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Sur le crucifix - Le père Jésuite français Grou – 18 eme siècle

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Sur le crucifix - Le père Jésuite français Grou – 18 eme siècle  Empty Sur le crucifix - Le père Jésuite français Grou – 18 eme siècle

Message par MichelT Lun 10 Mar 2014 - 20:41

Le père Jésuite français Grou – 18 eme siècle

Sur le crucifix

Saint-Paul  bornait pour lui toute la religion a la science du crucifix ( 1 Co 2,2), et il avait certes raison.  Le crucifix est l`abrégé de tout ce qu`un chrétien doit croire et de ce que il doit pratiquer. Le crucifix nous fait connaitre toute la malice du péché, l`excès de notre misère, l`excès encore plus grand de la miséricorde divine. Le crucifix est la plus grande preuve que Dieu, tout Dieu qu`il est, put nous donner de son amour et le motif le plus fort qu`il put  employer pour gagner notre cœur.

Toutes les vertus se trouvent renfermés dans le crucifix, et il est la consommation des voies intérieures. Je vais dire un mot sur chacun de ces objets. La grâce en dira bien davantage à ceux qui veulent  se dévouer à Dieu. Le crucifix est l`abrégé de tout ce qu`un chrétien doit croire. La personne de celui qui souffre, fils unique de Dieu, et conçu dans le sein de Marie par l`opération du St-Esprit., nous propose les deux grand mystères de la Trinité et de l`Incarnation.

L`objet de ses souffrances nous instruit du mystère de la Rédemption et du péché originel.  Le mystère de la Prédestination, celui de la grâce, la volonté de sauver tous les hommes  sont aussi renfermés dans la Croix. Elle est la source de tous les sacrements, comme il me serait aisé de le montrer en détail, et tout le culte par lequel  l`Église honore Dieu se rapporte au sacrifice de la Croix.

Le crucifix est l`abrégé de tout ce que un chrétien doit pratiquer. Toute la morale évangélique se réduit à porter sa croix, a se renoncer, à gouverner ses sens et notre convoitise, à obéir à la volonté de Dieu. Jésus-Christ n`a prescrit aucune loi, n`a donné aucun conseil dont l`accomplissement et le parfait modèle ne se trouve dans la Croix. Elle est l`expression la plus vive et la plus frappante de toute la doctrine évangélique.

Le crucifix nous fait connaitre toute la malice du péché. Quel plus grand mal que celui qui a causé la mort d`un homme-Dieu?  Avant Jésus-Christ on pouvait se former  une certaine idée de l`offense de Dieu, mais cette idée était bien faible et bien imparfaite.  Le supplice éternel de l`enfer, quoiqu` il passe  toute intelligence créée, ne répond pas encore à la malice infinie du péché, car il peut le punir mais il ne peut pas l`expier.  Il ne fallait rien de moins que une personne divine, pour réparer par ses souffrances et ses humiliations l`injure faite à Dieu par le péché ( par nos premier parent en Éden – le péché a la face de Dieu). C`est donc au pied de la croix que nous devons apprendre à juger du péché et à concevoir toute l`horreur qu`il mérite.

Le crucifix nous fait connaitre encore  l`excès de notre misère, excès qu`il nous est impossible d`y remédier par nous-mêmes. Tout le genre humain était perdu, perdu sans ressources pour l`éternité, privé a jamais de la possession du souverain bien, si Jésus-Christ par sa mort ne l`avait racheté, réconcilié avec Dieu, rétabli dans ses droits. Le seul péché originel suffisait pour cela. Mais combiens de péchés actuels, incomparablement plus graves n`y avons-nous pas ajoutés? Dans quel abime de misère ne nous sommes-nous pas volontairement plongés?

Le crucifix nous fait connaitre l`excès encore plus grande de la miséricorde divine. Un abime a attiré un autre abime, l`abime de nos maux  a été absorbé et englouti dans l`abime de la miséricorde.  Le roi David avait bien raison de dire que « les miséricordes de Dieu sont au-dessus de toutes ses œuvres.» (Psaumes 144,9)  Tout ce que Dieu a fait dans l`ordre de la nature, n`est rien en comparaison de ce qu`il a fait dans l`ordre de la grâce.  La bonté du Tout-Puissant  s`est infiniment surpassée elle-même en nous rachetant. Jamais, même après  notre mort, notre entendement n`atteindra la  grandeur incompréhensible de ce bienfait, que la foi nous met sous les yeux dans le crucifix.
Dieu, tout Dieu qu`il est, ne pourrait nous donner une plus grande preuve de son amour. Quelque preuve qu`il nous en donnât, il fallait qu`elle s`accordât avec les droits de sa justice, auxquels il ne pouvait pas renoncer. Il fallait donc que cette justice fut apaisée mais par qui?( a cause du péché d`Adam et Ève en Éden)

Qui pouvait la satisfaire, la venger et, en même temps, épargner les coupables? Invention admirable de l`amour divin! Dieu transporte sur son fils toutes nos iniquités; il les punit en lui; il se venge sur lui et ce fils adorable consent de tout son cœur à être  pour nous la victime de la colère céleste. Quel amour dans le Père! Quel amour dans le fils!
Qui peut y penser sans être ravis d`étonnement et pénétré de reconnaissance.  Si Dieu avait laissé à notre choix de lui proposer quelque remède a nos maux, aurions-nous imaginé celui-là? Et s`il s`était présenté à notre esprit aurions –nous osé le proposer? Un pareil moyen de salut ne pouvait être conçu que dans le cœur d`un Dieu qui nous aime infiniment.
Si notre cœur peut résister a tant d`amour, quelle dureté! quelle ingratitude!  Dieu frappe son propre fils pour nous retirer de l`enfer et nous ouvrir le paradis.  Il décharge sur lui sa colère, et nous fait grâce. Il nous adopte dans ce fils pour ses enfants. Il nous donne droit à son héritage. Il nous prodigue tous les secours surnaturels pour y parvenir. Et que nous demande-t-il? Que nous l`aimions, que nous le servions, que nous lui obéissions. Et nous ne l`aimons pas! Et nous regardons son service comme un joug insupportable! Et nous violons ses commandements! Et tous les crimes, tous les scandales règnent aujourd`hui dans le christianisme avec autant sinon plus de licence que chez les païens! Et l`irréligion est portée a un point que Jésus-Christ  et sa croix sont devenus  un objet de mépris, de raillerie et d`horreur!

L`incompréhensibilité de ce mystère d`amour est  précisément la raison pour laquelle on le rejette.  Conçoit-on un tel excès d`impiété?  Conçoit-on  jusqu`à quel point l``amour méprisé, insulté, outragé, doit être irrité contre tant de chrétiens apostats, secrets ou déclarés?

Quel motif pour les bonnes âmes d`aimer Dieu de tout leur cœur et de le dédommager, par leur dévouement, de tant d`outrages!

De quelles vertus le crucifix ne nous offre-t-il pas le modèle? Amour de Dieu, confiance en Dieu, abandon a ses volontés les plus rigoureuses, patience inaltérable, charité pour le prochain, pardon des injures, amour des ennemis, humilité, pauvreté, renoncement entier à soi-même, vertus portées au comble de la perfection exercées dans les circonstances les plus difficiles et pratiquées avec un courage, une générosité digne d`un homme-Dieu. Plaignons-nous après cela que la vertu nous coute.  Disputons à Dieu des bagatelles. Reprochons-lui qu`il exige trop. Un coup d`œil sur le crucifix nous fera rougir de nos plaintes et de notre lâcheté.

Qu`avons-nous souffert, que souffrirons-nous jamais, pour notre salut qui approche tant soit peu des souffrances  et des humiliations de Jésus-Christ? Il était Dieu dit-on et je ne suis qu`une faible créature. Il était Dieu, cela est vrai, aussi a t`il souffert tout ce que pouvait souffrir la nature humaine unie a la nature divine. Si l`union hypostatique communiquait a l`humanité sainte une force infinie, les souffrances y ont été proportionnées et la justice de Dieu l`a chargée sans aucun ménagement de tout le poids qu`elle pouvait porter. C`est un principe de foi que Dieu ne permet jamais  que nous soyons éprouvé au-delà de nos forces. ( 1 Cor 10,13)
Tout faible que nous sommes, nous pouvons toujours porter les épreuves qu`il nous envoie, parce que la mesure du secours égale et surpasse même toujours la mesure des maux. Ainsi nous avons tort d`alléguer notre faiblesse et de penser que l`exemple du Sauveur ne soit pas fait pour nous.

Enfin, le crucifix est la consommation des voies intérieures. Il nous montre Jésus-Christ, prêtre et victime, Jésus s`immolant lui-même à la gloire de son Père, s`immolant volontairement  et se dévouant a sa justice. Peu d’âmes chéries de Dieu sont appelées a cet état de victime et de ressemblance expresse avec Jésus crucifié. Mais celles qui ont lieu de croire que Dieu les destine a cet honneur doivent regarder comme leur partage les souffrances et les humiliations du Sauveur.
Elles doivent souffrir sa croix. Jésus, soumis et obéissant jusqu`a la mort, doit être leur modèle, leur consolation, leur force.  Si quelquefois leurs peines leurs semble excessives, si le courage leur manque, si elles sont tentées d`accuser Dieu d`une injuste rigueur, qu`elles arrêtent leur regard sur le crucifix. Jésus en croix répondra  a tout et elles sortiront d`auprès de lui avec le désir de souffrir encore davantage.

Que le crucifix soit donc notre Grand Livre; qu`il soit le livre non de nos yeux seulement, mais de notre cœur. Prions Jésus de nous apprendre a y lire et de nous développer tous les secrets, non pour les contempler simplement dans l`oraison, mais pour les pratiquer dans tous le cours de notre vie. Entrons dans la voie intérieure  par un dévouement absolu et sans réserve à  la volonté de Dieu. Livrons-nous au-dedans à son esprit et a sa grâce. Faisons de grand cœur dans l`occasion tous les sacrifices que il exigera de nous.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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