de saint Gervais et de saint Protais , dont les corps avaient été découverts la veille. Saint Ambroise proclama ce miracle du haut de la chaire, saint Augustin en fut témoin. La personne qui fut l'objet de ce prodige, Sévérus, boucher de profession, homme connu dans toute la ville, protestait qu'ayant touché la frange de l'étoffe qui recouvrait les saintes reliques, la lumière lui avait été rendue à l'instant même. ( Discussion amicale. )


II° COMMANDEMENT.

Vous ne prendrez pas en vain le nom du Seigneur votre Dieu.

D. Que défend ce commandement ?

R. Il défend tout jurement faux, précipité, sans nécessité, toute profanation du saint nom de Dieu.

D, Et qu'ordonne ce commandement ?

R. De parler avec révérence de Dieu et de ses saints.

D. En quelles circonstances est-il permis de jurer ?  

R. Lorsque l'honneur de Dieu ou la défense légitime de notre prochain l'exige.

Instruction. Le premier commandement nous oblige à aimer Dieu et à l'honorer par -dessus toutes choses ; le second nous prescrit d'honorer même son nom par-dessus tous les noms, non point par un respect superstitieux, comme les Juifs à l'égard des syllabes et des lettres de ce nom, mais en considération de l'éternelle, de la toute puissante, de l'infinie majesté qu'il exprime. Nous honorons ce nom divin en l'exaltant, en le glorifiant, en l'invoquant dans toutes nos nécessités soit spirituelles soit corporelles. De cette façon, nous ne saurions répéter le nom de Dieu trop souvent. Que sa louange soit toujours sur nos lèvres ! Si nous honorons de la sorte le nom de Dieu ; il est aussi plusieurs autres manières de le déshonorer. Par exemple quand on l'emploie sans respect, dans des matières vaines et triviales, à propos de rien, par colère ou par dépit.

Mais ce qui le déshonore le plus c'est le blasphème et tout spécialement le parjure. Ainsi lorsqu'on prend Dieu à témoin d'un mensonge ou d'un serment illégitime, c'est-à-dire d'un serment que l'on fait au sujet d'une chose illicite, à l'appui de serments téméraires et inutiles , sans s'inquiéter aucunement si c'est vrai ou faux. Prêtez l'oreille à cet avertissement du Sauveur contre les blasphémateurs : Et moi je vous dis de ne point jurer en aucune manière, ni par le ciel, car c'est le trône de Dieu, ni par la terre , car c'est son marchepied, ni par Jérusalem, car c'est la ville du grand Roi. Ne jurez pas non plus par votre tête , car vous ne sauriez faire devenir blanc ou noir un seul cheveu. Mais exprimez-vous ainsi : Oui cela est ; non cela n'est pas ; car ce qui se dit de plus vient du mal. ( Matthieu, 5, 34) ;  saint Jacques dit aussi : Surtout, ne jurez ni par le ciel ni par la terre, et ne faites nul autre serment. ( 5, 12.) Ceux-là donc violent ce commandement qui invoquent le saint nom de Dieu pour se maudire eux-mêmes ou d'autres créatures, ou qui profanent ce nom sacré par d'autres manières de parler.

Toutefois, bien qu'il soit défendu en général de jurer par le nom de Dieu, il est certain cas où il est permis et même obligatoire de jurer, comme lorsque nous sommes appelés
par l'autorité légitime à rendre témoignage dans une cause où l'honneur de Dieu , notre propre défense ou la défense de notre prochain l'exigent. Alors c'est faire honneur au
nom de Dieu ; parce que c'est une manière de reconnaître que la vérité lui est essentielle. Cette sorte de jurement a toujours été tenue pour sacrée et employée pour mettre fin à tous les procès : la loi naturelle l'a fait comprendre de la sorte à tous les peuples. C'est ainsi que , suivant la sainte Écriture, les anges, les saints ont juré par la divinité , et Dieu par lui-même. Mais lorsque nous faisons un jurement, il faut prendre garde qu'il soit conforme à la vérité , à la justice et au jugement ; c'est-à-dire que la chose pour laquelle nous jurons soit juste et vraie, et qu'on ne puisse la faire admettre sans jurer.  En d'autres termes , les conditions d'un jurement légitime sont la vérité, afin qu'il ne blesse pas l'honneur de Dieu ; la justice , pour qu'il ne fasse pas de tort à notre prochain , le jugement ou la discrétion, afin qu'il ne soit pas vain et inutile.

Exhortation. Considérez , ô chrétien , quel respect , quelles adorations vous devez au saint nom de Dieu , tant à cause de la majesté divine , de la puissance éternelle, qu'à
raison de toutes les bénédictions dont ce nom a été la source pour vous. Si les anges, ces purs esprits, se prosternant, l'adorent avec crainte et tremblement , combien plus , ô poussière ! devez-vous adorer avec un frémissement de terreur, un nom si saint, si redoutable aux saints et aux anges : Saint et terrible est son nom! (Psaume 110, 9.) N'ayez rien plus en horreur que la profanation de ce nom sacré par le blasphème et le parjure. Ces blasphèmes, ces jurements qui ont coutume de se mêler aux discours ordinaires de tant d'hommes mauvais et insolents ne respirent qu'un éclatant mépris de Dieu et de la religion ; mépris porté au comble , quand il sert à soutenir le mensonge. Comment oseriez-vous vous servir du nom de Dieu , excepté quand il vous y autorise dans une légitime circonstance ? Comment avez-vous la hardiesse, ô homme, d'invoquer Dieu, la vérité même, pour servir de témoin au mensonge? Par là vous vous rendez coupable vous-même, et attirez la foudre sur votre propre tête. Car le Seigneur ne tiendra point pour innocent celui qui aura pris en vain le nom du Seigneur, son Dieu. (Exode, 20, 7.) Ah! terrible sera le jugement de Dieu sur les blasphémateurs !

Ne jurez donc par rien ; ni par les choses qui sont au ciel, ni par celles qui sont sur la terre ; à plus forte raison par leur créateur. Ne maudissez ni vous-même, ni les autres;
de tels outrages conviennent à des démons et à des réprouvés plutôt qu'à des chrétiens croyants. Pouvez-vous souhaiter d'être brûlé vivant ou mis en pièces? Comment donc
pouvez-vous appeler sur vous ou sur les autres la condamnation de Dieu ? Où est la pitié que vous devez avoir de vous-même et votre compassion pour les autres? N'avez-vous pas besoin de demander la bénédiction de Dieu plutôt que de provoquer sa malédiction et sa vengeance? Abhorrez donc le péché de blasphème et de jurement qui attire sur vous la colère céleste. Corrigez-vous vous-même ; faites plus , reprenez les coupables : c'est là un devoir essentiel pour tout chrétien. Accoutumez-vous à révérer, et à respecter tout ce qui se rattache à Dieu. Ne tournez en ridicule ni les saints ni rien de ce qui est consacré au culte de Dieu.  N'imitez pas ces profanateurs qui se servent de l'Écriture pour faire des jeux d'esprit et des plaisanteries. Gardez-vous de l'habitude des serments ; et si vous vous êtes engagé à quelque chose par un serment légitime, priez Dieu de vous aider de sa grâce à l'accomplir. Si jamais il vous est arrivé d'en prononcer que votre conscience réprouve, hâtez-vous de vous en repentir et dégagez-vous en le plus tôt possible.

HISTOIRES

Ce que défend ce commandement : le jurement , le blasphème , l'imprécation.
— Les saints ont eu une extrême horreur du blasphème. Sommé de blasphémer le Christ sous peine de la vie, saint Polycarpe répondit : « Il y a quatre-vingt-six ans que je le sers , et jamais il ne m'a fait de mal : comment pourrais-je donc blasphémer mon Roi et mon Sauveur ?» Et il mourut plutôt que de commettre.ee crime. (Eusèbe, Hist. eeclés.)

« Si je devais être précipité en enfer, disait saint Ignace de Loyola, mon plus grand tourment serait d'y entendre blasphémer Dieu. » ( Lohner. )

« J'éprouve un tel dégoût de la vie parfois, que je voudrais mourir, disait saint François Xavier, plutôt que d'entendre blasphémer si souvent le saint nom de Dieu. » (Lettres de S. François Xav.)

Un jour un partisan de l'hérésie d'Arius vomit d'horribles blasphèmes contre l'auguste Trinité. Ceux qui l'entendaient en furent saisis d'effroi. Dieu leur prouva bientôt qu'ils, avaient raison. Le blasphémateur entra dans une fureur subite, se mit à déchirer son corps avec ses ongles, et mourut enfin en poussant d'effroyables rugissements. (Baromus, Hist. de l'Église, an. 494.)

En punition du blasphème, et en témoignage de l'horreur qu'il lui inspire, Dieu fit périr en une seule nuit 185,000 hommes de l'armée du blasphémateur Sennachérib (4 Rois, 19; Isaïe, 37) ; il frappa de mort l'impie Nicanor, dont la langue fut jetée aux oiseaux, et la main suspendue vis-à-vis du temple (2  Macchabée 9, 9); il foudroya par la main de son ange l'orgueilleux Hérode , qui croyait parler comme un Dieu, et non comme un homme (Actes  des Apôtres 12 ) , etc.

Voulons-nous être agréables à Dieu, évitons ce crime, et si nous en avons l'habitude , hâtons-nous de nous en corriger. Un soldat s'était sincèrement confessé de ce péché , et avait promis d'y renoncer, si on voulait lui donner là-contre un remède efficace. Sa pénitence fut, chaque fois qu'il retomberait, de baiser la terre, en disant cette prière : Seigneur, pardonnez-moi ! Le soldat , fidèle à ce conseil , fit de rapides progrès dans la voie de sa conversion. Ce fut pour son bonheur. Un jour, dans un combat, ayant laissé tomber son épée, il proféra un horrible blasphème ; puis, se rappelant sa pénitence, il s'inclina aussitôt pour baiser la terre. Pendant qu'il était dans cette situation , un boulet passa sur sa tête , qu'il eut infailliblement emportée , s'il fût resté debout.  De ce moment il ne proféra plus jamais de blasphèmes. (Lohker, Biblioth.)

Non-seulement il faut nous amender, si nous sommes dans cette déplorable habitude , mais encore il faut travailler à en corriger les autres, ou du moins prendre bien garde de leur en donner jamais occasion. — Claude Bernard, connu sous le nom du Pauvre- Prêtre, rencontra un jour un charretier qui, sans aucun motif, lui donna un grand soufflet en blasphémant le saint nom de Dieu. Mon ami, lui dit le bon prêtre, donne-m'en un second et ne jure plus.

Un pieux enfant revenant de classe un peu plus tard que de coutume, son père l'en reprit en blasphémant le saint nom de Dieu. Désolé d'avoir donné lieu à ce blasphème , le pauvre enfant se jeta aux genoux de son père, en disant : Mon papa, battez-moi, mais ne blasphémez plus ! Le père, frappé de l'horreur que ce crime inspirait à son enfant, n'osa plus blasphémer. (Cossart.)

Enfin, en réparation de tant d'horribles blasphèmes, qui chaque jour provoquent la colère du Ciel, entrons dans l'Archiconfrérie réparatrice des blasphèmes..., établie par Mgr. Parisis, alors évêque de Langres , et enrichie de nombreuses indulgences par le saint Pontife Pie IX ; et de temps en temps , particulièrement lorsque nous entendons proférer des blasphèmes, récitons cette belle prière de l' Archiconfrérie : « Qu'à jamais soit loué, béni, aimé, adoré, glorifié, le très-saint, très-sacré, très- adorable, très-inconnu, très inexprimable , très-ineffable nom du Seigneur notre Dieu , au ciel et sur la terre, par toutes les créatures sorties des mains de Dieu, et par le très-sacré cœur de Jésus au très-saint Sacrement de l'au tel. Ainsi soit-il. »

Vaincu, fait prisonnier par les Sarrasins, saint Louis avait conclu, pour sa délivrance et celle de ses gens, un traité avec le sultan. Celui-ci vint à mourir. Les émirs voulurent alors forcer Louis à confirmer le traité par un serment. Le saint roi s'y refusa , parce que sans doute il regardait la chose comme inutile. « Quoi ! lui disent les émirs, l'épée à la main et tout prêts à fondre sur lui, tu es notre prisonnier, et tu veux nous traiter en esclaves? La mort ou le serment : choisis. » Louis répondit avec impassibilité : « A la vérité , vous êtes les maîtres de mon corps , mais vous ne pouvez rien sur mon âme : elle est entre les mains de Dieu. » Terrassés par cette grandeur d'âme et cette délicatesse de conscience , les émirs cessèrent leurs instances. (Histoire de saint Louis.)

Jurer en vain est un péché ; faire un serment faux ou pour des choses mauvaises, est un plus grand péché encore. — Godwin, comte de Kent, avait fait assassiner le prince Alfred et fait reconnaître pour roi son frère Édouard III, auquel il avait fait épouser sa fille. Un jour le comte se trouvant à la table du roi, avec un grand nombre de seigneurs , le page qui présentait à boire fit un faux pas : « Il est bien vrai, le frère soutenu par le frère est inébranlable, » dit le jeune homme. Par ce passage des saintes Écritures , il voulait dire qu'il avait eu de la chance de ce qu'un de ses pieds avait affermi l'autre. « Effectivement, reprit le roi, prenant le texte dans le sens littéral, si j'avais mon frère, nous serions l'un à l'autre un puissant appui ; » et en même temps il jeta un coup d'œil sévère sur le comte. Godwin se flatta de dissuader par un serment ce religieux prince : « Que ce morceau, dit-il, soit le dernier que je mange, si j'ai quelque chose à me reprocher par rapport au meurtre du prince Alfred. » Et il porta du pain à sa bouche ; le pain s'arrêta à sa gorge et l'étouffa. Était-ce une punition de Dieu, ou l'effet du trouble qui agitait sa conscience? toujours est-il qu'il paya le double crime (meurtre et faux serment) dont il s'était rendu coupable. (Berault-Bercastel, Hist. de l'Église.)

A-t-on prêté un serment légitime, il faut y rester fidèle, sans quoi- ce serait un parjure. Rodolphe, roi de Souabe, avait juré fidélité au roi Henri IV, mais il viola son serment. Peu de temps après il perdit la main droite dans un combat. Il la ramassa et dit à ses soldats : « C'est avec cette main que j'avais juré fidélité au roi Henri , mon maître légitime. » ( Schmid et Belet. )

Êtes-vous dans l'habitude du jurement, corrigez-vous en, à l'exemple de saint Augustin. «Autrefois, disait-il à son peuple, je jurais journellement ; mais depuis que j'ai commencé à craindre le Seigneur, j'ai lutté contre ce penchant criminel, et, avec le secours du Seigneur, j'ai résisté victorieusement. Maintenant rien ne m'est plus facile que de ne pas jurer. Ne dites donc pas, mes amis : Qui pourrait s'empêcher de proférer des jurements ? Oh ! quand on a la crainte de Dieu, on aime la vérité, on enchaîne sa langue, et le jurement est banni. » (S. Augustin, Serm. 10 sur les Saints.)

Gardons-nous bien aussi de faire des imprécations.  Mais qui ne tremblerait à la vue des terribles effets des imprécations et des malédictions ? Gardons-nous donc d'en proférer jamais. Que nous prescrit ce commandement ? De parler avec respect de Dieu et des saints , d'accomplir nos vœux, etc. — Jamais Newton , ce génie qui avait si profondément pénétré dans les secrets de la nature , ne prononçait ou n'entendait prononcer le nom de Dieu sans se découvrir et s'incliner respectueusement. — Robert de Boyle était un illustre Irlandais qui mourut à Londres en 1691. Burner, son historien , dit de lui : « Je n'ai jamais connu personne qui eût un plus profond respect pour le Créateur du ciel et de la terre. Il ne prononçait jamais le nom de Dieu sans faire une pause remarquable dans son discours. » ( Biographie des croyants célèbres. )

Saint Bonaventure avait reçu le nom de Jean au baptême; mais étant tombé dangereusement malade à l'âge de quatre ans , il recouvra la santé , grâce aux prières de saint François , aux pieds duquel sa pieuse mère était venue le déposer. Puis saint François, prévoyant les grandes destinées de cet enfant , s'écria dans un ravissement prophétique : 0 bona ventura ! 0 la bonne rencontre ! La mère du petit Bonaventure le consacra au Seigneur, vœu que le saint enfant ne démentit jamais. Aussitôt qu'il put connaître Dieu, il eut tant de vénération pour son saint nom, qu'il frémissait d'horreur lorsqu'il l'entendait blasphémer. (Vie de saint Bonaventure.)

Les vœux que nous devons renouveler souvent et accomplir avec zèle, sont, avant tous, les vœux de notre baptême.
C'était la pieuse pratique de saint François Xavier , et il n'y a pas , selon lui , de meilleur préservatif contre les attaques du démon que la rénovation journalière de ces vœux. (Lohner) —

Quant aux vœux particuliers , il n'en faut faire qu'après avoir bien consulté Dieu et son confesseur, à moins de circonstances particulières, comme celle qui suit
. Clovis se voyait au moment de perdre la bataille de Tolbiac. Alors se rappelant les leçons de la vertueuse Clotilde , il s'écrie : « Fils de Dieu, si vous me donnez la victoire, je croirai en vous et me ferai baptiser. » A l'instant les Allemands fuient et Clovis est vainqueur. Mais aussi , il se montra fidèle à son vœu. Il reçut le baptême des mains de saint Remi , et commença les dynasties de nos rois très-chrétiens. (Grégoire de Tours, De gestis Francorum; et Hikcmar, Vie de saint Remi.)


IIIe COMMANDEMENT.

Souvenez-vous de sanctifier le jour du Seigneur

D. Quand le jour du Seigneur a-t-il été institué ?

R. A la création du monde ; car Dieu bénit le septième jour et se reposa alors de toutes ses œuvres.  

D. Quand ce commandement a-t-il été renouvelé ?

R. Dans la Loi ancienne, lorsque Dieu donna les commandements à Moïse sur le mont Sinaï.

D. Que nous prescrit ce commandement?  

R. Il nous prescrit de rendre à Dieu le jour du sabbat l'honneur et l'adoration qui lui sont dus et de sanctifier ce jour-là.

D. Que nous défend-il?  

R. Toute œuvre servile et les occupations profanes.  

D. Pourquoi le sabbat des Juifs a-t-il été transféré au dimanche ?

R. Parce que c'est le dimanche qu'eurent lieu la résurrection de Notre-Seigneur et la descente du Saint-Esprit.

D. Par qui fut faite cette translation ?

R. Par l'Église , au temps des apôtres.

Instruction. Le premier commandement nous ordonne d'adorer Dieu et Dieu seul , le second d'honorer son saint nom par-dessus tous les noms. Le troisième nous prescrit
de lui rendre le culte divin qui lui est dû. C'est à cette fin que, dès le commencement du monde, a été consacré un jour de la semaine. Car, quoique nous devions lui offrir le tribut de nos hommages et le servir chaque jour, il a voulu que ce jour lui fût consacré tout entier et d'une manière particulière ; de telle sorte que nous pussions le servir librement, avec un cœur et un esprit dégagés des soucis et des affaires de cette vie. Le jour du Seigneur a donc été institué à l'origine du monde , et l'on a toute raison de croire que les serviteurs de Dieu l'ont toujours sanctifié ; mais la foule devenant peu à peu négligente et paresseuse à son service , Dieu rétablit cette obligation dans la loi de
Moïse et l'imposa sous des peines sévères , sous peine de mort même , contre les transgresseurs.

La parole : souvenez-vous , semble choisie pour insinuer que ce précepte n'était pas nouveau, lorsque Dieu donna la loi écrite. Le mot sabbat signifie repos et le repos était prescrit en mémoire du repos du Seigneur le septième jour de l'œuvre de la création. Le Seigneur bénit le septième jour et le sanctifia. C'est pourquoi son peuple était tenu de sanctifier le sabbat par le souvenir plein de reconnaissance de la création. Mais , dans la loi nouvelle , les apôtres ont transféré le sabbat du samedi au dimanche et l'ont appelé Dies dominica, le jour du Seigneur (Apocalypse 1, 10,) afin que tous les chrétiens le sanctifiassent en mémoire de notre rédemption , dont l'œuvre fut terminée le dimanche , jour dans lequel le Christ ressuscita d'entre les morts et où le Saint-Esprit descendit du ciel pour notre sanctification. La partie cérémonielle de la loi de Moïse devait être abolie à la mort du Christ : or le sabbat des Juifs , quant au jour de la semaine où il tombait et à la manière dont il se célébrait, rentrait dans cette partie cérémonielle et figurative ; il a donc cessé alors , et notre jour du Seigneur , le dimanche , lui a été substitué. De sorte que nous ne le célébrons pas le même jour que les Juifs le faisaient , ni de la manière que la loi mosaïque l`avait prescrit , mais bien comme l'Église l`a réglé.

Quoique notre Jour du Seigneur diffère de celui des Juifs , ce n'est pas moins pour nous une très-grave obligation de le sanctifier, en assistant, quand cela nous est possible, au service divin de l'Église; et cela sous peine de péché mortel. Outre cela, il faut prier, écouter la parole de Dieu, purifier nos âmes par la pénitence , recevoir ou du moins nous disposer nous-mêmes à recevoir la sainte Eucharistie; nous occuper ce jour-là d'œuvres spirituelles, telles que les actes de foi, d'espérance, de charité, ou autres exercices religieux. Conséquemment nous sommes tenus ce jour-là de nous abstenir de tout ce qui est incompatible avec les occupations de ce genre : telles sont les œuvres serviles, les travaux des mains et des machines, le commerce, les marchés , les plaidoiries devant les tribunaux.  Mais il n'y a pas d'interdiction pour les choses qui sont absolument nécessaires à la conservation de notre vie et de celle du prochain, comme la préparation de la nourriture, le soin des malades, la lutte contre les inondations ou les incendies, et autres choses semblables.

Exhortation. Âme chrétienne ! puisque Dieu , maître et créateur de toutes choses , a un droit souverain à demander notre service , au temps et au lieu qui lui plaisent, souvenez-vous donc qu'il a établi pour cette fin un jour de la semaine. II nous a accordé six jours pour nos affaires temporelles ; mais il s'en est réservé un pour lui-même. Vous travaillerez pendant six jours , et vous y ferez tout ce que vous avez à faire : mais le septième jour est le jour du Seigneur ou jour du repos consacré au Seigneur votre Dieu. (Exode, 20, 9, 10.) Appliquez-vous donc à remplir la volonté de Dieu par la sanctification du dimanche , afin d'obtenir ainsi la grâce de bien employer les autres jours de la semaine. Mettez de l'ardeur à louer et à servir Dieu ce jour là , de sorte que pendant les heures où votre corps se repose du travail , votre âme se repose en Dieu ; voilà le véritable sabbat chrétien , figure de l'éternel repos que nous attendons ensuite , et que l'Apôtre appelle : Un autre jour de repos pour le peuple de Dieu. ( Hébreux 4 9.)

Soyez fidèle à fréquenter les divins offices ; ne souffrez pas que rien vous empêche d'assister à la messe, si ce n'est une cause qui vous excuse devant Dieu , et assistez-y avec une sincère dévotion. A quoi vous servirait-il d'honorer Dieu en apparence, si votre esprit et votre cœur sont loin de lui ? Pourquoi offre-t-on le saint sacrifice sous vos yeux , au milieu des images de la passion du Christ sur la croix, à l`autel , etc., si ce n'est pour exciter votre amour et élever votre âme vers Dieu? Confessez souvent vos péchés ce jour-là ou, du moins , soyez amèrement repentant de vos fautes et implorez la divine miséricorde. Disposez-vous à recevoir la sainte communion. Gravez dans votre cœur les instructions que vous aurez reçues, et faites tous vos efforts pour les réduire en pratique, comme si vous les aviez entendues de la bouche de Dieu lui-même. Quand l'occasion se présente, soyez aussi charitable que possible envers les autres.

Ce n'est pas assez d'adorer Dieu le matin, il faut que le reste du jour soit encore consacré à son service. Prenez garde de l'offenser ou de scandaliser votre prochain ; de
peur que loin de dédier ce jour au Seigneur, vous n'en fassiez une fête du démon ( ange déchu). Conservez donc votre âme pure et sans tache comme il convient à la sainteté de ce jour, et vivez maintenant de manière à obtenir dans l'autre vie la jouissance du repos ou sabbat de la gloire éternelle.

HISTOIRES.

Ce que nous prescrit ce commandement : le service de Dieu, etc. — Mgr. de Cheverus , alors missionnaire en Amérique , marchait depuis huit jours au milieu d'une sombre forêt , lorsqu'un matin ( c'était le dimanche ) il entend dans le lointain des chants qui ne manquent ni d'ensemble ni d'harmonie.  Il écoute , il avance , il distingue un chant qui ne lui est pas inconnu : c'est la messe royale de Dumont dont retentissent dans nos belles solennités nos grandes cathédrales de France. Quelle charmante surprise ! quelles douces émotions !! ( Vie de Mgr. de Cheverus. )

Voici comment, dans des temps encore assez rapprochés de nous (c'était au dix-septième siècle), un avocat-général sanctifiait le dimanche. Puisse ce modèle trouver beaucoup d'imitateurs ! Jérôme Bignon ne manquait point à ses exercices de piété , quoique sur chargé d'occupations. On faisait chez lui la prière en commun, matin et soir ; Jérôme y assistait, et souvent en prononçait lui-même les formules avec une attendrissante ferveur. Sa piété redoublait, lorsqu'il s'approchait de la pénitence et de  l'Eucharistie , ce qu'il faisait souvent. Sa modestie le portait à se placer à l'endroit de l'église le moins remarquable. C'est dans ce but aussi qu'il assistait dès le grand matin le dimanche à la messe des pauvres et du petit peuple. Pendant l'instruction familière qui s'y faisait, il restait debout. Après les vêpres, il allait au catéchisme, auquel il prêtait autant d'attention qu'aux discours les plus sublimes. « Pourquoi aimez-vous donc tant à vous trouver parmi les enfants et les pauvres? lui demandait-on un jour. — C'est, répondit-il, que la voix de Dieu se fait entendre là plus particulièrement. » ( Biographie des croyants célèbres. )

Ce qu'il nous défend : les œuvres serviles. — Un juge anglais avait eu le malheur, pendant sa jeunesse, de contracter des liaisons mauvaises, qui lui inspirèrent le mépris de la religion, et lui firent tourner en dérision la sanctification du dimanche, qu'il passait, lui et ses compagnons, au milieu des sociétés les plus corrompues, cherchant à se surpasser les uns les autres par le scandale et la dissolution de leurs mœurs. Mais par l'effet de circonstances infiniment heureuses , il revint peu à peu à une conduite plus réglée, et, avec le calme de la conscience, il ne tarda pas à recouvrer aussi l'estime de ses semblables. Or, tandis que Holt remplissait les fonctions de juge, il se vit forcé de condamner à mort un homme qu'il reconnaissait pour avoir été autrefois de ses amis. Vivement impressionné à la vue de ce criminel , il ne put s'empêcher de lui demander ce qu'étaient devenus les autres camarades de leur jeunesse : « Hélas ! répondit le coupable , hormis vous et moi , mon sieur le juge, il n'en est plus aucun qui soit encore en vie : les uns ont succombé sous le glaive de la justice, les autres sont morts de mort violente. » Le juge ne pouvant plus maîtriser son émotion, poussa un profond soupir et adressa aux assistants un discours pathétique, où il prouva que la violation du dimanche fait de l'homme une bête féroce , dépourvue de tout sentiment noble et généreux , et qu'alors il n'y a plus rien qui l'empêche de se livrer effrontément à toutes les turpitudes des vices les plus dégradants. ( Schmid et Belet. )

Évitons donc avec le plus grand soin les œuvres serviles le dimanche, et imitons les bons chrétiens qui , en retour de leur fidélité à sanctifier le jour du Seigneur, reçoivent, même dès ce monde, des bénédictions précieuses.
— Il y avait dans une ville deux hommes du même métier. L'un, quoique chargé de famille, faisait parfaitement ses affaires , et cependant il sanctifiait scrupuleusement les jours de dimanche et de fêtes. L'autre n'avait point d'enfants, travaillait jour et nuit, sans excepter les dimanches, et pouvait à peine vivre. Profondément frappé de ce contraste, il alla trouver son compagnon, et, après l'avoir félicité de son honnête aisance, puis lui avoir fait part de sa détresse, il lui demanda comment il s'y prenait pour obtenir ces merveilleux succès : « Demain, lui répondit le bon chrétien, je te montrerai la maison où je trouve cette fortune. » Le lendemain, effectivement, il alla prendre notre homme et le conduisit à l'église. Il continua cela trois dimanches de suite ; après quoi l'ouvrier lui répondit : « Maintenant, mon ami , je sais ton secret , et je connais le chemin qui conduit à une honnête aisance ; sois tranquille , je ne veux pas l'oublier de sitôt. » Effectivement , à dater de ce jour, il se corrigea, cessa de travailler le dimanche, et réussit heureusement dans toutes ses affaires. (Surius, tom. Ier, 23 janvier, Vie de S. Jean l'Aumônier.)

Cette belle histoire m'en rappelle une autre que j'ai lue avec le plus grand plaisir. Un commerçant riche, mais bien dans ses devoirs , souffrait depuis longtemps de voir près de lui un pauvre cordonnier travailler les dimanches et les fêtes. « Pourquoi travaillez-vous donc de la sorte ? lui dit -il un jour avec douceur. — C'est bien aisé de dire; puis-je nourrir autrement ma femme et mes enfants? Ah ! certes, ce n'est pas pour le plaisir de travailler, j'aimerais bien mieux me reposer. — Eh bien, puisque ça ne tient qu'à cela, cessez de travailler le dimanche, je me charge de vous indemniser de vos pertes. » La proposition est acceptée. Le cordonnier ferme boutique le dimanche et assiste régulièrement aux offices. Six mois écoulés, le riche négociant vient trouver son cordonnier. « Eh bien, voyons quelles sont vos pertes à cause de la sanctification du dimanche ? — Je n'en ai aucune. — Aucune ! mais qu'est ce que je vous dois ? avez- vous fait votre calcul ? — Vous ne me devez rien, absolument rien ; au contraire, c'est moi qui vous dois. — Et comment cela ? — Rien de plus simple : le soir du dimanche et le lundi, je dépensais au cabaret le bénéfice de la semaine; maintenant ce n'est plus cela. Harassé d'un travail continuel et d'une vie de débauche , je travaillais languissamment ; maintenant frais et bien reposé , je travaille plus et mieux , et je satisfais mes pratiques. Les instructions que j'ai entendues m'ont fait réfléchir et m'ont ramené à mes devoirs : je suis heureux ! Mes colères troublaient la paix du ménage , et m'ont causé des maladies dispendieuses ; maintenant je suis patient, la paix règne entre nous ; mes enfants n'étant plus témoins de tant de scènes scandaleuses , deviennent plus sages. En un mot, le bon Dieu nous bénit, et tout va mieux. Ce n'est donc pas vous, monsieur, qui me devez, c'est moi qui vous suis redevable. » Profondément ému à ces paroles , le négociant tire sa bourse et dit au cordonnier : « Mon ami , acceptez ces deux ducats en souvenir de mon affection ; et rappelez vous , ce que vous savez maintenant par expérience , que quand nous faisons notre possible , de son côté Dieu ne manque jamais de nous venir en aide. »


Dernière édition par MichelT le Dim 20 Nov 2016 - 19:00, édité 1 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Dim 20 Nov 2016 - 18:56

IV COMMANDEMENT.

Honorez votre père et votre mère.

D. A quoi nous oblige ce commandement?

R. A aimer, à honorer nos parents et à leur obéir dans tout ce qui n'est pas péché.

D. Que nous défend-il ? —

R. Toute aigreur, irrévérence et désobéissance envers nos parents.

D. Pourquoi sommes-nous obligés de les aimer ?

R. Parce qu'après Dieu, ils sont la principale cause de notre vie et de notre existence.

D. Gomment devons-nous les honorer ?

R. Non-seulement intérieurement dans nos cœurs ; mais encore extérieurement par nos œuvres et notre conduite, et en les soulageant dans leurs nécessités spirituelles et corporelles.

D. Pourquoi devons-nous leur obéir? —

R. Parce que Dieu les a chargés de nous instruire, de nous diriger et de nous corriger.

D. Quelles récompenses a-t-il promises dans la loi aux enfants soumis à leurs parents ?

R. Une longue et heureuse vie : « Afin que tu vives de longs jours dans le pays que le Seigneur, ton Dieu, te donnera. » Conséquemment le contraire doit être le partage des enfants désobéissants.

D. Ne sommes-nous pas tenus aussi d'honorer nos supérieurs et de leur obéir ?

R. Certainement; car Dieu l'a expressément commandé.

Instruction. Il est bien juste que le premier commandement de la seconde table de la loi où sont inscrits nos devoirs envers le prochain, soit celui-ci : Honorez votre père et votre mère, car c'est à eux, après Dieu , que nous devons l'être, la vie, la nourriture, l'éducation, la religion. Si nous sommes obligés d'aimer notre prochain comme nous-même, nous devons certainement aimer nos parents avant tous les autres. Ne nous ont-ils pas mis au monde avec beaucoup d'angoisses et de peines! Ne nous ont -ils pas élevés avec amour, fatigue et sollicitude?

L'amour que nous leur devons est donc un juste tribut de reconnaissance pour ces marques innombrables d'affection. Souvenez - vous , dit le livre de l'Ecclésiastique, que vous avez reçu d'eux la naissance et rendez-leur des actions de grâce. Nous ne pouvons remplir ce devoir sans les aimer, et c'est également par un effet de cet amour que nous devons les soulager dans leurs nécessités, soit corporelles soit spirituelles : car si la loi de charité nous oblige à venir en aide à notre prochain, combien plus à nos parents? Donner ce que nous avons, même pour des usages pieux et laisser nos parents dans le besoin, ce serait un péché grave. (Matthieu 15, 4. ) Nous devons en second lieu les respecter profondément, comme nos supérieurs par l'âge, la sagesse et l'autorité; et respecter non-seulement leurs personnes, mais encore leurs instructions, leurs avertissements, leurs réprimandes. Mon fils, écoutez les instructions de votre père et n'abandonnez point les préceptes de votre mère. ( Proverbe 1, 8. ) Vous, ne devez les mépriser en aucune manière; car c'est l'insensé qui se moque de la correction paternelle. ( Proverbe 15, 5. ) Bien moins encore pourriez-vous les maudire ou lever la main sur eux.

Vous devez, en troisième lieu, obéir à leurs ordres, et leur obéir selon Dieu, c'est-à-dire en ce qui n'est pas péché, car c'est Dieu qui vous commande de leur obéir, et en le faisant vous obéissez à Dieu. Cette soumission sera pour vous une source de biens ; mais le malheur sera le partage des enfants désobéissants, témoin Absalon, ( le fils rebelle du Roi David – Ancien Testament) etc. Si les parents veulent que leurs enfants leur obéissent, les honorent et les secourent, cela dépend beaucoup de l'accomplissement de leurs propres devoirs envers leurs enfants ; car il y a d'égales obligations de part et d'autres. Les parents sont obligés d'entretenir leurs enfants jusqu'à ce que ceux-ci soient en état de se suffire à eux-mêmes. Ils leur doivent une bonne éducation, l'enseignement des devoirs et des principes de la religion, la correction des vices et de la désobéissance; el tout cela, ils doivent le faire avec amour, discrétion, bonté et douceur, sans les porter à l'irritation et au découragement. (Saint Paul.) Ils doivent leur donner le bon exemple, ne rien faire, ne rien dire qui puisse causer préjudice à leur bien spirituel. Rappelez-vous quelle malédiction attend le scandale et le mauvais exemple donnés aux enfants, surtout par leur père et mère. Ah! malheur! malheur à de tels parents !

Nous devons aussi le respect et l'obéissance à tous les supérieurs que Dieu a placés au-dessus de nous, rois, princes, et aussi magistrats ou officiers délégués pour les représenter; ils sont les pères du peuple et nous sont préposés de la part de Dieu : Que toute personne soit sujette aux puissances d'un ordre supérieur; car il n'y a point de puissance qui ne soit de Dieu , et toutes celles qui sont sur la terre sont ordonnées par Dieu. Celui donc qui résiste aux puissances résiste à l'ordre de Dieu, et ceux qui résistent attirent sur eux la condamnation. Il est donc nécessaire de vous soumettre non-seulement par crainte de la damnation ; mais encore par le devoir de la conscience. (Romains 13, l, 2, 5. ) Craignez Dieu, honorez le roi. (1 Pierre, 2,17.)

Nos pères spirituels sont les pasteurs de l'Église de Dieu, qui ont le soin de nos âmes et auxquels, après Dieu, nous devons la vie de nos âmes dont le baptême et les autres sacrements sont la source. Ils gravent les principes de la religion dans nos intelligences , ils veillent sur nous et nous conduisent à la vie éternelle par leurs salutaires avertissements. Ils méritent donc d'autant plus le respect, l'obéissance et l'amour que le soin de l'âme l'emporte davantage sur celui du corps. Et alors même que leur vie ne serait pas exemplaire, leur caractère nous commanderait toujours le respect : Honorez Dieu de toute votre âme; et révérez les prêtres. (Ecclésiaste 7, 33. ) Obéissez à ceux qui sont établis pour vous gouverner et ayez de la soumission pour eux; parce qu'ils veillent comme ayant à rendre compte de vos âmes. ( Hébreux 13, 17. )

Toutes les fois que des enfants agissent contrairement à ces devoirs d'amour, de respect , d'obéissance envers leurs parents, en matière grave, ils transgressent ce commandement : par exemple ils le transgressent en les haïssant, en les méprisant , en les contrariant, en leur souhaitant du mal, en négligeant de les secourir, en parlant mal d'eux, en faisant l'opposé de ce qu'ils commandent, etc. Il en est de même à l'égard des supérieurs qui nous sont préposés par la même autorité. Tous les péchés que nous commettons envers le prochain , sont considérablement aggravés quand ils attaquent nos parents, et souvent ils contractent une nouvelle espèce de malice.

D'un autre côté, tous parents et supérieurs placés au-dessus des autres pèchent grièvement contre ce précepte, lors qu'ils négligent le soin de ceux que Dieu a confiés à leur charge, soit en les privant d'éducation, d'instruction, de correction, du bon exemple, soit en manquant de justice et d'équité à leur égard. C'est là fréquemment la première cause de l'insubordination des inférieurs.

Exhortation. Accomplissez donc , ô chrétien, ce strict commandement de Dieu : Honorez votre père et votre mère. La nature comme la grâce exige de vous à leur égard un amour, un respect, une obéissance sincères; et tous ces devoirs vous devez les remplir par amour pour Dieu; car vous l'honorez lorsque vous honorez vos parents. Souvenez- vous également que ces devoirs ne vous incombent pas seulement pendant la vie mortelle de vos parents, mais encore après leur mort ; car alors vous ne devez pas les oublier dans vos prières et dans vos bonnes pensées. Réfléchissez souvent sur les récompenses et les bénédictions qui attendent les enfants fidèles à leur devoir et à la malédiction qui menace les autres , puis agissez de manière à éviter celles-ci , et à obtenir celles-là. Acquittez- vous aussi de vos obligations envers le roi , et suivez l'enseignement de saint Pierre : soumettez-vous donc en vue de Dieu, dit -il, à toutes sortes de personnes : soit au roi comme à celui qui est au-dessus de tout, soit aux gouverneurs qu'il envoie... car telle est la volonté de Dieu. (1 Pierre, 11, 13, 14, 15. ) Considérez votre souverain comme le père de tous ceux qui sont con fiés à ses soins. Enfin conduisez-vous en chrétiens à l'égard de vos pasteurs, ou pères spirituels; considérez- les comme les ministres de Dieu, comme les auteurs de la vie de votre âme par la prédication de l'Évangile. (II Corinthiens 4, 15.)

Estimez-les comme les ambassadeurs du Christ, et recevez-les avec un respect proportionné à la dignité de celui qui vous les envoie, et à l'importance de l'objet de leur ambassade, c'est-à-dire le salut des âmes. Soyez-leur soumis dans les affaires spirituelles; écoutez leurs instructions, leurs conseils, leurs avertissements; gardez-les comme un trésor dans vos cœurs, et en les mettant en pratique faites-les fructifier pour votre bonheur éternel. Souvenez-vous que cette parole du Christ à ses apôtres s'applique également à leurs successeurs, évêques et prêtres de l'Église : Qui vous écoute, m'écoute, qui vous méprise, me méprise. ( Luc, 10, 16. ) Et comme le péché ne les prive pas de leur autorité, il ne nous dispense pas non plus de les respecter et de leur obéir : leur caractère sacré subsiste. Le Christ a dit des scribes et des pharisiens : Observez donc et faites ce qu'ils vous diront, (dans les matières spirituelles) mais ne faites pas comme eux, s'ils se conduisent mal (Matthieu 23, 3.) Priez pour eux afin que Dieu les dirige en vue de votre propre direction. Bénissez leurs travaux, et secondez leurs pieux efforts dans la grande affaire de votre salut.

HISTOIRES.

Devoirs des enfants envers les parents. Les aimer. — Louis de Bourbon, prince de grandes espérances et déjà connu par son courage, apprend la mort de son père, vice-roi de Naples. Malgré la distance qui le sépare de cette ville , il s'y rend en toute hâte, fait ouvrir le tombeau de ce cher défunt , contemple son cadavre d'un œil fixe , et meurt de regret et de douleur. Ah ! il aimait son père, ce prince au cœur sensible et bon : aussi fut- il appelé le héros de la piété filiale. ( Histoire de France. )

Le respect. — Thomas More , ce glorieux martyr de la foi , témoigna toujours le plus grand respect aux auteurs de ses jours. Alors même qu'il était marié , avancé en âge et chancelier d'Angleterre , il ne sortait jamais de la maison sans avoir demandé à genoux la bénédiction de son vieux père. (Stapleton, Vie de Thomas More.)

Seraient-ils pauvres, infirmes, etc...., il ne faut jamais rougir de ses parents. Benoit XI s'était élevé au souverain pontificat par son propre mérite. Sa mère se présenta pour visiter un fils revêtu d'une si éminente dignité. « Comment est-elle vêtue? demanda le pape avant de la recevoir. — De soie, pour l'honneur du siège apostolique , lui fut-il répondu. — Ah ! alors ce n'est pas ma mère ; ma mère est une pauvre femme qui ne sait pas ce que c'est que la soie. » On fit reprendre ses humbles vêtements à cette pieuse mère. Sur quoi le pape dit : « Pour le coup, c'est ma mère; qu'elle vienne, » et il l'embrassa tendrement. ( Marchantius, Hortus Pastorum. )

Nos parents se montreraient-ils injustes ou sévères à notre égard, ce n'est point une raison de leur manquer jamais. La mère d'un pieux enfant, nommé Louis -François Bauvais, le gronda un jour avec beaucoup de sévérité. Quand elle se fut retirée , des domestiques abordèrent cet enfant , et lui dirent : « Quoi ! tu te laisses ainsi, traiter ? tu n'avais rien fait...  Ta mère ne t'aime pas. » Louis ne donna pas dans le piège qu'on lui tendait. « Je ne veux pas , répondit-il, qu'on dise du mal de maman : si elle m'a puni, c'est pour mon bien, je l'avais mérité. » ( Souvenirs des Petits-Séminaires. )

Leur obéir. — Sainte Rose de Lima n'allait nulle part , n'entreprenait rien , se faisait même scrupule de boire sans la permission de sa mère. Un jour, pour éprouver sa docilité, elle lui ordonna de faire à rebours un ouvrage de fleurs en broderie , qu'elle avait entre les mains. Sainte Rose obéit à l'instant même. Celle qui lui avait donné cet ordre lui fit ensuite une réprimande. « Maman, répondit - elle , il m'est assez indifférent de faire une fleur de telle et telle manière ; mais je ne saurais manquer à la soumission que je vous dois. » ( Vie de sainte Rose de Lima.)

Les assister. — Pendant nos troubles révolutionnaires , le vénérable Sombreuil, ancien gouverneur des Invalides, fut traîné devant le sanglant tribunal des égorgeurs , et condamné à mort. Il allait périr, lorsqu'une jeune fille s'élance au milieu des brigands, au travers des piques et des sabres , et s'écrie : « Arrêtez , barbares , c'est mon père ! » En même temps elle se précipite à leurs genoux, et leur baise les mains dégoutantes de sang. Elle prie, elle intercède, elle s'offre en sacrifice à la place de son père. Enfin elle se relève, le couvre de son corps, s'attache à lui avec tant de force, et supplie les meurtriers avec tant de larmes et un accent si déchirant, que leur fureur étonnée reste suspendue. Alors, comme pour mettre à une épreuve plus rude encore cette sensibilité qui les touche : Bois, disent-ils à cette fille généreuse, bois du sang des aristocrates.
Et ils lui présentent un verre plein de sang. L'amour filial donne à la jeune Sombreuil la force de céder à cette proposition : elle boit sans paraître hésiter. Alors le cri de grâce se fait entendre. Monsieur de Sombreuil et sa fille sont reconduits chez eux en triomphe par le peuple témoin de ce spectacle. Cette fille pouvait-elle assister plus héroïquement son père ? ( De la fidèle observance des commandements. )

Lorsque la tête de Thomas More fut tombée sur l'échafaud , il ne se trouva personne qui eût le courage de lui donner une sépulture honorable. Mais sa fille Marguerite, qui l'avait si tendrement aimé pendant sa vie, n'hésita pas à lui rendre ce dernier devoir : elle le fit inhumer avec toute la magnificence possible. Ce dévouement filial étonna si vivement le tyran, qu'il n'osa pas s'y opposer. (Bérault-Bercastel, Hist. de l'Église.)

Devoirs des parents envers leurs enfants. — Les enfants fidèles à leurs devoirs font le bonheur de leurs parents , mais c'est aux parents à se préparer ce bonheur par une bonne éducation : leurs enfants seront tels qu'ils les auront formés, et ces enfants les traiteront comme ils auront traité leurs pères. — Impatient de la trop longue vie de son père , un chevalier du Tyrol relégua l'auteur de ses jours dans une espèce de cachot, au fond de sa basse-cour, et là, tous les matins, il lui envoyait par son fils, alors jeune enfant, une sorte de brouet dans un pot de terre. A la mort du bonhomme, le chevalier ordonna de briser le pot de terre , qui était pour lui un fâcheux souvenir. « Non, mon père, dit l'enfant, conservons le, au contraire : il servira encore quand vous serez vieux.»

Le trait suivant renferme la même morale. Un homme , vivant dans l'aisance , et n'ayant qu'un fils , eut la barbarie d'abreuver son père de dégoûts , et finit par l'envoyer à l'hôpital. Le pauvre homme demanda quelques vêtements, on les lui refusa. Il supplia qu'on lui donnât au moins , pour le garantir du froid , une vieille couverture reléguée au galetas. Par un reste de pitié , elle lui fut accordée. Le jeune fils fut chargé de la lui porter; mais il n'en remit qu'une moitié et garda l'autre. Son père, honteux lui-même de cet excès de parcimonie, crut devoir lui en faire un reproche :  « Mon papa, répondit l'enfant, j'ai conservé l'autre moitié pour vous, quand vous irez à l'hôpital. » ( Histoires morales. )

0 parents , imitez plutôt Anne , entourant de soins pieux les tendres années de Samuel; David donnant, en présence de toute sa cour, de sages leçons à Salomon son fils; Tobie formant son enfant à la crainte du Seigneur ( Tobie, 1, 10. et 4, 2) ; les parents de Suzanne, qui l'élevèrent soigneusement selon la loi sainte (Daniel, 13, 1); le père des Macchabées, qui fit de ses fils autant de héros pleins de piété et de courage (1 Macchabées, passim), etc....

Devoirs des écoliers. — Le noble Gellert, ce véritable ami de la jeunesse, s'était acquis à Leipsig l'estime et l'amitié de ses élèves. Un voyageur, passant dans cette ville, se fit conduire au tombeau de ce maître bien-aimé. Là il reste absorbé, pendant quelques moments, dans de profondes rêveries, les yeux fixés sur le mausolée du défunt. Puis il se jette à genoux, embrasse la pierre sépulcrale, et s'écrie : « Mille actions de grâces vous soient rendues, mon cher ami , pour les leçons de sagesse et de vertu que vous m'avez don nées : vous m'avez mis sur la voie du bonheur. Vos paroles , vos exemples ont formé mon cœur. » (Schmid et Belet.)

Epaminondas aimait la compagnie de son maître ; Alexandre aima , vénéra toute sa vie son précepteur Aristote ; Gratien éleva Ausone, son maître, au consulat; Charles-Quint fit élire pape son précepteur ; le duc de Bourgogne voua à Fénelon un tendre attachement, une affection filiale; Louis XV eut toujours un grand respect pour le cardinal Fleury, etc....

Devoirs des domestiques. Nous trouvons dans la Bible des serviteurs modèles en grand nombre, tels que Eliezer, ce domestique si délicat et si fidèle ; Jacob, qui passa vingt années d'un travail pénible au service de l'intéressé Laban; Joseph, qui appela les bénédictions du Ciel sur la maison de son maître, etc....

Devoirs envers les supérieurs spirituels.
— Alexandre avait conquis l'univers connu, et la terre s'était tue en sa présence. Le grand prêtre Jaddus va au-devant de lui, revêtu de ses ornements pontificaux, accompagné de ses lévites, et suivi d'un peuple immense. A cette vue le conquérant dépose son orgueil : il descend de cheval et se prosterne devant Jaddus. Parménion, favori du prince, s'en étonne et lui en demande la raison. Alexandre fait cette réponse , digne d'être gravée dans le cœur de tous les chrétiens : Ce n'est pas lui que j'adore, c'est le Dieu qu'il représente. Personne n'ignore quel fut le respect d'Attila , ce terrible fléau de Dieu, pour saint Léon et saint Loup; quelle fut la conduite de l'usurpateur Maxime envers saint Martin, celle du grand Constantin au concile de Nicée, etc....  Saint Antoine se prosternait devant les prêtres, et leur demandait leur bénédiction ; sainte Catherine baisait les traces de leurs pas ; saint François disait : « Si je rencontrais un prêtre et un ange, je saluerais d'abord le premier. »

Devoirs envers les supérieurs temporels. Les sujets doivent obéir aux princes (Romains 11...), et les chrétiens ont toujours accompli ce devoir, en tout ce qui n'est pas contraire à la loi de Dieu.


V COMMANDEMENT.

Vous ne tuerez point.

D. Que défend ce commandement?

R. Le meurtre volontaire, les rixes, les querelles, la haine et le désir de la vengeance.

Instruction. La charité nous obligeant à ne faire aucun  tort au prochain , ce commandement défend le meurtre qui est le tort le plus grand que nous puissions faire à notre prochain, puisque ce n'est pas seulement le priver de la vie, et de tout ce qui lui est cher en ce monde, comme son épouse, ses enfants, ses biens , son état; mais même du temps que Dieu lui a donné pour travailler à son salut. Dieu a exprimé à Noé son horreur pour ce crime : Je vengerai la vie de l'homme de la main de l'homme, quiconque aura versé le sang de l'homme sera puni par l'effusion de son propre sang : car l'homme a été créé à l'image de Dieu. ( Genèse. 9, 5, 6. ) Le meurtre est donc un crime abominable et il ne peut jamais être commis impunément, parce que c'est un tort irréparable fait à notre prochain, un audacieux mépris de Dieu, dont l'homme est l'image, une usurpation, une révolte contre l'autorité divine. Mais comme Dieu est le Maître de la vie et de la mort, et comme personne ne peut avoir aucun droit sur la vie d'un autre qu'il ne le tienne de Dieu, il est permis de tuer dans une guerre juste pour la défense de l'empereur et la patrie ; et les magistrats peuvent condamner les criminels à mort, parce que c'est prévenir le meurtre que de le punir, et que ce n'est point contredire le commandement, mais poursuivre le but même qui l'a motivé : Le magistrat ne tient pas en vain le glaive . (Romains 13, 4 . ) Du reste, il n'est jamais permis de se venger soi-même , encore qu'un autre nous ait fait une injure qui mérite la mort; car nul ne peut être juge dans sa propre cause. Si le contraire était permis, ce ne serait partout que sang et boucherie. C'est pourquoi Dieu s'est réservé la vengeance, et il a les rois et les magistrats pour l'exercer sur la terre, toutes les fois que la justice le demande.

Conséquemment le duel est un crime horrible, parce que l'homme privé cherche sans aucune autorité à se venger lui-même, et qu'en même temps il expose témérairement sa propre vie : Vous ne vous appartenez point à vous-même. ( 1 Corinthiens 6, 19. ) Vous n'avez donc aucun pouvoir sur votre propre vie, ni sur celle d'aucun autre.
Pour la même raison, ce commandement défend tout ce qui a une tendance naturelle au meurtre : comme les querelles, les rixes, les mutilations dans lesquelles il y a une méchanceté de cœur qui équivaut au meurtre. La colère, la haine, le désir de la vengeance, tombent aussi sous la même prohibition , parce que c'est du cœur et de la volonté que pro vienne crime du meurtre , avant que l'acte ne soit commis.

Avec quel soin ne devez-vous pas éviter de provoquer ces passions dans les autres , d'ouvrir la voie aux querelles ou de les encourager par votre présence ? Gardez-vous en paix avec tout le monde, et jouez, autant que possible, le rôle de conciliateur parmi les autres ; autrement vous répondriez du sang répandu aussi bien que les auteurs du crime : Bienheureux les pacifiques, parce qu'ils seront appelés enfants de Dieu. (Matthieu 5, 9.) Tous ces péchés étant les effets naturels de l'orgueil et de la colère , ils ne peuvent être prévenus que par l'humilité et la patience. C'est pourquoi on nous avertit si souvent de nous humilier nous-mêmes , de posséder notre âme dans la patience , de remettre entièrement notre cause à Dieu , de ne pas accueillir dans notre cœur le moindre sentiment de colère , de méchanceté ou de vengeance , qui souvent éclatent en voies de fait et actes qui aboutissent au meurtre. Ce commandement nous enjoint aussi d'éviter le scandale, qui rend coupable du meurtre des âmes , en les faisant tomber dans le péché. De terribles malédictions ont été prononcées contre le scandale , dans l'Évangile.

Exhortation. Apprenez donc , ô chrétien , à détester et à abhorrer le meurtre volontaire comme un crime des plus énormes et qui crie vengeance au ciel. Souvenez-vous du
châtiment infligé à Caïn pour avoir versé le sang de l'innocent Abel. Que dis-je ? on n'épargnait pas même la bête qui s'était souillée de sang humain : « Elle mourra certainement, dit le Seigneur. » Vous n'avez pas le pouvoir d'enlever un cheveu de la tête de votre prochain , ni la permission d'entretenir un sentiment de colère ou de vengeance contre lui, ou de l'outrager par d'injurieuses paroles, encore moins pouvez-vous le frapper ou le mutiler. L'amour est l'accomplissement de la loi ; toutes les fois que vous détruisez ou diminuez l'amour du prochain, vous devenez violateur de la loi ; et comme son accomplissement est la vie, sa violation est la mort. Que de fois le Christ ne vous a-t-il pas prémunis contre les moindres offenses à la charité : Quiconque se met en colère contre son frère, sans raison qui l'y autorise, méritera d'être condamné par le jugement , et celui qui l'appellera fou , avec un sentiment de mépris et de méchanceté , méritera le supplice du feu. (Matthieu 5, 22. ) Quiconque hait son frère est un homicide. ( 1 Jean, 3, 15. )

Avant d'offrir votre don à l'autel , allez d'abord vous réconcilier avec votre frère , et ensuite revenant vous ferez votre offrande. (Matthieu 5, 24.)
Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. ( Matthieu 5, 24.) L'Évangile ordonne de faire du bien aux autres et défend de leur faire aucun mal, soit en parole soit en action. Mais gardez-vous surtout de tuer l'âme du prochain par le scandale , péché trop commun parmi les chrétiens ! Ah ! combien ont appris par les mauvais exemples des autres à mentir, à jurer, à donner des malédictions ! Combien deviennent ivrognes , libertins , sans souci de la religion par les blâmables conversations des autres ! Il n'est pas de crime que la bouche du Christ ait maudit autant que le scandale : Malheur au monde à cause des scandales. (Matthieu 18, 7.) Puisqu'il en est tant, hélas ! qui éloignent les autres du bien par leurs vices , et leurs mauvais exemples , efforcez-vous donc d'attirer votre prochain à la vertu par l'édification de votre vie : car aussi terrible sera le châtiment de celui qui scandalise, aussi éclatante sera la récompense de celui qui édifie : Ceux qui enseignent aux autres la justice brilleront comme, des étoiles «pendant toute l'éternité.» (Dan. 11, 3.) Si en quelque circonstance vous avez causé la perte d'une âme, la ruine spirituelle de votre prochain, implorez votre pardon et expiez cette faute de tout votre pouvoir, non-seulement par la contrition intérieure , mais par une conduite aussi édifiante à l'avenir que le peuvent exiger ceux que vous avez scandalisés.

HISTOIRES.

Ce que défend ce commandement.  A peine le traître. Judas a-t-il livré à la haine, des Juifs son Maître et son Dieu, qu'il s'abandonne par le désespoir aux puissances de l'enfer, et termine sa vie en s'étranglant lui-même. « C'est pour son crime qu'il se tua, dit saint Augustin, mais par un second crime. »

Le premier homicide.  Caïn , fut le triste modèle de tous ceux qui marchèrent sur ses traces, et pour la cause du crime, et pour la manière de le commettre, et pour le châtiment qui en fut la suite. Voyons donc dans un seul homicide tous les crimes de ce genre. La piété d'Abel attira sur lui et sur ses dons les regards du Seigneur ; au lieu que Caïn , par son impiété et son avarice , avait éloigné de lui le cœur de Dieu. Caïn voyant la préférence que Dieu accordait à son frère, conçût une secrète jalousie contre lui. Un
jour il lui proposa une promenade, et lorsqu'ils furent dans un lieu écarté, il se jeta sur lui et le tua. Ce crime arma la justice divine, et son châtiment annonça aux hommes que la Providence veille sur eux, pour punir le vice, et pour protéger la vertu. « Caïn, qu'avez-vous fait ? lui dit le Seigneur. Le sang de votre frère que vous avez répandu , crie vers moi et appelle ma vengeance : vous serez maudit sur la terre que vous avez souillée de ce sang ; vous y serez errant et fugitif tous les jours de votre vie. » Caïn, livré à des remords cuisants, et agité de continuelles terreurs, devint vagabond sur la terre. ( Genèse, 4 )

Causes et effets de ce crime. — Les causes de l'homicide sont les jalousies, les colères, les haines, les désirs de vengeance. Les frères de Joseph sont jaloux , et ils le descendent dans une citerne ( Genèse, 37); Le roi Saül entre en fureur, et il veut percer David (1 Rois, 18, 8) ; Le Roi Achab s'irrite du refus de Naboth, et il verse le sang innocent (III Rois, 21) ; Le conseiller Aman est froissé dans son orgueil, et il jure la perte de Mardochée (Esther, 3) ; Hérodiade nourrit dans son cœur la haine et la vengeance, et la tête de Jean-Baptiste tombe; les Pharisiens brûlent d'assouvir leur haine, et Jésus- Christ est crucifié.

L'impiété et les passions sont les deux sources premières et fécondes par- dessus toutes de ce crime horrible. — L'impudique et schismatique roi d`Angleterre Henri VIII immola à sa fureur deux cardinaux , trois archevêques, dix-huit évêques , treize abbés, cinq cents prêtres ou religieux, soixante chanoines, cinquante docteurs, trois cent trente-sept gentilshommes, parmi lesquels le célèbre Thomas More, cent dix femmes de condition, etc.... Sur le point de mourir, il s'écria : Que je suis malheureux de n'avoir jamais épargné aucun homme dans ma colère , ni aucune femme dans ma passion ! » C'était reconnaître, mais un peu tard, la double source de ses crimes et de son malheur.

Les remords les plus affreux , une mort sanglante, sont dans ce monde les châtiments ordinaires de l'homicide. — Constantin II , ayant fait tuer son frère Théodore, croyait tous les soirs le voir lui présenter une coupe de sang, en disant : Bois, mon frère, bois ! L'horreur qu'il en conçut le porta à courir le monde , ayant ce spectre toujours présent, jusqu'à ce qu'enfin il périt misérablement. ( Mappemonde historique. )

Un autre scélérat , ayant tué un enfant , il lui semblait toujours l'entendre lui répéter : Barbare, pourquoi m' as- tu assassiné? Le malheureux homicide entra dans un couvent, mais l'enfant continua de le poursuivre de cet éternel reproche : Barbare , pourquoi m'as-tu assassiné? Enfin, pour calmer sa conscience, il alla faire en justice l'aveu de son crime, et il périt sur l'échafaud. ( S. Liguori, Instruction sur le Décalogue. )

Adonibesech faisait couper les extrémités des pieds et des mains aux rois vaincus : vaincu par les Israélites , il subit le même traitement. (Juges, 1.) Achab et Jézabel font mourir injustement Naboth : le premier est tué par les Syriens , la seconde dévorée par les chiens, toute leur postérité détruite par Jéhu. (4 Rois, 9.) Jésus-Christ l'a dit : Celui qui frappe de l'épée périra par l'épée.

Le cinquième commandement ne défend pas seulement ce qui blesse, ce qui tue le corps, mais aussi ce qui porte atteinte à l'âme, et c'est ce qu'on appelle le scandale. Un seul trait nous fera comprendre l'énormité de ce crime. Un homme instruit dans sa religion et habile dans ses affaires, eut un petit-fils qui fut nommé Claude. Son enfance fut digne de la pieuse éducation qu'il reçut ; mais la connaissance d'un camarade vicieux , fréquenté à l'insu de ses parents , le plongea bientôt dans tous les désordres d'une jeunesse sans frein.  Les larmes et les corrections de son grand-père , les avertissements et les bontés du pasteur, tout fut inutile. Le vieillard, sur le point de terminer sa carrière, appela, bénit ses enfants ses petits -enfants rangés autour de sa couche funèbre ; Claude manqua seul à l'appel. « Où est Claude ? s'écriait le bon père , le malheureux enfant ! Je veux le bénir encore ! Peut-être les paroles d'un mourant toucheront-elles son cœur ? » Lorsque Claude se présenta, son aïeul venait d'expirer. Claude réfléchit, rentra en lui-même et fit aux pieds de son bon , de son vénérable pasteur une confession qui le combla de consolations ineffables. Les gens de bien applaudirent à cet heureux changement, mais les libertins du voisinage dont Claude avait été le complice et la victime , jurèrent de le ramener à leur parti. Collin , le coryphée d'entre eux , ouvrit le feu d'attaque : « Te voilà donc devenu dévot, Claude ? — Dévot, non ; mais je veux devenir honnête homme. — Allons donc !, tu plaisantes ! est-ce que le bon Dieu te fait peur, par hasard ? — Oui, je crains Dieu, et après lui, ceux qui ne le craignent pas.— Bon ! il est facile de voir que M. le curé t'a entortillé. Je parie que tu iras bientôt à confesse. — Ma confession est faite ; je te conseillerais fort aussi d'écouter M. le curé. — Sais-tu que nous nous sommes bien amusés dimanche au sujet de ta conversion ? etc... » Claude garda le silence : le respect humain mettait sur lui sa main de fer. « Tu ne réponds rien, continua l'émissaire de satan, tu vois donc que j'ai raison. Allons, promets-moi de te trouver dimanche au Lion-d'Or, pour y noyer dans une bouteille toutes ces idées mystiques. » Claude s'en défendit: alors avec vivacité ; puis sur une menace de Collin de révéler un mauvais acte de sa vie, il chancela. Dimanche, Claude sortit , le cœur pressuré entre deux craintes, celle de Dieu et celle des hommes ; malheureusement celle des hommes l'emporta. Collin qui guettait sa proie, l'aborda, en disant : Eh bien ! tu es: raisonnable aujourd'hui sans doute. » Un frisson de terreur parcourut tout le, corps de Claude : «Allons,, dit-il, puisque tu le veux; mais c'est pour la dernière fois ! » L'infortuné jeune homme, venait, de prononcer sa sentence- Le Lion d'Or était à deux lieues : on se dirige de ce côté...

Le soir six jeunes gens rapportaient le cadavre d'un jeune homme :  il avait le crâne brisé , et deux coups de couteau dans le ventre. C'était le cadavre de Claude ! Quelques jours après, on lisait dans les journaux l'annonce suivante : « On a retiré du Tarn le cadavre du nommé Collin, auteur présumé de l'assassinai commis sur la personne du nommé Claude... Il paraît qu'une rixe violente s'est engagée entre ces deux jeunes gens sur le chemin qui conduit au Lion-d'Or, et qu'après avoir tué son ami, Collin s'est, noyé de désespoir. « Voilà les effets du scandale. (Noël, Catéchisme de Rhodez.),

Ce que nous prescrit ce commandement : De prendre, soin, du corps et de l'âme de notre prochain: Un jour parut à Limoges un homme qui se tint d'abord immobile sur le pont, et se jeta dans la rivière. « Viens, mon frère, s'écria un enfant de 14 ans, voilà un homme qu'il nous faut sauver; » Les deux frères se précipitent, et parviennent , non sans beaucoup de peine, à ramener ce malheureux sur le bord:. «Ne; t'avais-je pas bien dit- que nous le sauverions», s'écria le plus jeune ! Et un» vive joie brillait dans leurs regards. La foule accourt et leur offre des présents.  « Merci, répondent-ils constamment, cet argent, donnez-le à cet infortuné, il en a plus besoin que nous. » C'était procurer de toutes façons le bien de ce malheureux que le besoin seul avait poussé à cette action désespérée: ( Belet. )

Ouvrez l'histoire ecclésiastique , et vous trouverez que les enfants de la vraie religion, qui est charité, n'ont jamais oublié une seule misère corporelle du prochain. Bien que consul et membre de la noblesse romaine , saint Gallien soignait les malades en personne , leur donnant la nourriture et les secours dont ils avaient besoin. (Dom Ruikart, Act. des Martyrs.)

Jean , disciple de saint Ammon , servit pendant i 2 ans un malade très impatient, sans donner aucun signe de mécontentement. (Vies des Pères.)

Au troisième siècle , lors de l'invasion de la peste , les chrétiens soignaient tous ceux qui en étaient atteints , avec un zèle que ne rebutèrent jamais les plus humbles fonctions de la charité. (Eusèbe , Hist. livre 7 , ch. 22 ) Nous pourrions citer mille faits de la même nature.

Pour être dans la disposition d'accomplir ces devoirs et les accomplir réellement, il faut pardonner les injures, être doux, patient, bienveillant envers le prochain. — La populace révoltée porta l'audace jusqu'à jeter des pierres aux statues de Constantin ; les courtisans de ce prince l'exhortaient à tirer une vengeance éclatante de cet attentat , commis , disaient-ils , contre sa personne. Mais Constantin portant la main sur son visage , leur dit avec douceur: « Il faut que la blessure soit bien légère, puisqu'il n'en reste aucune trace. » (Hist. de l'Église, passim.)

Tandis que Fernandez, compagnon de saint François-Xavier, prêchait au peuple, quelqu'un s'approcha de lui, comme pour lui parler, et lui cracha au visage. Le Père s'essuya sans rien dire , sans faire paraître aucune émotion, et continua tranquillement son discours. L'admiration fut générale, et beaucoup de conversions s'en suivirent. (Histoire de saint François-Xavier. ) —

Saint Vincent de Paul passait dans une rue de Paris, pendant les troubles de la Fronde; sous prétexte qu'il l'avait heurté, un homme furieux lui donna un soufflet. Vincent eût pu le faire arrêter; au lieu de cela, il se mit à genoux, tendit l'autre joue, s'avoua pécheur, et demanda pardon. Le lendemain le coupable était aux pieds de l'homme de Dieu. Vincent se le gagna par sa douceur, puis il le gagna à Dieu par sa charité. ( Vie de saint Vincent de Paul. )

Pendant les sanglantes journées de juin 1848, le général Damesme , à peine âgé de 40 ans, tombe mortellement blessé par un insurgé qui lui tire dessus, à bout portant, du fond d'une cave. Damesme interroge le docteur sur la gravite de sa blessure, et voyant qu'il ne répond rien, il fait à Dieu le sacrifice de sa vie dans une prière touchante ; puis,
se tournant vers la sœur de charité qui lui prodigue ses soins : « Ma sœur, lui dit-il, il faut que vous me rendiez un service : Voilà 5 francs; veuillez, je vous prie, faire dire deux messes, l'une pour celui qui a eu le malheur de m'assassiner, l`autre pour moi. » (les journaux religieux.)

Quant à l'âme du prochain, édifions-la par de bonnes paroles et de bonnes actions. Un père scandalisait ses enfants par plusieurs vices, et pourtant il voulait qu'ils fussent chrétiens : « Quels moyens prendrai-je pour cela? « dit-il à un digne ecclésiastique. — Donnez-leur de bons exemples, répondit celui-ci. Les enfants oublient d'ordinaire ce qu'on leur dit ; mais ils sont fort portés à faire ce qu'ils voient faire. » (De la fidèle Observation Des Comm.) —

Si un père, ou quelque autre personne a eu le malheur de donner du scandale, il doit réparer le mal autant qu'il est en lui. Toussaint désabusé des maximes philosophiques, et rendu à la religion qu'il avait si longtemps outragée , convia, la veille de sa mort, sa famille et plusieurs de ses amis à une cérémonie religieuse qui devait avoir lieu chez lui. Là il reçut les derniers sacrements, et en présence du pasteur et du Dieu de l'Eucharistie, il demanda solennellement pardon à tous, conjurant sa femme, ses enfants et surtout son fils aîné, au sujet duquel il éprouvait les plus affreuses inquiétudes, d'oublier ses maximes mondaines et sa conduite trop peu religieuse, pour suivre ses recommandations dernières. Il finit par ces paroles : « Mettez-vous à genoux, mon fils, joignez vos prières aux nôtres, promettez à Dieu que vous profiterez de mes dernières leçons, et conjurez-le de me pardonner. » (Fidèle Observ. des Comm.)


VIe COMMANDEMENT.

Vous ne commettrez point d`adultère.

D. Que défend ce commandement ?

R. Toute impureté, comme l'adultère, l'inceste, le péché contre nature, etc.

D. Qu'ordonne ce commandement ?

R. Il ordonne aux époux de se garder un amour et une fidélité mutuels.

D. Qu'ordonne-t-il encore?

R. Il ordonne à tous de vivre dans la chasteté , de résister aux inclinations de la concupiscence qui porte à commettre des fautes opposées à l'institution et à la loi du mariage.

D. Pourquoi la luxure est-elle si détestable aux yeux de Dieu ?

R. Parce qu'elle souille nos corps qui sont les membres de Jésus-Christ et les temples du Saint-Esprit.

Instruction. Ce n'est pas sans raison que Dieu , après avoir manifesté sa volonté en défendant le meurtre volontaire, en vient ensuite à la défense de l'adultère ; car la plus
grande injure et le plus grand tort que nous puissions faire au prochain , après la privation de la vie , c'est de souiller le lit nuptial. Par ce crime, on n'enlève pas seulement à l'épouse son innocence, mais on enlève à l'époux son plus précieux trésor sur la terre, l'amour et la fidélité de son épouse, sa propriété qu'il ne peut abandonner à un autre, son droit que nul ne peut ravir au prochain sans la plus horrible injustice. De là résultent les conséquences les plus déplorables : l'extinction de l'amour mutuel des époux, qui cependant doit durer jusqu'à la mort ; la discorde, source de tant de péchés et de tant de chagrin dans les familles ; l'introduction d'enfants illégitimes, et mille autres maux qu'il serait trop long d'énumérer.

Le sixième commandement , tel qu'il est exprimé dans la loi de Moïse , défend également tout péché déshonnête , de quelque espèce qu'il soit. Ainsi, outre l'adultère , il défend la fornication , le sacrilège , l'inceste , le viol , le péché contre nature ; toutes les satisfactions honteuses qui souillent l'âme et outragent Dieu , toutes les libertés coupables qui blessent la modestie , toutes les fautes qu'on rougirait de commettre devant des personnes respectables, et dont le souvenir seul fait rougir celui qui les a commises. Il défend encore tout ce qui peut conduire à ces diverses sortes d'impureté, c'est-à-dire les regards lascifs sur des personnes ou des objets indécents ; les paroles trop libres et les chansons obscènes qui portent au mal ; les entretiens trop familiers qui deviennent presque toujours des occasions de chute , la lecture des romans, des comédies, des feuilletons qui corrompent les cœurs ; les spectacles, où tout ce que l'on voit, tout ce que l'on entend, enflamme ordinairement les passions mauvaises ; les excès du vin qui produisent la luxure et font tomber dans le libertinage ; enfin, il nous est interdit de nous exposer, et de faire ou de dire quoi que ce soit qui expose les autres au péril.  Combien, hélas ! sont victimes des importunités, des séductions et des pièges des autres !

Exhortation. Puisque la nature corrompue est si vivement portée aux péchés de la chair, votre soin à les éviter, ô chrétien, doit être d'autant plus grand. Évitez toutes les avenues qui conduisent à ces damnables péchés : telles que l'oisiveté, la curiosité, les mauvaises compagnies , les excès dans le boire et le manger, l'excessive familiarité avec les personnes d'un autre sexe. Pour vous préserver plus facilement des péchés de la chair, il faut fermer les yeux sur les objets qui peuvent vous y exciter, vous souvenant de ces paroles de Job : J'ai fait un pacte avec mes yeux pour ne pas même penser à une vierge. (Job, 31, 1.) Secondement, il faut rejeter la moindre pensée d'impureté dès le principe : il n'y a pas de plus grand danger que de l'entretenir volontairement dans l'imagination. Troisièmement, il faut mettre un frein à nos désirs : Quiconque regarde une femme avec des yeux de convoitise a déjà commis l'adultère dans son cœur. (Matthieu 5, 28.)

Quatrièmement, il faut interdire à nos lèvres toutes paroles et chansons déshonnêtes , car elles corrompent notre propre cœur et celui des autres. Qu'on n'entende pas même parmi vous le nom de fornication ou de quelqu' autre impureté' ou d'avarice, comme on ne doit pas en entendre parler parmi les saints. (Éphésiens 5, 3. ) Cinquièmement il faut éviter tout impur attouchement. Pour vous préserver plus complètement de ces fautes , méditez souvent les considérations suivantes 4° De même, que rien, ne nous rend plus semblant aux anges que la pureté du corps et de l'âme, rien aussi ne nous rend semblable à la brute , comme la luxure et l'impureté. 2° Nos corps sont les membres du Christ ; par la fornication ils deviennent membre d'une prostituée, puisqu'ils sont deux dans une seule chair. (1 Corinthiens 6, 15, 16) Nos corps sont les temples du Saint- Esprit- Ah ! quelle indignité de les souiller par un péché si détestable ! Il est d'autres péchés qui ne concernent pas directement le corps j mais celui-ci est un péché contre notre, propre corps; il le déshonore et souvent le ruine par d'ignominieuses, par d'affreuses maladies. 4° Les péchés d'impureté sont souvent punis dès cette vie par les châtiments d'en haut : C'est ainsi que le feu du ciel consuma Sodome et Gomorrhe. Ils ont attiré de terribles sentences sur des nations entières comme sur des familles ou des personnes en particulier. N'est-ce pas pour les punir que le déluge a submergé toute l'a terre? Dieu a condamné ce crime d'une manière spéciale. Si quelqu'un viole le temple, de Dieu, Dieu le détruira. Concluons que l'impureté exclut du royaume des cieux : Ni les fornicateurs , ni les idolâtres , ni les adultères , ni les efféminés,  ne posséderont le royaume de Dieu. ( 1 Corinthiens 6, 9, 10. ) Pour enraciner profondément la vertu de chasteté dans nos âmes , nous devons continuellement implorer l'assistance divine, pour que Dieu crée en nous un cœur pur et renouvelle dans nos entrailles l'esprit de droiture. Notre prière doit être constante et persévérante puisque les tentations ne cessent qu'avec la vie , et que nos meilleures résolutions sont faibles et mobiles. N'oubliez jamais d'étouffer la pensée impure dès qu'elle parait , avant que votre âme y ait pris plaisir ou lui ait donné son consentement.

HISTOIRES.

Ce que défend ce commandement. — Les effets et les punitions du péché contre la sainte vertu viennent à l'appui des défenses du Seigneur. L'empereur Galère s'était livré à tous les désordres des passions impures une affreuse maladie contre laquelle vint échouer l'art des médecins, en fut le fruit. Depuis les hanches jusqu'aux pieds , la partie inférieure de son corps tombant en dissolution , n'offrait plus qu'un amas hideux de pourriture et de chairs en putréfaction. Des pertes de sang continuelles , des ulcères dont la puanteur infectait tout le palais , la multitude toujours croissante des vers qui le rongeaient , faisaient tout à la fois de ce malheureux prince un objet de compassion et d'horreur. (Eusèbe. Hist. Ecclés. livre 8, ch. 16.)

Le sort des âmes corrompues est bien pire encore. Un esclave du démon de l'impureté est frappé d'une maladie mortelle. On l'exhorte à la pénitence, mais le seul nom de la confession lui est insupportable. Instruit de cette obstination d'un gentilhomme de sa nation , saint François de Borgia , alors en Espagne , tombe au pied de son crucifix , et demande au Seigneur le salut d'une âme rachetée au prix de son sang. « Allez, François, allez, exhorter ce malade à la pénitence,» lui crie une voix mystérieuse. Le saint y court, tentative inutile! Le moribond ne veut pas entendre parler de confession. Saint François se prosterne de nouveau devant son crucifix, de nouveau il prie, et la même voix se fait entendre une seconde fois. Alors François revint armé de son crucifix , qui tout- à-coup, ô miracle ! paraît déchiré de plaies, et couvert de sang. La charité de François prie, presse, conjure. Le moribond est plus insensible que les rochers du Calvaire. Il meurt en blasphémant, en reniant son Dieu. Mort effroyable ! éternité plus terrible encore ! C'est le fruit, c'est le châtiment de l'impureté ! ( Tiré du procès de canonisation de saint François de Borgia.)

Ce que ce commandement prescrit. — Un jeune homme, nommé Alexandre, joignait à la noblesse de la naissance une éclatante beauté. Mais telle était son estime de la pureté qu'abandonnant la maison paternelle , il se retira dans les bois pour se faire charbonnier. Lorsqu'il se voyait couvert de poussière et de suie , il s'écriait avec l'accent de la joie : « Cette noirceur est un masque qui dérobe ma figure aux regards d'un monde corrompu , et me préserve de tout péril. » Saint Grégoire thaumaturge connut ce vertueux jeune homme, qui sous un extérieur négligé avait conservé une pureté angélique, et le fit nommer évêque de Comane. (Hist. De l'Église.) —

Potentienne, esclave d'une grande beauté, refuse de se rendre aux désirs corrompus de son maître. Celui-ci la dénonce au gouverneur auquel il promet une grande somme d'argent s'il triomphe de la résistance de Potentienne. Le juge inique fait tourmenter la chaste vierge ; elle demeure inébranlable ! Il fait préparer et placer une grande chaudière pleine de poix sur un feu ardent , puis lui dit en fureur : « Obéis à ton maître , ou tu vas être jetée toute vive dans cette chaudière bouillante. — Je ne puis croire , répondit la vierge , qu'un juge puisse me commander de pareilles choses. » Pour toute réponse le magistrat en courroux ordonne qu'on la jette dedans. Plus soucieuse de sa modestie que de sa vie, Potentienne lui dit : « Commandez qu'on m'enfonce peu à peu , habillée comme je suis , dans cette chaudière ardente. » Le plaisir de prolonger ses tortures fit condescendre à ce désir, et Potentienne, par un prodige de la grâce divine, vécut trois heures dans ce bain brûlant. Après quoi son âme ornée de la double couronne de la virginité et du martyre , s'envola vers son céleste époux. (Pallade, Hist. Lausiaque, eh. m.)

Remèdes au vice impur. — Le travail , contrepoison de l'oisiveté, cette école d'une foule de vices. Saint Jérôme, au désert de Chalcis ou dans sa solitude de Bethléem , se trouva en but à de violentes tentations. Quel moyen prit-il pour y résister ? Outre de grandes austérités, la pensée du jugement et de ferventes prières, il se voua à des travaux opiniâtres et persévérants , apprenant l'hébreu , en dépit d'un dégoût presque insurmontable, traduisant et commentant les saintes Écritures , se livrant même à l'éducation toujours si pénible de l'enfance. (F.-Z. Coixombet. Hist. de saint Jérôme )

La tempérance : Quand saint Hilarion éprouvait de mauvaises pensées , il se frappait la poitrine et disait en s'adressant à son corps : « Vil animal, je t'empêcherai bien de regimber; au lieu d'orge, je te donnerai de la paille ; je te fatiguerai par le froid et la chaleur, afin que tu ne songes plus à la lubricité. » Le saint homme tenait parole : il ne prenait sa réfection qu'après trois ou quatre jours , sustentait son corps d'un peu de figues sèches, et, pour que le travail ajoutât encore aux jeûnes et à l'abstinence , il bêchait péniblement la terre avec un noyau. ( Saint Jérôme, Vie de saint Hilarion. )

La modestie dans les vêtements.
Une femme de qualité , vieille et fort parée, demanda un entretien secret à saint Louis , qui le lui accorda , en présence de son confesseur, toutefois. Après l'avoir entendue : « Madame, lui dit le saint roi, j'aurai soin de votre affaire, si, de votre côté, vous voulez avoir soin de votre salut : la beauté du corps passe comme la fleur des champs ; il faut songer à la beauté de l'âme qui ne finira point. » Ce discours fit impression : la dame s'habilla plus modestement , et fit pénitence du temps qu'elle avait perdu en de vains ajustements. (Vie de saint Louis.)

Le respect de la pudeur. Madame Élisabeth , sœur de Louis XVI , marchait à la mort avec vingt-quatre victimes qu'elle exhortait à la résignation. Lors que le moment fut venu de monter à son tour sur le théâtre du martyr, son fichu se dérangea et tomba aux pieds du bourreau. Ses mains, retenues par d'infâmes liens, ne pouvaient réparer ce désordre ; c'est à l'homme dont le bras est levé pour lui donnes la mort, qu'elle s'adresse d'une voix suppliante : Au nom de la pudeur, lui dit-elle, couvrez-moi le sein. Ce furent ces dernières paroles , et ces paroles sont une grave leçon pour toutes les personnes de son sexe. ( Vie de madame Élisabeth.)

Fuite des occasions prochaines: « Parmi ceux qui se trouvent dans l'occasion prochaine de pécher contre la pureté, il n'y a de victorieux, dit saint Philippe de Néri, que les poltrons qui prennent la fuite. » C`est ainsi que Joseph échappe au péril qui menace son innocence ; pour se débarrasser des criminelles sollicitations de la femme de Putiphar, il laisse son manteau entre ses mains et s'enfuit. (Genèse, 30, 4.) —

Fuite, des regards. On vit plus d'une fois, l'empereur Charlemagne fermer sa fenêtre et tirer ses rideaux pour n'être pas exposé à voir passer dans la rue des personnes du sexe trop élégamment parées. (Lohner. )

L'horreur des paroles mauvaises.  Saint Bernardin , tout jeune encore , avait un extrême amour pour la pureté. Entendait-il proférer une parole malséante, il rougissait aussitôt et laissait voir par là l'extrême douleur qu'il éprouvait. Aussi , à son approche , ses camarades pleins de respect pour sa vertu , s'écriaient : « Voici Bernardin ! voici Bernardin ! » et immédiatement toute conversation déshonnête cessait. ( Lohner, Biblioth. )

Fuite des mauvaises lectures , surtout des romans. Une mère vertueuse avait élevé son fils dans les sentiments dont elle était elle-même pénétrée, et Dieu avait béni cette éducation éminemment chrétienne. Dans les derniers moments de sa vie, cette tendre mère le fit appeler, et , après lui avoir donné d'utiles leçons, elle lui recommanda de ne jamais éloigner de lui un vieux domestique , ni Médor, son chien favori. Elle croyait avoir laissé dans la personne de son fils l'héritier de ses vertus. Mais hélas ! il eut le malheur d'être introduit dans une société d'incrédules, qui, pour lui former l'esprit , disaient-ils , lui firent perdre ses mœurs avec sa foi. Sages leçons de sa mère , vertus acquises , habitudes chrétiennes, pratiques pieuses, tout fut mis de côté : c'était le triomphe de l'impiété, le règne des passions. Le jeune homme devint méconnaissable. Personne n'osait l'avertir, et seul le vieux domestique osa le rappeler à la vertu. Un jour que notre jeune incrédule paraissait soucieux, il lui dit sans détour, avec cette noble hardiesse que donnent la conviction et le dévouement : « En vérité , mon maître , je trouve que vous avez bien tort de tant lire ; car depuis que vous lisez tant , vous ne vivez pas mieux que Médor, qui n'a jamais rien lu. » Ces paroles furent pour le jeune homme un trait de lumière : il se rappelle ce qu'il a été, ce qu'il est devenu, et aussitôt, il embrasse ce serviteur, en qui il trouve un si bon maître , et va reporter à son instituteur philosophe ses livres accompagnés de cette courte lettre : « Voilà vos livres, reprenez-les et rendez-moi le bonheur de mes premières années ! » Combien imitent ce jeune homme dans son égarement, sans l'imiter dans son retour ! ( Noël , Catéch. de Rhodez.)

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Mar 22 Nov 2016 - 12:49

VIIe COMMANDEMENT.

Vous ne déroberez point.

D. Que nous défend ce commandement?

R. De faire du tort à notre prochain par le larcin , le vol , la fraude ,mou l'injustice dans le commerce.

D. Que doit faire celui qui a causé du dommage au prochain ?

R. Il doit réparer ce dommage , du moment que la restitution est possible. Sans cela, son péché ne peut être pardonné.

D. A quoi nous oblige ce commandement ?

R. A être juste dans nos relations commerciales et à payer nos dettes selon la justice.

Instruction. De même que Dieu a donné une loi pour protéger la vie de l'homme, une autre pour le préserver de toute atteinte dans la personne de son épouse qui est un autre lui-même, de même a-t-il donné un troisième commandement pour protéger sa propriété : Vous ne déroberez point. On commet le vol soit clandestinement, soit ouvertement et avec violence ; on trompe dans le commerce ou au jeu. De petits vols commis par la même personne à diverses reprises et montant ensemble à une somme considérable blessent ce commandement, autant que si le total avait été volé en une seule fois : car le propriétaire éprouve le même dommage et il a sur ses biens le même droit soit qu'on les lui vole à plusieurs reprises soit qu'on les lui enlève d'un seul coup. User de faux poids et de fausses mesures , de manière à voler un peu à celui-ci, un peu à celui-là, mais de sorte que le tout soit considérable, c'est violer le précepte aussi grièvement, et cette manœuvre coupable est appelée dans l'Écriture : une abomination devant Dieu.

Ce commandement est également violé lorsque l'on commet ouvertement le brigandage, lorsqu'on envahit ou que l'on saisit ce qui appartient aux autres, par exemple dans une guerre injuste, soit lorsqu'on les force à se-déposséder par le gain d'un procès plein de corruption. On vole par extorsion et usure ; on vole en exploitant la détresse des malheureux , en torturant les fermiers, lorsqu'on sait qu'ils ne peuvent échapper au propriétaire en retenant par force ou par d'autres violences les gages des serviteurs. Le vol est un péché mortel lorsque la chose volée a du prix ou cause un dommage considérable à notre prochain ; ceux qui commettent le vol n'en sont pas seuls coupables, mais encore ceux qui les aident en quelque manière à le commettre et qui consentent à en partager le produit. Emprunter à un autre sans avoir l'intention de rendre, ou commander de l'ouvrage sachant que l'on ne pourra pas payer, c'est commettre la même injustice que si l'on volait. Ce commandement nous oblige à restitution. Tout ce que vous détenez injustement vous devez le restituer, autant que cela vous est possible, au légitime propriétaire; autrement le péché ne vous sera point pardonné : car refuser de restituer, c'est continuer le premier vol dont l'injustice subsiste toujours ; conséquemment il est vrai de dire : Sans restitution, point d'absolution : toutes les puissances de la terre n'y peuvent rien, sans le consentement du propriétaire.

La restitution n'oblige pas seulement ceux qui ont causé du dommage, mais encore ceux qui y ont contribué par leurs conseils, leur assistance ou le partage du bien mal acquis. Si vous ne pouvez restituer entièrement, ayez un regret sincère, faites ce qui est en votre pouvoir, et manifestez votre bonne volonté de vous acquitter complètement. Si celui qui a commis une injustice envers un autre meurt avant d'avoir restitué, son héritier est lié par la même obligation que lui ; et si c'est le propriétaire lésé qui meurt le premier, le débiteur doit restituer à son héritier.

Exhortation. Apprenez , ô chrétien , à détester et à éviter le péché de vol ; d'abord à raison de l'injure qu'il fait à Dieu. Dieu étant essentiellement juste aime la justice et veut que justice soit faite à chacun. C'est anéantir les effets de la bienveillance qu'il a témoignée aux autres ; car c'est lui qui est le généreux auteur de tout ce que nous possédons. C'est pourquoi il a fait ce précepte : Vous ne déroberez point ; et pour en assurer l'observation il a menacé le transgresseur de sa vengeance : Que personne ne passe les bornes , ni ne fasse tort à son frère , parce que le Seigneur tire vengeance de toutes ces choses. ( 1 Thessaliens 4, 6.) II l'exclut même du royaume des cieux : Ceux qui vivent de rapines ne posséderont pas le royaume de Dieu. (1 Corinthiens 6,10.) En second lieu, évitez le vol à cause du tort qu'il fait à votre prochain. Il lui enlève ce qu'il a reçu de Dieu. En certains cas , il porte atteinte à sa vie , en le privant de sa subsistance ; il occasionne du préjudice à son âme, en donnant naissance à des jugements téméraires sur le compte de personnes innocentes. Il engendre la haine, l'inimitié contre les voisins.

Le voleur est responsable de toutes ces conséquences en quelque degré. En troisième lieu, le vol est funeste au voleur lui-même. Il ruine entièrement sa bonne renommée, sa réputation ; il lui ôte la conscience et la religion, et lé dispose à de plus grands crimes qui souvent aboutissent à de terribles catastrophes . Judas fut d'abord un voleur; puis il trahit son divin maître, et il finit par se pendre lui-même; mais la pire conséquence du
vol, c'est de priver le voleur de la grâce et de la gloire éternelle : les voleurs n'hériteront pas du royaume de Dieu. Pour vous préserver de ce mal, évitez-en trois autres dont le vol tire généralement son origine, l'avarice, l'envie, la paresse. 1° L'avarice. Il est dans la nature de l'âme cupide de rechercher avec trop d'ardeur les richesses de ce monde, qui entraînent trop souvent à les amasser par des moyens illicites : Car l'amour des richesses est la racine de tous les maux, et quelques-uns s'y laissant aller, se sont écartés de la foi et se sont embarrassés en une multitude d'afflictions et de peines. (1 Timothée 6, 10.) Évitez ce malheur en aspirant de préférence aux richesses de l'éternelle gloire. 2° Gardez-vous de l'envie, la seconde cause du péché de vol.

Il est dans la nature de l'envie d'être triste, de murmurer à la vue des richesses des autres et d'être mécontente d'une position peu florissante; or ces sentiments suggèrent à l'envieux de ravir le bien que le prochain a reçu de Dieu : J'ai considéré tous les travaux des hommes et j'ai reconnu que leur industrie est exposée à l'envie des autres. (Ecclésiastique 4, 4.) Gardez-vous de l'envie et pour cela estimez-vous heureux de la condition où Dieu vous a placé ; soyez plein de reconnaissance pour les bienfaits qu'il vous a accordés, quelque modestes qu'ils soient, et confiez-vous dans sa providence qui revêt les lis des champs et qui ne peut oublier de pourvoir à vos besoins, vous le chef-d’œuvre de ses mains. 3- Enfin, évitez la paresse, ce vice qui trop souvent souffle la pensée de vivre aux dépens des autres : L'oisiveté a enseigné beaucoup de mal. (Ecclésiastique, 33 , 29. ) Elle a enfanté jusqu'à des voleurs et des brigands. Pour la prévenir, employez bien votre temps dans l'état que Dieu vous assigne , et menant ainsi une vie honnête, vous ne serez pas tenté d'en adopter une autre.

Si jamais vous vous êtes rendu coupable de vol, recevez cet avis de la bouche même de saint Paul : Que celui qui dérobait le bien d’autrui , ne le dérobe plus ; mais qu'il travaille de ses mains à quelque chose d'utile pour avoir de quoi donner a celui qui est dans la nécessité (Éphésiens 4, 28 ), ou pour restituer à celui qu'il a volé. En un mot, que les parents soient sévères à corriger dans leurs enfants les premières inclinations au vol ; que les magistrats punissent avec une rigueur salutaire les premiers méfaits des voleurs : cela en empêchera beaucoup de monter à l'échafaud, et cela leur rappellera les châtiments réservés aux voleurs dans l'autre vie.

HISTOIRES.

Ce que défend ce commandement. Le vol , les tromperies , les dégâts, etc. Il est rare que la main de Dieu ne s'appesantisse visiblement sur ceux qui se livrent aux vols, etc. Deux voleurs avaient résolu de dévaliser une maison. Pour cela ils louent l'appartement qui se trouve en face, et une nuit ils jettent un pont de communication de leur fenêtre à la lucarne qui est opposée. Au moyen d'une poulie ils font glisser deux larges madriers de leur croisée aux barreaux de la lucarne ; puis, l'un d'eux s'avance sur ce pont hardi, au milieu du silence et de l'obscurité de la nuit. En moins de dix minutes le plus hardi, nommé David, a fait sauter trois barreaux ; reste à forcer le contrevent. II demande une pince à son camarade, qui monte sur le pont pour passer cet instrument. Mais moins hardi que David , et se voyant à une grande hauteur au-dessus du sol, il sent ses jambes trembler : un frisson le saisit, il perd l'équilibre, tombe et va se briser sur le pavé. En même temps , soit que les madriers se fussent déplacés , soit que les cordes qui les réunissaient se fussent rompues , ils tombent en deux pièces séparées, rebondissent avec un horrible fracas , vont donner contre des devantures de boutiques qui rendent un sourd mugissement, et font voler les vitres en mille éclats. Les habitants réveillés, surpris, inquiets, accourent aux fenêtres : « Qu'est-ce donc? qu'est-ce donc, se demande-t-on de vingt endroits? — Un homme mort, moulu, écrasé, répondent quelques voix. » Quel hideux spectacle ! Le cadavre se tenait en double , les reins brisés sur une borne , les pieds et la tête touchant la terre , la figure aplatie.

Tandis qu'on cherche les causes de ce tragique événement , des plaintes arrachées par la souffrance attirent l'attention ; on cherche, on aperçoit, à travers les ténèbres, comme le corps d'un homme suspendu à une lucarne , à cinquante pieds au-dessus du niveau de la rue. C'était David : après que le pont s'était dérobé sous lui, il avait fait d'incroyables efforts pour remonter sur la lucarne , forcer le contrevent, et s'échapper par la maison de l'usurier. Vains efforts ! le contrevent le repoussait toujours. Il éprouvait dans la partie supérieure du corps d'horribles tiraillements, ses bras appuyés sur la saillie anguleuse, se déchiraient à chacun de ses mouvements, et son sang coulait en abondance . Enfin, à bout de courage et de forces, il pousse de lamentables gémissements, appelle même du secours. « Non, non, c'est un voleur, il mérite la mort, qu'il périsse, crient quelques-uns.  Des échelles ! des échelles ! crient d'autres , assez bien inspirés ; malheureusement les plus longues n'atteignent pas à moitié de la hauteur. D'autres apportent de la paille, étendent des matelas pour le recevoir. Tous frissonnaient et détournaient les yeux à ce moment critique. Alors soit que David eut lâché prise , soit que ses poignets affaiblis eussent refusé de le soutenir, il descendit ; mais au lieu de venir tomber sur les matelas, son corps, après avoir fait un ou deux tours sur lui-même , venant frapper l'enseigne d'un magasin d'épicerie, fut rejeté en arrière et alla se broyer sur le pavé. Il y avait de quoi frémir d'entendre ses os craquer et se rompre, et de les voir sortir à travers les chairs. ( Sabathier de Castres. )

0 parents corrigez dans vos enfants le vice naissant du vol. Un enfant avait soustrait à ses frères et à ses sœurs divers objets de peu de valeur ; mais c'était un début de mauvais augure, et le père crut devoir infliger une correction sévère à son fils. « Ah ! mon père, s'écriait l'enfant, en poussant des cris lamentables, c'est bien peu de chose ce que j'ai volé , et vous me punissez avec tant de rigueur ! — C'est pour que d'un petit voleur tu n'en deviennes pas un grand, lui répondit le père. » Les voleurs qui échappent à la verge de leur père tombent entre les mains des bourreaux. (Belet.)

Au reste c'est surtout la manière de corriger qui produit un effet salutaire. Un jeune enfant portait le dîner à son père, occupé à émonder la vigne. Arrivé dans un étroit sentier, au bord d'une grande vigne , il le trouve couvert de fruits qu'un vent violent a fait tomber dans la matinée. Les fruits étaient beaux, appétissants, la tentation extrême ; mais d'autre part l'œil vigilant, .et l'austère probité du père était là , que faire ? Il guette un moment où celui-ci se baisse pour son travail, et vite il ramasse et cache quelques belles poires dans ses poches ; puis il continue son chemin, persuadé qu'il n'avait point été aperçu. Mais à peine arrivé devant son père, il lit dans ses traits et dans son regard la sentence de sa condamnation. Effectivement, après un instant de solennel silence , le père dit à son fils : « Si tu veux que je mange du dîner que tu m'apportes , va d'abord reporter les fruits que tu as volés. » L'enfant obéit sur-le-champ , et conçut une telle horreur du vol que jamais dans la suite il n'en éprouva même la tentation. ( Un des Traducteurs. )

C'est le principe religieux qui est la sauvegarde de la propriété : inculquez-le à l'enfance, aux populations, et vous aurez tari la source des injustices qui désolent la société. — « Je suis content de la manière dont tu as conservé mes arbres , disait un propriétaire à un paysan chargé de la garde de son bien. — Ah ! monsieur, répondit cet homme simple , ce n'est point à moi que vous en avez l'obligation , mais bien à monsieur le curé ; ce qu'il dit dans ses prônes garde mieux que tout ce que je puis faire ici. » (Noël, Catéchisme de Rhodez.)

La religion donne une conscience délicate qui ne nous permet pas de porter au prochain le moindre préjudice. Un jour que le dauphin, père de Louis XVI, chassait avec le roi dans la forêt de Compiègne , son cocher voulait traverser une pièce de terre dont la récolte n'était pas encore levée. S'en étant aperçu, il lui cria de rentrer dans le chemin. « Mais; vous n'arriverez pas à temps au rendez- vous, dit le cocher. —  Soit, répliqua le prince , j'aimerais mieux manquer dix rendez-vous que d'occasionner pour cinq sous de dommage dans le champ d'u» pauvre paysan. » (L'abbé Proyart, Vie du, Dauphin. )

Louis XVI ne dégénéra pas de son père. Dans une circonstance absolument semblable, son cocher allais traverser un champ, de blé pour arriver plus tôt : « Prenez la route ordinaire, lui cria, le prince, le blé ne nous appartient pas. »,

Obligation, de restituer:, de payer ses, dettes d'être probe, dans le commerce, etc. Restituer est chose aussi difficile que nécessaire. Un ermite eut une vision. Il vit Lucifer qui, assis, sur son trône, demandait à un démon pourquoi il avait tant tardé à rentrer dans l'enfer. Celui-ci répondit: «Je me suis arrêté à tenter un voleur pour l'empêcher de restituer.»  Lucifer dit alors : « Infligez une pénitence à cet imbécile; à quoi bon, ajouta-t-il, perdre tout ce temps ? Ne sais-tu pas que celui qui prend le bien d'autrui, ne le rend jamais ? » ( Vies des Pères.).

Un fait à l'appui de cette triste vérité : Un homme , enrichi par la fraude et l'injustice, tombe mortellement frappé. Il rentre en lui-même, appelle un prêtre, et, sur ses avis , prépare un testament propre à réparer ses injustices. Mais sa femme l'apprend ; aussitôt elle arrive baignée de larmes , accompagnée de ses petits enfants, se lamentant et répétant : « Que vont-ils devenir ! » Le mari attendri , ébranlé , succombe ; le testament est révoqué , annulé. Un instant après l'infortuné moribond, déchiré de remords , livré à la fureur et au désespoir, rend te dernier soupir... Où est, où sera éternellement son âme? (La Sausse, Explication du Catéchisme de l'Empire.)  

Fidèles à la loi du Seigneur, gardons-nous de conserver le bien d'autrui. Suivons Zachée qui , touché de repentir, dit au Seigneur : « Je donne la moitié de mon bien aux pauvres, et, si j'ai fait tort à quelqu'un , je lui rends quatre fois autant (Luc, 19, 8) ; Le roi saint Louis, qui avant de partir pour la croisade ouvre ses trésors et annonce qu'il est prêt à réparer les injustices et les dommages commis en son nom ( sa vie ) ; saint Ignace qui demande pardon d'un tort par lui occasionné dans son enfance, et abandonne, pour le réparer, deux métairies à un homme pauvre jadis accusé de larcin, jeté en prison et condamné à la réparation du dommage , tandis que c'était le fait d'Ignace et de ses jeunes camarades. ( Il avait pénétré dans un jardin et y avait dérobé des fruits ! ( Sa vie.)

Imitez particulièrement Ponce de Lovèze. Il avait été longtemps la terreur de ses voisins et le fléau de la contrée. Touché de la crainte des jugements de Dieu , il changea de conduite , et résolut de faire une pénitence aussi éclatante que l'avaient été ses crimes. Il convoqua toutes les personnes qui ont à se plaindre de ses vols, et fixa le jour de cette grande restitution. Il commença par se prosterner aux pieds de chacun d'eux pour leur demander pardon ; puis il leur rendit en nature ce qu'il leur avait pris en argent , denrées , bétail, fruits de toute espèce. Il leur semblait retrouver les choses mêmes qu'ils avaient perdues ; leur joie égalait leur surprise.

Le nom de Ponce, depuis longtemps un objet de malédiction publique, ne fut plus prononcé qu'avec admiration et amour. Comme tout le monde s'en retournait content, Ponce dit à un paysan qui n'avait rien réclamé : «Pourquoi, mon ami, ne demandes -tu rien? — Moi, seigneur, loin de m'avoir fait du tort, vous m'avez toujours protégé. — Ne te souvient-il pas d'avoir perdu un troupeau à telle époque ? — Oh !... je vous le donne volontiers. — Il n'en sera pas ainsi, dit Ponce; et il lui fit rendre un autre troupeau. ( Histoire de l'Église.)

Le paiement des dettes est chose sacrée. Le fils d'un créancier d'un pays fort éloigné, passait à quelque distance de la maison d'un débiteur qui devait huit francs de rente depuis trente ans. Cet homme vivait-il encore? pouvait-il payer? le voulait-il, car il y avait prescription? était-ce la peine de se détourner... Enfin il arrive, en faisant ces réflexions, à la chaumière du bon homme : c'était un vieillard octogénaire , assis devant son humble foyer, entouré d'une nombreuse famille d'enfants , de petits-enfants qui l'écoutaient avec une respectueuse tendresse. Le vieillard, transporté de joie, l'embrasse les larmes aux yeux. «Ah! monsieur, lui dit-il, vous êtes le fils d'un brave homme ; je mourrai content de vous avoir vu et de m'être acquitté ; mais vous partagerez notre frugal repas. » Il n'y eut pas moyen de s'en dispenser. Lorsque le débiteur eut porté la dernière santé à son hôte, il se leva, alla détacher de l'intérieur de la cheminée un sac de cuir suspendu à une corne de bœuf, et revint lui demander combien il lui devait : « Je l'ignore , dit le créancier. — Et moi aussi, répliqua le vieillard ; mais comme le jour de l'échéance j'ai versé régulièrement la rente annuelle dans ce sac de cuir, vous pouvez compter monsieur, et vous saurez la somme. ».Il y trouva 320. francs!  (Dictionnaire d'éducation. )

Saint Eloi nous offre un double trait de probité dans les affaires. Clotaire II lui avait ordonné de lui faire un trône où l'art le disputerait à l'or et aux pierreries. Il fit un chef-d’œuvre. Mais il restait des matériaux considérables; le consciencieux orfèvre ne les garda pas pour lui : il en fit un trône aussi artistement travaillé que le premier et le porta au roi. Une autre fois il avait obtenu sans peine, du monarque un terrain pour bâtir un couvent ; mais pendant la construction il remarqua qu'on avait dépassé d'un pied la place accordée. Aussitôt il fit démolir les murs , et courut au palais demander au roi de vouloir bien lui pardonner. Ravi d'une telle délicatesse , le roi s'écria : « Voyez la probité des hommes de Dieu ! mes gouverneurs m'enlèvent des provinces sans scrupule , et Eloi n'ose empiéter de quelques pouces ! » (Saint Ouen, Vie de S. Eloi. )

Nous devons garder fidèlement les dépôts, qui nous sont confiés. Un particulier portait à un notaire la somme de 30,000 francs pour un terrain qu'il avait acquis. Mais sachant qu'on devait prêcher à quatre heures, il entre chez une connaissance et dit : « Permettez-moi de déposer chez vous quelques sacs d'argent ; je les reprendrai après le sermon. — Ouvrez cette armoire, lui dit-on; au retour vous reprendrez ce que tous y aurez mis. » Le particulier revient: Il est temps de reprendre mes écus. — Et quels écus ? — Ceux que j'ai mis là, dit-il en montrant l'armoire. —Cherchez -les, ils y sont. »  L'individu se lève et cherche : il ne voit plus de sac d'argent. D'abord il croit que c'est, un jeu; mais quand il voit que l'autre se fâche, il comprend, mais un peu tard , que c'est un fripon « 30,000 francs ! pour qui me prenez -vous, monsieur?, vous n'avez rien apporté ici, sortez de chez moi. » Il fallut bien se retirer. Le particulier se rendit chez un ami intimement lié avec le missionnaire, qui justement vint, un quart d'heure après. «Mon père, dit-il, votre sermon m'a bien fait plaisir, mais il me coûte cher: 30,000 francs» Et il raconte son histoire. Un instant après, le missionnaire sorti, va
chez celui qui avait reçu l'argent; en dépôt, et lui dit : « Je viens chercher les 30,000 francs de Monsieur.... Vous avez nié les avoir reçus, parce que vous croyez n`avoir pas de témoin; mais vous vous êtes trompé. J'en ai un à vous produire, un qui vous a vu. ». Au nom du, témoin le coupable se troubla , devint pâle et rougit. « Restituez, ou vous êtes perdu; ce témoin, c'est Jésus-Christ, c'est votre Dieu » et il lui présenta son crucifix:. « Si vous ne restituez pas, continua-t-il, vous perdez aujourd'hui votre réputation , et votre âme éternellement. » Celui que la vue de l'or avait séduit, avoua le fait, et rendit les 30,000 francs au missionnaire. {Lettres édifiantes.) -

II eût mieux fait de ne point oublier la présence de Dieu, et de se garder de cette ignoble tentation.


VIIIe COMMANDEMENT

Vous ne rendrez pas de faux témoignage contre le prochain.

D. Que défend ce commandement?-

R. Les faux témoignages, les jugements téméraires , les mensonges , la calomnie et la médisance;

D. A quoi est tenu celui qui a porté atteinte à la réputation du prochain par la détraction?

R. Il doit lui rendre satisfaction, et rétablir sa réputation compromise.

D. Qu'ordonne ce commandement?

R. De parler et de rendre témoignage conformément à la vérité en toutes choses : car le démon (ange déchu) est un menteur et le père du mensonge.

Instruction: Ce commandement, dans sa grande étendue, défend toutes les espèces d'injures et de torts que l'on fait communément au prochain par la parole, comme les
affronts;, les détractions , les calomnies. De même que Dieu a tracé une loi pour imposer à notre langue le respect de sa divinité , de même il en a porté une pour lui faire respecter le prochain : Vous ne porterez pas de faux témoignages contre votre prochain. L'amour de notre prochain, en effet, est inséparablement uni à l'amour de Dieu.

I. Ce commandement défend donc en premier lieu de prêter un faux serment au préjudice d'un autre , publiquement ou dans les rapports privés, soit devant les tribunaux , soit ailleurs , en faisant peser une accusation contre un innocent. La loi ancienne punissait ce crime en infligeant au témoin parjure le châtiment même auquel il exposait son prochain : Ils le traiteront comme il avait dessein de traiter son frère. (Deutéronome 19, 19.)

II. Ce commandement défend de mentir avec l'intention de tromper les autres, péché qui s'aggrave en proportion du préjudice qu'il cause au prochain : Vous ne mentirez point, et nul ne trompera son prochain. ( Lévitique 19,11 .) Le mensonge est de trois sortes : le malicieux fait en vue de causer préjudice au prochain ; l'officieux, qui a pour but de nous servir d'excuse à nous ou aux autres ; le joyeux, dont la fin est de divertir la compagnie. On peut ajouter à ces mensonges, les mensonges fanfarons pour se vanter soi-même, les flatteries , par lesquelles on recherche les faveurs d'un autre, tout en lui faisant injure par ces adulations mêmes. Toute dissimulation , hypocrisie , sainteté affectée tiennent aussi du mensonge, et l'Apôtre nous en détourne quand il dit : C'est pourquoi quittant le mensonge parlez tous à votre prochain le langage de la vérité. (Éphésiens 4, 25.)

III. Ce commandement défend le jugement téméraire : c'est-à-dire la censure ou la condamnation soit intérieure, soit extérieure des actions et des intentions des autres , sans fondement assuré.

IV. Il défend la détraction, ou de parler mal des autres de manière à nuire à leur réputation. Si on le fait par une accusation fausse, c'est une calomnie. Si on le fait en révélant les fautes secrètes des autres, en interprétant mal leurs actions ou leurs intentions, en niant, en diminuant ou en cachant leurs bonnes qualités, quand ils ont besoin de notre défense, ou en les louant avec une, froideur affectée, c'est proprement une détraction. Si on le fait en leur présence c'est un affront; à leur insu et par derrière, c'est une médisance ; et comme dans tous ces cas on se propose généralement de montrer le prochain pire qu'il n'est réellement, c'est en quelque degré rendre un faux témoignage contre lui. Le calomniateur et le détracteur peuvent être comparés au brigand et au voleur. Le calomniateur comme le brigand, attaque ouvertement notre bonne renommée; le médisant semblable au voleur l'attaque en secret, comme s'il craignait d'être aperçu. Les rapports injurieux tiennent aussi delà détraction, et ils sèment la mésintelligence entre amis. Vous ne serez point parmi votre peuple, dit la sainte Écriture , ni un calomniateur public ni un médisant secret. (Lévitique 19, 16.) Le même commandement défend encore les railleries , les affronts , les paroles de mépris adressés aux autres , à cause des défauts du corps ou de l'esprit qu'ils ont apportés en naissant : c'est un malheur et non pas une faute ; on ne doit pas leur en faire un reproche. Il est à remarquer que ces injures ne sont jamais plus graves que quand elles diffament et discréditent l'Église de Dieu, ses ministres, la religion : c'est faire proprement l'œuvre de Satan et travailler au triomphe de sa cause.

De même qu'il nous est défendu de dire une parole en vue de nuire à notre prochain , nous sommes tenus de parler avantageusement de lui, pour rendre hommage à la
vérité en toute occasion ; car Dieu est la vérité même et il veut qu'elle subsiste toujours : La vérité du Seigneur demeure éternellement. C'est une très-ancienne et très-juste maxime que de dire : Faire le bien et dire la vérité rend les hommes semblables à Dieu. Comme le septième commandement nous oblige à restituer son bien au véritable
propriétaire, nous sommes tenus par le huitième, si nous avons enlevé au prochain sa bonne renommée par la détraction ou la calomnie, de lui rendre satisfaction, de rétablir sa réputation en démentant ce que nous avons faussement avancé contre lui et en parlant mieux de lui à l'avenir.

Exhortation. Ici donc, ô chrétien, Dieu vous commande de ne rien dire qui porte préjudice à la réputation du prochain, à sa vie, à sa fortune. Puisque la langue vous a été
donnée pour louer Dieu et parler charitablement des autres, mettez une garde à vos lèvres et préservez - vous de trois péchés. I. Évitez d'abord le mensonge; il vous fait descendre du rang d'enfants de Dieu, qui est la vérité même, à celui de fils du démon, le père du mensonge. Les lèvres menteuses sont en abomination au Seigneur (Proverbes 12, 22), surtout lorsque le mensonge est pernicieux aux autres. Vous haïssez tous ceux qui commentent l'iniquité; vous perdez toutes les personnes qui profèrent le mensonge (Psaume 5, 7), principalement quand on l'appuie par un serment : car alors c'est une double violation du second et du huitième commandement. Aussi écoutez les reproches que Notre-Seigneur adresse aux Pharisiens qui ne cessèrent de porter de fausses accusations contre lui jusqu'à ce qu'ils lui eussent ôté la vie : Vous êtes les enfants du démon. . . , lorsqu'il ment c'est de son propre fonds qu'il parle, car il est menteur et père du mensonge. (Jean, 8, 44.)

Ne croyez donc pas que l'habitude de mentir soit une faute légère, puis qu'elle est l'origine de tant de maux déplorables et qu'elle corrompt les mœurs. C'est un vice bas et méprisable, c'est une dégradation de la raison que de parler contrairement à sa pensée et à la réalité connue. C'est la destruction de la société humaine ; car il ne peut y avoir aucun lien d'amitié, aucune sécurité entre les hommes, si la confiance mutuelle et la sincérité, qui en sont la condition essentielle, sont détruites par le mensonge. Que chacun donc se corrige de ce défaut; que les parents en particulier surveillent leurs enfants et les punissent de leurs mensonges; les enfants n'y sont que trop naturellement enclins ; 2° Évitez , en second lieu, le jugement téméraire ou cette censure des actions des autres , dont les Juifs se sont rendus coupables envers Notre-Seigneur.

Ce péché engendré par les on-dit, les jalousies , les soupçons dépourvus de certitude ou même de probabilité, trahit un cœur sans charité, un cœur porté à penser mal des autres, et ne peut manquer de tourner contre vous-même : 0 homme qui jugez, vous êtes inexcusable, qui que vous soyez; parce qu'en condamnant les autres, vous vous condamnez vous-même. (Romains 2, 1 . ) Terrible sentence ! Prenez donc le parti de vous juger vous-même pour n'être point jugé. Puisque vous ne connaissez personne aussi bien que vous, que votre jugement porte sur vous-même et qu'il serve à la conversion de votre âme.

3° Le troisième mal à éviter c'est la détraction et la calomnie; car détruire la réputation du prochain c'est violer cette loi naturelle gravée dans nos cœurs : Agissez envers les
autres comme vous voulez qu'on agisse envers vous ; c'est lui causer un préjudice plus grand que le vol : une bonne renommée vaut mieux en effet que les richesses; or la détraction a pour résultats de faire mépriser celui qui auparavant jouissait de la considération et de l'estime. Afin de remédier à ce vice, examinez-vous bien et dès-lors vous rougirez d'accuser les autres de ce dont vous êtes vous-même coupable et à un plus haut degré peut-être. Après avoir découvert une paille dans l'œil de votre frère, vous trouverez probablement une poutre dans le vôtre.

HISTOIRES.

Ce qui est défendu par ce commandement : les jugements téméraires. — Putiphar porta un jugement téméraire contre Joseph , calomnié par sa femme ; Héli contre Anne demandant avec ferveur un fils au Ciel ; les amis de Job contre ce juste éprouvé ; les Maltois contre Paul mordu d'une vipère (Genèse, 40; 1 Rois, 1, 14 ; Job,; Actes 28, 4). Le supérieur des anachorètes avait fait donner à l'illustre saint Arsène un matelas et un oreiller, à raison de ses infirmités corporelles. Un solitaire qui était venu le voir en fut scandalisé. Le supérieur le prit à l'écart et lui dit : « Qu'étiez-vous dans le monde? — Berger, répondit -il. — Conséquemment , reprit le supérieur, la vie religieuse vous a été plus douce que votre premier état. Mais Arsène était autrefois le père et le maître des empereurs , il habitait un palais et nageait au sein des délices. Entre vous et lui la différence est grande. Comment osez-vous donc trouver mauvais qu'on lui procure, où plutôt qu'on lui impose quel que soulagement dans ses infirmités et sa vieillesse ?  ( Vies des Pères. )

Ne jugeons donc pas mal des autres si facilement. — Un anneau d'or placé sur une table avait disparu un instant après. Un jeune étudiant était entré dans la maison : donc C'était lui qui l'avait ravi. On chercha , on fouilla partout sans rien trouver ; et le soupçon pesa de plus en plus sur la personne accusée. Le lendemain on apporte une miche de pain sur la table, et l'on coupe du pain. Au même instant l'anneau tombe sur la table ! La femme avait placé son anneau sur cette table , puis elle avait déposé la miche dessus  et l'anneau , par suite de la pression , s'était enfoncé dans le pain nouvellement cuit. Que de fois nous accusons les autres de ce que nous ne devrions imputer qu'à notre négligence, etc. !... (Schmid.)

Les mensonges. — Le premier menteur et le père du mensonge , c'est Satan : il a menti aux anges en leur faisant accroire qu'ils seraient semblables à Dieu ; il a menti à nos premiers parents, en leur assurant qu'ils ne mourraient point. (Genèse 3, 5.) — Giézi, serviteur d'Élisée , mentit à Naaman et à son maître ; et la lèpre fut le prix de son mensonge. ( 4 Rois , 5. ) Les prêtres de Babylone mentirent au roi en affirmant que Bel était vivant et consommait chaque jour des offrandes considérables. (Daniel, 14.) Ananie et Saphire mentirent effrontément , et sur-le-champ ils furent punis de mort. (Actes des Apôtres 5.) — Saint Jacques, évêque de Nisibe, était un saint et un thaumaturge du quatrième siècle. Un jour plusieurs pauvres le supplièrent de leur venir en aide pour donner la sépulture à l'un des leurs qui venait de mourir; et en même temps ils lui montraient son prétendu cadavre gisant à ses pieds. Le saint homme leur fit l'aumône désirée, et pria Dieu pour qu'il pardonnât à cet homme qui venait de mourir les péchés qu'il avait commis pendant sa vie ; puis il continua son chemin. Lorsqu'il fut un peu éloigné, les auteurs du mensonge dirent à leur camarade : « Allons, lève-toi. » Mais il ne répondit point. Alors ils l'agitent, le retournent, l'examinent : il était mort. Surpris , alarmés , ils courent après l'homme de Dieu, se jettent à ses pieds, fondant en larmes, et le conjurent de leur pardonner et de ressusciter leur infortuné compagnon. Saint Jacques , touché de compassion , s'adressa au Ciel , et par ses prières il rendit la vie à celui à qui ses prières l'avaient ôtée. - (Théodore, Hist. relig., ch. 1.)

Il est donc vrai de dire avec le Sage : Le pain acquis par le mensonge se change bientôt en cailloux. (Proverbes 20, 17.) Ajoutons que le mensonge est le marchepied ou le palliatif de tous les vices. « J'étais , encore enfant , d'une méchanceté très grande, dit saint Augustin ; par de fréquents mensonges, je trompais mes gouverneurs, mes parents et mes maîtres. Au mensonge vint bientôt se joindre le vol... coupable jusque dans les jeux, combien de fois, vaincu par la puérile vanité de l'emporter sur les autres, n'ai-je pas frauduleusement surpris la victoire ! » (Confessions liv. 1, chap. 19.)

La calomnie. — Du mensonge proprement dit à la calomnie la transition est facile. Ici encore c'est le démon , le diable ( calomniateur), qui est le coryphée des calomniateurs : il a accusé Job, il nous accuse sans cesse en exagérant nos péchés. Ses suppôts continuent son œuvre avec une rage digne de lui. Marie a calomnié Moïse , son frère, et a été frappée de la lèpre (Nombres, 12) ; Doëg a calomnié Achimélech, et s'est plongé dans des flots de sang (1 Rois, 21 ); la femme de Putiphar a calomnié Joseph, et l'a fait jeter dans les fers (Genèse, 40) ; les juges iniques ont calomnié Susanne, et l'ont fait traîner à la mort (Daniel, 13). On a calomnié le Saint des saints, Jésus -Christ, en l'appelant ivrogne, homme de bonne chère , pécheur et commensal des pécheurs , séditieux , perturbateur du repos public, possédé du démon, blasphémateur; on l'a traité comme un insensé, un roi de théâtre, un criminel, un voleur, un scélérat. Les apôtres et les premiers chrétiens ne furent pas mieux traités que leur Maître. Les fils des ténèbres les accusaient de tuer et de manger un enfant, après l'avoir fait rôtir, de se livrer à d'infâmes orgies et d'exécrables désordres, à un instant donné. Tertullien et une foule d'apologistes réfutèrent ces odieuses calomnies.  Plus tard on les accusa d'être les ennemis du genre humain, et en particulier de l'empire romain ; de se réjouir des calamités publiques et même d'en être la cause; de s'affliger de sa prospérité et de souhaiter sa ruine. Saint Augustin réfuta ces calomnies dans son grand ouvrage De la Cité de Dieu. Enfin on empoisonnait jusqu'aux vertus des chrétiens : leur charité était une conjuration , leurs noms de frères et de sœurs étaient mal interprétés, leurs aumônes des moyens de séduction pour se gagner les pauvres , ou un effet de l'avarice des évêques , leurs miracles des maléfices, etc. (Claude Fleury, Mœurs des Chrétiens.)

Faut -il nous étonner que les Luther et consorts aient pratiqué au suprême degré l'art de la calomnie contre l'Église de Jésus-Christ et son chef? Et le coryphée du philosophisme du dix-huitième siècle, que recommandait-il aux, siens ? « Mentez, mes amis, calomniez, il en restera toujours quelque chose. » Cette mauvaise maxime établie par Voltaire, patriarche des incrédules du dix-huitième siècle, a porté des fruits dignes de son auteur et de celui qui l'inspirait. Voyez 1793 et ses horreurs ; lisez les feuilles animées de l'esprit de Voltaire , de nos jours même : jamais sut-on débiter le mensonge et forger la calomnie avec plus d'artifice et d'impudence?

Aussi pas un saint sur qui l'infâme calomnie , mise au service de l'enfer, n'ait jeté sa bave immonde : témoins saint Grégoire Thaumaturge, saint Chrysostome, saint Athanase, etc.... saint Thomas de Cantorbéry, saint Louis, sainte Élisabeth de Portugal, sainte Thérèse,... le respectable Boudon, saint Vincent de Paul, saint François de Sales, etc.... C'est parce que la vérité et l'innocence condamnent l'erreur et la corruption , que celles-ci s'irritent et se vengent par d'infâmes calomnies. Mais si, au dire d'un philosophe,
un coup de langue ou de plume est un glaive acéré qui perce sa victime , presque toujours aussi du nuage de la calomnie qui obscurcit pour un moment la réputation du prochain , sort la foudre qui en écrase les coupables auteurs. Citons un trait à l'appui de cette double vérité.

Aétius était le premier général et le plus grand homme d'état de l'empire ( Rome 395 Ap J.C.) En fallait-il davantage pour irriter l'envie? Pour comble de malheur, le faible Valentinien prête une oreille facile à la calomnie ; sous prétexte de s'entretenir d'affaires importantes avec Aétius , l'empereur le mande au palais , et l'interroge sur divers points auxquels le général répond avec une noble franchise. L'empereur, prévenu contre lui, affecte de trouver dans ses réponses et la liberté de son langage une injure à sa personne et un oubli des égards qui lui sont dus. Sur-le-champ il tire son épée et l'enfonce dans le cœur du général. A l'instant tout le monde se rue sur lui, et le plus grand homme de son siècle, le soutien de l'empire, la terreur d'Attila, tombe sous les coups meurtriers d'un troupeau de courtisans, toujours ennemis du vrai mérite. La mort d'Aétius est triste , mais l'avenir que se prépare Valentinien ne l'est pas moins. C'est en faisant allusion à ce malheur qu'un courtisan osa lui dire : « Votre Majesté s'est aujourd'hui coupé la main droite avec la main gauche. » ( Hist. du moyen-âge, par Lebeau. )


Comment faut-il supporter la calomnie. — Lorsque l'intérêt de la religion et l'honneur de Dieu ne réclament pas une justification éclatante ? Plusieurs saints vont nous le dire. Un juge chez qui saint Vincent de Paul habitait , l'accusa de lui avoir volé quatre écus, et décria le saint , cet homme digne de l'admiration de tous les siècles , parmi ses connaissances et ses amis. Peu frappé d'une accusation si ridicule, Vincent se contenta de dire tranquillement : Dieu sait la vérité ! Ce fut là sa seule réponse, pendant six ans que ce soupçon pesa sur lui. Le véritable voleur finit par se découvrir lui-même.

Un libertin, irrité de ce que saint François de Sales lui avait arraché sa proie, contrefit l'écriture et le style du saint, et lui prêta le langage de la plus infâme passion. Cette calomnie fit des dupes sans nombre : on le regardait comme un homme corrompu, comme un hypocrite abominable. Le saint souffrit patiemment cette inculpation. Mais deux ans après , le coupable , bourrelé de remords , rétracta publiquement ce qu'il avait avancé. ( Vies de S. Vincent de Paul; de S. François de Sales...)

Il ne faut ni dire ni écouter de médisance. — Plusieurs solitaires parlaient d'une faute commise par un frère absent ; l'abbé Prior garda d'abord le silence, puis il sortit, remplit de sable un sac qu'il mit sur ses épaules, et fit de même pour un petit panier qu'il porta devant lui. « Qu'est-ce que cela signifie? lui demanda-t-on. — Ce sac rempli de sable représente mes nombreux péchés, je les mets derrière mon dos pour ne pas en rougir ni les pleurer ; ce petit panier représente les fautes de ce frère que j'ose juger et condamner. Ah ! il vaudrait bien mieux que je misse mes péchés devant moi pour y penser sans cesse. » Ce discours fut compris et produisit son effet. (Rosweide, liv. IX, n° 9.)

Quelqu'un des religieux de saint - Pacôme, abbé de Tabenne, parlait-il au désavantage d'un autre, il se retirait en grande hâte comme s'il eût fui devant un serpent. « Il ne sort rien de mauvais de la bouche d'un homme de bien, disait-il, il ne parle point de ses frères avec des paroles empoisonnées. » - ( Vies des Pères.)

Pour empêcher la médisance , si ordinaire pendant les repas , saint Augustin avait fait écrire ces vers dans la salle où il mangeait :
Loin d'ici les médisants
Dont la langue coupable
Déchire l'honneur-des absents;
On ne permet à cette table
Que des entretiens innocents.

Il arriva qu'un jour un de ses amis se mit à parler des défauts du prochain; le saint l'en reprit aussitôt , en lui disant que s'il ne cessait pas , il fallait ou effacer ces vers , ou se lever de table. Que de médisances on préviendrait si l'on usait de cette fermeté ! (Possidius, Vie de S. Augustin, chap. 22.)

Si c'est un péché de mal parler du prochain , c'en est un aussi d'user de flatterie à son égard. C'était la troisième année que le roi Hérode Agrippa régnait sur la Judée. Il vint à Césarée célébrer des jeux pour la santé de l'empereur, parut au théâtre, et s'assit sur un trône du haut duquel il harangua le peuple. C'est un Dieu, c'est la voix d'un Dieu ,crièrent ses flatteurs de toutes parts. Au lieu de rejeter cette criminelle flatterie avec horreur, Hérode eut le malheur de s'y complaire. Aussitôt un ange le frappa , et il sentit de cruelles douleurs d'entrailles. Voilà votre Dieu qui va mourir, dit-il. On le rapporta dans son palais : une plaie honteuse couvrait tout son corps ; des vers, engendrés de sa propre chair, le dévoraient tout vivant. (Joseph, Antiq., liv. 19, chap. 9.)

Un homme délicat paie d'un noble mépris la grossière flatterie : pour les sots c'est le meilleur des régals. « Quand on me loue, disait M de Marillac, j'ai envie de mettre sur une table mes lettres de garde -des -sceaux; car c'est à ma charge que ces éloges s'adressent. » — Un jour l'empereur Sigismond donna un grand soufflet à un courtisan qui avait eu l'audace de le flatter, en lui disant : Pourquoi me mords-tu, flatteur?

Il est encore un vice défendu par le huitième commandement, ce sont les faux rapports et même les rapports vrais , mais non légitimes. Cette manie, cette furie de colporter de rue en rue, de maison en maison , ce que l'on a appris sur le compte de son prochain, est un fléau pour un pays. Un seul exemple suffira pour nous le faire comprendre. La paix, la charité, régnaient dans un village depuis de longues années. Tout-à-coup éclatent dans son sein les haines et les désordres les plus envenimés. Le voisin maudissait ses voisins, une famille une autre famille ; les enfants eux-mêmes, marchant sur les traces de leurs parents , s'accablaient d'injures, etc. Quelle était la cause de ces déplorables dissensions? Les rapports d'un étranger qui était venu habiter le pays. Entrer dans toutes les confidences , se mêler à tous les cancans, c'était son plus grand plaisir. Puis , quand il avait appris quelque chose dans une maison, vite il le reportait dans une autre. En tout cela, il jouait admirablement son rôle : « Je ne devrais pas le dire , ajoutait-il avec un air de discrétion affectée ; mais là-dessus bouche close , j'espère bien que vous ne me trahirez pas. C'est donc sous le secret le plus inviolable que je vais vous dire ce qu'on pense de vous dans telle maison. Mais non ! il vaut mieux se taire ; cela vous fâcherait. »  Naturellement un début aussi piquant stimulait la curiosité des auditeurs ; de là mille instances : on pressait , on suppliait, etc. A la fin notre homme se laissant gagner, finissait par conter ses étonnantes découvertes. Comme on le devine sans peine, il ne s'en tenait pas au simple exposé des faits : ces sortes de gens aiment à broder, à se donner carrière , à mettre à profit les ressources de leur imagination. Et tout cela, notre homme, qui poussait à un haut degré le talent de l'invention, le faisait avec une habileté parfaite, une grâce inimitable. Pendant son récit, il souriait d'un air de satisfaction ; mais , lorsqu'il s'apercevait que ses auditeurs prenaient l'affaire trop au sérieux et paraissaient indignés, il ajoutait : « N'allez pas croire que j'aie ajouté foi à toutes ces fariboles , je vous crois trop honnêtes. Mais enfin , je vous le répète , on parle de vous dans telle maison : ne me compromettez pas. »  C'est par ce moyen que cet homme dangereux jeta le trouble et la confusion dans tout
un  village et en fit un véritable enfer. Hélas ! combien n'a-t-il pas d'imitateurs! (Schmid et Belet.)

Ce que nous prescrit ce commandement. — D'abord l'amour de la vérité. Il aimait la vérité le jeune Samuel qui communiqua, dans toute son intégrité , la révélation divine à l'infortuné pontife Héli (1. Rois, 3, 18); Eléazar qui refusa de recourir au mensonge pour sauver ses jours (2. Macchabée 6) ; le martyr saint Lucien, qui, sollicité de renier sa foi , répondit : Mentir n'est pas mon affaire (Lohner, Bibl.) ; saint Chrysostome, qui renonça à la carrière du barreau, dans la crainte de blesser la vérité, etc. (Sa vie.)

Des soldats, chargés par l'empereur Maximien de saisir le saint évêque Anthime , entrèrent par hasard dans sa maison et demandèrent à manger. Saint Anthime les accueillit et les traita de son mieux. Après cela ils s'informèrent du lieu où ils pourraient trouver l'évêque Anthime. « C'est moi , leur répondit le prélat , avec une admirable franchise. » Nous ne voulons pas vous prendre , répliquèrent les soldats, touchés de tant de vertus; nous dirons que nous ne vous avons pas trouvé. — Non ! mes amis , répondit le saint ; je ne permettrai pas que vous mentiez ; j'aime mieux mourir que de vous conseiller un mensonge. » Et il les suivit au tribunal de l'empereur. ( Histoire de l'Église, Vies des Saints, etc.)

Dans l'Église de Jésus-Christ l'héroïsme de la vertu est de tous les temps. C'était à l'époque de la Terreur (1793). Deux frères, revêtus du sacerdoce, sont conduits devant les juges : ils ont fait, ils ont soutenu une noble profession de foi et par conséquent prononcé leur sentence. Alors un concitoyen de ces généreux disciples de Jésus-Christ ne peut résister à l'impulsion de son cœur : intrépide défenseur de l'innocence, il se précipite aux pieds des administrateurs, et les conjure au moins de sauver le plus jeune, en leur représentant qu'ayant été ordonné prêtre pendant la révolution, il n'est pas censé fonctionnaire public, ni conséquemment assujetti aux lois qui le proscrivent. Chose étonnante ! le zèle, la chaleur qu'il met dans ses instances désarment les juges : sa demande est exaucée ! Alors il vole au jeune André , et lui dit avec l'émotion la plus vive : « Mon ami , vous êtes sauvé , j'en ai la parole , pourvu que vous disiez que vous n'êtes pas fonctionnaire public. — Ah ! monsieur, répond André, en jetant sur son bienfaiteur un regard plein de reconnaissance , mais aussi d'une foi inébranlable, la vie la plus heureuse vaut-elle assez pour être rachetée par un mensonge ! » Ce bienveillant solliciteur est pénétré d'admiration; mais suffoqué par la douleur, il s'éloigne en sanglotant ; il va mêler ses larmes à celles d'une famille respectable, et répandre sur ses peines un baume consolateur, en lui racontant ce trait d'héroïsme. ( Les confesseurs de la foi. )

On aime surtout à voir cet amour, cette passion de la vérité dans les enfants : C'est ordinairement la marque d'un caractère plein de droiture, et le gage de l'innocence.
Un camarade de saint Thomas d'Aquin, voulant badiner, s'écria un jour : «Vois- tu ce bœuf qui vole ! » Thomas , étonné , promène ses regards de tous côtés; à la vue de ce qu'il regarde comme une crédulité excessive, son ami se met à rire aux éclats. Mais le saint jette sur lui un regard sévère, en disant : « On doit croire plus facilement qu'un
bœuf vole que de penser qu'une bouche chrétienne profère un mensonge. » ( Hist. de S. Thomas. Lohner. Bibl.)

L'ombre de la tromperie faisait peur au duc de Bourgogne , cet illustre élève de Fénelon. « Un jour, dit Madame de Maintenon, il m'avait fait une réponse peu sincère; mais le lendemain il vint me dire : Madame , j'eus hier la faiblesse de vous en imposer : je n'ai pu dormir de toute la nuit , ayant ce détour à me reprocher. Je vais vous dire ma faute et la vérité. » Un enfant de neuf ans pleurait amèrement, parce que, ayant dérobé quelque chose, il craignait que son père n'en eût connaissance. Les domestiques, témoins de ses larmes, lui conseillèrent de recourir au mensonge pour échapper au châtiment. L'enfant repoussa cet expédient avec horreur : « J'aime mieux être battu que de mentir, s'écria-t-il ; que mon père fasse de moi ce qu'il voudra, je ne mentirai pas , dût-il m' assommer. Eh ! comment oserais-je encore demander quelque chose à la sainte Vierge, si je venais à mentir? » (Lohner, Biblioth.)

La franchise est si belle, que les derniers des hommes ne peuvent s'empêcher de l'admirer. Saint Jean de Kent voyageait pour Rome, portant son sac sur son dos. Des brigands l'attaquent, lui enlèvent ce qu'ils trouvent sur lui; puis, après l'avoir fouillé avec soin, ils lui demandent s'il ne possède plus rien qui vaille la peine d'être volé. Il répond que non, et on le laisse continuer sa route. Mais à peine a-t-il fait quelques pas,-qu'il se rappelle qu'il lui reste encore des pièces d'or cousues dans son manteau. Aussitôt il court après les voleurs , leur confesse qu'il n'a pas dit la vérité , et leur offre ces quelques pièces d'or. Étonnés d'une telle délicatesse de conscience , les voleurs refusent de les accepter, et lui rendent même ce qu'ils lui ont pris. . (Guillois, Explication...)

Réparer le mal causé par la calomnie ou la médisance. — C'est là une obligation rigoureuse, mais une obligation difficile. Un jeune homme alla consulter un théologien distingué de son époque, et lui dit : « Dans une société distinguée je me suis permis d'accuser une illustre dame de la cour, généralement estimée par la régularité de ses mœurs, d'entretenir des liaisons suspectes. Cette accusation est une fable, une pure calomnie : aussi ma conscience m'en fait-elle d'amers reproches. Dites-moi ce qu'il me faut faire. » Alphonse de Castro, c'était le nom de ce théologien fameux, se tut pendant quelques secondes; puis il dit en poussant un profond soupir : « Hélas ! monsieur, votre chute est de celles dont on ne guérit pas . » Ces paroles ne laissèrent au calomniateur aucun repos : il se rendit auprès d'un théologien de Salamanque, qui trouva Alphonse de Castro un peu trop sévère. Le jeune homme se sentit respirer plus librement : « Je vous en prie, imposez-moi quelle pénitence vous voudrez, elle me sera douce, pourvu que je retrouve le calme de la conscience.—  Oh ! repartit le théologien, vous n'avez pas besoin de recourir à des œuvres satisfactoires très-difficiles. Vous n'avez qu'une chose à faire, c'est d'aller chez toutes les personnes qui vous ont entendu, et de leur déclarer que ce que vous avez dit sur le compte de cette dame est une pure calomnie, et tout sera fini. » A ces paroles, le jeune homme sentit le sang lui monter à la figure : il raidit ses poings, grinça des dents, et s'écria avec fureur : « Me déshonorer au point d'aller déclarer à des personnes haut placées que je suis un menteur, un calomniateur ! jamais je ne le ferai , cela m'est absolument impossible! » A ce triste aveu, le savant poussa un profond soupir, et ajouta : « Hélas ! je vois maintenant qu'Alphonse de Castro ne s'est pas trompé ! » — Évitons donc avec soin les médisances et les calomnies, puisque la réparation en est si difficile. (D'après J. Banuza.)

Pratiquer en toutes choses la discrétion. — Firmus , évêque de  Tagaste en Afrique , montra par sa généreuse fermeté qu'il était véritablement digne de son nom. On persécutait les chrétiens par ordre de l'empereur. Les inquisiteurs du prince , sachant qu'un proscrit avait trouvé un asile chez le saint prélat, vinrent le presser de le leur livrer. « Je ne puis ni mentir ni vous découvrir celui que vous cherchez, leur répondit-il; je l'ai caché, et vous ne saurez jamais le lieu de sa retraite. » Outrés d'indignation , les officiers se saisirent de sa personne et lui firent souffrir d'horribles tourments pour le forcer à leur découvrir le chrétien qu'il recélait. Firmus, au milieu des plus affreuses tortures, se contentait de leur répondre : «Je sais mourir, mais je ne sais point parler. » L'empereur fut instruit de cette héroïque constance ; il fit venir le pontife , et plein d'admiration pour sa vertu , il lui accorda sa grâce et celle de celui qu'il tenait caché. — Quel amour de la vérité ! quel zèle pour la charité ! quelle discrétion ! (S. Augustin, Sur le mensonge, chap. 13.)

Aux jours de la terreur, deux prêtres, poursuivis par les radicaux de la révolution, venaient de prendre la fuite : l'un fut saisi , l'autre échappa. Tandis que les uns gardent leur proie, les autres viennent à la maison qui servait de retraite à ces prêtres vénérables. Ils rencontrent un enfant de douze ans, neveu de celui qu'ils tiennent sous leurs chaînes, et lui demande d'un ton impérieux quel est l'autre prêtre qui était avec son oncle. L'enfant ne répond que parle silence. On lui réitère la même question : toujours la même réponse. Alors, transportés de colère, les révolutionnaires saisissent ce pauvre enfant, l'étendent sur une table, et, tandis que les uns le tiennent par le reste du corps , un autre , le prenant par les cheveux , lui porte le sabre à la gorge, en lui disant : « Si tu ne dis quel était l'autre prêtre qui était avec ton oncle, je te tranche la tête. » Alors le courageux enfant rompt le silence et dit : « Si vous voulez me trancher la tête, vous le pouvez; mais pour me faire dire ce que vous me demandez , vous n'y parviendrez jamais. » L'anarchie était à son comble, la cruauté à l'ordre du jour; cependant ces fanatiques n'osèrent égorger un enfant au sein de sa famille , et, vaincus par son héroïque résistance, ils lui rendirent la liberté. ( Conférences de Sainte-Geneviève. )

Quelquefois la discrétion consiste dans un inviolable silence, témoin saint Jean Népomucène , qui aima mieux périr que de dire un seul mot de la confession de l'impératrice , femme du cruel Wenceslas.  ( Vie de S. Jean Népomucène. ) C'était son devoir, un devoir qu'il dut remplir au péril de sa vie.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques Empty Re: Le catéchisme du Bon Pasteur - Livre pour les familles catholiques

Message par MichelT Jeu 24 Nov 2016 - 12:28

IX COMMANDEMENT.

Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain.

D. Que défend ce commandement?

R. Tout désir d'adultère et de luxure; toute délectation réfléchie et volontaire dans des pensées impures.

D. Qu'ordonne ce commandement?  

R. Il nous ordonne de garder nos pensées chastes et pures.

Instruction. La loi de Dieu étant une loi spirituelle, elle nous oblige non-seulement à régler nos œuvres et nos actions extérieures; mais même nos pensées et nos désirs intérieurs , de sorte que nous soyons parfaitement innocents et non pas seulement en apparence : c'est pourquoi les deux derniers commandements nous obligent à ne pas faire de tort à notre prochain même dans notre désir et notre volonté. Ils nous enseignent clairement que ce qui est un péché de parole ou d'action peut être aussi un péché par le désir et la pensée. Le Christ reprend certains juifs qui s'imaginaient que les fautes extérieures étaient seules défendues par la loi et qui , en conséquence, permettaient sans difficulté les pensées et les désirs mauvais. ( Matthieu 6, 6. )

Mais la doctrine chrétienne nous apprend que Dieu ne se contente pas d'une sage conduite extérieure, si l'intention du cœur n'y répond pas, et qu'on peut commettre le péché par pensée aussi bien qu'en parole et en œuvre. Trois degrés conduisent au péché de pensées : 1° c'est d'abord la suggestion par laquelle la mauvaise pensée apparaît dans l'esprit. Elle n'est point un péché, tant qu'elle est involontaire, Saint-Paul l'éprouvait en lui-même, lorsqu'il dit : Je vois une loi dans mes membres qui s'oppose à la loi de mon esprit. (Romains 7, 23. ) La suggestion vient du démon (ange déchu) ou de la corruption de notre propre nature : car nous sommes nés dans le péché. 2° Le second degré c'est la délectation qui naît de la pensée des plaisirs défendus ; elle-même n'est pas un péché, si elle vient à l'improviste et contre notre volonté; mais lorsque nous l'excitons ou tardons à lui résister, alors elle est un péché, tant à cause du danger auquel nous nous exposons, qu'à raison du plaisir volontaire que nous prenons dans ce qui est péché. 3° Le troisième degré qui consomme le péché , c'est le consentement : Le péché quand il est consommé donne la mort. ( Jacques, 1, 15. )

Parce que le péché commence par la mauvaise pensée et reçoit l'assentiment de la volonté avant de se manifester par l'action, la loi de Dieu défend la pensée et le désir du mal pour détruire le péché jusque dans sa véritable racine. Le neuvième commandement : Vous ne désirerez pas la femme de votre prochain correspond au
sixième : Vous ne commettrez point l'adultère; et comme celui-ci défend les crimes d'adultère, de fornication, d'inceste, etc., ainsi l'autre nous défend d'entretenir la seule pensée de ces mêmes péchés dans notre esprit avec plaisir et consentement. Comme le sixième impose une garde à nos yeux, à nos oreilles, à nos mains, à notre langue, le neuvième met un frein aux puissances de notre âme , à la volonté, à la mémoire, an sentiment, à la pensée, au désir. Il est vrai, on ne peut pas toujours empêcher une mauvaise pensée de s'élever dans l'âme assujettie à la corruption ; mais on peut, avec l'assistance de la grâce, arrêter le progrès de cette pensée et lui refuser tout consentement.

HISTOIRES.

Défense de se complaire volontairement aux pensées et désirs impurs. — S'opposer au mal dès le principe est le parti le plus sage. La jeune épouse du roi des Scythes, étant devenue la captive de Cyrus, celui-ci ne voulut jamais la voir, quelques éloges qu'on fit de sa beauté, et précisément à cause de ces éloges. « Les yeux, répondit-il, sont des traîtres dangereux ; de vainqueur, de souverain indépendant que je suis aujourd'hui, je pourrais demain, par l'effet de leur séduction, être vaincu et réduit à la condition d'esclave. » (Lohner, Biblioth.)

Si l'incendie commence, serait-ce par une faible étincelle, il faut vite travailler à l'éteindre. Saint Benoît, effrayé de la grande corruption qui régnait parmi la jeunesse de Rome , s'était retiré dans une étroite caverne, en un lieu nommé Sublac. Cependant, en dépit de sa solitude , de sa mortification, de sa prière continuelle , il se trouvait poursuivi par des tentations qui renaissaient et grandissaient sans cesse. Que faire pour se débarrasser de ces ennemis importuns et dangereux ? Il aperçoit près de sa grotte un épais buisson , hérissé d'épines acérées : il ôte ses vêtements et se roule sur les ronces et les épines. Les cuisantes douleurs que lui causent ses blessures font à l'instant même une salutaire diversion aux pensées mauvaises. Quel courage pour repousser ces suggestions impures! (S. Grégoire-le-Grand, Dialogues, etc.)

Obligation et moyens de garder la pureté de l'esprit et du cœur.—Un moyen indispensable , c'est de déployer toute l'énergie dont on est capable. Les païens représentaient leurs déesses de la virginité, Diane et Minerve , armées d'une lance et d'un bouclier , voulant signifier par là qu'il est impossible , sans combattre , de conserver la chasteté. ( S. Jérôme, Épitre 140.)

Si l'on n'oppose pas une résistance énergique , les pensées , les désirs , bientôt les actes, et par suite les habitudes mauvaises nous envahissent. Celui qui ne sait pas mettre un frein à ses désirs, se trouve emporté par ses passions comme par des chevaux farouches et indomptés, et horriblement maltraité. (S. Ambroise, Des vierges.)

Ah ! craignons, craignons l'empire du vice et la tyrannie de l'habitude
! Un prêtre s'efforçait, par de sages avertissements et par de terribles menaces, d'amener un jeune voluptueux à des sentiments de componction. Le pécheur parut touché ; mais, tandis qu'il avait les larmes aux yeux , et que de profonds soupirs s'échappaient de son cœur, il ne put s'empocher de proférer ces paroles : « Respectable confesseur, je vous déclare que quand même vous m'ouvririez l'enfer et me montreriez le démon prêt à m'y recevoir, je ne pourrais surmonter ma coupable habitude , lorsque se présenterait l'occasion de la satisfaire. » (Drexelius, In Salom.)

Mais que sont les forces morales de l'homme sans le secours de la grâce? « Je m'imaginais, dit saint. Augustin, pouvoir vivre dans la continence par les seules forces de la nature. Insensé ! j'ignorais que personne ne peut être chaste , si vous, ô mon Dieu , ne lui en donnez la grâce et la force. » (S. Augustin, Conf., liv. VI, ch. xi.)

Or cette grâce agit en nous par les pensées de la foi , par la prière , par les sacrements. Susanne était attaquée par deux juges iniques, qui la menaçaient de la perdre, si elle se refusait à leurs infâmes désirs. Que fit-elle alors ? elle leva les yeux au ciel , et dit en soupirant : Si je fais cela, c'est la mort , la mort de mon âme ; si je ne le fais pas , je ne puis échapper à votre vengeance. Mais j'aime mieux tomber entre vos mains, innocente, que de pécher en la présence du Seigneur. (Daniel, 13, 22, 23.)

Un remède toujours présent et toujours efficace , lorsqu'on sait bien l'employer, c'est la prière. Que fait-on, disait un saint anachorète , lorsqu'on voit venir à soi une bête féroce ? on monte sur un arbre pour l'éviter; également celui qui se voit assailli par de mauvaises pensées , doit s'élever à Dieu par la prière, et se mettre ainsi à l'abri du danger. ( Vies des Pères.)

De toutes les prières , la plus efficace est le recours à la très sainte Vierge. Un magicien épuisait contre sainte Justine tous ses enchantements pour allumer en son cœur une flamme criminelle. Elle invoqua Marie, et bientôt tous les effets de cet art infernal, toutes les impressions de l'impureté s'évanouirent. (S. Grégoire de Naziance)

Enfin voulez-vous recevoir abondamment le secours de la grâce victorieuse de l'impureté ? Fréquentez souvent, fréquentez dans de bonnes dispositions les sacrements de Pénitence et d'Eucharistie.

Xe COMMANDEMENT.

Vous ne convoiterez pas les biens de votre prochain.

D. Que défend ce commandement?

R. Il nous défend de convoiter ce qui appartient aux autres, ou même de désirer faire tort à notre prochain.

D. Que nous ordonne t- il?

R. De n'accueillir que d'honnêtes. pensées, et de nous contenter de notre propre état et condition.

Instruction. Le dixième commandement correspond au septième : Vous ne commettrez pas de vol. Celui-ci défend les actes du vol ou du brigandage ; celui-là interdit même le désir de les commettre, parce que le désir ouvre la porte à l'action. Car si d'abord vous convoitez les biens de votre prochain , vous tâchez ensuite de vous en emparer par les
moyens en votre pouvoir soit à la dérobée, soit par la violence ouverte. La cupidité, qui est appelée par saint Paul la racine de tous les maux ( 1. Timothée 6, 10 ), jette les yeux sur toute chose, et si elle peut s'en emparer, aucune propriété n'est assurée. Il est aisé de voir combien est sainte la loi de Dieu , dans ce qu'elle nous défend. Modérer nos désirs effrénés et nous contenter de ce que Dieu nous a donné, c'est donc une disposition bien meilleure que d'aspirer toujours à ce que nous ne pouvons jamais obtenir. La charité n'est point jalouse. Ne cessons donc de souhaiter le bonheur à chacun et n'envions les richesses de personne.

Exhortation. Apprenez de ces deux commandements, ô chrétien, à résister à la nature corrompue et à bannir de votre cœur tout mauvais désir : car c'est la source de tout
péché : C'est du cœur de l'homme que viennent les méchantes pensées , les adultères, les fornications et les homicides, les larcins, l'avarice, les méchancetés, la fourberie, les impudicités, l'envie, le blasphème, l'orgueil, l'égarement de l'esprit. ( Marc, 7, 21, 22. ) Dieu ne se contente pas de la bonne apparence extérieure de nos actions, si elles ne sont conformes aux dispositions intérieures de nos âmes. Souvenez-vous que le premier péché commis par les anges déchus a été un péché de pensée. En réalité, tout péché est commis d'abord par le cœur et la volonté : aussi saint Paul nous défend-il de désirer rien de mal. ( 1. Corinthiens ch. 10 )

La loi de Dieu nous interdit de désirer la vengeance, le meurtre, etc., mais elle a fait une défense très-expresse de convoiter la femme ou les biens du prochain , parce que
nos inclinations naturelles vers ces péchés sont plus communes et plus fortes. Un homme est en droit de dire, peut-être, qu'il n'a jamais commis de fornication ni d'adultère; peut-il dire qu'il n'a jamais pris plaisir à une pensée déshonnête, ou donné son consentement à un mauvais désir ! Un autre est en droit de dire qu'il n'a jamais commis de vol, ni de brigandage, ni de fraude; mais n'a-t-il jamais convoité le bien d'autrui? S'il n'a jamais fait de tort à. personne, n'a-t-il jamais voulu de mal au prochain ni médité de vengeance? Ah! combien il est nécessaire de s'opposer dès le principe aux mauvaises suggestions naissant dans nos cœurs : principiis obsta ! Car tout péché commence dans la pensée. Gardons-nous donc de nourrir dans notre âme aucun mauvais désir. Dieu qui sonde les cœurs voit ces sentiments; un jour il les mettra en lumière et leur infligera un juste châtiment. Puisque nos corps et nos âmes sont les temples du Saint-Esprit, rien ne doit habiter en eux que la sainteté et la pureté. Ne livrez donc pas votre âme au péché et ne vous permettez aucune pensée que vous rougiriez de laisser voir à un autre. Que vos cœurs, votre langue, vos actions, vos intentions soient toujours étroitement unies pour le bien , afin que tout ce que vous ferez, direz ou même penserez soit à la gloire de Dieu, pour le bien de votre prochain et à l'avantage de votre âme.

Vous venez de voir l'exposition des commandements en général et en particulier, appliquez -vous maintenant à les accomplir en faisant ce qu'ils vous ordonnent, en évitant ce qu'ils vous interdisent. Ils sont la règle de vie pour le pauvre comme pour le riche , pour le roi comme pour le sujet, s'ils veulent mériter une bonne mort et l'éternité
bienheureuse : Si vous voulez arriver à la vie , observez les commandements. Ils sont le code de lois de toutes les nations, lois universellement justes et sages pour l'humanité entière. Pourvoyez donc, maintenant qu'il en est temps, à vos intérêts éternels , en accomplissant ces préceptes. Ne craignez rien tant que de les violer. Ce n'est pas l'homme, mais Dieu qui les a donnés au milieu des foudres et des éclairs ; et il vengera leur transgression dans les flammes éternelles. Au dernier jour, c'est d'après ces lois que vous serez examiné et jugé, condamné ou sauvé. Leur accomplissement est récompensé par d'innombrables bénédictions en ce monde et dans l'autre; leur violation entraîne une foule de malédictions et la perte éternelle du corps et de l'âme.

Veillez donc à les observer toutes, car la religion ne saurait vous sauver sans la fidélité aux commandements de Dieu : En Jésus-Christ, dit saint Paul, ni la circoncision ni l' incirconcision ne servent, mais l'observation des commandements divins, qui doit toujours être unie à la profession de la vraie foi. Il ne suffit point d'en observer un ; il faut les suivre tous; car mourir après en avoir violé un seul, et sans repentir, c'est assez pour l'éternelle condamnation de nos âmes : Quiconque aura observé la loi tout entière, s'il vient à manquer en un seul point, il se rend coupable comme l'ayant toute violée. (Jacques, 2, 10. ) Car il brise en effet la convention que Dieu a faite avec l'homme. Mais comment remplir la loi tout entière? En aimant Dieu par dessus toute chose et notre prochain comme nous - même : celui qui le fait accomplit toute la loi et les prophètes, et il possède la vie éternelle : Faites cela et vous vivrez. (Luc, 10, 28. )


HISTOIRES.

Défense de convoiter le bien d'autrui. — Le saint homme Tobie, bien que réduit à une grande pauvreté, était loin de désirer le bien du prochain. Tandis qu'il était aveugle, il entendit crier un chevreau qu'Anne, sa femme, avait eu en salaire de son travail. Tremblant à la seule pensée que cet objet ne fût point à eux : « Prenez garde, dit-il , qu'il n'ait été dérobé. Rendez-le à ceux à qui il appartient. Il ne nous est pas permis de toucher à quelque chose qui a été dérobé. » (Tobie, ch. 4)

Ce fut la convoitise, le désir de l'argent qui conduisit Judas, un des apôtres du Sauveur , vers les princes des prêtres pour leur dire : Que voulez-vous me donner, et je vous le livrerai. Ce fut cette passion qui le porta ensuite à trahir, par un baiser, son adorable maître. (Matthieu 26; Luc. 22.)

Au contraire le détachement des biens de la terre fit du publicain Matthieu un fidèle apôtre du Sauveur. Publicain et percepteur des impôts étaient chez les Juifs une même chose. Ces hommes étaient odieux parce qu'ils étaient presque toujours esclaves de la passion de l'argent , passion déréglée qui porte à commettre une foule d'injustices. Or, J.-C. passant devant le bureau des impôts, aperçut Matthieu, et lui dit : Suivez-moi. A l'instant, Matthieu, docile à la grâce , se leva , renonça à son emploi et suivit Jésus. C'est ainsi que Matthieu devint apôtre et plus tard évangéliste du Sauveur. (Math. 9; Luc. 5.)

Le désir des richesses enfante les plus terribles désordres. C'était pendant les rigueurs d'une famine qui désolait la ville de Rimini. Seul, au milieu du deuil universel, se réjouissait un homme cupide parce qu'il avait dans ses greniers d'abondantes provisions. Quand le prix du blé fut excessif, il trouva qu'il n'était pas assez élevé encore, et pour échapper aux sollicitations de ses concitoyens affamés, il alla habiter la campagne. Cependant chaque jour, il se rendait sur la route pour s'enquérir des passants du prix du blé. Si on lui disait qu'il allait toujours en augmentant, il poussait un soupir de commisération affectée, mais il jubilait dans son cœur. Or, deux hommes de bien ayant fait venir de l'Apulée, une grande quantité de froment, le prix baissa de moitié sur-le-champ. C'était précisément le jour que l'homme cupide avait choisi pour aller à la ville profiter de la détresse publique. Quel ne fut pas son désappointement, lorsqu'il apprit une nouvelle si heureuse pour les autres, si triste pour lui ! A la vue d'une foule immense d'hommes qui chantaient et poussaient des cris de joie, marchant à côté de leurs ânes accablés sous d'énormes sacs de blé , son front devint sombre et il demanda en tremblant le prix du blé. « Baissé de moitié ! s'écrièrent en chantant les voituriers; alléluia! alléluia! » A ces mots, il resta comme pétrifié; quelques minutes après, on l'entendit murmurer : Baissé de moitié! Il rentra dans la ville, et à chaque salutation des personnes qui le connaissaient, il répondait : Baissé de moitié!  A son entrée chez lui, sa femme, ses enfants le saluent, lui parlent, et lui de répondre : Baissé de moitié! Il se met au lit , le visage couvert de pâleur, et quand le médecin, mandé par sa femme effrayée, arrive, il répond à toutes les questions : Baissé de moitié! Un prêtre vient l'exhorter à la pénitence : Baissé de moitié ! répond-il : enfin il meurt en prononçant ce maudit refrain qui peint si bien la passion qui lui a ravi la raison et la vie. (S. Bernardin, tom. 4, 26.)

Ordre d'accueillir des désirs modérés, et de nous contenter de notre sort. — Un pauvre n'avait que vingt-quatre sous, lorsqu'il se mit à vendre du vin aux passants. Pour gagner davantage, il mêlait à son vin moitié d'eau. Par ce moyen évidemment injuste , il fit au bout d'un certain temps un bénéfice de 100 francs. Il mit cette somme dans un sac de cuir et sortit de la ville, avec l'un de ses amis , pour aller faire provision au vignoble , et continuer cet injuste trafic. Arrivé près d'une rivière , il tira du sac une pièce de vingt sols pour payer une dépense qu'il venait de faire à l'auberge. Tandis qu'il tenait cette pièce d'une main et le sac de l'autre, soudain attiré par une apparence trompeuse , un oiseau de proie fond sur lui et lui enlève le sac qu'il tient à la main. Il l'élève d'a bord dans les airs, puis s' étant sans doute aperçu de sa méprise , il laisse tomber dans l'eau la fortune du marchand. « Dieu est juste, dit-il à son compagnon. Quand j'ai commencé mon commerce je n'avais qu'une pièce de vingt sols; la pièce de vingt sols me reste. Ce qui m'était venu par l'eau que j'ai mêlée au vin est maintenant à l'eau. Je prie Dieu de me pardonner mes fraudes passées; je renonce de tout mon cœur au désir que j'avais d'amasser de l'argent. » (S. Grégoire de Tours.)

Fin

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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