Fratoun, des Guetteurs : « J’ai vécu un véritable cœur à cœur avec Jésus »
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Fratoun, des Guetteurs : « J’ai vécu un véritable cœur à cœur avec Jésus »
Fratoun, des Guetteurs : « J’ai vécu un véritable cœur à cœur avec Jésus »
Chanteur de reggae chrétien, membre du groupe Les Guetteurs, François-Joseph Ambroselli dit "Fratoun" est le plus jeune invité de notre série estivale consacrée au pays de l’enfance, auquel il ne semble pas être étranger.
Chanteur de reggae chrétien, membre du groupe Les Guetteurs, François-Joseph Ambroselli dit "Fratoun" est le plus jeune invité de notre série estivale consacrée au pays de l’enfance, auquel il ne semble pas être étranger.
Guitare à la main, sourire candide et petite mèche... François-Joseph, dit « Fratoun », est reconnaissable. À la terrasse d’un café de Montmartre où nous le rencontrons, il semble dans son élément, près des marches du Sacré-Cœur où il lui arrive de chanter avec son groupe de reggae. Un quartier qui résonne avec l’idéal de bohème des artistes, auquel il semble attaché. Chez ce jeune homme de 27 ans, l’enfant et le chanteur cohabitent et semblent même ne faire qu’un. D’une part, de par son nom : Fratoun est son nom de scène, mais aussi celui que lui donnaient ses grandes sœurs lorsqu’il était petit. D’autre part, dans sa foi. Car, si François-Joseph aime tant chanter, c’est aussi pour annoncer l’Évangile, faire rayonner autour de lui la foi qu’il a reçue de ses parents et qui a habité toute sa prime jeunesse. Auteur de trois albums, le reggaeman chevronné ne joue pas les blasés : au cours de notre rencontre, il se confie très humblement sur son enfance, qu’il semble n’avoir pas tout à fait quittée et dans laquelle il puise le meilleur de ce qui l’anime aujourd’hui... au point que lorsqu’il nous présente le petit qu’il a été, on a le sentiment de l’avoir en face de nous.
Neuf à la maison
« Naître dans une famille nombreuse, c’est atterrir sur une petite planète qui vous préexiste. La mienne m’a fait grandir dans une espèce de grand flou artistique. » Assez timide, ayant facilement la larme à l’œil, mais d’un naturel heureux et joueur, François-Joseph est en effet le petit dernier d’une fratrie de neuf.
« Je ne m’endormais que quand il y avait du bruit, ce qui était normal, puisque je suis né dans une sorte de jungle bienveillante. À la maison, c’était le foutoir, entre les frères et sœurs, les innombrables amis et cousins qui passaient chez nous en continu... Mais un foutoir organisé : ma mère était tout de même fille de général ! » Dans cette animation permanente, l’enfant n’a pas le temps de se sentir seul. « Tout le monde voulait me porter dans ses bras en permanence... Il y avait toujours quelqu’un pour me tripoter les joues ou m’embrasser : c’est une terrible violence dont on ne parle pas assez ! », plaisante-t-il en sirotant sa bière. L’amour n’a jamais fait défaut. Pourtant, aucun lien fusionnel avec les parents, seulement « une tendresse très forte et très vraie, qui n’avait pas besoin de tomber dans les grandes effusions ».
Une vieille bâtisse en Normandie, près des belles falaises du pays de Caux
C’est à son père artiste que lui et ses frères et sœurs doivent « l’éveil aux belles choses », leur capacité de contemplation. Restaurateur d’objets d’art, mais aussi dessinateur, peintre et homme pieux, celui-ci leur a appris à suivre la messe et à en apprécier la beauté liturgique. Dans la famille, on ne plaisantait pas avec le sens de l’engagement, se souvient-il également. Pas question d’abandonner les louveteaux après ses premiers pas dans le scoutisme. « Tu y es inscrit, tu t’y es engagé, tu y feras les quatre années », lui ont rétorqué ses parents. Mais le mouvement de jeunesse qui l’a le plus profondément formé n’est pas un mouvement scout. « J’étais jeune compagnon à la Compagnie secouriste Sainte-Barbe, des sortes de scouts pompiers avec lesquels on apprend le métier de secouriste, les interventions en opération, tout en suivant la spiritualité de Don Bosco. » Dans une discipline qui tranche avec l’ambiance familiale.
Une enfance comblée, et rythmée par les vacances passées dans la maison familiale que ses parents ont achetée peu avant sa venue au monde. Cette vieille bâtisse de Normandie, près des belles falaises du pays de Caux, a été entièrement reconstruite par l’ensemble de la famille, qui passait chaque été à bricoler d’une manière ou d’une autre pour rendre la maison habitable. Trop jeune pour effectuer des travaux périlleux, le jeune François-Joseph doit se limiter à des tâches relativement humbles : séparer les silex taillés des silex non taillés, les briques de Saint-Jean des autres briques, retirer les pierres des champs, accompagner son père sur le tracteur... « On a passé notre enfance dans ce genre de travaux, entre la bricole et la peinture... C’était loin des tropiques, et c’était très bien comme ça ! Personnellement, les petites tâches me convenaient très bien : elles m’offraient le sentiment qu’on me confiait quelque chose. Je me sentais responsabilisé, et fier de travailler avec les grands. » Fier au point que lorsque la maîtresse lui demande, à la rentrée, de dessiner ses vacances, l’enfant rend... une représentation de brique.
Une expérience mystique comme point d’ancrage
Impossible aussi de ne pas évoquer sa première grande émotion spirituelle dans cette maison de famille. Même si elle résonne davantage avec les rigueurs de l’hiver qu’avec la caresse de l’été. C’était un soir de décembre, lors d’un réveillon organisé par ses sœurs. Avant que la fête ne commence, une messe est célébrée dans la crypte de la maison, bientôt suivie de l’exposition du Saint-Sacrement pour ceux qui veulent prier durant le début de la soirée. François-Joseph a 6 ans et il s’endort tout simplement devant l’ostensoir. « J’ai vécu à ce moment-là un véritable cœur à cœur avec Jésus. C’était un cadeau de Dieu, évidemment, mais également un cadeau de mes parents qui m’avaient donné très tôt le goût de Dieu et le sens du sacré, en m’expliquant la signification de la Présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. »
Son père lui répétait à chaque messe à quoi correspondait chaque parole rituelle, chaque moment de la célébration. Depuis, la foi ne l’a jamais quitté tout comme ses frères et sœurs. L’expérience mystique de son enfance constitue même pour lui une sorte de point d’ancrage lumineux. « N’allons pas croire que la foi d’un enfant est mécanique et puérile. Bien au contraire, elle peut être celle de la lumière absolue. Oui, c’est une foi naïve, mais quelle lumière ! Je me souviens avoir entièrement fait confiance à Dieu. L’enfant a l’habitude de s’abandonner à plus grand que lui : il est en permanence aux mains des adultes. S’abandonner à Dieu est quelque chose de naturel pour un enfant. C’est peut-être pour ça que les personnes âgées retrouvent plus facilement la foi de leur enfance : elles reprennent l’habitude de s’abandonner. » Pour lui, le modèle du croyant qui aspire à retrouver sa foi d’enfant, c’est Charles de Foucauld qui, en tant que prêtre, accepte d’être un outil à la disposition du Bon Dieu. En un sens, « c’est pour retrouver une foi d’enfant que les prêtres sont soumis à l’obéissance ».
Écouter François-Joseph parler du petit « Fratoun le clown » qu’il était peut évoquer cette citation de Georges Bernanos dans Les Grands Cimetières sous la lune : « Qu’importe ma vie ! Je veux seulement qu’elle reste jusqu’au bout fidèle à l’enfant que je fus. » François-Joseph est-il fidèle à l’enfant qu’il a été ? Lui, l’enfant timide devenu homme de scène et de spectacle ? Aucune contradiction entre sa timidité naturelle et son travail d’artiste et de chanteur, considère-t-il : « Je ne suis pas un homme de spectacle. Je ne savoure pas de me mettre en scène, je savoure simplement le fait de toucher les cœurs et de transmettre quelque chose. Dans le groupe des Guetteurs, on se complète assez bien là-dessus. »
« L’enfance, un temps de promesses »
Pas de doute, le François-Joseph adulte a su faire une place au petit Fratoun, et lui reste fidèle de bien des manières. Par sa foi, il chemine avec l’enfant qu’il était au pied du Saint-Sacrement en ce réveillon passé dans la crypte de la maison familiale. Par sa musique, il poursuit le travail d’équipe et de bâtisseur qui était celui du benjamin de la famille, devenu chanteur et tête d’affiche d’un groupe de reggae. Enfin, il occupe toujours cette place de petit dernier, chéri par ses frères et sœurs dont il est toujours aussi proche.
Il conclut notre conversation en nous confiant un rêve qu’il a fait l’été dernier. « Je ne l’ai jamais raconté à personne, mais cet article en est peut-être l’occasion... », murmure-t-il. « Je me suis vu enfant. Je me regardais et je disais au petit Fratoun, «Qu’est-ce que tu étais fort ! Que tu étais grand, que tu étais beau !» Je ne sais pas si je suis fidèle à l’enfant que j’ai été, mais je sais que j’y travaille. J’ai envie d’être à la hauteur de ce qu’il a été, et de construire ma vie en fonction de cela. L’enfance est un temps de promesses : à mon âge à moi, l’enjeu est de les tenir. »
Robin Nitot
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Lumen- Date d'inscription : 09/11/2021
Localisation : France
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