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A Nîmes, une nouvelle chapelle pour la Légion sera dédiée à Charles de Foucauld

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A Nîmes, une nouvelle chapelle pour la Légion sera dédiée à Charles de Foucauld Empty A Nîmes, une nouvelle chapelle pour la Légion sera dédiée à Charles de Foucauld

Message par Lumen Ven 17 Déc 2021 - 22:16

A Nîmes, une nouvelle chapelle pour la Légion sera dédiée
à Charles de Foucauld


Le 2e Régiment étranger d’infanterie, à Nîmes, veut aménager une nouvelle chapelle
pour remplacer l’ancienne, devenue trop petite.


A Nîmes, une nouvelle chapelle pour la Légion sera dédiée à Charles de Foucauld Chapelle_legion_nimes
L’aumônier et le soldat Mehdi, qui sera baptisé au printemps, discutent dans l’actuelle chapelle,
devenue trop exiguë. - D.BIZET - HANS LUCAS POUR FC

Publié le 15/12/2021 à 15:02


Au début des années quatre-vingts, un personnage surprenant s’était invité au camp du 2e Régiment d’infanterie étrangère (REI), à Nîmes : Serge Gainsbourg. Précédé d’une odeur de soufre après le scandale causé par sa réinterprétation de La Marseillaise façon reggae, l’enfant terrible de la chanson française était venu sceller sa réconciliation avec les légionnaires en offrant une bouteille de cognac, millésime 1928 – son année de naissance – au chef d’unité de l’époque. En partant, le chanteur aurait laissé de l’argent, permettant d’acheter un chapiteau pour les fêtes du régiment.


Un confessionnal de l'abbaye de Jouques

Une quarantaine d’années après, le régiment a un autre projet : déplacer et agrandir sa chapelle, devenue trop exiguë. Mais, pour l’heure, il n’a pas de mécène aussi illustre que le grand Serge. Lui, qui passa les derniers mois de sa vie à l’ombre de la basilique de Vézelay sans oser y rentrer, aurait sans doute été séduit par le projet. L’actuelle chapelle du régiment date de 2004. L’aumônier de l’époque l’a agrémentée d’icônes écrites par des moines orthodoxes serbes, lorsque les légionnaires sont revenus d’une mission au Kosovo. Aujourd’hui, elle doit déménager : les lieux vont accueillir les assistantes sociales du régiment, qui pourront y recevoir plus facilement les familles des légionnaires. Le site qui abritera la nouvelle chapelle est tout trouvé : il s’agit d’un grand – et froid – hangar, qui a servi tour à tour d’écurie, de club, de lieu de stockage et de salle de badminton. Pour s’y rendre, il faut déambuler dans le camp, entre un groupe faisant des tractions et l’autre se tapant allègrement dessus pour s’entraîner au combat rapproché.

« Nous devrons y installer un autel, un bureau, une sacristie, ajouter les cloisons, l’éclairage, enlever les enduits, percer des ouvertures, mettre un vitrail », liste le Père Pierre-Nicolas Chapeau, aumônier du régiment. Coût prévisionnel : 400 000 euros, qui ne peuvent pas être fournis par l’armée. Le « padre » et ses légionnaires comptent donc sur la bienveillance de donateurs. « La nouvelle chapelle pourra accueillir 150 personnes, l’équivalent d’une compagnie », note le prêtre, qui prend le temps de discuter avec l’adjudant-chef Yannick de l’opportunité ou non de monter tout de suite le confessionnal, acheté pour une modique somme à l’abbaye de Jouques. L’adjudant-chef est l’un de ceux qui ont été autorisés à nous parler. Ici, c’est un peu comme une sorte de monastère laïc : cloîtrés, levés tôt, alternant cérémonies et temps de travail, les légionnaires ont besoin d’une autorisation de leur supérieur pour s’exprimer. Ce qui ne les empêche pas d’être volubiles une fois lancés. Ou de glisser une phrase entre deux portes. « Dieu, on y croit tout le temps », nous glisse l’un de nos chauffeurs.

« Padre, il faut qu’on parle de ce qui se passe dans l’Église », entend-on dire avec un accent aux « r » roulants. Pas besoin de chapelle pour parler de Dieu ? Pas sûr. Pour commencer, Yannick nous tend un cahier sur lequel sont écrites avec application les raisons qui font que la chapelle est importante pour lui. Parmi celles-ci : « Lieu de recueillement qui donne du sens à notre engagement et d’atmosphère apaisée pour laisser notre cœur s’exprimer », « Lieu pour évacuer la fureur guerrière au profit de bâtisseurs de paix », « Lieu où Jésus est pour nous symbole d’espérance ». Après plus de vingt ans de Légion, cet homme reste pudique sur sa jeunesse. Il a passé ses onze premières années sous anonymat, histoire de se faire oublier. Issu d’une longue lignée de paysans, il a arpenté les quatre points cardinaux de la guerre : Côte d’Ivoire, Kosovo, Mali, Afghanistan. Sans se la jouer : « À la chapelle, on tombe le masque militaire, on se met à nu : il n’y a pas de grade. On est tous égaux devant Dieu ! » Un temps éloigné de la foi, il y est revenu après l’Afghanistan, théâtre d’opérations parmi les plus rudes. « Je crois beaucoup à la Providence. J’ai souvent ressenti cette main tendue. En Afghanistan, nous avons eu un combat compliqué, je ne pensais pas que nous allions survivre. Et nous sommes rentrés. Pour moi, ça a été le premier tutoiement de la Providence, qui ne m’a jamais quitté depuis. »



Charles de Foucauld : une rencontre providentielle


Canonisé en mai prochain, Charles de Foucauld est intimement lié au 2e REI. La future chapelle lui sera dédiée.

Chaque année, alors que Noël approche, les légionnaires construisent des crèches. Cette tradition est bien ancrée : « C’est une allégorie de la famille qu’on trouve quand on entre à la Légion », note le Père Pierre-Nicolas Chapeau. Cette année, les légionnaires participeront sans doute aussi à l’aménagement d’une crèche un peu particulière : leur future chapelle. Des anciens du régiment, devenus entrepreneurs en bâtiment, ont proposé leur aide. Car à la Légion, le lien avec les anciens est fort, et le respect des traditions également. Comme le prouve le choix du nom de la chapelle.

L’histoire a plus de cent ans, mais au 2e REI, elle est dans toutes les têtes.  Le 2 septembre 1903, au petit matin, un détachement de cent quinze légionnaires est attaqué par une bande de trois mille Marocains, près d’El Moungar, non loin de Tamanrasset. Les combats  sont féroces sous le soleil brûlant d’Afrique, et les légionnaires se retrouvent vite en difficulté :  leurs officiers sont blessés ou morts, et près de la moitié de la troupe est hors de combat. Cela n’empêche pas les survivants de tenir, envers et contre tout. Après plus de huit heures de combat, les légionnaires sont secourus. Cette résistance hors du commun connaît un retentissement fort en métropole, et la date du 2 septembre est devenue, depuis, celle de la fête du régiment.

C’est après les combats qu’interviendra Charles de Foucauld. Installé en Afrique du Nord, l’ancien saint-cyrien fêtard et trappiste ascétique rejoint les blessés et se met à leur service pour les soigner, les consoler et leur donner les sacrements. Il restera plusieurs semaines à leurs côtés. On raconte que pas un des blessés soignés par Charles de Foucauld ne mourra de la suite de ses blessures, ce qui aurait pu être considéré comme un miracle pour sa canonisation. Le petit frère universel remplacera donc le grand saint Antoine en tant que patron de la chapelle.

« Ce n’est pas une lubie du chef de corps ou de l’aumônier, même si la vie de l’aumônier, en immersion auprès des légionnaires, ressemble à celle de Charles de Foucauld, en immersion auprès des Touaregs », sourit  le Père Chapeau, qui se réjouit  que l’actualité lui fasse un clin-Dieu : l’ermite bienheureux de Tamanrasset a le bon goût d’être canonisé plus de cent ans après son martyre, en mai 2022, alors que les travaux de sa chapelle devraient être  bien avancés. Il rêve aussi de pouvoir faire réaliser un vitrail représentant le (futur) saint soignant les légionnaires blessés.

Pour les légionnaires, ce choix non plus n’est pas neutre. Particulièrement pour l’adjudant-chef Yannick : « Aussi loin que je me souvienne, la fête régimentaire a toujours été associée à Charles de Foucauld. Moi, j’ai passé onze ans sous anonymat à la Légion, et mon prénom d’emprunt était… Foucault. Avec un ”t”. »
Il n’y a pas de hasard, conclura le légionnaire. Il n’y a que la Providence.


Théophane Leroux


« La prière se passe de mots »

Forgée dans le métal de la guerre, sa foi est trempée dans la paix des brefs moments de recueillement qu’il réussit à s’offrir lorsque son emploi du temps le lui permet : une messe au cul d’un véhicule blindé dans les vents de sable maliens, une bénédiction de convoi… ou une pause dans la chapelle. « Parfois, la prière se passe de mots », souffle ce père de six enfants. « Il faut se replonger à l’intérieur de soi. Je me recentre sur ce qui m’a été offert : une femme merveilleuse, six enfants… Ça décuple l’envie de réussir. » Le grand saint Antoine, père des moines et patron des légionnaires, n’aurait sans doute rien à redire de cet apophtegme.

Moins expérimenté, le soldat Mehdi nous retrouve devant les portes de l’actuelle chapelle. Il sort d’une longue sieste – obligatoire, après vingt-quatre heures de garde sans interruption. Ce jeune homme d’origine marocaine sera baptisé au printemps prochain. Il recevra alors pour l’Église le nom d’Augustin, ce petit Nord-Africain devenu le plus grand théologien de tous les temps. « On peut prier partout, parce qu’on n’a pas souvent le temps de venir ici : je suis toujours en train de courir, de nettoyer mon arme… Mais c’est important d’avoir une chapelle, même pour ceux qui ne croient pas », explique le jeune homme de 21 ans, qui a tout quitté après les confinements successifs pour entrer dans les rangs verts et rouges. « On est vite à l’étroit ici, quand il y a des baptêmes ou des chapelles ardentes quand un camarade est décédé. » Lieu de pause dans un quotidien trépidant, de méditation, de réflexion, de recueillement, la future chapelle n’attend qu’une chose : qu’on puisse y faire des adorations nocturnes, pour que Dieu Lui-même aille jusqu’à dire, comme dans la chanson reprise par Gainsbourg : « Il m’a aimé toute la nuit, mon légionnaire. »

Il est possible de contribuer à  l’aménagement de la chapelle sur le site : eveche.fr/diocese-aux-armees/



Théophane Leroux
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