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Canonisation et Infaillibilité

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Canonisation et Infaillibilité Empty Canonisation et Infaillibilité

Message par Francesco Jeu 14 Jan 2010 - 0:01

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Dieu seul suffit,l'aimer,le suivre et faire sa volonté.
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Canonisation et Infaillibilité Empty Re: Canonisation et Infaillibilité

Message par Francesco Jeu 14 Jan 2010 - 0:02


Question: Est-ce que le Pape engage son infaillibilité lorsqu'il canonise, c'est-à-dire proclame sainte, une personne que l'on a déjà déclarée bienheureuse, pour qu'elle soit vénérée non plus seulement localement, mais dans toute l'Église?

Par: Yvon Marcoux, prêtre-canoniste, 19 mai 2005 ________________________________________________


Pour bien saisir l'enjeu et la portée de cette question, il faut au départ bien comprendre ce qu’est l'infaillibilité dans l'Église, qui peut l'exercer, à quoi elle réfère et jusqu'où elle peut s'appliquer, de quelle adhésion elle engage les fidèles, et enfin le sens, la nature et la portée véritable d'une canonisation. Pour ce faire, il nous faut parler d'abord de la fonction d'enseignement et de l’autorité dans l'Église, et comprendre ce pourquoi ces dernières réalités, canonisation et infaillibilité, peuvent être intimement reliées à cette dernière fonction ecclésiale.

I- Au sujet de l’infaillibilité

1. L’Église gardienne du dépôt de la foi

L'Église est la gardienne du dépôt de la foi reçu du Christ et transmise par les apôtres. Avec l'aide du Saint-Esprit, elle a pour mission de garder saintement la vérité révélée, de la scruter plus profondément, de l'annoncer et de l'exposer. Elle a le droit inné et le devoir de prêcher l'Évangile à toutes les nations. Quand nous parlons ici de l'Église, il ne s'agit pas seulement des clercs, mais de tous les fidèles laïcs pris autant individuellement que collectivement (LG 12) (Dei Verbum 7-10) (DC. canons 211,747, 756-759; 763-766; 773-780; 782-785).

C'est également du domaine de la compétence de l'Église d'exposer les principes moraux de l'ordre social et de porter un jugement sur toute réalité humaine dans laquelle les droits fondamentaux sont impliqués et/ou le salut des âmes est compromis. (GS 76; DH 13). Ce droit de l'Église de garder la vérité révélée et le devoir de l’annoncer, a contrario, n'oblige personne à embrasser la foi catholique par contrainte, et a adhérer à cette foi contre sa conscience. (C. 748 § 2)

C'est un droit également pour ceux qui sont croyants de chercher à connaître la vérité de Dieu, de la trouver à travers les enseignements de l'Église, et d'y adhérer en la gardant précieusement, sachant que celle-ci ne peut se tromper ou ni tromper ses fidèles dans ce qu'elle révèle en au nom du Seigneur. (C. 748 § 1)





2. L'infaillibilité de l'Église au service de la foi reçue du Christ et des Apôtres

Pour remplir sa mission, ce qui est absolument original parmi les sociétés humaines, l'Église a reçu la Révélation divine en dépôt et l'assistance indéfectible de l'Esprit de Vérité (DV 9). C'est sur ces deux prémisses que repose la responsabilité de l'Église de protéger la foi reçue du Christ et des apôtres, et de revendiquer son droit à la liberté de communiquer sa doctrine à tous les hommes. Ce dépôt unique et cette assistance assurée nous invite à croire au caractère infaillible de l'Église qui, comme collectivité, ayant reçu l'Onction du Saint Esprit, ne peut errer dans le contenu de la foi reçue et à transmettre.

L'infaillibilité, c'est ce don particulier, ce charisme extraordinaire que l'Église a reçu du Christ et qu'elle exerce de différentes manières en son nom, de ne pas être sujette à l'erreur dans ce qu'elle croit et/ou enseigne concernant le Dépôt révélé, dans les domaines de la foi et des mœurs plus précisément. Il s'agit par conséquent d'un charisme de contenu négatif accordé à tout le peuple de Dieu et à ces dirigeants sur ces deux points particuliers de la vie chrétienne. Possédant ce charisme, L’Église toute entière participe à l'infaillibilité du Christ qui s'est déclaré être «Le chemin, la Vérité, et la Vie», et qui lui a fait le don de l'Esprit Saint, cet Esprit de Vérité, qui l’assistera, tel que promis, jusqu'à la fin des temps.


Catéchisme de l'Église catholique
889. Pour maintenir l’Église dans la pureté de la foi transmise par les apôtres, le Christ a voulu conférer à son Église une participation à sa propre infaillibilité, Lui qui est la Vérité. Par le « sens surnaturel de la foi », le Peuple de Dieu « s’attache indéfectiblement à la foi », sous la conduite du Magistère vivant de l’Église (cf. LG 12 ; DV 10).


3. La fonction d'enseignement et d’autorité dans l'Église

Ce don de l'infaillibilité donné ainsi à l'Église toute entière en vertu de l'assistance divine, est accordé d'une façon toute particulière à tous ceux qui exercent la responsabilité première dans l'Église de par leur mission de garder, de scruter, d'annoncer et d'exposer fidèlement l'Évangile de Jésus-Christ. Ce don de l'infaillibilité accordé au Peuple de Dieu, s'exerce en particulier par le magistère extraordinaire et solennel, et par le magistère ordinaire et universel de ceux à qui le Christ à confié son Église.


Catéchisme de l'Église catholique
888 Les évêques, avec les prêtres, leurs coopérateurs, « ont pour première tâche d’annoncer l’Évangile de Dieu à tous les hommes » (PO 4), selon l’ordre du Seigneur (cf. Mc 16, 15). Ils sont « les hérauts de la foi, qui amènent au Christ de nouveaux disciples, les docteurs authentiques » de la foi apostolique, « pourvus de l’autorité du Christ » (LG 25).





3.1. Le Magistère extraordinaire et solennel

3.1.1 Le Pape agissant seul

Le Pontife Suprême, le Pape, en vertu de sa charge, jouit de ce don de l'infaillibilité dans le magistère extraordinaire et solennel de l'Église lorsque, comme Pasteur et Docteur suprême de tous les fidèles auquel il appartient de confirmer ses frères dans la foi, il proclame par un acte définitif une doctrine spécifique sur la foi ou les mœurs. (c.749 § 1.) (LG 25) (Lc 22, 32).

Ainsi, selon les conditions précitées, le Pape jouit de l'infaillibilité sous une forme extraordinaire et solennelle, quand il s'exprime :

- seulement sur des questions concernant la « foi ou les mœurs»;
- clairement en proclamant «par un acte définitif» un doctrine «à tenir»;
- en vertu de sa charge, à savoir comme «pasteur et docteur suprême».


L'application de l'infaillibilité papale s'étendant à toute la révélation concernant la foi et les mœurs, cette application peut également s'étendre à des doctrines qui explicitent ces vérités révélées en raison de leur relation étroite avec la Révélation, celles-ci ne pouvant ainsi être sauvegardées que si elles sont couvertes par ce don de l'infaillibilité. Sous cette forme solennelle et extraordinaire, le Pape définit ainsi une vérité qui devient par le fait même un dogme de foi; il parle alors ex cathedra et engage tous les catholiques du monde à croire à cette vérité comme venant de Dieu et faisant ainsi parti du Dépôt révélé.


3.1.2. Le Collège des évêques assemblés en Concile Oecuménique

Le Collège des évêques jouit également de ce don de l'infaillibilité donné à l’Église lorsque, en Concile Œcuménique, les évêques exerçant leur magistère comme docteurs et juges de la foi et des mœurs, ceux-ci déclarent pour l'Église toute entière qu'il faut tenir de manière définitive une doctrine qui concerne la foi ou les mœurs. (c.749 § 2.)


3.1.3. Le Collège des Évêques dispersés à travers le monde

Enfin les évêques dispersés à travers le monde jouissent également de l'infaillibilité lorsque, gardant le lien de la communion entre eux et avec le successeur de Pierre, enseignant authentiquement en union avec celui-ci ce qui concerne la foi ou les mœurs, ils s'accordent sur un point de doctrine à tenir de manière définitive.
(c.749 § 2 )

Il est à noter ici que les mêmes conditions que celles du "Pape agissant seul» doivent être remplies pour que les Évêques puissent jouir de l'infaillibilité du magistère du Collège épiscopal réuni en Concile ou dispersé à travers le monde. De plus, leur enseignement doit être constaté par une déclaration authentique du successeur de Pierre.

Aussi, à ce présent chapitre, aucune doctrine n’est considérée comme infailliblement définie que si cela est manifestement établi (c.749 § 3 ).


3.1.4. Degré d'adhésion des fidèles aux définitions dogmatiques


Ces dogmes ainsi définis dans cette forme extraordinaire et solennelle par le magistère de l'Église, obligent les fidèles à croire que ces vérités sont de foi divine et catholique. Ils font parti également alors de l'unique dépôt de la foi confiée par le Christ à son Église, et ce au même titre que l'on croit de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu écrite ou transmise par la Tradition. En croyant à ces vérités ainsi définies, la collectivité des fidèles, le Peuple de Dieu participe de l'infaillibilité de l'Église et de ses dirigeants …qui ne peuvent se tromper dans cet assentiment de la foi proclamé et réclamé de tous. (LG 12, 25).



Catéchisme de l'Église catholique: En résumé…
891 «De cette infaillibilité, le Pontife romain, chef du collège des évêques, jouit du fait même de sa charge quand, en tant que pasteur et docteur suprême de tous les fidèles, et chargé de confirmer ses frères dans la foi, il proclame, par un acte définitif, un point de doctrine touchant la foi et les mœurs (...). L’infaillibilité promise à l’Église réside aussi dans le corps des évêques quand il exerce son Magistère suprême en union avec le successeur de Pierre », surtout dans un Concile Œcuménique (LG 25 ; cf. Vatican I : DS 3074).

Lorsque par son Magistère suprême, l’Église propose quelque chose « à croire comme étant révélé par Dieu » (DV 10) et comme enseignement du Christ, « il faut adhérer dans l’obéissance de la foi à de telles définitions » (LG 25). Cette infaillibilité s’étend aussi loin que le dépôt lui-même de la Révélation divine (cf. LG 25).


Il y a lieu également de noter ici que cette doctrine sur l'infaillibilité dont jouit le magistère extraordinaire et solennel des évêques - sauf celle accordé au Pape - n'a pas été défini comme telle par Vatican I. Elle a été par contre enseignée dans LG 25, en union fidèle avec la foi de l'Église de tous les temps, et exprimée par saint Thomas qui disait: L'Église universelle ne peut se tromper, car elle est gouvernée par l'Esprit Saint, qui est Esprit de vérité (Summa theologiae, II-II, q.1, a.9) (DC Notes explicatives p.445, note 749). On retrouve également cette doctrine dans le Catéchisme de l'Église catholique (no. 888 ss).


3.2. Le Magistère ordinaire et universel

Le charisme de l'infaillibilité dont jouit l'Église pour conserver et protéger la foi des fidèles s'exerce et s'applique également bien au-delà des définitions infaillibles prononcées d'une manière définitive par le Magistère solennel du Pape seul ou avec les Évêques lors de Concile œcuménique ou dispersés à travers le monde. Cette même assistance de l'Esprit Saint est accordée également aux doctrines que le Pontife Suprême et/ou au Collège des Évêques énoncent en matière de foi ou de mœurs, même s'ils n'ont pas l'intention de les proclamer par un acte définitif.

Ainsi, les fidèles doivent croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu écrite et transmise par la tradition, donc l'unique dépôt de la foi confié à l'Église et qui est proposé comme divinement révélé par le magistère ordinaire et universel, à savoir ce qui est manifesté par la commune adhésion des fidèles sous la conduite du magistère sacré. (c. 750)

Au cours de l'histoire de l'Église, le Souverain Pontife n'a que très rarement défini un Dogme de foi ex cathedra dans les conditions prévues par le Concile Vatican I et consignée dans le canon 749 § 1. La plus grande partie du magistère ordinaire des papes est infaillible également en dehors de cette forme extraordinaire et solennel, parce qu'elle réfère à des sujets du magistère universel et ordinaire de l'Église qui concerne aussi la foi et les mœurs, et donc requiert également l'assistance de l'Esprit Saint. Il en est de même du magistère du collège épiscopal en tant que tel.


3.3. Le Magistère ordinaire et authentique concernant une doctrine


C'est dans cette même mouvance du charisme de l'infaillibilité que nous pouvons dire également que l’Esprit saint assiste le Pontife Suprême et le Collège des Évêques sur l’énoncé d’une doctrine en matière de foi ou de mœurs, même s’il n’ont pas l’intention de la proclamer par un acte définitif.

Même si ce magistère ne requiert pas ici un assentiment de la foi, comme pour un dogme et une doctrine issue du magistère ordinaire et universel de l’Église, les fidèles sont néanmoins invités à accorder à ces vérités une soumission religieuse de l'intelligence et de la volonté (hommage entier de l'entendement et de la volonté à Dieu qui se révèle par elle), afin d'éviter tout ce qui ne concorde pas avec cette doctrine. (c. 752). Même si le degré d’adhésion demandé est moindre et que son contenu n’est pas présenté dans une forme extraordinaire et solennelle, il n’en reste pas moins que ce magistère ordinaire est authentique et prolonge les deux magistères précédents qui requièrent l’adhésion de la foi. Cette authenticité du magistère provient également de ce charisme que possède de l’Église de ne pouvoir se tromper dans les domaines de la foi et des mœurs, et ce jusqu’à son explicitation doctrinale. N’exigeant pas des fidèles une un assentiment plein et entier de la foi, cette doctrine particulière amène les fidèles à une meilleure intelligence de celle-ci.





Ainsi, le Concile Vatican II, concile qui s'est voulu d'abord d'ordre pastoral, doit recevoir la qualification de magistère authentique de l'Église. Même si le Concile ne s'est pas prononcé selon les modalités requises pour requérir des fidèles un assentiment de la foi, l’enseignement ordinaire et authentique de la doctrine que l’on y a enseignée requiert un assentiment religieux et de l’esprit, qui prolonge l’assentiment de la foi.


Catéchisme de l'Église catholique: En résumé
892 L’assistance divine est encore donnée aux successeurs des apôtres, enseignant en communion avec le successeur de Pierre, et, d’une manière particulière, à l’évêque de Rome, Pasteur de toute l’Église, lorsque, sans arriver à une définition infaillible et sans se prononcer d’une « manière définitive », ils proposent dans l’exercice du Magistère ordinaire un enseignement qui conduit à une meilleure intelligence de la Révélation en matière de foi et de mœurs. A cet enseignement ordinaire les fidèles doivent « donner l’assentiment religieux de leur esprit » (LG 25) qui, s’il se distingue de l’assentiment de la foi, le prolonge cependant.

3.4. Le Magistère authentique des Évêques pris individuellement ou en Conférence

Ce présent magistère qualifié d’authentique, ne traite pas des actes du magistère du Pontife Suprême, ni du collège épiscopal, mais bien de celui que chacun des évêques seuls ou en Conférences épiscopales, ou encore en Conciles particuliers, exerce, en communion avec le chef du Collège épiscopal et ses membres, pour que la multitude des croyants conserve l’unité de foi et de la communion.

Ces évêques, ainsi en communion, ne jouissent pas de l’infaillibilité quand ils enseignent comme docteurs et maîtres de la foi des fidèles confiés à leurs soins; néanmoins, les fidèles sont tenus d’adhérer à leur enseignement avec une révérence religieuse de l’esprit. Le magistère du pape est le point de référence pour assurer la caractéristique évangélique de la prédication de ces derniers. La prédication du pape a pour finalité que l’épiscopat soit lui-même indivis dans la cohérence interne du sacerdoce. (Pastor aeternus du Concile Vatican I)(c. 753).

Il appartient de même aux Évêques, et selon le droit, aux conférences des Évêques, de promouvoir cette même unité, et de donner, selon les divers besoins ou les occasions favorables, des règles pratiques, en tenant compte des dispositions portées par l’autorité suprême de l’Église (c. 755 § 2).


II- Au sujet de la canonisation de Serviteurs de Dieu

1. Sens d’une canonisation

Père, Fils et Esprit, Dieu seul est Saint, et lui seul peut sanctifier son Église et les membres qui la compose. Puisqu’il nous a envoyé son Fils Jésus-Christ et son Esprit-Saint pour qu’ils nous apprennent à aimer et donc a devenir saint comme Dieu, tous les imitateurs de Dieu qui aime comme Lui nous a aimé peuvent être déclaré saint à la manière de Dieu, sans pourtant posséder toute la perfection de sa Sainteté. Tout comme les apôtres, les martyrs, les anges, Marie, sont recommandés à la pieuse dévotion et à l’imitation des fidèles, les autres saints, témoins de Dieu qui continue toujours de sanctifier son Église aujourd’hui, sont proposés comme des signes de sa présence et de sa sainteté parmi nous.

L’Église, par son magistère, ayant pour mission confiée par le Seigneur d’enseigner, de sanctifier et de gouverner le Peuple de Dieu, a proposé et propose encore à l’imitation, à la vénération et à la prière des fidèles, des hommes et des femmes qui se sont distingués par l’éclat de leur charité, de leur amour, et des autres vertus évangéliques; après avoir mené les enquêtes qui convient, le Siège apostolique les déclare saints ou saintes dans l’acte solennel de leur canonisation. Constitution apostolique Divinus perfectionis Magister 25 janvier l983(DC 80 ( 1983) 1138-1140).

Rappelons que pour la béatification, il faut tout d'abord examiner si le baptisé a vécu de façon héroïque les vertus chrétiennes, puis qu'un miracle soit authentifié et reconnu comme dû à l'intercession du Serviteur de Dieu, à moins que son martyre soit attesté. Pour la canonisation, il faudra l'attestation d'un nouveau miracle.


2. Origine historique des béatifications et des canonisations


Aux premiers siècles de l'Église, le culte des saints est né spontanément autour de la tombe d'un martyr et était le fait de la communauté chrétienne locale. C'est seulement au IV e siècle que la canonisation s'étend à ceux, qui bien que n'ayant pas eu l'occasion de verser leur sang pour la foi, s'étaient illustrés par des vertus éminentes. Rapidement, le culte déborde les limites locales: l'Église d'Afrique fête S. Laurent de Rome, et l'Église romaine des saints d'Afrique: Cyprien, Perpétue et Félicité: c'est une sorte de canonisation de fait. Peu à peu les évêques s'estiment responsables du culte à rendre sur place à des martyrs, à leurs propres prédécesseurs, à d'autres personnages locaux, et veillent à écarter des abus venant de la crédulité populaire. Assez souvent on voit le pape intervenir, soit de son propre chef, soit à la demande des évêques pour donner plus de poids à leur décision. "Le culte ne s'élevait à la dignité d'une canonisation que lorsque passant de diocèse en diocèse, il s'étendait à l'Église universelle, avec l'assentiment exprès ou tacite du Souverain Pontife." (Dict. de Théo Catholique -DTC- Tome IV, col. 1632).


A partir de 1170, le pape Alexandre III entend se réserver les cas de canonisation et les fait instruire par un véritable procès sur la vie, les vertus et les miracles (avant et après la mort) d'un serviteur de Dieu dont on sollicite la canonisation. La sévérité du pape en matière de miracles s'est heurtée longtemps aux habitudes locales et à des mentalités portées au merveilleux et peu accessibles aux arguties juridiques.

Une étape décisive est franchie avec la création de la Congrégation des rites (1588): c'est désormais un organe permanent de la Curie romaine qui surveille et accompagne les différentes phases de chaque cause jusqu'à son terme». En 1634, par le bref "Cealestis Jerusalem cives", il est hors de conteste, de fait comme de droit, que seul le Souverain Pontife peut procéder aux béatifications et aux canonisations.


3. Procédures actuelles de canonisation
La procédure de canonisation a été structurée en fonction de ce qui avait été établi dans le Code de Droit Canonique de 1917. Quelques modifications ont été introduites par la suite. Pie XI introduisit la Section Historique pour les Causes Anciennes; Paul VI a unifié la phase diocésaine et la phase apostolique, instituant un seul procès pour le recueil de preuves concernant la vie, les vertus, le martyre et les miracles. Ensuite le Concile Vatican II a constaté l'exigence de faire une réforme plus importante qui tienne compte de la collégialité épiscopale et des progrès de la technologie. Le pape actuel a tenté de répondre à cette exigence avec la réforme de 1983. La procédure actuelle est déterminée par la Constitution apostolique "Divinus perfectionis magister" qui prévoit deux phases.
«Dans la première, la phase diocésaine, l'évêque du lieu où est mort le serviteur de Dieu (c'est ainsi qu'est appelé le candidat à la béatification) vérifie d'abord si celui-ci avait une réputation de sainteté aux yeux du peuple et si cette réputation est ancrée dans une authentique sainteté de vie et d'oeuvres. Il recueille ensuite tous les écrits et toute la documentation en lien avec la personne et l'activité du serviteur de Dieu. Par la suite, avec le "nihil obstat" du Saint-Siège, il constitue un tribunal particulier pour recueillir les témoignages de ceux qui l'ont connu. Tous les actes (les documents écrits et les témoignages) sont ensuite envoyés à la Congrégation pour la Cause des Saints. La deuxième phase est une phase d'étude très approfondie réalisée par la Congrégation pour voir si le serviteur de Dieu vivait les vertus chrétiennes de manière héroïque, ou si sa mort peut être considérée comme un véritable martyre, ou si le miracle présumé est réellement un fait inexplicable pour les lois naturelles. Ces examens sont réalisés par des théologiens et ensuite par des cardinaux et des évêques membres de la Congrégation pour la Cause des Saints. Leur jugement est transmis au Pape qui ratifie la canonisation s'il la juge opportune» (ZF99110103)
«Il est à noter que lorsqu’il s’agit de canoniser un groupe, formé même de personnes béatifiées à diverses dates (comme les 103 martyrs de Corée, canonisés en 1984, les 117 martyrs du Vietnam, canonisés en 1988, les 120 martyrs de Chine, canonisés en 2000), un seul miracle est requis pour l'ensemble. L'examen des miracles pour une canonisation se fait selon les mêmes règles que pour une béatification. Dans la plupart des cas, toujours selon la même source, le miracle allégué est un miracle de guérison. Il suffit, depuis 1983, d'un seul miracle, mais l'enquête médicale est devenue de plus en plus exigeante. Cependant, ce miracle peut ne pas être une guérison. Pour Juan Grande (+ 1600) en 1996, il s'agissait d'une multiplication de riz en faveur de pauvres.
Enfin, la canonisation "équipollente", rare, se fait par la publication d'une bulle. Ce fut le cas pour Albert le Grand op. (+ 1280) en 1931, et pour Marguerite de Hongrie (+ 1270), en 1943. Elle concerne des personnages anciens ayant un culte local. Aucun nouveau miracle n'est requis, mais la congrégation tient compte de la renommée des miracles accomplis.» (ZF01060803)


4. Acte solennel d’une canonisation

La Canonisation, c’est donc l’acte solennel par lequel le Souverain Pontife décrète et inscrit définitivement qu’un serviteur de Dieu, déjà compté parmi les bienheureux, doit être inscrit au catalogue des saints (le Martyrologe romain) et vénéré dans toute l'Église universelle. Avec la canonisation, la sentence est préceptive, et le culte étendu à toute l'Église. Par cet acte, le pape déclare que celui ou celle qu'il vient de placer sur les autels règne vraiment dans la gloire éternelle, et il commande à l'Église universelle de lui rendre en tout lieu le culte dû aux saints.

La canonisation équivaut donc à un triple jugement souverain et définitif par lequel l'Église affirme son autorité:

a) que telle personne est dans la gloire éternelle et a durant sa vie pratiqué les vertus surnaturelles à un degré héroïque;
b) que sa vénération universelle constitue pour tous les fidèles de l'Église une norme sûre, et qu'en s'y conformant, ils sont assurés de ne pas se tromper;
c) que tout fidèle en y donnant son adhésion, et en prenant part au culte public de sa personne, vénère en même temps la grâce éminente qu'elle a reçue de participer à l'intimité de la nature de Dieu.

La canonisation se différencie de la béatification. Tous les deux sont des actes solennels. Mais dans le cas d'une béatification, le pape autorise le culte d'un nouveau bienheureux que dans un territoire ou dans une famille religieuse; c'est un privilège concédé à une cité, un diocèse, une région ou une famille religieuse seulement. Dans la béatification, l'acte du pape n'est pas définitif et sa sentence peut être réformable; ce n'est pas un précepte, mais une permission. Cette permission précède sa canonisation. La canonisation engage l'infaillibilité papale, mais pas la béatification. Rappelons que "non infaillible" ne signifie pas "dépourvu de toute valeur". La certitude admet des degrés, et le titre de bienheureux appelle notre respect.

5. Caractère infaillible d’une canonisation

Les théologiens presque à l'unanimité acceptent comme étant théologiquement certain que l’église est infaillible dans le canonisation solennelle des saints, contrairement à la béatification des bienheureux. La raison en est que la canonisation n’est pas seulement une permission d’honorer un saint, comme c’est le cas de la béatification. C’est une définition, et un commandement, (acte définitif et préceptif), faits par le souverain pontife avec l’usage de sa pleine autorité, et qui donc lie les catholiques. C’est quelque chose de «semblable» à une proclamation de la foi, mais ayant pour objet «la gloire d’un saint au ciel». (St-Thomas, Quodlibet IX, Q.8, art 16).
Cependant, tous les saints canonisés ne sont pas déclarés comme tels par l’Église. Dans les dix premiers siècles de l’histoire de l’Église, les papes donnaient simplement leur approbation à la vénération des saints et des martyrs par les fidèles. Ils sont aujourd’hui considérés comme des saints. Mais puisqu’il n’y a pas eu dans leur cas de procès solennel de canonisation, l’autorité et l’infaillibilité entière de l’Église ne sont pas engagées pour de tels saints; il semble très probable que l'on avait affaire qu'à de simples béatifications.
On doit donc dire que ce n’est pas le fait qu’une personne soit appelée un saint qui engage l’infaillibilité, mais la déclaration et la définition solennelle par le Souverain Pontife liant les catholiques. (…) Si le décret de canonisation n’était pas solennelle, et/ou ne contenait pas des expressions comme « nous définissons », et « nous commandons » la vénération de ce saint, alors ce décret ne serait pas infaillible, à l’instar de l’approbation de la vénération des saints dans les premiers siècles de l’Église. La même distinction s’applique au concile Vatican II, qui, en refusant de définir ainsi clairement sa doctrine, a refusé d’utiliser l’autorité infaillible de Magistère extraordinaire qu’il aurait pu utiliser pour condamner des hérésies ou affirmer de nouvelles doctrines.
Surgit alors la question de savoir, dans l’hypothèse d’une canonisation accomplie solennellement et selon les règles, si nous sommes tenus de vénérer ce saint particulier comme un patron et un modèle. L’objet de la canonisation est ainsi la vision que le saint a de Dieu au ciel et seulement indirectement la sainteté de sa vie et sa valeur comme modèle. Ces dernières ne sont donc pas l’objet de la définition infaillible par le pape, et bien que normalement on ne les met pas en doute dans un saint canonisé». (Peter Scott, dans The Angelus,juil. 2002).

III- Conclusion

La canonisation est une sentence définitive, irréformable, sur la sainteté d’une personne. Oui, c’est une proclamation qui engage l’autorité suprême du Pape, et qui touche au dogme de l’infaillibilité (Mgr Saraiva Martins, préfet de la Congrégation pour la Cause des Saints ZF99110103). La canonisation d’un saint est un acte du magistère extraordinaire et solennel quant à sa forme, un acte du magistère ordinaire et universel quant à son contenu, un acte du magistère ordinaire et authentique quant au degré d’adhésion qu’elle requiert, mais dans tous ces cas précités c’est toujours dans la mouvance de l’infaillibilité de l’Église et du Pape que cette canonisation est proclamée.

1. Magistère extraordinaire et solennel quant à la forme

Quand l’Église canonise un saint, quoiqu’il ne s’agisse pas d’une question concernant la «foi et les mœurs», mais bien de sainteté d’un serviteur de Dieu, l’affirmation de cette sainteté est proclamé dans les mêmes termes que ceux que l’Église emploie en particulier pour énoncer une nouvelle définition de la foi. Dans une canonisation, elle utilise en fait les expressions « acte définitif», «acte irréformable», vérité «à tenir», issus de son magistère extraordinaire et solennel pour lier les fidèles et l’Église dans cette nouvelle définition. Et c’est le Pape agissant seul, comme Pasteur et Docteur suprême de l’Église qui confirme ses frères dans la sainteté de ce serviteur de Dieu.


2. Magistère ordinaire et universel quant au contenu

Quant au contenu d’une canonisation, ce à quoi l’Église nous invite à croire, celui-ci tient lieu de ce que nous retrouvons généralement dans son magistère ordinaire universel. Il s’agit ici non pas de croire à une doctrine concernant la «foi et les mœurs», mais bien au fait que ce saint, de par sa vie exemplaire quant à sa foi , quant à ses mœurs et la grâce de Dieu, a maintenant la vision béatifique, qu’il est au ciel, et que nous pouvons le prier et le vénérer universellement sans nous tromper. Il ne s’agit pas alors d’un nouveau dogme, d’un nouvel article de la foi ou de la morale, mais de croire que ce saint a vécu pleinement les vérités liées à la Révélation, et que son exemple peut nous aider, nous inspirer à vivre comme lui les Béatitudes.


3. Magistère ordinaire et authentique quant au degré d’assentiment requis

Une canonisation, quant au degré d’assentiment qu’elle requiert de la part des fidèles, n’est pas celui du degré de foi qu’exige une définition dogmatique, dont les vérités à croire sont de foi divine et catholique, comme tout ce qui se trouve également dans la parole de Dieu écrite et transmise par la Tradition. Non, une canonisation fait partie sur ce plan du magistère ordinaire et authentique de l’Église, qui ne requiert en fait de la part des fidèles qu’une soumission religieuse de la volonté et de l’intelligence.

L’autorité que l’Église engage par la canonisation est une autorité ordinaire qui requiert donc des croyants une reconnaissance respectueuse du Magistère suprême de l’Église, et une adhésion sincère à cette déclaration, en conformité avec ce qu’il manifeste de sa pensée et de sa volonté. Une personne qui ne saurait donner cet assentiment dans cette matière ne pourrait être considéré comme hérétique.

Si déclarer un serviteur de Dieu Bienheureux invite au respect, - la certitude admettant des degrés-, la canonisation appelle à son tour à une reconnaissance honnête et sincère des fidèles au magistère ordinaire et authentique de l'Église qui, par la valeur de son infaillibilité, soumet et prolonge l'assentiment de la foi croyants à une adhésion au droit divin de révéler également sa Sainteté à travers les vertus héroïques des personnes concernées.

Il en est des canonisations dans l'Église comme des révélations privées. Il faut là comme ailleurs un discernement prudent dans l’évaluation de la valeur spirituelle de celles-ci. La chose a été soulignée dans un commentaire catholique romain récent concernant les révélations privées en particulier:
« La révélation privée… [un tel message] peut être une aide valable pour comprendre et mieux vivre l'Évangile à l'heure actuelle; c'est pourquoi il ne doit pas être négligé. Il une aide qui est offerte, mais dont il n'est nullement obligatoire de faire usage… Le critère pour la vérité et pour la valeur d'une révélation privée est donc son orientation vers le Christ lui-même. Quand elle nous éloigne de lui, quand elle se rend autonome ou même quand elle se fait passer pour un dessein de salut autre et meilleur, plus important que l'Évangile, elle ne vient certainement pas de l'Esprit Saint » (Congrégation pour la doctrine de la foi, Commentaire théologique sur le message de Fatima, 26 juin 2000).



"Nous sommes d’accord que, à l’intérieur des contraintes posées dans cet enseignement pour garantir que l’honneur rendu au Christ reste pré-éminent, on peut accepter une telle dévotion privée mais sans jamais l’exiger des croyants". (Le Rapport Seattle. "Marie: grâce et espérance dans le Christ" 8 novembre 2004.)



4- Magistère qui engage l’infaillibilité de l’Église et de son Pontife Suprême

Puisque dans une canonisation, le charisme de l’infaillibilité dont jouit l’Église et ses dirigeants participe, quant aux actes qu’elle implique, de l’un et de l’autre des magistères précités, et ce autant dans leur forme, dans leur contenu, que dans l’assentiment requis des fidèles, il va de soi que nous disions sans ambages que le Pape engage vraiment son infaillibilité lorsqu’il canonise; c’est-à-dire qu’il proclame sainte une personne, un serviteur de Dieu qui a été déjà déclaré bienheureux, pour qu’elle soit vénérée dans toute l’Église. «La canonisation d’un saint engage l’Église toute entière, eu égard aux vérités liées à la Révélation par nécessité historique - Cardinal Ratzinger».

L'argument de droit qui soutient ce magistère infaillible, est qu'il n'est pas possible que le pape se trompe en canonisant une personne qui serait réprouvé. En cette matière " la divine Providence préserve l'Église de ne pouvoir être trompée par le témoignage faillible des hommes" (Quodlibet, livre I, chapitre 44, ad.2, St-Thomas). De fait également, il n'y a jamais eu d'erreurs trouvés dans les canonisations auxquelles les pape ont pu procéder formellement.

Nul n’est tenu d’y croire comme à un dogme, ou comme au Dépôt révélé. La procédure de canonisation nécessitant un miracle reconnu comme d’origine divine, c’est Dieu lui-même alors qui engage son autorité, et qui autorise le successeur de Pierre à proposer aux fidèles des exemples crédibles et authentiques de la puissance du Très-Haut qui transforme encore l’humanité par son Esprit d’Amour et de Vérité.

La foi à laquelle nous sommes conviés dans une canonisation, c’est somme toute celle de croire que si cette canonisation n’apporte rien de nouveau concernant le contenu de la foi chrétienne, pourtant à l’exemple des saints canonisés, elle nous apporte une espérance renouvelée; celle de comprendre que Dieu, encore aujourd’hui, continue son plan de salut et d’amour pour l’humanité, et que ces serviteurs de Dieu confirment que nous pouvons également nous laisser sanctifier dans le quotidien de nos vies, par la grâce et le salut de tous en Jésus christ.

Yvon Marcoux, prêtre-canoniste

Dernière mise à jour 19/05/2005



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