Gad Elmaleh : « La Vierge Marie a bouleversé ma vie »
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Gad Elmaleh : « La Vierge Marie a bouleversé ma vie »
Gad Elmaleh : « La Vierge Marie a bouleversé ma vie »
Ses derniers signaux n’auront échappé à personne. Comédie musicale sur Bernadette de Lourdes, cours aux Bernardins, apparition à Paray-le-Monial... Famille Chrétienne a rencontré Gad Elmaleh à l’occasion de la sortie de son film « Reste un peu », le 16 novembre, retraçant son étonnant chemin spirituel.
Ses derniers signaux n’auront échappé à personne. Comédie musicale sur Bernadette de Lourdes, cours aux Bernardins, apparition à Paray-le-Monial... Famille Chrétienne a rencontré Gad Elmaleh à l’occasion de la sortie de son film « Reste un peu », le 16 novembre, retraçant son étonnant chemin spirituel.
Vous consacrez votre dernier film « Reste un peu » à votre cheminement spirituel. N’est-ce pas une prise de risque ?
C’est vrai que ce n’est pas la thématique la plus tranquille et que, dans le monde du showbiz, parler de sa foi est un sujet plutôt tabou. Mais je n’ai pas eu peur, parce que je suis totalement renforcé dans ce chemin-là et parce que je suis bien épaulé. Après, je précise que c’est un film et que, dans ce film, certaines choses sont vraies, d’autres ne le sont pas... mais je ne vous dirai pas lesquelles !
Comment s’est déroulé votre premier contact avec la religion catholique ?
C’était dans mon enfance, à l’âge de 6 ans. Enfin, ce n’est pas vraiment un contact avec la religion catholique, parce qu’à l’époque je ne savais pas où je mettais les pieds. Nous sommes dans les années soixante-dix à Casablanca, et un jour, pendant que mon père fait une course dans le quartier, je pousse la porte d’une église dans laquelle j’ai l’interdiction absolue d’entrer. J’avais vu des Sœurs missionnaires y pénétrer, mais je ne comprenais pas bien à quoi servait ce bâtiment. J’ai poussé la porte parce que c’était interdit. J’ai transgressé deux commandements d’un coup : l’idolâtrie et la parole des parents. Là, c’est l’enfer direct [rires] !
Que s’est-il passé dans cette église ?
Je me suis retrouvé face à une représentation de Marie. J’étais avec ma sœur Judith, et nous n’avons pas vécu la même expérience. Elle, elle a regardé et elle est ressortie. Moi, je suis resté face à cette dame que je ne connaissais pas, que je n’avais jamais vue, et j’ai pleuré. Je me sentais bien. Je suis resté, j’étais comme attaché à ce visage. La première chose que je me suis dit, c’est : pourquoi m’interdit-on de rentrer dans cet endroit où je suis si bien ? Ma sœur est entrée à nouveau et m’a tiré par le bras en me disant de sortir parce que mon père allait bientôt revenir. Mon point de départ, c’est donc un interdit et une plénitude, une joie profonde au sens catholique du terme que j’ai découvert bien plus tard.
Famille Chrétienne a rencontré Gad Elmaleh à l'hôtel Brach à Paris, à l'occasion de la sortie de son nouveau film "Reste un peu" :copyright:PATRICE NORMAND – LEEXTRA POUR FC
Aviez-vous reçu une éducation religieuse ?
J’ai été élevé dans la tradition juive. Mes parents m’ont donné une éducation traditionaliste dans le sens où je devais respecter les coutumes, aller prier à la synagogue, et apprendre l’hébreu. Ils n’étaient pas fervents, ils ne priaient pas chaque jour, mais la vie quotidienne était marquée par les fêtes, le shabbat, la nourriture casher et des valeurs comme la charité, l’entraide... Ensuite, à l’adolescence, j’ai fait ma bar-mitzvah et j’ai étudié pendant deux ans dans une école talmudique. J’apprenais la Torah toute la journée, c’était très difficile. J’ai appris l’araméen, parce que les commentaires du Talmud sont rédigés dans cette langue. Cela m’a beaucoup apporté et préparé à comprendre le christianisme.
Comment avez-vous peu à peu articulé cette éducation religieuse avec votre attirance pour la Vierge Marie ?
J’ai continué à lui rendre visite. À l’âge de 16 ans, je suis parti vivre au Québec. Là-bas, je me rendais régulièrement à l’oratoire Saint-Joseph. Mais c’est beaucoup plus tard, à Lourdes, que je me suis rendu compte que ma connexion avec Marie était devenue évidente. Tout a commencé par une discussion avec le producteur Gilbert Coullier. Nous parlions de plusieurs projets, et je l’entends dire à mi-voix : « Vierge Marie. » Je l’interpelle : « Tu as dit quoi là ? » Il me répond : « Non, non rien, ça ne va pas t’intéresser. » Alors j’ai insisté et je lui ai demandé pourquoi il avait dit « Vierge Marie ». Il a fini par m’expliquer qu’il y avait un projet de spectacle sur Bernadette de Lourdes. J’ai insisté pour rentrer dans cette production. Je suis donc allé à Lourdes pour la première fois de ma vie et là, ça a été open bar !
C’est-à-dire ?
J’y ai fait des rencontres qui ont bouleversé ma vie. J’ai d’abord rencontré les jeunes qui sont au service des malades. Cela a été une grande leçon de découvrir qu’aujourd’hui en France, chaque année, des gamins donnent leur temps, leur cœur, leur âme à des gens en détresse. Ils m’ont invité à participer à une veillée organisée pour les personnes psychotiques. Et là, j’ai pris une gifle. J’étais déjà allé rendre visite à des malades dans des hôpitaux, mais tout le monde me connaissait. À Lourdes, les malades n’étaient pas en mesure de savoir qui j’étais. Je me suis retrouvé simplement devant eux à essayer de les divertir en donnant le meilleur de moi-même et j’ai découvert ce qu’était la charité.
J’ai croisé aussi une jeune fille dont les paroles m’ont bouleversé. J’étais au milieu d’un tas de personnes qui me demandaient de faire des selfies quand elle s’est approchée de moi et m’a dit : « Je vais aller prier pour vous, pour que vous viviez bien cette expérience ici et que vous continuiez à nous faire rire. » Deuxième gifle ! On ne m’avait jamais dit un truc pareil. Elle est repartie et, par miracle, j’ai réussi à la retrouver. Depuis, nous sommes devenus amis. Son personnage apparaît dans le film, mais c’est la seule qui n’a pas voulu jouer son propre rôle.
Que s’est-il encore passé à Lourdes ? Êtes-vous allé dans la grotte ?
Bien sûr que j’y suis allé, j’avais besoin de voir, de comprendre ! J’ai écouté le chapelet, c’est la bande-son de Lourdes ! Et là, j’ai vécu un autre moment incroyable en croisant un couple de juifs pratiquants avec un gamin en détresse dans une poussette médicalisée. Imaginez la scène ! Le comble, deux juifs qui se rencontrent à Lourdes ! Et le mec a le culot de me dire : « Mais, Gad, qu’est-ce que tu fous là ? » Comme si lui pouvait venir à Lourdes, mais pas moi. La femme me dit une chose bouleversante en mettant la main sur la tête de son fils malade : « On essaie tout. » Cet épisode m’a en quelque sorte donné l’autorisation d’emprunter ce nouveau chemin spirituel.
"Je m'arrête souvent dans les églises pour prier. Pour moi, l’église symbolise la liberté", confie l'humoriste. :copyright: PATRICE NORMAND – LEEXTRA POUR FC
Hormis Lourdes, y a-t-il d’autres lieux spirituels qui vous ont marqué ?
Oui, il y a notamment eu ma retraite à Sénanque. C’était avant Lourdes, et cela a été déterminant.
Dans quelles circonstances y êtes-vous allé ?
C’est mon ami humoriste Élie Semoun qui m’a raconté un jour son expérience à l’abbaye, alors que j’étais à un moment compliqué de ma vie, où je cherchais vraiment du sens. Je veux être honnête, je ne suis pas allé là-bas pour y chercher ce que j’y ai finalement trouvé. J’avais hésité avec une cure thermale ou un centre pour jeûner en mode thérapie yoga... Élie m’a intrigué, donc j’ai cherché Sénanque sur Google. Cela avait l’air tellement beau que j’ai contacté l’abbaye. Lorsqu’ils m’ont dit le prix du séjour, j’ai eu un peu peur... surtout le petit-déjeuner à seulement quatre euros. J’ai demandé à Élie si ça valait vraiment le coup d’y aller, il m’a dit : « Fais-moi confiance. » Me voilà donc chez les Frères cisterciens. Dans cette abbaye, j’ai trouvé beaucoup de paix. J’ai suivi des offices, j’ai discuté avec les moines, demandé une audience, assisté aux prières... J’adorais les chants, c’était sublime. J’ai aussi beaucoup lu saint Augustin. Maintenant, j’ai très envie d’aller à Lagrasse chez les Chanoines réguliers. Je vais y aller ! Comment est le petit-déj ? [Rires].
Vous continuez donc à fréquenter des lieux spirituels ?
Oui. Cet été, je suis allé à Paray. Je m’arrête aussi dans les églises sur la route au cours de mes tournées. Ce sont des lieux où je me rends souvent pour me recueillir, pour prier, pour me retrouver dans cet état dans lequel j’étais quand j’ai poussé la porte de cette église dans mon enfance. Pour moi, l’église symbolise la liberté. Parce que c’est mon histoire avec ce lieu.
Que faites-vous concrètement dans ces églises ?
Je me recueille avant tout, et j’essaie de prendre un moment pour moi. Je m’y sens bien. J’observe aussi. J’y trouve toujours un petit rendez-vous avec moi-même. Pour mieux repartir.
Quelles sont les personnes qui vous ont accompagné sur votre chemin ?
Il y a celles que j’ai lues et celles que j’ai rencontrées physiquement. Notamment toutes celles qui sont dans le film. Parmi celles que j’ai lues et qui m’ont marqué, il y a saint Augustin et le cardinal Lustiger. J’aurais tellement aimé parler avec lui ! Aux Bernardins, j’ai rencontré des professeurs, des théologiens, des biblistes qui ont travaillé avec lui, et je leur pose des tas de questions.
Qu’est-ce qui vous fascine autant chez le cardinal Lustiger ?
La liberté et le choix. Comment, à l’âge de 14 ans, on décide de demander le baptême ? Et cela remue beaucoup de choses, l’histoire du peuple juif avec la Shoah, parce qu’il a perdu sa maman dans un camp de concentration. C’est complexe parce que l’histoire de l’Église et de la communauté juive est complexe. Cela aussi, j’ai voulu le mettre dans le film.
Vous évoquez tout au long du film votre tiraillement, lié à votre loyauté envers votre famille. Comment a commencé le conflit ? Vos parents ont-ils vraiment retrouvé une statue de la Vierge dans votre valise ?
En réalité, ce conflit n’a jamais vraiment eu lieu. Mais j’ai voulu traduire ce que mes parents ont probablement ressenti ces dernières années. La vraie scène qui s’est passée est quand mes parents sont venus dîner chez moi un soir, et qu’ils ont vu une statue de la Vierge dans ma chambre. Leur réaction était très intéressante : ils n’ont rien dit, c’était en quelque sorte une chose tellement grave qu’ils n’en ont pas parlé. C’est tout cela que j’ai voulu mettre en scène. Mais je suis aussi un artiste comique, j’ai eu envie de pousser les choses. Par exemple, avec cette scène où mon père met des gants pour ne pas toucher la statue.
Vos parents se sont donc rendu compte que le catholicisme prenait une telle place dans votre vie ?
Je pense qu’ils ont vraiment pris conscience de la force de cette aventure en voyant le film. Ils n’ont pas lu le scénario et, sur le plateau, ils ont bien vu qu’on manipulait des choses en lien avec la foi, mais en voyant le film ils ont pris une claque. Ils se sont dit : « Ah oui, c’est vraiment sérieux, c’est pour ça qu’il nous a demandé de faire tout cela... » Finalement, ils n’ont pas été choqués. Au contraire, ils ont compris à quel point c’était important pour moi. Ils ont aussi compris ce qui était un point de départ réel et ce qui était de la fiction.
Dans son film, Gad Elmaleh met en scène tout le tiraillement entre son attrait mystérieux pour la foi catholique et son souci de loyauté envers sa famille juive. :copyright:PATRICE NORMAND – LEEXTRA POUR FC
Comment avez-vous fait pour les convaincre de jouer leur rôle dans le film ?
J’ai un peu menti, j’ai un peu triché... En fait, je leur ai dit que je voulais faire un film sur la crise de la cinquantaine [Rires]. Cela dit, c’est aussi un film qui raconte la quête de sens d’un homme et un film sur la famille. Peut-on interroger son éducation, sa foi, ce qu’on nous a transmis, interroger le schéma familial et parental ? À quel moment quitte-t-on ses parents ? C’est pour cela qu’il y a cette phrase de l’Évangile dite par le Père Barthélemy : « Et celui qui aura quitté, à cause de mon nom, des maisons, des frères, des sœurs, un père, une mère, des enfants, ou une terre, recevra le centuple, et il aura en héritage la Vie éternelle » (Mt 19, 29). Je l’aime tellement cette phrase ! C’est une sagesse.
Ce film était-il un peu l’occasion de briser la glace ?
Oui, je me demande si je ne me suis pas servi de ce film pour parler à mes parents, de mon attrait pour le catholicisme. Reste un peu est peut-être pour moi ce qu’a été pour certains ce genre littéraire apparu après la Seconde Guerre mondiale : le récit de conversion. Édith Stein, Simone Weil, Bergson ont eu besoin de raconter leur itinéraire. Les sociologues analysent ça très bien : c’est le schéma de maîtrise, le converti a besoin de s’aider d’une forme de récit, ou de l’avoir romancé, pour pouvoir faire passer le message. Avec Reste un peu, il y a quelque chose de cet ordre. J’ai demandé à Mehdi Djaadi [qui joue dans le film, Ndlr], s’il n’avait pas fait son spectacle Coming Out pour qu’il l’aide lui-même à cheminer.
Mehdi Djaadi a aussi vécu ce tiraillement familial et il a finalement franchi le cap de la conversion. Vous arrive-t-il d’en discuter ?
On ne parle que de ça ! On se donne même des adresses. Je ne peux pas tout vous dire...
Vous décrivez tous les deux dans vos spectacles le monde catholique vu de l’extérieur. Quelle perception en aviez-vous avant de connaître un peu mieux cet univers ?
Je n’avais pas une idée préconçue, mais je rencontrais souvent des gens qui étaient catholiques et ne voulaient pas trop en parler... Ils pensaient souvent qu’en tant qu’artiste marocain juif, je ne serais pas intéressé par leur foi chrétienne et ils me ménageaient en me disant presque : « Ne t’inquiète pas, je ne suis pas baptisé ! » J’ai souvent vu ce complexe et j’en ris dans mes spectacles pour provoquer les catholiques là-dessus, car j’ai du mal à comprendre. Ce n’est peut-être pas sexy d’être catho en France, mais c’est la responsabilité des catholiques, ce ne sont pas seulement les autres qui les enferment là-dedans. Donc je les décomplexe. Je raconte, par exemple, que quand tu demandes à un juif :
« T’es juif ? », il répond : « Bien sûr je suis juif, grâce à Dieu. Pourquoi tu poses cette question ? » Quand tu demandes à un musulman, c’est la même chose. Et quand tu poses la question à un catho, il répond : « Euh, c’est un peu compliqué. Alors, en fait, mon frère a été baptisé, moi non, la communion, en fait, je ne m’en rappelle pas... » Arrête, c’est pas vrai, tu t’en souviens très bien ! Finalement, on n’est jamais aussi enfermé que par soi-même ! Je pense que plus on assume ce qu’on est et plus on est respecté. C’est aussi valable pour la famille... pour tout ce qui fait partie de notre identité.
Au fond, comment faut-il comprendre « Reste un peu » ? Est-ce uniquement la phrase que votre mère vous dit lorsque vous rentrez chez vos parents au début ?
Pas vraiment... Cette demande, c’est aussi moi qui l’adresse à Marie. L’image protectrice, maternelle et consolatrice qui m’est la plus évidente dans le catholicisme et qui m’accompagne, c’est elle.
Camille Lecuit et Élisabeth Caillemer
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"Reste un peu". La Foi de Gad Elmaleh
Dans son nouveau film, « Reste un peu », sur les écrans dès ce 16 novembre 2022, l'humoriste franco-marocain partage une étape de sa vie spirituelle : la recherche. Un cheminement qui a commencé à Casablanca alors que, enfant et malgré l'interdiction parentale, il fit irruption dans une église pour y vivre une rencontre singulière avec la Vierge Marie. Cinquante ans plus tard, toujours amoureux de la sainte Vierge, il est bien sur le plateau de KTO pour partager, en confiance, ses questions, ses rencontres, son parcours, notamment les interrogations et préventions du milieu familio-amical devant ce qui a paru à certains être une conversion insupportable.
Gad ELMALEH : "J'ai eu un coup de foudre pour la vierge Marie"
Tous les jours, à 18h50 (heure de Paris), Patrick Simonin reçoit les personnalités qui font l'actualité sur TV5MONDE.
Lumen- Date d'inscription : 09/11/2021
Localisation : France
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