Voyage de Sa Sainteté le Pape François à Chypre et en Grèce et les enjeux de ce voyage

par Lumen Jeu 2 Déc 2021 - 17:48

Les cinq enjeux du voyage du pape François à Chypre et en Grèce

Migrants, œcuménisme, unité de Chypre, Méditerranée, santé du pape… Une analyse des principaux enjeux du 35e voyage apostolique à l’étranger du pape François. La visite du pape à Chypre et en Grèce s'étendra du 2 au 6 décembre.

Voyage de Sa Sainteté le Pape François à Chypre et en Grèce et les enjeux de ce voyage Voyage_du_pape_chypre

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Le pape prêt à embarquer pour son voyage en Méditerranée. - Vincenzo PINTO / AFP

Publié le 2/12/2021 à 10:15

1- Un voyage au chevet des migrants

En choisissant de retourner cinq ans après sur l’île de Lesbos pour y retrouver des migrants, le pape François montre sa volonté de braquer de nouveau les projecteurs sur les drames de l’immigration. Le pontife, qui depuis Rome ne cesse d’appeler l’Europe à considérer les migrants comme des personnes et non des chiffres, fera de ce 35e voyage une caisse de résonance pour alerter les consciences, à l’heure où des migrants se noient au large de Calais ou stationnent à la frontière biélorusse.

À Chypre, il se rendra à une prière œcuménique avec des réfugiés. On murmure qu’il pourrait faire revenir un groupe de migrants vers l’Italie. À la veille du départ du pontife, Vatican News, le média officiel du Saint-Siège, annonce déjà que 46 réfugiés de Lesbos viennent d’arriver à Rome via l’association Sant’Egidio, très proche du pape François.

2- Un pas pour l’œcuménisme

À Chypre comme en Grèce, le pontife rencontrera les chefs des Églises autocéphales locales, Chrysostome II et Hieronymus II. Une opportunité de dialogue œcuménique rare. François sera le deuxième pontife de l’histoire à fouler le sol chypriote, onze ans après le voyage de Benoît XVI. En Grèce, il marchera par ailleurs dans les pas de Jean Paul II, premier pape à se rendre dans ce pays depuis le Grand Schisme de 1054. Le Polonais avait à l’époque demandé pardon pour les torts commis par l’Église catholique contre les orthodoxes.

Malgré ce geste, Mgr Theodore Kontidis, évêque d’Athènes, confie qu’il existe toujours « une divergence, parfois une hostilité » entre Rome et l’Église de Grèce – qui a d’ailleurs refusé toute prière œcuménique durant le voyage. Il faut donc y voir une visite avant tout « protocolaire », confie Carol Saba, responsable de la communication de l’Assemblée des évêques orthodoxes en France.

Au contraire, l’Église orthodoxe de Chypre devrait montrer plus de signes d’ouverture : un temps de prière œcuménique est ainsi prévu lors d’une rencontre avec des migrants à Nicosie.

3- Le Saint-Siège pour l’unité de Chypre ?

« Le problème chypriote peut être résolu par un dialogue sincère et loyal entre les parties concernées, en tenant toujours compte du bien de toute l’île » : ces mots sont ceux du cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, prononcés à la veille du départ du pontife.

Depuis 1974, l’île est coupée en deux entre la République de Chypre, majoritairement orthodoxe au sud, et la République turque de Chypre du Nord – majoritairement musulmane-, reconnue uniquement par la Turquie. Depuis l’échec du plan de réunification Annan de 2004 – rejeté par les Chypriotes du Sud – un certain statu quo semble s’être installé, confie une source diplomatique sur place.

De son côté, le Saint-Siège « soutient tous les efforts » qui vont dans le sens de la réunification, « l’unique solution » pour la paix de l’île, explique Matteo Bruni, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège.

Le pape François ne devrait cependant pas aborder la question d’un point de vue politique, estime Mgr Selim Sfeir, archevêque des maronites de Chypre, mais « exprimer sa solidarité avec la population ».

4- Un voyage pour faire vivre la Méditerranée

« L’Europe ne peut ignorer la Méditerranée », déclarait le pape François à une semaine de son départ dans un message envoyé aux Chypriotes et aux Grecs. Une dimension géographique qui devrait irriguer l’ensemble du périple du pontife. « On pourrait parler de François l’Oriental ou de François le Méditerranéen », analyse Mgr Pascal Gollnisch, directeur général de l’Œuvre d’Orient, qui souligne l’importance de ces questions pour le pape.

Le prélat français rappelle le précédent du sommet de Bari, en février 2020, pendant lequel François avait esquissé une « théologie de l’accueil » pour la Méditerranée, s’opposant à « la rhétorique de l’affrontement » qui la domine actuellement. En février 2022, le pape argentin réunira une nouvelle fois tous les évêques de la Mare Nostrum à Florence lors d’un sommet avec des élus.

Le pape François voit la Méditerranée comme un bassin d’échanges, aujourd’hui fortement agité par la question migratoire. Le 28 novembre dernier, il déplorait le sort de ceux qui ont traversé cette mer « à la recherche d’une terre de prospérité et qui ont trouvé à la place une tombe ».

Mais la thématique est aussi liée à celle de l’œcuménisme, explique enfin l’orthodoxe français Carol Saba, qui considère que la Méditerranée devrait permettre de « rapprocher les deux poumons de la chrétienté ». Un rêve d’unité méditerranéenne présent en 2001 lors de la visite en Grèce de Jean Paul II mais qui s’est essoufflé depuis, constate-t-il.

5- L’état de forme du pape François

Onze jours après son retour d’Athènes, le pape argentin fêtera ses 85 ans, le 17 décembre, après une année marquée par des soucis de santé. 2021 avait en effet commencé par la « réapparition » de douleurs liées à une sciatique, douleurs qui l’avaient contraint à reporter certains rendez-vous.

Mais c’est surtout sa lourde opération au côlon, l’été dernier, qui a obligé le pontife à lever le pied. « Je suis toujours en vie », avait-il ironisé début septembre au micro d’une radio espagnole, balayant d’un trait les rumeurs de démission liée à son état de santé.

Depuis, l’agenda de l’évêque de Rome ne s’est pas désempli. Mais à la veille du départ du pape pour Chypre et la Grèce, le Vatican a laissé échapper l’idée selon laquelle le pontife devrait se ménager.

C’est de manière indirecte que l’information est sortie. Alors que des articles de presse s’interrogeaient sur le report de l’audience entre le pape François et les membres de la Commission Sauvé – prévue le 9 décembre, soit trois jours après le retour du pape à Rome -, Mgr Eric de Moulins Beaufort a voulu clarifier les choses, expliquant que la préfecture de la Maison pontificale avait eu « le devoir d’alléger » le programme du pape au retour de son voyage.

Agence I.Media
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