LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE - Le R. Père Laurent Mermillod - 1866
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LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE - Le R. Père Laurent Mermillod - 1866
LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE
MÈRE TRÈS-GLORIEUSE DE MARIE IMMACULÉE
Le R. Père Laurent Mermillod
De la Compagnie de Jésus. 1866
( Quelques Extraits)
St-Anne et la St-Vierge Marie enfant
St-Joachim et la St-Vierge Marie enfant
Légende de sainte Anne et de saint Joachim.
Sainte Anne et saint Joachim, parents de la très-sainte Vierge Marie, Mère de Dieu, étaient tous deux de race royale et sacerdotale.
Joachim, ou Eli, naquit à Nazareth en Galilée. Il eut pour père Mathat , de la descendance du roi David par son fils Nathan. Estha, sa mère, descendait aussi de David, par le roi Salomon. Anne était de Bethléem et du sang de David, par son père Stolan et sa mère Emérentienne.
Le Roi David - roi d`Israël vers 950 Av J.C. et auteur des Psaumes.
Le Prophète Samuel envoyé par Dieu à Bethléem chez Jessé fait l`onction du dernier de ses enfants le futur roi David. (1 Rois 16)
Tous deux vécurent dans la plus parfaite observance de la Loi divine, chéris de Dieu, dont ils cherchaient le bon plaisir en toutes choses, et bénis des hommes à cause de leur tendre charité. Ils faisaient trois parts de leurs revenus: la première était destinée au Temple et consacrée à relever la pompe de ses fêtes, la seconde était appliquée au soulagement des pauvres et des malades; ils vivaient modestement de la troisième.
Dieu, pour épurer leur vertu et les élever à la plus haute sainteté, leur envoya l'épreuve la plus pénible et la plus humiliante en ce temps-là. Il frappa leur union de stérilité. Chez les Juifs, et surtout dans la tribu de David, la privation de descendance était regardée comme un opprobre, un châtiment du Ciel, une sorte de malédiction; les époux stériles ne pouvaient plus se compter parmi les aïeux du Fils de la Promesse, et cette exclusion atteignait à la fois, de la manière la plus sensible, leurs espérances, leur piété, leur considération dans la tribu. Ils étaient désormais condamnés à vivre dans l'isolement et une inconsolable tristesse.
Anne et Joachim se résignèrent à cette douloureuse épreuve, sans toutefois perdre l'espoir d'en obtenir la cessation. Ils multiplièrent pendant de longues années leurs oraisons, leurs jeûnes et leurs aumônes, pleins de confiance d'être tôt ou tard exaucés. Ces prières et ces larmes n'avaient cependant pas pour but d'obtenir une consolation purement humaine, une satisfaction d'amour propre; toutes les fois qu'ils se rendaient au Temple, ils promettaient de consacrer au Seigneur l'enfant qu'il daignerait leur accorder, et de lui en faire un généreux sacrifice.
Le Temple de Jérusalem
Ils étaient déjà presque parvenus aux glaces de l'âge, lorsqu'un jour de novembre, à la fête des Encénies, ils virent leur sacrifice encore plus durement rebuté des prêtres, sous le prétexte que Dieu n'avait pas béni leur union. Ils se retirèrent couverts de confusion, Joachim sur la montagne, au milieu des bergers commis à la garde de ses troupeaux, Anne dans ses jardins, pour répandre, chacun de son côté, leur âme devant le Seigneur, et se consoler de leur affliction. Après quelques jours d'une retraite durant laquelle ils s'élevèrent au plus sublime abandon à la volonté céleste, le Tout-Puissant, touché de leurs pieuses larmes, leur députa un consolateur.
Un Ange vint leur annoncer en son nom la cessation prochaine de l'opprobre qui pesait sur eux. Le divin messager se montra d'abord à Joachim; il lui promit qu'Anne ne tarderait pas à concevoir une vierge incomparable, future mère du Messie promis depuis tant de siècles. De son côté, sa sainte épouse eut aussi connaissance de la même révélation, et tous deux, remplis intérieurement de confiance, se communiquèrent cette heureuse nouvelle avec un joyeux empressement, et se hâtèrent, par de ferventes actions de grâces, de témoigner à Dieu leur reconnaissance d'un si grand bienfait.
A quelques jours de là, le 8 décembre, la bienheureuse Anne conçut une Fille exempte de la tache originelle, Marie Immaculée, qui, neuf mois après, au milieu de la joie de ses parents et de tous les habitants des alentours, naquit à Nazareth, le 8 septembre, dans la maison de saint Joachim. Sur un ordre du Ciel, on lui donna le nom de Marie, dont la signification avait rapport à ses destinées futures.
Quatre-vingts jours après, Anne avec sa Fille bien aimée se rendit au Temple pour y accomplir la purification légale et y présenter les offrandes d'usage. Quand Marie eut atteint sa troisième année, ses parents, fidèles à leur vœu, la conduisirent de nouveau au Temple, et, malgré les douleurs d'une cruelle séparation, offrirent généreusement au Seigneur cette Enfant, joie de leur vieillesse, récompense de leur sainteté. Ils ne vécurent vraisemblablement pas longtemps après ce dernier sacrifice. Ils moururent consolés et comblés de mérites, heureux d'annoncer à leurs aïeux la prochaine arrivée du Messie.
Voilà, suivant les traditions les plus accréditées, les saints Pères et le commun des Docteurs, à peu près tout ce que nous savons de certain sur ces illustres personnages, comme on peut s'en assurer en parcourant les continuateurs de Bollandus, Trombelli et d'autres sages critiques. On a fait sur leur vie, nous le savons, des récits bien plus
circonstanciés; mais pour rester fidèles à notre dessein, nous avons rejeté des détails inutiles à la piété.
La légende de sainte Anne et de saint Joachim est courte, il est vrai, mais elle ne laisse pas de nous donner la plus haute idée de leur sainteté, et, comme nous le verrons ci-après, elle est bien propre à nous remplir d'une confiance illimitée en leur puissante intercession.
Pourquoi les Évangiles gardent le silence sur sainte Anne.
On se demande parfois avec étonnement pourquoi les divines Écritures nous parlent si peu des personnages dont les glorieuses destinées se lient à l'œuvre de notre rédemption; pourquoi, le plus souvent, elles sont muettes sur le détail de leurs vertus et les vicissitudes de leur existence. Une page contiendrait tout ce qui se rapporte directement à Marie, tandis que saint Jean-Baptiste nous est révélé avant sa conception, on nous le montre tressaillant dans le sein de sa mère, on nous le montre à sa naissance, dans la solitude, dans sa prédication, sur les bords du Jourdain, dans sa captivité, à sa mort.
Cathédrale Santa-Anna de San Salvador - Amérique centrale
Notre-Seigneur lui-même fait de son Précurseur le plus magnifique éloge. D'un autre côté, il est à peine fait mention de saint Joseph, et le silence enveloppe la vie, les vertus, et jusqu'aux noms bénis de sainte Anne et de son pieux époux, saint Joachim. A première vue, cette conduite de l'Esprit-Saint paraît étrange ; mais la réflexion nous fait bientôt entrevoir en elle une sagesse profonde, comme dans toutes les œuvres divines. Ce silence mystérieux vaut une louange, et plus qu'une louange, puisqu'il fait à ces saints Patriarches une part analogue à celle de Marie et de Joseph, et qu'il nous les montre indirectement dans les reflets de la sainte humanité de Jésus. Tous ces illustres personnages ne sont-ils pas groupés dans un même tableau où Notre- Seigneur occupe le premier plan? Toutes les gloires de l'Homme-Dieu ne rejaillissent-elles pas sur leurs têtes vénérables? En effet, l'âme fidèle ne peut, dans ses élévations, les séparer de Jésus ; elle ne peut penser à lui sans que sa pensée se reporte en quelque manière sur eux; l'aimer sans aimer aussi et remercier ceux qui furent sa famille, la race et le sang dont il descendit.
Elle ne peut, en un mot, mettre de côté ceux dont l'existence fut coordonnée à la sienne, ceux dont les vertus, modelées par avance sur ses leçons, nous valurent un tel Rédempteur, un tel Jésus. Cette position exceptionnelle, ces privilèges, prix de leur sainteté, les placent si haut dans l'estime, la vénération et l'amour du Ciel et de la terre, que la parole humaine devenait impuissante à les louer dignement. Voilà peut-être une raison du silence des saintes Écritures : l'Esprit-Saint aurait préféré laisser à notre piété filiale le doux soin de rechercher ce qu'ils furent devant Dieu. Oh ! non, sainte Anne et saint Joachim ne sont pas, dans le tableau évangélique, entièrement relégués dans l'ombre, puisqu'ils partagent les gloires du Christ, puisque leur justice a attiré les regards du Père des miséricordes, puisque le Lis immaculé germe dans leur cœur et sort de leur sang comme d'une source très-pure.
Avoir mérité une telle faveur, n'est-ce pas, pour sainte Anne en particulier avoir de beaucoup dépassé les limites d'une sainteté ordinaire? « Qui trouvera la femme forte? Son prix est par-delà toute limite » ( Proverbe 31).
Un pieux et savant auteur donne une autre interprétation de ce silence des Évangiles : elle n'est pas moins à l'honneur de sainte Anne. « II ne convenait pas, dit-il, de rendre la Vierge Marie recommandable par les vertus de ses parents, de même qu'on ne saurait faire valoir Notre-Seigneur par sa Mère ; mais au contraire, de la sainteté infinie de Jésus-Christ, on a dû conclure à celle de Marie, et de la sainteté de Marie à celle de ses parents, sainte Anne et saint Joachim. Or, comme par là même les fidèles devaient leur supposer les vertus et les mérites les plus rares, l'Esprit-Saint n'a pas permis aux Évangélistes de raconter leurs vie. »
Suivant le bienheureux Thomas de Villeneuve, leur gloire et leur sainteté furent toutes cachées en Dieu : comme Marie, leur très-sainte Fille, et Joseph, son chaste époux, ils surent, avec une profonde humilité, en dérober l'éclat aux hommes. Il était donc à peu près inutile d'exposer aux regards de la foule le tableau de vertus au-dessus de sa portée, de merveilles accessibles seulement aux méditations des âmes intérieures.
D'ailleurs, si les Juifs incrédules ont été révoltés des anéantissements du Verbe incarné et scandalisés de ses enseignements; si, malgré tant de miracles, ils ont méconnu sa mission divine, quel accueil auraient-ils fait à des récits empreints de la même abnégation, du même esprit de sacrifice? Notre- Seigneur a bravé les mépris de ses contemporains, mais il n'a pas voulu laisser blasphémer sa Mère, ni les vénérables parents de sa Mère, en livrant leur existence à une publicité inopportune.
Il a donc fait tirer un voile discret sur l'intérieur de cette famille toute céleste, afin de la soustraire aux outrages purement gratuits de ses ennemis. D'un autre côté, une manifestation de la vie angélique de ses parents n'aurait pas été sans danger sur l'esprit grossier des païens : elle aurait facilement pu donner lieu à des méprises, agir sur les imaginations superstitieuses et les faire adorer comme des divinités. Ce danger rendit la primitive Église très - circonspecte sur le culte public dont elle honora la Vierge, les saints et leurs reliques. Voilà pourquoi elle mit d'abord en relief, par la prédication écrite, Jésus son divin chef, se réservant de suppléer, par la tradition orale, au silence calculé de l'Écriture sur le culte de Marie et des saints.
Elle attendit des temps prospères à une manifestation plus complète dont l'éclat devait ajouter au triomphe de la sainte Humanité. On le voit donc, ce silence est à la fois digne de la Sagesse divine et plus glorieux pour sainte Anne et saint Joachim qu'un éloge au-dessous de leur mérite. Un vénérable prélat, dont s'honore l'épiscopat français, donne une solution encore plus concluante, qu'on nous saura gré de rapporter textuellement.
«Pourquoi vous étonnez-vous, dit l'éloquent évêque de Poitiers, du silence de l'Évangile sur la génération de Marie, qui est un prodige, une œuvre accomplie en dehors de plusieurs des lois ordinaires? Marie est la proche parente de Joseph ; elle a un même aïeul avec lui, et il vous suffît que leur lignée soit commune jusque-là. Mais arrivé à ce point, l'écrivain inspiré s'entoure de mystère en ce qui regarde la filiation de Marie et celle de Jésus, parce que l'engendrement de la Mère et celui du Fils s'étant produits l'un et l'autre dans des conditions exceptionnelles, ne pouvaient être simplement racontés comme faisant suite à toute la série généalogique précédente, où les règles générales suivaient leur cours. Et comme le généalogiste sacré ne donne point de père à Jésus, mais parle seulement de l'époux de sa Mère, attendu que la conception de Jésus-Christ selon la chair n'est pas moins inénarrable que sa génération éternelle ; ainsi, pour un motif analogue, il se tait sur le père et sur la mère de Marie, parce que la génération de Marie ne peut être assimilée à aucune autre. Entendez ce qu'une fidèle et constante Tradition nous apprend à cet égard, et voyez comme le germe confié aux familles patriarcales, le sang dont l'Humanité sainte de Jésus doit être formée, va en s'épurant jusqu'à l'entière perfection» (Mgr Pie, Homélie sur l`Immaculée Conception. 1854. ).
Au reste, pour concevoir une haute idée de ces saints Patriarches, nous n'avons nul besoin des considérations qui précèdent: il suffira de leur appliquer une règle infaillible, une mesure indiquée par la Sagesse elle-même; elle a dit : « Vous les connaîtrez à leurs fruits. » Ce mot nous servira de fil conducteur pour sonder l'abîme de leurs vertus. Imitons les Hébreux dans le désert : impatients de vérifier ce qu'on leur racontait des délices de la Terre Promise.
Cathédrale de St-Anne d`Apt - France
MÈRE TRÈS-GLORIEUSE DE MARIE IMMACULÉE
Le R. Père Laurent Mermillod
De la Compagnie de Jésus. 1866
( Quelques Extraits)
St-Anne et la St-Vierge Marie enfant
St-Joachim et la St-Vierge Marie enfant
Légende de sainte Anne et de saint Joachim.
Sainte Anne et saint Joachim, parents de la très-sainte Vierge Marie, Mère de Dieu, étaient tous deux de race royale et sacerdotale.
Joachim, ou Eli, naquit à Nazareth en Galilée. Il eut pour père Mathat , de la descendance du roi David par son fils Nathan. Estha, sa mère, descendait aussi de David, par le roi Salomon. Anne était de Bethléem et du sang de David, par son père Stolan et sa mère Emérentienne.
Le Roi David - roi d`Israël vers 950 Av J.C. et auteur des Psaumes.
Le Prophète Samuel envoyé par Dieu à Bethléem chez Jessé fait l`onction du dernier de ses enfants le futur roi David. (1 Rois 16)
Tous deux vécurent dans la plus parfaite observance de la Loi divine, chéris de Dieu, dont ils cherchaient le bon plaisir en toutes choses, et bénis des hommes à cause de leur tendre charité. Ils faisaient trois parts de leurs revenus: la première était destinée au Temple et consacrée à relever la pompe de ses fêtes, la seconde était appliquée au soulagement des pauvres et des malades; ils vivaient modestement de la troisième.
Dieu, pour épurer leur vertu et les élever à la plus haute sainteté, leur envoya l'épreuve la plus pénible et la plus humiliante en ce temps-là. Il frappa leur union de stérilité. Chez les Juifs, et surtout dans la tribu de David, la privation de descendance était regardée comme un opprobre, un châtiment du Ciel, une sorte de malédiction; les époux stériles ne pouvaient plus se compter parmi les aïeux du Fils de la Promesse, et cette exclusion atteignait à la fois, de la manière la plus sensible, leurs espérances, leur piété, leur considération dans la tribu. Ils étaient désormais condamnés à vivre dans l'isolement et une inconsolable tristesse.
Anne et Joachim se résignèrent à cette douloureuse épreuve, sans toutefois perdre l'espoir d'en obtenir la cessation. Ils multiplièrent pendant de longues années leurs oraisons, leurs jeûnes et leurs aumônes, pleins de confiance d'être tôt ou tard exaucés. Ces prières et ces larmes n'avaient cependant pas pour but d'obtenir une consolation purement humaine, une satisfaction d'amour propre; toutes les fois qu'ils se rendaient au Temple, ils promettaient de consacrer au Seigneur l'enfant qu'il daignerait leur accorder, et de lui en faire un généreux sacrifice.
Le Temple de Jérusalem
Ils étaient déjà presque parvenus aux glaces de l'âge, lorsqu'un jour de novembre, à la fête des Encénies, ils virent leur sacrifice encore plus durement rebuté des prêtres, sous le prétexte que Dieu n'avait pas béni leur union. Ils se retirèrent couverts de confusion, Joachim sur la montagne, au milieu des bergers commis à la garde de ses troupeaux, Anne dans ses jardins, pour répandre, chacun de son côté, leur âme devant le Seigneur, et se consoler de leur affliction. Après quelques jours d'une retraite durant laquelle ils s'élevèrent au plus sublime abandon à la volonté céleste, le Tout-Puissant, touché de leurs pieuses larmes, leur députa un consolateur.
Un Ange vint leur annoncer en son nom la cessation prochaine de l'opprobre qui pesait sur eux. Le divin messager se montra d'abord à Joachim; il lui promit qu'Anne ne tarderait pas à concevoir une vierge incomparable, future mère du Messie promis depuis tant de siècles. De son côté, sa sainte épouse eut aussi connaissance de la même révélation, et tous deux, remplis intérieurement de confiance, se communiquèrent cette heureuse nouvelle avec un joyeux empressement, et se hâtèrent, par de ferventes actions de grâces, de témoigner à Dieu leur reconnaissance d'un si grand bienfait.
A quelques jours de là, le 8 décembre, la bienheureuse Anne conçut une Fille exempte de la tache originelle, Marie Immaculée, qui, neuf mois après, au milieu de la joie de ses parents et de tous les habitants des alentours, naquit à Nazareth, le 8 septembre, dans la maison de saint Joachim. Sur un ordre du Ciel, on lui donna le nom de Marie, dont la signification avait rapport à ses destinées futures.
Quatre-vingts jours après, Anne avec sa Fille bien aimée se rendit au Temple pour y accomplir la purification légale et y présenter les offrandes d'usage. Quand Marie eut atteint sa troisième année, ses parents, fidèles à leur vœu, la conduisirent de nouveau au Temple, et, malgré les douleurs d'une cruelle séparation, offrirent généreusement au Seigneur cette Enfant, joie de leur vieillesse, récompense de leur sainteté. Ils ne vécurent vraisemblablement pas longtemps après ce dernier sacrifice. Ils moururent consolés et comblés de mérites, heureux d'annoncer à leurs aïeux la prochaine arrivée du Messie.
Voilà, suivant les traditions les plus accréditées, les saints Pères et le commun des Docteurs, à peu près tout ce que nous savons de certain sur ces illustres personnages, comme on peut s'en assurer en parcourant les continuateurs de Bollandus, Trombelli et d'autres sages critiques. On a fait sur leur vie, nous le savons, des récits bien plus
circonstanciés; mais pour rester fidèles à notre dessein, nous avons rejeté des détails inutiles à la piété.
La légende de sainte Anne et de saint Joachim est courte, il est vrai, mais elle ne laisse pas de nous donner la plus haute idée de leur sainteté, et, comme nous le verrons ci-après, elle est bien propre à nous remplir d'une confiance illimitée en leur puissante intercession.
Pourquoi les Évangiles gardent le silence sur sainte Anne.
On se demande parfois avec étonnement pourquoi les divines Écritures nous parlent si peu des personnages dont les glorieuses destinées se lient à l'œuvre de notre rédemption; pourquoi, le plus souvent, elles sont muettes sur le détail de leurs vertus et les vicissitudes de leur existence. Une page contiendrait tout ce qui se rapporte directement à Marie, tandis que saint Jean-Baptiste nous est révélé avant sa conception, on nous le montre tressaillant dans le sein de sa mère, on nous le montre à sa naissance, dans la solitude, dans sa prédication, sur les bords du Jourdain, dans sa captivité, à sa mort.
Cathédrale Santa-Anna de San Salvador - Amérique centrale
Notre-Seigneur lui-même fait de son Précurseur le plus magnifique éloge. D'un autre côté, il est à peine fait mention de saint Joseph, et le silence enveloppe la vie, les vertus, et jusqu'aux noms bénis de sainte Anne et de son pieux époux, saint Joachim. A première vue, cette conduite de l'Esprit-Saint paraît étrange ; mais la réflexion nous fait bientôt entrevoir en elle une sagesse profonde, comme dans toutes les œuvres divines. Ce silence mystérieux vaut une louange, et plus qu'une louange, puisqu'il fait à ces saints Patriarches une part analogue à celle de Marie et de Joseph, et qu'il nous les montre indirectement dans les reflets de la sainte humanité de Jésus. Tous ces illustres personnages ne sont-ils pas groupés dans un même tableau où Notre- Seigneur occupe le premier plan? Toutes les gloires de l'Homme-Dieu ne rejaillissent-elles pas sur leurs têtes vénérables? En effet, l'âme fidèle ne peut, dans ses élévations, les séparer de Jésus ; elle ne peut penser à lui sans que sa pensée se reporte en quelque manière sur eux; l'aimer sans aimer aussi et remercier ceux qui furent sa famille, la race et le sang dont il descendit.
Elle ne peut, en un mot, mettre de côté ceux dont l'existence fut coordonnée à la sienne, ceux dont les vertus, modelées par avance sur ses leçons, nous valurent un tel Rédempteur, un tel Jésus. Cette position exceptionnelle, ces privilèges, prix de leur sainteté, les placent si haut dans l'estime, la vénération et l'amour du Ciel et de la terre, que la parole humaine devenait impuissante à les louer dignement. Voilà peut-être une raison du silence des saintes Écritures : l'Esprit-Saint aurait préféré laisser à notre piété filiale le doux soin de rechercher ce qu'ils furent devant Dieu. Oh ! non, sainte Anne et saint Joachim ne sont pas, dans le tableau évangélique, entièrement relégués dans l'ombre, puisqu'ils partagent les gloires du Christ, puisque leur justice a attiré les regards du Père des miséricordes, puisque le Lis immaculé germe dans leur cœur et sort de leur sang comme d'une source très-pure.
Avoir mérité une telle faveur, n'est-ce pas, pour sainte Anne en particulier avoir de beaucoup dépassé les limites d'une sainteté ordinaire? « Qui trouvera la femme forte? Son prix est par-delà toute limite » ( Proverbe 31).
Un pieux et savant auteur donne une autre interprétation de ce silence des Évangiles : elle n'est pas moins à l'honneur de sainte Anne. « II ne convenait pas, dit-il, de rendre la Vierge Marie recommandable par les vertus de ses parents, de même qu'on ne saurait faire valoir Notre-Seigneur par sa Mère ; mais au contraire, de la sainteté infinie de Jésus-Christ, on a dû conclure à celle de Marie, et de la sainteté de Marie à celle de ses parents, sainte Anne et saint Joachim. Or, comme par là même les fidèles devaient leur supposer les vertus et les mérites les plus rares, l'Esprit-Saint n'a pas permis aux Évangélistes de raconter leurs vie. »
Suivant le bienheureux Thomas de Villeneuve, leur gloire et leur sainteté furent toutes cachées en Dieu : comme Marie, leur très-sainte Fille, et Joseph, son chaste époux, ils surent, avec une profonde humilité, en dérober l'éclat aux hommes. Il était donc à peu près inutile d'exposer aux regards de la foule le tableau de vertus au-dessus de sa portée, de merveilles accessibles seulement aux méditations des âmes intérieures.
D'ailleurs, si les Juifs incrédules ont été révoltés des anéantissements du Verbe incarné et scandalisés de ses enseignements; si, malgré tant de miracles, ils ont méconnu sa mission divine, quel accueil auraient-ils fait à des récits empreints de la même abnégation, du même esprit de sacrifice? Notre- Seigneur a bravé les mépris de ses contemporains, mais il n'a pas voulu laisser blasphémer sa Mère, ni les vénérables parents de sa Mère, en livrant leur existence à une publicité inopportune.
Il a donc fait tirer un voile discret sur l'intérieur de cette famille toute céleste, afin de la soustraire aux outrages purement gratuits de ses ennemis. D'un autre côté, une manifestation de la vie angélique de ses parents n'aurait pas été sans danger sur l'esprit grossier des païens : elle aurait facilement pu donner lieu à des méprises, agir sur les imaginations superstitieuses et les faire adorer comme des divinités. Ce danger rendit la primitive Église très - circonspecte sur le culte public dont elle honora la Vierge, les saints et leurs reliques. Voilà pourquoi elle mit d'abord en relief, par la prédication écrite, Jésus son divin chef, se réservant de suppléer, par la tradition orale, au silence calculé de l'Écriture sur le culte de Marie et des saints.
Elle attendit des temps prospères à une manifestation plus complète dont l'éclat devait ajouter au triomphe de la sainte Humanité. On le voit donc, ce silence est à la fois digne de la Sagesse divine et plus glorieux pour sainte Anne et saint Joachim qu'un éloge au-dessous de leur mérite. Un vénérable prélat, dont s'honore l'épiscopat français, donne une solution encore plus concluante, qu'on nous saura gré de rapporter textuellement.
«Pourquoi vous étonnez-vous, dit l'éloquent évêque de Poitiers, du silence de l'Évangile sur la génération de Marie, qui est un prodige, une œuvre accomplie en dehors de plusieurs des lois ordinaires? Marie est la proche parente de Joseph ; elle a un même aïeul avec lui, et il vous suffît que leur lignée soit commune jusque-là. Mais arrivé à ce point, l'écrivain inspiré s'entoure de mystère en ce qui regarde la filiation de Marie et celle de Jésus, parce que l'engendrement de la Mère et celui du Fils s'étant produits l'un et l'autre dans des conditions exceptionnelles, ne pouvaient être simplement racontés comme faisant suite à toute la série généalogique précédente, où les règles générales suivaient leur cours. Et comme le généalogiste sacré ne donne point de père à Jésus, mais parle seulement de l'époux de sa Mère, attendu que la conception de Jésus-Christ selon la chair n'est pas moins inénarrable que sa génération éternelle ; ainsi, pour un motif analogue, il se tait sur le père et sur la mère de Marie, parce que la génération de Marie ne peut être assimilée à aucune autre. Entendez ce qu'une fidèle et constante Tradition nous apprend à cet égard, et voyez comme le germe confié aux familles patriarcales, le sang dont l'Humanité sainte de Jésus doit être formée, va en s'épurant jusqu'à l'entière perfection» (Mgr Pie, Homélie sur l`Immaculée Conception. 1854. ).
Au reste, pour concevoir une haute idée de ces saints Patriarches, nous n'avons nul besoin des considérations qui précèdent: il suffira de leur appliquer une règle infaillible, une mesure indiquée par la Sagesse elle-même; elle a dit : « Vous les connaîtrez à leurs fruits. » Ce mot nous servira de fil conducteur pour sonder l'abîme de leurs vertus. Imitons les Hébreux dans le désert : impatients de vérifier ce qu'on leur racontait des délices de la Terre Promise.
Cathédrale de St-Anne d`Apt - France
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE - Le R. Père Laurent Mermillod - 1866
Cher lecteur, sainte Anne et saint Joachim sont en quelque manière cette terre de promission, du moins ce titre symbolique leur est décerné par les Pères et quelques pieux écrivains. Si vous voulez donc en apprécier les richesses, voyez son fruit : sur cette terre sainte, le buisson ardent a jeté tout son éclat sans se consumer; sur cette terre bénie, dans ce paradis terrestre, s'est développée la tige de Jessé, l'arbre qui nous a donné le fruit de vie, la Vie elle-même. Joachim fut le père et Anne fut la mère de Marie Immaculée.
Comme les Hébreux errants à travers des solitudes arides, hâtons-nous vers ce sol aimé des deux, arrosé d'ineffables bénédictions. Quittons les cavernes de Pharan; cherchons un refuge sur cette terre où coulent le lait et le miel des consolations divines ; dans nos peines, nos tentations et tous nos besoins, apprenons à recourir à sainte Anne et à ses maternelles bontés : n'est-elle pas la mère de la Mère de grâce?
Maternité de sainte Anne.
Cette dignité l'élève au-dessus de toutes les autres Saintes. Quand Dieu choisit une âme pour une mission de spéciale providence , il façonne en quelque sorte cette âme de loin, et , en lui prodiguant ses dons et ses grâces, il les lui mesure au but qu'il veut atteindre. Cette donnée a passé en principe, et tous les théologiens l'admettent. Saint Thomas la formule ainsi avec sa concision ordinaire : « Dieu prépare toujours ceux qu'il choisit pour une fin , de telle sorte qu'ils soient propres à la remplir. » Si donc il a en vue d'élever une âme à une dignité très-sublime, il la sanctifie en proportion; s'il la destine à la plus haute dignité , il l'enrichit de mérites incomparables.
Or Dieu a choisi cette illustre Princesse pour mère et nourrice de Marie Immaculée, pour aïeule de son Fils unique et de tous ses fils adoptifs dans la Grâce : dignité suréminente, œuvre d'une excellence presque infinie ; il a donc dû lui donner tout ce qui convient à une telle élévation , et l'orner suivant les exigences de sa sagesse et de sa libéralité. S'il en était autrement, les créatures ainsi élevées au-dessus des destinées vulgaires , mais dépourvues de ce que comporterait leur sublime état , seraient couvertes de confusion , et , à la vue de leur insuffisance, auraient droit de s'en prendre à la Sagesse éternelle.
Or donc , puisque sainte Anne a été éternellement prédestinée et préparée à la plus haute dignité , après celle de Mère de Dieu , ne devons-nous pas fermement croire qu'aucune fille d'Ève n'a autant reçu de la divine bonté ? Ces principes posés, on peut le dire hardiment, sa maternité seule élève sainte Anne au-dessus de toutes les saintes ; car la maternité de Marie est quelque chose de si sublime qu'on ne peut la faire entrer en ligne de comparaison. Cette réserve faite, quelle autre mère peut se glorifier auprès de cette mère si vénérable? Serait-ce la mère du prophète Jérémie, celle de saint Jean-Baptiste, ou celle de saint Joseph? Non, elles ne virent pas leurs enfants soustraits à toute influence de l'enfer; quoique sanctifiés avant le commun des mortels, leurs enfants ne furent pas conçus sans péché, ils ne furent pas appelés à d'aussi hautes destinées que la Fille de sainte Anne. Serait-ce Ève, mère du genre humain ? Hélas ! elle donna le jour à une postérité maudite, à une race déshéritée et condamnée à des malheurs sans fin ; tandis que sainte Anne donna au monde la réparatrice de sa faute et la véritable mère de tous les vivants; de tous les élus.
On peut donc le dire avec un Père de l'Église orientale : Sainte Anne l'emporte sur toutes les autres mères par sa maternité. Nous ne sommes ici que l'écho des saints Pères et des auteurs les plus recommandables. Citons quelques passages moins souvent reproduits. « II n'est pas douteux, dit saint Fulbert de Chartres , que les parents de Marie n'aient été remplis d'une façon merveilleuse de l'esprit de vie et de charité, que la garde et la présence des anges ne leur aient jamais manqué. Il est donc bien juste de louer et d'exalter ces très saints parents de la bienheureuse Vierge. Ils se montrèrent toujours si parfaits dans toute leur conduite qu'on ne doit pas s'étonner de voir sortir de leur sang celle qui resplendit, dans les siècles passés et à venir, comme le miroir de toute bonté. Heureux et plus heureux que tous les pères , celui qui mérita d'être appelé père d'une telle Fille !»
Elle est vraiment bienheureuse et digne de toute notre vénération, elle a droit en quelque sorte à tous nos hommages, cette Mère qui sur passe toutes les mères, parce qu'elle a conçu et enfanté celle dont le Créateur de toutes choses a voulu prendre la chair ! Mère fortunée, réjouissez-vous et tressaillez , le don qui vous a été fait d'une Fille aussi auguste est tel que nulle autre femme , ni avant ni après vous , ne mérita d'en recevoir un plus sublime. »
Pourrait-on affirmer notre assertion en termes plus énergiques ? D'un autre côté le vénérable Lansperge s'écrie avec saint Jérôme : « Anne est l'arbre excellent dont un rameau détaché a fleuri sous une influence divine. Elle est la Terre sainte qui a produit le Buisson ardent, mais incombustible. Elle est le ciel élevé du haut duquel l'Etoile des mers s'est avancée vers son lever. Anne est la stérilité féconde et visitée des anges. Elle est bénie entre les femmes , mère heureuse entre les mères : de son chaste sein s'est échappé resplendissant aux regards des hommes le Temple du Seigneur , le Sanctuaire du Saint- Esprit, la Mère de Dieu. »
St-Ann`s Cathedral - Leeds - Angleterre
« Que l'on paie un tribut de justes louanges à toutes les femmes qui, dès l'origine du monde, se sont illustrées par les plus rares vertus, à nulle d'entre elles cependant on ne reconnaîtra le privilège d'avoir donné le jour à la Mère de Dieu , à la mère de toute consolation ; ce privilège fut réservé à cette glorieuse Princesse. »
Les Ménées de l'Église grecque expriment le même sentiment avec un enthousiasme tout oriental , et nous attestent par leurs transports la haute idée que les Grecs avaient de la sainteté de sainte Anne. En voici un fragment :
« Accourez , vous tous qui aimez le Christ, et avec nous , en des hymnes ornées de toutes les fleurs du langage , élevez la voix et chantez : 0 Anne , vous êtes digne de toute vénération ! Heureuses les entrailles qui ont porté la Mère du Verbe divin ! Heureuses les mamelles qui ont allaité la jeune Vierge dont le lait a nourri le Créateur de tous les êtres vivants ! Anne est au-dessus de tous les éloges : elle a mis au monde cette tige qui fleurit avant toute autre, sans jamais avoir été flétrie. Salut, ô Terre bénie, qui avez donné au monde un Sol habité par un Dieu ! 0 vous qui, attachée à la loi divine par une pratique incessante, avez tracé avant toutes les autres les premiers traits de la loi de grâce , lorsque par la naissance d'une illustre Vierge vous avez vu briser les liens de votre stérilité. 0 glorieuse Anne ! vous avez enfanté le ciel sur la terre , et peu après ce ciel a reçu son Créateur, qui vous a transportée , vous, la mère de ce ciel , dans le royaume éternel . »
Cathédrale Santa-Anna de Las Palmas - Iles Canaries
Enfin Georges de Nicomédie se fait encore l'interprète du même sentiment dans plusieurs de ses discours. « Considérez , dit-il, l'élection de tous les justes et de tous les prophètes , voyez par quels liens la reconnaissance les a attachés au Dieu qui les a choisis , et vous pourrez entrevoir l'incomparable excellence d'Anne et de Joachim. Ne trouvez-vous pas en eux une dignité qui surpasse notre intelligence , une dignité plus précieuse et plus honorable que toutes les autres dignités? Dieu, leur créateur, les a choisis pour la restauration du monde ; il reçoit une mère de leur sang, et dans le sein de cette mère il a résolu d'opérer une nouvelle création. De leur sang, dont la vertu est toute royale , il tire la pourpre royale du genre humain. Ces faveurs rendent ces saints Patriarches supérieurs à tous les justes, et leur confèrent des droits qui surpassent tout mérite. N'ont-ils pas été choisis entre tous, et réservés pour l'accomplissement du plus grand mystère? Voyez donc combien tout ce qui les concerne est en dehors de toute comparaison. » De ces autorités et de ces considérations ne pouvons-nous pas conclure que sainte Anne est élevée en dignité au-dessus de toutes les saintes, à peu près, s'il est permis de le dire , comme Marie , par sa dignité de Mère de Dieu , est au-dessus de toutes les créatures angéliques et humaines ? Ne peut-on pas conclure que sainte Anne se trouve aussi dans un ordre exceptionnel ?
Sans doute cette comparaison ne saurait être rigoureuse dans ses conséquences ; toutefois, si la maternité de sainte Anne n'est pas un vain mot, un simple titre honorifique , cette comparaison n'est ni téméraire ni déplacée , et nous ne sommes pas les premiers à la faire. Or, puisque cette dignité est si grande , quel abîme de mérites ne suppose-t-elle pas en notre Sainte, puisqu'elle l'a méritée ! Oui, Anne a mérité de devenir mère de Marie Immaculée , et c'est ce que nous allons démontrer.
Basilique St-Anne de Beaupré - Québec - Canada
Sainte Anne a mérité de devenir mère de Marie Immaculée.
Si nous parcourons, dans le Bréviaire romain, l'office du 26 juillet , jour où l'Église célèbre la fête de sainte Anne, nous trouverons l'oraison suivante :
« 0 Dieu, qui avez daigné conférer à la bienheureuse Anne votre grâce , afin qu'elle méritât de donner le jour à la mère de votre fils unique, accordez-nous, dans votre bonté, d'être aidés auprès de vous du patronage de Celle dont nous célébrons la solennité. »
On peut donc le dire , puisque l'Église se sert de ce mot , sainte Anne a mérité sa maternité autant qu'une créature pouvait s'en rendre digne par sa fidélité à la grâce , et elle l'a obtenue. Mais qu'a-t-elle fait pour s'attirer cette bénédiction? par quelle échelle de vertus et de perfections s'est-elle élevée avant de la rendre possible ? Afin d'en concevoir une faible idée , rappelons-nous ce que fut Marie dès le premier instant de sa création , et nous pourrons entrevoir ce que dut être sa mère. La tige ne doit-elle pas être digne de sa fleur , et le vase , du parfum qu'on lui confie ?
En sortant des mains de Dieu , sous l'action de son souffle créateur , l'âme de Marie fut associée à un corps très-pur , à jamais virginal et immaculé comme elle. Afin que ce petit corps de vierge ne fût en contact avec aucune souillure , afin que rien de désordonné ne pût , par son voisinage , lui causer le moindre trouble , ne fallait-il pas que ses parents fussent eux-mêmes arrivés par leur concours à la grâce , sinon par privilège, à une pureté sans tache? Ne fallait-il pas que sainte Anne, réceptacle béni de cette Arche d'alliance , eût acquis par une humble vigilance et par les luttes de toute sa vie , un empire absolu sur tous les mouvements de son être? Oh ! que la Conception Immaculée de Marie relève ses parents , et qu'elle grandit sainte Anne !
Basilique St-Anne d`Auray - France
Quelques Pères de l'Église ont écrit des choses merveilleuses sur cette glorieuse Mère de la Vierge, et les âmes pieuses n'ont pas de peine à les croire. D'après leurs écrits et suivant des traditions respectables, elle serait parvenue, avec son saint Époux, à reconquérir l'état d'innocence primitive d'Adam et d'Ève avant leur chute, à éteindre sans retour toutes les révoltes et toutes les concupiscences qui en furent le châtiment ; elle aurait mené longtemps avec lui une vie plus angélique qu'humaine, partagée entre les travaux de la vie pastorale, l'assistance des pauvres et la méditation des choses divines. Durant de longues années , elle aurait appelé par ses prières et ses larmes l'accomplissement des prophéties et des promesses faites à sa nation, supportant avec une admirable patience l'opprobre que sa stérilité avait attiré sur sa maison, car tels étaient les préjugés d'Israël, et elle n'aurait jamais cessé de demander la rédemption des hommes. Dieu eut enfin pitié de ses larmes , et , après une si longue préparation , lui donna une fécondité miraculeuse. L'archange Gabriel vint lui annoncer l'Immaculée Conception de Marie.
Oh ! qui nous dira maintenant les joies angéliques de sainte Anne , les profondes actions de grâces de saint Joachim, le triple concert de louanges et de bénédictions qui, du sein de cette famille, désormais consolée, montera vers le Très-Haut ! Salut , digne Fille de tels parents , récompense des saints désirs ! Salut , Fille du miracle et de la vieillesse fertilisée par les influences de l'Esprit-Saint ! Salut, ô Marie Immaculée !
Comme les Hébreux errants à travers des solitudes arides, hâtons-nous vers ce sol aimé des deux, arrosé d'ineffables bénédictions. Quittons les cavernes de Pharan; cherchons un refuge sur cette terre où coulent le lait et le miel des consolations divines ; dans nos peines, nos tentations et tous nos besoins, apprenons à recourir à sainte Anne et à ses maternelles bontés : n'est-elle pas la mère de la Mère de grâce?
Maternité de sainte Anne.
Cette dignité l'élève au-dessus de toutes les autres Saintes. Quand Dieu choisit une âme pour une mission de spéciale providence , il façonne en quelque sorte cette âme de loin, et , en lui prodiguant ses dons et ses grâces, il les lui mesure au but qu'il veut atteindre. Cette donnée a passé en principe, et tous les théologiens l'admettent. Saint Thomas la formule ainsi avec sa concision ordinaire : « Dieu prépare toujours ceux qu'il choisit pour une fin , de telle sorte qu'ils soient propres à la remplir. » Si donc il a en vue d'élever une âme à une dignité très-sublime, il la sanctifie en proportion; s'il la destine à la plus haute dignité , il l'enrichit de mérites incomparables.
Or Dieu a choisi cette illustre Princesse pour mère et nourrice de Marie Immaculée, pour aïeule de son Fils unique et de tous ses fils adoptifs dans la Grâce : dignité suréminente, œuvre d'une excellence presque infinie ; il a donc dû lui donner tout ce qui convient à une telle élévation , et l'orner suivant les exigences de sa sagesse et de sa libéralité. S'il en était autrement, les créatures ainsi élevées au-dessus des destinées vulgaires , mais dépourvues de ce que comporterait leur sublime état , seraient couvertes de confusion , et , à la vue de leur insuffisance, auraient droit de s'en prendre à la Sagesse éternelle.
Or donc , puisque sainte Anne a été éternellement prédestinée et préparée à la plus haute dignité , après celle de Mère de Dieu , ne devons-nous pas fermement croire qu'aucune fille d'Ève n'a autant reçu de la divine bonté ? Ces principes posés, on peut le dire hardiment, sa maternité seule élève sainte Anne au-dessus de toutes les saintes ; car la maternité de Marie est quelque chose de si sublime qu'on ne peut la faire entrer en ligne de comparaison. Cette réserve faite, quelle autre mère peut se glorifier auprès de cette mère si vénérable? Serait-ce la mère du prophète Jérémie, celle de saint Jean-Baptiste, ou celle de saint Joseph? Non, elles ne virent pas leurs enfants soustraits à toute influence de l'enfer; quoique sanctifiés avant le commun des mortels, leurs enfants ne furent pas conçus sans péché, ils ne furent pas appelés à d'aussi hautes destinées que la Fille de sainte Anne. Serait-ce Ève, mère du genre humain ? Hélas ! elle donna le jour à une postérité maudite, à une race déshéritée et condamnée à des malheurs sans fin ; tandis que sainte Anne donna au monde la réparatrice de sa faute et la véritable mère de tous les vivants; de tous les élus.
On peut donc le dire avec un Père de l'Église orientale : Sainte Anne l'emporte sur toutes les autres mères par sa maternité. Nous ne sommes ici que l'écho des saints Pères et des auteurs les plus recommandables. Citons quelques passages moins souvent reproduits. « II n'est pas douteux, dit saint Fulbert de Chartres , que les parents de Marie n'aient été remplis d'une façon merveilleuse de l'esprit de vie et de charité, que la garde et la présence des anges ne leur aient jamais manqué. Il est donc bien juste de louer et d'exalter ces très saints parents de la bienheureuse Vierge. Ils se montrèrent toujours si parfaits dans toute leur conduite qu'on ne doit pas s'étonner de voir sortir de leur sang celle qui resplendit, dans les siècles passés et à venir, comme le miroir de toute bonté. Heureux et plus heureux que tous les pères , celui qui mérita d'être appelé père d'une telle Fille !»
Elle est vraiment bienheureuse et digne de toute notre vénération, elle a droit en quelque sorte à tous nos hommages, cette Mère qui sur passe toutes les mères, parce qu'elle a conçu et enfanté celle dont le Créateur de toutes choses a voulu prendre la chair ! Mère fortunée, réjouissez-vous et tressaillez , le don qui vous a été fait d'une Fille aussi auguste est tel que nulle autre femme , ni avant ni après vous , ne mérita d'en recevoir un plus sublime. »
Pourrait-on affirmer notre assertion en termes plus énergiques ? D'un autre côté le vénérable Lansperge s'écrie avec saint Jérôme : « Anne est l'arbre excellent dont un rameau détaché a fleuri sous une influence divine. Elle est la Terre sainte qui a produit le Buisson ardent, mais incombustible. Elle est le ciel élevé du haut duquel l'Etoile des mers s'est avancée vers son lever. Anne est la stérilité féconde et visitée des anges. Elle est bénie entre les femmes , mère heureuse entre les mères : de son chaste sein s'est échappé resplendissant aux regards des hommes le Temple du Seigneur , le Sanctuaire du Saint- Esprit, la Mère de Dieu. »
St-Ann`s Cathedral - Leeds - Angleterre
« Que l'on paie un tribut de justes louanges à toutes les femmes qui, dès l'origine du monde, se sont illustrées par les plus rares vertus, à nulle d'entre elles cependant on ne reconnaîtra le privilège d'avoir donné le jour à la Mère de Dieu , à la mère de toute consolation ; ce privilège fut réservé à cette glorieuse Princesse. »
Les Ménées de l'Église grecque expriment le même sentiment avec un enthousiasme tout oriental , et nous attestent par leurs transports la haute idée que les Grecs avaient de la sainteté de sainte Anne. En voici un fragment :
« Accourez , vous tous qui aimez le Christ, et avec nous , en des hymnes ornées de toutes les fleurs du langage , élevez la voix et chantez : 0 Anne , vous êtes digne de toute vénération ! Heureuses les entrailles qui ont porté la Mère du Verbe divin ! Heureuses les mamelles qui ont allaité la jeune Vierge dont le lait a nourri le Créateur de tous les êtres vivants ! Anne est au-dessus de tous les éloges : elle a mis au monde cette tige qui fleurit avant toute autre, sans jamais avoir été flétrie. Salut, ô Terre bénie, qui avez donné au monde un Sol habité par un Dieu ! 0 vous qui, attachée à la loi divine par une pratique incessante, avez tracé avant toutes les autres les premiers traits de la loi de grâce , lorsque par la naissance d'une illustre Vierge vous avez vu briser les liens de votre stérilité. 0 glorieuse Anne ! vous avez enfanté le ciel sur la terre , et peu après ce ciel a reçu son Créateur, qui vous a transportée , vous, la mère de ce ciel , dans le royaume éternel . »
Cathédrale Santa-Anna de Las Palmas - Iles Canaries
Enfin Georges de Nicomédie se fait encore l'interprète du même sentiment dans plusieurs de ses discours. « Considérez , dit-il, l'élection de tous les justes et de tous les prophètes , voyez par quels liens la reconnaissance les a attachés au Dieu qui les a choisis , et vous pourrez entrevoir l'incomparable excellence d'Anne et de Joachim. Ne trouvez-vous pas en eux une dignité qui surpasse notre intelligence , une dignité plus précieuse et plus honorable que toutes les autres dignités? Dieu, leur créateur, les a choisis pour la restauration du monde ; il reçoit une mère de leur sang, et dans le sein de cette mère il a résolu d'opérer une nouvelle création. De leur sang, dont la vertu est toute royale , il tire la pourpre royale du genre humain. Ces faveurs rendent ces saints Patriarches supérieurs à tous les justes, et leur confèrent des droits qui surpassent tout mérite. N'ont-ils pas été choisis entre tous, et réservés pour l'accomplissement du plus grand mystère? Voyez donc combien tout ce qui les concerne est en dehors de toute comparaison. » De ces autorités et de ces considérations ne pouvons-nous pas conclure que sainte Anne est élevée en dignité au-dessus de toutes les saintes, à peu près, s'il est permis de le dire , comme Marie , par sa dignité de Mère de Dieu , est au-dessus de toutes les créatures angéliques et humaines ? Ne peut-on pas conclure que sainte Anne se trouve aussi dans un ordre exceptionnel ?
Sans doute cette comparaison ne saurait être rigoureuse dans ses conséquences ; toutefois, si la maternité de sainte Anne n'est pas un vain mot, un simple titre honorifique , cette comparaison n'est ni téméraire ni déplacée , et nous ne sommes pas les premiers à la faire. Or, puisque cette dignité est si grande , quel abîme de mérites ne suppose-t-elle pas en notre Sainte, puisqu'elle l'a méritée ! Oui, Anne a mérité de devenir mère de Marie Immaculée , et c'est ce que nous allons démontrer.
Basilique St-Anne de Beaupré - Québec - Canada
Sainte Anne a mérité de devenir mère de Marie Immaculée.
Si nous parcourons, dans le Bréviaire romain, l'office du 26 juillet , jour où l'Église célèbre la fête de sainte Anne, nous trouverons l'oraison suivante :
« 0 Dieu, qui avez daigné conférer à la bienheureuse Anne votre grâce , afin qu'elle méritât de donner le jour à la mère de votre fils unique, accordez-nous, dans votre bonté, d'être aidés auprès de vous du patronage de Celle dont nous célébrons la solennité. »
On peut donc le dire , puisque l'Église se sert de ce mot , sainte Anne a mérité sa maternité autant qu'une créature pouvait s'en rendre digne par sa fidélité à la grâce , et elle l'a obtenue. Mais qu'a-t-elle fait pour s'attirer cette bénédiction? par quelle échelle de vertus et de perfections s'est-elle élevée avant de la rendre possible ? Afin d'en concevoir une faible idée , rappelons-nous ce que fut Marie dès le premier instant de sa création , et nous pourrons entrevoir ce que dut être sa mère. La tige ne doit-elle pas être digne de sa fleur , et le vase , du parfum qu'on lui confie ?
En sortant des mains de Dieu , sous l'action de son souffle créateur , l'âme de Marie fut associée à un corps très-pur , à jamais virginal et immaculé comme elle. Afin que ce petit corps de vierge ne fût en contact avec aucune souillure , afin que rien de désordonné ne pût , par son voisinage , lui causer le moindre trouble , ne fallait-il pas que ses parents fussent eux-mêmes arrivés par leur concours à la grâce , sinon par privilège, à une pureté sans tache? Ne fallait-il pas que sainte Anne, réceptacle béni de cette Arche d'alliance , eût acquis par une humble vigilance et par les luttes de toute sa vie , un empire absolu sur tous les mouvements de son être? Oh ! que la Conception Immaculée de Marie relève ses parents , et qu'elle grandit sainte Anne !
Basilique St-Anne d`Auray - France
Quelques Pères de l'Église ont écrit des choses merveilleuses sur cette glorieuse Mère de la Vierge, et les âmes pieuses n'ont pas de peine à les croire. D'après leurs écrits et suivant des traditions respectables, elle serait parvenue, avec son saint Époux, à reconquérir l'état d'innocence primitive d'Adam et d'Ève avant leur chute, à éteindre sans retour toutes les révoltes et toutes les concupiscences qui en furent le châtiment ; elle aurait mené longtemps avec lui une vie plus angélique qu'humaine, partagée entre les travaux de la vie pastorale, l'assistance des pauvres et la méditation des choses divines. Durant de longues années , elle aurait appelé par ses prières et ses larmes l'accomplissement des prophéties et des promesses faites à sa nation, supportant avec une admirable patience l'opprobre que sa stérilité avait attiré sur sa maison, car tels étaient les préjugés d'Israël, et elle n'aurait jamais cessé de demander la rédemption des hommes. Dieu eut enfin pitié de ses larmes , et , après une si longue préparation , lui donna une fécondité miraculeuse. L'archange Gabriel vint lui annoncer l'Immaculée Conception de Marie.
Oh ! qui nous dira maintenant les joies angéliques de sainte Anne , les profondes actions de grâces de saint Joachim, le triple concert de louanges et de bénédictions qui, du sein de cette famille, désormais consolée, montera vers le Très-Haut ! Salut , digne Fille de tels parents , récompense des saints désirs ! Salut , Fille du miracle et de la vieillesse fertilisée par les influences de l'Esprit-Saint ! Salut, ô Marie Immaculée !
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE - Le R. Père Laurent Mermillod - 1866
St-Ann`s Church - Dublin - Irlande
0 sainte Anne! ô toute gracieuse! aujourd'hui votre crédit auprès du Père céleste nous est enfin révélé : quel prix estimable il accorde à votre invincible persévérance ! Que ne pourrez -vous nous obtenir , puisque vous avez obtenu Marie de son infinie bonté ?
Ainsi , cher lecteur, quand le Ciel diffère l'accomplissement de nos vœux, c'est le plus souvent pour nous rendre dignes de bienfaits encore plus grands. Saint Anne n'en est-elle pas la preuve la plus frappante? Exaucée plus tôt, elle n'aurait peut-être pas été mère de la Vierge sainte par excellence , parce qu'elle n'eût peut-être pas été assez parfaite. Quelle ne fut pas en effet la dignité et la perfection de Marie , au moment même où elle fut créée?
Marie se connut, et aucun des esprits célestes ne la surpassa en lumière sur Dieu et ses œuvres ; tous les docteurs de l'Église en conviennent. Elle vit donc clairement l'âme de sa mère , entretint avec elle les rapports les plus fréquents, les plus intimes; autant que le comportait sa captivité, elle rendit à sa mère les devoirs de la piété filiale la plus parfaite. N'était-il donc pas de la plus haute convenance qu'elle n'aperçût en elle rien qui pût la contrister, altérer la plénitude de son respect, ou diminuer sa vénération ? D'un autre côté, sainte Anne ne serait-elle pas morte de confusion et de regret, si elle avait pu se faire le moindre reproche, si elle s'était vu condamner à porter indignement dans son sein la Reine du ciel et de la terre, à se voir même involontairement un sujet de peine pour sa Fille Immaculée ?
Ainsi , non seulement on peut le conjecturer , mais on doit le tenir pour certain, Anne, dès qu'elle fut mère, avait franchi toutes les limites où arrivent les plus saintes : Qui trouvera une femme forte? (Proverbe 31,10).
Elle avait dit un éternel adieu aux imperfections les plus légères, inévitables pour des âmes moins humbles, moins vigilantes, moins généreuses; aucun nuage ne devait plus troubler la sérénité de sa belle âme, ni ternir la pureté de son cœur; elle avait reçu le don de confirmation dans la grâce et du règne de la justice. Par sa foi et son espérance, elle avait laissé bien loin les justes de l'Ancien Testament; elle avait cru et espéré toute sa vie, sans jamais laisser entrer dans son cœur une hésitation injurieuse à la fidélité de Dieu. Quant à l'amour de Dieu, il se produit au dehors, par l'intérêt qu'on porte aux choses saintes, par les dons précieux destinés à relever la pompe des cérémonies sacrées, et surtout, selon saint Jean, par les œuvres de miséricorde et la pratique si variée de la charité fraternelle.
St-Ann`s Cathedral - Belfast - Irlande du Nord
Nul ne surpassa sainte Anne en amour. Pressée, dans son tendre cœur, par la loi intérieure de cet amour tout à la fois double et unique de Dieu et du prochain, elle devança les temps, elle devina le caractère distinctif de la loi de grâce; le culte de la maison de Dieu, le culte du pauvre. Avec saint Joachim, elle fit, comme il a été dit dans sa légende , trois parts de son revenu : l'une destinée au Temple, l'autre aux malheureux , et la troisième aux besoins de sa maison.
Sainte Anne avait donc mérité sa maternité par la pratique de la foi, de l'espérance et de la charité : elle avait atteint la parfaite maturité de ces vertus essentielles. Elle pouvait donc remplir auprès de Marie les mêmes fonctions que celle-ci remplit plus tard auprès de l'enfant Jésus. Marie pouvait donc être saintement fière de sa mère, et, s'il est permis d'employer une expression profane, remercier Dieu de la lui avoir donnée si pure et si parfaite. Marie n'avait donc pas à rougir d'elle devant les anges, et pendant neuf mois, Marie put se reposer en sainte Anne comme en une couche de roses et de lis; sa prison était comme un temple embaumé du parfum de toutes les vertus, et nulle demeure, excepté le Cœur de Jésus, ne fut jamais plus digne d'elle !
Par la Présentation de Marie au Temple, sainte Anne et saint Joachim ont mis le comble à leurs mérites.
Dieu ménage ordinairement à ses élus, en quelques rares circonstances de leur vie, l'occasion de lui donner une preuve éclatante d'amour; il leur demande alors des sacrifices inaccoutumés ou plus parfaits; tantôt l'offrande volontaire d'un objet tendrement chéri, tantôt un acte de résignation à des revers et à des délaissements profonds; parfois l'abnégation absolue d'eux-mêmes en faveur des membres souffrants de Jésus-Christ. Ainsi furent traités Abraham, Job, Tobie, à l'un il demande son fils unique; à l'autre, une aveugle conformité à son bon plaisir; au troisième, les immolations de la charité paternelle. Qui ne connaît les deux épreuves qui portèrent le chaste Joseph ( Ancien Testament) sur les marches du trône de Pharaon , et en firent le sauveur d'Israël ?
Nous n'étendrons pas cette énumération, puis qu'il serait difficile de trouver, soit parmi les anciens Patriarches, soit parmi les Saints du Nouveau Testament, une seule exception à cette loi ainsi formulée par l'archange Raphaël à Tobie: « Parce que vous étiez agréable à Dieu, il a été nécessaire que la tentation vous éprouvât (Tobie 12,1).»
Heureux donc ceux qui savent connaître le temps de la visite et profiter de l'occasion d'aimer véritablement ! Sainte Anne et saint Joachim eurent ce bonheur durant toute leur vie, mais surtout lorsque Marie eut atteint sa troisième année. Avant de l'obtenir du Ciel, et d'un mutuel accord, ils l'avaient vouée au Seigneur; et Marie, de son côté, dès le sein maternel, s'était consacrée à son Dieu , pour le servir dans son temple de Jérusalem.
Aussitôt que son âge le permit, tous les trois accomplirent leur promesse avec une générosité vraiment royale. Sans donner aucune marque des faiblesses de la nature, dont les légitimes exigences peuvent bien se faire sentir aux âmes ordinaires, mais qui ne vit plus dans celles qu'une vertu parfaite a rendues maitresses d'elles-mêmes, ils se hâtèrent d'offrir leur Fille au Seigneur, et de couronner par ce sacrifice tous les sacrifices de leur longue carrière. Voici sur cette offrande incomparable quelques pieuses réflexions d'Alvarez de Paz : « Enfin , ô Marie ! holocauste pur et sacré , vint le temps où vous deviez être consacrée au Seigneur , suivant le vœu de vos parents. Pénétrés de ces paroles du plus sage des rois : « Si vous avez fait un vœu au Seigneur, ne différez point de vous en acquitter (Ecclésiastique 5,3), » ils se hâtent de vous conduire au Temple et de vous offrir à Dieu comme ils le lui ont promis.
Leur empressement à présenter leur offrande est d'autant plus grand, qu'ils sont plus purs et plus saints; et pourtant, ils sont, avancés en âge , les glaces de la vieillesse pèsent déjà sur leurs tête , ils ne peuvent plus espérer aucune postérité ; ils vous ont obtenue à force de larmes et de prières; ils vous aiment de l'amour le plus tendre, mais la piété triomphe dans leurs âmes de tout mouvement de la nature; ils ne veulent pas retenir pour eux ce qui est saint, ils l'offrent de tout leur cœur au Saint des saints qui seul en est digne.
« Que j'apprenne d'eux, ô ma Souveraine! à délester mon extrême avarice, moi qui ai tant de peine à me détacher, pour l'amour du Seigneur, de choses si misérables; moi qui , lorsque j'y parviens, ne rougis pas de les lui offrir avec tant de froideur et de lâcheté. »
« Vos parents, ô Marie, vierge très-précieuse, quittent donc leur demeure; ils vous portent dans leurs bras, ils s'avancent pour vous consacrer à Dieu. La tristesse n'est point sur leur visage; ils marchent le cœur rempli de joie ; c'est sans arrière-pensée , pleins de bonne volonté , qu'ils vont offrir au Seigneur , non pas seulement ce qu'ils ont de meilleur, mais ce qu'il y a de plus saint et de plus excellent sur la terre et dans les cieux . »
Une sensibilité exquise , une profonde tendresse , ne sont pas incompatibles avec ce généreux détachement , comme pourraient le penser ceux qui ne comprennent rien à la vie de sacrifice. Au contraire , les cœurs les plus sensibles et les plus aimants ont toujours fait de la manière la plus paisible et même la plus joyeuse, les plus dures immolations. L'histoire des saints , depuis Abraham jusqu'à nos jours, en est une preuve continuelle. Comment Dieu a-t-il traité Marie, la meilleure des mères, et son Fils unique, Jésus, victimes volontaires et empressées de notre salut? Le sacrifice reçoit un nouveau prix de ce saint empressement, car Dieu chérit ceux qui donnent sans tristesse, sans trouble de cœur, mais avec une joie vraiment intime, ce qui leur est le plus cher.
Saint Germain, patriarche de Constantinople décrit ainsi leur sacrifice : « La vénérable Anne, toute pénétrée de cette auguste cérémonie, conduit avec son très-cher Époux, sa Fille bien-aimée; une troupe de tendres vierges l'escorte, et ils arrivent à l'entrée du Temple. A leur approche les portes s'ouvrent pour donner passage à la Porte du Dieu Emmanuel, et les pas de Marie sanctifient ce seuil sacré. Le sanctuaire resplendit de la lumière des lampes, mais l'éclat de cette Lampe vivante le remplit d'une splendeur bien plus vive; il s'éclaire à son entrée des reflets de sa céleste beauté. Les degrés de l'autel s'empourprent de l'auréole virginale qui ceint le front de la Vierge. Zacharie se réjouit de l'honneur de recevoir la Mère de Dieu; Joachim est dans une sainte joie d'offrir une oblation qui hâte l'accomplissement des prophéties. Anne consacre sa Fille au Seigneur avec des transports d'allégresse ; nos premiers pères sont inondés de consolation, et se sentent délivrés de la condamnation qui pèse sur eux ; les prophètes sont dans le ravissement , et , avec eux, tous les ordres des élus , toutes les âmes ornées de la grâce sanctifiante»
On peut dire de sainte Anne ce que l'Esprit-Saint dit de la Femme forte.
Ce qui précède nous autorise à appliquer à sainte Anne le portrait de la Femme forte tracé par Salomon dans les Proverbes. Plusieurs Pères, il est vrai, l'ont diversement interprété. Saint Augustin y voit l'image de l'Église; saint Bernard y reconnaît la Vierge Marie qui, par ses privilèges, ses vertus et ses mérites, a surpassé les anges et les hommes; suivant d'autres, ce portrait convient à la fois aux plus illustres femmes de l'Ancien Testament, à Marie et à l'Église.
Toutes ces interprétations ont leur fondement dans le texte que nous citons; mais si l'on examine ce chapitre attentivement, on verra qu'on peut l'appliquer aussi bien spécialement à sainte Anne, et que cette page admirable renferme comme l'abrégé de sa vie. Au reste , l'Église, en proposant à nos méditations cette page sacrée , dans l'office du 26 juillet , nous autorise elle-même à en faire cette application.
« Qui trouvera la femme forte? Son prix est au-delà et bien loin de toute limite. »
Qui nous dira les charmes ineffables de cette union, la parfaite estime de saint Joachim pour sainte Anne , leur mutuelle confiance, leur émulation à procurer la gloire de Dieu , leurs soupirs vers le Messie, les bénédictions que le Ciel répandait sur leurs entreprises, leurs champs et leurs troupeaux ? Qui vous dira leur tendre amour en Dieu, amour mille fois plus sincère que les affections dont le fondement est éphémère, et comment de communes épreuves , généreusement surmontées, finirent par l'épurer entièrement et le transformer en la plus parfaite charité ?
« Elle lui rendra le bien et non le mal , pendant tous les jours de sa vie. »
Quelle gloire pour saint Joachim d'avoir mérité une telle épouse ! Quelles richesses n'a-t-elle pas apportées dans sa maison ! Elle lui a donné par sa Fille une puissance réelle , quoique indirecte , sur toutes les créatures , et en quelque manière l'empire du ciel et de la terre. Quelle consolation d'avoir vécu de longues années avec une épouse si accomplie et si bonne , avec Anne la Toute-gracieuse!
« Elle a cherché la laine et le lin , elle a employé l'adresse de ses mains à les travailler. »
Comme les autres , ce verset concorde avec la tradition. Les âmes contemplatives n'ont jamais dédaigné le travail des mains ; mais sainte Anne ne s'en fit pas un simple délassement ou un honnête moyen d'existence; un mobile plus élevé stimula l'activité de ses doigts , la piété et la charité ; le prix de ses ouvrages était destiné au Temple et aux pauvres. Son exemple, suivi plus tard par de grandes reines et d'illustres princesses, sera toujours la condamnation des femmes désœuvrées, ou qui se font une sotte vanité de leur inaptitude aux travaux de l'aiguille et du fuseau.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: LE CULTE ET LE PATRONAGE DE SAINTE ANNE - Le R. Père Laurent Mermillod - 1866
Église St-Anne de Détroit - USA
« Elle est comme le vaisseau du trafiquant qui de loin apporte son pain. »
Dans le noble but de se rendre utile aux autres, elle tient sa maison dans un ordre parfait : elle en multiplie sagement les ressources , et se met ainsi en état de faire face à tous les besoins , à toutes les misères qui peuvent atteindre les gens de sa tribu et de son voisinage ; mais ce zèle actif et la charitable prévoyance de cette sainte maîtresse de maison, ne sont rien en comparaison de son ardeur à poursuivre les richesses spirituelles dont elle remplit sa grande âme. Uniquement occupée à plaire à son Dieu, d'un pied dédaigneux elle foule cette terre , et loin d'elle, en échange de ses aumônes , de ses jeûnes et de ses prières , elle cherche son pain véritable : un accroissement de désir et d'amour.
« Elle s'est levée dès la nuit pour distribuer leur nourriture à ses serviteurs et à ses servantes. »
Quelles attentions et quel oubli de soi-même ! Où sont les maîtresses de maison qui se font , à la suite de Notre-Seigneur Jésus-Christ , les servantes de leurs serviteurs comme sainte Anne? Quelle tendre préoccupation pour eux, et que la conduite de cette douce mère est propre à encourager notre dévotion ! Cette femme vénérable ne bornait pas sa sollicitude à des soins matériels, elle s'intéressait bien plus encore aux besoins spirituels de ses gens. Elle fut toujours à leur égard ce qu'elle est encore pour ceux qui l'honorent de leur confiance : elle travaille avec une merveilleuse efficacité à la sanctification de leurs âmes , et elle s'en fait comme la nourrice.
« Elle a considéré un champ et l'a acheté; du fruit de ses mains elle a planté une vigne. »
Quelle est cette terre attentivement considérée dont elle désire l'entière possession ? Quel est ce champ propre à la culture de la vigne? N'est-ce pas elle-même? Elle réussit à défricher ce riche fonds, à en extirper toutes les plantes inutiles et à le fertiliser. Par une vigilance incessante, par une lutte opiniâtre, elle arrive à se maîtriser parfaitement, et sur le règne de la Nature à jamais ruiné , elle établit le règne de la Grâce; par cette merveilleuse culture elle mérite de voir, sur son propre fonds, s'élever la tige de Jessé , espoir d'Israël , et , dans ce champ devenu sans tache , de faire prospérer la vigne qui produit le vin des vierges !
« Elle a entouré ses reins de force, et elle a affermi son bras. »
Elle a aimé la chasteté et elle s'est affermie contre toute concupiscence. Elle a espéré dans le Seigneur contre toute espérance, et elle a pris la vertu de la Grâce en échange des forces de la Nature. Sa pureté angélique fut digne de la Reine des anges.
« Elle a goûté et elle a vu que son trafic est bon; sa lampe ne s'éteindra point la nuit. »
Ce négoce de l'âme pure et généreuse, c'est cette communication, cet échange continuel d'elle-même avec Dieu; pour s'en remplir elle se vide de toute créature. Hélas! bien peu d'âmes ont le courage de s'appauvrir ; mais celles-là seules qui se dépouillent , goûtent par expérience les suavités de ce saint trafic, et rien ne saurait plus les arrêter dans leur essor : leur lampe brûle nuit et jour, elles courent de vertu en vertu. C'est ainsi que sainte Anne goûta et vit les suavités du Seigneur; c'est ainsi que , sans se donner aucun repos , elle avança toujours à pas de géant bien au-delà des plus saintes.
« Elle a porté sa main à des choses fortes, et ses doigts ont pris le fuseau. »
Suivant saint Augustin , ces robustes ouvrages et ce fuseau entre les doigts de la femme forte , désignent les actes de vertu, l'immolation de soi-même et la persévérance. Or de quoi n'est pas capable une âme qui ne vit plus à elle-même et qui obéit fidèlement aux inspirations divines? A quel genre de bonnes œuvres sainte Anne fut elle étrangère?
« Elle a ouvert sa main à l'indigent, elle a étendu ses bras vers le pauvre. »
La bonté et la compassion de sainte Anne sont incomparables; elle travaille, elle amasse ; le fruit de ses épargnes et de ses privations va soulager l'indigent. Elle porta, suivant les anciens récits, le culte du pauvre aussi loin que le culte extérieur de Dieu. Dans l'indigent elle entrevit Jésus, son Dieu ; elle préféra le servir dans son image vivante, dans ses plus humbles membres, plutôt que dans son sanctuaire de marbre. Le tiers de son revenu fut , il est vrai , consacré Temple; mais ses tendresses, ses amabilités et ses caresses furent pour le pauvre.
« Elle ne craindra pas pour sa maison le froid de la neige, car tous ses domestiques ont un double vêtement. »
Ce verset , non plus que les autres, ne doit pas seulement être pris à la lettre : les interprétations si variées des Pères en font jaillir une multitude de significations consolantes et propres à entre tenir la confiance des serviteurs de sainte Anne. Le froid de la neige, ce sont les périls et les séductions de la vie, la torpeur dans le service de Dieu, et surtout le péché qui répand dans les âmes les glaces de la mort spirituelle. Le double vêtement , c'est la foi , avec la grâce d'en suivre les clartés; c'est l'espérance, avec le courage; c'est l'amour triomphant de tout obstacle , la charité qui embrasse à la fois Dieu et les hommes. Or, que les serviteurs de sainte Anne soient abondamment pourvus de tous ces biens, et qu'ils traversent heureusement tous les écueils de la vie , dix-huit siècles l'attestent.
« Elle s'est fait une riche tenture ; son vêtement est de lin et de pourpre. »
L'ensemble de ses vertus est assimilé aux couleurs et au travail des tissus les plus précieux, et les deux plus remarquables d'entre elles forment comme son vêtement : c'est la chasteté symbolisée par le lin éclatant de blancheur ; c'est la charité signifiée par la pourpre.
« Son époux sera illustre, il siégera à l'entrée de la ville avec les sénateurs de la terre.»
Au dernier jour, son époux, dont elle est la gloire, servira d'assesseur au Souverain Juge , il siégera à la tête des Patriarches. Saint Joachim fut digne de sainte Anne, et tous deux , avec une noble émulation , s'aidèrent à la recherche de tout ce qu'il y a de plus parfait dans la vie de l'esprit. Voilà pourquoi l'éclat de l'un rejaillit sur l'autre.
« Elle s'est fait un voile et l'a vendu, elle a livré une ceinture au Chananéen. »
Suivant saint Grégoire , le voile indique le zèle à édifier les autres, soit par la parole , soit par les exemples de vertu et surtout de soumission; tandis que la ceinture signifie la mortification et la pénitence. Sainte Anne, modèle des épouses par ses vertus conjugales et domestiques , et par son ardeur à les communiquer , s'est fait ce riche voile, et elle abrite dans ses plis ceux qui ont recours à elle. Par ses pénitences, ses larmes et ses jeûnes , elle s'est fait cette forte ceinture qu'elle ne refuse pas à ceux dont le noble désir est de s'enrichir de ses plénitudes.
« Elle est vêtue de force et de beauté, et à son dernier jour le sourire sera sur ses lèvres.»
Qu'aurait à redouter Anne ou la grâce, parée de la force et de la perfection de sou âme ? Et que peuvent redouter ceux qu'elle assistera au dernier moment, elle si dévouée et si fidèle aux siens? Car la sagesse a parlé par sa bouche; par elle la clémence a rendu son oracle. Elle saura conduire ses serviteurs avec tant de sagesse, et intercéder pour eux si efficacement, qu'ils ne pourront se perdre.
« Elle a considéré les sentiers de sa maison et n'a pas mangé son pain dans l'oisiveté. »
Nul dans sa maison ne saurait échapper à son œil maternel : loin de se borner à goûter en repos les douceurs de son Dieu, loin de se livrer aux attraits d'une céleste contemplation , elle cherche à communiquer son bonheur à tous, et elle va au-devant des moindres nécessités de ceux qui lui sont chers.
« Ses fils se sont levés et l'ont appelée bienheureuse ; et son époux l'a comblée de louanges. »
C'est le cri universel de reconnaissance qui s'élève de toutes parts autour d'elle et qui retentit au ciel , sur la terre et jusqu'au sein des flammes expiatrices : Toute créature vous est obligée , dit saint Jean Damascène.
« Beaucoup de filles ont amassé des richesses, mais vous les avez toutes surpassées. »
En vertus, en mérites et en bontés, vous ne le cédez qu'à Marie, Marie récompense de votre admirable sainteté; et cette divine Mère, c'est vous qui nous l'avez obtenue et méritée. 0 sainte Anne, qui pourra nous acquitter auprès de vous? Que toutes vos œuvres vous soient une louange, une bénédiction ! Jouissez du Fruit de vos entrailles ; vivez et régnez à jamais glorieuse dans les Sacré-Cœurs de Jésus et de Marie. Amen.
Sainte Anne et saint Joachim ont droit à notre confiance.
On vient de le voir, ces bienheureux Patriarches occupent parmi les Saints une place à part; tous leur doivent leur Souveraine, et, par Elle et son divin Fils, leur bonheur. Les Anges ne sont pas étrangers à ces obligations, à cette reconnaissance, que l'adorable Trinité elle-même a voulu partager. Cette position exceptionnelle leur assure dans la cour céleste un crédit sans bornes ; leurs moindres désirs y sont comme des commandements auxquels on se rend avec un filial empressement. Pourrait-on refuser quelque chose à des parents tendrement aimés, dont on a reçu tant de bienfaits?
Dieu résisterait-il à la prière de ceux qui l'ont aidé, suivant leur pouvoir, dans l'œuvre de ses miséricordes? Il ne faut pas moins qu'une semblable position, jointe à une bonté inouïe, pour expliquer la multitude des grâces dues à leur puissante intercession. Faute d'en avoir fait l'heureuse expérience, on ne connaît généralement pas assez les bontés de sainte Anne; on semble ignorer trop généralement le soin qu'elle prend des siens, les attentions et les amabilités qu'elle prodigue à ceux qui l'honorent assidûment.
Le patronage de sainte Anne est donc d'une puissante efficacité, et il ne s'étend pas, comme celui de quelques bienheureux, à des nécessités spéciales, ou d'un genre restreint, il embrasse tous nos besoins et l'ensemble de tous nos maux, quels qu'ils puissent être. La sollicitude d'une mère ne doit-elle pas être proportionnée aux besoins de ses enfants? Nous savons en effet que Dieu donne à quelques-uns de ses amis, en récompense de leurs vertus, le pouvoir particulier de remédier à quelques-unes de nos infirmités.
On invoque traditionnellement, et avec succès, sainte Apollonie contre les maux de dents; sainte Lucie, contre les maux d'yeux; saint Biaise, dans les accès de suffocation ; saint Roch et saint Sébastien, contre la peste et les épidémies; saint Antoine de Padoue, pour retrouver les objets perdus; saint Benoît et saint Ignace de Loyola sont particulièrement redoutables aux démons, dont ils déjouent les trames ténébreuses, et dont ils dissipent les infestations. Saint Louis de Gonzague se plaît à assister la jeunesse studieuse, il s'emploie à la préserver de la contagion du vice ; saint Stanislas de Kostka fait triompher les vocations arrêtées par des oppositions ou des persécutions de famille.
Chaque contrée, chaque diocèse , chaque famille religieuse a ses protecteurs et ses traditions, et les fidèles savent fort bien à qui ils doivent recourir suivant l'objet de leur demande. Mais sainte Anne est une patronne universelle : comme son glorieux époux, elle a part au privilège accordé à saint Joseph, et dont Marie a la plénitude.
On a généralement coutume de n'invoquer avec assiduité et de n'honorer d'une manière plus spéciale que les saints dont on reçoit des grâces journalières, ou dont on a expérimenté le pouvoir par des miracles éclatants. Or, si l'on doit se guider dans la dévotion par ces marques extérieures, sainte Anne mérite sans aucun doute la plus grande vénération , la dévotion la plus tendre et la plus persévérante ; elle a droit à toutes les démonstrations du culte le plus filial.
Après la très-sainte Vierge et saint Joseph, de quelle autre pourrait -on raconter autant de faveurs obtenues et célébrer autant de prodiges? On a cessé de les constater depuis longtemps : ils sont de tous les lieux, de tous les siècles, et, dans certains pays privilégiés.
Prenons donc pour avocate et honorons chaque jour par de dignes hommages celle qui de toute éternité fut plus agréable au Seigneur que toutes les autres mères. Que les personnes engagées dans le mariage l'invoquent fréquemment : elle a sanctifié toutes les unions en devenant mère de Marie Immaculée ; que les veuves la révèrent : elle leur a tracé les règles de la modestie; que les vierges chérissent tendrement celle qui a enfanté la plus pure et la plus sainte de toutes les vierges; que les justes lui rendent leurs devoirs assidus : elle est le modèle de la justice; que les pécheurs s'empressent auprès d'elle : elle a donné le jour à celle dont le Fils change les pécheurs en justes; que tous l'aiment d'un ardent amour, puisqu'elle nous a donné la Mère de notre Sauveur.
PRATIQUES.
Choisir sainte Anne pour mère, patronne spéciale, guide spirituel.
Lui confier tous ses intérêts, se consacrer à son service.
Ne rien entreprendre sans la prier et la consulter.
Recourir à sa médiation dans tous les besoins de notre âme.
Professer le plus grand respect pour son nom, le proférer fréquemment avec piété.
Si l'on est invité à tenir quelque enfant sur les fonts baptismaux, lui imposer le nom de sainte Anne, ou seul ou associé au nom de Marie et à celui des autres saints, autant du moins que les exigences des familles le permettront.
En plusieurs contrées, le nom de sainte Anne se donne, comme celui de Marie, même aux garçons. Cette pratique est un moyen très-propre à multiplier les serviteurs et les servantes de cette tendre Mère.
S'engager, en des limites raisonnables, à ne rien refuser de ce qui nous serait demandé au nom de sainte Anne.
S'employer activement à la propagation de son culte, soit dans notre entourage, soit parmi les personnes de notre connaissance.
Inspirer sa dévotion aux petits enfants.
Répandre les livres propres à la faire aimer et invoquer.
Vénérer, faire vénérer ses images, ses statues, ses médailles ; en porter sur soi, en distribuer si on en a le moyen.
Visiter ses chapelles, et, si on le peut, faire un pèlerinage à l'un de ses sanctuaires.
Contribuer à la décoration de ses autels, y faire brûler des cierges.
Si notre fortune ou notre position sociale nous en donne la facilité, souscrire, après l'avoir provoquée, à la construction d'une chapelle ou d'une église en son honneur.
S'enrôler dans l'une de ses confréries et en suivre ponctuellement les règles.
Faire célébrer des messes en son honneur.
Se préparer à la célébration de sa fête par une neuvaine, la confession et la pratique de bonnes œuvres.
L'honorer spécialement chaque mardi de l'année.
Sanctifier le mois de juillet en son honneur.
Cette pratique a été récemment inaugurée à Bologne.
S'imposer quelquefois des privations, des sacrifices, des jeûnes, des aumônes dans le but de l'honorer, de mériter ses faveurs et de l'imiter.
Consoler les affligés, visiter les prisonniers, servir les malades et les vieillards, entreprendre toute autre œuvre de miséricorde, afin de nous rendre propice cette charitable Mère.
Se proposer l'imitation de ses vertus.
Réciter régulièrement, chaque jour ou chaque semaine, quelque prière en son honneur, comme ses litanies, son petit office ou quelque autre, suivant notre attrait ; en un mot, s'efforcer de l'honorer et de la servir de la manière la plus parfaite, sans présomption, sans superstition et sans singularité.
Rendre les mêmes devoirs de piété filiale à saint Joachim, persuadés que ces bons parents nous aideront puissamment à bien vivre et à bien mourir.
Prière
Seigneur, vous avez exaucé la prière des justes; vous avez écouté favorablement les supplications de vos aïeux , et vous leur avez donné celle qui vous a enfanté. (Saint André de Crète.} Je vous salue, Bienheureuse Anne, le Seigneur est avec vous : vous êtes bénie entre les femmes, et Marie, le fruit de vos entrailles, est bénie. Sainte Anne, Mère très-digne de la Mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort. Ainsi soit-il.
Fin
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
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