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Des Tentations !

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Message par Invité Jeu 16 Juil 2020 - 4:24

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Des tentations !

Parce que vous étiez agréable à Dieu, il a fallu que la tentation vous éprouvât. (L'ange Raphaël à Tobie).

Ceux qui s'adonnent à la vie spirituelle n'ont pas de peine à se persuader qu'ils sont agréables à Dieu, lorsqu'il leur fait sentir les douceurs de sa présence et qu'il les comble de caresses ; lorsqu'ils jouissent d'une paix que rien ne trouble, et qu'ils n'éprouvent rien de fâcheux ni de la part du démon, ni de la part des hommes. Mais quand Dieu leur retire ses consolations, quand il permet que le démon les tente et que les hommes mettent leur vertu à l'épreuve, si l'on venait leur dire que cela est une marque certaine qu'ils sont agréables à Dieu, il ne serait pas aisé de le leur persuader ; au contraire, ils croient que Dieu les a délaissés, qu'ils ne lui plaisent plus comme autrefois, et ils cherchent avec inquiétude dans leur conduite ce qui a pu donner à Dieu sujet de les traiter avec tant de rigueur.

Cependant voici un Ange qui révèle à Tobie que, parce qu'il était agréable à Dieu, il a été nécessaire que la tentation l'éprouvât. Remarquons cette liaison : Dieu, le démon, les hommes vous exercent. Quelle est la cause et la cause nécessaire de ce traitement ? C'est que vous étiez agréable à Dieu. Les tentations sont donc la récompense de votre fidélité précédente ; et Dieu les veut ou les permet pour nous rendre encore plus agréables à ses yeux ; par conséquent, encore plus saints et plus parfaits. Toutes les pages de l'ancien et du nouveau Testament contiennent des preuves et des exemples de cette vérité. Et c'est, sans contredit, le plus puissant motif de consolation que les serviteurs de Dieu puissent avoir dans leurs peines.

Ainsi, quand ils commencent à se donner à Dieu, la première chose à laquelle ils doivent s'attendre infailliblement, c'est que s'ils le servent de tout cœur, s'ils sont fidèles à ses grâces, s'ils ne négligent rien pour se rendre agréables à ses yeux, il les éprouvera par différents genres d'affliction, il permettra au démon de les tenter, il leur procurera des humiliations et des persécutions ; et ils doivent s'y préparer par l'abandon à la volonté de Dieu. Mais si, après plusieurs années passées dans son service, leur paix intérieure n'était traversée par aucune espèce d'épreuve ; si le démon, si les hommes les laissaient tranquilles ; ce seraient alors qu'ils devraient se défier de leur vertu, et croire qu'ils ne sont pas aussi agréables à Dieu qu'ils le pensent.

Il est donc nécessaire que la tentation éprouve les vrais serviteurs de Dieu. Qu'est-ce à dire éprouver ? C'est-à-dire, premièrement, qu'elle mette au jour la vérité, la solidité de leur vertu. Car qu'est-ce qu'une vertu qui n'a pas été exercée ? C'est une vertu faible, une vertu douteuse, sur laquelle on ne peut faire aucun fond. En coûte-t-il beaucoup pour marcher, lorsque Dieu nous porte ? pour faire oraison, lorsqu'on y est inondé de consolations ? pour se vaincre, lorsque l'attrait de la grâce est triomphant, et laisse à peine lieu à la plus petite résistance de la nature ? Est-ce une chose pénible de reposer paisiblement dans le sein de Dieu, de s'y voir à l'abri des vents et des tempêtes ? d'être craint du démon qui se tient à l'écart, et respecté des hommes qui rendent en notre personne hommage à la piété ? Certes la sainteté ne serait ni difficile, ni rare, ni redoutable à la nature corrompue, si elle s'acquérait ainsi sans effort, sans combat, sans traverses ; et ce serait contre toute raison que saint Paul aurait comparé les chrétiens aux athlètes qui, après de longs et pénibles exercices, venaient lutter dans l'arène, et à qui la victoire coûtait tant de sueurs et souvent tant de sang. Une vertu qui n'a pas été éprouvée ne mérite donc pas le nom de vertu.

Qu'est-ce encore à dire éprouver ? C'est purifier. De même qu'on éprouve les métaux, et qu'on les purifie de tout alliage en les mettant dans le creuset ; de même la vertu s'épure dans le creuset de la tentation. Et de quoi s'épure-t-elle ? de l'alliage de l'esprit d'intérêt qui l'avilit, de l'amour-propre qui la corrompt, de l'orgueil qui la tourne en poison. Il est impossible que la vertu soit ce qu'elle doit être : désintéressée, désappropriée, exempte de tout retour, de toute vaine complaisance, si elle n'a passé par le creuset de diverses tentations. L'effet de chaque tentation contre la pureté, par exemple, contre la foi, contre l'espérance, est de fortifier en nous ces vertus et de les porter au plus haut degré. L'effet des recherches, des ennuis, des dégoûts, des répugnances violentes, de la soustraction de toute grâce sensible et d'une espèce d'abandon de la part de Dieu, est d'épurer notre amour, d'augmenter notre courage, notre fidélité, notre constance. L'effet des calomnies, des vexations, des persécutions, est de nous élever au-dessus de tout respect humain, et en même temps de nous dépouiller d'une certaine bonne opinion de nous-mêmes, que les applaudissements humains entretiennent sans qu'on s'en aperçoive. Enfin, l'effet général de toutes les tentations est de nous détacher des choses d'ici-bas, de nous humilier à nos propres yeux, de nous inspirer plus de confiance en Dieu, plus d'union avec lui.
Les tentations sont donc tout à fait, dans les desseins de Dieu, la récompense, la preuve, la consommation de la vertu. Comment, après cela, pourrait-on les craindre ? Si l'humilité ne permet pas de les désirer, parce que ce serait présumer de ses forces, le zèle de notre perfection ne nous permet pas non plus de les appréhender ; encore moins de nous désoler quand elles arrivent, et de croire que tout est perdu. Mais dira-t-on, je crains de pécher, je crains de perdre la grâce, je crains de me damner, et je me vois par la tentation sans cesse exposé à ce malheur. Dites donc aussi que vous craignez de combattre, de remporter la victoire et d'être couronné ; car la couronne de gloire n'est destinée, selon l'Apôtre, qu'à celui qui aura combattu selon les règles. Ne voyez-vous pas que cette crainte de pécher, qui vous rend lâche et pusillanime, vient de ce que vous ne consultez que vos propres forces, et que vous ne comptez pas assez sur le secours de Dieu, qui vous rendrait invincible ? J'avoue qu'à ne regarder que votre faiblesse, la moindre tentation suffit pour vous renverser. Aussi ne devez-vous la regarder que pour ne pas vous appuyer sur vous-même, et pour vous jeter entre les bras de Dieu, afin qu'il soit votre appui et votre soutien. Pensez-vous craindre de pécher quand le bras du Tout-Puissant vous soutient ? Que peuvent contre lui tous les hommes et tous les démons ? Vous arracheront-ils malgré vous d'entre ses bras ? Son secours ne vous est-il pas assuré dans une tentation qu'il permet, que vous n'avez pas recherchée, où vous vous défiez de vous même, et à laquelle vous ne vous exposez que par son ordre ?

Écoutez saint Paul, c'est à vous qu'il parle : Dieu est fidèle, dit-il, il ne permettra pas que vous soyez tenté au-delà de vos forces, mais il augmentera le secours avec la tentation, afin que vous puissiez la soutenir (I. Cor. x. 13) Pesez ces paroles, qui sont capables de vous remplir de consolation et de confiance au milieu des plus rudes épreuves. Dieu est fidèle ; il se doit à lui-même, il doit à ses promesses, il doit à son amour pour vous de vous secourir dans un danger qui menace votre âme. Sa gloire y est intéressée, puisque le péché est son offense. Il sait que vous ne pouvez rien sans lui, et que vous tomberez s'il vous abandonne. S'il vous manquait dans ces moments critiques, il se manquerait à lui-même.
Il ne souffrira pas que vous soyez tenté au-delà de vos forces. La fidélité de Dieu à notre égard ne consiste pas à nous soustraire à la tentation, puisque ce serait se priver de sa gloire et nous priver nous-mêmes des mérites attachés à la victoire ; mais elle consiste à ne pas souffrir que la tentation aille au-delà de nos forces. Dieu connaît parfaitement et infiniment mieux que nous nos forces, puisque nous les tirons uniquement de lui et de sa grâce. Il modère donc l'action du tentateur, action dont il est toujours le maître suprême ; et il ne souffrira pas qu'il ait plus de force pour attaquer que nous pour résister.

Ce n'est pas assez : il augmente le secours avec la tentation, de sorte que nous puissions la soutenir et en sortir vainqueurs. Ainsi il nous donne plus de force pour résister qu'il n'en laisse au démon pour attaquer. La grandeur du secours croît à proportion de la violence de la tentation. Nous combattons sous les yeux de Dieu avec ses propres armes, et il est de foi que ce n'est jamais par le défaut du secours divin, mais par notre propre faute, que nous serons vaincus. C'est qu'il voudra punir, ou nos infidélités précédentes, ou notre présomption, ou notre défaut de confiance en lui. En supposant donc que nous ne donnions aucune occasion à notre défaite, la victoire nous est assurée de la part de Dieu.
Mais je ne sens pas ce secours. Qu'importe que vous le sentiez ou non, pourvu qu'il soit réel ? Dieu en exerce d'autant plus votre foi. Est-il étonnant, que tandis que, le démon excite des tempêtes dans votre imagination, qu'il soulève vos passions, qu'il obscurcit votre entendement, qu'il ébranle votre volonté, qu'il vous remplit de trouble, vous ne sentiez pas un secours tout spirituel qui agit dans le plus intime de votre âme.

Mais je crois avoir consenti ; j'en suis sûr. Ne jugez pas de cela vous-même ; Dieu ne le veut pas : vous vous tromperiez, et vous donneriez par là prise sur vous au démon, qui vous jetterait dans le désespoir. Rapportez-vous là-dessus à la décision de votre père spirituel, et soumettez humblement votre jugement au sien. Quoi ! sur ce qui se passe en moi, sur ce qui intéresse ma conscience et le salut de mon âme ? Oui, votre père spirituel a des lumières et des règles sûres pour juger si vous avez
consenti ou non, et vous n'avez ni ces règles ni ces lumières pour vous-même. Dieu, qui veut que vous soyez conduit par la foi et par l'obéissance, que vous mouriez à votre jugement propre, ne permet pas que vous voyiez clairement ce qui se passe en votre intérieur, surtout en ces moments de troubles et de ténèbres.


Job (William Blake)
(Extrait du Manuel des âmes intérieures)
Le Petit Sacristain

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