Avignon : Une seconde vie pour le carmel

par Lumen Sam 10 Déc - 18:08

Avignon : Une seconde vie pour le carmel

Des laïcs ont monté la foncière immobilière Oykos pour éviter que des hauts lieux spirituels perdent leur vocation. Ils commencent par chercher 2,4 millions d’euros pour racheter le carmel d’Avignon avant Noël.

Avignon : Une seconde vie pour le carmel Carmel_avignon

Le carmel, fondé à Avignon en 1613, s'est installé dans l'ancien couvent des Franciscains récollets en 1879, et ce, jusqu'en 2022. - OYKOS

« Nous voulons garder la lampe du tabernacle allumée », explique Anne-Claire Long, du pôle communication d’Oykos. Cette lampe, c’est celle du carmel d’Avignon. Ce dernier est en effet sur le point d’être racheté par Oykos, une foncière immobilière qui s’est donnée pour mission de transmettre des biens d’Église en leur trouvant une nouvelle utilité. À l’origine, une poignée de laïcs, proches du Congrès Mission, désireux de donner un nouveau soufﬂe à tous ces hauts lieux spirituels qui, en France, seront vendus dans les années à venir.

En 2022, près de 60 % des religieuses ont plus de 85 ans… D’ici dix ans, près de trois cents lieux d’Église pourraient devenir vacants selon la foncière (soit environ trente par an) : abbayes, monastères, biens immobiliers des diocèses… Des lieux menacés par un abandon pur et simple ou par une vente au plus offrant débouchant sur des projets étrangers à leur vocation originelle.

Le carmel d’Avignon fait donc ﬁgure de test. En se lançant dans Oykos – « maison » en grec –, ces laïcs ne pensaient pas se retrouver aussi vite à pied d’œuvre. Monter une foncière, trouver de gros ﬁnancements, cela ne va jamais de soi. « Mais la Providence en a décidé autrement », commente en souriant Anne-Claire Long. Il ne sufﬁt pas en effet pour eux d’avoir remporté l’appel à projet pour l’acquisition du carmel d’Avignon, il faut maintenant ﬁnancer le projet ! La foncière doit en effet lever une somme de 2,4 millions d’euros auprès de petits et grands investisseurs d’ici… Noël (1). Les délais sont très courts, mais les carmélites ont maintenant besoin de tourner la page. Oykos a donc moins de temps que prévu pour réunir une somme colossale. Mais le jeu en vaut la chandelle.

Une nouvelle « maison de famille »

• La foncière Oykos prévoit dans les 2 000m2 du bâtiment principal une « maison de famille », lieu de vie commune entre les générations avec des étudiants et des seniors.

• Le jardin de 1,2 ha, outre un grand potager et un verger, sera consacré à des espaces d’accueil et de réception.

• Ouverture prévue en 2023 pour le Festival d’Avignon.

Des choix difficiles pour ces communautés

La foncière envisage concrètement de créer une « Maison de famille » avec une quarantaine de logements étudiants, une dizaine de logements seniors et un café solidaire ouvert sur le jardin. En période estivale, le jardin vivra au rythme du célèbre festival de théâtre en y proposant des lieux de représentation et un espace de restauration. La chapelle restera ouverte toute l’année, et la messe y sera régulièrement célébrée. La potentielle nouvelle vie du carmel d’Avignon est tout un symbole. « Deux réalités profondes se croisent, détaille Anne-Claire Long.

La première est le chamboulement économique et sociétal que nous vivons en France et l’envie – chez de nombreux chrétiens – de vivre autrement, plus en conformité avec l’esprit Laudato si. » Elle est d’ailleurs prête, après discernement, à faire le saut à Avignon l’été prochain avec toute sa famille.

« L’autre réalité, c’est le fait que de nombreux lieux religieux sont en train de s’éteindre petit à petit », poursuit celle qui est consultante marketing dans la vie de tous les jours. « Ces communautés sont confrontées à des choix difﬁ ciles : soit laisser s’abîmer des biens faute de les entretenir, soit les vendre souvent au plus offrant.Nous proposons une troisième voie aﬁn que ces lieux restent en vie. Au moment de la signature du compromis, la supérieure du carmel est rentrée en elle-même un long moment, puis a levé les yeux et nous a dit : “Je me permets d’emprunter ces mots à la Petite Thérèse : ‘Seul l’amour compte.’ ”»

« Le Carmel est un lieu idéal »

Sur place, de nombreux chrétiens soutiennent le projet comme Maud Lauriot-Prévost, déléguée épiscopale à la Nouvelle Evangélisation : « Le carmel est un endroit magniﬁque en plein centre-ville. On a prié durant des siècles en ce lieu, c’est l’un des derniers réservoirs de prière de la Cité des papes. On ne peut pas le laisser tomber ! Ce serait merveilleux s’il pouvait accueillir des activités qui ont du sens. » Elle précise que le Vaucluse est l’un des territoires les plus pauvres de France et que l’on attend de l’Église qu’elle se positionne sur des problématiques comme la précarité ou la mission.

Un avis partagé par Maud Bagaria, déléguée diocésaine du Secours catholique du Vaucluse : « Ce projet coïncide avec les valeurs du Secours catholique. Il y a des besoins énormes à Avignon, notamment auprès de la population étudiante. Cela faisait longtemps que nous cherchions un lieu pour ouvrir un café social. Il est évident que le carmel est un lieu idéal pour cela. Il faut investir et sa spiritualité nous porte. » Chiche ?

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Samuel Pruvot
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