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L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.

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L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.  Empty L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.

Message par MichelT Dim 28 Juin 2015 - 16:57

L`esprit de nos aïeux

par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle. ( Extraits)


L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.  Imgro40106256

Table des matières

1 - Le Clergé Séculier - La conversion et pénitence de Foulques de Marseille - Une réplique de l`Évêque de Toulouse.

2 - Les Moines - La dialectique de St-Bernard, abbé de Clairvaux - Un bon avocat et un bon chevalier font de mauvais moines.

3 Les Rois et les Reines - L`avis de Louis VII décide du choix d`un Évêque - Parole profondes du roi St-Louis - Jugement Royal rendu le Vendredi Saint - Conversation du roi St-Louis avec St-Bonaventure.

4 - Les Seigneurs et les Chevaliers - Le bien rendu pour le mal - Thibaud de Champagne chez le lépreux de Sézanne - La façon de donner vaut mieux que ce qu`on donne - Blasphémateur corrigé par un chevalier - L`attrait du péché -  La mauvaise odeur du péché.

5- Les Bourgeois et le Peuple - La plaideur - Tous pécheurs et en dette devant Dieu - Sermon d`un jongleur a des hérétiques - Le breton du Mont St-Michel - Réception faite a un paysan dans un château mystérieux - L`aventure du marchand volé et de l`honnête bourgeois.



1- Le clergé séculier

La conversion et pénitence de Foulques de Marseille

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Foulques de Marseille

Foulques de Marseille, évêque de Toulouse se convertit comme il est dit dans la Somme des Vices et des Vertus de Guillaume Perraud en méditant sur l`éternité des peines de l`enfer. Il fut d`abord jongleur et exerçait cette profession lorsque un jour alors qu`il était couché sur un lit somptueux et d`une mollesse raffinée, il se prit à penser que si on lui donnait pour pénitence de rester continuellement sur un lit pareil, avec défense d`en sortir sous aucun prétexte, il ne pourrait certainement pas le supporter. Combien moins saurai-je supporter  d`être sans cesse sur des brasiers ardents, dans un supplice inimaginable? A force de creuser cette pensée, il se fit moine à Cîteaux, et fut ensuite élu évêque de Toulouse.

Quand il fut devenu évêque, Foulques toutes les fois qu`il entendait chanter quelque cantilène composée par lui à l`époque où il vivait dans le monde, se condamnant ce jour-là à ne prendre que du pain et de l`eau.  Ainsi il arriva que quand il était à la cour du roi de France, qu`un jongleur, au moment du diner, entonna devant lui une de ses chansons d`autrefois.  Aussitôt, le prélat demanda qu`on lui apporta de l`eau et refusa de boire autre chose, il ne prit du pain que pour toute nourriture.


Une réplique de l`évêque de Toulouse

Ce même prélat prêchait un jour au peuple sur les faux prophètes. Il comparait les hérétiques (Albigeois?) aux loups et les chrétiens fidèles aux brebis. A ce passage on vit se lever  de sa place en plein sermon un hérétique qui était venu se joindre à l`auditoire. C`était un homme qui avait torturé sévèrement des catholiques et que le comte de Monfort avait fait aussi brutalisé. « Vous entendez ce que dit votre évêque que nous sommes des loups et que vous êtes des brebis? Eh bien avez-vous déjà vu une brebis mordre un loup de cette façon?», en montrant a tous ses blessures et cicatrices.

L`évêque ne se troubla pas et répondit : « De même que l`ordre de Cîteaux  n`a pas tous ses biens dans l`abbaye-mère, mais possède, de différents côtés, des  granges pleines de brebis, avec des chiens pour défendre celles-ci contre les loups, de même l`Église n`a pas tous ses fidèles à Rome, mais en mille lieux divers; et ici, en particulier, elle a un bercail dont elle a confié la défense a un chien brave et redoutable, le comte de Monfort, qui a mordu de cette façon le loup que vous voyez parce que il dévorait le troupeau de l`Église.» Une autre fois l`Évêque Foulques fut abordé par une femme hérétique. Elle lui demanda l`aumône, en disant que elle était très pauvre.  Le prélat sachant bien  que elle était de la secte et qu`il ne devait pas l`encourager par ses bienfaits fut néanmoins touché de compassion. « Tenez dit-il, en lui donnant ce qu`elle désirait; je ne veux pas secourir l`hérétique, mais voilà pour la pauvresse.»


2- Les Moines


La dialectique de St-Bernard, abbé de Clairvaux


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St-Bernard enseignant dans la salle capitulaire

On raconte que St-Bernard entra un jour dans les écoles de logique de la capitale avec la pensée de  gagner à Dieu quelques étudiants, il fut invité par le maitre après l`exercice de la «disputation» a « déterminer» à son tour. Il n`avait jamais suivi de cours de logique mais néanmoins il s`exécuta de cette façon : «Écoutez, dit-il, comment Dieu argumente contre nous. Il vous a donné une loi; telle est la proposition majeure. Vous l`avez transgressé; c`est la mineure.  Vous encourrez la peine éternelle; voilà ma conclusion. La Loi que je vous ai donné, c`est de ne pas pécher, vous avez violé ce commandement : donc vous êtes punis. » Comme le saint entendait souvent répéter dans les exercices de dialectique : « L`homme est  un animal raisonnable et mortel» ; il en dégagea cette conséquence : « Étant donné cette double condition de créature raisonnable et mortelle, il découle de la une double vérité; c`est que la mort humilie la raison, et que la raison console de la mort.»

St-Bernard avait converti tous ses frères et leur avait fait prendre l`habit religieux. Seul de la famille, son père s`était endurci et demeurait dans le monde. Bernard se rendit dans son village et là il se mit à prêcher devant le vieillard pour attendrir son cœur.  A côté de lui se trouvait un tronc d`arbre très vieux; il en fit un argument probant. Il ordonna aux gens qui étaient déjà là d`apporter des branches de bois sec autour du tronc et d`y mettre le feu. Les branchages furent vite consumés, et le vieil arbre, lançant par ses extrémités une fumée noire brûla longtemps sans prendre feu. Alors le saint se mit à parler des peines éternelles et dit a son père que il était semblable à ce tronc parce que il ne pouvait s`enflammer de l`amour divin, ni pleurer ses péchés, ni soupirer vers Dieu. Donc il devait faire pénitence, s`il ne voulait brûler, lui aussi, durant un temps infini en exhalant une fumée nauséabonde. Ce raisonnement toucha enfin le cœur du père. Il suivi son fils et embrassa lui aussi la vie religieuse.


Un bon avocat et un bon chevalier font de mauvais moines

Il y avait une fois un avocat qui avait la réputation de gagner presque toutes ses causes.  Cet avocat fini par renoncer au monde pour revêtir l`habit religieux, et, quand il eut fait sa profession, ses supérieurs s`empressèrent de l`employer à soutenir leurs procès. Mais par un singulier revirement des choses, il les perdait régulièrement.  Étonné d`un tel résultat, ses frères lui adressèrent des reproches en plein chapitre.  Alors il leur dit : « Dans le monde, j`avais gain de cause parce que, si la vérité n`était pas pour moi, je ne craignais pas de mentir ou d`inventer; mais à présent sous cet habit, je ne puis plus dissimuler, ni tromper, car je ne suis pas entré dans cet ordre pour perdre mon âme.» Après cette explication ils le laissèrent tranquille.

Dans un autre monastère c`était un preux chevalier qui était venu se consacrer à Dieu. Il était chargé de se rendre aux foires afin de vendre des ânes. Les acheteurs lui demandaient si ceux qu`il offrait étaient de bonnes bêtes. Il répondait « Croyez-vous que notre maison soit tombée dans une telle détresse qu`elle soit obligée de se défaire de ses meilleurs animaux?»  Un frère qui l`accompagnait lui fit quelques observations. Il répondit : « Moi qui ai abandonné pour faire mon salut des troupeaux d`ânes et de moutons vous voudriez que je me damne pour deux ou trois des vôtres?  Jamais de la vie!»


3- Les Rois et les Reines


L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.  Saint-louis-roi-de-france
St-Louis- Roi de France

L`avis de Louis VII décide du choix d`un évêque

L`évêques de Paris étant mort, les chanoines qui avaient à faire l`élection de son successeur, voulurent avant de se décider, consulter le Roi Louis. « Quels sont les meilleurs clercs de votre Église?» leur dit-il. Ils en désignèrent deux qui éclipsaient tous les autres  par leur science et leur renommée : l`un s`appelait maître Maurice et l`autre maître Pierre Le Mangeur. Le Roi demanda lequel des deux était le plus zélé pour le salut des âmes, le plus occupé de la prédication et des intérêts spirituels. Ils répondirent que Maurice était le plus ardent à prêcher la parole de Dieu, plus empressé de gagner des âmes, et Pierre plus versé dans la connaissance des Écritures. « Eh bien dit le Monarque, mettez le premier a la tête du diocèse, et chargez le second de la direction des écoles.» Ainsi firent-ils et tout le monde s`en trouva bien.


Paroles profondes de St-Louis


Le Roi Louis de France dit un jour une excellente parole, laquelle fut répétée par un religieux qui se trouvait là et qui l`entendit de sa bouche. Un matin alors que ce prince était encore tout jeune, une quantité de pauvres était rassemblée dans la cour de son palais et attendait l`aumône. Profitant de l`heure où tout le monde dormait encore, il sortit de sa chambre seul avec un serviteur chargé d`une grosse somme en deniers, et sous le costume d`un écuyer; puis il se mit à distribuer le tout de sa propre main, donnant plus largement a ceux qui lui semblait les plus misérables. Cela fait il se retira vers ses appartements lorsqu`un religieux qui avait tout vu par l`embrasure d`une fenêtre se porta a sa rencontre et dit :  «Seigneur, j`ai parfaitement vu vos méfaits.» «Mon très cher frère, répondit le prince, tout confus, ces gens-là sont mes soudoyers; ils combattent pour moi contre mes adversaires et maintiennent le Royaume en paix. Je ne leur ai pas encore payé toute la solde qui leur est due.»


Jugement royal rendu le Vendredi saint


Le roi St-Louis avait pris l`habitude de lire le Psautier tout entier tous les Vendredi Saint depuis le commencement jusqu`à la fin. Or une année, certain personnage appartenant à une famille noble, se trouvait détenu au Châtelet, en raison de nombreux forfaits qu`il avait commis. Le Vendredi Saint, le roi se retira en sa chapelle pour s`absorber en ce pieux exercice. Mais les parents et amis du prisonnier vinrent le relancer jusque dans le sanctuaire, conduits par son propre fils et par les princes, ses frères.  En les apercevant, il posa le doigt sur le verset ou il était rendu afin de recommencer à cet endroit sa lecture.  Un des seigneurs qui avait reçu mission de parler au nom des autres lui dit : « Très illustre sire, c`est aujourd`hui  un jour de grâce et de miséricorde. A pareil jour notre Sauveur nous a rachetés, et du haut de la Croix a pardonné au voleur; et il est mort en priant pour ses bourreaux. Or, nous tous ici présents, nous nous jetons a vos genoux,  très illustre sire, et vous supplions humblement de suivre l`exemple de Jésus-Christ, en ayant pitié de ce noble captif qui gémit dans les cachots du Châtelet.

Le pieux roi les écouta avec bonté; il s`apprêtait à faire éclater sa clémence, lorsque levant le doigt qu`il avait appuyé sur le Psautier, il lut dessous un verset ou il était écrit : « Heureux ceux qui gardent la justice et qui rendent leur jugement tous les jours de la vie.» Il réfléchit un moment et dit aux suppliants de faire venir le prévôt de Paris, et il se remit à lire. Le magistrat fut bientôt en présence du roi. Louis lui dit d`énumérer les crimes commis par le prisonnier. Le prévôt, n`osant déguiser la vérité, s`exécuta et raconta une liste de crimes à faire frémir. Le roi, après l`avoir entendu, lui commanda de laisser libre cours a la justice et de mener le criminel a la potence le jour même sans avoir égard à la solennité que l`on célébrait.


Conversation du roi St-Louis avec St-Bonaventure


Le roi St-Louis posa au frère Bonaventure la question suivante : Qu`est-ce que l`homme devrait préférer, s`il avait le choix, ou de ne pas exister, ou d`exister pour être condamner aux supplices éternels?

Bonaventure répondit : « Monseigneur, cette question suppose deux points; d`une part l`offense perpétuelle de Dieu, sans laquelle le juge suprême d`imposerait pas une peine éternelle, et d`autre part, une souffrance sans fin.  Comme personne ne saurait accepter de rester en état de perpétuelle hostilité avec Dieu, je pense que il vaudrait mieux ne pas exister.»

Alors le roi Louis répondit : « Je m`en tient à la décision de mon frère Bonaventure et je vous atteste que j`aimerais mieux mille fois être réduit à néant que de vivre éternellement en ce monde, et même d`y jouir de la toute-puissance royale en offensant mon Créateur.


4- Les Seigneurs et les Chevaliers


Le bien rendu pour le mal

Il y eu en Normandie un duc qui s`appelait Richard. C`était un croyant et un homme remplit de piété, qui dans tous les lieux et villages de son domaine où se trouvait des monastères, ne manquait pas de venir assister aux matines. Une fois il arriva dans ses terres qui possédait une abbaye d`hommes, et le matin, de bonne heure,  n`entendant pas sonner l`office, il crut que le sacristain s`était mis en retard; il se leva donc, se couvrit d`un vêtement ordinaire et vint cogner a la porte de l`église. Le sacristain ne trouvant pas le procédé de son gout et ne sachant qui c`était, sortit rapidement et se mis à rouer de coups celui qui l`avait dérangé.

Le pauvre duc eut la patience de tout souffrir et de ne rien dire. Mais le lendemain, il se rendit solennellement au chapitre et déposa une plainte contre son agresseur affirmant qu`il l`avait gravement meurtri et déclarant qu`il ne se tiendrait pour satisfait  si le prieur de lui amener le coupable poing et pieds liés afin de pouvoir devant ses chevaliers lui infliger une peine telle que toute la France serait dans l`étonnement.  Le malheureux sacristain lui fut livré dans cet état. Alors il le délia, proclama bien haut sa vigilance et le proclama le modèle des moines, parce que malgré sa colère, il n`avait pas rompu le silence imposé par la règle. Afin de le récompenser il lui donna une vigne qui donnait de l`excellent vin.


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Thibaud de Champagne chez le lépreux de Sézanne

On raconte de Thibaud, comte de Champagne, de vénérable mémoire, qu`il portait d`ordinaire avec lui des chaussures et du cirage, pour les donner de sa main aux pauvre qu`il rencontrait. Il trouvait à cela un double avantage : d`une part son cœur était mieux disposé a la componction et a l`humilité; de l`autre, les indigents priaient pour lui avec plus d`affection en voyant un si haut personnage s`abaisser  jusqu`à leur rendre lui-même un tel service.

Ce noble seigneur, qui bien que laïque, était un véritable homme de Dieu, avait l`habitude de visiter, entre autres, un lépreux logé en-dehors de la ville de Sézanne. Il arriva que ce malheureux vient à mourir. Quelque temps après, le comte passant dans le pays s`arrête, suivant sa coutume, a la cabane du lépreux, y entra, et demanda comment il se trouvait.
« Bien, par la grâce de Dieu, répondit cet homme. Je n`ai même jamais été mieux!» Les chevaliers et les serviteurs du comte attendaient dehors que l`entretien soit terminé lorsque plusieurs habitants de Sézanne vinrent au-devant de leur seigneur mais ne le voyant pas ils demandaient ce qu`il était devenu.

Ils répondirent, « Il est par là dans la cabane avec le lépreux.»

«Le lépreux, répondirent-ils, il y a bien un mois que nous l`avons enterré, il est a présent dans le cimetière de la paroisse.»

Au même instant, le comte sortait de la cabane.

« Monseigneur, lui dirent-ils, pourquoi avoir pris une peine inutile? Ce lépreux que vous alliez voir est mort et enterré.»

Saisi d`étonnement, Thibaud rentra dans la demeure du pauvre homme; mais il n`y trouva plus personne et sentit seulement que la chambre était pleine d`une odeur embaumée. Dieu avait voulu lui montrer combien ses œuvres de charité lui étaient agréables.


La façon de donner vaut mieux que ce qu`on donne

Le comte de Beaumont possédait une belle foret. Certain religieux vain un jour lui demander la permission d`y prendre du bois, pour faire des sièges dont on avait besoin dans son Église. C`était disait-il pour l`amour de Dieu.

«Allez, allez s`empressa de répondre un des chevaliers du comte. Monseigneur réfléchira a votre requête.» Mais le comte répondit : «Dieu m`a donné tout cela sans prendre de délai. Le frère me demande pour l`amour de Dieu; je ne veux pas réfléchir ni tenir conseil; je veux qu`il prenne dans ma forêt tout ce qui est nécessaire pour le service de mon Seigneur et Maître.»


Blasphémateur corrigé par un chevalier

Un chevalier passait un jour par un pont de Paris lorsqu`il entendit un riche bourgeois blasphémer. Saisi de colère, il s`approcha de lui et lui donna un violent soufflet. Trainé devant le roi pour cette agression, il s`attendait à l`expier par un dur châtiment car il avait enfreint les privilèges de la cité et frappé un bourgeois du roi.
Devant le roi il dit hardiment «Monseigneur vous êtes mon souverain terrestre et je suis votre homme-lige. Si j`entendais quelqu`un maudire votre nom et vous accabler d`outrage je ne pourrais le supporter et je voudrais venger cette offense. Or cet homme que j`ai frappé vomissait tant d`injures contre mon souverain céleste et le blasphémait de manière si odieuse que je n`étais plus maître de moi et j`ai défendu son honneur.

Le roi, en l`entendant plaider ainsi, admit son excuse, loua son action et le renvoya en liberté.


L`attrait du péché


Un chevalier qui avait commis des mauvaises actions vint trouver son Évêque pour obtenir l`absolution. Mais il ne voulait faire pour sa pénitence ni prières, ni jeûne, ni pèlerinage car tout cela lui répugnait.

L`Évêque lui dit alors : « Quelle est l`œuvre pieuse que vous faite le plus volontiers?»

C`est, répondit-il de chômer les fêtes.

Bien répondit l`Évêque, alors  vous observerez strictement les dimanches et  les fêtes des St-Apôtres, et vous vous abstiendrez en ces jours de toute œuvre servile; cela vous servira de pénitence.

Le chevalier accepta. Mais le dimanche qui suivit, il aperçut dans un de ses champs un laboureur couché par terre se reposant des travaux de la semaine. Agacé de la voir se livrer à l`oisiveté, il mit lui-même la main à la charrue et entreprit de labourer, ce qu`il n`avait jamais fait de sa vie.

Il fut donc obliger de retourner voir l`Évêque et de lui avouer qu`il n`avait pas observé sa pénitence.

L`Évêque lui demanda : « Quel est le met que vous avez le plus en horreur?»

Ce sont, dit-il, les poireaux crus.

Eh bien! dit l`Évêque, vous vous abstiendrez de poireaux crus.

En s`en retournant, il rencontra des femmes qui lavaient des poireaux et qui en mangeaient.  La tentation le prit de les imiter; il s`approcha d`elles,   leur arracha quelque uns de ces légumes et les porta a sa bouche.

Reconnaissant alors sa faiblesse et sa misère, il retourna a l`Évêque et se mit a sa disposition pour faire la pénitence qu`il lui enjoindrait.


La mauvaise odeur du péché

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Un jour, l`ange du Seigneur vint a un ermite et lui dit : « Suis-moi et allons ensevelir un voyageur qui est mort.»
L`ermite le suivit mais a la mauvaise odeur du cadavre il se ferma la bouche et les narines. L`ange le remarquant, lui en demanda la raison.

« Ne sentez-vous pas, dit l`ermite, la mauvaise odeur de ce corps?»

« Je ne sens rien, dit l`ange.»

Au même moment passa un jeune noble, il était sur un beau cheval , il avait un habit magnifique et un faucon sur le poing. L`ange se ferma la bouche et les narines. L`ermite le remarqua et lui demanda la raison.

« Ah dit l`ange, je ne puis supporter la mauvaise odeur qui vient de ce jeune noble tant son âme souillée sent mauvais devant le Seigneur!»


5- Les bourgeois et le peuple

Le plaideur

J`ai entendu parler, disait Jacques de Vitry, d`un avocat malhonnête, digne de la réprobation publique, que l`on avait surnommé l`avant-plaideur, parce que avant la moindre action, il voulait discuter le pour et le contre.

Étant tombé gravement malade, il dut recevoir les sacrements. Mais comme on les lui apportait, il tomba dans sa mauvaise habitude et ne put s`empêcher de crier : « je veux d`abord que l`on juge si le droit exige que je les reçoive ou non.»

Les assistants lui dire qu` il était parfaitement juste que vous les receviez, voilà le jugement que nous rendons. « Oui, répliqua-t-il mais vous n`êtes pas mes pairs. Vous n`avez pas qualité pour juger ma cause. J`en appelle!

Et pendant que la discussion continuait, il rendit son âme au diable.

Un autre individu  de son espèce sur le point d`expirer demanda à la mort ce qu`on nomme en terme judiciaire un sursis. Mais il en avait trop demandé en ses procès et cette fois aucun délai ne lui fut accordé.


Tous pécheurs et en dette devant Dieu


Un certain Comte de Poitiers voulut expérimenter par lui-même quel était le meilleur métier que pouvait avoir un homme. Il revêtit des déguisements et s`engagea dans différents métiers. Il étudia les mœurs et les habitudes, compara les avantages et les inconvénients de chaque position sociale. Mais il finit par revenir à sa condition première.

Il avoua par contre que le métier qui lui semblait le plus intéressant était celui des marchands qui courent les foires, car ils entraient comme ils voulaient dans les tavernes, y trouvaient des tables toujours servies et n`avaient qu`à choisir parmi les mets les plus délicats. Il n`y avait dans ce métier que un seul désagrément et c`est qu`il fallait faire avant de sortir un compte exact avec l`hôtelier et lui payer jusqu`à la moindre chose. Ce moment la gâtait tout le reste.

N`en sera-t-il pas de même quand nous quitteront ce monde et que nous devrons rendre nos compte à Dieu de tous nos péchés et ensuite de payer toutes nos dettes….



Sermon d`un jongleur a des hérétiques


Certains hérétiques albigeois se vantaient devant leurs partisans des mortifications qu`ils s`infligeaient.  Il se trouvait là un jongleur très plaisant qui leur tint ce discours. « Je vais vous prouver que mon cheval fait mieux que vous. Vous ne mangez pas de viande, mon cheval non plus. Vous ne buvez pas de vin, lui non plus. Vous êtes mal couchés; il l`est encore moins bien. Mais tout cela doit lui profiter plus qu`à vous, et ses privations et souffrances ont plus de mérite que les vôtres, car vous ne croyez pas et vous discréditez les articles de la foi.

Or, comme sans la foi, rien ne plait à Dieu, tout ce que vous faites ne peut que lui déplaire. Mon cheval au contraire, s`il ne croit pas, il ne fait pas la guerre a aucune croyance, ne contredit aucune vérité. Ainsi par rapport à la foi et aux œuvres, mon cheval a l`avantage sur vous.


Le breton au Mont St-Michel


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Ceux qui s`abstiennent du mal par crainte de l`adversité sont semblable à ces pirates qui au moment de la tempête, font des vœux de toutes sortes de changer de vie et que aussitôt le calme revenu sur la mer, retournent  a leurs pillages et leurs crimes.

Un paysan breton conduisait sa vache et son veau au Mont St-Michel pour les vendre au marché. Se voyant surpris  par la marée montante, il fit un vœu a St-Michel et promit de lui donner son veau, si par sa puissante protection, il échappait au péril.

La mer parut se retirer. Alors notre homme de dire a l`Archange qu`il serait bien fou s`il pensait qu`il allait lui donner son veau.  Mais soudain voilà la mer qui revient et lui touche les pieds. Aussitôt le paysan se met a crier : « St-Michel, St-Michel, tu veux tout, tu auras tout, la vache et le veau!».

La vague recule de nouveau  et si loin que il se croit à l`abri de son atteinte. Alors il s`écrit bravement : « St-Michel ! St-Michel! Ni la vache, ni le veau!



Réception faite à un paysan dans un château mystérieux

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Un habitant de la campagne nommé Jean et vivant dans le diocèse de Cambrai, vivait de la pénitence, de la charité et surtout de l`hospitalité. Cet homme voulut une fois se procurer une statue de la St-Vierge, afin de la recevoir, a son tour, chez lui. Il avait entendu parler d`un atelier ou en faisait de fort belles; mais cet atelier était situé dans un village lointain appelé Fontaines; il fallait deux jours de marche pour y arriver.

L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.  Statue

Cependant son désir était si grand que profitant d`un instant de liberté, il entreprit ce voyage afin d`aller et de revenir d`une seule traite. Parvenu à Fontaines, il choisit la plus belle statue qu`il put trouver, l`enveloppa dans une étoffe de prix, la chargea sur ses épaules et se mit en route pour le retour, pensant tout au long du chemin au projet d`un oratoire secret, ou il installerait sa Vierge d`une façon digne d`elle et irait tous les jours faire sa prière. Mais la fatigue et le poids de son précieux fardeau eurent bientôt raison de son impatience : force lui fut en traversant un village, de chercher une hôtellerie pour prendre un peu de repos. Il n`en trouva pas et commençait a se désoler lorsque un inconnu vêtu semblable à un moine l`aborda et lui dit : «venez avec moi je vous procurerai un gite bon et honorable. C`est à deux pas d`ici.

Qui êtes-vous donc?  demanda le voyageur.

Je suis le frère Pierre répondit simplement l`inconnu.

Notre homme se laisse conduire à l`extérieur du village. Il trouve bientôt devant lui une forêt profonde et dans cette foret, un château magnifique, et dans ce château, un seigneur plein de bonté, qui l`accueille avec joie et commande au frère Pierre de lui faire servir tout ce qu`il y avait de meilleur. On allume un bon feu, on met la table et sur cette table un belle nappe blanche. Puis on apporte du pain blanc et un breuvage d`une saveur incomparable. Le pauvre villageois ne pouvait se rendre compte de quelle matière la nappe était faite; il n`osait manger à son appétit, tant le gout de chaque met était délicat. Puis il craignait qu`il n`y entra de la viande en ce jour maigre. Son hôte le rassura. « Vous pouvez manger en toute sécurité, il n`y a pas de viande.»

Au dessert, on lui servit des poires d`un gout délicieux. Le repas fini la châtelaine vint s`entretenir avec lui et lui demanda ce que c`était que cet objet si bien enveloppé qu`il portait, en arrivant sur ses épaules. Il répondit que c`était une statue de la Vierge.  Elle voulut la voir, en loua fort le travail, la recouvrit d`un voile plus précieux encore, et recommanda bien à Jean de s`agenouiller souvent devant  cette belle image en faisant dévotement ses prières car la mère de Dieu le récompenserait largement.

La noble dame s`était assise avec deux suivantes qu`elle avait amenées, à côté du maître du logis, celui-ci donna l`ordre au frère Pierre de conduire le voyageur dans sa chambre. On lui fit voir un appartement des plus riches, un lit somptueux et comme il n`osait pas s`y coucher le frère Pierre lui dit : « N`ayez crainte ce lit est pour vous.» Il s`endormit et goûta une nuit de sommeil le plus doux. Il était déjà tard quand le frère vint le réveiller et il fut honteux d`avoir dormi si longtemps.  Alors il voulut prendre congé de son hôte mystérieux et lui adressa tous ses remerciements.

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St-Pierre Apôtre

« Je ne veux pas, dis ce généreux seigneur, que mon hôte soit exposé à souffrir de la faim en route; donnez-lui du pain et qu`il mange.» Le pain était si merveilleux qu` il suffisait d`y goûter pour être réconforté. Enfin, il dit adieu aux maîtres du logis, et Pierre le remis dans son chemin. Il voulut cependant absolument savoir le nom des gens qui l`avaient si bien traité. Cédant à ses instances, le frère finit par les lui révéler.

« Vote hôte, lui dit-il, est le Seigneur Jésus-Christ lui-même, qui a pris en pitié votre fatigue,  et la très sainte Vierge Marie, sa mère, qui a voulu vous rendre l`hospitalité que vous lui préparez sous votre toit. Ils vous préparent une récompense beaucoup plus belle si vous persévérez. Quant à moi, je suis le prince des Apôtres, et je vous conseille, en cette qualité d`aller trouver le pénitencier de votre évêque et de vous confesser et conduire selon ses avis.»

L`esprit de nos aieux par Lecoy de la Marche – Tiré des manuscrits du 13 eme siècle.  Corazones_jesus_maria
Notre Seigneur Jésus-Christ et Notre-Dame

A peine avait-il finit que tout disparu, la foret, le château et les habitants. Jean se retrouva subitement aux portes de Cambrai, près de son village, sa route était faite bien que il s`était arrêté a quatorze milles de là.


L`aventure du marchand volé et de l`honnête bourgeois


Un certain marchand revenait de la foire, ou il avait mené quantité de marchandises;  et il avait tout vendu en fort peu de temps. Tout son gain fut troquer contre une masse d`or moulu et ayant ainsi réuni son avoir, il se mit en route.

Il cheminait depuis des jours quand il se vint à passer devant  une grande ville où il aperçut une église.  Le prud homme qui avait l`habitude de faire oraison devant l`image de Dieu entra,  se mit en prière, et posa son sac à côté de lui. Mais quand il se releva, il pensa a autre chose et il oublia son précieux fardeau, s`en alla et n`y pensa plus.  Il y avait dans la même ville, un bourgeois, qui lui aussi, fréquentait assidûment l`église et venait très souvent s`agenouiller devant la mère de Notre Seigneur. Il y vint donc ce jour-là, et ses yeux tombèrent sur une bourse bien garnie, bien fermée avec une forte serrure. Il se demanda d`où pouvait venir un tel  trésor.

«Mon Dieu, dit-il, que faire? Si je publie par toute la ville que j`ai trouvé une grosse somme, tel viendra la réclamer alors que elle ne lui appartient pas. »
Le bourgeois décida qu`il la garderait par devers de lui, jusqu`à ce qu`il eut des  vrais nouvelles du propriétaire. Il revint en sa chambre, serra la bourse dans un écrin et inscrit sur la porte de sa maison cet avis : « Si quelqu’un a perdu quelque chose, qu`il vienne me trouver.»

Le marchand avait continué sa route. Il était déjà loin quand il découvre que il n`a plus son trésor. Il est désespéré « Je suis trahi, je suis mort, j`ai tout perdu!» Il revient jusqu`à l`église croyant trouver sa bourse. Plus de bourse!  Il accoste le prêtre et demande des nouvelles : mais le prêtre ne sait pas.  Il sort tout pensif et arrive devant la porte ou s`étalait l`inscription. Plein d`espoir il entre dans la maison du bourgeois.

« De par Dieu sire, êtes-vous maître de céans?

Oui dit l`autre tant qu`il plaira à Dieu. Que voulez-vous?

Sire, dites-moi qui a écrit les mots sur votre porte?

Bel ami, dit le bourgeois feignant de ne rien savoir, il loge ici des clercs et plusieurs gens, ils inscrivent la leurs vers et leurs devises.  Que vous faut-il mon beau sire, avez-vous perdu quelque chose?

Perdu, s`écrit le marchand, oui un si gros trésor que je n`en sais même pas la valeur.

Comment mon pauvre ami, et qu`as-tu donc perdu?

Sire, j`ai perdu une bourse toute pleine d`or, scellée de tel sceau et fermée a tel loquet.

Le bourgeois reconnu alors que le pauvre homme disait vrai. Il l`emmena donc à sa chambre, lui montra son avoir intact et le pria de le prendre. Le marchand frappé de tant de sagesse et de bonté s`arrêta.

Beau sire dit-il, je ne suis pas digne de posséder un tel trésor. Vous en êtes plus digne que moi. Il sera mieux placé dans vos mains que dans les miennes, gardez-le je vous prie, il lui dit Adieu.

Le marchand quitta à toutes jambes.

Le bourgeois s`élance à sa poursuite en criant au voleur! Arrêtez ce voleur!
Des voisins arrêtent le marchand et demandent au bourgeois ce qu`il a fait.

Seigneurs, il veut me ravir ma loyauté et ma probité que j`ai gardées intact jusqu`à ce jour. Il leur raconta l`affaire en détail.

Les voisins ayant compris l`histoire donnèrent au marchand son trésor complet et le renvoyèrent vers sa ville.  

Fin

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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