« J’ai été guérie ici par le Seigneur » : Heureux comme des gens du voyage à Paray

par Lumen Dim 31 Juil 2022 - 21:33

« J’ai été guérie ici par le Seigneur » : Heureux comme des gens du voyage à Paray

À Paray-le-Monial, des centaines de gens du voyage viennent en pèlerinage chaque été. La session organisée par la Communauté de l’Emmanuel est une occasion pour eux de vivre leur foi ensemble, de recevoir les sacrements, de se former et d’évangéliser.

« J’ai été guérie ici par le Seigneur » : Heureux comme des gens du voyage à Paray Gens_du_voyage_paray

« J’ai été guérie ici par le Seigneur » : Heureux comme des gens du voyage à Paray Gens_du_voyage_paray

Les pèlerinages, courants chez les gens du voyage qui vont d’un sanctuaire à l’autre pendant tout l’été,
sont aussi un moyen pour eux de tisser des liens sociaux et de vivre leur foi en Église. - DR

La lumière du soleil couchant tombe sur le vaste terrain où sont rassemblées plus de deux cents caravanes, à proximité du sanctuaire de Paray-le-Monial. Familles, jeunes et personnes plus âgées se dirigent vers le grand chapiteau monté au centre, où une « veillée de miséricorde » est organisée par la Communauté de l’Emmanuel. Quatre hommes jouent de la guitare ; des voix de femmes réunies en chœur s’élèvent avec puissance. Confession, prières pour une intention particulière, procession et bénédiction du Saint-Sacrement pour chacune des personnes présentes sont des moments forts de la soirée. Des larmes coulent sur plusieurs visages, tandis que le Seigneur agit dans le secret.

Une occasion d’évangélisation auprès des familles

« J’ai été guérie ici par le Seigneur. Il a enlevé le poids des souffrances qui pesaient sur mon cœur », témoigne Isabelle, venue à Paray pour la première fois il y a trois ans et qui y retourne chaque année depuis. À Pâques et pendant l’été c’était cette année du 12 au 17 juillet , la Communauté de l’Emmanuel propose une session pour les gens du voyage, en parallèle de celles organisées pour tous, avec un programme adapté à leur mode de vie. « Le matin, les hommes travaillent (chantiers, maraîchages, etc.) », explique Jean-Michel Meilhac, « sédentaire » en service auprès des « voyageurs », selon le vocabulaire en usage. Ceux qui le souhaitent peuvent venir aux temps de louange, à l’adoration et à la messe. Les enfants découvrent le catéchisme lors des activités organisées par tranches d’âge l’après-midi. « Beaucoup viennent ici pour recevoir les sacrements », poursuit Jean-Michel Meilhac. Après une préparation accélérée, plusieurs recevront le baptême, la confirmation ou communieront pour la première fois à la fin de la semaine. « Je me suis marié ici il y a sept ans ; on était six couples à le faire en même temps », raconte Paulo. « On a compris que le mariage à l’Église n’est pas que pour les sédentaires », ajoutent « L’Abîme » et son mari « Petitnain », surnoms de ces voyageurs de la Communauté de l’Emmanuel. La bénédiction des caravanes est par ailleurs une occasion d’évangélisation auprès des familles qui viennent à Paray davantage pour les commodités du terrain que pour le pèlerinage.

« L’enjeu de ces sessions est de former des voyageurs responsables de l’évangélisation de leur propre peuple », explique le Père Grégoire Kornprobst, aumônier des gens du voyage au sein de l’Emmanuel depuis huit ans. Le défi missionnaire est d’autant plus important qu’il est relevé efficacement par les chrétiens évangéliques, nombreux parmi les voyageurs, et parfois vigoureusement opposés aux catholiques. Les pèlerinages, courants chez les gens du voyage qui vont d’un sanctuaire à l’autre pendant tout l’été, sont aussi un moyen pour eux de tisser des liens sociaux et de vivre leur foi en Église. « Un voyageur se définit comme pratiquant s’il va à Lourdes tous les ans. Vivre sa foi chrétienne dans des lieux de pèlerinage fait partie de sa culture », constate le Père Grégoire. Paray-le-Monial est donc une destination courue. « Les autres pèlerinages sont plutôt mariaux, ou pour des saints, mais ici, dans le sanctuaire du Cœur de Jésus, on est chez nous », souligne Rudy, membre voyageur de l’équipe d’organisation.

« Ils lâchent tout pour rencontrer Dieu »

La Communauté de l’Emmanuel rencontre ainsi des voyageurs à Paray et les accueille en son sein dès le début des années 1980, et de manière renouvelée depuis 2009. Ils sont aujourd’hui une soixantaine à en faire partie. « On a compris qu’on avait une complémentarité à vivre entre sédentaires et voyageurs au sein de la Communauté », explique Anny Hilling, qui accompagne ces derniers depuis les débuts et habite aujourd’hui à l’année sur le terrain prêté par l’Emmanuel. « Ils nous enseignent l’abandon à la Providence, alors que nous avons tant de mal à lâcher prise. » Leur mode de vie voyageur détermine leur façon de vivre leur foi et leur vocation spécifique au sein de l’Église. « Le voyageur doit garder une certaine liberté, ne pas se laisser emprisonner, vivre à la grâce de Dieu et au rythme du vent », explique L’Abîme. « Leur vie dans l’instant présent les dispose à la vie dans l’Esprit Saint », souligne le Père Grégoire. Rudy s’émerveille ainsi de la foi de son peuple : « Les gens qui viennent ici savent à peine lire et écrire, ils ont peu de moyens pour se déplacer, mais ils lâchent tout pour rencontrer Dieu. On vit vraiment cette phrase de l’Évangile : «Ce que Tu as caché aux sages et aux savants, Tu l’as révélé aux tout-petits» (Luc 10, 21) ».

Anne-Françoise de Taillandier

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