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3 juin. Sainte Clotilde, reine de France. 545.

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Message par Lumen Dim 5 Juin 2022 - 19:56

3 juin. Sainte Clotilde, reine de France. 545.

- Sainte Clotilde, reine de France. 545.

Pape : Vigile. Roi de Paris : Childebert Ier. Roi des Francs : Clotaire Ier.

" Après qu'elle eût invoqué Dieu qui gouverne et sauve tout, Dieur changea l'esprit du roi."
Esther, XV, 5.



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En cette saison où l'Office du Temps nous amène à considérer les premiers développements de la sainte Eglise, il entrait dans les vues de l'éternelle Sagesse que les fêtes des Saints complétassent, comme toujours, les enseignements du Cycle mobile. Le Paraclet, dont l'avènement est si près de nous, doit remplir la terre (Sap. I, 7.) ; l'Homme-Dieu l'envoie conquérir l'espace et assurer les temps à son Eglise. Or, c'est en soumettant les royaumes par la foi, qu'il doit former au Christ son empire ; c'est en faisant que l'Eglise s'assimile les nations, qu'il donne à l'Epouse croissance et durée. Voici donc qu'au temps même où il vient de nouveau s'emparer du monde, les coopérateurs de l'Esprit dans son oeuvre de conquête apparaissent de toutes parts au ciel de la sainte Liturgie.

Mais l'Occident surtout concourt à former la constellation qui vient mêler ses clartés radieuses aux feux puissants de la Pentecôte. Et, en effet, l'établissement de la chrétienté latine ne manifestera-t-il pas plus que nulle part ailleurs, dans ces lointaines contrées, la toute-puissance de l'Esprit du Christ ? Aussi voyez comme, partis d'Orient, les deux astres incomparables des princes des Apôtres se hâtent, sur notre horizon, vers le zénith glorieux qu'ils atteindront en ce mois même ; hier Jean, le disciple bien-aimé, projetait sur la Gaule ses derniers, ses plus durables rayons; quelques jours plus tôt, c'était le pape Eleuthère et le moine Augustin joignant leur action à travers les siècles, pour porter la lumière du salut dans l'extrême Occident, chez les Bretons et les Angles ; après-demain, Boniface illuminera la Germanie.

Mais aujourd'hui, quelle autre étoile se lève en nos régions ? Son doux éclat rivalise en vertu avec la lumière des plus puissants flambeaux du Christ. La ville de Lyon, préparée par le sang des martyrs à cette seconde gloire, vit grandir dans son sein l'astre nouveau ; comme d'eux-mêmes, après trois siècles, ses rayons se mêlent à ceux de Blandine. Comme Blandine en effet, Clotilde est mère ; et la maternité de l'esclave , engendrant pour le ciel dans sa virginité les martyrs gaulois, préparait la naissance des Francs au Christ-Dieu du sein de leur première reine. Clotilde n'eut point comme Blandine à verser son sang ; mais d'autres tortures l'atteignirent cruellement toute jeune encore, et mûrirent son âme pour les grandes destinées que Dieu réserve aux privilégiés de la souffrance.

La mort violente de son père Chilpéric détrôné par un usurpateur fratricide . la vue de ses frères massacrés, de sa mère noyée dans le Rhône, sa longue captivité à la cour arienne du meurtrier qui amenait avec lui l'hérésie sur le trône des Burgondes, développèrent en elle le même héroïsme de foi qui soutenait Blandine dans l'enfantement douloureux de l'amphithéâtre, et devait faire également de la nièce de Gondebaud la mère de tout un peuple. Unissons donc leurs noms dans un même hommage ; et, prosternés aux pieds du Père souverain de qui découle toute paternité sur la terre et au ciel (Eph. III, 15.), adorons ses voies remplies pour nous de tendresse et d'amour.

Dieu, qui n'a tiré du néant l'univers visible que pour manifester sa bonté, a voulu que l'homme, sortant de ses mains sans pouvoir encore contempler directement son auteur, rencontrât comme première traduction de l'amour infini la tendresse d'une mère : traduction sublime, irrésistible dans sa douceur, et dont l'exquise pureté donne à la mère cette facilité qui n'appartient qu'à elle seule d'achever par l'éducation, dans l'âme de son enfant, la reproduction complète de l'idéal divin qui doit s'imprimer en lui.



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Clotilde apportant des subsides à un ermite.
La cité de Dieu. Saint Augustin. Paris. XVe.

Mais la fête d'aujourd'hui nous révèle combien plus sublime encore, plus puissante et plus étendue que dans l'ordre de la nature, est la maternité dans l'ordre supérieur de la grâce. Lorsque Dieu en effet, venant parmi nous, voulut prendre chair au sein d'une fille d'Adam, la maternité s'éleva jusqu'à la limite extrême qui sépare les dons d'une simple créature des attributs divins. En même temps qu'elle s'élevait par delà les deux, elle embrassait le monde , rapprochant tous les hommes, sans distinction de familles ou de nations, dans la filiation de la Vierge-Mère. Car l'Adam nouveau, modèle parfait de la race humaine et notre premier-né (Rom. VIII, 29. ; Heb. II, 11-12.), nous voulait pour frères en toute plénitude, frères en Marie comme en Dieu (Matth. I, 25 ; Heb. I, 6.).

La Mère de Dieu fut donc proclamée celle des hommes au Calvaire ; du haut de sa croix, l'Homme-Dieu replaçait sur la tète de Marie la couronne d'Eve, brisée près de l'arbre fatal. Constituée l'unique mère des vivants par cette auguste investiture (Gen. III, 20.), Notre-Dame entrait une fois de plus en communication des privilèges du Père qui est aux deux. Non seulement elle était, par nature comme lui, mère de son Fils éternel ; mais de même que toute paternité découle ici-bas de ce Père souverain, et lui emprunte sa dignité suréminente : toute maternité ne fut plus dès lors, dans un sens très vrai, qu'un écoulement de celle de Marie, une délégation de son amour, et la communication de son auguste privilège d'enfanter à Dieu les hommes qui doivent être ses fils.

Les mères chrétiennes ont bien le droit de s'en glorifier, car c'est là leur grandeur ; leur dignité s'est accrue par Marie jusqu'à un point que n'aurait pu soupçonner la nature. Mais en même temps, sous l'égide de Marie, comme hier en notre Blandine, non moins réelle pour Dieu que la leur apparaîtra maintes fois, désormais, la maternité des vierges ; comme Clotilde aujourd'hui, souvent aussi l'épouse, préparée par l'appel de Dieu et la souffrance, se verra douée d'une fécondité plus grande mille fois que celle qui lui venait de la terre. Heureux les hommes issus, par la faveur de Marie, de cette fécondité surnaturelle qui réunit toutes les grandeurs ! Heureux les peuples auxquels une mère fut donnée par la divine munificence !

L'histoire nous apprend que les fondateurs des empires ont toujours eu la prérogative redoutable d'imprimer aux nations le caractère, néfaste ou bienfaisant, qui marque leur existence à travers les siècles. Combien parfois on sent, dans l'impulsion qui leur fut donnée pour détruire plutôt que pour édifier, le manque d'un contrepoids à la prépondérance du pouvoir ! C'est que les peuples anciens n'avaient point de mères ; on ne peut donner ce titre aux héroïnes qui n'ont transmis leurs noms à la postérité, que pour avoir rivalisé d'ambition et de faste avec les conquérants. Il était réservé aux temps chrétiens de voir s'introduire dans la vie des nations cet élément de la maternité, plus salutaire, plus efficace en son humble douceur, que celui qui résulte des qualités ou des vices, de la puissance ou du génie de leurs premiers princes.



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Sainte Clotilde en prière au pied du tombeau de saint Martin.
Détail. Charles Van Loo. XVIIIe.

Dans le christianisme même, la sainteté que demande chez la créature qui en est investie cette maternité sublime, en fait l'apanage exclusif de l’Eglise catholique, seule sainte, et des nations qui sont dans l'Eglise ; les empires issus du schisme ou de l'hérésie n'ont point à y prétendre. Rejetés par ce côté au rang des nations païennes, ils pourront exceller comme elles dans la richesse ou la force, être appelés même d'en haut au sinistre honneur d'être les fléaux de Dieu contre des enfants indociles ; mais il restera toujours dans leur formation sociale, dans leur vie entière, un vide immense : sortis de la terre directement, fils de leurs œuvres, comme on dit aujourd'hui, ils n'ont point bénéficié des prières et des larmes d'une mère ; son sourire n'a point éclairé leurs premiers pas, adouci leur enfance. En conséquence, selon le mot du poète latin, ils ne seront point admis à la table divine, ni aux intimités d'une alliance véritable avec le ciel (Virg. Egl. IV. : "... Cui non risere parentes, nec deus hunc mensa, dea nec dignata cubili est ") ; et jamais la vraie civilisation n'avancera par leurs mains.

Les peuples fidèles, au contraire, sont pour l'Eglise, qui est le royaume de Dieu, comme les familles dont le rapprochement sous une même unité sociale forme la nation ; leur vocation, d'ordre avant tout surnaturel, appelle en eux une plénitude de vie au développement de laquelle s'emploient, dans l'éternelle Trinité, la Toute-Puissance, la Sagesse et l'Amour. Aussi, bien que la nature ait l'honneur de fournir ici les ternies du langage et les points de comparaison, ses procèdes et sa puissance sont tellement surpassés à ces hauteurs divines, qu'elle n'y apparaît plus que comme une faible image, presque fautive à force d'être incomplète. Mais parmi les nations baptisées dans la foi au Christ et la soumission à son vicaire, c'est à la France surtout qu'il appartient de s'écrier avec le Psalmiste :

" Ô Seigneur qui avez prévu mes voies et longtemps à l'avance fixé mes destinées, votre science, dans le travail de ma formation, a été merveilleuse ! Mes reins vous appartiennent ; avec ses aspirations et ses pensées, tout mon être est à vous ; car vous m'avez reçu dans vos bras comme votre oeuvre, lorsque je sortais du sein même de ma mère. Aucun de mes os qui vous soit caché, à vous qui l'avez façonné dans le secret des entrailles maternelles et qui connaissez l'imperfection de mes premières origines." (Psalm. CXXXVIII.).

Il fallut du temps pour dompter les instincts farouches des guerriers de Clovis, et préparer leur épée à la noble mission dont elle était appelée à devenir, dans la main de Charlemagne et de saint Louis, l'instrument glorieux. On a dit avec raison que ce travail fut l'honneur des évêques et des moines. Mais, pour être complet et faire preuve d'une science plus approfondie des voies de la Providence, il eût convenu d'oublier moins la part que devait avoir la femme, et qu'elle eut en effet, dans l'œuvre de la conversion et de l'éducation qui firent du peuple franc le premier-né de l'Eglise.

C'est Clotilde qui conduit les Francs au baptistère de Reims, et présente à Rémi le fier Sicambre transformé beaucoup moins par les exhortations du saint évêque, que par la vertu des prières de la femme forte élue de Dieu pour enlever cette riche dépouille à l'enfer. Quelle virile énergie, quel dévouement à Dieu nous révèlent les démarches de cette noble fille du roi détrôné des Burgondes, qui, sous l'oeil soupçonneux de l'usurpateur meurtrier de sa famille, attend l'heure du ciel dans l'exercice de la charité et le silence de l'oraison : jusqu'à ce que, le moment venu enfin, ne prenant conseil que de l'Esprit-Saint et d'elle-même, elle s'élance pour conquérir au Christ cet époux, qu'elle ne connaît pas encore, avec une vaillance qui dépasse celle des guerriers formant son escorte !



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Saint Remi accueille Clovis et sainte Clotilde à Reims.

La force et la beauté (Prov. XXXI.) sont véritablement sa parure au jour des noces ; le coeur de Clovis a bientôt compris que les conquêtes réservées à cette épouse, l'emporteront sur le butin ravi jusque-là par ses armes. Clotilde, au reste, a trouvé sur les rives de la Seine son oeuvre préparée ; depuis cinquante ans, Geneviève est debout, défendant Paris contre l'invasion des hordes païennes, et n'attendant que le baptême du roi des Francs pour lui ouvrir ses portes.

Toutefois, lorsque dans cette même nuit de Noël qui vit Notre-Dame donner au monde l'Enfant divin, Clotilde a enfanté pour Marie à l'Eglise son peuple premier-né, l'oeuvre est loin d'être achevée ; il s'agit de faire maintenant de ce peuple nouveau, dans les labeurs d'une lente éducation, la nation très chrétienne. L'élue de Dieu et de Notre-Dame ne défaille point à sa tâche maternelle. Que de larmes pourtant il lui faudra verser encore ! Que d'angoisses sur des fils dont la violence de race semble indomptable, livrés par l'exubérance même de leur riche nature à la fougue des passions qui les pousse en aveugles aux crimes les plus atroces !

Les petits-fils qui grandissaient près d'elle, massacrés dans un infâme guet-apens par des oncles perfides ; des guerres fratricides, promenant la dévastation sur tout ce territoire de la vieille Gaule qu'elle avait purgé du paganisme et de l'hérésie ; et, comme pour compenser l'amertume des discordes intestines par une autre douleur du moins plus glorieuse, sa fille chérie, Clotilde la jeune, mourant d'épuisement à la suite des sévices endurés pour sa foi de la part d'un époux arien : tout montre assez à la reine des Francs que si le ciel l'a choisie pour être leur mère, il entend lui en laisser la peine aussi bien que l'honneur. Ainsi le Christ traite les siens, quand ils ont sa confiance. Clotilde l'a compris : depuis longtemps déjà, veuve de son époux, privée de l'assistance di Geneviève qui a suivi de près Clovis au tombeau, elle s'est retirée près du sépulcre de son glorieux précurseur, le thaumaturge des Gaules, pour y continuer avec l'aide de Martin, dans le secret de la prière et l'héroïsme de la foi qui soutint son enfance, la préparation du nouveau peuple à ses grandes destinées.



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Travail immense, auquel une seule vie ne pourrait suffire ! Mais la vie de Clotilde, qui ne doit point voir s'achever la transformation tant désirée, ne se clora pas qu'elle n'ait, à Tours, serré dans ses bras Radegonde, son illustre belle-fille ; investie de sa sublime maternité dans une étreinte suprême, elle l'envoie poursuivre près de la tombe d'Hilaire, cet autre vrai père de la patrie, l'intercession toute-puissante qui fera la nation. Puis, lorsque Radegonde elle-même, sa tâche de souffrance et d'amour accomplie, devra quitter la terre, Bathilde bientôt paraîtra, consommant l'œuvre en ce siècle septième, dont on a pu dire qu'il sembla comme celui où, prêt enfin pour sa mission, " le Franc fut fiancé à l'Eglise et armé chevalier de Dieu " (Hist. de S. Léger. Introduction.).

Clotilde, Radegonde, Bathilde, mères de la France, se présentent à nous reconnaissables toutes les trois aux mêmes traits pour leurs fils : préparées toutes trois, dès le début de la vie, au dévouement qu'exige leur grande mission, par les mêmes épreuves, la captivité, l'esclavage, par le massacre ou la perte des leurs ; toutes trois ne portant sur le trône que l'indomptable amour du Christ-Roi et le désir de lui donner leur peuple ; toutes trois enfin déposant le diadème au plus tôt, afin de pouvoir, prosternées devant Dieu dans la retraite et la pénitence, atteindre plus sûrement l'unique but de leur ambition maternelle et royale. Héritières d'Abraham en toute vérité, elles ont trouvé dans sa foi (Rom. IV, 18 ; Heb. XI, 11.) la fécondité qui les rendit mères des multitudes que si longtemps notre sol, arrosé de leurs larmes , produisit sans compter pour le ciel.

En nos temps amoindris eux-mêmes, ils sont nombreux encore, ceux que, chaque jour, la terre des Francs envoie rejoindre dans la vraie patrie les heureux combattants des jours meilleurs ; et tous, n'étant plus soumis aux distractions d'ici-bas, ont vite, là-haut du moins, reconnu leurs mères. A la vue de cette affluence toujours croissante de nouveaux fils pressant leurs rangs dans l'allégresse autour de leurs trônes, leur cœur débordant d'amour renvoie au Père souverain la parole du Prophète :

" Qui donc m'a engendré ceux-ci ? Moi la stérile et qui n'enfantais pas, moi la captive et l'exilée, qui m'a nourri tous ces fils ? J'étais seule, abandonnée ; et tous ceux-là, où étaient-ils ?
- En vérité, répond le Seigneur, tous ceux-là seront ta parure, et tu en seras entourée comme l'épouse de ses joyaux. Tes déserts, tes solitudes, la terre de ruines qui vit ta souffrance, seront remplis des fils de ta stérilité, jusqu'à en être trop étroits pour les contenir. Les rois seront tes nourriciers, et les reines tes nourrices. Et tu sauras que c'est moi, le Seigneur, au sujet de qui ne seront point confondus ceux qui l'attendent."
(Isai. XLIX, 18-23.).



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Sainte Clotilde et sa famille ; notamment trois de ses petits fils
dont le futur saint Cloud. Grandes chroniques de France. XIVe.

Clotilde, fille du roi Chilpéric, après le meurtre de sus parents, fut élevée par son oncle Gondebaud, roi de Bourgogne, qui la donna en mariage à Clovis encore païen. Etant devenue mère, elle fit baptiser son premier-né, avec la tolérance plutôt que l'assentiment de Clovis. L'enfant, à qui on avait donné le nom d'Ingomer, étant venu à mourir lorsqu'il portait encore la robe blanche des néophytes, Clovis se plaignit vivement à Clotilde, attribuant la perte de son fils à la vengeance des dieux de ses pères irrités du mépris qu on avait fait de leur divinité. Mais Clotilde disait :
" Je rends grâces au tout-puissant Créateur de toutes choses, de ce qu'il ne m'a pas jugée indigne de mettre au monde un fils appelé à partager son royaume."

Ayant mis au monde un second fils, elle voulut aussi qu'il fût baptisé ; on lui donna le nom de Clodomir. L'enfant étant tombé malade, le roi affirmait déjà qu'il allait avoir le même sort que son frère, lorsqu'il fut guéri par les prières de sa mère. Cependant la reine ne cessait d'exhorter son époux à repousser l'idolâtrie pour adorer le Dieu unique en trois personnes ; mais Clovis se tenait attaché aux superstitions des Francs, jusqu'à ce qu'un jour...



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Voeu de Clovis à la bataille de Tolbiac. Fresque de Paul-Joseph Blanc.
Ancienne église Sainte-Geneviève, aujourd'hui profanée
et transformée en " Panthéon ". Paris. XIXe.

En 496 Clovis fut contraint de mener une campagne contre les Alamans, dont l'établissement jouxtait la frontière Est des nouveaux territoires saliens. Ceux ci ne cessaient d'agresser les Francs Rhénans du royaume de Cologne. Clovis vint donc au secours de Sigebert le Boiteux, allié de Clovis, roi de Cologne, et qui devait son surnom à une blessure qu'il reçu des Alamans.

La bataille qui eut lieu, à Tolbiac (aujourd'hui Zülpich au sud ouest de Cologne), dégénéra en un violent massacre et son armée de Francs-Saliens fut sur le point d'être complètement exterminée. Après avoir invoqué en vain ces dieux païens, Clovis implora avec succès le Dieu de Clotilde. La bataille, près d'être perdue, fut une complète victoire et le roi des Alamans fut tué d'une flèche.

Clovis décida alors de sa conversion au Christianisme. Les Alamans firent leur soumission, abandonnant le cours supérieur du Rhin, désormais placé solidement sous le contrôle de Sigebert le Boîteux.

Clotilde, pleine de joie, vint au-devant de lui jusqu'à Reims, ayant su la manière dont tout s'était passé. Appelé par elle, saint Remi, et plusieurs autres illustres prélats choisis par lui, instruisirent Clovis des mystères de la foi, le baptisèrent et lui conférèrent l'onction du saint Chrême.



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Bataille de Tolbiac. Ary Scheffer. Château de Versailles. XIXe.

Après la mort de Clovis, Clotilde se fixa à Tours, où elle passa le reste de sa vie au tombeau de saint Martin, se livrant aux veilles, à l'aumône et aux autres œuvres de la piété, exerçant sa munificence envers les églises et les monastères. Clodomir ayant été tué dans la guerre de Bourgogne, elle éleva près d'elle ses petits-fils, Théobald, Gontaire et Clodoald.

Enfin, pleine de jours, elle rendit son âme au Seigneur, à Tours, et son corps fut transféré à Paris, escorté de chœurs qui chantaient des psaumes. Les rois Childebert et Clotaire ses fils l'ensevelirent à côté de Clovis, dans le sanctuaire de la basilique de Saint-Pierre qui a reçu depuis le nom de Sainte-Geneviève.

L'éclat des miracles ayant illustré le tombeau de la sainte reine, on leva de bonne heure son corps pour l'honorer, et il fut placé dans une châsse. Toutes les fois que la ville de Paris éprouvait quelque calamité, nos pères avaient coutume de porter ce saint corps en procession avec un pieux appareil.



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A la fin du dix-huitième siècle, les bêtes féroces révolutionnaires s'étant emparés du gouvernement, et tandis que les reliques des Saints étaient profanées dans tout Paris et dans toute la pauvre France par une fureur sacrilège, les ossements de la bienheureuse reine, grâce à une admirable providence de Dieu, furent soustraits par des personnes pieuses.

La paix ayant été enfin rendue à l'Eglise, les saintes reliques furent placées dans une nouvelle châsse et déposées dans l'église des Saints-Leu-et-Gilles à Paris, où elles sont entourées des honneurs d'un culte fervent.

Votre gloire est grande sur la terre et au ciel, Clotilde, mère des peuples. Non seulement vous avez donné à l'Eglise la nation très chrétienne ; mais elles-mêmes, la catholique Espagne et l'île des Saints remontent jusqu'à vous devant Dieu par Ingonde et Berthe, vos illustres petites-filles. Plus heureuse que Clotilde la jeune, Ingonde, soutenue par Léandre de Séville, ramène à l'intégrité de la foi son royal époux Herménégilde, et l'élève jusqu'au martyre; Berthe accueille Augustin sur la terre des Angles, et, selon la parole de l'Apôtre qui avait annoncé que le mari infidèle serait sanctifié par la femme fidèle (I Cor. VII, 14.), Ethelbert est conduit des ténèbres du paganisme au baptême et à la sainteté. Depuis, en combien de lieux dans notre Europe et sur combien de lointains rivages, les fils de la nation dont vous êtes mère directement n'ont-ils pas propagé cette lumière de la foi que vous leur aviez donnée : soit que l'épée fût en leurs mains la protectrice du droit qui convient à l'Epouse de l'Homme-Dieu d'enseigner librement partout et toujours ; soit qu'eux-mêmes, se faisant missionnaires et apôtres, portassent, loin de toute protection possible, aux peuples infidèles leurs sueurs et leur sang ? Heureuse êtes-vous d'avoir, la première, engendré au Christ-Roi une nation pure de toute tache hérétique et vouée à l'Eglise dès son premier instant! C'est à bon droit que, par un juste hommage envers la Mère de Dieu, l'église Sainte-Marie de Reims fut, au jour de Noël 496, choisie comme lieu de cette insigne naissance ; car Notre-Dame vous fit part alors de sa glorieuse maternité sur la race humaine en des proportions admirables.

Et c'est là ce qui nous rassure, Ô Clotilde, en recourant à vous. Beaucoup de vos fils ne sont plus, hélas ! Ce qu'ils devraient être à l'égard de leur mère. Mais Notre-Dame, en vous communiquant les droits de sa maternité, ne l'a pu faire sans vous communiquer aussi sa tendre compassion pour des enfants abusés qui n'écoutent plus la voix maternelle. Prenez en pitié les malheureux que des doctrines étrangères l'ont entraînés bien loin de leur point de départ.



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Partage du royaume de Clovis devant sainte Clotilde.
Chroniques françaises. Guillaume Crétin. XVIe.

La monarchie chrétienne que vous aviez fondée n'est plus. Vous l'aviez établie sur la reconnaissance des droits de Dieu dans son Christ et dans le vicaire de son Christ. Des princes à courte vue sur leurs propres intérêts, traîtres à la mission qu'ils avaient reçue de maintenir votre oeuvre, ont cru faire merveille en laissant pénétrer chez nous des maximes proclamant l'indépendance du pouvoir civil à l'égard de l'Eglise ; et la société, par un juste retour, a proclamé son indépendance à l'égard des princes.

Mais, en même temps, le peuple affolé n'entend plus avoir d'autre souverain que lui-même, et, dans l'ivresse de la fausse liberté qu'il a prétendu conquérir, il méconnaît jusqu'au domaine suprême que garde sur lui son Créateur. Les droits de l'homme ont remplacé les droits de Dieu, comme base du pacte social ; évangile nouveau que la France, dans son prosélytisme égaré, prétend maintenant imposer au monde, à la place de l'ancien !

Tel est, dans notre pauvre pays empoisonné par une philosophie menteuse, l'excès de la déraison, que plusieurs qui déplorent l'apostasie du grand nombre et veulent rester chrétiens, croient pouvoir le faire en admettant le principe de libéralisme destructeur qui forme l'essence de la révolution : au Christ le ciel et les âmes ; à l'homme la terre, avec le droit de la gouverner comme il l'entend et de penser à sa guise. A genoux devant la divinité du Seigneur Jésus dans le sanctuaire de leur conscience, ils scrutent les Ecritures et n'y découvrent point que l'Homme-Dieu soit le roi du monde ; en de savantes études ils ont, disent-ils, approfondi l'histoire et n'y ont rien vu qui les contredise.

Si le gouvernement de Clovis, de Charlemagne et de saint Louis, ne répond pas en tout aux données de leur politique, il faut faire, assurent-ils, la part de ces temps primitifs : ce n'est pas en un jour qu'on arrive à l'âge parfait où nous établit enfin la loi du progrès. Pitié, Ô mère, pour ces insensés ! Ressuscitez en nous la foi des Francs. Que le Dieu de Clotilde, Seigneur des armées et Roi des nations, se montre à nous ramenant la victoire, sous le vrai nom que Clovis lui donnait à Tolbiac :
" Jésus-Christ !"



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