Fin du masque en intérieur : les fidèles vont-ils pouvoir communier dans la bouche ?

par Lumen Lun 7 Mar 2022 - 23:58

Fin du masque en intérieur : les fidèles vont-ils pouvoir
communier dans la bouche ?

Alors que Jean Castex vient d’annoncer la fin des masques en intérieur et du pass vaccinal dès le 14 mars, qu’en est-il des mesures dans les églises notamment pour la communion ? Famille Chrétienne fait le point.

Fin du masque en intérieur : les fidèles vont-ils pouvoir communier dans la bouche ? Communion_ciric

Fin du masque en intérieur : les fidèles vont-ils pouvoir communier dans la bouche ? Communion_ciric

Publié le 4/03/2022 à 07:00

Masques, paix du Christ « sans contact », gel hydro alcoolique remplaçant l’eau des bénitiers… La routine semble installée dans la vie des paroisses depuis que l’épidémie de Covid a fait surface et chamboulé le déroulement des célébrations il y a désormais près de deux ans. Au soulagement général, jeudi 3 mars, le Premier ministre Jean Castex a annoncé la fin du pass vaccinal mais aussi des masques en intérieur dès le 14 mars.

Dès lors, faut-il attendre d’autres allègements des mesures sanitaires dans les églises ? Si le port du masque n’influait qu’à la marge sur le cours de la liturgie, une autre mesure suscite aujourd’hui des attentes particulièrement fortes : la communion. Sujet déjà sensible dans l’Eglise, son mode de distribution a causé chez certains fidèles un véritable tiraillement depuis le début de l’épidémie entre l’exigence sanitaire et celle du sens profond donné à ce rituel central de la messe, qui les poussait à communier habituellement à la bouche. Jusqu’à provoquer de véritables cas de conscience chez les prêtres et évêques chargés de mettre en place un protocole sanitaire approprié.

Consignes données par les évêques

Pour l’heure, le document faisant foi est celui édicté par la Conférence des évêques de France (CEF) fin mai 2020, après les directives gouvernementales du décret du 23 mai. Contactée par Famille Chrétienne après les annonces de Jean Castex, la CEF indique qu’elle n’a pas prévu pour l’heure de nouvelles directives et que ce document de mai 2020 reste bien valable en attendant. Que dit-il ? Il commence par édicter plusieurs principes généraux, parmi lesquels figure le suivant : « Les dispositions pratiques et éléments de discernement qui suivent seront appréciés selon les diocèses, les moyens de leur application, les lieux ainsi que le rythme de succession des célébrations. Une évaluation régulière sera réalisée ». Avant d’ajouter dans le même sens : « sous l’autorité de l’évêque, les curés de paroisse en concertation avec leurs équipes pastorales veilleront à l’application de ces recommandations. » Parmi elles, voici la préconisation concernant la distribution de la communion : « Les ministres de la communion veilleront à déposer l’hostie respectueusement dans la main tendue de la personne qui la reçoit (sans toucher la main de cette dernière). »

En résumé, la CEF laisse le soin à chaque évêque de décider de la mise en place des recommandations qui lui semblent appropriées parmi celles qu’elle suggère, y compris pour la communion, ou de déléguer cette responsabilité à chaque curé de paroisse.

Les astuces des prêtres dans les paroisses

Concrètement, les situations sont variables d’un diocèse à un autre, et une forme de flou persiste dans certains d’entre eux. Le seul ayant publié un communiqué évoquant explicitement la question semble être le diocèse de Paris, ayant indiqué parmi une série de règles en vigueur « à partir du 19 juillet 2021 » : « Communion donnée uniquement sur la main par un ministre porteur d’un masque ». Contacté par Famille Chrétienne, le diocèse a fait savoir que « compte tenu de l’évolution de l’épidémie, il est laissé à la libre appréciation de chaque curé la possibilité de donner la communion dans la bouche. » Ainsi plusieurs paroisses s’organisent, dans certaines d’entre elles une file spéciale est faite pour ceux qui souhaitent communier sur la langue, dans une autre, la tendance est inversée et la seule file à part est réservée à ceux qui souhaitent recevoir l’hostie à la main. Ailleurs encore, ceux qui souhaitent communier sur la langue sont priés de s’avancer en dernier.

Au Puy en Velay, « on demande habituellement à ce que les gens communient dans la main, sauf dans les églises où une partie considérable des fidèles communiaient à la bouche. Dans ce cas ils doivent faire une file à part, résume le vicaire général du Puy-en-Velay à Famille Chrétienne. Cela concerne peu de paroisses et n’a pas créé de tensions spécifiques dans le diocèse ». A Bourges, « Mgr Beau a toujours appelé à exercer "charité, intelligence, sens de la responsabilité" sur cette question », résume le diocèse. A Fréjus-Toulon, « nous rappelons aux prêtres de respecter les mesures sanitaires (port du masque, distanciation, gel), mais les paroisses sont libres ensuite de mettre en place ou non d’autres mesures notamment pour la communion ».

Situations sensibles

Dans d’autres diocèses, comme à Bayonne, Nantes ou Orléans, on s’appuie sur les textes officiels stipulant que personne n’est habilité à interdire à un fidèle de communier à la bouche. Parmi ces textes, l’instruction de 2002 « Redemptionis sacramentum » de la congrégation du culte divin qui affirme que « tout fidèle a toujours le droit de recevoir, selon son choix, la sainte communion dans la bouche. » Une lettre en ce sens a été envoyée par Mgr Aillet aux curés de Bayonne en décembre 2020 et par le vicaire général pour le diocèse de Nantes en juin 2021. Ainsi, pour marier cette exigence avec celles de la crise sanitaire, les curés ont mis en place quelques astuces. Dans une paroisse orléanaise, « le prêtre qui distribue la communion tient un coton imbibé de gel hydroalcoolique contre l’ostensoir pour essuyer ses doigts », explique une paroissienne. De son côté, un curé de Nantes fait « régulièrement des annonces, la dernière étant pas plus tard qu’hier, pour dire aux fidèles souhaitant communier à la bouche de venir en dernier. » Une solution adoptée par de nombreux curés contactés par Famille chrétienne aux quatre coins de France.

Dans d’autres diocèses encore comme Rennes, Lyon, La Rochelle, Strasbourg ou Besançon ayant répondu à Famille Chrétienne, aucune consigne spécifique n’a été donnée, les évêques comptant sur la responsabilité des curés pour appliquer la recommandation de la CEF dans leurs paroisses. Le sujet demeure très sensible dans certains lieux, si bien que le diocèse de Toulouse n’a par exemple pas souhaité s’exprimer directement auprès de Famille Chrétienne de peur de raviver des tensions. L’abbé Simon d’Artigues qui gère l’ensemble paroissial Saint-Etienne explique qu’« aucune recommandation spécifique n’a été émise, le document de la CEF faisant foi ». Dans sa paroisse il privilégie la communion à la main, tout en invitant les prêtres à ne pas refuser à tout prix la communion à la bouche. Ces fidèles doivent plutôt se présenter en fin de file. « Mon but est de garantir l’unité de la communauté, et sur ce sujet très sensible je crois qu’il faut beaucoup de délicatesse pour éviter de durcir les positions des deux camps, considère le curé toulousain. Il y a des gens pour lesquels c’est un réel arrachement de communier dans la main, et pour d’autres, voir des gens communier à la bouche provoque une grande crainte d’être contaminés, nous devons les prendre en compte avec respect. » Un mot d’ordre qui restera sans doute valable dans les prochains mois si ce n’est les prochaines années, si d’aventure le Covid devait faire partie intégrante du fameux « monde d’après »…

Camille Lecuit
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