BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
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BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE, REPRÉSENTÉES DANS SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; ENTRETIENS SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES. (Extraits)
OUVRAGE TRADUIT DE L'ALLEMAND, AUGMENTÉ ET ANNOTÉ – Allemagne - 1857 Par l'abbé N.-J. CORNET
«La fille du roi a tout son honneur à l'intérieur.» (Psaume 45,14.)
Ayant examiné l'ouvrage intitulé : Beautés de l'Église Catholique, nous en permettons l'impression. Liège, le 27 janvier 1857. H. J. JACQUEMOTTE, Vic.-Gén.
INTRODUCTION.
DES RITES ET DES CÉRÉMONIES DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE EN GÉNÉRAL.
Éloigné du bruit et du mouvement des grandes villes par sa situation dans les montagnes, encore plus que par la distance,
le village de Christenthal formait une paroisse que n'avait point encore atteint la corruption moderne. Les habitants de la riante
et tranquille vallée avaient conservé la foi, les vénérables coutumes et les pieuses pratiques de leurs pères.
LES CÉRÉMONIES DE L'ANNÉE ECCLÉSIASTIQUE.
ENTRETIEN PREMIER.
CÉRÉMONIES ET USAGES DEPUIS L'AVENT JUSQU'A LA SEPTUAGÉSIME
Résumé. Avent : Sa signification, son but. Le Rorate. Usages. Noël. Les trois messes. Crèches, étrennes, arbres de Noël. Vin de Saint Jean. Épiphanie, Offrandes des Rois-Mages. Signification de cette fête et mystères que l'Église propose en ce jour. Fête de la Chandeleur. Bénédiction et signification des cierges. Bénédiction de saint Blaise.
Le Curé. Mes amis, vous me voyez prêt à exécuter ce que je vous ai promis. Nous devons tout naturellement commencer par l'année ecclésiastique.
Vous n'ignorez peut-être pas que cette année ne commence pas comme l'année civile au 1 janvier, mais.... Avec l`Avent, interrompirent quelques-uns;
nous l'avons retenu de l'un de vos sermons.
L`Avent
Simon. Mais nous ignorons d'où vient le nom d'Avent.
Le Curé. Les semaines de l'Avent sont destinées à nous servir de préparation à la naissance de Jésus-Christ ou à son avènement sur la
terre, en rappelant à notre souvenir le désir avec lequel les saints Patriarches de l'ancienne alliance avaient souhaité de voir arriver ce
jour, de voir leur Sauveur advenir ; de là donc aussi le mot advent ou avent. Cette explication vous fait voir en même temps, pourquoi
nous commençons l'année ecclésiastique avec l'Avent ; car, chaque année, nous devons pour ainsi dire vivre intérieurement de la vie du
Sauveur, nous rappeler toute l'histoire depuis sa naissance jusqu'à la descente du Saint-Esprit, de sorte donc que l'année qui s'inaugure
par la Nativité du divin Sauveur est précédée de ces quatre semaines de préparation qu'on appelle l'Avent.
Simon. Mais veuillez bien nous dire, monsieur le curé, pourquoi nous devons encore maintenant nous préparer à la naissance du
Seigneur, tandis qu'il a fait son apparition dans le monde depuis plus de dix-huit siècles.
Le Curé. Mon cher ami, le Sauveur est né pour tout le monde ; mais est-il né aussi en nous ? Il y va de notre dignité de le recevoir lui et sa grâce dans notre âme. Avant que le Christ descendit sur la terre il fallut une préparation de quatre mille ans. Les hommes durent alors apprendre à reconnaître d'abord combien un Sauveur leur était nécessaire ; ils durent en exciter en eux un très-vif désir, et, afin de s'en rendre dignes, faire une sincère et sérieuse pénitence. Voilà ce que nous aussi nous devons faire pendant les quatre semaines de l'Avent qui rappellent si justement les quatre mille ans qui ont précédé la venue de Jésus-Christ.
La couronne de sapin de l`Avent avec quatre chandelles représente les 4 semaines avant Noel et les 4,000 ans de l`attente de la naissance de Jésus-Christ
par les patriarches - de Noé en passant par Abraham ( vers 2,000 Av J.C.) et Moise ( vers 1300 Av J.C.)
Ce n'est qu'après avoir imité les patriarches et rappelé, par notre pénitence, les temps qui précédèrent la Rédemption, après avoir réfléchi sérieusement sur ce que nous serions devenus sans l'avènement du Seigneur et combien il nous est nécessaire, ce n'est, dis-je, qu'après avoir excité en nous un vrai désir de le recevoir dans nos cœurs et éloigné tous les obstacles qui pourraient l'empêcher de demeurer en nous, ( Confession de nos péchés et pénitence) que nous sommes disposés à célébrer, comme il faut sa nativité dans notre âme.
Simon. Voilà des choses que je veux bien noter. — Veuillez nous dire encore, pourquoi, pendant ce temps, on chante les messes que nous appelons de Rorate.
Le Curé. Ces messes sont en rapport avec ce que nous devons faire pendant ce saint temps. Elles commencent par les paroles du prophète Isaïe : (Isaïe 45,8) Rorate coeli, etc., ce qui veut dire en français : Cieux, faites descendre votre rosée et que les nues enfantent le Juste; que la terre s'ouvre et produise le Sauveur !
Rorate coeli: Cieux, faites descendre votre rosée et que les nues enfantent le Juste; que la terre s'ouvre et produise le Sauveur !
Messe Rorate aux chandelles pendant l`Avent
C'est comme un cri vers le Messie qui, partant de l'autel, a plus de force sur le cœur de Dieu. Comme vous pouvez donc le voir vous-mêmes, ces messes se célèbrent en l'honneur de l'Incarnation de Jésus-Christ et elles sont l'expression du désir qui entraîne les chrétiens vers leur Sauveur ; car, avec la même ardeur avec laquelle les patriarches espéraient qu'il naîtrait dans la chair, nous aussi nous devons désirer vivement qu'il prenne vie en nous d'une manière spirituelle par sa grâce.
Simon. Pour quelle raison ne se sert-on, durant l'Avent, que des ornements violets ?
Le Curé. Ce n'est pas la seule chose qu'il faille observer comme propre à ce saint temps. Dans la messe, on omet aussi le Gloria in excelsis et les prêtres omettent également dans leurs heures le Te Deum, qu'ils doivent réciter d'ordinaire pendant les autres temps de l'année. Tout cela se fait ainsi, parce que l'Avent est un temps de deuil et de pénitence ( confession des péchés), par lequel nous nous préparons à la fête de la naissance de Jésus-Christ. Or, vous verrez que tous les jours de deuil ou de pénitence, le prêtre porte un vêtement de couleur violette. Le cantique angélique ou Gloria in excelsis, nous rappelle la venue véritable et la naissance de Jésus, puisque ce sont les anges qui ont annoncé au monde cette grande nouvelle par ce cantique. On ne dit pas le Te Deum, parce que c'est un cantique d'actions de grâces. Il est donc tout naturel que, puisque nous ne célébrons pas encore la venue du Sauveur, mais que nous l'attendons seulement, nous ne chantions pas ce cantique d'actions de grâces. Quant à l`Alleluia, on le prononce dans la messe et ailleurs tout aussi bien que dans les temps de joie, parce que, les jours de l'Avent étant des jours d'espérance, ne sont pas sans avoir aussi leur côté joyeux. Autrefois on jeûnait pendant l'Avent, ce qui a été supprimé plus tard, excepté dans quelques ordres religieux.
Passons maintenant à la fête de Noël.
Simon. Si vous le permettez, je voudrais vous demander tout d'abord pourquoi on dit trois messes en ce jour et pourquoi, en plusieurs endroits, la première de ces messes se célèbre à minuit.
Le Curé. Cet usage, disent d'anciens auteurs, a été établi par le pape saint Télesphore ( 127-138 Ap J.C. ). Le saint pape Grégoire-le-Grand (590-604 Ap J.C.) en parle comme d'une chose usitée depuis longtemps. Car il commence ainsi l'un de ses sermons de Noël : «Comme nous devons aujourd'hui célébrer trois messes, nous ne pourrons parler longtemps sur l'Évangile que je viens de vous lire. Mais la Nativité du Sauveur me force à vous adresser au moins quelques mots.»
Leise rieselt der Schnee - chanson de Noel allemande - Nana Mouskouri
Cet usage contribue à rehausser l'éclat de la fête, et la triple célébration du saint sacrifice nous représente plus particulièrement la triple naissance du Sauveur : 1° sa naissance éternelle de Dieu le Père ; 2° sa naissance temporelle du sein de la sainte Vierge Marie ; 3° sa naissance spirituelle dans le cœur du juste. Or, on célèbre la première de ces messes à minuit, parce que Jésus est né au milieu de cette nuit sainte, comme le rapporte saint Luc dans son évangile. Cela nous rappelle aussi que Jésus-Christ, la lumière du monde, est venu dans les ténèbres de la terre pour les faire disparaître. (La lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l`ont point reçue – Jean 1,5).
Tout-à-coup un petit garçon du nom de Joseph, interpelle le pasteur : « Monsieur le curé, dit-il, j'aimerais à vous faire une question. Dites-nous, s'il vous plaît , d'où viennent les crèches et pourquoi on les place dans les églises.»
Le Curé. C'est très-bien, mon enfant; n'ayez pas peur de me questionner, je vous répondrai avec plaisir. L'usage de faire des crèches a été introduit par saint François d'Assise, il y a de cela près de six siècles. Ce grand saint plaça, avec la permission du Souverain Pontife, une crèche dans son église dans laquelle se trouvait une image du saint enfant Jésus ; autour du Sauveur on voyait représentés tous les personnages qui furent présents peu de temps après sa naissance : La sainte Vierge, saint Joseph, les Anges, les bergers et peut-être aussi les trois Rois Mages. Saint François voulait raviver, par le moyen des sens, la reconnaissance envers Dieu et la ferveur du peuple pour le grand bienfait de la Nativité du Sauveur. Plus tard, notre saint trouva un grand nombre d'imitateurs qui, à leur tour, construisirent des crèches, même dans leurs maisons.
La crèche de Bethléem se trouve à Rome dans la basilique de sainte Marie Majeure qui, pour cette raison, se nomme aussi sainte Marie à la crèche du Sauveur. Quant à vous, mon petit Joseph, pour vous témoigner mon contentement de la question que vous avez faite, j'ajouterai l'explication d'un usage que vous connaissez et qui vous intéresse, savoir ce que veut dire l'arbre de Noël et ce que signifient les étrennes que vous recevez en ce jour.
Tradition de l'arbre de Noël en Allemagne . C'est l'usage en Allemagne que la veille de Noël, au soir, les enfants se réunissent dans la grande chambre de la maison où ils trouvent un arbre décoré de banderoles, auquel pendent des noix dorées, des pommes, enfin des cadeaux de tout genre que le petit Jérusalem fait. Des centaines de petites chandelles brûlent sur les branches de cet arbre en l'honneur de l'enfant Jésus. Or, ces bougies sont l'emblème de Jésus-Christ qui est la lumière du monde ; les cadeaux ou étrennes rappellent les grâces innombrables que nous a apportées sa naissance: l'arbre signifie l'arbre de la croix duquel toutes ces grâces sont découlées.
Nos premiers parents, Adam et Ève, mangèrent du fruit défendu et commirent par là une désobéissance très - grave envers Dieu, leur créateur, qui les avait comblés de bienfaits. Par là ils se rendirent malheureux, eux et toute leur postérité, et nous aurions été rejetés de Dieu pour jamais, si le Fils de Dieu n'était devenu homme , afin de nous délivrer du malheur éternel.
C'est donc là le plus grand de tous les dons que Dieu ait pu nous faire que de nous donner son propre Fils , et c'est pour rappeler ce bienfait à notre mémoire que l'on donne des étrennes en ce jour. En même temps , nous nous ressouvenons que ce même Jésus qui nous est né , veut souffrir pour nous la mort ignominieuse de la croix, pour nous mériter ainsi toutes les grâces et toutes les bénédictions du ciel. Pour que donc notre esprit se porte sur l'arbre de la croix et sur les beaux fruits que nous devons cueillir de cet arbre de bénédiction, nous élevons un petit arbre dans la nuit sainte, nous l'ornons de lumières qui signifient Jésus-Christ , la lumière venant dans les ténèbres de ce monde.
Nous y appendons de beaux fruits et autres choses, par lesquelles nous nous réjouissons les uns les autres, et pour vous faire plaisir à vous surtout, mes enfants; et tout cela signifie les grâces et les bienfaits que nous devons recueillir de la mort de Notre-Seigneur , conformément à ce qu'il demande de nous. Que nous soyons donc de grands ou de petits enfants , nous voulons à l'avenir, chaque fois que nous verrons soit une crèche, soit un arbre de Noël, ou bien chaque lois que nous recevrons des étrennes en ce jour, nous rappeler le grand bienfait de l'Incarnation de notre divin Sauveur.
Simon. Nous ne manquerons certainement pas de le faire ; car Notre-Seigneur ne veut-il pas que, par notre simplicité et notre innocence, nous ressemblions aux enfants, si nous voulons obtenir le ciel? Mais veuillez nous expliquer maintenant , monsieur le curé, ce que signifie le vin que l'on bénit à l'église au jour de saint Jean l`Évangéliste. (27 Décembre)
Vin de St-Jean et Fête de St-Jean l`Évangéliste - 27 Décembre
Le Curé. Je vous suis obligé de ce que vous voulez bien porter mon attention sur cette coutume. Une ancienne tradition nous rapporte qu'un jour on avait présenté à saint Jean une coupe de vin empoisonné. Le saint ayant fait le signe de la croix , selon sa coutume, sur cette boisson, il en sortit un serpent dont l'apparition fit comprendre à l'apôtre le danger qu'il courait. C'est pourquoi , en bénissant le vin de saint Jean, le prêtre « supplie le Dieu de toute bénédiction, de nous préserver de tout danger du corps et de l'âme, et d'accorder à tous ceux qui boiront de ce vin bénit toutes les bénédictions temporelles et surtout la vie éternelle. »
On considère aussi le vin comme le symbole de la charité ; c'est pourquoi le prêtre le présente à boire aux assistants en disant : « Buvez la charité de saint Jean. » Il veut nous représenter le plus grand devoir que nous ayons à remplir, savoir celui d'aimer Dieu et notre prochain, imitant en cela l'exemple du saint Évangéliste qui dans ses écrits autant que par sa vie, nous a enseigné surtout cette belle vertu.
St-Jean l`Évangéliste avec la coupe
L'Évangile nous dit suffisamment à quel point le disciple bien aimé du Sauveur lui a rendu amour pour amour : il suivait Jésus garrotté, alors que tous les autres apôtres l'avaient abandonné et que Pierre l'avait renié; il ne le quitta même pas, lorsque, suspendu sur la croix, ce Dieu Sauveur allait quitter la vie. C'est donc à bon droit qu'on le nomme par excellence le disciple de l'amour. Pour ce qui concerne son amour envers le prochain, les anciens écrivains ecclésiastiques nous ont conservé sur sa vie des détails qui prouvent combien il s'était appliqué à s'y perfectionner.
Dans une ville voisine d'Éphèse où il résidait, après avoir consolé ses frères par ses discours, saint Jean aperçut un jeune homme bien fait et d'un esprit ardent. Se retournant vers l'évêque, il lui dit devant tout le peuple : « Prenez soin de ce jeune homme, je vous le recommande en présence de l'Église et de Jésus-Christ». Celui-ci ne négligea rien pour le bien élever ; il l'instruisit et le disposa à recevoir le baptême. Mais , croyant pouvoir l'abandonner ensuite à sa propre conduite, il cessa de veiller sur lui, et le jeune homme, abusant de la liberté qu'on lui laissait, lia amitié avec des libertins de son âge qui l'engagèrent à commettre avec eux toutes sortes de crimes. Le jeune homme reçut facilement ces funestes impressions et il alla même jusqu'à devenir chef d'une bande de voleurs.
Quelques années après, saint Jean retournant dans la même ville et ayant appris de l'évêque qu'il était mort à Dieu, poussa un cri de détresse, déchira ses vêtements de douleur, demanda un cheval et un guide et se rendit au lieu où étaient les voleurs. Leurs sentinelles l'arrêtent et le conduisent à leur capitaine que l'attendait en armes ; mais ce jeune homme ayant reconnu saint Jean fut saisi de honte et s'enfuit.
Alors le saint apôtre oubliant son âge et ses infirmités courut après lui en lui criant : « Mon fils, pourquoi me fuyez-vous, pourquoi fuyez-vous votre père, un vieillard sans armes? Mon fils, ayez pitié de moi ; ne craignez point, il y a encore espérance pour votre salut; je répondrai pour vous à Jésus-Christ; je donnerai volontiers ma vie pour vous, comme Jésus-Christ a donné la sienne pour nous; arrêtez, croyez-moi, c'est Dieu qui m'a envoyé vers vous. »
A ces mots le voleur s'arrêta , laissa tomber ses armes et fondit en pleurs. Le saint vieillard l'embrassa avec tendresse, le rassura en lui promettant d'obtenir du Sauveur
le pardon de ses péchés ; il le ramena à l'Église ; il pria pour lui ; il jeûna avec lui ; il l'entretint de discours édifiants et ne le quitta point qu'il ne l'eût rétabli dans la
participation des Sacrements. Sans doute, cet exemple de zèle pour le salut du prochain vous fait plaisir. — Ses paroles et ses recommandations correspondaient à ses actions.
Ses instructions étaient remplies de charité : « Aimons Dieu, disait-il, car c'est lui qui nous a aimés le premier ; mais celui qui dit : j'aime Dieu et hait son frère est un menteur». Et, lorsqu'épuisé par ses fatigues et son grand âge, il ne pouvait plus faire de longs discours, il se faisait porter à l'assemblée des fidèles et il leur disait
chaque fois ces paroles : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres.»
Et comme ses disciples lui demandèrent un jour pourquoi il leur disait toujours la même chose: « C'est, répondit-il, parce que tel est le commandement de Dieu, et pourvu qu'on l'accomplisse, il suffit »
Les paroles: «Buvez la charité de saint Jean» veulent donc dire : Faites disparaître de votre coeur toute malice, la haine et l'envie contre votre prochain;
exercez-vous dans la charité fraternelle, la douceur et la miséricorde , afin de devenir ressemblants à ce saint apôtre.
Fête de Saint Etienne (26 déc), de saint Jean (27 déc) et des saints Innocents. (28-29 déc)
Simon. C'est étrange , qu'immédiatement après la fête de la Nativité de Notre-Seigneur , on célèbre dans l'Église les fêtes importantes de saint Etienne, de saint Jean et des saints Innocents. Pour quelle raison les a-t-on réunies de la sorte?
Le Curé. On a cherché à s'expliquer pourquoi on a groupé ainsi ces fêtes ; en voici la raison. Après la fête de la Naissance du Sauveur, suivent celles des hommes qui l'ont confessé , qui ont rendu témoignage en sa faveur : 1° saint Etienne en qualité de martyr par la volonté et par les souffrances, puisqu'il fut le premier, parmi les adultes, à répandre son sang pour Jésus-Christ ; 2° Saint Jean, martyr par la volonté seulement, quoique cependant il fût prêt aussi à donner son sang pour l'Évangile , mais qui mourut de mort naturelle , selon la prédiction de son maître ; 3° Les saints Innocents, martyrs par leurs souffrances, mais sans leur volonté, puisqu'ils furent sacrifiés pour Jésus-Christ, avant même que d'être en état de comprendre la grandeur du sacrifice qu'ils faisaient.
Le martyre des Saint-Innocents a Bethléem sur l`ordre du Roi Hérode après la naissance de Jésus-Christ
Outre cela, saint Etienne a confessé Jésus - Christ par son discours devant le grand conseil, saint Jean par son évangile : «Et le Verbe s'est fait chair» les petits enfants de Bethléem par leur mort. C'est pourquoi nous prions au jour de leur fête : « 0 Dieu, dont les innocents Martyrs ont confessé aujourd'hui la gloire, non par leurs paroles, mais par leur mort, etc. »
L'Église célèbre cette fête comme un jour de deuil, tout-à-fait comme pendant l'Avent, se servant d'ornements violets et omettant dans la messe
le Gloria in excelsis. Cela se fait, soit pour exciter notre compassion envers les mères éplorées de ces jeunes martyrs, soit parce que ces enfants
moururent avant Jésus-Christ et ne purent par conséquent entrer immédiatement dans le ciel, devant rester d'abord dans les Limbes jusqu'à la mort du Fils de Dieu.
Le jour des Rois Mages – Épiphanie (6 janvier)-
Simon. Voici venir maintenant le jour des Rois Mages.
Le Curé. . . . qu'on nomme aussi Épiphanie. On appelle cette fête d'après les trois mages, le jour des Rois, parce que l'on croit, sur la foi de vieilles traditions , que ces Sages qui vinrent de l'Orient pour adorer le Sauveur, étaient des princes de ces pays. Qu'il en ait eu trois, c'est aussi la tradition chrétienne qui nous le rapporte. Ils offrirent aussi trois présents différents au divin Enfant.
Simon. Oui, de l'or, de l'encens et de la myrrhe.
Le Curé. Ces dons symbolisent parfaitement la nature et les intentions de Jésus-Christ, qui veut régner sur nous en qualité de roi de notre âme ; sa royauté nous est remémorée par l'or, que nous donnons en tribut aux rois de la terre; il veut se sacrifier lui-même comme victime, mais il est aussi le prêtre sacrificateur et enfin il vient réclamer nos adorations en qualité de Dieu , ce que l'encens nous rappelle admirablement bien. Il était vraiment Dieu, mais il voulut devenir homme, naître, travailler, souffrir et mourir.
Son humanité ne pouvait donc trouver de symbole plus frappant que la myrrhe dont on se servait pour embaumer les corps morts. Cependant ne nous contentons pas de l'explication de ces présents, sachons aussi en offrir d'équivalents au bon Sauveur qui s'est incarné pour notre salut.
Simon. Mais le moyen de lui offrir ces choses comme les Rois?
L`Adoration des Rois-Mages qui signifient celle des Gentils ( les nations non-juives).
Le Curé. Quant à l'or, le Sauveur est prêt à recevoir tout notre superflu soit en or, soit en argent, soit en cuivre. Il a placé les pauvres comme ses trésoriers au milieu de nous, et par ces paroles : « Ce que vous aurez fait au moindre d'entre mes frères, vous me l`aurez fait à moi-même ; » il leur a donné leurs lettres de créance sous la meilleure forme. Quelque riches que soient, du reste, les dons que nous faisons à Jésus-Christ, il n'en serait pas satisfait, si nous ne nous appliquions pas à renouveler au moins spirituellement l'offrande faite à lui par les Mages. On dit ordinairement : pur comme de l`or, juste, fidèle comme l'or à la balance, etc. Qui d'entre vous ne s'est pas servi maintes fois de cette manière de parler? Eh bien, vous comprenez alors aussi quelles sont les vertus que nous devons offrir à Dieu , et qui correspondent à ce premier présent.
Représentation des trois rois mages : Melchior, Gaspar et Balthazar avec l`or, l`encens et la myrrhe
L'encens qui nous rappelle encore de nos jours la ferveur, l'élévation de l'âme vers Dieu, devient par conséquent , à côté de la crèche de l'enfant Jésus, une pressante exhortation à la prière. Pour ne rien oublier, la myrrhe que nous offrirons à l'Homme-Dieu, c'est une profonde humilité , un grand renoncement qui est très propre à empêcher la pourriture, c'est-à-dire la tiédeur et le péché de s'emparer de notre âme. Peut-être Dieu pourvoira-t-il à ce que, sous ce rapport, l'occasion ne nous manque pas de lui offrir ce présent , en nous envoyant des peines et des tribulations qui sont une véritable myrrhe pour notre âme et l'empêchent de se corrompre.
Souffrons-les donc avec patience, offrons-les à Dieu, et de la sorte elles seront très-propres à nous guérir et à nous préserver de la pourriture du péché. Ayons surtout en vue, de notre côté, de ne pas en empêcher les fruits par des plaintes et des murmures contre la divine Providence. Approchons-nous du Sauveur et offrons-lui ces présents, et ainsi nous aurons très-bien sanctifié la fête de sa Manifestation, autrement dite de son Épiphanie.
Simon. Épiphanie signifierait donc la même chose que Manifestation ?
Le Curé. Oui, mon ami, ces deux mots veulent dire la même chose. Au jour de sa naissance , le Sauveur ne se manifesta qu'aux seuls bergers qui étaient Juifs et qui vinrent, comme vous savez, sur l'invitation de l'ange, adorer leur Rédempteur nouvellement né. Mais le Christ n'était pas venu seulement pour les Juifs, mais aussi pour les infidèles qui composaient la grande majorité des habitants de la terre. Cette circonstance fut indiquée tout d'abord le jour que de pieux Gentils vinrent à Bethléem pour présenter leurs hommages au nouveau Messie. Dès-lors il ne fut plus possible de penser que Jésus fut venu pour les Juifs exclusivement ; en se manifestant aux trois Rois, il donnait suffisamment à entendre qu'il était descendu sur la terre pour tout le monde. Avez-vous déjà réfléchi à ce qu'ont été vos pères?
Simon. Oui, ils étaient païens. (Adorateurs des idoles des faux dieux)
Le Curé. Vous voyez donc pourquoi cet événement est d'une si grande importance : c'est aussi la raison pour laquelle l'Église a toujours fêté ce jour avec la plus grande solennité. C'est comme une fête d'actions de grâces, de ce que Dieu a bien voulu éclairer nos ancêtres de la lumière de la vraie foi et nous donner à nous-mêmes la grâce de naître dans la sainte Église catholique. — En ce même jour, l'Église nous rappelle aussi le baptême de Jésus-Christ , à l'occasion duquel le Père et le Saint-Esprit le proclamèrent, pour ainsi dire, Fils de Dieu pour la première fois du haut du ciel et en présence d'un grand nombre d'hommes réunis auprès du Jourdain , auxquels sa dignité était ainsi manifestée. Enfin le jour des Rois est également destiné à nous rappeler le miracle de la noce de Cana, au moyen duquel le Sauveur manifesta pour la première fois sa divinité par un fait. Voilà autant de manifestations de Jésus-Christ, ou bien autant de circonstances par lesquelles il constatait son origine divine ainsi que sa céleste mission.
Simon. Je ne me rappelle pas pour le moment quelle est la fête la plus rapprochée de l'Épiphanie , pour vous en demander l'explication.
La Fête de la Purification de la St-Vierge Marie ou la Chandeleur - ( 2 février)
La présentation de l`enfant Jésus au Temple de Jérusalem
Le Curé. C'est la fête de la Purification de la Sainte Vierge ou la Chandeleur.
Simon. Oui, c'est cela ! N'est-ce pas en ce jour qu'a lieu la bénédiction des cierges?
Le Curé. Effectivement, Simon, et cet usage a une signification aussi belle que profonde. Une simple chandelle allumée renferme tout un enseignement. Rien de surprenant donc , si l'Église en fait un usage si fréquent , non-seulement dans le culte solennel et public, mais dans presque toutes les fonctions les plus ordinaires. Simon. Vous aurez la bonté, M. le curé , de nous en dire un mot avant de nous séparer.
Le Curé. Si, en ce jour de fête on fait usage des cierges bénits (de là vient aussi le nom de Chandeleur) avant la grand messe , il
faut que vous sachiez que les cierges nous rappellent Jésus-Christ, en ce sens que :
1° Jésus-Christ , fils de Dieu, est la lumière véritable qui est venue dans le monde afin d'éclairer les hommes. Il fut porté en ce jour dans le temple et offert au Père céleste. De même aussi nous devons nous offrir à Dieu et être prêts à ouvrir nos yeux à la lumière divine.
2° Cet usage doit nous faire souvenir du moment auquel le vieillard saint Siméon portant l'enfant Jésus dans ses bras , s'écriait plein d'allégresse : « Maintenant mes yeux ont vu la lumière qui doit éclairer tous les peuples. » A nous aussi , cette lumière s'est rendue visible, réjouissons-nous de ce bonheur et remercions en Dieu par un grand amour envers lui.
3° La cire des cierges nous représente la chair toute virginale de l'humanité de Jésus-Christ, qui est comme le fruit éclos du sein immaculé de Marie, tout comme la cire est une production de l'abeille qui est si propre et si pure. Les prières de l'Église pendant cette bénédiction ne rappellent autre chose que les idées que je viens de vous développer.
Le Curé. Oui, mais je n'ai pas encore tout dit relativement à ce que signifie un cierge. Une simple chandelle allumée est très-riche en enseignements pour les hommes, en ce qu’elle possède certaines qualités physiques que nous devons acquérir pour notre âme. Tenez, ne dit-on pas la lumière de la Foi; une lueur d'espérance? Le cierge allumé nous rappelle donc ces deux vertus et nous invite à les pratiquer. Mais c'est surtout la charité qui est admirablement symbolisée par l'ardeur de la lumière. L'amour que nous
portons à Dieu n'a-t-il pas des traits de ressemblance avec cette flamme qui tend continuellement vers le ciel et qui semble nous inviter à la contemplation des bontés et des miséricordes du Seigneur et à la prière? Tournez et retournez une chandelle dans tous les sens, chaque fois la flamme se dirigera vers le haut ; de même le chrétien véritable peut bien être accablé de malheurs, de tribulations, de revers de tout genre, de tentations, mais son âme ne cessera de tendre vers le haut, et son cœur de vivre dans l'union avec Dieu. Mais faites-y bien attention : la flamme, si elle est faible, s'éteindra en la tenant longtemps dirigée vers la terre, elle ne fera au contraire que grandir, si elle est forte.
Simon. Cela veut donc dire que nous devons nous appliquer à avoir un grand amour de Dieu et une grande ferveur.
Le Curé. Et que tous les malheurs que Dieu envoie ne servent qu'à augmenter les mérites du juste, tandis que celui qui reste faible par sa faute en vivant dans la tiédeur, finit par détourner ses regards de Dieu et désespérer de son assistance. En second lieu, le cierge est une représentation de notre vie et de sa durée. Comme le cierge est destiné à augmenter la gloire de Dieu par la lumière qu'il répand, et à servir aux hommes tant dans l'Église que dans leurs maisons ou ailleurs ; ainsi notre vie doit se consumer et se partager entre le service de Dieu et celui du prochain jusqu'à notre dernier soupir. Mais malheur à nous , si, à l'heure de notre mort , notre vie n'a ressemblé qu'à un cierge qui
s'est consumé inutilement dans un coin !
Troisièmement. Pour que le cierge puisse brûler et devenir ainsi comme un sacrifice fait à Dieu , d'innombrables essaims d'abeilles ont dû réunir avec une activité infatigable la cire dont il est fait. C'est ainsi que notre vie ne deviendrait jamais un sacrifice agréable à Dieu , si nous n'en usions point pour recueillir des mérites devant lui, et si nous ne la passions pas dans la pratique des bonnes œuvres.
Quatrièmement. Les flambeaux allumés que nous portons en nos mains ont pour but de nous rappeler les paroles du Sauveur : « Ceignez vos reins et portez des flambeaux ardents en vos mains » ( Luc 12. 35.) et ces autres : « Que votre lumière luise devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu'ils louent votre Père qui est dans les Cieux» (Matthieu 5. 16.). Car il ne faut pas oublier que notre qualité de chrétien nous oblige à édifier par de bons exemples nos frères, qu'ils soient chrétiens ou infidèles, mais surtout ceux qui nous sont soumis.
Thomas. Mais à quoi sert-il donc de bénir les cierges?
Le Curé. Le prêtre supplie le Seigneur d'augmenter dans le cœur de ceux qui les portent ou qui s'en servent, le feu de son amour, qu'il daigne les éclairer de sa lumière, de son Saint-Esprit et leur donner ce qui leur est nécessaire tant pour l'âme que pour le corps. Celui donc qui n'est pas indigne de ses grâces a tout lieu d'espérer que Dieu exaucera une prière qui lui est adressée au nom de toute l'Église catholique. Du reste la bénédiction des cierges peul servir à nous faire souvenir du Saint des Saints , qui est de venu homme et nous est représenté par le cierge lui-même ; il nous rappelle notre Baptême et le caractère ineffaçable qu'il a imprimé en nous, la pureté et la sainteté promises à Dieu aux premiers jours de notre vie, ainsi que la promesse que nous avons faite de nous vouer tout entier à Lui.
Un jour aussi, mes chers amis, on vous tiendra un cierge à la main comme au jour qui suivit votre naissance , quand la sueur froide , qui couvrira votre front , vos amis éplorés autour de votre lit, et le dernier râle qui vous suffoquera, vous feront présumer qu'enfin l'heure de votre dissolution n'est pas éloignée ; oh ! alors puissiez-vous et puissions-nous tous , en voyant ce cierge mortuaire, n'y trouver qu'un présage de la lumière éternelle et non un terrifiant pronostic des flammes éternelles , qu'une vie de péchés et une fin impénitente nous forceraient de redouter.
Bénédiction de saint Blaise. 3 février - (Évêque et martyr)
Saint Blaise: Saint Blaise de Sébaste, est un médecin et évêque martyrisé sous Licinius en Arménie en 316 Ap J.C., par l'ordre d'Agricola, gouverneur de Cappadoce (Région gréco-romaine a cette époque - en Turquie actuelle).
Simon. Je n'aurais jamais cru qu'on pût trouver tant de belles pensées à la vue d'un simple flambeau ou d'un cierge qu'on regarde à peine et auquel , pour mon compte , je n'avais pas rattaché la moindre idée jusqu'à ce jour. Quoiqu'il se soit fait tard, monsieur le curé , je prendrai la liberté de vous importuner encore par une dernière question : Pourquoi bénit-on le cou le lendemain, jour de saint Blaise , avec des cierges bénits ?
Le Curé. Cet usage n'est pas général dans le monde catholique, mais on le retrouve dans un grand nombre de diocèses et il est très-ancien. Selon une très-vieille tradition, saint Blaise, qui était évêque de Sébaste en Arménie, guérit miraculeusement un enfant réduit à l'extrémité par une arête de poisson qu'il avait avalée; elle lui était demeurée dans la gorge et on désespérait de l'en extraire par des moyens naturels. Soit pour cette raison, soit pour une autre, le fait est qu'on a invoqué ce saint spécialement pour obtenir par son intercession auprès de Dieu la guérison des maladies de la gorge, et les prières par lesquelles on bénit ces cierges nous indiquent que Dieu protège ceux qui reçoivent cette bénédiction avec un esprit de foi. On demande de plus, dans ces prières, que le Seigneur veuille les préserver de tous les maux et particulièrement des maux de l'âme, et les en délivrer, si jamais ils en sont atteints.
Nous en sommes donc venus dans nos explications jusqu'au temps qui nous sert de préparation au carême ; — mais je crois, mes amis , que l'heure déjà avancée nous dit assez que, pour aujourd'hui , nous ne pouvons rien faire de mieux que de reprendre le chemin de nos foyers. Nous continuerons donc à la première réunion. Loué soit Jésus Christ ! — A jamais.
OUVRAGE TRADUIT DE L'ALLEMAND, AUGMENTÉ ET ANNOTÉ – Allemagne - 1857 Par l'abbé N.-J. CORNET
«La fille du roi a tout son honneur à l'intérieur.» (Psaume 45,14.)
Ayant examiné l'ouvrage intitulé : Beautés de l'Église Catholique, nous en permettons l'impression. Liège, le 27 janvier 1857. H. J. JACQUEMOTTE, Vic.-Gén.
INTRODUCTION.
DES RITES ET DES CÉRÉMONIES DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE EN GÉNÉRAL.
Éloigné du bruit et du mouvement des grandes villes par sa situation dans les montagnes, encore plus que par la distance,
le village de Christenthal formait une paroisse que n'avait point encore atteint la corruption moderne. Les habitants de la riante
et tranquille vallée avaient conservé la foi, les vénérables coutumes et les pieuses pratiques de leurs pères.
LES CÉRÉMONIES DE L'ANNÉE ECCLÉSIASTIQUE.
ENTRETIEN PREMIER.
CÉRÉMONIES ET USAGES DEPUIS L'AVENT JUSQU'A LA SEPTUAGÉSIME
Résumé. Avent : Sa signification, son but. Le Rorate. Usages. Noël. Les trois messes. Crèches, étrennes, arbres de Noël. Vin de Saint Jean. Épiphanie, Offrandes des Rois-Mages. Signification de cette fête et mystères que l'Église propose en ce jour. Fête de la Chandeleur. Bénédiction et signification des cierges. Bénédiction de saint Blaise.
Le Curé. Mes amis, vous me voyez prêt à exécuter ce que je vous ai promis. Nous devons tout naturellement commencer par l'année ecclésiastique.
Vous n'ignorez peut-être pas que cette année ne commence pas comme l'année civile au 1 janvier, mais.... Avec l`Avent, interrompirent quelques-uns;
nous l'avons retenu de l'un de vos sermons.
L`Avent
Simon. Mais nous ignorons d'où vient le nom d'Avent.
Le Curé. Les semaines de l'Avent sont destinées à nous servir de préparation à la naissance de Jésus-Christ ou à son avènement sur la
terre, en rappelant à notre souvenir le désir avec lequel les saints Patriarches de l'ancienne alliance avaient souhaité de voir arriver ce
jour, de voir leur Sauveur advenir ; de là donc aussi le mot advent ou avent. Cette explication vous fait voir en même temps, pourquoi
nous commençons l'année ecclésiastique avec l'Avent ; car, chaque année, nous devons pour ainsi dire vivre intérieurement de la vie du
Sauveur, nous rappeler toute l'histoire depuis sa naissance jusqu'à la descente du Saint-Esprit, de sorte donc que l'année qui s'inaugure
par la Nativité du divin Sauveur est précédée de ces quatre semaines de préparation qu'on appelle l'Avent.
Simon. Mais veuillez bien nous dire, monsieur le curé, pourquoi nous devons encore maintenant nous préparer à la naissance du
Seigneur, tandis qu'il a fait son apparition dans le monde depuis plus de dix-huit siècles.
Le Curé. Mon cher ami, le Sauveur est né pour tout le monde ; mais est-il né aussi en nous ? Il y va de notre dignité de le recevoir lui et sa grâce dans notre âme. Avant que le Christ descendit sur la terre il fallut une préparation de quatre mille ans. Les hommes durent alors apprendre à reconnaître d'abord combien un Sauveur leur était nécessaire ; ils durent en exciter en eux un très-vif désir, et, afin de s'en rendre dignes, faire une sincère et sérieuse pénitence. Voilà ce que nous aussi nous devons faire pendant les quatre semaines de l'Avent qui rappellent si justement les quatre mille ans qui ont précédé la venue de Jésus-Christ.
La couronne de sapin de l`Avent avec quatre chandelles représente les 4 semaines avant Noel et les 4,000 ans de l`attente de la naissance de Jésus-Christ
par les patriarches - de Noé en passant par Abraham ( vers 2,000 Av J.C.) et Moise ( vers 1300 Av J.C.)
Ce n'est qu'après avoir imité les patriarches et rappelé, par notre pénitence, les temps qui précédèrent la Rédemption, après avoir réfléchi sérieusement sur ce que nous serions devenus sans l'avènement du Seigneur et combien il nous est nécessaire, ce n'est, dis-je, qu'après avoir excité en nous un vrai désir de le recevoir dans nos cœurs et éloigné tous les obstacles qui pourraient l'empêcher de demeurer en nous, ( Confession de nos péchés et pénitence) que nous sommes disposés à célébrer, comme il faut sa nativité dans notre âme.
Simon. Voilà des choses que je veux bien noter. — Veuillez nous dire encore, pourquoi, pendant ce temps, on chante les messes que nous appelons de Rorate.
Le Curé. Ces messes sont en rapport avec ce que nous devons faire pendant ce saint temps. Elles commencent par les paroles du prophète Isaïe : (Isaïe 45,8) Rorate coeli, etc., ce qui veut dire en français : Cieux, faites descendre votre rosée et que les nues enfantent le Juste; que la terre s'ouvre et produise le Sauveur !
Rorate coeli: Cieux, faites descendre votre rosée et que les nues enfantent le Juste; que la terre s'ouvre et produise le Sauveur !
Messe Rorate aux chandelles pendant l`Avent
C'est comme un cri vers le Messie qui, partant de l'autel, a plus de force sur le cœur de Dieu. Comme vous pouvez donc le voir vous-mêmes, ces messes se célèbrent en l'honneur de l'Incarnation de Jésus-Christ et elles sont l'expression du désir qui entraîne les chrétiens vers leur Sauveur ; car, avec la même ardeur avec laquelle les patriarches espéraient qu'il naîtrait dans la chair, nous aussi nous devons désirer vivement qu'il prenne vie en nous d'une manière spirituelle par sa grâce.
Simon. Pour quelle raison ne se sert-on, durant l'Avent, que des ornements violets ?
Le Curé. Ce n'est pas la seule chose qu'il faille observer comme propre à ce saint temps. Dans la messe, on omet aussi le Gloria in excelsis et les prêtres omettent également dans leurs heures le Te Deum, qu'ils doivent réciter d'ordinaire pendant les autres temps de l'année. Tout cela se fait ainsi, parce que l'Avent est un temps de deuil et de pénitence ( confession des péchés), par lequel nous nous préparons à la fête de la naissance de Jésus-Christ. Or, vous verrez que tous les jours de deuil ou de pénitence, le prêtre porte un vêtement de couleur violette. Le cantique angélique ou Gloria in excelsis, nous rappelle la venue véritable et la naissance de Jésus, puisque ce sont les anges qui ont annoncé au monde cette grande nouvelle par ce cantique. On ne dit pas le Te Deum, parce que c'est un cantique d'actions de grâces. Il est donc tout naturel que, puisque nous ne célébrons pas encore la venue du Sauveur, mais que nous l'attendons seulement, nous ne chantions pas ce cantique d'actions de grâces. Quant à l`Alleluia, on le prononce dans la messe et ailleurs tout aussi bien que dans les temps de joie, parce que, les jours de l'Avent étant des jours d'espérance, ne sont pas sans avoir aussi leur côté joyeux. Autrefois on jeûnait pendant l'Avent, ce qui a été supprimé plus tard, excepté dans quelques ordres religieux.
Passons maintenant à la fête de Noël.
Simon. Si vous le permettez, je voudrais vous demander tout d'abord pourquoi on dit trois messes en ce jour et pourquoi, en plusieurs endroits, la première de ces messes se célèbre à minuit.
Le Curé. Cet usage, disent d'anciens auteurs, a été établi par le pape saint Télesphore ( 127-138 Ap J.C. ). Le saint pape Grégoire-le-Grand (590-604 Ap J.C.) en parle comme d'une chose usitée depuis longtemps. Car il commence ainsi l'un de ses sermons de Noël : «Comme nous devons aujourd'hui célébrer trois messes, nous ne pourrons parler longtemps sur l'Évangile que je viens de vous lire. Mais la Nativité du Sauveur me force à vous adresser au moins quelques mots.»
Leise rieselt der Schnee - chanson de Noel allemande - Nana Mouskouri
Cet usage contribue à rehausser l'éclat de la fête, et la triple célébration du saint sacrifice nous représente plus particulièrement la triple naissance du Sauveur : 1° sa naissance éternelle de Dieu le Père ; 2° sa naissance temporelle du sein de la sainte Vierge Marie ; 3° sa naissance spirituelle dans le cœur du juste. Or, on célèbre la première de ces messes à minuit, parce que Jésus est né au milieu de cette nuit sainte, comme le rapporte saint Luc dans son évangile. Cela nous rappelle aussi que Jésus-Christ, la lumière du monde, est venu dans les ténèbres de la terre pour les faire disparaître. (La lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l`ont point reçue – Jean 1,5).
Tout-à-coup un petit garçon du nom de Joseph, interpelle le pasteur : « Monsieur le curé, dit-il, j'aimerais à vous faire une question. Dites-nous, s'il vous plaît , d'où viennent les crèches et pourquoi on les place dans les églises.»
Le Curé. C'est très-bien, mon enfant; n'ayez pas peur de me questionner, je vous répondrai avec plaisir. L'usage de faire des crèches a été introduit par saint François d'Assise, il y a de cela près de six siècles. Ce grand saint plaça, avec la permission du Souverain Pontife, une crèche dans son église dans laquelle se trouvait une image du saint enfant Jésus ; autour du Sauveur on voyait représentés tous les personnages qui furent présents peu de temps après sa naissance : La sainte Vierge, saint Joseph, les Anges, les bergers et peut-être aussi les trois Rois Mages. Saint François voulait raviver, par le moyen des sens, la reconnaissance envers Dieu et la ferveur du peuple pour le grand bienfait de la Nativité du Sauveur. Plus tard, notre saint trouva un grand nombre d'imitateurs qui, à leur tour, construisirent des crèches, même dans leurs maisons.
La crèche de Bethléem se trouve à Rome dans la basilique de sainte Marie Majeure qui, pour cette raison, se nomme aussi sainte Marie à la crèche du Sauveur. Quant à vous, mon petit Joseph, pour vous témoigner mon contentement de la question que vous avez faite, j'ajouterai l'explication d'un usage que vous connaissez et qui vous intéresse, savoir ce que veut dire l'arbre de Noël et ce que signifient les étrennes que vous recevez en ce jour.
Tradition de l'arbre de Noël en Allemagne . C'est l'usage en Allemagne que la veille de Noël, au soir, les enfants se réunissent dans la grande chambre de la maison où ils trouvent un arbre décoré de banderoles, auquel pendent des noix dorées, des pommes, enfin des cadeaux de tout genre que le petit Jérusalem fait. Des centaines de petites chandelles brûlent sur les branches de cet arbre en l'honneur de l'enfant Jésus. Or, ces bougies sont l'emblème de Jésus-Christ qui est la lumière du monde ; les cadeaux ou étrennes rappellent les grâces innombrables que nous a apportées sa naissance: l'arbre signifie l'arbre de la croix duquel toutes ces grâces sont découlées.
Nos premiers parents, Adam et Ève, mangèrent du fruit défendu et commirent par là une désobéissance très - grave envers Dieu, leur créateur, qui les avait comblés de bienfaits. Par là ils se rendirent malheureux, eux et toute leur postérité, et nous aurions été rejetés de Dieu pour jamais, si le Fils de Dieu n'était devenu homme , afin de nous délivrer du malheur éternel.
C'est donc là le plus grand de tous les dons que Dieu ait pu nous faire que de nous donner son propre Fils , et c'est pour rappeler ce bienfait à notre mémoire que l'on donne des étrennes en ce jour. En même temps , nous nous ressouvenons que ce même Jésus qui nous est né , veut souffrir pour nous la mort ignominieuse de la croix, pour nous mériter ainsi toutes les grâces et toutes les bénédictions du ciel. Pour que donc notre esprit se porte sur l'arbre de la croix et sur les beaux fruits que nous devons cueillir de cet arbre de bénédiction, nous élevons un petit arbre dans la nuit sainte, nous l'ornons de lumières qui signifient Jésus-Christ , la lumière venant dans les ténèbres de ce monde.
Nous y appendons de beaux fruits et autres choses, par lesquelles nous nous réjouissons les uns les autres, et pour vous faire plaisir à vous surtout, mes enfants; et tout cela signifie les grâces et les bienfaits que nous devons recueillir de la mort de Notre-Seigneur , conformément à ce qu'il demande de nous. Que nous soyons donc de grands ou de petits enfants , nous voulons à l'avenir, chaque fois que nous verrons soit une crèche, soit un arbre de Noël, ou bien chaque lois que nous recevrons des étrennes en ce jour, nous rappeler le grand bienfait de l'Incarnation de notre divin Sauveur.
Simon. Nous ne manquerons certainement pas de le faire ; car Notre-Seigneur ne veut-il pas que, par notre simplicité et notre innocence, nous ressemblions aux enfants, si nous voulons obtenir le ciel? Mais veuillez nous expliquer maintenant , monsieur le curé, ce que signifie le vin que l'on bénit à l'église au jour de saint Jean l`Évangéliste. (27 Décembre)
Vin de St-Jean et Fête de St-Jean l`Évangéliste - 27 Décembre
Le Curé. Je vous suis obligé de ce que vous voulez bien porter mon attention sur cette coutume. Une ancienne tradition nous rapporte qu'un jour on avait présenté à saint Jean une coupe de vin empoisonné. Le saint ayant fait le signe de la croix , selon sa coutume, sur cette boisson, il en sortit un serpent dont l'apparition fit comprendre à l'apôtre le danger qu'il courait. C'est pourquoi , en bénissant le vin de saint Jean, le prêtre « supplie le Dieu de toute bénédiction, de nous préserver de tout danger du corps et de l'âme, et d'accorder à tous ceux qui boiront de ce vin bénit toutes les bénédictions temporelles et surtout la vie éternelle. »
On considère aussi le vin comme le symbole de la charité ; c'est pourquoi le prêtre le présente à boire aux assistants en disant : « Buvez la charité de saint Jean. » Il veut nous représenter le plus grand devoir que nous ayons à remplir, savoir celui d'aimer Dieu et notre prochain, imitant en cela l'exemple du saint Évangéliste qui dans ses écrits autant que par sa vie, nous a enseigné surtout cette belle vertu.
St-Jean l`Évangéliste avec la coupe
L'Évangile nous dit suffisamment à quel point le disciple bien aimé du Sauveur lui a rendu amour pour amour : il suivait Jésus garrotté, alors que tous les autres apôtres l'avaient abandonné et que Pierre l'avait renié; il ne le quitta même pas, lorsque, suspendu sur la croix, ce Dieu Sauveur allait quitter la vie. C'est donc à bon droit qu'on le nomme par excellence le disciple de l'amour. Pour ce qui concerne son amour envers le prochain, les anciens écrivains ecclésiastiques nous ont conservé sur sa vie des détails qui prouvent combien il s'était appliqué à s'y perfectionner.
Dans une ville voisine d'Éphèse où il résidait, après avoir consolé ses frères par ses discours, saint Jean aperçut un jeune homme bien fait et d'un esprit ardent. Se retournant vers l'évêque, il lui dit devant tout le peuple : « Prenez soin de ce jeune homme, je vous le recommande en présence de l'Église et de Jésus-Christ». Celui-ci ne négligea rien pour le bien élever ; il l'instruisit et le disposa à recevoir le baptême. Mais , croyant pouvoir l'abandonner ensuite à sa propre conduite, il cessa de veiller sur lui, et le jeune homme, abusant de la liberté qu'on lui laissait, lia amitié avec des libertins de son âge qui l'engagèrent à commettre avec eux toutes sortes de crimes. Le jeune homme reçut facilement ces funestes impressions et il alla même jusqu'à devenir chef d'une bande de voleurs.
Quelques années après, saint Jean retournant dans la même ville et ayant appris de l'évêque qu'il était mort à Dieu, poussa un cri de détresse, déchira ses vêtements de douleur, demanda un cheval et un guide et se rendit au lieu où étaient les voleurs. Leurs sentinelles l'arrêtent et le conduisent à leur capitaine que l'attendait en armes ; mais ce jeune homme ayant reconnu saint Jean fut saisi de honte et s'enfuit.
Alors le saint apôtre oubliant son âge et ses infirmités courut après lui en lui criant : « Mon fils, pourquoi me fuyez-vous, pourquoi fuyez-vous votre père, un vieillard sans armes? Mon fils, ayez pitié de moi ; ne craignez point, il y a encore espérance pour votre salut; je répondrai pour vous à Jésus-Christ; je donnerai volontiers ma vie pour vous, comme Jésus-Christ a donné la sienne pour nous; arrêtez, croyez-moi, c'est Dieu qui m'a envoyé vers vous. »
A ces mots le voleur s'arrêta , laissa tomber ses armes et fondit en pleurs. Le saint vieillard l'embrassa avec tendresse, le rassura en lui promettant d'obtenir du Sauveur
le pardon de ses péchés ; il le ramena à l'Église ; il pria pour lui ; il jeûna avec lui ; il l'entretint de discours édifiants et ne le quitta point qu'il ne l'eût rétabli dans la
participation des Sacrements. Sans doute, cet exemple de zèle pour le salut du prochain vous fait plaisir. — Ses paroles et ses recommandations correspondaient à ses actions.
Ses instructions étaient remplies de charité : « Aimons Dieu, disait-il, car c'est lui qui nous a aimés le premier ; mais celui qui dit : j'aime Dieu et hait son frère est un menteur». Et, lorsqu'épuisé par ses fatigues et son grand âge, il ne pouvait plus faire de longs discours, il se faisait porter à l'assemblée des fidèles et il leur disait
chaque fois ces paroles : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres.»
Et comme ses disciples lui demandèrent un jour pourquoi il leur disait toujours la même chose: « C'est, répondit-il, parce que tel est le commandement de Dieu, et pourvu qu'on l'accomplisse, il suffit »
Les paroles: «Buvez la charité de saint Jean» veulent donc dire : Faites disparaître de votre coeur toute malice, la haine et l'envie contre votre prochain;
exercez-vous dans la charité fraternelle, la douceur et la miséricorde , afin de devenir ressemblants à ce saint apôtre.
Fête de Saint Etienne (26 déc), de saint Jean (27 déc) et des saints Innocents. (28-29 déc)
Simon. C'est étrange , qu'immédiatement après la fête de la Nativité de Notre-Seigneur , on célèbre dans l'Église les fêtes importantes de saint Etienne, de saint Jean et des saints Innocents. Pour quelle raison les a-t-on réunies de la sorte?
Le Curé. On a cherché à s'expliquer pourquoi on a groupé ainsi ces fêtes ; en voici la raison. Après la fête de la Naissance du Sauveur, suivent celles des hommes qui l'ont confessé , qui ont rendu témoignage en sa faveur : 1° saint Etienne en qualité de martyr par la volonté et par les souffrances, puisqu'il fut le premier, parmi les adultes, à répandre son sang pour Jésus-Christ ; 2° Saint Jean, martyr par la volonté seulement, quoique cependant il fût prêt aussi à donner son sang pour l'Évangile , mais qui mourut de mort naturelle , selon la prédiction de son maître ; 3° Les saints Innocents, martyrs par leurs souffrances, mais sans leur volonté, puisqu'ils furent sacrifiés pour Jésus-Christ, avant même que d'être en état de comprendre la grandeur du sacrifice qu'ils faisaient.
Le martyre des Saint-Innocents a Bethléem sur l`ordre du Roi Hérode après la naissance de Jésus-Christ
Outre cela, saint Etienne a confessé Jésus - Christ par son discours devant le grand conseil, saint Jean par son évangile : «Et le Verbe s'est fait chair» les petits enfants de Bethléem par leur mort. C'est pourquoi nous prions au jour de leur fête : « 0 Dieu, dont les innocents Martyrs ont confessé aujourd'hui la gloire, non par leurs paroles, mais par leur mort, etc. »
L'Église célèbre cette fête comme un jour de deuil, tout-à-fait comme pendant l'Avent, se servant d'ornements violets et omettant dans la messe
le Gloria in excelsis. Cela se fait, soit pour exciter notre compassion envers les mères éplorées de ces jeunes martyrs, soit parce que ces enfants
moururent avant Jésus-Christ et ne purent par conséquent entrer immédiatement dans le ciel, devant rester d'abord dans les Limbes jusqu'à la mort du Fils de Dieu.
Le jour des Rois Mages – Épiphanie (6 janvier)-
Simon. Voici venir maintenant le jour des Rois Mages.
Le Curé. . . . qu'on nomme aussi Épiphanie. On appelle cette fête d'après les trois mages, le jour des Rois, parce que l'on croit, sur la foi de vieilles traditions , que ces Sages qui vinrent de l'Orient pour adorer le Sauveur, étaient des princes de ces pays. Qu'il en ait eu trois, c'est aussi la tradition chrétienne qui nous le rapporte. Ils offrirent aussi trois présents différents au divin Enfant.
Simon. Oui, de l'or, de l'encens et de la myrrhe.
Le Curé. Ces dons symbolisent parfaitement la nature et les intentions de Jésus-Christ, qui veut régner sur nous en qualité de roi de notre âme ; sa royauté nous est remémorée par l'or, que nous donnons en tribut aux rois de la terre; il veut se sacrifier lui-même comme victime, mais il est aussi le prêtre sacrificateur et enfin il vient réclamer nos adorations en qualité de Dieu , ce que l'encens nous rappelle admirablement bien. Il était vraiment Dieu, mais il voulut devenir homme, naître, travailler, souffrir et mourir.
Son humanité ne pouvait donc trouver de symbole plus frappant que la myrrhe dont on se servait pour embaumer les corps morts. Cependant ne nous contentons pas de l'explication de ces présents, sachons aussi en offrir d'équivalents au bon Sauveur qui s'est incarné pour notre salut.
Simon. Mais le moyen de lui offrir ces choses comme les Rois?
L`Adoration des Rois-Mages qui signifient celle des Gentils ( les nations non-juives).
Le Curé. Quant à l'or, le Sauveur est prêt à recevoir tout notre superflu soit en or, soit en argent, soit en cuivre. Il a placé les pauvres comme ses trésoriers au milieu de nous, et par ces paroles : « Ce que vous aurez fait au moindre d'entre mes frères, vous me l`aurez fait à moi-même ; » il leur a donné leurs lettres de créance sous la meilleure forme. Quelque riches que soient, du reste, les dons que nous faisons à Jésus-Christ, il n'en serait pas satisfait, si nous ne nous appliquions pas à renouveler au moins spirituellement l'offrande faite à lui par les Mages. On dit ordinairement : pur comme de l`or, juste, fidèle comme l'or à la balance, etc. Qui d'entre vous ne s'est pas servi maintes fois de cette manière de parler? Eh bien, vous comprenez alors aussi quelles sont les vertus que nous devons offrir à Dieu , et qui correspondent à ce premier présent.
Représentation des trois rois mages : Melchior, Gaspar et Balthazar avec l`or, l`encens et la myrrhe
L'encens qui nous rappelle encore de nos jours la ferveur, l'élévation de l'âme vers Dieu, devient par conséquent , à côté de la crèche de l'enfant Jésus, une pressante exhortation à la prière. Pour ne rien oublier, la myrrhe que nous offrirons à l'Homme-Dieu, c'est une profonde humilité , un grand renoncement qui est très propre à empêcher la pourriture, c'est-à-dire la tiédeur et le péché de s'emparer de notre âme. Peut-être Dieu pourvoira-t-il à ce que, sous ce rapport, l'occasion ne nous manque pas de lui offrir ce présent , en nous envoyant des peines et des tribulations qui sont une véritable myrrhe pour notre âme et l'empêchent de se corrompre.
Souffrons-les donc avec patience, offrons-les à Dieu, et de la sorte elles seront très-propres à nous guérir et à nous préserver de la pourriture du péché. Ayons surtout en vue, de notre côté, de ne pas en empêcher les fruits par des plaintes et des murmures contre la divine Providence. Approchons-nous du Sauveur et offrons-lui ces présents, et ainsi nous aurons très-bien sanctifié la fête de sa Manifestation, autrement dite de son Épiphanie.
Simon. Épiphanie signifierait donc la même chose que Manifestation ?
Le Curé. Oui, mon ami, ces deux mots veulent dire la même chose. Au jour de sa naissance , le Sauveur ne se manifesta qu'aux seuls bergers qui étaient Juifs et qui vinrent, comme vous savez, sur l'invitation de l'ange, adorer leur Rédempteur nouvellement né. Mais le Christ n'était pas venu seulement pour les Juifs, mais aussi pour les infidèles qui composaient la grande majorité des habitants de la terre. Cette circonstance fut indiquée tout d'abord le jour que de pieux Gentils vinrent à Bethléem pour présenter leurs hommages au nouveau Messie. Dès-lors il ne fut plus possible de penser que Jésus fut venu pour les Juifs exclusivement ; en se manifestant aux trois Rois, il donnait suffisamment à entendre qu'il était descendu sur la terre pour tout le monde. Avez-vous déjà réfléchi à ce qu'ont été vos pères?
Simon. Oui, ils étaient païens. (Adorateurs des idoles des faux dieux)
Le Curé. Vous voyez donc pourquoi cet événement est d'une si grande importance : c'est aussi la raison pour laquelle l'Église a toujours fêté ce jour avec la plus grande solennité. C'est comme une fête d'actions de grâces, de ce que Dieu a bien voulu éclairer nos ancêtres de la lumière de la vraie foi et nous donner à nous-mêmes la grâce de naître dans la sainte Église catholique. — En ce même jour, l'Église nous rappelle aussi le baptême de Jésus-Christ , à l'occasion duquel le Père et le Saint-Esprit le proclamèrent, pour ainsi dire, Fils de Dieu pour la première fois du haut du ciel et en présence d'un grand nombre d'hommes réunis auprès du Jourdain , auxquels sa dignité était ainsi manifestée. Enfin le jour des Rois est également destiné à nous rappeler le miracle de la noce de Cana, au moyen duquel le Sauveur manifesta pour la première fois sa divinité par un fait. Voilà autant de manifestations de Jésus-Christ, ou bien autant de circonstances par lesquelles il constatait son origine divine ainsi que sa céleste mission.
Simon. Je ne me rappelle pas pour le moment quelle est la fête la plus rapprochée de l'Épiphanie , pour vous en demander l'explication.
La Fête de la Purification de la St-Vierge Marie ou la Chandeleur - ( 2 février)
La présentation de l`enfant Jésus au Temple de Jérusalem
Le Curé. C'est la fête de la Purification de la Sainte Vierge ou la Chandeleur.
Simon. Oui, c'est cela ! N'est-ce pas en ce jour qu'a lieu la bénédiction des cierges?
Le Curé. Effectivement, Simon, et cet usage a une signification aussi belle que profonde. Une simple chandelle allumée renferme tout un enseignement. Rien de surprenant donc , si l'Église en fait un usage si fréquent , non-seulement dans le culte solennel et public, mais dans presque toutes les fonctions les plus ordinaires. Simon. Vous aurez la bonté, M. le curé , de nous en dire un mot avant de nous séparer.
Le Curé. Si, en ce jour de fête on fait usage des cierges bénits (de là vient aussi le nom de Chandeleur) avant la grand messe , il
faut que vous sachiez que les cierges nous rappellent Jésus-Christ, en ce sens que :
1° Jésus-Christ , fils de Dieu, est la lumière véritable qui est venue dans le monde afin d'éclairer les hommes. Il fut porté en ce jour dans le temple et offert au Père céleste. De même aussi nous devons nous offrir à Dieu et être prêts à ouvrir nos yeux à la lumière divine.
2° Cet usage doit nous faire souvenir du moment auquel le vieillard saint Siméon portant l'enfant Jésus dans ses bras , s'écriait plein d'allégresse : « Maintenant mes yeux ont vu la lumière qui doit éclairer tous les peuples. » A nous aussi , cette lumière s'est rendue visible, réjouissons-nous de ce bonheur et remercions en Dieu par un grand amour envers lui.
3° La cire des cierges nous représente la chair toute virginale de l'humanité de Jésus-Christ, qui est comme le fruit éclos du sein immaculé de Marie, tout comme la cire est une production de l'abeille qui est si propre et si pure. Les prières de l'Église pendant cette bénédiction ne rappellent autre chose que les idées que je viens de vous développer.
Le Curé. Oui, mais je n'ai pas encore tout dit relativement à ce que signifie un cierge. Une simple chandelle allumée est très-riche en enseignements pour les hommes, en ce qu’elle possède certaines qualités physiques que nous devons acquérir pour notre âme. Tenez, ne dit-on pas la lumière de la Foi; une lueur d'espérance? Le cierge allumé nous rappelle donc ces deux vertus et nous invite à les pratiquer. Mais c'est surtout la charité qui est admirablement symbolisée par l'ardeur de la lumière. L'amour que nous
portons à Dieu n'a-t-il pas des traits de ressemblance avec cette flamme qui tend continuellement vers le ciel et qui semble nous inviter à la contemplation des bontés et des miséricordes du Seigneur et à la prière? Tournez et retournez une chandelle dans tous les sens, chaque fois la flamme se dirigera vers le haut ; de même le chrétien véritable peut bien être accablé de malheurs, de tribulations, de revers de tout genre, de tentations, mais son âme ne cessera de tendre vers le haut, et son cœur de vivre dans l'union avec Dieu. Mais faites-y bien attention : la flamme, si elle est faible, s'éteindra en la tenant longtemps dirigée vers la terre, elle ne fera au contraire que grandir, si elle est forte.
Simon. Cela veut donc dire que nous devons nous appliquer à avoir un grand amour de Dieu et une grande ferveur.
Le Curé. Et que tous les malheurs que Dieu envoie ne servent qu'à augmenter les mérites du juste, tandis que celui qui reste faible par sa faute en vivant dans la tiédeur, finit par détourner ses regards de Dieu et désespérer de son assistance. En second lieu, le cierge est une représentation de notre vie et de sa durée. Comme le cierge est destiné à augmenter la gloire de Dieu par la lumière qu'il répand, et à servir aux hommes tant dans l'Église que dans leurs maisons ou ailleurs ; ainsi notre vie doit se consumer et se partager entre le service de Dieu et celui du prochain jusqu'à notre dernier soupir. Mais malheur à nous , si, à l'heure de notre mort , notre vie n'a ressemblé qu'à un cierge qui
s'est consumé inutilement dans un coin !
Troisièmement. Pour que le cierge puisse brûler et devenir ainsi comme un sacrifice fait à Dieu , d'innombrables essaims d'abeilles ont dû réunir avec une activité infatigable la cire dont il est fait. C'est ainsi que notre vie ne deviendrait jamais un sacrifice agréable à Dieu , si nous n'en usions point pour recueillir des mérites devant lui, et si nous ne la passions pas dans la pratique des bonnes œuvres.
Quatrièmement. Les flambeaux allumés que nous portons en nos mains ont pour but de nous rappeler les paroles du Sauveur : « Ceignez vos reins et portez des flambeaux ardents en vos mains » ( Luc 12. 35.) et ces autres : « Que votre lumière luise devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu'ils louent votre Père qui est dans les Cieux» (Matthieu 5. 16.). Car il ne faut pas oublier que notre qualité de chrétien nous oblige à édifier par de bons exemples nos frères, qu'ils soient chrétiens ou infidèles, mais surtout ceux qui nous sont soumis.
Thomas. Mais à quoi sert-il donc de bénir les cierges?
Le Curé. Le prêtre supplie le Seigneur d'augmenter dans le cœur de ceux qui les portent ou qui s'en servent, le feu de son amour, qu'il daigne les éclairer de sa lumière, de son Saint-Esprit et leur donner ce qui leur est nécessaire tant pour l'âme que pour le corps. Celui donc qui n'est pas indigne de ses grâces a tout lieu d'espérer que Dieu exaucera une prière qui lui est adressée au nom de toute l'Église catholique. Du reste la bénédiction des cierges peul servir à nous faire souvenir du Saint des Saints , qui est de venu homme et nous est représenté par le cierge lui-même ; il nous rappelle notre Baptême et le caractère ineffaçable qu'il a imprimé en nous, la pureté et la sainteté promises à Dieu aux premiers jours de notre vie, ainsi que la promesse que nous avons faite de nous vouer tout entier à Lui.
Un jour aussi, mes chers amis, on vous tiendra un cierge à la main comme au jour qui suivit votre naissance , quand la sueur froide , qui couvrira votre front , vos amis éplorés autour de votre lit, et le dernier râle qui vous suffoquera, vous feront présumer qu'enfin l'heure de votre dissolution n'est pas éloignée ; oh ! alors puissiez-vous et puissions-nous tous , en voyant ce cierge mortuaire, n'y trouver qu'un présage de la lumière éternelle et non un terrifiant pronostic des flammes éternelles , qu'une vie de péchés et une fin impénitente nous forceraient de redouter.
Bénédiction de saint Blaise. 3 février - (Évêque et martyr)
Saint Blaise: Saint Blaise de Sébaste, est un médecin et évêque martyrisé sous Licinius en Arménie en 316 Ap J.C., par l'ordre d'Agricola, gouverneur de Cappadoce (Région gréco-romaine a cette époque - en Turquie actuelle).
Simon. Je n'aurais jamais cru qu'on pût trouver tant de belles pensées à la vue d'un simple flambeau ou d'un cierge qu'on regarde à peine et auquel , pour mon compte , je n'avais pas rattaché la moindre idée jusqu'à ce jour. Quoiqu'il se soit fait tard, monsieur le curé , je prendrai la liberté de vous importuner encore par une dernière question : Pourquoi bénit-on le cou le lendemain, jour de saint Blaise , avec des cierges bénits ?
Le Curé. Cet usage n'est pas général dans le monde catholique, mais on le retrouve dans un grand nombre de diocèses et il est très-ancien. Selon une très-vieille tradition, saint Blaise, qui était évêque de Sébaste en Arménie, guérit miraculeusement un enfant réduit à l'extrémité par une arête de poisson qu'il avait avalée; elle lui était demeurée dans la gorge et on désespérait de l'en extraire par des moyens naturels. Soit pour cette raison, soit pour une autre, le fait est qu'on a invoqué ce saint spécialement pour obtenir par son intercession auprès de Dieu la guérison des maladies de la gorge, et les prières par lesquelles on bénit ces cierges nous indiquent que Dieu protège ceux qui reçoivent cette bénédiction avec un esprit de foi. On demande de plus, dans ces prières, que le Seigneur veuille les préserver de tous les maux et particulièrement des maux de l'âme, et les en délivrer, si jamais ils en sont atteints.
Nous en sommes donc venus dans nos explications jusqu'au temps qui nous sert de préparation au carême ; — mais je crois, mes amis , que l'heure déjà avancée nous dit assez que, pour aujourd'hui , nous ne pouvons rien faire de mieux que de reprendre le chemin de nos foyers. Nous continuerons donc à la première réunion. Loué soit Jésus Christ ! — A jamais.
Dernière édition par MichelT le Mer 26 Oct 2022 - 13:16, édité 2 fois
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN DEUXIÈME.
DE LA SEPTUAGÉSIME JUSQU'AU DIMANCHE DE LA PASSION. ( Extraits)
Résumé. Septuagésime. Sexagésime. Quinquagésime. Carême. Mercredi des cendres. Le jeûne. Origine du mot Collation. Abstinence.
A la réunion suivante, le curé commença ainsi : Notre explication du culte catholique nous a conduits jusqu'au carême ou plutôt jusqu'aux dimanches qui servent de préparation au carême et qui en forment comme l'introduction. Il est nécessaire que je vous en parle d'abord brièvement avant d'écouter vos questions.
Dans les premiers siècles du christianisme, on se préparait partout à la fête de Pâques par un certain nombre de jours destinés à la mortification et à la pénitence, mais ce nombre variait d'après les usages des diocèses. Ici on jeûnait durant quarante jours, là on étendait le jeûne jusqu'à soixante-dix.
Dans différents pays il s'était même introduit la coutume de supprimer quelques jours de jeûne pendant la semaine, et en conséquence on commençait le carême aussitôt que c'était nécessaire pour obtenir, en les additionnant, les quarante jours de jeûne. C'est pourquoi les uns le commençaient au cinquantième , ou au soixantième jour, tandis que les autres le faisaient au septantième ; voilà la raison pour la quelle on a appelé et pourquoi l'on appelle encore les dimanches qui précèdent le carême Septuagésime , Sexagésime , Quinquagésime; ce qui revient à dire : le dimanche qui tombe pendant le carême de septante, soixante ou cinquante jours, tout comme le nom de Quadragésime (carême), appliqué aux dimanches de carême indique simplement que ces dimanches tombent pendant le carême de quarante jours.
Ce ne fut qu'en l`an 511 et 541 Ap J.C. que les Souverains Pontifes et les Conciles portèrent des lois statuant que , dans toute l'Église catholique, le temps de pénitence serait commencé et observé d'une manière uniforme ; en conséquence on restreignit le carême à quarante-six jours , dont quarante de jeûne , les dimanches étant exceptés relativement à ce précepte. Cependant on a continué à donner à ces dimanches leurs anciens noms, et dans l'office divin, on les célèbre à peu près de la même manière que ceux du carême.
Le prêtre se revêt d'ornements violets, symbole de la pénitence ; à la messe, il ne dit pas le Gloria in excelsis ; il ne prononce plus le cri de joie Alleluia. C'est ce qu'il observe aussi dans la récitation de son bréviaire , et au lieu du mot Alleluia , il dit : Louanges vous soient rendues , Seigneur , roi de gloire éternelle. Le sens des paroles est à peu près le même , si vous voulez , mais il leur manque cependant ce ton d'allégresse exprimé par Alleluia. De plus il ne dit plus les psaumes qui expriment surtout la joie , comme il le fait durant les autres temps de l'année. Surtout il répète souvent le psaume Miserere (Ayez pitié de moi, Seigneur, selon la grandeur de vos miséricordes). De la sorte le cœur du chrétien se prépare peu-à-peu au temps sévère du deuil et de la pénitence de ses péchés, ou en un mot au saint temps du carême.
Simon. Pour quelle raison répand-on des cendres sur la tête des fidèles au commencement du carême?
Mercredi de Cendres – Commencement du Carême - « Souviens-toi, ô homme , que tu n`es que poussière et que tu retourneras en poussière . »
Le Curé : Cela veut dire qu'à dater de ce jour va commencer le temps de pénitence, comme l'Église l'exprime aussi dans les heures canoniales : « Ils sont venus, les jours de la pénitence, pour nous délivrer de nos péchés ; » car , dans tous les temps , on s'est servi des cendres pour signifier la pénitence et pour la pratiquer. C'est ainsi que les habitants de Ninive ( ancien Royaume de l`Assyrie vers 700 Av J.C, en Irak actuel) répandirent des cendres sur leurs têtes , pour faire pénitence de leurs péchés, et que le roi David ( roi d’Israël vers l`an 1000 Av J.C.) dit, d'une manière figurée sans doute, qu'il a mangé des cendres au lieu de pain.
Les habitants de la ville de Ninive dans le puissant royaume d`Assyrie font pénitence publique pour les péchés de leur nation. (voir le livre Jonas 3,1 - Ancien Testament) - vers 700 Av J.C. - les ruines de cette ville ancienne sont en Irak.
La seconde intention qu'a l'Église est de représenter à l'orgueil humain son néant et sa fragilité et de lui rappeler l'humilité : c'est pourquoi, en donnant les cendres, le prêtre dit ces paroles : « Souviens-toi, ô homme , que tu n`es que poussière et que tu retourneras en poussière . » Saint Isidore dit : « Ou leur distribue des cendres , afin qu'ils se souviennent qu'ils ne sont que cendre et poussière. Considérons donc , au moyen des cendres , le jugement de mort que nous devons subir par suite du péché. »
Oui, pour indiquer avec plus d'insistance le néant du monde et surtout la fragilité des plaisirs et de la gloire terrestre, il est de précepte qu'on doit se servir des cendres des rameaux bénits l'année précédente et qui ont signifié par conséquent l'entrée triomphante de Jésus Christ à Jérusalem.
C'est le pape saint Grégoire qui a ordonné vers la fin de sa vie que le carême commencerait en ce jour. Durant les premières années de son pontificat , on ne le commençait qu'au lundi suivant; mais, comme on ne jeûne pas les dimanches, il se trouvait qu'il n'y avait que trente-six jours de jeune jusqu'à la fête de Pâques. Ces trente-six jours de l'année le saint Pontife les nomme la dîme de tous les jours de l'année qui est due au Seigneur et qu'il faut lui offrir en les sanctifiant d'une manière particulière par le jeune et les bonnes œuvres. Mais pour compléter le nombre de quarante jours, il y ajouta les quatre jours qui précédaient le premier dimanche de carême.
A l'origine, on ne distribuait des cendres qu'à ceux qui devaient faire pénitence publique et dont la pénitence commençait en ce jour. D'autres chrétiens , par humilité et dévotion, s'adjoignirent à eux pour recevoir aussi les cendres. Enfin l'an 1091, il fut ordonné par le concile de Bénévent , que la distribution des cendres aurait lieu pour tous, afin que par ces pressants avertissements, on en retirât une grande utilité spirituelle.
1° Nous jeûnons pour nous punir nous-mêmes de nos péchés. Considérant combien de fois nous avons offensé Dieu, tout ce que le Sauveur a fait et souffert par amour pour nous , afin de nous réconcilier avec son père céleste et nous rendre justes et saints, voyant de plus combien nous sommes ingrats en péchant continuellement, nous devons certainement nous en vouloir à nous-mêmes. Il vous est peut-être arrivé plus d'une fois de vous punir vous-même après quelque bévue ou quelque maladresse, eh bien! c'est ainsi que nous nous sentons de même portés à nous punir de notre conduite envers Dieu. C'est là un bon signe qui indique que nous avons un repentir véritable et que nous voulons réellement nous amender.
Les Psaumes de Pénitence du Roi David ( roi d`Israël vers l`an 950 Av J.C.)
Aussi n'est-il nullement inutile ni indifférent de nous imposer une pénitence de ce genre. Il est certain que les souffrances sont des suites du péché , et il n'est pas moins vrai que si nous ne nous en infligeons pas nous-mêmes, c'est Dieu lui-même qui devra s'en charger en nous envoyant, toute autre mortification dans cette vie ou bien les peines du purgatoire en l'autre monde.
2° Le jeûne nous aide à nous convertir. Bien des péchés ont leur source dans la mollesse du corps. Nous raisonnons tout autrement sur bien des points , nous jugeons de maintes choses bien différemment, quand nous avons renoncé pour quelques jours à la bonne chère et que, par les macérations, notre esprit est de venu plus lucide et plus calme. Par le jeûne, nous arrêtons notre corps dans sa fougue , de telle manière qu'il n'ose plus empiéter sur les droits de notre raison en lui dictant ses lois. Dans tout cela, je suppose toujours que, même hors du temps de carême, on ne mène pas une vie d'intempérance ; mais vous devez comprendre maintenant vous-même que, pour atteindre les fins mentionnées, une vie sobre doit être réellement une vie de jeûne.
Thomas. Mais Jésus-Christ lui-même a reproché très-sévèrement aux Pharisiens leurs jeûnes et il dit même que ce n’est pas ce qui entre par la bouche , mais bien ce qui en sort qui souille l`homme. Ne semble-t-il point désapprouver, par ces paroles, l'observance de s'abstenir des aliments.
Le Curé. Il faut que je vous fasse observer d'abord que le jeûne ne consiste pas seulement, ni même principalement, à s'abstenir de nourriture; tout ce qui flatte notre corps et nos sens ou qui favorise nos caprices est pour nous une jouissance que nous préférons très-souvent au boire et au manger. Dans tout cela , nous pouvons et nous devons même nous imposer un jeûne , une privation. Quant aux Pharisiens , le divin Sauveur les reprend, comme il les avait déjà repris sur leurs cérémonies, par la raison qu'ils ne recherchaient que la gloire devant les hommes et qu'ils se figuraient être agréables à Dieu en jeûnant, sans se soucier le moins du monde de se convertir , et de faire pénitence.
C'est pourquoi il nous or donne de ne pas faire parade de nos macérations , et de ne pas simuler un air de tristesse pendant ce temps, afin d'attirer les louanges des autres à cause de notre vie mortifiée. C'est aussi la raison par laquelle il leur reproche de ne pas jeûner d'une manière consciencieuse, mais de le faire pour offenser leur prochain. Le jeûne n'a aucun prix, si on ne renonce au péché. C'est ce que dit le pape saint Léon dans un de ses discours. « L'accomplissement du précepte de jeûner ne consiste pas seulement à s'abstenir de la nourriture , car c'est sans utilité qu'on la retire au corps , si l'on ne retire en même temps à l'âme sa malice. » —
Ce qui entre par la bouche ne souille pas l'homme , ce sont des paroles prononcées par le Sauveur lui-même et que nous répétons après lui ; car ce n'est réellement pas la nourriture , par laquelle nous rompons le jeûne qui nous souille ; elle est tout aussi pure, tout aussi inoffensive les jours de jeûne que les autres jours - mais ce qui souille notre cœur, c'est la malice et la mauvaise volonté, par lesquelles nous devenons infidèles en nous rendant coupables de désobéissance aux 10 Commandements, et allant directement contre les lois divines. S'il en était autrement, nous pourrions aller jusqu'à l'intempérance, sans commettre de péché. Le péché de nos premiers parents ne consistait lui-même que dans la transgression d'un commandement semblable : Adam et Ève n'avaient fait que manger du fruit défendu. Mais la circonstance que ce fruit leur était défendu a fait, qu'en en mangeant, ils devinrent désobéissants à Dieu , et c'est précisément la désobéissance qui constituait, à proprement parler, le péché.
Thomas. Pourquoi ne pas laisser à chacun sa liberté dans le choix du temps et de la manière dont il veut jeûner?
Le Curé. L'Église est tout aussi peu coupable de la transgression que, par exemple, le commandement : «Vous ne tuerez point» l'est du meurtre. Ceux-là précisément qui transgressent les lois de l'Église, prouvent qu'ils penseraient encore beaucoup moins au devoir de jeûner, si ces lois n'existaient pas. Mais si l'Église a donné des ordres relativement au temps et au mode de jeûne, c'est qu'elle veut nous faire exercer notre obéissance et nous apprendre à vaincre notre volonté propre qui est la cause de tant de péchés.
Celui qui n'est pas habitué à se refuser quelque chose sera bientôt le jouet de ses passions et de sa concupiscence qui le porte au péché; mais celui qui a appris à obéir aux préceptes de l'Église catholique aura aussi la force et le courage de se refuser la transgression des commandements de Dieu , si jamais une passion ou une tentation quelconque venait à l'y pousser. Il est libre à chacun de jeûner quand il l'entend , pourvu qu'il le fasse aussi aux jours où cela lui est ordonné par l'Église. Alors seulement il peut faire plus ou autrement selon son choix. Mais n'oublions pas que « l'obéissance est préférable au sacrifice» (1 Rois 15,22) et que «celui qui n'écoute pas l’Église doit être regardé comme un païen et un publicain (Matthieu 18,17). »
Simon. Pourquoi l'Église a-t-elle déterminé justement les quarante jours qui précèdent la fête de Pâques?
Le Curé. En cela nous suivons l'exemple de Jésus-Christ qui , avant de commencer sa vie publique, jeûna pendant quarante jours et quarante nuits, circonstance qui a, pour ainsi dire, rendu sacré le nombre de quarante.
Notre Seigneur Jésus-Christ jeûne pendant 40 jours au désert pour nous donner l`exemple (Matthieu 4,2)
Note : Moïse dit dans le Deutéronome 9. 9. «Quand je montai sur la montagne pour recevoir les tables de pierre, les tables de l'alliance que le Seigneur fit avec vous, je demeurai sur cette montagne durant quarante jours et quarante nuits ne mangeant pas de pain et ne buvant pas d'eau. » Moïse n'est ici que la figure de Notre Seigneur. Avant de commencer sa vie publique qu'il termina en montant sur la montagne du Calvaire, où la nouvelle alliance fut scellée de son sang, Jésus-Christ se retira pendant quarante jours dans le désert où il jeûna aussi pendant quarante jours et quarante nuits.
— Mais que l'on ait choisi de préférence les jours qui précèdent la fête de Pâques en voici les raisons :
1° Le temps de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ est le plus important de toute l'année ecclésiastique parce que notre rédemption repose entièrement sur ces faits. Nous avons donc assez de raisons pour nous préparer à célébrer dignement, c'est-à-dire, avec une grande application et une pieuse sévérité ces grands mystères , d'autant plus que nous avons déjà fait précéder la fête de Noël d'une préparation de quatre semaines qui est l'Avent. Jésus-Christ est descendu sur la terre et il y est mort à cause de nos péchés. Si nous nous souvenons donc de ce que notre Sauveur a fait et souffert pour nous, ne devons-nous pas aimer également à souffrir quelque peu avec lui et lui montrer justement en ce saint temps, la bonne volonté que nous avons de nous corriger.
2° C'est pendant le temps pascal que nous devons nous approcher des saints Sacrements de Pénitence et d'Eucharistie ; il y a donc là aussi une invitation à changer de vie et à ne pas manquer de réprimer convenablement nos mauvais penchants.
3° L'Église a choisi de préférence le printemps , parce que cette saison qui n'est pas sans quelque influence sur nos passions, nécessite aussi un frein particulier, pour empêcher nos mauvais penchants de nous entraîner avec trop d'impétuosité et de remporter la victoire sur les bons sentiments et les bons propos de notre âme.
Simon. A-t-on toujours observé le carême de la même manière qu'on le fait maintenant ?
Le Curé. Dans ce qui est essentiel, il n'a pas changé ; car les Pères de l'Église des premiers siècles tels que saint Léon, saint Jérôme et d'autres affirment que le jeûne, et le jeûne de quarante jours en particulier, tire son origine des Apôtres. La manière dont on s'en acquittait à seule varié en deux points. Au commencement, le jeûne était beaucoup plus sévère, puisque dans plusieurs endroits on s'abstenait de manger des œufs, du beurre , du fromage , ce qui se pratique encore de nos jours chez les Grecs. Dans quelques pays, l'usage du vin même était défendu. L'Église permit tout cela plus tard, afin de ne pas rendre son précepte trop difficile à un grand
nombre de fidèles.
En second lieu on jeûnait pendant toute la journée et l'on ne prenait son repas qu'après le coucher du soleil. De là vient l'usage que les prêtres récitent encore aujourd'hui les Vêpres avant midi pendant tout le carême parce qu'autrefois on ne dinait qu'après les Vêpres. A l'Église, on les chantait immédiatement après la messe. A dater du treizième siècle l'Église permit de prendre le repas principal à midi, et, le soir, un petit rafraîchissement. Le nom de collation qui fut donné à ce rafraîchissement provient des couvents.
Lorsque les religieux , excédés de fatigues par le chant des offices et le travail des mains, s'étaient rendus au réfectoire pour prendre quelques fruits ou un morceau de pain avec un verre d'eau, on commençait par une lecture du beau livre du saint abbé Cassien qui porte le titre de « Collationes Patrum » c'est-à-dire a Recueil de passages tirés des saints Pères . Pour exprimer donc qu'on se rendait au réfectoire, on disait qu'on allait à la collation ou bien à la lecture spirituelle. De là est venu aussi le nom de collation , pour exprimer le petit rafraîchissement que l'Église permettait les jours de jeûne.
Note : Jeûne et abstinence. Le précepte du jeûne comme celui de l'abstinence a son origine dans l'ancien Testament. Dans la loi mosaïque nous rencontrons un jeûne prescrit pour tout le peuple: c'était le grand jour de pénitence et de propitiation auquel il était défendu de prendre la moindre nourriture pendant 24 heures. Outre ce jeûne universel et régulier, on le prescrivait encore à certaines occasions extraordinaires p. ex. pendant les calamités publiques. C'est ainsi que le peuple de Dieu adoucit la colère divine par la pénitence et par un jeûne prescrit par Samuel (1. Samuel. 7,3). A Ninive le roi ordonna « que les hommes et les chevaux, les bœufs et les brebis ne prissent aucune nourriture. » (Jonas. 3.) Menacés par Holopherne, les Juifs recoururent à la prière et au jeûne. (Judith 4. 8.) La même chose se fit sous la persécution d'Aman. (Esther. 4. 16.) Voyez encore là-dessus Joël 1. 14. — On jeûnait aussi par dévotion particulière, comme le prouvent le roi David, Sara, fille de Raguel (Tobie 3. 10.) Anne (Luc. 2. 37.), etc. Donc depuis Adam jusqu'à St Jean-Baptiste le jeûne et l'abstinence ont été pratiqués; Jésus qui n'était pas venu pour détruire l'ancienne loi, mais pour l'accomplir et la perfectionner, a sanctifié cet usage par son exemple ; l'Église l'a sanctionné par ses préceptes.
Finissons pour aujourd'hui; la fois prochaine nous aurons à nous entretenir d'un grand nombre de choses importantes. Loué soit Jésus.-Christ ! — A jamais.
DE LA SEPTUAGÉSIME JUSQU'AU DIMANCHE DE LA PASSION. ( Extraits)
Résumé. Septuagésime. Sexagésime. Quinquagésime. Carême. Mercredi des cendres. Le jeûne. Origine du mot Collation. Abstinence.
A la réunion suivante, le curé commença ainsi : Notre explication du culte catholique nous a conduits jusqu'au carême ou plutôt jusqu'aux dimanches qui servent de préparation au carême et qui en forment comme l'introduction. Il est nécessaire que je vous en parle d'abord brièvement avant d'écouter vos questions.
Dans les premiers siècles du christianisme, on se préparait partout à la fête de Pâques par un certain nombre de jours destinés à la mortification et à la pénitence, mais ce nombre variait d'après les usages des diocèses. Ici on jeûnait durant quarante jours, là on étendait le jeûne jusqu'à soixante-dix.
Dans différents pays il s'était même introduit la coutume de supprimer quelques jours de jeûne pendant la semaine, et en conséquence on commençait le carême aussitôt que c'était nécessaire pour obtenir, en les additionnant, les quarante jours de jeûne. C'est pourquoi les uns le commençaient au cinquantième , ou au soixantième jour, tandis que les autres le faisaient au septantième ; voilà la raison pour la quelle on a appelé et pourquoi l'on appelle encore les dimanches qui précèdent le carême Septuagésime , Sexagésime , Quinquagésime; ce qui revient à dire : le dimanche qui tombe pendant le carême de septante, soixante ou cinquante jours, tout comme le nom de Quadragésime (carême), appliqué aux dimanches de carême indique simplement que ces dimanches tombent pendant le carême de quarante jours.
Ce ne fut qu'en l`an 511 et 541 Ap J.C. que les Souverains Pontifes et les Conciles portèrent des lois statuant que , dans toute l'Église catholique, le temps de pénitence serait commencé et observé d'une manière uniforme ; en conséquence on restreignit le carême à quarante-six jours , dont quarante de jeûne , les dimanches étant exceptés relativement à ce précepte. Cependant on a continué à donner à ces dimanches leurs anciens noms, et dans l'office divin, on les célèbre à peu près de la même manière que ceux du carême.
Le prêtre se revêt d'ornements violets, symbole de la pénitence ; à la messe, il ne dit pas le Gloria in excelsis ; il ne prononce plus le cri de joie Alleluia. C'est ce qu'il observe aussi dans la récitation de son bréviaire , et au lieu du mot Alleluia , il dit : Louanges vous soient rendues , Seigneur , roi de gloire éternelle. Le sens des paroles est à peu près le même , si vous voulez , mais il leur manque cependant ce ton d'allégresse exprimé par Alleluia. De plus il ne dit plus les psaumes qui expriment surtout la joie , comme il le fait durant les autres temps de l'année. Surtout il répète souvent le psaume Miserere (Ayez pitié de moi, Seigneur, selon la grandeur de vos miséricordes). De la sorte le cœur du chrétien se prépare peu-à-peu au temps sévère du deuil et de la pénitence de ses péchés, ou en un mot au saint temps du carême.
Simon. Pour quelle raison répand-on des cendres sur la tête des fidèles au commencement du carême?
Mercredi de Cendres – Commencement du Carême - « Souviens-toi, ô homme , que tu n`es que poussière et que tu retourneras en poussière . »
Le Curé : Cela veut dire qu'à dater de ce jour va commencer le temps de pénitence, comme l'Église l'exprime aussi dans les heures canoniales : « Ils sont venus, les jours de la pénitence, pour nous délivrer de nos péchés ; » car , dans tous les temps , on s'est servi des cendres pour signifier la pénitence et pour la pratiquer. C'est ainsi que les habitants de Ninive ( ancien Royaume de l`Assyrie vers 700 Av J.C, en Irak actuel) répandirent des cendres sur leurs têtes , pour faire pénitence de leurs péchés, et que le roi David ( roi d’Israël vers l`an 1000 Av J.C.) dit, d'une manière figurée sans doute, qu'il a mangé des cendres au lieu de pain.
Les habitants de la ville de Ninive dans le puissant royaume d`Assyrie font pénitence publique pour les péchés de leur nation. (voir le livre Jonas 3,1 - Ancien Testament) - vers 700 Av J.C. - les ruines de cette ville ancienne sont en Irak.
La seconde intention qu'a l'Église est de représenter à l'orgueil humain son néant et sa fragilité et de lui rappeler l'humilité : c'est pourquoi, en donnant les cendres, le prêtre dit ces paroles : « Souviens-toi, ô homme , que tu n`es que poussière et que tu retourneras en poussière . » Saint Isidore dit : « Ou leur distribue des cendres , afin qu'ils se souviennent qu'ils ne sont que cendre et poussière. Considérons donc , au moyen des cendres , le jugement de mort que nous devons subir par suite du péché. »
Oui, pour indiquer avec plus d'insistance le néant du monde et surtout la fragilité des plaisirs et de la gloire terrestre, il est de précepte qu'on doit se servir des cendres des rameaux bénits l'année précédente et qui ont signifié par conséquent l'entrée triomphante de Jésus Christ à Jérusalem.
C'est le pape saint Grégoire qui a ordonné vers la fin de sa vie que le carême commencerait en ce jour. Durant les premières années de son pontificat , on ne le commençait qu'au lundi suivant; mais, comme on ne jeûne pas les dimanches, il se trouvait qu'il n'y avait que trente-six jours de jeune jusqu'à la fête de Pâques. Ces trente-six jours de l'année le saint Pontife les nomme la dîme de tous les jours de l'année qui est due au Seigneur et qu'il faut lui offrir en les sanctifiant d'une manière particulière par le jeune et les bonnes œuvres. Mais pour compléter le nombre de quarante jours, il y ajouta les quatre jours qui précédaient le premier dimanche de carême.
A l'origine, on ne distribuait des cendres qu'à ceux qui devaient faire pénitence publique et dont la pénitence commençait en ce jour. D'autres chrétiens , par humilité et dévotion, s'adjoignirent à eux pour recevoir aussi les cendres. Enfin l'an 1091, il fut ordonné par le concile de Bénévent , que la distribution des cendres aurait lieu pour tous, afin que par ces pressants avertissements, on en retirât une grande utilité spirituelle.
1° Nous jeûnons pour nous punir nous-mêmes de nos péchés. Considérant combien de fois nous avons offensé Dieu, tout ce que le Sauveur a fait et souffert par amour pour nous , afin de nous réconcilier avec son père céleste et nous rendre justes et saints, voyant de plus combien nous sommes ingrats en péchant continuellement, nous devons certainement nous en vouloir à nous-mêmes. Il vous est peut-être arrivé plus d'une fois de vous punir vous-même après quelque bévue ou quelque maladresse, eh bien! c'est ainsi que nous nous sentons de même portés à nous punir de notre conduite envers Dieu. C'est là un bon signe qui indique que nous avons un repentir véritable et que nous voulons réellement nous amender.
Les Psaumes de Pénitence du Roi David ( roi d`Israël vers l`an 950 Av J.C.)
Aussi n'est-il nullement inutile ni indifférent de nous imposer une pénitence de ce genre. Il est certain que les souffrances sont des suites du péché , et il n'est pas moins vrai que si nous ne nous en infligeons pas nous-mêmes, c'est Dieu lui-même qui devra s'en charger en nous envoyant, toute autre mortification dans cette vie ou bien les peines du purgatoire en l'autre monde.
2° Le jeûne nous aide à nous convertir. Bien des péchés ont leur source dans la mollesse du corps. Nous raisonnons tout autrement sur bien des points , nous jugeons de maintes choses bien différemment, quand nous avons renoncé pour quelques jours à la bonne chère et que, par les macérations, notre esprit est de venu plus lucide et plus calme. Par le jeûne, nous arrêtons notre corps dans sa fougue , de telle manière qu'il n'ose plus empiéter sur les droits de notre raison en lui dictant ses lois. Dans tout cela, je suppose toujours que, même hors du temps de carême, on ne mène pas une vie d'intempérance ; mais vous devez comprendre maintenant vous-même que, pour atteindre les fins mentionnées, une vie sobre doit être réellement une vie de jeûne.
Thomas. Mais Jésus-Christ lui-même a reproché très-sévèrement aux Pharisiens leurs jeûnes et il dit même que ce n’est pas ce qui entre par la bouche , mais bien ce qui en sort qui souille l`homme. Ne semble-t-il point désapprouver, par ces paroles, l'observance de s'abstenir des aliments.
Le Curé. Il faut que je vous fasse observer d'abord que le jeûne ne consiste pas seulement, ni même principalement, à s'abstenir de nourriture; tout ce qui flatte notre corps et nos sens ou qui favorise nos caprices est pour nous une jouissance que nous préférons très-souvent au boire et au manger. Dans tout cela , nous pouvons et nous devons même nous imposer un jeûne , une privation. Quant aux Pharisiens , le divin Sauveur les reprend, comme il les avait déjà repris sur leurs cérémonies, par la raison qu'ils ne recherchaient que la gloire devant les hommes et qu'ils se figuraient être agréables à Dieu en jeûnant, sans se soucier le moins du monde de se convertir , et de faire pénitence.
C'est pourquoi il nous or donne de ne pas faire parade de nos macérations , et de ne pas simuler un air de tristesse pendant ce temps, afin d'attirer les louanges des autres à cause de notre vie mortifiée. C'est aussi la raison par laquelle il leur reproche de ne pas jeûner d'une manière consciencieuse, mais de le faire pour offenser leur prochain. Le jeûne n'a aucun prix, si on ne renonce au péché. C'est ce que dit le pape saint Léon dans un de ses discours. « L'accomplissement du précepte de jeûner ne consiste pas seulement à s'abstenir de la nourriture , car c'est sans utilité qu'on la retire au corps , si l'on ne retire en même temps à l'âme sa malice. » —
Ce qui entre par la bouche ne souille pas l'homme , ce sont des paroles prononcées par le Sauveur lui-même et que nous répétons après lui ; car ce n'est réellement pas la nourriture , par laquelle nous rompons le jeûne qui nous souille ; elle est tout aussi pure, tout aussi inoffensive les jours de jeûne que les autres jours - mais ce qui souille notre cœur, c'est la malice et la mauvaise volonté, par lesquelles nous devenons infidèles en nous rendant coupables de désobéissance aux 10 Commandements, et allant directement contre les lois divines. S'il en était autrement, nous pourrions aller jusqu'à l'intempérance, sans commettre de péché. Le péché de nos premiers parents ne consistait lui-même que dans la transgression d'un commandement semblable : Adam et Ève n'avaient fait que manger du fruit défendu. Mais la circonstance que ce fruit leur était défendu a fait, qu'en en mangeant, ils devinrent désobéissants à Dieu , et c'est précisément la désobéissance qui constituait, à proprement parler, le péché.
Thomas. Pourquoi ne pas laisser à chacun sa liberté dans le choix du temps et de la manière dont il veut jeûner?
Le Curé. L'Église est tout aussi peu coupable de la transgression que, par exemple, le commandement : «Vous ne tuerez point» l'est du meurtre. Ceux-là précisément qui transgressent les lois de l'Église, prouvent qu'ils penseraient encore beaucoup moins au devoir de jeûner, si ces lois n'existaient pas. Mais si l'Église a donné des ordres relativement au temps et au mode de jeûne, c'est qu'elle veut nous faire exercer notre obéissance et nous apprendre à vaincre notre volonté propre qui est la cause de tant de péchés.
Celui qui n'est pas habitué à se refuser quelque chose sera bientôt le jouet de ses passions et de sa concupiscence qui le porte au péché; mais celui qui a appris à obéir aux préceptes de l'Église catholique aura aussi la force et le courage de se refuser la transgression des commandements de Dieu , si jamais une passion ou une tentation quelconque venait à l'y pousser. Il est libre à chacun de jeûner quand il l'entend , pourvu qu'il le fasse aussi aux jours où cela lui est ordonné par l'Église. Alors seulement il peut faire plus ou autrement selon son choix. Mais n'oublions pas que « l'obéissance est préférable au sacrifice» (1 Rois 15,22) et que «celui qui n'écoute pas l’Église doit être regardé comme un païen et un publicain (Matthieu 18,17). »
Simon. Pourquoi l'Église a-t-elle déterminé justement les quarante jours qui précèdent la fête de Pâques?
Le Curé. En cela nous suivons l'exemple de Jésus-Christ qui , avant de commencer sa vie publique, jeûna pendant quarante jours et quarante nuits, circonstance qui a, pour ainsi dire, rendu sacré le nombre de quarante.
Notre Seigneur Jésus-Christ jeûne pendant 40 jours au désert pour nous donner l`exemple (Matthieu 4,2)
Note : Moïse dit dans le Deutéronome 9. 9. «Quand je montai sur la montagne pour recevoir les tables de pierre, les tables de l'alliance que le Seigneur fit avec vous, je demeurai sur cette montagne durant quarante jours et quarante nuits ne mangeant pas de pain et ne buvant pas d'eau. » Moïse n'est ici que la figure de Notre Seigneur. Avant de commencer sa vie publique qu'il termina en montant sur la montagne du Calvaire, où la nouvelle alliance fut scellée de son sang, Jésus-Christ se retira pendant quarante jours dans le désert où il jeûna aussi pendant quarante jours et quarante nuits.
— Mais que l'on ait choisi de préférence les jours qui précèdent la fête de Pâques en voici les raisons :
1° Le temps de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ est le plus important de toute l'année ecclésiastique parce que notre rédemption repose entièrement sur ces faits. Nous avons donc assez de raisons pour nous préparer à célébrer dignement, c'est-à-dire, avec une grande application et une pieuse sévérité ces grands mystères , d'autant plus que nous avons déjà fait précéder la fête de Noël d'une préparation de quatre semaines qui est l'Avent. Jésus-Christ est descendu sur la terre et il y est mort à cause de nos péchés. Si nous nous souvenons donc de ce que notre Sauveur a fait et souffert pour nous, ne devons-nous pas aimer également à souffrir quelque peu avec lui et lui montrer justement en ce saint temps, la bonne volonté que nous avons de nous corriger.
2° C'est pendant le temps pascal que nous devons nous approcher des saints Sacrements de Pénitence et d'Eucharistie ; il y a donc là aussi une invitation à changer de vie et à ne pas manquer de réprimer convenablement nos mauvais penchants.
3° L'Église a choisi de préférence le printemps , parce que cette saison qui n'est pas sans quelque influence sur nos passions, nécessite aussi un frein particulier, pour empêcher nos mauvais penchants de nous entraîner avec trop d'impétuosité et de remporter la victoire sur les bons sentiments et les bons propos de notre âme.
Simon. A-t-on toujours observé le carême de la même manière qu'on le fait maintenant ?
Le Curé. Dans ce qui est essentiel, il n'a pas changé ; car les Pères de l'Église des premiers siècles tels que saint Léon, saint Jérôme et d'autres affirment que le jeûne, et le jeûne de quarante jours en particulier, tire son origine des Apôtres. La manière dont on s'en acquittait à seule varié en deux points. Au commencement, le jeûne était beaucoup plus sévère, puisque dans plusieurs endroits on s'abstenait de manger des œufs, du beurre , du fromage , ce qui se pratique encore de nos jours chez les Grecs. Dans quelques pays, l'usage du vin même était défendu. L'Église permit tout cela plus tard, afin de ne pas rendre son précepte trop difficile à un grand
nombre de fidèles.
En second lieu on jeûnait pendant toute la journée et l'on ne prenait son repas qu'après le coucher du soleil. De là vient l'usage que les prêtres récitent encore aujourd'hui les Vêpres avant midi pendant tout le carême parce qu'autrefois on ne dinait qu'après les Vêpres. A l'Église, on les chantait immédiatement après la messe. A dater du treizième siècle l'Église permit de prendre le repas principal à midi, et, le soir, un petit rafraîchissement. Le nom de collation qui fut donné à ce rafraîchissement provient des couvents.
Lorsque les religieux , excédés de fatigues par le chant des offices et le travail des mains, s'étaient rendus au réfectoire pour prendre quelques fruits ou un morceau de pain avec un verre d'eau, on commençait par une lecture du beau livre du saint abbé Cassien qui porte le titre de « Collationes Patrum » c'est-à-dire a Recueil de passages tirés des saints Pères . Pour exprimer donc qu'on se rendait au réfectoire, on disait qu'on allait à la collation ou bien à la lecture spirituelle. De là est venu aussi le nom de collation , pour exprimer le petit rafraîchissement que l'Église permettait les jours de jeûne.
Note : Jeûne et abstinence. Le précepte du jeûne comme celui de l'abstinence a son origine dans l'ancien Testament. Dans la loi mosaïque nous rencontrons un jeûne prescrit pour tout le peuple: c'était le grand jour de pénitence et de propitiation auquel il était défendu de prendre la moindre nourriture pendant 24 heures. Outre ce jeûne universel et régulier, on le prescrivait encore à certaines occasions extraordinaires p. ex. pendant les calamités publiques. C'est ainsi que le peuple de Dieu adoucit la colère divine par la pénitence et par un jeûne prescrit par Samuel (1. Samuel. 7,3). A Ninive le roi ordonna « que les hommes et les chevaux, les bœufs et les brebis ne prissent aucune nourriture. » (Jonas. 3.) Menacés par Holopherne, les Juifs recoururent à la prière et au jeûne. (Judith 4. 8.) La même chose se fit sous la persécution d'Aman. (Esther. 4. 16.) Voyez encore là-dessus Joël 1. 14. — On jeûnait aussi par dévotion particulière, comme le prouvent le roi David, Sara, fille de Raguel (Tobie 3. 10.) Anne (Luc. 2. 37.), etc. Donc depuis Adam jusqu'à St Jean-Baptiste le jeûne et l'abstinence ont été pratiqués; Jésus qui n'était pas venu pour détruire l'ancienne loi, mais pour l'accomplir et la perfectionner, a sanctifié cet usage par son exemple ; l'Église l'a sanctionné par ses préceptes.
Finissons pour aujourd'hui; la fois prochaine nous aurons à nous entretenir d'un grand nombre de choses importantes. Loué soit Jésus.-Christ ! — A jamais.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN TROISIÈME.
DEPUIS LE DIMANCHE DE LA PASSION JUSQU'AU JEUDI-SAINT.
Résumé. Dimanche de la Passion. Différents usages liturgiques. Pourquoi on voile les crucifix. Dimanche des Rameaux. — Office des Ténèbres. Le Jeudi-Saint. Silence de l'orgue et des cloches. Crécelles. Lavement des pieds ou Mandat. Bénédiction des saintes huiles. Reposoirs. Dépouillement des autels.
Simon. Monsieur le curé , tout le monde est dans l'attente pour cette soirée qu'on a vu arriver avec joie ; car , puisque vous voulez bien nous entretenir de la Semaine Sainte , nous pouvons supposer que vous allez nous donner là-dessus des détails bien intéressants.
Le Curé. Vous avez raison , mes chers amis , aucun temps de l'année liturgique n'est si riche en usages édifiants que la semaine dont je vais vous parler aujourd'hui ; car c'est la Passion de notre Sauveur qui a été la source de notre salut ; aussi l'Église s'est-elle appliquée à rendre le temps de l`année, destiné à nous rappeler le plus grand de tous les bienfaits, aussi instructif que profitable pour notre âme.
Simon. Ainsi vous voulez donc bien nous expliquer aujourd'hui les cérémonies qui se pratiquent pendant la Semaine Sainte.
Le Curé. Ce serait forte affaire d'épuiser ce sujet en une seule soirée. Toutefois, nous verrons jusqu'où nous pourrons en venir aujourd'hui, sauf à continuera la prochaine séance. Notre dernier entretien, vous vous en souvenez, nous a conduits jusqu'au Dimanche de la Passion. ( une semaine avant le début de la Semaine Sainte) Il porte ce nom, parce que nous commençons, surtout à dater de ce jour , à nous occuper plus particulièrement des souffrances de l'Homme-Dieu. C'est pourquoi l'Évangile de ce jour nous raconte comment Jésus-Christ reprocha aux Juifs leur endurcissement et comment , au lieu de se convertir, ceux-ci tentèrent de le lapider. Vous savez peut-être que , durant l'ancienne Alliance (Ancien Testament), on lapidait les blasphémateurs, et comme le Sauveur s'était dit Fils de Dieu , ils le considéraient aussi comme coupable de blasphème.
Les heures canoniales commencent pour la même raison par ces paroles : « Aujourd'hui que vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs. » Il y a encore cela de remarquable, que le prêtre en commençant la sainte Messe ne récite pas le psaume 42, Judica me Deus, comme il le fait ordinairement pendant l'année : en voici la raison. Ce psaume est rempli de paroles de consolation et renferme une prière par laquelle nous supplions Dieu de nous délivrer de nos persécuteurs : or , nous ne récitons pas ce psaume, parce que les ennemis du Seigneur tinrent conseil et résolurent de le poursuivre, et parce que nous nous rappelons vivement la tristesse qui s'empara de Jésus-Christ avant sa Passion. On omet aussi le Gloria Patri (Gloire soit au Père, etc.) parce que le chrétien se représente les outrages que le Sauveur eut à subir de la part de ceux qui le crucifièrent et qu'il a à subir encore tous les jours de la part des pécheurs, qui, à proprement parler, l'ont crucifié par leurs péchés.
Cela étant, nous nous considérons en quelque sorte comme indignes de proférer les louanges de la Sainte Trinité d'une manière si éclatante et si solennelle. Dans les heures canoniales que récitent les prêtres , on omet certaines courtes prières adressées aux Saints et qu'on appelle pour cette raison : « Suffrages des Saints. » (Commemorationes Sanctorum.) Vous n'ignorez pas, mes amis, que nous faisons mention des Saints d'abord pour nous rappeler leurs vertus et pour être portés à imiter leur sainteté, et ensuite afin de nous rendre participants de leur intercession.
Mais puisque, pendant le temps de la Passion, les regards de l'Église sont tournés exclusivement sur Jésus-Christ qui est la source de toute sainteté et le miroir de toutes les vertus, et parce que nous devons le considérer comme le fondement de notre espérance en même temps que le donateur de tous les dons, nous ne faisons pas mention expresse des Saints pendant la quinzaine qui précède la Fête de Pâques. Quand le soleil resplendit, on ne voit plus les étoiles. C'est ainsi qu'en tenant les yeux de notre âme dirigés vers le soleil de justice et l'auteur de toute sainteté, qui est aussi notre plus grand intercesseur auprès de son Père, nous ne pensons presque plus aux Saints.
Simon. Veuillez bien nous dire aussi pour quelle raison on voile les crucifix à dater de ce jour.
Le Curé. Parce que : 1° l'Évangile du dimanche de la Passion rapporte que le Sauveur s'est caché , les Juifs ayant voulu attenter à sa vie et le lapider. 2° Pour signifier la profonde douleur de la sainte Église, qui est l'Épouse de Jésus-Christ et son deuil à cause des souffrances inexprimables de son divin Époux. C'est tout-à-fait la même chose que fit un jour un peintre célèbre, qui, ne pouvant reproduire avec le pinceau la grande douleur de la Sainte-Vierge, lui voila la face d'un voile noir, voulant dire par là : « On peut bien penser à de pareilles douleurs et les considérer intérieurement, mais il est impossible de les exprimer et de les rendre sensibles. »
C'est pourquoi encore les voiles dont on se sert pour couvrir les crucifix, sont de couleur violette, symbole de la pénitence. Souvent on les remplace le Jeudi-Saint par d'autres de couleur blanche, à cause de l'institution de la Sainte Eucharistie qui se fit en ce jour.
Le crucifix voilé avant la semaine sainte
Le Dimanche des Rameaux
Simon. Passons au dimanche des Rameaux ou des Palmes; je crois pouvoir deviner pourquoi on lui a donné ce nom.
Note : Comme on bénit les rameaux en ce jour et que plusieurs joignent aux branches de buis, de saule , etc., des fleurs selon que la saison peut en fournir, en a appelé aussi ce dimanche la Pâque fleurie.
Le Curé. Hé bien, veuillez bien nous le dire.
Simon. Ne serait-ce point parce que ce fut en ce jour que Jésus- Christ entra en triomphe à Jérusalem, alors que les habitants de Jérusalem étendirent leurs vêtements et des palmes sur son passage, le saluant du Hosannah et de leurs cris de jubilation ?
Le Curé. Oui , c'est cela même. C'est aussi pourquoi à lieu la procession dite des Rameaux, qui n'est qu'une frappante représentation commémorative de cette entrée triomphante du divin Sauveur, ainsi que la dépeint saint Matthieu et comme l'avait prédite le prophète Zacharie en disant : «Dites à la fille de Sion : voilà que ton roi vient à toi plein de douceur , assis sur l'ânesse dont l'ânon n’a pas encore porté le joug. » Il a voulu s'asseoir sur l'ânesse, pour nous montrer combien sont méprisables les grandeurs du monde.
Saint Augustin dit que les palmes sont le signe de la louange; qu'elles signifient la victoire que le Seigneur a remportée sur la mort en l'acceptant pour nous , la victoire de la croix sur le prince de la mort qui est le démon ( l`ange déchu). Dans quelques endroits, il est d'usage que les enfants de chœur déposent leurs surplis, et se couchent à terre en chantant : «Voilà celui qui doit venir. » Par cet usage on rappelle d'une manière très-sensible la promptitude du peuple de Jérusalem à recevoir Jésus-Christ et la circonstance que les Juifs étendirent leurs vêtements sur la route par laquelle devait passer le Sauveur.
Mais les palmes signifient encore les bonnes œuvres , avec lesquelles nous devons comparaître devant Dieu, si nous voulons lui être agréables. C'est ce qui a fait dire là-dessus à un évêque ces belles paroles : « Nous allons à la rencontre de Jésus-Christ avec les enfants, lorsque nous conservons l'innocence ; nous portons des rameaux d'olivier, lorsque nous pratiquons les œuvres de miséricorde, de paix et de mansuétude; nous portons des palmes devant Dieu, lorsque nous remportons la victoire sur Satan dans la tentation ; enfin nous portons des branches verdoyantes , lorsque nous sommes ornés des belles vertus chrétiennes. Nous étendons nos vêtements, lorsque nous mortifions la chair , que nous évitons et que nous détestons la vanité dans la parure et l'orgueil, dans toutes les phases sous lesquelles il tâche de se produire en nous. »
Simon. Je pense que nous tous, ici présents, nous nous appliquerons à aller à la rencontre du Sauveur avec des palmes comme celles dont nous a parlé M. le Curé. Je le prie de vouloir bien ajouter encore à ses explications celle de la bénédiction des rameaux, en nous disant ce qu’ elle signifie.
Le Curé. En bénissant les rameaux , le prêtre demande, au nom de toute l'Église, que Dieu veuille bénir les habitations dans lesquelles on conservera ces rameaux ; il prie , en outre , que le Seigneur nous donne la grâce de nous appliquer à vivre de plus en plus selon notre vocation , nous rendant toujours plus parfaits par la pratique des bonnes œuvres, pour qu'un jour nous soyons trouvés dignes d'entrer triomphants avec Jésus-Christ dans la Jérusalem céleste.
Office de Ténèbres
Simon. Pourquoi les matines des mercredi, jeudi et vendredi saints se nomment-elles Ténèbres?
Le Curé. Cet office, qui se compose des Matines et des Laudes du lendemain qu'on chante la veille par anticipation, se célébrait autrefois le soir dans la plupart des localités. Ailleurs il se faisait pendant la nuit et durait jusqu'au matin. On veut rappeler par là que Notre-Seigneur fut fait captif dans la soirée et qu'il dut subir durant toute une nuit les outrages et les violences de ses ennemis. L'Église veut en même temps représenter les ténèbres dont toute la terre fut couverte à la mort de Jésus-Christ, tout en exprimant son deuil profond causé par la considération de la douloureuse Passion de son divin Fondateur ; car la nuit si silencieuse et si sombre passe pour un temps de tristesse et de désolation. Cet office est donc particulièrement propre à produire en nous une espèce de tristesse. Ajoutez à cela le silence de l'orgue et des cloches remplacés par la quadruple voix de David, de Jérémie , des saintes Femmes et de l'Église, qui semblent profiter de ce silence universel pour pleurer seuls devant Dieu. Les lamentations de Jérémie, dont les sublimes accents émeuvent l'âme d'une si douce et si religieuse mélancolie , dépeignent la ruine future de Jérusalem et la captivité des Juifs.
Ces chants ont pour but de nous faire souvenir que ce sont nos péchés et nos propres prévarications qui ont occasionné la passion et la mort du divin Sauveur, et voilà pourquoi l'Église répète à plusieurs reprises : Jerusalem, Jerusalem , convertere ad Dominum. C'est par conséquent nous-mêmes et tous les chrétiens qui sont compris dans le mot Jérusalem.
Eram quasi agnus - T. L. Victoria - Office de Ténèbres - Westminster Cathedral Choir - Grande-Bretagne
Pendant tous les autres temps de l'année , on commence les heures ecclésiastiques par la prière : Seigneur , ouvrez mes lèvres, afin que ma bouche chante vos louanges (Psaume. 50) ; mais en ce jour de deuil, depuis les vêpres de jeudi jusqu'à Pâques, on omet ces paroles parce que, vu la grandeur de sa tristesse, l'Église semble pour ainsi dire n'avoir pas le courage d'ouvrir la bouche pour chanter les louanges de Dieu. C'est pour la même raison aussi qu'on ne récite pas le Gloria Patri à la fin de chaque Psaume ; car n'est-ce pas précisément en ces jours que d'indignes créatures refusèrent de rendre l’hommage au Fils de Dieu et le comblèrent au contraire d'avanies et d'outrages ?
De plus, on ne dit pas, en commençant les Heures, cette exclamation : « Seigneur , venez à mon aide, hâtez-vous de me secourir!» (Psaume. 69), parce que Celui dont vient toute assistance, fut réduit à s'écrier sur la croix, a cause de nos péchés: « Mon Dieu , mon Dieu , pourquoi m'avez-vous délaissé? » C'est encore pourquoi, dans les Heures, les hymnes et les cantiques ne se récitent plus, car ils rappellent trop douloureusement les outrages tout-à-fait contraires, les moqueries dont on accabla Notre-Seigneur et les hommages de dérision qui lui furent rendus.
Dans l'office de la nuit ou les Matines, les différentes Leçons commencent par des paroles de bénédiction par lesquelles nous invoquons sur nous la miséricorde divine ; elles se terminent par ces mots : «Mais vous, Seigneur , ayez pitié de nous !» Cela a lieu en temps ordinaire ; mais pendant la Semaine Sainte , on omet encore ces paroles, parce que le père céleste n'a pas même épargné son propre Fils, mais il l'a livré pour la rançon de nos péchés.
Toutes les Heures finissent par ces mots : «Jésus-Christ a été pour nous obéissant jusqu'à la mort, même la mort sur la croix, » et ce n'est que la veille du Vendredi-Saint, qu'on ajoute ces paroles, qui renferment une certaine consolation et une lueur d'espérance: « Jésus-Christ a été pour nous obéissant jusqu'à la mort, même la mort sur la croix; c'est pourquoi Dieu l'a exalté et lui a donné un nom qui est au-dessus de tous les noms. » (Philippiens, 2, 8.) On répète jusqu'à huit fois le jour le psaume Miserere dans les Heures, et lorsqu'on célèbre l'office en commun , on le chante à genoux et à demi voix ; puis, l'un des assistants récite la prière : «Nous vous supplions, Seigneur, d'abaisser vos regards sur cette famille qui vous appartient et pour laquelle Notre-Seigneur Jésus-Christ n'a pas dédaigné d'être livré entre les mains des impies et de souffrir le supplice de la croix. »
La touchante salutation : Dominus vobiscum, cesse; et la finale de la prière « vous qui vivez et régnez avec le Père et le Saint-Esprit durant toute l'éternité, » se dit seulement à voix basse. C'est très-naturel, puisqu'en ce jour d'opprobres, la gloire et la divinité du Fils de Dieu et son égalité avec le Père et le Saint- Esprit étaient comme recouvertes d'un voile lugubre. Enfin, pendant l'office qu'on nomme Matines, on éteint successivement toutes les lumières, excepté une seule , de sorte que les ténèbres se font réellement dans l'église.
Le Jeudi Saint
Le Curé. Sur les usages ecclésiastiques du jeudi saint, il y en a plusieurs : Lorsque, dans une paroisse, il y a plusieurs prêtres, un seul célèbre le saint sacrifice; mais les autres reçoivent la sainte communion de sa main tout-à-fait comme les autres fidèles. La raison en est que Jésus-Christ a seul offert le saint sacrifice en ce jour en donnant lui-même la sainte communion à ses disciples.
Pour remémorer le lavement des pieds que pratiqua le Sauveur envers ses disciples , il est d'usage, dans plusieurs endroits, d'imiter chaque année cet exemple d'humilité donné par Notre-Seigneur lui-même. La cérémonie du lavement des pieds s'appelle aussi le mandat ou mandatum, soit parce qu'en cette circonstance le Sauveur dit à ses disciples de faire entre eux ce qu'il venait de faire à leur égard et qu'il leur en donna l'ordre , le mandat; soit parce que l'antienne qu'on chante à plusieurs reprises pendant l'action, commence par ces mots : « Mandatum novum do vobis; je vous donne un commandement nouveau, » à savoir, celui de s'aimer les uns les autres comme il les avait aimés. A Rome, le Saint Père lave les pieds à douze personnes et il les baise ensuite après les avoir essuyés.
Enfin , dans les cathédrales , c'est l'Évêque lui-même qui célèbre le saint sacrifice et qui distribue la sainte communion à tous les prêtres présents. Or, c'est pendant cette messe qu'a lieu la consécration des saintes huiles, c'est-à-dire, l'huile des infirme pour l'administration de l'Extrême-Onction aux malades, celle que l'on emploie dans l'administration du Baptême qu'on nomme huile des catéchumènes et enfin le saint chrême qui sert pour la Confirmation.
Si vous me demandez pourquoi on a choisi le jeudi saint pour cette consécration, je vous dirai que, dans les premiers temps de l'Église, il était d'usage de baptiser les catéchumènes le samedi saint, et, comme ils recevaient en même temps la Confirmation pour l'administration de laquelle les saintes huiles étaient nécessaires, et que d'ailleurs cette bénédiction ne pouvait guère se faire convenablement le vendredi saint, on avait choisi pour ce motif le jeudi. Il y a lieu de croire que ces cérémonies, qui étaient déjà en usage du temps de saint Grégoire-le-Grand ( Pape en 590 Ap J.C.) sont, du moins pour la plus grande partie, d'origine apostolique.
Bénédiction des Saintes Huiles
Simon. Je voudrais pouvoir assister à cette grande et sublime cérémonie. La plupart d'entre nous n'ont jamais vu un si grand nombre de prêtres réunis. Et puis, qu'il doit être touchant de voir notre saint Père le Pape lui-même laver les pieds à ces gens et donner un si bel exemple d'humilité!
Le Curé. Si même il ne nous est pas donné de pouvoir être témoins de ces belles solennités, nous pouvons au moins, quelqu'éloignés que nous soyons; imiter ces exemples en même temps que celui que nous a donné le Sauveur lui-même en lavant les pieds à ses apôtres et tant d'autres que nous rapportent les saints Évangiles. Pardonnez à vos ennemis les offenses qu'ils vous ont faites; faites-vous violence à vous-mêmes, pour vous réconcilier avec eux, malgré les prétextes par lesquels votre mauvaise inclination voudrait vous en empêcher; ne vous emportez pas quand vos proches se rendent coupables de quelque petite faute; faites du bien aux pauvres, mais ne leur jetez pas votre aumône avec dédain, montrez, au contraire, charité et amour envers ces bien-aimés de Jésus-Christ; traitez-les, en vue du Sauveur, comme si vous étiez leurs serviteurs, et vous donnerez ainsi un exemple d'humilité qui sera méritoire pour vous et utile pour les autres.
Le Curé. Comme le jour du vendredi saint on ne célèbre pas le saint sacrifice, on consacre le jeudi saint deux hosties, dont l'une est mise en réserve et sert le lendemain à la communion. Mais on ne la conserve pas dans le tabernacle du maître-autel, on la transporte dans un calice ou ciboire sur l'un des autels latéraux où, recouvert d'un voile, il reste exposé à l'adoration des fidèles. Cela se fait ainsi pour rappeler de nouveau aux chrétiens que Jésus-Christ a été ravi du milieu des siens par la mort qu'il voulut souffrir pour eux. Les pieux fidèles ne manquent pas de se rendre à l'église pour y remercier le Seigneur de la grâce inexprimable qu'il nous a faite en voulant souffrir et mourir pour remédier à nos maux spirituels, et pour demander à Dieu pardon de leurs propres offenses qui ont été pour beaucoup dans la douloureuse passion de Jésus-Christ.
Ils rendent grâces au divin Sauveur de ce que, pour mettre le comble à son amour, il a bien voulu instituer la sainte Eucharistie et perpétuer, par ce sacrement d'amour, sa présence parmi les enfants des hommes. C'est pourquoi l'autel sur lequel est placé le saint Sacrement est paré avec tout le soin possible et, comme il représente le tombeau de notre divin Rédempteur, on l'appelle ordinairement le Tombeau ou le saint Sépulcre. Ces cierges innombrables et ces riches ornements et surtout l'Homme-Dieu qui se donne aux hommes pour s'unir à eux de la manière la plus intime, font de ce tombeau un sépulcre vraiment glorieux, comme l'avait prédit le prophète Isaïe 11,10 (Les nations se tourneront vers lui. Et la gloire sera sa demeure.)
Simon. Dieu veuille, M. le curé, que nous suivions les bons conseils que vous nous donnez. Comme déjà il se fait tard, je crains de vous importuner encore par de nouvelles questions. Cependant, pour compléter votre instruction sur le jeudi saint, veuillez bien nous expliquer encore avant de nous séparer, pourquoi on porte le saint sacrement sur un autre autel, et pourquoi on dépouille les autels.
Le Curé: Après avoir répondu à la première partie de votre question, je dois vous dire un mot du dépouillement des autels. Cet usage signifie, d'abord, qu'à partir de ce moment jusqu'à la résurrection du Sauveur, on ne célébrera plus le saint Sacrifice ; c'est pourquoi on ôte ce qui se trouve sur l'autel comme étant inutile. En outre nous voulons encore exprimer par là notre douloureuse tristesse à cause de la mort du Fils de Dieu.
Celui qui est opprimé par la tristesse oublie jusqu'aux choses de la plus grande nécessité ; il ne prend intérêt à rien de ce qu'il voit autour de lui et il n'a aucun goût pour tenir en ordre par exemple sa maison, ses habillements, etc. Le dépouillement des autels nous rappelle encore Jésus dépouillé de ses habits. C'est pourquoi le prêtre, en procédant à cette cérémonie, récite le psaume 21 qui est une prophétie ayant trait à la passion de Jésus-Christ et dans laquelle on lit ces paroles : « Ils se sont partagé mes vêtements entre eux. » Le dépouillement des autels nous marque aussi la perte que fit le divin Rédempteur de toute la gloire visible de sa divinité au moment de sa passion selon cette parole du prophète «On ne trouva plus en lui ni beauté, ni éclat.» (Isaïe. 53.2) On y a trouvé enfin une indication symbolique du voile du temple qui se déchira au moment de son trépas et de l'abandon de ses disciples.
L'un des assistants demanda pour quelle raison on n'offrait pas le saint Sacrifice le Vendredi-Saint, mais le curé répondit : « Méditons jusqu'à demain ce qui a fait le sujet de notre causerie d'aujourd'hui. Puisse le Seigneur la faire fructifier en vous ! » Amen, répétèrent les bons villageois, tandis que leur digne pasteur quittait l'assemblée en disant : Loué soit J.-C. ! — A jamais.
Institution de la Sainte-Eucharistie le Jeudi Saint au dernier repas : Le Jeudi-Saint, que Saint Chrysostome appelle le grand cinquième jour et qui portait aussi, dans les églises d'Orient, le nom de «jour des mystère» , nous rappelle outre l'institution du sacerdoce indiquée par la bénédiction du saint chrême et le lavement des pied , surtout l`institution de la sainte Eucharistie.
C'est la célébration de ce mystère qui est l'objet principal de la fête du Jeudi-Saint. Jésus-Christ ayant ordonné à ses disciples de le renouveler en mémoire de lui, on peut dire que l'origine de cette fête remonte aux Apôtres. Pour la célébrer d'une manière digne du mystère qui est le chef-d’œuvre de l'amour divin et le résumé de toutes les grâces célestes, puisqu'il renferme l'auteur même de la grâce, l'Église fit céder le deuil dans lequel elle est plongée, à la joie spirituelle que légitime un si grand bienfait. C'est en signe de joie qu'on chante encore aujourd'hui le Gloria in excelsis dans la messe du Jeudi-Saint. Pendant longtemps même, cette fête était d'obligation et, dès les premiers siècles, on adoucissait le jeûne à cause de la grande solennité de ce jour. Du temps de saint Augustin, c'était même l'usage que tous les fidèles y communiassent; ceux qui jeûnaient, recevaient la communion le soir et ceux qui ne pouvaient jeûner, la recevaient le matin. Mais dans la suite l'Église, considérant que la fête de l'institution de l'Eucharistie se trouvait trop resserrée entre les jours consacrés au souvenir de la passion et de la mort du Sauveur, jugea à propos de transférer la fête particulière du très-Saint-Sacrement au jeudi après l'octave de la Pentecôte, comme nous le dirons en son lieu, et le concile de Trente, assemblé en 1549 , réduisit le Jeudi-Saint au rang des demi-fêtes laissées à la dévotion des fidèles. L'Église ne laisse pas cependant d'honorer encore maintenant la sainte Eucharistie dans les offices de ce jour. C'est en actions de grâces pour ce témoignage de l'amour de Jésus-Christ envers les hommes, que la messe se célèbre avec toute la pompe que permet la douleur de la passion. On n'y donne point la paix, comme dans les autres fêtes, par horreur pour le baiser sacrilège que le traître Judas donna à son divin maître.
Si tous les prêtres, excepté le célébrant, s'abstiennent de dire la messe ce jour-là, ce n'est pas par des motifs de deuil et de tristesse comme le Vendredi et le Samedi Saints, mais c'est pour imiter de plus près la cène où le Seigneur, instituant la sainte Eucharistie, fit, pour la première fois, les fonctions de sacrificateur et fut le seul célébrant. Vu la signification de ce saint jour, nous devons, selon les intentions de l'Église, assister à la sainte messe avec une dévotion toute particulière, comme étant le jour anniversaire de son institution, et former la résolution d'assister dorénavant à ce saint Sacrifice avec plus de piété et de dévotion que nous ne l'avons fait ci-devant. Notre devoir est encore de remercier le doux Sauveur de ce que, non content de s'être une fois offert sur la croix pour nos péchés, il veut encore s'immoler tous les jours sur nos autels par la main de ses prêtres, afin de nous rappeler le souvenir, de nous appliquer les fruits et les mérites du Sacrifice sanglant de la croix.
Enfin nous devons lui rendre mille actions de grâces de ce qu'en ce même jour, il a daigné instituer le Sacrement adorable de l'Eucharistie pour s'unir à nous par la sainte communion jusqu'à la consommation des siècles et nourrir notre âme de son propre corps et de son propre sang. Gémissons encore sur l'abus que nous pourrions avoir fait d'une si grande grâce, en le recevant sans les dispositions requises, avec tant de tiédeur et si peu de foi et de désir. Lorsque donc vous irez visiter les reposoirs ou faire les stations, vous ferez bien, âme chrétienne, de faire amende honorable à Jésus-Christ de ce qu'il a souffert tant d'ignominies durant sa passion de la part de ses apôtres, du peuple juif, de Caïphe, de Pilate et d'Hérode, etc., et surtout pour tant d'outrages que lui infligent encore dans la sainte Eucharistie des chrétiens irrévérents, profanateurs, sacrilèges ou hérétiques.
DEPUIS LE DIMANCHE DE LA PASSION JUSQU'AU JEUDI-SAINT.
Résumé. Dimanche de la Passion. Différents usages liturgiques. Pourquoi on voile les crucifix. Dimanche des Rameaux. — Office des Ténèbres. Le Jeudi-Saint. Silence de l'orgue et des cloches. Crécelles. Lavement des pieds ou Mandat. Bénédiction des saintes huiles. Reposoirs. Dépouillement des autels.
Simon. Monsieur le curé , tout le monde est dans l'attente pour cette soirée qu'on a vu arriver avec joie ; car , puisque vous voulez bien nous entretenir de la Semaine Sainte , nous pouvons supposer que vous allez nous donner là-dessus des détails bien intéressants.
Le Curé. Vous avez raison , mes chers amis , aucun temps de l'année liturgique n'est si riche en usages édifiants que la semaine dont je vais vous parler aujourd'hui ; car c'est la Passion de notre Sauveur qui a été la source de notre salut ; aussi l'Église s'est-elle appliquée à rendre le temps de l`année, destiné à nous rappeler le plus grand de tous les bienfaits, aussi instructif que profitable pour notre âme.
Simon. Ainsi vous voulez donc bien nous expliquer aujourd'hui les cérémonies qui se pratiquent pendant la Semaine Sainte.
Le Curé. Ce serait forte affaire d'épuiser ce sujet en une seule soirée. Toutefois, nous verrons jusqu'où nous pourrons en venir aujourd'hui, sauf à continuera la prochaine séance. Notre dernier entretien, vous vous en souvenez, nous a conduits jusqu'au Dimanche de la Passion. ( une semaine avant le début de la Semaine Sainte) Il porte ce nom, parce que nous commençons, surtout à dater de ce jour , à nous occuper plus particulièrement des souffrances de l'Homme-Dieu. C'est pourquoi l'Évangile de ce jour nous raconte comment Jésus-Christ reprocha aux Juifs leur endurcissement et comment , au lieu de se convertir, ceux-ci tentèrent de le lapider. Vous savez peut-être que , durant l'ancienne Alliance (Ancien Testament), on lapidait les blasphémateurs, et comme le Sauveur s'était dit Fils de Dieu , ils le considéraient aussi comme coupable de blasphème.
Les heures canoniales commencent pour la même raison par ces paroles : « Aujourd'hui que vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs. » Il y a encore cela de remarquable, que le prêtre en commençant la sainte Messe ne récite pas le psaume 42, Judica me Deus, comme il le fait ordinairement pendant l'année : en voici la raison. Ce psaume est rempli de paroles de consolation et renferme une prière par laquelle nous supplions Dieu de nous délivrer de nos persécuteurs : or , nous ne récitons pas ce psaume, parce que les ennemis du Seigneur tinrent conseil et résolurent de le poursuivre, et parce que nous nous rappelons vivement la tristesse qui s'empara de Jésus-Christ avant sa Passion. On omet aussi le Gloria Patri (Gloire soit au Père, etc.) parce que le chrétien se représente les outrages que le Sauveur eut à subir de la part de ceux qui le crucifièrent et qu'il a à subir encore tous les jours de la part des pécheurs, qui, à proprement parler, l'ont crucifié par leurs péchés.
Cela étant, nous nous considérons en quelque sorte comme indignes de proférer les louanges de la Sainte Trinité d'une manière si éclatante et si solennelle. Dans les heures canoniales que récitent les prêtres , on omet certaines courtes prières adressées aux Saints et qu'on appelle pour cette raison : « Suffrages des Saints. » (Commemorationes Sanctorum.) Vous n'ignorez pas, mes amis, que nous faisons mention des Saints d'abord pour nous rappeler leurs vertus et pour être portés à imiter leur sainteté, et ensuite afin de nous rendre participants de leur intercession.
Mais puisque, pendant le temps de la Passion, les regards de l'Église sont tournés exclusivement sur Jésus-Christ qui est la source de toute sainteté et le miroir de toutes les vertus, et parce que nous devons le considérer comme le fondement de notre espérance en même temps que le donateur de tous les dons, nous ne faisons pas mention expresse des Saints pendant la quinzaine qui précède la Fête de Pâques. Quand le soleil resplendit, on ne voit plus les étoiles. C'est ainsi qu'en tenant les yeux de notre âme dirigés vers le soleil de justice et l'auteur de toute sainteté, qui est aussi notre plus grand intercesseur auprès de son Père, nous ne pensons presque plus aux Saints.
Simon. Veuillez bien nous dire aussi pour quelle raison on voile les crucifix à dater de ce jour.
Le Curé. Parce que : 1° l'Évangile du dimanche de la Passion rapporte que le Sauveur s'est caché , les Juifs ayant voulu attenter à sa vie et le lapider. 2° Pour signifier la profonde douleur de la sainte Église, qui est l'Épouse de Jésus-Christ et son deuil à cause des souffrances inexprimables de son divin Époux. C'est tout-à-fait la même chose que fit un jour un peintre célèbre, qui, ne pouvant reproduire avec le pinceau la grande douleur de la Sainte-Vierge, lui voila la face d'un voile noir, voulant dire par là : « On peut bien penser à de pareilles douleurs et les considérer intérieurement, mais il est impossible de les exprimer et de les rendre sensibles. »
C'est pourquoi encore les voiles dont on se sert pour couvrir les crucifix, sont de couleur violette, symbole de la pénitence. Souvent on les remplace le Jeudi-Saint par d'autres de couleur blanche, à cause de l'institution de la Sainte Eucharistie qui se fit en ce jour.
Le crucifix voilé avant la semaine sainte
Le Dimanche des Rameaux
Simon. Passons au dimanche des Rameaux ou des Palmes; je crois pouvoir deviner pourquoi on lui a donné ce nom.
Note : Comme on bénit les rameaux en ce jour et que plusieurs joignent aux branches de buis, de saule , etc., des fleurs selon que la saison peut en fournir, en a appelé aussi ce dimanche la Pâque fleurie.
Le Curé. Hé bien, veuillez bien nous le dire.
Simon. Ne serait-ce point parce que ce fut en ce jour que Jésus- Christ entra en triomphe à Jérusalem, alors que les habitants de Jérusalem étendirent leurs vêtements et des palmes sur son passage, le saluant du Hosannah et de leurs cris de jubilation ?
Le Curé. Oui , c'est cela même. C'est aussi pourquoi à lieu la procession dite des Rameaux, qui n'est qu'une frappante représentation commémorative de cette entrée triomphante du divin Sauveur, ainsi que la dépeint saint Matthieu et comme l'avait prédite le prophète Zacharie en disant : «Dites à la fille de Sion : voilà que ton roi vient à toi plein de douceur , assis sur l'ânesse dont l'ânon n’a pas encore porté le joug. » Il a voulu s'asseoir sur l'ânesse, pour nous montrer combien sont méprisables les grandeurs du monde.
Saint Augustin dit que les palmes sont le signe de la louange; qu'elles signifient la victoire que le Seigneur a remportée sur la mort en l'acceptant pour nous , la victoire de la croix sur le prince de la mort qui est le démon ( l`ange déchu). Dans quelques endroits, il est d'usage que les enfants de chœur déposent leurs surplis, et se couchent à terre en chantant : «Voilà celui qui doit venir. » Par cet usage on rappelle d'une manière très-sensible la promptitude du peuple de Jérusalem à recevoir Jésus-Christ et la circonstance que les Juifs étendirent leurs vêtements sur la route par laquelle devait passer le Sauveur.
Mais les palmes signifient encore les bonnes œuvres , avec lesquelles nous devons comparaître devant Dieu, si nous voulons lui être agréables. C'est ce qui a fait dire là-dessus à un évêque ces belles paroles : « Nous allons à la rencontre de Jésus-Christ avec les enfants, lorsque nous conservons l'innocence ; nous portons des rameaux d'olivier, lorsque nous pratiquons les œuvres de miséricorde, de paix et de mansuétude; nous portons des palmes devant Dieu, lorsque nous remportons la victoire sur Satan dans la tentation ; enfin nous portons des branches verdoyantes , lorsque nous sommes ornés des belles vertus chrétiennes. Nous étendons nos vêtements, lorsque nous mortifions la chair , que nous évitons et que nous détestons la vanité dans la parure et l'orgueil, dans toutes les phases sous lesquelles il tâche de se produire en nous. »
Simon. Je pense que nous tous, ici présents, nous nous appliquerons à aller à la rencontre du Sauveur avec des palmes comme celles dont nous a parlé M. le Curé. Je le prie de vouloir bien ajouter encore à ses explications celle de la bénédiction des rameaux, en nous disant ce qu’ elle signifie.
Le Curé. En bénissant les rameaux , le prêtre demande, au nom de toute l'Église, que Dieu veuille bénir les habitations dans lesquelles on conservera ces rameaux ; il prie , en outre , que le Seigneur nous donne la grâce de nous appliquer à vivre de plus en plus selon notre vocation , nous rendant toujours plus parfaits par la pratique des bonnes œuvres, pour qu'un jour nous soyons trouvés dignes d'entrer triomphants avec Jésus-Christ dans la Jérusalem céleste.
Office de Ténèbres
Simon. Pourquoi les matines des mercredi, jeudi et vendredi saints se nomment-elles Ténèbres?
Le Curé. Cet office, qui se compose des Matines et des Laudes du lendemain qu'on chante la veille par anticipation, se célébrait autrefois le soir dans la plupart des localités. Ailleurs il se faisait pendant la nuit et durait jusqu'au matin. On veut rappeler par là que Notre-Seigneur fut fait captif dans la soirée et qu'il dut subir durant toute une nuit les outrages et les violences de ses ennemis. L'Église veut en même temps représenter les ténèbres dont toute la terre fut couverte à la mort de Jésus-Christ, tout en exprimant son deuil profond causé par la considération de la douloureuse Passion de son divin Fondateur ; car la nuit si silencieuse et si sombre passe pour un temps de tristesse et de désolation. Cet office est donc particulièrement propre à produire en nous une espèce de tristesse. Ajoutez à cela le silence de l'orgue et des cloches remplacés par la quadruple voix de David, de Jérémie , des saintes Femmes et de l'Église, qui semblent profiter de ce silence universel pour pleurer seuls devant Dieu. Les lamentations de Jérémie, dont les sublimes accents émeuvent l'âme d'une si douce et si religieuse mélancolie , dépeignent la ruine future de Jérusalem et la captivité des Juifs.
Ces chants ont pour but de nous faire souvenir que ce sont nos péchés et nos propres prévarications qui ont occasionné la passion et la mort du divin Sauveur, et voilà pourquoi l'Église répète à plusieurs reprises : Jerusalem, Jerusalem , convertere ad Dominum. C'est par conséquent nous-mêmes et tous les chrétiens qui sont compris dans le mot Jérusalem.
Eram quasi agnus - T. L. Victoria - Office de Ténèbres - Westminster Cathedral Choir - Grande-Bretagne
Pendant tous les autres temps de l'année , on commence les heures ecclésiastiques par la prière : Seigneur , ouvrez mes lèvres, afin que ma bouche chante vos louanges (Psaume. 50) ; mais en ce jour de deuil, depuis les vêpres de jeudi jusqu'à Pâques, on omet ces paroles parce que, vu la grandeur de sa tristesse, l'Église semble pour ainsi dire n'avoir pas le courage d'ouvrir la bouche pour chanter les louanges de Dieu. C'est pour la même raison aussi qu'on ne récite pas le Gloria Patri à la fin de chaque Psaume ; car n'est-ce pas précisément en ces jours que d'indignes créatures refusèrent de rendre l’hommage au Fils de Dieu et le comblèrent au contraire d'avanies et d'outrages ?
De plus, on ne dit pas, en commençant les Heures, cette exclamation : « Seigneur , venez à mon aide, hâtez-vous de me secourir!» (Psaume. 69), parce que Celui dont vient toute assistance, fut réduit à s'écrier sur la croix, a cause de nos péchés: « Mon Dieu , mon Dieu , pourquoi m'avez-vous délaissé? » C'est encore pourquoi, dans les Heures, les hymnes et les cantiques ne se récitent plus, car ils rappellent trop douloureusement les outrages tout-à-fait contraires, les moqueries dont on accabla Notre-Seigneur et les hommages de dérision qui lui furent rendus.
Dans l'office de la nuit ou les Matines, les différentes Leçons commencent par des paroles de bénédiction par lesquelles nous invoquons sur nous la miséricorde divine ; elles se terminent par ces mots : «Mais vous, Seigneur , ayez pitié de nous !» Cela a lieu en temps ordinaire ; mais pendant la Semaine Sainte , on omet encore ces paroles, parce que le père céleste n'a pas même épargné son propre Fils, mais il l'a livré pour la rançon de nos péchés.
Toutes les Heures finissent par ces mots : «Jésus-Christ a été pour nous obéissant jusqu'à la mort, même la mort sur la croix, » et ce n'est que la veille du Vendredi-Saint, qu'on ajoute ces paroles, qui renferment une certaine consolation et une lueur d'espérance: « Jésus-Christ a été pour nous obéissant jusqu'à la mort, même la mort sur la croix; c'est pourquoi Dieu l'a exalté et lui a donné un nom qui est au-dessus de tous les noms. » (Philippiens, 2, 8.) On répète jusqu'à huit fois le jour le psaume Miserere dans les Heures, et lorsqu'on célèbre l'office en commun , on le chante à genoux et à demi voix ; puis, l'un des assistants récite la prière : «Nous vous supplions, Seigneur, d'abaisser vos regards sur cette famille qui vous appartient et pour laquelle Notre-Seigneur Jésus-Christ n'a pas dédaigné d'être livré entre les mains des impies et de souffrir le supplice de la croix. »
La touchante salutation : Dominus vobiscum, cesse; et la finale de la prière « vous qui vivez et régnez avec le Père et le Saint-Esprit durant toute l'éternité, » se dit seulement à voix basse. C'est très-naturel, puisqu'en ce jour d'opprobres, la gloire et la divinité du Fils de Dieu et son égalité avec le Père et le Saint- Esprit étaient comme recouvertes d'un voile lugubre. Enfin, pendant l'office qu'on nomme Matines, on éteint successivement toutes les lumières, excepté une seule , de sorte que les ténèbres se font réellement dans l'église.
Le Jeudi Saint
Le Curé. Sur les usages ecclésiastiques du jeudi saint, il y en a plusieurs : Lorsque, dans une paroisse, il y a plusieurs prêtres, un seul célèbre le saint sacrifice; mais les autres reçoivent la sainte communion de sa main tout-à-fait comme les autres fidèles. La raison en est que Jésus-Christ a seul offert le saint sacrifice en ce jour en donnant lui-même la sainte communion à ses disciples.
Pour remémorer le lavement des pieds que pratiqua le Sauveur envers ses disciples , il est d'usage, dans plusieurs endroits, d'imiter chaque année cet exemple d'humilité donné par Notre-Seigneur lui-même. La cérémonie du lavement des pieds s'appelle aussi le mandat ou mandatum, soit parce qu'en cette circonstance le Sauveur dit à ses disciples de faire entre eux ce qu'il venait de faire à leur égard et qu'il leur en donna l'ordre , le mandat; soit parce que l'antienne qu'on chante à plusieurs reprises pendant l'action, commence par ces mots : « Mandatum novum do vobis; je vous donne un commandement nouveau, » à savoir, celui de s'aimer les uns les autres comme il les avait aimés. A Rome, le Saint Père lave les pieds à douze personnes et il les baise ensuite après les avoir essuyés.
Enfin , dans les cathédrales , c'est l'Évêque lui-même qui célèbre le saint sacrifice et qui distribue la sainte communion à tous les prêtres présents. Or, c'est pendant cette messe qu'a lieu la consécration des saintes huiles, c'est-à-dire, l'huile des infirme pour l'administration de l'Extrême-Onction aux malades, celle que l'on emploie dans l'administration du Baptême qu'on nomme huile des catéchumènes et enfin le saint chrême qui sert pour la Confirmation.
Si vous me demandez pourquoi on a choisi le jeudi saint pour cette consécration, je vous dirai que, dans les premiers temps de l'Église, il était d'usage de baptiser les catéchumènes le samedi saint, et, comme ils recevaient en même temps la Confirmation pour l'administration de laquelle les saintes huiles étaient nécessaires, et que d'ailleurs cette bénédiction ne pouvait guère se faire convenablement le vendredi saint, on avait choisi pour ce motif le jeudi. Il y a lieu de croire que ces cérémonies, qui étaient déjà en usage du temps de saint Grégoire-le-Grand ( Pape en 590 Ap J.C.) sont, du moins pour la plus grande partie, d'origine apostolique.
Bénédiction des Saintes Huiles
Simon. Je voudrais pouvoir assister à cette grande et sublime cérémonie. La plupart d'entre nous n'ont jamais vu un si grand nombre de prêtres réunis. Et puis, qu'il doit être touchant de voir notre saint Père le Pape lui-même laver les pieds à ces gens et donner un si bel exemple d'humilité!
Le Curé. Si même il ne nous est pas donné de pouvoir être témoins de ces belles solennités, nous pouvons au moins, quelqu'éloignés que nous soyons; imiter ces exemples en même temps que celui que nous a donné le Sauveur lui-même en lavant les pieds à ses apôtres et tant d'autres que nous rapportent les saints Évangiles. Pardonnez à vos ennemis les offenses qu'ils vous ont faites; faites-vous violence à vous-mêmes, pour vous réconcilier avec eux, malgré les prétextes par lesquels votre mauvaise inclination voudrait vous en empêcher; ne vous emportez pas quand vos proches se rendent coupables de quelque petite faute; faites du bien aux pauvres, mais ne leur jetez pas votre aumône avec dédain, montrez, au contraire, charité et amour envers ces bien-aimés de Jésus-Christ; traitez-les, en vue du Sauveur, comme si vous étiez leurs serviteurs, et vous donnerez ainsi un exemple d'humilité qui sera méritoire pour vous et utile pour les autres.
Le Curé. Comme le jour du vendredi saint on ne célèbre pas le saint sacrifice, on consacre le jeudi saint deux hosties, dont l'une est mise en réserve et sert le lendemain à la communion. Mais on ne la conserve pas dans le tabernacle du maître-autel, on la transporte dans un calice ou ciboire sur l'un des autels latéraux où, recouvert d'un voile, il reste exposé à l'adoration des fidèles. Cela se fait ainsi pour rappeler de nouveau aux chrétiens que Jésus-Christ a été ravi du milieu des siens par la mort qu'il voulut souffrir pour eux. Les pieux fidèles ne manquent pas de se rendre à l'église pour y remercier le Seigneur de la grâce inexprimable qu'il nous a faite en voulant souffrir et mourir pour remédier à nos maux spirituels, et pour demander à Dieu pardon de leurs propres offenses qui ont été pour beaucoup dans la douloureuse passion de Jésus-Christ.
Ils rendent grâces au divin Sauveur de ce que, pour mettre le comble à son amour, il a bien voulu instituer la sainte Eucharistie et perpétuer, par ce sacrement d'amour, sa présence parmi les enfants des hommes. C'est pourquoi l'autel sur lequel est placé le saint Sacrement est paré avec tout le soin possible et, comme il représente le tombeau de notre divin Rédempteur, on l'appelle ordinairement le Tombeau ou le saint Sépulcre. Ces cierges innombrables et ces riches ornements et surtout l'Homme-Dieu qui se donne aux hommes pour s'unir à eux de la manière la plus intime, font de ce tombeau un sépulcre vraiment glorieux, comme l'avait prédit le prophète Isaïe 11,10 (Les nations se tourneront vers lui. Et la gloire sera sa demeure.)
Simon. Dieu veuille, M. le curé, que nous suivions les bons conseils que vous nous donnez. Comme déjà il se fait tard, je crains de vous importuner encore par de nouvelles questions. Cependant, pour compléter votre instruction sur le jeudi saint, veuillez bien nous expliquer encore avant de nous séparer, pourquoi on porte le saint sacrement sur un autre autel, et pourquoi on dépouille les autels.
Le Curé: Après avoir répondu à la première partie de votre question, je dois vous dire un mot du dépouillement des autels. Cet usage signifie, d'abord, qu'à partir de ce moment jusqu'à la résurrection du Sauveur, on ne célébrera plus le saint Sacrifice ; c'est pourquoi on ôte ce qui se trouve sur l'autel comme étant inutile. En outre nous voulons encore exprimer par là notre douloureuse tristesse à cause de la mort du Fils de Dieu.
Celui qui est opprimé par la tristesse oublie jusqu'aux choses de la plus grande nécessité ; il ne prend intérêt à rien de ce qu'il voit autour de lui et il n'a aucun goût pour tenir en ordre par exemple sa maison, ses habillements, etc. Le dépouillement des autels nous rappelle encore Jésus dépouillé de ses habits. C'est pourquoi le prêtre, en procédant à cette cérémonie, récite le psaume 21 qui est une prophétie ayant trait à la passion de Jésus-Christ et dans laquelle on lit ces paroles : « Ils se sont partagé mes vêtements entre eux. » Le dépouillement des autels nous marque aussi la perte que fit le divin Rédempteur de toute la gloire visible de sa divinité au moment de sa passion selon cette parole du prophète «On ne trouva plus en lui ni beauté, ni éclat.» (Isaïe. 53.2) On y a trouvé enfin une indication symbolique du voile du temple qui se déchira au moment de son trépas et de l'abandon de ses disciples.
L'un des assistants demanda pour quelle raison on n'offrait pas le saint Sacrifice le Vendredi-Saint, mais le curé répondit : « Méditons jusqu'à demain ce qui a fait le sujet de notre causerie d'aujourd'hui. Puisse le Seigneur la faire fructifier en vous ! » Amen, répétèrent les bons villageois, tandis que leur digne pasteur quittait l'assemblée en disant : Loué soit J.-C. ! — A jamais.
Institution de la Sainte-Eucharistie le Jeudi Saint au dernier repas : Le Jeudi-Saint, que Saint Chrysostome appelle le grand cinquième jour et qui portait aussi, dans les églises d'Orient, le nom de «jour des mystère» , nous rappelle outre l'institution du sacerdoce indiquée par la bénédiction du saint chrême et le lavement des pied , surtout l`institution de la sainte Eucharistie.
C'est la célébration de ce mystère qui est l'objet principal de la fête du Jeudi-Saint. Jésus-Christ ayant ordonné à ses disciples de le renouveler en mémoire de lui, on peut dire que l'origine de cette fête remonte aux Apôtres. Pour la célébrer d'une manière digne du mystère qui est le chef-d’œuvre de l'amour divin et le résumé de toutes les grâces célestes, puisqu'il renferme l'auteur même de la grâce, l'Église fit céder le deuil dans lequel elle est plongée, à la joie spirituelle que légitime un si grand bienfait. C'est en signe de joie qu'on chante encore aujourd'hui le Gloria in excelsis dans la messe du Jeudi-Saint. Pendant longtemps même, cette fête était d'obligation et, dès les premiers siècles, on adoucissait le jeûne à cause de la grande solennité de ce jour. Du temps de saint Augustin, c'était même l'usage que tous les fidèles y communiassent; ceux qui jeûnaient, recevaient la communion le soir et ceux qui ne pouvaient jeûner, la recevaient le matin. Mais dans la suite l'Église, considérant que la fête de l'institution de l'Eucharistie se trouvait trop resserrée entre les jours consacrés au souvenir de la passion et de la mort du Sauveur, jugea à propos de transférer la fête particulière du très-Saint-Sacrement au jeudi après l'octave de la Pentecôte, comme nous le dirons en son lieu, et le concile de Trente, assemblé en 1549 , réduisit le Jeudi-Saint au rang des demi-fêtes laissées à la dévotion des fidèles. L'Église ne laisse pas cependant d'honorer encore maintenant la sainte Eucharistie dans les offices de ce jour. C'est en actions de grâces pour ce témoignage de l'amour de Jésus-Christ envers les hommes, que la messe se célèbre avec toute la pompe que permet la douleur de la passion. On n'y donne point la paix, comme dans les autres fêtes, par horreur pour le baiser sacrilège que le traître Judas donna à son divin maître.
Si tous les prêtres, excepté le célébrant, s'abstiennent de dire la messe ce jour-là, ce n'est pas par des motifs de deuil et de tristesse comme le Vendredi et le Samedi Saints, mais c'est pour imiter de plus près la cène où le Seigneur, instituant la sainte Eucharistie, fit, pour la première fois, les fonctions de sacrificateur et fut le seul célébrant. Vu la signification de ce saint jour, nous devons, selon les intentions de l'Église, assister à la sainte messe avec une dévotion toute particulière, comme étant le jour anniversaire de son institution, et former la résolution d'assister dorénavant à ce saint Sacrifice avec plus de piété et de dévotion que nous ne l'avons fait ci-devant. Notre devoir est encore de remercier le doux Sauveur de ce que, non content de s'être une fois offert sur la croix pour nos péchés, il veut encore s'immoler tous les jours sur nos autels par la main de ses prêtres, afin de nous rappeler le souvenir, de nous appliquer les fruits et les mérites du Sacrifice sanglant de la croix.
Enfin nous devons lui rendre mille actions de grâces de ce qu'en ce même jour, il a daigné instituer le Sacrement adorable de l'Eucharistie pour s'unir à nous par la sainte communion jusqu'à la consommation des siècles et nourrir notre âme de son propre corps et de son propre sang. Gémissons encore sur l'abus que nous pourrions avoir fait d'une si grande grâce, en le recevant sans les dispositions requises, avec tant de tiédeur et si peu de foi et de désir. Lorsque donc vous irez visiter les reposoirs ou faire les stations, vous ferez bien, âme chrétienne, de faire amende honorable à Jésus-Christ de ce qu'il a souffert tant d'ignominies durant sa passion de la part de ses apôtres, du peuple juif, de Caïphe, de Pilate et d'Hérode, etc., et surtout pour tant d'outrages que lui infligent encore dans la sainte Eucharistie des chrétiens irrévérents, profanateurs, sacrilèges ou hérétiques.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN QUATRIÈME.
DU VENDREDI ET DU SAMEDI SAINTS.
Résumé. Vendredi-Saint ; son nom. Office du Vendredi-Saint. Découvrement et adoration de la croix. Messe des Pré-Sanctifiés. Samedi-Saint. Bénédiction du feu nouveau. Cierge pascal. Bénédiction des fonts baptismaux. Baptême des catéchumènes. Messe du Samedi-Saint.
Le Curé : Mes chers amis, j'ai pensé que si vous vous trouvez aujourd'hui réunis sitôt et en si grand nombre, je n'osais pas manquer moi-même, aussi n'y a-t-il aucun inconvénient à commencer ce soir un peu plus tôt qu'à l'ordinaire, car j'ai bien des choses à vous expliquer. Je n'ai pas encore répondu à la question qui m'a été faite en clôturant la dernière séance ; je pense néanmoins qu'il sera mieux de suivre, selon leur ordre, les cérémonies de la Semaine Sainte; de la sorte, nous aboutirons aussi à la discussion du point en question.
Simon. M. le Curé, les noms de Vendredi-Saint, me paraissent faciles à expliquer, si je réfléchis à ce que vous nous avez dit la fois dernière. Toutefois , comme l'assemblée est plus nombreuse aujourd'hui qu'elle ne l'était hier, je vous prie de vouloir bien nous en dire encore un mot.
Le Curé. Très-volontiers, Simon. Ce jour est Saint par excellence, parce que c'est en ce jour que le Saint des Saints a bien voulu s'offrir en sacrifice pour nous racheter de l'esclavage de Satan (le péché originel avait soumis l`homme a l`ange déchu), nous sanctifier et nous ouvrir le ciel ; il est bon, puisque des grâces infinies nous ont été méritées sur la croix. Cependant, par sa mort, Jésus-Christ n'a pas voulu nous priver de notre liberté ; il dépend de nous de nous sanctifier en coopérant à la grâce du Sauveur et de mettre en pratique ces paroles de l'Apôtre : « Vous avez été rachetés à un grand prix; c'est pourquoi glorifiez Dieu et portez-le en votre corps, » c'est-à-dire : devenez semblables à lui (1 Corinthiens 6. 20).
O Crux ave spes unica - O Croix, salut, espoir unique! - Latin - 19 eme siècle - Espagne - Fernando Sor
Si donc vous vous réjouissez de ce que Dieu n'a pas dédaigné de donner son propre fils pour votre rançon, n'oubliez pas de correspondre à l'exhortation de l'Apôtre en vous montrant reconnaissants par une vie fervente et sainte.
Est-ce bien là ce que vous vous proposez de faire ?
Un grand nombre répondent : Oui, de tout coeur.
Dieu aidant, ajouta Simon.
Oui, mes amis, reprit le vénérable pasteur, et Dieu aidera sans faute, si seulement nous le voulons fermement. Du reste, vous avez raison. Simon, nous ne pouvons mettre qu'en Dieu seul notre confiance; nous devons même encore nous défier de nous-mêmes, quand il s'agit de faire le bien. Si Dieu ne bâtit lui-même la maison, ce sera en vain qu'y travailleront les ouvriers, dit le psalmiste.
Simon. M. le Curé. Ici les questions se pressent, vu le grand nombre des cérémonies du Vendredi Saint. Mais, ne les connaissant pas toutes de mémoire, vous voudrez bien vous-même y suppléer au besoin.
Le Curé. Commençons seulement ; les questions se présenteront d'elles-mêmes. — Arrive à l'autel, le prêtre se prosterne étendu de son long, la face contre terre, pour s'humilier par-là profondément devant le Seigneur, qui a voulu lui-même s'humilier jusqu'à la mort sur la croix; il exprime en même temps la douleur que ressent toute la chrétienté, en considérant la passion et la mort du Rédempteur des hommes. Après être resté prosterné le temps d'un Miserere, il se lève, monte les marches de l'autel et lit un extrait du prophète Osée, (6. 1-6.) dans lequel nous trouvons ces paroles: « Dans leur tribulation, ils reviendront à moi, disant : Venez, retournons vers le Seigneur; c'est lui qui nous a mis dans la captivité; c'est lui qui nous délivrera; c'est lui qui nous rendra la vie et nous ressuscitera au troisième jour, afin que nous vivions en sa présence. » Ces paroles, appliquées au Messie, sont comme une consolation que l'Église emploie, de peur que la douleur ne déborde, et, ne voulant pas nous laisser sans espérance, elle nous représente, à côté de la passion de Jésus-Christ, sa résurrection future. Tout chrétien auquel Dieu envoie des souffrances, doit tacher de s'appliquer ces paroles du prophète, puisque Dieu, en nous éprouvant par la tribulation, n'a en vue que notre bien, soit déjà en cette vie, soit surtout en l'autre. Ensuite le prêtre prie Dieu de vouloir faire servir ses tribulations au salut de notre âme, comme au bon larron, en nous préservant du sort de Judas, pour qui la souffrance ne fut qu'une malédiction; il lui demande de nous purifier du péché et de nous donner la grâce de ressusciter spirituellement avec le Seigneur.
Il lit ensuite un passage tiré de l'Exode, (12, 1-11) dans lequel il est parlé de la manière dont les Juifs devaient tuer et manger l'Agneau pascal, qui était une figure de la mort réparatrice de l'Agneau divin. Pour compléter la même figure par la réalité, on lit encore de quelle manière l'Agneau pascal de la nouvelle Alliance, Jésus-Christ, fut immolé sur la croix; c'est ce qui se fait par le récit de la Passion selon l'Évangile de saint Jean.
Simon. Si j'ai bonne mémoire, on lit plusieurs fois la Passion pendant la Semaine-Sainte.
Le Curé. Oui, quatre fois, savoir : le dimanche des Rameaux, le mardi, le mercredi et le vendredi saints, et chaque fois selon un autre évangéliste ; de la sorte, ils viennent attester tous les quatre, l'un après l'autre, combien le Fils de Dieu a souffert par amour pour nous.
Simon. Pourquoi le Prêtre se prosterne-t`il pendant la lecture de la Passion?
Le Curé. Il se met à genoux lorsqu'il arrive au passage du récit évangélique qui rapporte la mort du Seigneur. C'est aussi un signe de tristesse et d'humilité ; le prêtre veut par là remercier Dieu au nom de tous les assistants de ce qu'il a bien voulu nous racheter par la mort de son Fils. — La Passion finie, le prêtre prie pour la prospérité de l'Église catholique, pour le Pape, les évêques et tous les autres membres de la hiérarchie ecclésiastique qui sont dans l`Église ; particulièrement encore pour les chefs chrétiens; ensuite il prie pour les catéchumènes, c'est-à-dire pour ces hommes qui sont sur le point de suivre l'Évangile et qui, par la réception du baptême, veulent confesser la vraie foi. Si, à la vérité, chez nous tous les enfants reçoivent le baptême immédiatement après la naissance , il est encore bien des pays où l'on travaille à la conversion des païens et où , par conséquent, il y a encore des adultes à baptiser. Le prêtre prie ensuite le Seigneur d'éloigner de nous la guerre, la peste ou autres maladies et surtout l'erreur; il demande le bonheur pour les voyageurs, la santé pour les malades, la délivrance pour les prisonniers. Enfin il fait aussi mention des hérétiques et des schismatiques, afin que Dieu daigne leur ouvrir les yeux et les conduire à la connaissance de la vérité en les faisant entrer dans l'Église de Jésus-Christ.
Thomas. Ainsi donc l'Église catholique prie pour ceux qui ne sont pas ses membres ?
Le Curé. L'Église prie pendant toute l'année pour la propagation de la vraie foi, l'extirpation des hérésies et en général pour tous les hommes qui n'ont pas le bonheur de lui appartenir, afin qu'il plaise au Seigneur de faire briller à leurs yeux la lumière de l'Évangile et les préparer au salut éternel ; il en résulte donc que ceux qui ne sont pas catholiques ou qui ne sont pas même chrétiens, ne sont jamais exclus de ses prières.
Simon. Il nous tarde d'entendre expliquer les cérémonies sacrées du vendredi-saint. Si je ne me trompe, nous en sommes venus au découvrement de la croix ?
Le Curé. Oui. Après les oraisons sacerdotales, le célébrant prend la croix recouverte d'un voile noir ou violet et la découvre graduellement en se tournant vers le peuple et chantant trois fois « voici le bois de la croix, » et le choeur : «venez, adorons-le». En même temps on ôte les voiles dont sont recouverts depuis le dimanche de la Passion tous les christs ou crucifix qui se trouvent dans l'église. Ce découvrement des crucifix a pour but de nous représenter le moment auquel le divin Sauveur fut dépouillé de ses habillements, pour être ainsi suspendu à la croix et exposé aux regards de la multitude. Ensuite le prêtre dépose la croix au pied de l'autel et se prosterne à trois reprises différentes devant le crucifix.
Alors tout le monde présent à l'église, les vieillards du sanctuaire et les enfants du choeur, les riches et les pauvres viennent adorer le bois rédempteur : il semble voir les enfants éplorés d'un père qui vient de mourir, admis dans la chambre mortuaire où le chef de famille est exposé sur la couche funèbre, et baiser avec une respectueuse douleur ses restes vénérables. En se prosternant devant le crucifix, le prêtre ne fait qu'exécuter ce que dit l'Apôtre aux Philippiens (2, 10): Que tous les genoux fléchissent au nom de Jésus.
Le Curé. Qu'en dites-vous maintenant, si nous aussi nous commencions à repasser intérieurement tous les bienfaits que nous avons reçus de Dieu depuis tant d'années que nous vivons, et si, d'autre part, nous nous rappelions aussi les péchés dont, malgré ces bienfaits, nous nous sommes rendus coupables?... C'est Dieu qui nous a appelés à la vie ; n'en avons-nous jamais abusé pour l'offenser? C'est lui qui nous a donné tous les membres de notre corps; ne les avons-nous jamais fait servir au péché? C'est lui encore qui nous donne la nourriture de tous les jours ; n'en avons-nous jamais fait une arme contre Dieu? Enfin c'est Dieu lui-même qui est venu nous racheter par sa mort sur la croix, lui qui a lavé nos péchés de son sang; et avons-nous toutefois cessé de l'offenser?
Simon. Ce n'est que trop vrai, et nous aurions sujet de déplorer une pareille ingratitude avec des larmes de sang.
Le Curé : N'oubliez pas que la sainte messe est un sacrifice non sanglant et un mémorial du sacrifice sanglant de la croix. Or, comme le jour du Vendredi-Saint, nous avons sous les yeux le sacrifice sanglant lui-même, le sacrifice non sanglant n'est pas offert, afin que nous nous occupions exclusivement de la méditation de cet autre sacrifice dont l'Apôtre dit: Jésus, après avoir offert une seule victime pour les péchés, est assis pour toujours à la droite de Dieu (Hébreux 10. 12). La seconde raison, pour laquelle on ne dit pas la messe proprement dite, est fondée sur l'idée que l'Église se fait du saint sacrifice de nos autels, en le considérant comme une action toute de joie et de consolation. Il est donc convenable de l'omettre en ce jour lugubre auquel la nature elle-même voulut participer au deuil universel.
L'un des assistants dit qu'il avait toujours cru que la cérémonie du Vendredi-Saint n'était autre qu'une messe en désordre, comme on l'appelait dans le pays ; alors le curé reprit : On ne la désigne par ce nom que pour exprimer que ce n'est pas une messe proprement dite. L'essentiel, dans le saint sacrifice de la messe, consiste dans la consécration du pain et du vin au corps et au sang de Notre-Seigneur. Or, la consécration manque précisément dans la cérémonie du Vendredi-Saint. La sainte hostie, que le prêtre élève pour la consommer ensuite, a été déjà consacrée à la messe du Jeudi-Saint et mise en réserve pour le vendredi.
C'est pourquoi la messe du vendredi ou la messe en désordre se nomme, dans le langage de l'Église, messe des Pré-sanctifiés , c'est-à-dire messe où on consomme les dons sanctifiés ou consacrés la veille. L'office divin de ce jour n'est donc qu'une cérémonie exprimant le deuil et la douleur et dans laquelle on se sert de plusieurs prières et de
plusieurs rites usités dans le saint sacrifice de la messe.
Le célébrant omet de saluer l'assemblée par les paroles joyeuses : « Que le Seigneur soit avec vous » (Dominus vobiscum), parce que Jésus-Christ a été arraché du milieu des siens, et il quitte l'autel immédiatement après la communion. Voilà donc de quelle manière l'Église catholique célèbre la triste journée qui nous rappelle la mort du divin Rédempteur. Si l'un ou l'autre avait encore quelqu'explication à demander, je le prie de vouloir me le dire, avant que nous nous occupions du Samedi-Saint.
Simon : Voyant que personne ne prenait la parole, dit : Je pense, monsieur le curé , qu'on trouverait difficilement à faire encore une question sur les solennités du vendredi
saint; il ne nous reste donc qu'à vous remercier d'avoir bien voulu nous éclairer, d'une manière si incessante et si complète à la fois , sur la signification des beaux
usages de l'Église catholique. Vraiment on sent s’accroître l'amour envers elle, à mesure qu'on apprend à mieux la connaître.
Le Samedi Saint
Le Curé. Hé bien, passons maintenant au Samedi-Saint. Ce jour n'est plus si sombre et les cérémonies qui le distinguent, ne portent plus le même caractère de tristesse, mais plutôt celui de la joie avec un certain mélange de tristesse. On sent que l'Église a foi au consolant et glorieux mystère du lendemain. Au commencement, le silence règne encore dans l'église; nous n'y voyons pas même une seule chandelle allumée, c'est là l'obscurité du sépulcre et le silence de l'Épouse qui veille au tombeau de son Époux. Mais au moment où l'office commence, apparaît devant, nous une série de figures qui nous rappellent déjà la résurrection du Seigneur. La première cérémonie qui a lieu, c'est la bénédiction du feu nouveau.
Simon. Je ne comprends guère pourquoi on bénit ce feu.
Le Curé : Je vais vous expliquer toute la cérémonie et vous dire en même temps sa signification. Ce feu signifie Jésus crucifié. D'après le précepte de l'Église et la coutume ancienne que nous trouvons déjà au quatrième siècle dans la plupart des contrées, on tire le feu de la pierre pour le bénir, plutôt que de le prendre à un foyer quelconque. Après l'avoir bénit, on s'en sert pour allumer tous les cierges de l'église. On le tire de la pierre, pour symboliser que Jésus-Christ est cette pierre angulaire et qu'il apparut sur la terre comme une lumière éclairant le monde. Nous pouvons espérer d'obtenir de lui seul la lumière pour notre intelligence et l'ardeur pour embraser nos coeurs du saint amour de Dieu, car tout ce qui nous est donné, ne nous est donné que par lui : voilà ce que signifie la cérémonie qui consiste à allumer tous les cierges au moyen du feu nouveau.
Or, on bénit le feu, parce que, dans la pensée de l'Église, toutes les créatures ont été viciées par le péché d'Adam et qu'il ne convient point, par conséquent, de les employer sans bénédiction aux cérémonies du culte divin. C'est ainsi que, dès les premiers siècles, on; bénissait le sel, l'encens, les ornements sacerdotaux, etc, pour indiquer par là qu'on retirait ces objets à tout usage profane, afin de les employer uniquement au service du Sanctuaire. On bénit encore le feu ; afin qu'il puisse d'autant mieux signifier Jésus-Christ, le Saint des Saints, et pour que le feu sacré de nos temples nous fasse souvenir que notre cœur ne doit plus brûler que d'un feu divin qui le consume pour Dieu.
Ce feu doit être nouveau et ne pas provenir d'un autre, pour signifier que Jésus- Christ, la lumière du monde, s'est, pour ainsi dire, éteint dans l'ombre de la mort et qu'il a voilé sa gloire, mais qu'à sa glorieuse résurrection, il s'est élevé du tombeau en devenant de nouveau une lumière pour nous éclairer. Dans cette cérémonie, nous imitons les Juifs, qui devaient éloigner de la maison tous les anciens aliments, aussitôt que Pâque arrivait. C'est ainsi que, nous aussi, nous n'employons rien dans les églises qui ne soit nouveau et sanctifié par la prière et la bénédiction de l'Église. Nous y trouvons également un avertissement qui nous dit d'éloigner de notre cœur l'ancien ferment du péché, en reprenant une nouvelle vie devant Dieu dans la sainteté et d'allumer en nos cœurs le feu de l'amour, divin et d'une piété ardente.
Simon. Qui se serait imaginé de trouver une si belle signification à ce feu nouveau ! Que veut donc dire la chandelle à trois branches?
Le Curé. Elle rappelle la Sainte Trinité, qui est une dans sa nature et triple dans ses personnes, dont la seconde est la vraie lumière qui est venue dans le monde. « Il est cette vraie lumière qui éclaire tout homme venant dans ce monde » (Jean. 1 . 9.). C'est pourquoi le prêtre, en l'allumant, chante trois fois : Lumen Christi, la lumière du Christ; et le peuple répond en se prosternant : Deo gratias, pour remercier l'Éternel de ce qu'il a daigné envoyer son Fils sur la terre, pour nous éclairer.
Simon. Et le cierge pascal?
Le Curé... Signifie encore Jésus-Christ ressuscité. La cire blanche représente le sein pur et virginal de la bienheureuse Vierge Marie, dont a été pris le corps de notre Seigneur. Vous savez qu'on y insère cinq grains d'encens en forme de croix. Souvent les grains sont renfermés dans des clous de cire qui nous rappellent les cinq plaies du Sauveur, qu'il conserva après sa résurrection et que nous verrons encore sur son corps, glorifiés à notre plus grande joie ou bien remplis de terreur, an grand jour du jugement; l'encens, au contraire, est le symbole des aromates avec lesquels Nicomède et Joseph d'Arimathie embaumèrent le corps de Jésus-Christ.
On allume le cierge pascal à la chandelle à trois branches dont je vous ai parlé, pour indiquer que le Fils a été engendré du Père et qu'il s'est incarné, pour opérer le salut des hommes, comme nous le confessons dans le Credo de la messe : Dieu de Dieu et lumière de lumière. Plus tard on allume encore les autres cierges de l'église à cette triple lumière, pour signifier que toute lumière intérieure provient du Père des lumières ( Jacques 1. 17.); qu'elle a son origine dans Notre- Seigneur Jésus-Christ qui est la lumière du monde, et qu'elle est répandue dans les âmes par la grâce du Saint-Esprit. Après la bénédiction des fonts baptismaux, on place le cierge pascal du côté de l'Évangile. Ce cierge rappelle le séjour que le divin Rédempteur fit sur la terre après sa résurrection.
Simon. Vous voudrez bien nous instruire maintenant sur la bénédiction des fonts baptismaux.
Le Curé. Elle est précédée du chant des prophéties. Par là, l'Église veut exprimer que maintenant toutes les prophéties et les figures qui avaient désigné et décrit le Messie depuis le commencement du monde, se sont vérifiées en lui, et que tout ce qui n'avait été montré aux Patriarches de l'Ancien Testament que sous un nuage, est maintenant radieux de clarté et de vérité. Les prophéties annoncent en même temps d'une manière emblématique le triste sort du pécheur, aussi longtemps qu'il n'aura pas joui du bonheur de la Rédemption, et le bonheur d'appartenir à Jésus-Christ par la réception du saint Baptême. Voilà en résumé leur contenu, et elles s'adressaient surtout aux nouveaux baptisés qui devaient recevoir le baptême le Samedi-Saint. Ce n'est qu'après la lecture de ces douze prophéties tirées des livres de l'ancien Testament, qu'on procède à la bénédiction des fonts.
Thomas. Je trouve la bénédiction de l'eau destinée à conférer la Baptême passablement inutile, puisque l'eau naturelle suffit pour baptiser.
Le Curé. C'est vrai, le Baptême peut être validement conféré, même en ne se servant pas d'eau bénite. Mais l'Église de Dieu a prescrit cette bénédiction, afin que ce saint Sacrement fût conféré et reçu avec plus de respect et de dévotion. C'est dans ce but qu'on a pratiqué cet usage dès les temps les plus reculés. Saint Basile, qui vivait au quatrième siècle, mentionne cette bénédiction comme provenant des Apôtres, et plusieurs autres Pères de l'Église des premiers siècles en parlent également dans le même sens.
Simon. Pour autant que je m'en rappelle, il se pratique quelques cérémonies particulières à cette occasion.
Le Curé. Le prêtre s'avance d'abord vers la cuve baptismale en récitant les paroles du psaume 41 : « Comme le cerf altéré désire l'eau des fontaines, ainsi mon âme soupire après vous , Seigneur. Mon âme a soif du Dieu vivant. Quand est-ce que j'y parviendrai et quand apparaîtrai-je devant la face de Dieu? »
Ces paroles sont propres à nous faire souvenir avec quelle ardeur nous devons aspirer vers la grâce de Dieu, du Sauveur, en particulier combien est grande et précieuse la grâce du saint Baptême, et avec quel empressement nous devons en rendre participants les nouveaux-nés. Pendant les prières qu'on récite, le prêtre forme dans l'eau, avec la main, le signe de la croix, qu'il fait aussi sur la surface, pour rappeler le Calvaire et nous dire que la grâce du Baptême en est découlée ; il touche l'eau avec la paume de la main, pour signifier que, de même que l'Esprit de Dieu était porté au-dessus des eaux avant la création, de même il fixera sa demeure dans l'âme de tous ceux qui recevront le Baptême, et les remplira de sa lumière et de sa force.
Le prêtre répand de l'eau vers les quatre parties du monde, pour indiquer que l'Évangile doit faire le tour de la terre et que toutes les parties du monde sont appelées à devenir participantes de ce bienfait, selon les paroles de Jésus-Christ: «Allez par tout le monde et annoncez l`Évangile à toutes les créatures et baptisez-les » (Matthieu 28. 19.). Le prêtre souffle sur l'eau en conjurant Jésus-Christ de la bénir de sa bouche même, pour signifier que, par le Baptême, l'homme récupère la vie de son âme, tout comme le Créateur vivifia le premier homme du souffle de sa bouche, et aussi pour montrer que le Saint-Esprit est communiqué aux nouveaux baptisés, de même que Notre-Seigneur le communiquait à ses Apôtres en soufflant sur eux.
C'est encore pour la même raison qu'on y plonge trois fois le cierge pascal, emblème de Notre-Seigneur, en disant : « Que la vertu du Saint-Esprit descende dans cette source d'eau et veuille lui donner la puissance de régénérer les âmes ! » Enfin le prêtre répand quelques gouttes de cire en forme de croix, pour marquer l'onction de la grâce que cette eau, rendue féconde et vivifiante par la vertu du sang de Jésus-Christ répandu sur la croix, produira dans les âmes; puis il y infuse du saint chrême et de l'huile des catéchumènes, pour indiquer la plénitude de l'Esprit divin qui agit par le moyen de cette eau dans le Baptême, et pour nous remémorer que la grâce du Saint-Esprit, ainsi que les vertus théologales, la foi, l'espérance et la charité, sont infuses dans l'âme du néo-baptisé. Car l'huile et le saint chrême sont les emblèmes de l'Esprit-Saint. Mais, avant de verser l'huile sainte dans la fontaine baptismale, il asperge les assistants de l'eau qu'il vient de bénir. En faisant à cette occasion le signe de la croix, on fera bien de se rappeler son propre Baptême, pour renouveler et consolider les engagements sacrés qu'on y a pris envers Dieu. On vous donne alors, mes amis, la liberté d'aller prendre de cette eau et de l'emporter dans vos maisons.
Simon. Cette eau a une vertu particulière, n'est-ce pas ?
Le Curé. Se fondant sur les paroles elles-mêmes de l'Église, on l'emploie comme préservatif contre les accidents et les dangers spirituels et temporels.
Simon. Après la bénédiction des fonts, on chante les litanies de tous les Saints.
Le Curé. Cela se fait en revenant au choeur. Ce chant a lieu dans un grand nombre d'actions importantes dans l'Église, comme, par exemple, l'ordination des prêtres et des évêques. Le motif en est clair, car, lorsqu'il s'agit d'une action de si grande importance, nous sentons combien nos prières sont insuffisantes, et, à cet effet, nous nous adressons à nos frères glorifiés qui font partie de l'Église triomphante, afin qu'ils unissent, auprès de Dieu, leurs prières aux nôtres et que nous puissions ainsi compter avec d'autant plus d'assurance sur le succès de nos supplications. Nous le faisons aussi en ce jour, pour que la grâce du saint Baptême soit donnée à tous les hommes sans exception, mais particulièrement aux néo-baptisés. Pendant qu'on achève les litanies, le prêtre se prosterne au pied de l'autel, pour exprimer par là avec quelle ferveur l'Église supplie le Ciel en union avec les Saints pour une affaire si importante. Cette action du prêtre rappelle aussi l'état de mort spirituelle de l'homme qui n'a pas encore été baptisé, et, en se relevant, il indique que tous Ceux qui étaient morts de la sorte, ressusciteront par le Baptême à la grâce avec Jésus-Christ pour la Vie éternelle.
Simon. Vous nous avez déjà dit plusieurs fois qu'originairement on conférait, dans la journée du Samedi-Saint, le Baptême à ceux qui voulaient embrasser le christianisme. Cela ne se faisait-il qu'à cette époque et pourquoi justement le Samedi-Saint?
Le Curé. Oui, on le conférait de préférence le Samedi-Saint, mais pas exclusivement. La veille de la Pentecôte était fixée également pour le Baptême solennel des catéchumènes ; c'est donc pourquoi on procède en ces deux jours à la bénédiction des fonts nécessaires pour toute l'année. Or, on conférait le Baptême de préférence le Samedi-Saint, parce que la Semaine-Sainte nous fait penser au mystère de notre Rédemption, et puis encore, parce que le saint temps de carême avait donné occasion de se préparer, par la prière et le jeûne, à une action si importante.
Enfin, le Baptême par immersion, tel qu'il se pratiquait autrefois, et qui consistait à plonger dans l'eau le catéchumène, est comme un symbole de la sépulture de Jésus-Christ, de même que la sortie du catéchumène de la fontaine baptismale nous rappelle sa glorieuse Résurrection. L'Apôtre des nations nous dit à ce sujet : « Ne savez-vous pas que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, nous avons été baptisés en sa mort ? En effet, nous avons été ensevelis avec lui par le Baptême, pour la mort du péché, afin que, comme Jésus-Christ est ressuscité d'entre les morts par la gloire de son Père, nous marchions aussi dans une vie nouvelle. » (Romains 6. 3.)
La fête de la Pentecôte, au contraire, avait été choisie pour le Baptême, soit qu'on la considérât comme la fin du temps pascal, soit parce que ce fut en ce jour que le Saint-Esprit descendit sur les Apôtres, les baptisant par le feu et allumant en eux une foi vive ; ensuite parce qu'après la descente du Saint-Esprit, à la première prédication de saint Pierre, il y eut un si grand nombre de personnes qui se firent baptiser. On peut dire du Saint-Esprit comme du Fils de Dieu : « Voilà que je fais toutes choses nouvelles » (Apocalypse 21. 5), ce qui s'applique surtout aux nouveaux baptisés qui sortent en hommes nouveaux du bain de la régénération. C'est une coutume usitée encore de nos jours dans plusieurs endroits du monde catholique, de faire baptiser en ce jour les enfants nés vers cette époque. On ajoute encore, d'après un usage très-ancien, dans toutes les messes qui se disent entre Pâques et la Pentecôte, une prière pour les nouveaux baptisés. Cette prière, qui se dit immédiatement avant la consécration, est celle-ci: «Ayez pour agréable, Seigneur, ce sacrifice que nous vous offrons en union avec toute votre sainte Église et dans l'humilité de nos cœurs pour ceux aussi que vous avez daigné régénérer par l'eau et le Saint-Esprit. »
Simon. Étaient-ce là les seuls jours auxquels le Baptême était conféré?
Le Curé. Oui, au moins dans les premiers siècles de l'Église; plus tard on y ajouta d'autres fêtes, telles que, celles de la Nativité, de saint Jean-Baptiste et autres. Dès les temps les plus reculés, on baptisait aussi le jour de l'Épiphanie, parce que les trois Mages avaient été les premiers infidèles appelés à la vraie foi. Ce jour était très-convenable pour cette solennité, parce qu'il exhortait ceux qui obtenaient la grâce du saint Baptême, à suivre comme les trois Rois l'étoile de la foi, pour lui soumettre leur intelligence et assujettir leur cœur à Dieu, par une vie chrétienne. Comme on rappelle aussi le jour des Rois le changement de l'eau en vin aux noces de Cana en Galilée et le premier miracle de Jésus, par lequel il inaugura sa vie publique, le nouveau baptisé y trouvait une indication de la connaissance de Jésus-Christ qu'il acquérait par le baptême. Enfin cette fête est encore destinée à perpétuer le souvenir du Baptême de notre Seigneur par saint Jean-Baptiste dans les eaux du Jourdain, et ce précieux anniversaire vous dit suffisamment que le jour n'aurait pu être mieux choisi pour la dispensation de ce sacrement aux novices du christianisme.
De là provient l'usage de bénir de l'eau, dans certains pays, qu'on appelle eau des Trois Rois, mais qui n'est pas la même que celle qu'on bénit le Samedi-Saint et la veille de la Pentecôte pour l'administration du Baptême. Ensuite, je ne dois pas oublier de vous faire remarquer que l'observation de ces jours n'avait lieu que pour le Baptême des adultes et de ceux dont la vie n'était pas en danger. D'ailleurs, au commencement de l'Église, il n'y avait guère que des adultes à baptiser parmi ceux qui quittaient le paganisme ou la croyance des Juifs pour embrasser le christianisme. Dans le cas d'une maladie dangereuse, et plus tard, lorsque l'usage se fut introduit de baptiser les enfants, on cessa de limiter le Baptême à ces jours ; il importait avant tout de le conférer aussitôt que possible et de ne pas laisser mourir avec la faute originelle. De nos jours pas moins qu'alors, ce serait assumer une bien grande responsabilité, si les parents négligeaient de faire baptiser leurs enfants le plus tôt possible.
Simon. Oui, effectivement, quelle immense responsabilité et quels reproches des parents si négligents doivent se faire!
Le Curé. Et des reproches d'autant plus fondés, que les parents tiennent envers leurs enfants la place de Dieu qui ne les leur a confiés, que pour qu'ils prennent soin de leur bien-être spirituel et temporel. Mais, mes bons amis, il se fait tard et pourtant je n'ose pas finir aujourd'hui, sans avoir épuisé la matière que je m'étais proposée. Hâtons-nous donc de dire un mot de la Messe du Samedi-Saint.
Simon. Cette messe est beaucoup plus joyeuse que celle des autres jours de la semaine ; on peut déjà le remarquer à l'autel qui est orné et n'offre plus la nudité du Vendredi- Saint.
Le Curé. Cette messe anticipée se célébrait autrefois la nuit de Pâques, un peu avant l'heure de la Résurrection du Sauveur. C'est donc pour la célébrer que l'on décore les autels, en signe de joie, et pour signifier la jubilation spirituelle qui doit nous animer au jour de la grande victoire de Jésus-Christ sur la mort. En outre, l'Église nous fait comprendre par-là que Jésus-Christ est ressuscité du tombeau avec un corps glorieux et transfiguré.
Simon. Alors on entend de nouveau les cloches!
Le Curé. Je vous ai dit déjà que les cloches symbolisent les Apôtres, dont la voix devait faire résonner l'Évangile dans toutes les parties du monde. Or, ceux-ci s'étaient cachés et ils étaient restés muets pendant la Passion du Sauveur par la crainte des Juifs ; mais par la Résurrection et l'apparition de Jésus-Christ, les disciples furent remplis de courage et de consolation et ils répandirent partout la nouvelle que leur maître était ressuscité. Voilà pourquoi les cloches qui les symbolisent se font entendre de nouveau. En général leur son exprime la joie du monde catholique, comme leur silence est un signe du deuil et de la tristesse que nous ressentons à cause de sa mort.
Simon. Le prêtre entonne aussi le Gloria in excelsis ?
Le Curé. Oui, en signe de joie, car c'est en ce moment que les cloches et l'orgue se font entendre de nouveau ainsi que les sonnettes qui avaient fait silence dans l'église ; tout semble participer à la joie que ressent l'Église de voir son Époux triomphant reprendre une vie nouvelle, éternelle, glorieuse, impassible. Les raisons particulières, pour lesquelles on chante en ce jour le Gloria sont :
1° Parce que la Résurrection de Jésus-Christ était comme une seconde naissance. Or, comme les anges ont chanté ce cantique de joie, lors de la première naissance du Seigneur sortant du sein de la sainte Vierge, ce cantique convient aussi parfaitement pour solenniser sa seconde naissance du sein du tombeau, sa Résurrection.
2° De même que les anges annoncèrent à Bethléem la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, de même aussi on annonçait aux nouveaux baptisés la paix avec Dieu, qu'ils acquéraient par la grâce sanctifiante que le Baptême leur conférait le Samedi-Saint. C'était comme une salutation que leur adressait toute l'Église.
3° Des anges avaient annoncé aux bergers Jésus naissant dans la crèche, ce sont encore de ces esprits célestes qui annoncent sa naissance glorieuse aux saintes femmes et par elles aux Apôtres; quel chant aurait donc pu remplacer ici le cantique angélique ?
Profitez donc des connaissances que vous avez acquises pour assister à ces offices, non-seulement avec plaisir, mais aussi avec grande dévotion et en vous rappelant le bienfait de la Rédemption. Et maintenant je prie Dieu de vous protéger pendant cette nuit. Soyez, pendant votre sommeil, comme ensevelis avec Jésus-Christ, afin que chaque fois votre réveil soit comme une résurrection à une vie meilleure. Chaque jour vous apportera ainsi un joyeux Alléluia, jusqu'à ce que vous puissiez le chanter un jour. éternellement avec les anges et les Saints dans le ciel. Loué soit J.-C. ! — A jamais.
DU VENDREDI ET DU SAMEDI SAINTS.
Résumé. Vendredi-Saint ; son nom. Office du Vendredi-Saint. Découvrement et adoration de la croix. Messe des Pré-Sanctifiés. Samedi-Saint. Bénédiction du feu nouveau. Cierge pascal. Bénédiction des fonts baptismaux. Baptême des catéchumènes. Messe du Samedi-Saint.
Le Curé : Mes chers amis, j'ai pensé que si vous vous trouvez aujourd'hui réunis sitôt et en si grand nombre, je n'osais pas manquer moi-même, aussi n'y a-t-il aucun inconvénient à commencer ce soir un peu plus tôt qu'à l'ordinaire, car j'ai bien des choses à vous expliquer. Je n'ai pas encore répondu à la question qui m'a été faite en clôturant la dernière séance ; je pense néanmoins qu'il sera mieux de suivre, selon leur ordre, les cérémonies de la Semaine Sainte; de la sorte, nous aboutirons aussi à la discussion du point en question.
Simon. M. le Curé, les noms de Vendredi-Saint, me paraissent faciles à expliquer, si je réfléchis à ce que vous nous avez dit la fois dernière. Toutefois , comme l'assemblée est plus nombreuse aujourd'hui qu'elle ne l'était hier, je vous prie de vouloir bien nous en dire encore un mot.
Le Curé. Très-volontiers, Simon. Ce jour est Saint par excellence, parce que c'est en ce jour que le Saint des Saints a bien voulu s'offrir en sacrifice pour nous racheter de l'esclavage de Satan (le péché originel avait soumis l`homme a l`ange déchu), nous sanctifier et nous ouvrir le ciel ; il est bon, puisque des grâces infinies nous ont été méritées sur la croix. Cependant, par sa mort, Jésus-Christ n'a pas voulu nous priver de notre liberté ; il dépend de nous de nous sanctifier en coopérant à la grâce du Sauveur et de mettre en pratique ces paroles de l'Apôtre : « Vous avez été rachetés à un grand prix; c'est pourquoi glorifiez Dieu et portez-le en votre corps, » c'est-à-dire : devenez semblables à lui (1 Corinthiens 6. 20).
O Crux ave spes unica - O Croix, salut, espoir unique! - Latin - 19 eme siècle - Espagne - Fernando Sor
Si donc vous vous réjouissez de ce que Dieu n'a pas dédaigné de donner son propre fils pour votre rançon, n'oubliez pas de correspondre à l'exhortation de l'Apôtre en vous montrant reconnaissants par une vie fervente et sainte.
Est-ce bien là ce que vous vous proposez de faire ?
Un grand nombre répondent : Oui, de tout coeur.
Dieu aidant, ajouta Simon.
Oui, mes amis, reprit le vénérable pasteur, et Dieu aidera sans faute, si seulement nous le voulons fermement. Du reste, vous avez raison. Simon, nous ne pouvons mettre qu'en Dieu seul notre confiance; nous devons même encore nous défier de nous-mêmes, quand il s'agit de faire le bien. Si Dieu ne bâtit lui-même la maison, ce sera en vain qu'y travailleront les ouvriers, dit le psalmiste.
Simon. M. le Curé. Ici les questions se pressent, vu le grand nombre des cérémonies du Vendredi Saint. Mais, ne les connaissant pas toutes de mémoire, vous voudrez bien vous-même y suppléer au besoin.
Le Curé. Commençons seulement ; les questions se présenteront d'elles-mêmes. — Arrive à l'autel, le prêtre se prosterne étendu de son long, la face contre terre, pour s'humilier par-là profondément devant le Seigneur, qui a voulu lui-même s'humilier jusqu'à la mort sur la croix; il exprime en même temps la douleur que ressent toute la chrétienté, en considérant la passion et la mort du Rédempteur des hommes. Après être resté prosterné le temps d'un Miserere, il se lève, monte les marches de l'autel et lit un extrait du prophète Osée, (6. 1-6.) dans lequel nous trouvons ces paroles: « Dans leur tribulation, ils reviendront à moi, disant : Venez, retournons vers le Seigneur; c'est lui qui nous a mis dans la captivité; c'est lui qui nous délivrera; c'est lui qui nous rendra la vie et nous ressuscitera au troisième jour, afin que nous vivions en sa présence. » Ces paroles, appliquées au Messie, sont comme une consolation que l'Église emploie, de peur que la douleur ne déborde, et, ne voulant pas nous laisser sans espérance, elle nous représente, à côté de la passion de Jésus-Christ, sa résurrection future. Tout chrétien auquel Dieu envoie des souffrances, doit tacher de s'appliquer ces paroles du prophète, puisque Dieu, en nous éprouvant par la tribulation, n'a en vue que notre bien, soit déjà en cette vie, soit surtout en l'autre. Ensuite le prêtre prie Dieu de vouloir faire servir ses tribulations au salut de notre âme, comme au bon larron, en nous préservant du sort de Judas, pour qui la souffrance ne fut qu'une malédiction; il lui demande de nous purifier du péché et de nous donner la grâce de ressusciter spirituellement avec le Seigneur.
Il lit ensuite un passage tiré de l'Exode, (12, 1-11) dans lequel il est parlé de la manière dont les Juifs devaient tuer et manger l'Agneau pascal, qui était une figure de la mort réparatrice de l'Agneau divin. Pour compléter la même figure par la réalité, on lit encore de quelle manière l'Agneau pascal de la nouvelle Alliance, Jésus-Christ, fut immolé sur la croix; c'est ce qui se fait par le récit de la Passion selon l'Évangile de saint Jean.
Simon. Si j'ai bonne mémoire, on lit plusieurs fois la Passion pendant la Semaine-Sainte.
Le Curé. Oui, quatre fois, savoir : le dimanche des Rameaux, le mardi, le mercredi et le vendredi saints, et chaque fois selon un autre évangéliste ; de la sorte, ils viennent attester tous les quatre, l'un après l'autre, combien le Fils de Dieu a souffert par amour pour nous.
Simon. Pourquoi le Prêtre se prosterne-t`il pendant la lecture de la Passion?
Le Curé. Il se met à genoux lorsqu'il arrive au passage du récit évangélique qui rapporte la mort du Seigneur. C'est aussi un signe de tristesse et d'humilité ; le prêtre veut par là remercier Dieu au nom de tous les assistants de ce qu'il a bien voulu nous racheter par la mort de son Fils. — La Passion finie, le prêtre prie pour la prospérité de l'Église catholique, pour le Pape, les évêques et tous les autres membres de la hiérarchie ecclésiastique qui sont dans l`Église ; particulièrement encore pour les chefs chrétiens; ensuite il prie pour les catéchumènes, c'est-à-dire pour ces hommes qui sont sur le point de suivre l'Évangile et qui, par la réception du baptême, veulent confesser la vraie foi. Si, à la vérité, chez nous tous les enfants reçoivent le baptême immédiatement après la naissance , il est encore bien des pays où l'on travaille à la conversion des païens et où , par conséquent, il y a encore des adultes à baptiser. Le prêtre prie ensuite le Seigneur d'éloigner de nous la guerre, la peste ou autres maladies et surtout l'erreur; il demande le bonheur pour les voyageurs, la santé pour les malades, la délivrance pour les prisonniers. Enfin il fait aussi mention des hérétiques et des schismatiques, afin que Dieu daigne leur ouvrir les yeux et les conduire à la connaissance de la vérité en les faisant entrer dans l'Église de Jésus-Christ.
Thomas. Ainsi donc l'Église catholique prie pour ceux qui ne sont pas ses membres ?
Le Curé. L'Église prie pendant toute l'année pour la propagation de la vraie foi, l'extirpation des hérésies et en général pour tous les hommes qui n'ont pas le bonheur de lui appartenir, afin qu'il plaise au Seigneur de faire briller à leurs yeux la lumière de l'Évangile et les préparer au salut éternel ; il en résulte donc que ceux qui ne sont pas catholiques ou qui ne sont pas même chrétiens, ne sont jamais exclus de ses prières.
Simon. Il nous tarde d'entendre expliquer les cérémonies sacrées du vendredi-saint. Si je ne me trompe, nous en sommes venus au découvrement de la croix ?
Le Curé. Oui. Après les oraisons sacerdotales, le célébrant prend la croix recouverte d'un voile noir ou violet et la découvre graduellement en se tournant vers le peuple et chantant trois fois « voici le bois de la croix, » et le choeur : «venez, adorons-le». En même temps on ôte les voiles dont sont recouverts depuis le dimanche de la Passion tous les christs ou crucifix qui se trouvent dans l'église. Ce découvrement des crucifix a pour but de nous représenter le moment auquel le divin Sauveur fut dépouillé de ses habillements, pour être ainsi suspendu à la croix et exposé aux regards de la multitude. Ensuite le prêtre dépose la croix au pied de l'autel et se prosterne à trois reprises différentes devant le crucifix.
Alors tout le monde présent à l'église, les vieillards du sanctuaire et les enfants du choeur, les riches et les pauvres viennent adorer le bois rédempteur : il semble voir les enfants éplorés d'un père qui vient de mourir, admis dans la chambre mortuaire où le chef de famille est exposé sur la couche funèbre, et baiser avec une respectueuse douleur ses restes vénérables. En se prosternant devant le crucifix, le prêtre ne fait qu'exécuter ce que dit l'Apôtre aux Philippiens (2, 10): Que tous les genoux fléchissent au nom de Jésus.
Le Curé. Qu'en dites-vous maintenant, si nous aussi nous commencions à repasser intérieurement tous les bienfaits que nous avons reçus de Dieu depuis tant d'années que nous vivons, et si, d'autre part, nous nous rappelions aussi les péchés dont, malgré ces bienfaits, nous nous sommes rendus coupables?... C'est Dieu qui nous a appelés à la vie ; n'en avons-nous jamais abusé pour l'offenser? C'est lui qui nous a donné tous les membres de notre corps; ne les avons-nous jamais fait servir au péché? C'est lui encore qui nous donne la nourriture de tous les jours ; n'en avons-nous jamais fait une arme contre Dieu? Enfin c'est Dieu lui-même qui est venu nous racheter par sa mort sur la croix, lui qui a lavé nos péchés de son sang; et avons-nous toutefois cessé de l'offenser?
Simon. Ce n'est que trop vrai, et nous aurions sujet de déplorer une pareille ingratitude avec des larmes de sang.
Le Curé : N'oubliez pas que la sainte messe est un sacrifice non sanglant et un mémorial du sacrifice sanglant de la croix. Or, comme le jour du Vendredi-Saint, nous avons sous les yeux le sacrifice sanglant lui-même, le sacrifice non sanglant n'est pas offert, afin que nous nous occupions exclusivement de la méditation de cet autre sacrifice dont l'Apôtre dit: Jésus, après avoir offert une seule victime pour les péchés, est assis pour toujours à la droite de Dieu (Hébreux 10. 12). La seconde raison, pour laquelle on ne dit pas la messe proprement dite, est fondée sur l'idée que l'Église se fait du saint sacrifice de nos autels, en le considérant comme une action toute de joie et de consolation. Il est donc convenable de l'omettre en ce jour lugubre auquel la nature elle-même voulut participer au deuil universel.
L'un des assistants dit qu'il avait toujours cru que la cérémonie du Vendredi-Saint n'était autre qu'une messe en désordre, comme on l'appelait dans le pays ; alors le curé reprit : On ne la désigne par ce nom que pour exprimer que ce n'est pas une messe proprement dite. L'essentiel, dans le saint sacrifice de la messe, consiste dans la consécration du pain et du vin au corps et au sang de Notre-Seigneur. Or, la consécration manque précisément dans la cérémonie du Vendredi-Saint. La sainte hostie, que le prêtre élève pour la consommer ensuite, a été déjà consacrée à la messe du Jeudi-Saint et mise en réserve pour le vendredi.
C'est pourquoi la messe du vendredi ou la messe en désordre se nomme, dans le langage de l'Église, messe des Pré-sanctifiés , c'est-à-dire messe où on consomme les dons sanctifiés ou consacrés la veille. L'office divin de ce jour n'est donc qu'une cérémonie exprimant le deuil et la douleur et dans laquelle on se sert de plusieurs prières et de
plusieurs rites usités dans le saint sacrifice de la messe.
Le célébrant omet de saluer l'assemblée par les paroles joyeuses : « Que le Seigneur soit avec vous » (Dominus vobiscum), parce que Jésus-Christ a été arraché du milieu des siens, et il quitte l'autel immédiatement après la communion. Voilà donc de quelle manière l'Église catholique célèbre la triste journée qui nous rappelle la mort du divin Rédempteur. Si l'un ou l'autre avait encore quelqu'explication à demander, je le prie de vouloir me le dire, avant que nous nous occupions du Samedi-Saint.
Simon : Voyant que personne ne prenait la parole, dit : Je pense, monsieur le curé , qu'on trouverait difficilement à faire encore une question sur les solennités du vendredi
saint; il ne nous reste donc qu'à vous remercier d'avoir bien voulu nous éclairer, d'une manière si incessante et si complète à la fois , sur la signification des beaux
usages de l'Église catholique. Vraiment on sent s’accroître l'amour envers elle, à mesure qu'on apprend à mieux la connaître.
Le Samedi Saint
Le Curé. Hé bien, passons maintenant au Samedi-Saint. Ce jour n'est plus si sombre et les cérémonies qui le distinguent, ne portent plus le même caractère de tristesse, mais plutôt celui de la joie avec un certain mélange de tristesse. On sent que l'Église a foi au consolant et glorieux mystère du lendemain. Au commencement, le silence règne encore dans l'église; nous n'y voyons pas même une seule chandelle allumée, c'est là l'obscurité du sépulcre et le silence de l'Épouse qui veille au tombeau de son Époux. Mais au moment où l'office commence, apparaît devant, nous une série de figures qui nous rappellent déjà la résurrection du Seigneur. La première cérémonie qui a lieu, c'est la bénédiction du feu nouveau.
Simon. Je ne comprends guère pourquoi on bénit ce feu.
Le Curé : Je vais vous expliquer toute la cérémonie et vous dire en même temps sa signification. Ce feu signifie Jésus crucifié. D'après le précepte de l'Église et la coutume ancienne que nous trouvons déjà au quatrième siècle dans la plupart des contrées, on tire le feu de la pierre pour le bénir, plutôt que de le prendre à un foyer quelconque. Après l'avoir bénit, on s'en sert pour allumer tous les cierges de l'église. On le tire de la pierre, pour symboliser que Jésus-Christ est cette pierre angulaire et qu'il apparut sur la terre comme une lumière éclairant le monde. Nous pouvons espérer d'obtenir de lui seul la lumière pour notre intelligence et l'ardeur pour embraser nos coeurs du saint amour de Dieu, car tout ce qui nous est donné, ne nous est donné que par lui : voilà ce que signifie la cérémonie qui consiste à allumer tous les cierges au moyen du feu nouveau.
Or, on bénit le feu, parce que, dans la pensée de l'Église, toutes les créatures ont été viciées par le péché d'Adam et qu'il ne convient point, par conséquent, de les employer sans bénédiction aux cérémonies du culte divin. C'est ainsi que, dès les premiers siècles, on; bénissait le sel, l'encens, les ornements sacerdotaux, etc, pour indiquer par là qu'on retirait ces objets à tout usage profane, afin de les employer uniquement au service du Sanctuaire. On bénit encore le feu ; afin qu'il puisse d'autant mieux signifier Jésus-Christ, le Saint des Saints, et pour que le feu sacré de nos temples nous fasse souvenir que notre cœur ne doit plus brûler que d'un feu divin qui le consume pour Dieu.
Ce feu doit être nouveau et ne pas provenir d'un autre, pour signifier que Jésus- Christ, la lumière du monde, s'est, pour ainsi dire, éteint dans l'ombre de la mort et qu'il a voilé sa gloire, mais qu'à sa glorieuse résurrection, il s'est élevé du tombeau en devenant de nouveau une lumière pour nous éclairer. Dans cette cérémonie, nous imitons les Juifs, qui devaient éloigner de la maison tous les anciens aliments, aussitôt que Pâque arrivait. C'est ainsi que, nous aussi, nous n'employons rien dans les églises qui ne soit nouveau et sanctifié par la prière et la bénédiction de l'Église. Nous y trouvons également un avertissement qui nous dit d'éloigner de notre cœur l'ancien ferment du péché, en reprenant une nouvelle vie devant Dieu dans la sainteté et d'allumer en nos cœurs le feu de l'amour, divin et d'une piété ardente.
Simon. Qui se serait imaginé de trouver une si belle signification à ce feu nouveau ! Que veut donc dire la chandelle à trois branches?
Le Curé. Elle rappelle la Sainte Trinité, qui est une dans sa nature et triple dans ses personnes, dont la seconde est la vraie lumière qui est venue dans le monde. « Il est cette vraie lumière qui éclaire tout homme venant dans ce monde » (Jean. 1 . 9.). C'est pourquoi le prêtre, en l'allumant, chante trois fois : Lumen Christi, la lumière du Christ; et le peuple répond en se prosternant : Deo gratias, pour remercier l'Éternel de ce qu'il a daigné envoyer son Fils sur la terre, pour nous éclairer.
Simon. Et le cierge pascal?
Le Curé... Signifie encore Jésus-Christ ressuscité. La cire blanche représente le sein pur et virginal de la bienheureuse Vierge Marie, dont a été pris le corps de notre Seigneur. Vous savez qu'on y insère cinq grains d'encens en forme de croix. Souvent les grains sont renfermés dans des clous de cire qui nous rappellent les cinq plaies du Sauveur, qu'il conserva après sa résurrection et que nous verrons encore sur son corps, glorifiés à notre plus grande joie ou bien remplis de terreur, an grand jour du jugement; l'encens, au contraire, est le symbole des aromates avec lesquels Nicomède et Joseph d'Arimathie embaumèrent le corps de Jésus-Christ.
On allume le cierge pascal à la chandelle à trois branches dont je vous ai parlé, pour indiquer que le Fils a été engendré du Père et qu'il s'est incarné, pour opérer le salut des hommes, comme nous le confessons dans le Credo de la messe : Dieu de Dieu et lumière de lumière. Plus tard on allume encore les autres cierges de l'église à cette triple lumière, pour signifier que toute lumière intérieure provient du Père des lumières ( Jacques 1. 17.); qu'elle a son origine dans Notre- Seigneur Jésus-Christ qui est la lumière du monde, et qu'elle est répandue dans les âmes par la grâce du Saint-Esprit. Après la bénédiction des fonts baptismaux, on place le cierge pascal du côté de l'Évangile. Ce cierge rappelle le séjour que le divin Rédempteur fit sur la terre après sa résurrection.
Simon. Vous voudrez bien nous instruire maintenant sur la bénédiction des fonts baptismaux.
Le Curé. Elle est précédée du chant des prophéties. Par là, l'Église veut exprimer que maintenant toutes les prophéties et les figures qui avaient désigné et décrit le Messie depuis le commencement du monde, se sont vérifiées en lui, et que tout ce qui n'avait été montré aux Patriarches de l'Ancien Testament que sous un nuage, est maintenant radieux de clarté et de vérité. Les prophéties annoncent en même temps d'une manière emblématique le triste sort du pécheur, aussi longtemps qu'il n'aura pas joui du bonheur de la Rédemption, et le bonheur d'appartenir à Jésus-Christ par la réception du saint Baptême. Voilà en résumé leur contenu, et elles s'adressaient surtout aux nouveaux baptisés qui devaient recevoir le baptême le Samedi-Saint. Ce n'est qu'après la lecture de ces douze prophéties tirées des livres de l'ancien Testament, qu'on procède à la bénédiction des fonts.
Thomas. Je trouve la bénédiction de l'eau destinée à conférer la Baptême passablement inutile, puisque l'eau naturelle suffit pour baptiser.
Le Curé. C'est vrai, le Baptême peut être validement conféré, même en ne se servant pas d'eau bénite. Mais l'Église de Dieu a prescrit cette bénédiction, afin que ce saint Sacrement fût conféré et reçu avec plus de respect et de dévotion. C'est dans ce but qu'on a pratiqué cet usage dès les temps les plus reculés. Saint Basile, qui vivait au quatrième siècle, mentionne cette bénédiction comme provenant des Apôtres, et plusieurs autres Pères de l'Église des premiers siècles en parlent également dans le même sens.
Simon. Pour autant que je m'en rappelle, il se pratique quelques cérémonies particulières à cette occasion.
Le Curé. Le prêtre s'avance d'abord vers la cuve baptismale en récitant les paroles du psaume 41 : « Comme le cerf altéré désire l'eau des fontaines, ainsi mon âme soupire après vous , Seigneur. Mon âme a soif du Dieu vivant. Quand est-ce que j'y parviendrai et quand apparaîtrai-je devant la face de Dieu? »
Ces paroles sont propres à nous faire souvenir avec quelle ardeur nous devons aspirer vers la grâce de Dieu, du Sauveur, en particulier combien est grande et précieuse la grâce du saint Baptême, et avec quel empressement nous devons en rendre participants les nouveaux-nés. Pendant les prières qu'on récite, le prêtre forme dans l'eau, avec la main, le signe de la croix, qu'il fait aussi sur la surface, pour rappeler le Calvaire et nous dire que la grâce du Baptême en est découlée ; il touche l'eau avec la paume de la main, pour signifier que, de même que l'Esprit de Dieu était porté au-dessus des eaux avant la création, de même il fixera sa demeure dans l'âme de tous ceux qui recevront le Baptême, et les remplira de sa lumière et de sa force.
Le prêtre répand de l'eau vers les quatre parties du monde, pour indiquer que l'Évangile doit faire le tour de la terre et que toutes les parties du monde sont appelées à devenir participantes de ce bienfait, selon les paroles de Jésus-Christ: «Allez par tout le monde et annoncez l`Évangile à toutes les créatures et baptisez-les » (Matthieu 28. 19.). Le prêtre souffle sur l'eau en conjurant Jésus-Christ de la bénir de sa bouche même, pour signifier que, par le Baptême, l'homme récupère la vie de son âme, tout comme le Créateur vivifia le premier homme du souffle de sa bouche, et aussi pour montrer que le Saint-Esprit est communiqué aux nouveaux baptisés, de même que Notre-Seigneur le communiquait à ses Apôtres en soufflant sur eux.
C'est encore pour la même raison qu'on y plonge trois fois le cierge pascal, emblème de Notre-Seigneur, en disant : « Que la vertu du Saint-Esprit descende dans cette source d'eau et veuille lui donner la puissance de régénérer les âmes ! » Enfin le prêtre répand quelques gouttes de cire en forme de croix, pour marquer l'onction de la grâce que cette eau, rendue féconde et vivifiante par la vertu du sang de Jésus-Christ répandu sur la croix, produira dans les âmes; puis il y infuse du saint chrême et de l'huile des catéchumènes, pour indiquer la plénitude de l'Esprit divin qui agit par le moyen de cette eau dans le Baptême, et pour nous remémorer que la grâce du Saint-Esprit, ainsi que les vertus théologales, la foi, l'espérance et la charité, sont infuses dans l'âme du néo-baptisé. Car l'huile et le saint chrême sont les emblèmes de l'Esprit-Saint. Mais, avant de verser l'huile sainte dans la fontaine baptismale, il asperge les assistants de l'eau qu'il vient de bénir. En faisant à cette occasion le signe de la croix, on fera bien de se rappeler son propre Baptême, pour renouveler et consolider les engagements sacrés qu'on y a pris envers Dieu. On vous donne alors, mes amis, la liberté d'aller prendre de cette eau et de l'emporter dans vos maisons.
Simon. Cette eau a une vertu particulière, n'est-ce pas ?
Le Curé. Se fondant sur les paroles elles-mêmes de l'Église, on l'emploie comme préservatif contre les accidents et les dangers spirituels et temporels.
Simon. Après la bénédiction des fonts, on chante les litanies de tous les Saints.
Le Curé. Cela se fait en revenant au choeur. Ce chant a lieu dans un grand nombre d'actions importantes dans l'Église, comme, par exemple, l'ordination des prêtres et des évêques. Le motif en est clair, car, lorsqu'il s'agit d'une action de si grande importance, nous sentons combien nos prières sont insuffisantes, et, à cet effet, nous nous adressons à nos frères glorifiés qui font partie de l'Église triomphante, afin qu'ils unissent, auprès de Dieu, leurs prières aux nôtres et que nous puissions ainsi compter avec d'autant plus d'assurance sur le succès de nos supplications. Nous le faisons aussi en ce jour, pour que la grâce du saint Baptême soit donnée à tous les hommes sans exception, mais particulièrement aux néo-baptisés. Pendant qu'on achève les litanies, le prêtre se prosterne au pied de l'autel, pour exprimer par là avec quelle ferveur l'Église supplie le Ciel en union avec les Saints pour une affaire si importante. Cette action du prêtre rappelle aussi l'état de mort spirituelle de l'homme qui n'a pas encore été baptisé, et, en se relevant, il indique que tous Ceux qui étaient morts de la sorte, ressusciteront par le Baptême à la grâce avec Jésus-Christ pour la Vie éternelle.
Simon. Vous nous avez déjà dit plusieurs fois qu'originairement on conférait, dans la journée du Samedi-Saint, le Baptême à ceux qui voulaient embrasser le christianisme. Cela ne se faisait-il qu'à cette époque et pourquoi justement le Samedi-Saint?
Le Curé. Oui, on le conférait de préférence le Samedi-Saint, mais pas exclusivement. La veille de la Pentecôte était fixée également pour le Baptême solennel des catéchumènes ; c'est donc pourquoi on procède en ces deux jours à la bénédiction des fonts nécessaires pour toute l'année. Or, on conférait le Baptême de préférence le Samedi-Saint, parce que la Semaine-Sainte nous fait penser au mystère de notre Rédemption, et puis encore, parce que le saint temps de carême avait donné occasion de se préparer, par la prière et le jeûne, à une action si importante.
Enfin, le Baptême par immersion, tel qu'il se pratiquait autrefois, et qui consistait à plonger dans l'eau le catéchumène, est comme un symbole de la sépulture de Jésus-Christ, de même que la sortie du catéchumène de la fontaine baptismale nous rappelle sa glorieuse Résurrection. L'Apôtre des nations nous dit à ce sujet : « Ne savez-vous pas que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, nous avons été baptisés en sa mort ? En effet, nous avons été ensevelis avec lui par le Baptême, pour la mort du péché, afin que, comme Jésus-Christ est ressuscité d'entre les morts par la gloire de son Père, nous marchions aussi dans une vie nouvelle. » (Romains 6. 3.)
La fête de la Pentecôte, au contraire, avait été choisie pour le Baptême, soit qu'on la considérât comme la fin du temps pascal, soit parce que ce fut en ce jour que le Saint-Esprit descendit sur les Apôtres, les baptisant par le feu et allumant en eux une foi vive ; ensuite parce qu'après la descente du Saint-Esprit, à la première prédication de saint Pierre, il y eut un si grand nombre de personnes qui se firent baptiser. On peut dire du Saint-Esprit comme du Fils de Dieu : « Voilà que je fais toutes choses nouvelles » (Apocalypse 21. 5), ce qui s'applique surtout aux nouveaux baptisés qui sortent en hommes nouveaux du bain de la régénération. C'est une coutume usitée encore de nos jours dans plusieurs endroits du monde catholique, de faire baptiser en ce jour les enfants nés vers cette époque. On ajoute encore, d'après un usage très-ancien, dans toutes les messes qui se disent entre Pâques et la Pentecôte, une prière pour les nouveaux baptisés. Cette prière, qui se dit immédiatement avant la consécration, est celle-ci: «Ayez pour agréable, Seigneur, ce sacrifice que nous vous offrons en union avec toute votre sainte Église et dans l'humilité de nos cœurs pour ceux aussi que vous avez daigné régénérer par l'eau et le Saint-Esprit. »
Simon. Étaient-ce là les seuls jours auxquels le Baptême était conféré?
Le Curé. Oui, au moins dans les premiers siècles de l'Église; plus tard on y ajouta d'autres fêtes, telles que, celles de la Nativité, de saint Jean-Baptiste et autres. Dès les temps les plus reculés, on baptisait aussi le jour de l'Épiphanie, parce que les trois Mages avaient été les premiers infidèles appelés à la vraie foi. Ce jour était très-convenable pour cette solennité, parce qu'il exhortait ceux qui obtenaient la grâce du saint Baptême, à suivre comme les trois Rois l'étoile de la foi, pour lui soumettre leur intelligence et assujettir leur cœur à Dieu, par une vie chrétienne. Comme on rappelle aussi le jour des Rois le changement de l'eau en vin aux noces de Cana en Galilée et le premier miracle de Jésus, par lequel il inaugura sa vie publique, le nouveau baptisé y trouvait une indication de la connaissance de Jésus-Christ qu'il acquérait par le baptême. Enfin cette fête est encore destinée à perpétuer le souvenir du Baptême de notre Seigneur par saint Jean-Baptiste dans les eaux du Jourdain, et ce précieux anniversaire vous dit suffisamment que le jour n'aurait pu être mieux choisi pour la dispensation de ce sacrement aux novices du christianisme.
De là provient l'usage de bénir de l'eau, dans certains pays, qu'on appelle eau des Trois Rois, mais qui n'est pas la même que celle qu'on bénit le Samedi-Saint et la veille de la Pentecôte pour l'administration du Baptême. Ensuite, je ne dois pas oublier de vous faire remarquer que l'observation de ces jours n'avait lieu que pour le Baptême des adultes et de ceux dont la vie n'était pas en danger. D'ailleurs, au commencement de l'Église, il n'y avait guère que des adultes à baptiser parmi ceux qui quittaient le paganisme ou la croyance des Juifs pour embrasser le christianisme. Dans le cas d'une maladie dangereuse, et plus tard, lorsque l'usage se fut introduit de baptiser les enfants, on cessa de limiter le Baptême à ces jours ; il importait avant tout de le conférer aussitôt que possible et de ne pas laisser mourir avec la faute originelle. De nos jours pas moins qu'alors, ce serait assumer une bien grande responsabilité, si les parents négligeaient de faire baptiser leurs enfants le plus tôt possible.
Simon. Oui, effectivement, quelle immense responsabilité et quels reproches des parents si négligents doivent se faire!
Le Curé. Et des reproches d'autant plus fondés, que les parents tiennent envers leurs enfants la place de Dieu qui ne les leur a confiés, que pour qu'ils prennent soin de leur bien-être spirituel et temporel. Mais, mes bons amis, il se fait tard et pourtant je n'ose pas finir aujourd'hui, sans avoir épuisé la matière que je m'étais proposée. Hâtons-nous donc de dire un mot de la Messe du Samedi-Saint.
Simon. Cette messe est beaucoup plus joyeuse que celle des autres jours de la semaine ; on peut déjà le remarquer à l'autel qui est orné et n'offre plus la nudité du Vendredi- Saint.
Le Curé. Cette messe anticipée se célébrait autrefois la nuit de Pâques, un peu avant l'heure de la Résurrection du Sauveur. C'est donc pour la célébrer que l'on décore les autels, en signe de joie, et pour signifier la jubilation spirituelle qui doit nous animer au jour de la grande victoire de Jésus-Christ sur la mort. En outre, l'Église nous fait comprendre par-là que Jésus-Christ est ressuscité du tombeau avec un corps glorieux et transfiguré.
Simon. Alors on entend de nouveau les cloches!
Le Curé. Je vous ai dit déjà que les cloches symbolisent les Apôtres, dont la voix devait faire résonner l'Évangile dans toutes les parties du monde. Or, ceux-ci s'étaient cachés et ils étaient restés muets pendant la Passion du Sauveur par la crainte des Juifs ; mais par la Résurrection et l'apparition de Jésus-Christ, les disciples furent remplis de courage et de consolation et ils répandirent partout la nouvelle que leur maître était ressuscité. Voilà pourquoi les cloches qui les symbolisent se font entendre de nouveau. En général leur son exprime la joie du monde catholique, comme leur silence est un signe du deuil et de la tristesse que nous ressentons à cause de sa mort.
Simon. Le prêtre entonne aussi le Gloria in excelsis ?
Le Curé. Oui, en signe de joie, car c'est en ce moment que les cloches et l'orgue se font entendre de nouveau ainsi que les sonnettes qui avaient fait silence dans l'église ; tout semble participer à la joie que ressent l'Église de voir son Époux triomphant reprendre une vie nouvelle, éternelle, glorieuse, impassible. Les raisons particulières, pour lesquelles on chante en ce jour le Gloria sont :
1° Parce que la Résurrection de Jésus-Christ était comme une seconde naissance. Or, comme les anges ont chanté ce cantique de joie, lors de la première naissance du Seigneur sortant du sein de la sainte Vierge, ce cantique convient aussi parfaitement pour solenniser sa seconde naissance du sein du tombeau, sa Résurrection.
2° De même que les anges annoncèrent à Bethléem la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, de même aussi on annonçait aux nouveaux baptisés la paix avec Dieu, qu'ils acquéraient par la grâce sanctifiante que le Baptême leur conférait le Samedi-Saint. C'était comme une salutation que leur adressait toute l'Église.
3° Des anges avaient annoncé aux bergers Jésus naissant dans la crèche, ce sont encore de ces esprits célestes qui annoncent sa naissance glorieuse aux saintes femmes et par elles aux Apôtres; quel chant aurait donc pu remplacer ici le cantique angélique ?
Profitez donc des connaissances que vous avez acquises pour assister à ces offices, non-seulement avec plaisir, mais aussi avec grande dévotion et en vous rappelant le bienfait de la Rédemption. Et maintenant je prie Dieu de vous protéger pendant cette nuit. Soyez, pendant votre sommeil, comme ensevelis avec Jésus-Christ, afin que chaque fois votre réveil soit comme une résurrection à une vie meilleure. Chaque jour vous apportera ainsi un joyeux Alléluia, jusqu'à ce que vous puissiez le chanter un jour. éternellement avec les anges et les Saints dans le ciel. Loué soit J.-C. ! — A jamais.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
DEPUIS PÂQUES JUSQU’À L'ASCENSION.
Résumé : Souhaits de Pâques. Œufs et agneaux de Pâques. Signification de la Pâque chrétienne. Procession et autres particularités. Le Dimanche de Quasimodo. Procession de saint Marc. Les Rogations et autres processions supplicatoires en temps de calamités publiques. Les pèlerinages. Litanies de tous les saints. Étendards.
Le Curé. Comme nous allons parler aujourd'hui de la solennité de Pâques, je commencerai, tout comme on le fait en ce grand jour, par vous souhaiter à tous de bonnes Pâques ou un heureux Alléluia.
Simon. Nous vous en remercions, M. le curé, en formant le même souhait pour vous-même, et pour entrer de suite en matière, je vous prie de vouloir nous expliquer quelle est l'origine de ce souhait ou de ces félicitations que vous venez de nous adresser
Le Curé. Hé bien, on se félicite chaque fois qu'il arrive quelque événement joyeux ou heureux : or , peut-il s'en être passé de plus joyeux et de plus heureux à la fois, que l'accomplissement de notre rédemption et la résurrection du Rédempteur sortant glorieux du tombeau dans lequel ses ennemis l'avaient renfermé?
La résurrection de Jésus-Christ est en outre le gage que, nous aussi, nous ressusciterons un jour et voilà une des raisons que nous avons de nous féliciter mutuellement. Ainsi nous exprimons encore le vœu de célébrer cette fête avec une joie vive et cordiale; or, cela ne deviendra possible qu'en louant Dieu de toute notre âme à cause de ses miséricordes envers nous, en nous rendant dignes des grâces du Ressuscité et en menant une vie qui nous mette à même de penser avec joie et sans terreur à notre résurrection à venir. Ce qui, du reste, distingue encore ce jour d'une manière particulière, ce sont les présents que les chrétiens se font mutuellement.
Le petit Joseph. Oui, oui, les oeufs de Pâques.
Joyeuse Pâques - Allemagne
Le Curé. Et les agneaux de Pâques ! Un agneau portant un étendard, est un bien bel emblème de notre Sauveur, qui se laissa conduire sans dire mot, comme un agneau à la boucherie, mais c'est précisément par sa mort qu'il a remporté la victoire sur la mort et l'enfer en sortant victorieux du sépulcre; c'est ce que signifie l'étendard qu'il porte. L'œuf est également une image de la résurrection. Sa coque ressemble à la pierre scellée qui renferme le tombeau que le Seigneur perça, tout comme le poussin perce la coque de l'œuf, pour en sortir vivant.
Le Christ en agneau de Dieu avec l`Étendard victorieux de la Résurrection
Note : Aux premiers siècles de l'Église, dès l'aurore du grand jour de Pâques, tous les fidèles se rendaient à l`église Le prêtre entonnait le cantique de la Résurrection, puis il baisait l'image de Jésus-Christ ressuscité, il donnait ensuite le baiser de dilection au plus considérable de l'assemblée, qui le communiquait aux suivants, ainsi jusqu'au dernier des hommes. Les femmes en usaient de même entre elles. Celui qui donnait le baiser, disait : Jésus-Christ est ressuscité; celui qui le recevait, répondait : II est vraiment ressuscité. De l'église les embrassements passaient dans les rues, dans les champs, dans les maisons. Gardez-vous de voir là une vaine cérémonie : nos pères prenaient la religion au sérieux ; ils choisissaient d'ordinaire cette occasion pour se réconcilier publiquement, et recommencer la vie de paix et de charité qui doit distinguer les enfants de Celui qui a dit : On reconnaîtra que vous êtes mes disciples si vous vous aimez les uns les autres. Ce touchant usage existe encore en Pologne pendant les fêtes de Pâques. Un Polonais qui en rencontre un autre, lui dit : « Jésus-Christ est ressuscité,» et l'autre lui répond : « Oui, Jésus-Christ est vraiment ressuscité; » et ils s'embrassent dans la rue. Parmi nous, il se réduit au baiser de paix que se donnent entre eux, avant la communion, les ministres de l'autel. Catéchisme de Persévérance.
Simon. Tenez, qui aurait attribué aux œufs de Pâques une signification si chrétienne? Quant à moi, j'avais toujours regardé cet usage comme insignifiant.
Le Curé. Leur signification est toute chrétienne, il fut même en usage pendant plusieurs siècles de les bénir dans l'église, avant que les chrétiens ne se les donnassent mutuellement. Et, soit dit en passant, ce petit œuf nous dit bien des choses utiles dans son langage muet. Quoique nous n'apercevions que la coque dure et extérieure de l'œuf, nous sommes convaincus qu'il peut en sortir un être vivant; or, comment pourrions-nous
moins ajouter foi aux choses que Dieu nous a révélées, quoique nous ne puissions les voir des yeux de la chair?
Simon. Sans doute.
Le Curé. Et voilà pourtant ce que ferait aussi celui qui, par exemple, ne voudrait pas croire que Jésus-Christ est ressuscité ou que nous ressusciterons nous-mêmes un jour, pour la raison qu'il ne trouve dans le sépulcre qu'un cadavre ou même les cendres, la pourriture.
Simon. Vraiment, c'est tout-à-fait la même chose. Mais, M. le curé, nous voilà engagés dans l'explication des usages de Pâques avant de savoir ce que signifie ce nom de Pâques.
Le Curé. Le nom de Pâques vient de l'hébreu et signifie passage. Il faut savoir que les Juifs célébraient en ce jour la mémoire de leur délivrance du joug des Égyptiens et de leur passage de la mer Rouge. L'ange du Seigneur passe durant la nuit et frappe de mort tous les premiers-nés des maisons sur lesquelles il ne voit pas le sang de l'Agneau pascal dont, selon l'ordre de Dieu, les Israélites devaient marquer leurs portes. Outre ce passage de l'ange et ce passage de la mer Rouge, il s'en est opéré pour nous un autre, dont ces premiers n'étaient que la figure. Jésus-Christ, notre Seigneur et notre Rédempteur, nous a délivrés du péché par l'effusion de son sang, et nous a fait passer, par cette mer rouge de son sang précieux, de la servitude du démon à l'héritage céleste. Nos âmes, régénérées par la réception de la communion pascale, ont été marquées d'une manière invisible du sang de l'Agneau divin, de sorte que le prince de l'enfer n'a plus de puissance contre nous. Telle est aussi la raison pour laquelle nous nous servons encore du mot hébreu de Pâques pour désigner ce grand jour.
La traversée de la mer rouge par Moise et le peuple Hébreux
Simon. D'autres fêtes se célèbrent à un jour fixe tous les ans, comme par exemple la Noël, le 25 décembre. D'où vient-il que Pâques tombe toujours tantôt plus tôt, tantôt plus tard dans l'année ?
Le Curé. Le jour de la solennité de Pâques se règle d'après le cours de la lune, qui diffère également d'une année à l'autre sans coïncider avec les jours du mois. Toutefois la fête de Pâques se célèbre toujours un dimanche, parce que Jésus-Christ est réellement ressuscité à pareil jour. Comme Dieu acheva l'œuvre de la création au sixième jour en créant l'homme, de même aussi il compléta la seconde création, la rédemption de l'homme, par sa mort le sixième jour de la semaine, qui est le vendredi; et de même qu'il se
reposa le septième, de même encore il reposa au tombeau après avoir achevé l`œuvre de notre Rédemption. Mais le dimanche ou le premier jour de la semaine, après être donc demeuré enseveli pendant trois jours, c'est-à-dire depuis la soirée du vendredi jusqu'au dimanche matin, il sort glorieux du sépulcre. — La fête de Pâques une fois connue, il est alors facile de trouver le jour auquel tombent les autres fêtes que nous appelons ordinairement fêtes mobiles. C'est ainsi que l'Ascension se célèbre toujours quarante jours, la Pentecôte cinquante jours après Pâques, etc.
Simon. Pourquoi le mot Alléluia se répète-t-il si souvent dans les offices du temps pascal ?
Le Curé. Ce mot vient de l'hébreu et se retrouve souvent dans les psaumes. Sa signification est : louez le Seigneur ou bien louanges à Dieu. La répétition fréquente de ce mot nous remémore le devoir qui nous incombe de rendre des actions de grâces continuelles à Jésus-Christ, notre Rédempteur, à cause du grand bienfait de sa résurrection. Saint Augustin nous cite encore une autre raison, qui est très-belle, en disant : « Par le temps pascal est signifiée la vie éternelle et bienheureuse du ciel, où nous louerons Dieu sans En en union avec les Saints; mais le temps qui précède Pâques ou le carême, représente notre vie mortelle, qui est une vie de douleurs, pendant laquelle nous avons à combattre les mauvaises passions, à pleurer nos péchés et à soupirer après notre céleste Patrie. Ici-bas nous ne pouvons qu'espérer la vue de Dieu, sans pouvoir encore en devenir participants». C'est pourquoi, continue ce même Père de l'Église, l'exclamation Alléluia convient au temps pascal et non au triste temps de carême. — Dans le reste de l'année, on répète encore souvent le mot Alléluia, quoique moins fréquemment, et surtout les dimanches, parce que le dimanche doit nous faire souvenir du jour de la résurrection du Sauveur.
Hymne de Pâques
Simon. On ne chante pas non plus, les dimanches du temps pascal, l'Asperges me avant la messe, mais Vidi aquam, avant de faire l'aspersion de l'eau bénite : pourquoi cela?
Le Curé. Outre cette aspersion de l'eau, dont je vous parlerai tantôt, on fait encore avant la messe la procession pascale qui a pour but de représenter les Apôtres et les disciples allant de Jérusalem en Galilée, où Jésus avait dit aux saintes femmes qu'il les précéderait.
Note: Les Évangiles des dimanches après Pâques nous rappellent, par leur contenu , les principaux fruits de la Résurrection du Sauveur. Le 1er rapporte l'institution du Sacrement de la Pénitence, le second nous représente dans le bon Pasteur, la sollicitude de Jésus-Christ pour le salut des fidèles et la propagation de la foi chrétienne; le 3 eme fait entrevoir aux enfants de son Eglise les persécutions souffertes en son nom récompensées par une vie sans fin; le 4 eme promet, dans le Saint-Esprit, un Maître, un Consolateur, un Sanctificateur ; le 5 eme assure l'efficacité à nos prières faites au nom de Jésus et le 6 eme prédit l'éternelle durée de l'Eglise, avec laquelle le Saint-Esprit demeurera jusqu'à la consommation des siècles.
Il vous faut savoir, d'abord, mes amis, que le chant qui commence par ces premières paroles, est tiré d'un psaume de la Pénitence et signifie : « Arrosez-moi avec l'hyssope, Seigneur , et je serai purifié ; lavez-moi et je deviendrai plus blanc que la neige. » On chante ensuite : « Ayez pitié de moi,, ô mon Dieu, selon votre grande miséricorde. Gloire soit au Père, etc.» Nous prions Dieu, par ces paroles, de vouloir nous pardonner nos péchés et user de miséricorde envers nous. Mais pendant le temps pascal, l'Église se sert de prières qui sont tirées en partie du prophète Ézéchiel (ch. 17), et en partie du psaume 117 et qui veulent dire : « J'ai vu une eau qui sortait du côté droit du temple, Alléluia, et tous ceux que cette eau a arrosés, ont été sauvés, et ils chanteront les louanges de Dieu. Louez le Seigneur, car il est bon, car sa miséricorde est éternelle. Gloire soit au Père, etc. »
Çe chant a pour but de nous rappeler l'eau du saint Baptême, par laquelle nous avons été purifiés du péché et nous remercions Dieu de cette grâce, dont nous sommes redevables à son infinie miséricorde. Voyez, il n'y a que quelques jours que nous nous rappelions encore la mort du Christ et ce torrent de sang et d'eau qui coula de son côté sacré en symbolisant si bien le sacrement de Baptême et celui de l'autel. Car la circonstance du Baptême des Néophytes à cette époque nous fait souvenir du jour auquel, nous aussi, nous avons été purifiés du péché et sanctifiés par le bain de régénération. Ajoutez à cela que la confession et la communion pascales ont eu lieu vers cette époque, et par conséquent aussi une nouvelle sanctification de notre âme, pour laquelle nous rendons grâces à Dieu.
Simon. Il n'y a probablement plus rien à observer concernant la fête de Pâques.
Le Curé. Il y a encore quelques particularités propres à ce saint temps, dont vous avez très-bien pu ne pas vous apercevoir; j'en dirai quelques mots ;
1 . Cette fête, comme en général toutes les grandes fêtes célébrées par l'Église, a son octave, c'est-à-dire qu'on la prolonge pendant huit jours. Ce prolongement a pour but de nous donner l'occasion de nous occuper d'autant plus souvent, avec d'autant plus de zèle, de la méditation du mystère qu'on célèbre.
2, Les offices sont plus courts qu'à l'ordinaire, pendant cette octave, à cause de l'occupation que donnaient autrefois les catéchumènes et du temps qu'il fallait à les instruire. Un autre privilège qui distingue le temps pascal, est l`exemption de la loi du jeûne, même à l'égard des religieux et des pénitents. Ces jours étant consacrés à l'allégresse et aux actions de grâces, l'Église n'a pas voulu qu'on alliât les pratiques de la douleur et de la pénitence aux accents de la joie et aux louanges du Seigneur.
3. Là où l'on observe exactement toutes les règles de l'Église, par exemple dans un chœur composé de prêtres qui les connaissent à fond, toutes les prières se font debout, et pas à genoux, pour remémorer ainsi la résurrection. Cet usage doit nous rappeler encore que nous sommes ressuscités spirituellement avec Jésus-Christ à une vie nouvelle, devenant en lui des hommes nouveaux par la réception des saints Sacrements, et que, par conséquent, nous devons persévérer dans la sainteté, restant fidèles au bon propos de nous amender et d'éviter tous les dangers, toutes les occasions, qui auparavant nous entraînaient au péché, ayant sans cesse devant les yeux ces paroles de l'Apôtre : Que celui qui est debout prenne garde de tomber. (1 Corinthiens 10. 12). Il est donc convenable que nous éloignions en ces jours notre cœur de tout attachement aux vanités de ce monde, afin de ne plus désirer que les choses du ciel. Après être sortis du tombeau avec Jésus Christ, nous dit encore l'Apôtre, cherchez ce qui est du ciel et plus ce qui est de la terre. (Colossiens 3. 1). Élevez donc vos cœurs vers Dieu, pensez que vous n'avez pas été créés pour le monde, mais pour le ciel et pour l'éternité.
Simon. Monsieur le curé nous dira maintenant pourquoi le premier dimanche après Pâques porte le nom de Pâque close! Est-ce peut-être le dernier jour de ce qu'on appelle le temps pascal?
Le Curé. Le temps pascal, proprement dit, dure cinquante jours, et se termine seulement à la Pentecôte. Pâque close signifie tout simplement la clôture ou le dernier jour de la grande octave de Pâques: on nomme ce jour dimanche de Quasimodo, parce que l'Introït de la messe commence par ce mot. Comme autrefois toute la semaine de Pâques était une fête continuelle, les Néophytes baptisés le Samedi-Saint, portaient leurs vêtements blancs jusqu'au dimanche de Quasimodo et les déposaient seulement en ce jour, qui fut appelé pour cela : Dominica in Albis depositis, dimanche où l'on quitte les habits blancs.
La Fête de Saint Marc – 25 Avril
Monsieur le curé, comme la fête de saint Marc tombe ordinairement vers cette époque, seriez-vous assez bon pour nous expliquer ce que signifie la procession que l'on fait en ce jour.
Le Curé. C'est le saint pape Grégoire qui a, dit-on, établi cette procession en de l`an 590. En novembre 389, le Tibre avait débordé d'une manière effrayante et, en se retirant, il avait laissé dans les campagnes une telle infection, que celui qui seulement éternuait ou bâillait, était atteint de la peste et mourait à l'instant. En moins d'une heure, plus de quatre-vingts personnes tombaient et mouraient frappées de cette horrible maladie. Le pape Pelage II venait d'être emporté par le même fléau, et son successeur, saint Grégoire-le-Grand, comprit qu'il fallait apaiser la colère de Dieu par des supplications et des jeûnes extraordinaires et exhorter le peuple à la pénitence. Nous avons encore un sermon que ce saint Pontife prononça à cette occasion et dans lequel nous lisons les paroles suivantes : « Mes très-chers frères, dit-il en commençant, la solennité annuelle que nous célébrons et qu'on appelle généralement la Grande Litanie, nous dit assez que nous devons la faire avec attention et piété. Nous devons conjurer la divine miséricorde qu'elle daigne nous purifier de nos péchés. Il convient aussi de prendre à cœur les grandes et nombreuses calamités qui nous ont assaillis à cause de nos prévarications, pour que la bonté de Dieu daigne nous en délivrer. Remercions-le aussi, en assistant au saint Sacrifice, des bienfaits ancien et nouveaux qu'elle nous a accordés.» — Je dois vous dire encore que la foi du saint Pontife fut récompensée par la cessation instantanée de la contagion.
Saint-Marc l`Évangéliste
Les Rogations – pour bénir les récoltes et les agriculteurs
Simon. Nous avons encore les mêmes processions, les trois jours qui précèdent la fête de l'Ascension et que nous appelons les Rogations.
Le Curé. Oui, et ces processions qui portaient le nom de petites litanies (supplications), datent de la plus haute antiquité. Un écrivain ecclésiastique nous rapporte ce qui suit : Le Dauphiné et la Savoie étaient affligés, depuis longtemps, de grandes calamités publiques qui avaient répandu la désolation dans ces contrées. Les tremblements de terre y étaient à peu près journaliers, les incendies n'avaient Jamais été si nombreux, les bêtes féroces quittaient leurs antres et les bois, et menaçaient la sécurité. La nuit de Pâques de l`an 469, pendant que tout le peuple de Vienne (commune du Sud de la France) était réuni à l'église, avec saint Mamert, son évêque, le feu prit dans la ville. Tout le monde quitta l'église, afin de pourvoir à la sûreté de leur demeure, laissant l'Évêque seul au pied de l'autel. Le saint homme offre à Dieu ses prières et ses larmes, lui demandant de vouloir porter remède aux maux qui empêchaient son peuple de le servir avec la fidélité qui lui était due.
Procession des Rogations dans les campagnes
Le grand embrasement s'arrête soudain ; le peuple reconnaissant se retrouve à l'église, où saint Mamert lui annonce que, pendant l'alarme générale, il avait voué à Dieu le rétablissement des anciennes Rogations, qui avaient déjà existé avant son temps, mais que l'on n'avait plus tenues que rarement et avec tiédeur. Tout le monde applaudit à la pieuse pensée de l'Évêque, et les trois jours qui précèdent l'Ascension, furent choisis pour s'acquitter du vœu. On établit ces processions pour éloigner la punition divine, et demander miséricorde en y joignant la prière et le jeûne.
Cet exemple fut suivi par les autres Évêques des Gaules ou ancienne France, et nous voyons, déjà en l`an 511, qu'un concile tenu à Orléans ordonne les Rogations, comme devant se faire annuellement. Car si même les maux qui avaient occasionné ces pieuses manifestations, n'existaient plus, depuis que la Justice divine avait été pacifiée d'une manière si miraculeuse, les raisons de les continuer ne pouvaient pas manquer, puisque, dans tous les temps, nous avons des supplications à adresser à Dieu. De nos jours, c'est principalement pour les fruits de la terre que nous faisons la procession, afin que Dieu les bénisse, et comme ces jours tombent au printemps, c'est-à-dire, à l'époque décisive pour les moissons , ils sont donc très-bien choisis pour cette pratique du culte. Ensuite la fête de l'Ascension, qui suit immédiatement, nous exhorte à son tour à la prière : car ce jour de fête nous rappelle que le Sauveur est retourné au ciel, afin de devenir notre avocat et notre médiateur auprès de son Père céleste : c'est donc un motif de confiance. Voilà pourquoi, mes amis, on a choisi ces jours pour les Rogations, qui devinrent bientôt générales dans toute l'Église. C'est ainsi qu'un concile, tenu en l`an 813, dans la ville de Mayence, décréta que tous les chrétiens devraient accompagner la procession en ces trois jours, et y comparaître tous, sans autre exception que les malades, à pieds nus et revêtus des habits de pénitence.
Les processions
Le Curé. Les processions en général sont très-anciennes, et Tertullien, auteur ecclésiastique, qui vécut jusqu'à l'an 320 de notre ère, en parle déjà. Il est vrai qu'elles ne pouvaient encore être bien solennelles pendant les temps de persécution, quoique toutefois nous en trouvions qui furent publiques, même sous le règne du sanguinaire empereur romain Domitien (empereur de l`an 81 a 96 ap J.C.). Il s'en fit une entre autres, en 220, à l'occasion de la translation, de Tarse à Rome, des reliques de saint Boniface, qui avait été immolé pour la foi. Un grand nombre d'ecclésiastiques et d'autres fidèles allèrent publiquement à la rencontre de ce saint corps, en chantant des cantiques. C'était là, si vous le voulez, un convoi d'honneur pour vénérer le saint martyr, mais, dans le fond, ce n'était autre chose qu'une procession. Naturellement il fut plus facile de faire de semblables manifestations après que la paix eut été rendue à l'Église, et, pour la même raison, elles devinrent par conséquent aussi plus fréquentes. Pour ne citer qu'un exemple, saint Chrysostôme parle de processions, de véritables Rogations, qui se faisaient déjà de son temps, pour obtenir de Dieu la cessation de pluies.
Le Curé. Nous nous rendons ainsi d'un endroit à l'autre pour les mêmes raisons, bien louables sans doute, que celles dont je vous ai déjà entretenu concernant les processions. Nous voudrions adresser en commun nos prières au Tout-Puissant, afin de les rendre plus fortes et pouvoir compter d'autant plus sur leur efficacité. De même donc que les membres d'une paroisse se réunissent, vous voyez dans ce cas deux paroisses qui se réunissent et s'excitent mutuellement à la prière. Les différentes paroisses donnent encore par ce moyen un témoignage de leur foi et se montrent mutuellement comme catholiques. Cette action terminée, il est naturel qu'on prenne quelque repas, et pour la bonne raison que ces bonnes gens ont aussi un corps à soigner et que la fatigue de la marche les a épuisées en excitant leur appétit. Il faut donc prendre de la nourriture, et que peut-on y trouver de mauvais? Notre-Seigneur a mangé lui-même à Cana, il a rassasié dans le désert un grand nombre d'hommes accourus pour l'écouter.
Simon. Pourquoi porte-t-on la croix et les bannières ou étendards dans les processions ?
Le Curé. Voici les raisons pour lesquelles on porte la croix. C'est 1° pour indiquer que, dans les processions, nous sommes réunis au nom de Jésus crucifié; 2° que nous voulons commencer et accomplir toutes nos pratiques de dévotion au nom de Jésus-Christ, selon l'exhortation de saint Paul : Quoi que vous fassiez, faites tout au nom de Jésus ; 3° pour confesser que Jésus crucifié est notre chef; 4° que nous obtenons toutes les grâces de Dieu le Père par les mérites infinis du sang précieux du Sauveur au nom duquel nous prions , nous conformant à ces paroles du divin Maître : « Toutes les fois que vous demanderez à mon Père quelque chose en mon nom, il vous le donnera » (Jean 16. 23).
Pour ce qui concerne les étendards, je vous en dirai aussi quelques mots. Vous savez que l'Église se compose de trois ordres distincts selon les âmes qui en font partie : l'Église triomphante, composée des Saints qui jouissent de la gloire du ciel ; l`Église militante, composée des hommes qui combattent encore sur la terre et à laquelle nous avons le bonheur d'appartenir, et enfin l'Église souffrante, à laquelle appartiennent les âmes du Purgatoire.
Les étendards n'ont donc d'autre but que de signifier que, semblables aux soldats réunis autour de leur drapeau, nous voulons nous rassembler sous l'étendard de Jésus-Christ, afin de combattre pour la gloire de Dieu et le salut de notre âme les ennemis visibles et invisibles. Les étendards représentent encore le triomphe et la victoire du Sauveur, au jour de sa résurrection, remportée sur le péché, le démon et ses ennemis. Ils rappellent en même temps victoire solennelle remportée par notre foi au moyen de la sueur et des travaux des Apôtres, celle du sang des martyrs, sur l'idolâtrie des païens, la rage des tyrans qui persécutaient l'Église, ainsi que sur les erreurs et les hérésies. De même qu'une armée victorieuse déploie fièrement ses drapeaux, de même aussi nous portons l'étendard de la croix publiquement et à la vue de tous; devant l'impiété et l'erreur, et paraissant dire avec saint Jean : « Notre foi, c'est la victoire qui a vaincu le monde ! »
Résumé : Souhaits de Pâques. Œufs et agneaux de Pâques. Signification de la Pâque chrétienne. Procession et autres particularités. Le Dimanche de Quasimodo. Procession de saint Marc. Les Rogations et autres processions supplicatoires en temps de calamités publiques. Les pèlerinages. Litanies de tous les saints. Étendards.
Le Curé. Comme nous allons parler aujourd'hui de la solennité de Pâques, je commencerai, tout comme on le fait en ce grand jour, par vous souhaiter à tous de bonnes Pâques ou un heureux Alléluia.
Simon. Nous vous en remercions, M. le curé, en formant le même souhait pour vous-même, et pour entrer de suite en matière, je vous prie de vouloir nous expliquer quelle est l'origine de ce souhait ou de ces félicitations que vous venez de nous adresser
Le Curé. Hé bien, on se félicite chaque fois qu'il arrive quelque événement joyeux ou heureux : or , peut-il s'en être passé de plus joyeux et de plus heureux à la fois, que l'accomplissement de notre rédemption et la résurrection du Rédempteur sortant glorieux du tombeau dans lequel ses ennemis l'avaient renfermé?
La résurrection de Jésus-Christ est en outre le gage que, nous aussi, nous ressusciterons un jour et voilà une des raisons que nous avons de nous féliciter mutuellement. Ainsi nous exprimons encore le vœu de célébrer cette fête avec une joie vive et cordiale; or, cela ne deviendra possible qu'en louant Dieu de toute notre âme à cause de ses miséricordes envers nous, en nous rendant dignes des grâces du Ressuscité et en menant une vie qui nous mette à même de penser avec joie et sans terreur à notre résurrection à venir. Ce qui, du reste, distingue encore ce jour d'une manière particulière, ce sont les présents que les chrétiens se font mutuellement.
Le petit Joseph. Oui, oui, les oeufs de Pâques.
Joyeuse Pâques - Allemagne
Le Curé. Et les agneaux de Pâques ! Un agneau portant un étendard, est un bien bel emblème de notre Sauveur, qui se laissa conduire sans dire mot, comme un agneau à la boucherie, mais c'est précisément par sa mort qu'il a remporté la victoire sur la mort et l'enfer en sortant victorieux du sépulcre; c'est ce que signifie l'étendard qu'il porte. L'œuf est également une image de la résurrection. Sa coque ressemble à la pierre scellée qui renferme le tombeau que le Seigneur perça, tout comme le poussin perce la coque de l'œuf, pour en sortir vivant.
Le Christ en agneau de Dieu avec l`Étendard victorieux de la Résurrection
Note : Aux premiers siècles de l'Église, dès l'aurore du grand jour de Pâques, tous les fidèles se rendaient à l`église Le prêtre entonnait le cantique de la Résurrection, puis il baisait l'image de Jésus-Christ ressuscité, il donnait ensuite le baiser de dilection au plus considérable de l'assemblée, qui le communiquait aux suivants, ainsi jusqu'au dernier des hommes. Les femmes en usaient de même entre elles. Celui qui donnait le baiser, disait : Jésus-Christ est ressuscité; celui qui le recevait, répondait : II est vraiment ressuscité. De l'église les embrassements passaient dans les rues, dans les champs, dans les maisons. Gardez-vous de voir là une vaine cérémonie : nos pères prenaient la religion au sérieux ; ils choisissaient d'ordinaire cette occasion pour se réconcilier publiquement, et recommencer la vie de paix et de charité qui doit distinguer les enfants de Celui qui a dit : On reconnaîtra que vous êtes mes disciples si vous vous aimez les uns les autres. Ce touchant usage existe encore en Pologne pendant les fêtes de Pâques. Un Polonais qui en rencontre un autre, lui dit : « Jésus-Christ est ressuscité,» et l'autre lui répond : « Oui, Jésus-Christ est vraiment ressuscité; » et ils s'embrassent dans la rue. Parmi nous, il se réduit au baiser de paix que se donnent entre eux, avant la communion, les ministres de l'autel. Catéchisme de Persévérance.
Simon. Tenez, qui aurait attribué aux œufs de Pâques une signification si chrétienne? Quant à moi, j'avais toujours regardé cet usage comme insignifiant.
Le Curé. Leur signification est toute chrétienne, il fut même en usage pendant plusieurs siècles de les bénir dans l'église, avant que les chrétiens ne se les donnassent mutuellement. Et, soit dit en passant, ce petit œuf nous dit bien des choses utiles dans son langage muet. Quoique nous n'apercevions que la coque dure et extérieure de l'œuf, nous sommes convaincus qu'il peut en sortir un être vivant; or, comment pourrions-nous
moins ajouter foi aux choses que Dieu nous a révélées, quoique nous ne puissions les voir des yeux de la chair?
Simon. Sans doute.
Le Curé. Et voilà pourtant ce que ferait aussi celui qui, par exemple, ne voudrait pas croire que Jésus-Christ est ressuscité ou que nous ressusciterons nous-mêmes un jour, pour la raison qu'il ne trouve dans le sépulcre qu'un cadavre ou même les cendres, la pourriture.
Simon. Vraiment, c'est tout-à-fait la même chose. Mais, M. le curé, nous voilà engagés dans l'explication des usages de Pâques avant de savoir ce que signifie ce nom de Pâques.
Le Curé. Le nom de Pâques vient de l'hébreu et signifie passage. Il faut savoir que les Juifs célébraient en ce jour la mémoire de leur délivrance du joug des Égyptiens et de leur passage de la mer Rouge. L'ange du Seigneur passe durant la nuit et frappe de mort tous les premiers-nés des maisons sur lesquelles il ne voit pas le sang de l'Agneau pascal dont, selon l'ordre de Dieu, les Israélites devaient marquer leurs portes. Outre ce passage de l'ange et ce passage de la mer Rouge, il s'en est opéré pour nous un autre, dont ces premiers n'étaient que la figure. Jésus-Christ, notre Seigneur et notre Rédempteur, nous a délivrés du péché par l'effusion de son sang, et nous a fait passer, par cette mer rouge de son sang précieux, de la servitude du démon à l'héritage céleste. Nos âmes, régénérées par la réception de la communion pascale, ont été marquées d'une manière invisible du sang de l'Agneau divin, de sorte que le prince de l'enfer n'a plus de puissance contre nous. Telle est aussi la raison pour laquelle nous nous servons encore du mot hébreu de Pâques pour désigner ce grand jour.
La traversée de la mer rouge par Moise et le peuple Hébreux
Simon. D'autres fêtes se célèbrent à un jour fixe tous les ans, comme par exemple la Noël, le 25 décembre. D'où vient-il que Pâques tombe toujours tantôt plus tôt, tantôt plus tard dans l'année ?
Le Curé. Le jour de la solennité de Pâques se règle d'après le cours de la lune, qui diffère également d'une année à l'autre sans coïncider avec les jours du mois. Toutefois la fête de Pâques se célèbre toujours un dimanche, parce que Jésus-Christ est réellement ressuscité à pareil jour. Comme Dieu acheva l'œuvre de la création au sixième jour en créant l'homme, de même aussi il compléta la seconde création, la rédemption de l'homme, par sa mort le sixième jour de la semaine, qui est le vendredi; et de même qu'il se
reposa le septième, de même encore il reposa au tombeau après avoir achevé l`œuvre de notre Rédemption. Mais le dimanche ou le premier jour de la semaine, après être donc demeuré enseveli pendant trois jours, c'est-à-dire depuis la soirée du vendredi jusqu'au dimanche matin, il sort glorieux du sépulcre. — La fête de Pâques une fois connue, il est alors facile de trouver le jour auquel tombent les autres fêtes que nous appelons ordinairement fêtes mobiles. C'est ainsi que l'Ascension se célèbre toujours quarante jours, la Pentecôte cinquante jours après Pâques, etc.
Simon. Pourquoi le mot Alléluia se répète-t-il si souvent dans les offices du temps pascal ?
Le Curé. Ce mot vient de l'hébreu et se retrouve souvent dans les psaumes. Sa signification est : louez le Seigneur ou bien louanges à Dieu. La répétition fréquente de ce mot nous remémore le devoir qui nous incombe de rendre des actions de grâces continuelles à Jésus-Christ, notre Rédempteur, à cause du grand bienfait de sa résurrection. Saint Augustin nous cite encore une autre raison, qui est très-belle, en disant : « Par le temps pascal est signifiée la vie éternelle et bienheureuse du ciel, où nous louerons Dieu sans En en union avec les Saints; mais le temps qui précède Pâques ou le carême, représente notre vie mortelle, qui est une vie de douleurs, pendant laquelle nous avons à combattre les mauvaises passions, à pleurer nos péchés et à soupirer après notre céleste Patrie. Ici-bas nous ne pouvons qu'espérer la vue de Dieu, sans pouvoir encore en devenir participants». C'est pourquoi, continue ce même Père de l'Église, l'exclamation Alléluia convient au temps pascal et non au triste temps de carême. — Dans le reste de l'année, on répète encore souvent le mot Alléluia, quoique moins fréquemment, et surtout les dimanches, parce que le dimanche doit nous faire souvenir du jour de la résurrection du Sauveur.
Hymne de Pâques
Simon. On ne chante pas non plus, les dimanches du temps pascal, l'Asperges me avant la messe, mais Vidi aquam, avant de faire l'aspersion de l'eau bénite : pourquoi cela?
Le Curé. Outre cette aspersion de l'eau, dont je vous parlerai tantôt, on fait encore avant la messe la procession pascale qui a pour but de représenter les Apôtres et les disciples allant de Jérusalem en Galilée, où Jésus avait dit aux saintes femmes qu'il les précéderait.
Note: Les Évangiles des dimanches après Pâques nous rappellent, par leur contenu , les principaux fruits de la Résurrection du Sauveur. Le 1er rapporte l'institution du Sacrement de la Pénitence, le second nous représente dans le bon Pasteur, la sollicitude de Jésus-Christ pour le salut des fidèles et la propagation de la foi chrétienne; le 3 eme fait entrevoir aux enfants de son Eglise les persécutions souffertes en son nom récompensées par une vie sans fin; le 4 eme promet, dans le Saint-Esprit, un Maître, un Consolateur, un Sanctificateur ; le 5 eme assure l'efficacité à nos prières faites au nom de Jésus et le 6 eme prédit l'éternelle durée de l'Eglise, avec laquelle le Saint-Esprit demeurera jusqu'à la consommation des siècles.
Il vous faut savoir, d'abord, mes amis, que le chant qui commence par ces premières paroles, est tiré d'un psaume de la Pénitence et signifie : « Arrosez-moi avec l'hyssope, Seigneur , et je serai purifié ; lavez-moi et je deviendrai plus blanc que la neige. » On chante ensuite : « Ayez pitié de moi,, ô mon Dieu, selon votre grande miséricorde. Gloire soit au Père, etc.» Nous prions Dieu, par ces paroles, de vouloir nous pardonner nos péchés et user de miséricorde envers nous. Mais pendant le temps pascal, l'Église se sert de prières qui sont tirées en partie du prophète Ézéchiel (ch. 17), et en partie du psaume 117 et qui veulent dire : « J'ai vu une eau qui sortait du côté droit du temple, Alléluia, et tous ceux que cette eau a arrosés, ont été sauvés, et ils chanteront les louanges de Dieu. Louez le Seigneur, car il est bon, car sa miséricorde est éternelle. Gloire soit au Père, etc. »
Çe chant a pour but de nous rappeler l'eau du saint Baptême, par laquelle nous avons été purifiés du péché et nous remercions Dieu de cette grâce, dont nous sommes redevables à son infinie miséricorde. Voyez, il n'y a que quelques jours que nous nous rappelions encore la mort du Christ et ce torrent de sang et d'eau qui coula de son côté sacré en symbolisant si bien le sacrement de Baptême et celui de l'autel. Car la circonstance du Baptême des Néophytes à cette époque nous fait souvenir du jour auquel, nous aussi, nous avons été purifiés du péché et sanctifiés par le bain de régénération. Ajoutez à cela que la confession et la communion pascales ont eu lieu vers cette époque, et par conséquent aussi une nouvelle sanctification de notre âme, pour laquelle nous rendons grâces à Dieu.
Simon. Il n'y a probablement plus rien à observer concernant la fête de Pâques.
Le Curé. Il y a encore quelques particularités propres à ce saint temps, dont vous avez très-bien pu ne pas vous apercevoir; j'en dirai quelques mots ;
1 . Cette fête, comme en général toutes les grandes fêtes célébrées par l'Église, a son octave, c'est-à-dire qu'on la prolonge pendant huit jours. Ce prolongement a pour but de nous donner l'occasion de nous occuper d'autant plus souvent, avec d'autant plus de zèle, de la méditation du mystère qu'on célèbre.
2, Les offices sont plus courts qu'à l'ordinaire, pendant cette octave, à cause de l'occupation que donnaient autrefois les catéchumènes et du temps qu'il fallait à les instruire. Un autre privilège qui distingue le temps pascal, est l`exemption de la loi du jeûne, même à l'égard des religieux et des pénitents. Ces jours étant consacrés à l'allégresse et aux actions de grâces, l'Église n'a pas voulu qu'on alliât les pratiques de la douleur et de la pénitence aux accents de la joie et aux louanges du Seigneur.
3. Là où l'on observe exactement toutes les règles de l'Église, par exemple dans un chœur composé de prêtres qui les connaissent à fond, toutes les prières se font debout, et pas à genoux, pour remémorer ainsi la résurrection. Cet usage doit nous rappeler encore que nous sommes ressuscités spirituellement avec Jésus-Christ à une vie nouvelle, devenant en lui des hommes nouveaux par la réception des saints Sacrements, et que, par conséquent, nous devons persévérer dans la sainteté, restant fidèles au bon propos de nous amender et d'éviter tous les dangers, toutes les occasions, qui auparavant nous entraînaient au péché, ayant sans cesse devant les yeux ces paroles de l'Apôtre : Que celui qui est debout prenne garde de tomber. (1 Corinthiens 10. 12). Il est donc convenable que nous éloignions en ces jours notre cœur de tout attachement aux vanités de ce monde, afin de ne plus désirer que les choses du ciel. Après être sortis du tombeau avec Jésus Christ, nous dit encore l'Apôtre, cherchez ce qui est du ciel et plus ce qui est de la terre. (Colossiens 3. 1). Élevez donc vos cœurs vers Dieu, pensez que vous n'avez pas été créés pour le monde, mais pour le ciel et pour l'éternité.
Simon. Monsieur le curé nous dira maintenant pourquoi le premier dimanche après Pâques porte le nom de Pâque close! Est-ce peut-être le dernier jour de ce qu'on appelle le temps pascal?
Le Curé. Le temps pascal, proprement dit, dure cinquante jours, et se termine seulement à la Pentecôte. Pâque close signifie tout simplement la clôture ou le dernier jour de la grande octave de Pâques: on nomme ce jour dimanche de Quasimodo, parce que l'Introït de la messe commence par ce mot. Comme autrefois toute la semaine de Pâques était une fête continuelle, les Néophytes baptisés le Samedi-Saint, portaient leurs vêtements blancs jusqu'au dimanche de Quasimodo et les déposaient seulement en ce jour, qui fut appelé pour cela : Dominica in Albis depositis, dimanche où l'on quitte les habits blancs.
La Fête de Saint Marc – 25 Avril
Monsieur le curé, comme la fête de saint Marc tombe ordinairement vers cette époque, seriez-vous assez bon pour nous expliquer ce que signifie la procession que l'on fait en ce jour.
Le Curé. C'est le saint pape Grégoire qui a, dit-on, établi cette procession en de l`an 590. En novembre 389, le Tibre avait débordé d'une manière effrayante et, en se retirant, il avait laissé dans les campagnes une telle infection, que celui qui seulement éternuait ou bâillait, était atteint de la peste et mourait à l'instant. En moins d'une heure, plus de quatre-vingts personnes tombaient et mouraient frappées de cette horrible maladie. Le pape Pelage II venait d'être emporté par le même fléau, et son successeur, saint Grégoire-le-Grand, comprit qu'il fallait apaiser la colère de Dieu par des supplications et des jeûnes extraordinaires et exhorter le peuple à la pénitence. Nous avons encore un sermon que ce saint Pontife prononça à cette occasion et dans lequel nous lisons les paroles suivantes : « Mes très-chers frères, dit-il en commençant, la solennité annuelle que nous célébrons et qu'on appelle généralement la Grande Litanie, nous dit assez que nous devons la faire avec attention et piété. Nous devons conjurer la divine miséricorde qu'elle daigne nous purifier de nos péchés. Il convient aussi de prendre à cœur les grandes et nombreuses calamités qui nous ont assaillis à cause de nos prévarications, pour que la bonté de Dieu daigne nous en délivrer. Remercions-le aussi, en assistant au saint Sacrifice, des bienfaits ancien et nouveaux qu'elle nous a accordés.» — Je dois vous dire encore que la foi du saint Pontife fut récompensée par la cessation instantanée de la contagion.
Saint-Marc l`Évangéliste
Les Rogations – pour bénir les récoltes et les agriculteurs
Simon. Nous avons encore les mêmes processions, les trois jours qui précèdent la fête de l'Ascension et que nous appelons les Rogations.
Le Curé. Oui, et ces processions qui portaient le nom de petites litanies (supplications), datent de la plus haute antiquité. Un écrivain ecclésiastique nous rapporte ce qui suit : Le Dauphiné et la Savoie étaient affligés, depuis longtemps, de grandes calamités publiques qui avaient répandu la désolation dans ces contrées. Les tremblements de terre y étaient à peu près journaliers, les incendies n'avaient Jamais été si nombreux, les bêtes féroces quittaient leurs antres et les bois, et menaçaient la sécurité. La nuit de Pâques de l`an 469, pendant que tout le peuple de Vienne (commune du Sud de la France) était réuni à l'église, avec saint Mamert, son évêque, le feu prit dans la ville. Tout le monde quitta l'église, afin de pourvoir à la sûreté de leur demeure, laissant l'Évêque seul au pied de l'autel. Le saint homme offre à Dieu ses prières et ses larmes, lui demandant de vouloir porter remède aux maux qui empêchaient son peuple de le servir avec la fidélité qui lui était due.
Procession des Rogations dans les campagnes
Le grand embrasement s'arrête soudain ; le peuple reconnaissant se retrouve à l'église, où saint Mamert lui annonce que, pendant l'alarme générale, il avait voué à Dieu le rétablissement des anciennes Rogations, qui avaient déjà existé avant son temps, mais que l'on n'avait plus tenues que rarement et avec tiédeur. Tout le monde applaudit à la pieuse pensée de l'Évêque, et les trois jours qui précèdent l'Ascension, furent choisis pour s'acquitter du vœu. On établit ces processions pour éloigner la punition divine, et demander miséricorde en y joignant la prière et le jeûne.
Cet exemple fut suivi par les autres Évêques des Gaules ou ancienne France, et nous voyons, déjà en l`an 511, qu'un concile tenu à Orléans ordonne les Rogations, comme devant se faire annuellement. Car si même les maux qui avaient occasionné ces pieuses manifestations, n'existaient plus, depuis que la Justice divine avait été pacifiée d'une manière si miraculeuse, les raisons de les continuer ne pouvaient pas manquer, puisque, dans tous les temps, nous avons des supplications à adresser à Dieu. De nos jours, c'est principalement pour les fruits de la terre que nous faisons la procession, afin que Dieu les bénisse, et comme ces jours tombent au printemps, c'est-à-dire, à l'époque décisive pour les moissons , ils sont donc très-bien choisis pour cette pratique du culte. Ensuite la fête de l'Ascension, qui suit immédiatement, nous exhorte à son tour à la prière : car ce jour de fête nous rappelle que le Sauveur est retourné au ciel, afin de devenir notre avocat et notre médiateur auprès de son Père céleste : c'est donc un motif de confiance. Voilà pourquoi, mes amis, on a choisi ces jours pour les Rogations, qui devinrent bientôt générales dans toute l'Église. C'est ainsi qu'un concile, tenu en l`an 813, dans la ville de Mayence, décréta que tous les chrétiens devraient accompagner la procession en ces trois jours, et y comparaître tous, sans autre exception que les malades, à pieds nus et revêtus des habits de pénitence.
Les processions
Le Curé. Les processions en général sont très-anciennes, et Tertullien, auteur ecclésiastique, qui vécut jusqu'à l'an 320 de notre ère, en parle déjà. Il est vrai qu'elles ne pouvaient encore être bien solennelles pendant les temps de persécution, quoique toutefois nous en trouvions qui furent publiques, même sous le règne du sanguinaire empereur romain Domitien (empereur de l`an 81 a 96 ap J.C.). Il s'en fit une entre autres, en 220, à l'occasion de la translation, de Tarse à Rome, des reliques de saint Boniface, qui avait été immolé pour la foi. Un grand nombre d'ecclésiastiques et d'autres fidèles allèrent publiquement à la rencontre de ce saint corps, en chantant des cantiques. C'était là, si vous le voulez, un convoi d'honneur pour vénérer le saint martyr, mais, dans le fond, ce n'était autre chose qu'une procession. Naturellement il fut plus facile de faire de semblables manifestations après que la paix eut été rendue à l'Église, et, pour la même raison, elles devinrent par conséquent aussi plus fréquentes. Pour ne citer qu'un exemple, saint Chrysostôme parle de processions, de véritables Rogations, qui se faisaient déjà de son temps, pour obtenir de Dieu la cessation de pluies.
Le Curé. Nous nous rendons ainsi d'un endroit à l'autre pour les mêmes raisons, bien louables sans doute, que celles dont je vous ai déjà entretenu concernant les processions. Nous voudrions adresser en commun nos prières au Tout-Puissant, afin de les rendre plus fortes et pouvoir compter d'autant plus sur leur efficacité. De même donc que les membres d'une paroisse se réunissent, vous voyez dans ce cas deux paroisses qui se réunissent et s'excitent mutuellement à la prière. Les différentes paroisses donnent encore par ce moyen un témoignage de leur foi et se montrent mutuellement comme catholiques. Cette action terminée, il est naturel qu'on prenne quelque repas, et pour la bonne raison que ces bonnes gens ont aussi un corps à soigner et que la fatigue de la marche les a épuisées en excitant leur appétit. Il faut donc prendre de la nourriture, et que peut-on y trouver de mauvais? Notre-Seigneur a mangé lui-même à Cana, il a rassasié dans le désert un grand nombre d'hommes accourus pour l'écouter.
Simon. Pourquoi porte-t-on la croix et les bannières ou étendards dans les processions ?
Le Curé. Voici les raisons pour lesquelles on porte la croix. C'est 1° pour indiquer que, dans les processions, nous sommes réunis au nom de Jésus crucifié; 2° que nous voulons commencer et accomplir toutes nos pratiques de dévotion au nom de Jésus-Christ, selon l'exhortation de saint Paul : Quoi que vous fassiez, faites tout au nom de Jésus ; 3° pour confesser que Jésus crucifié est notre chef; 4° que nous obtenons toutes les grâces de Dieu le Père par les mérites infinis du sang précieux du Sauveur au nom duquel nous prions , nous conformant à ces paroles du divin Maître : « Toutes les fois que vous demanderez à mon Père quelque chose en mon nom, il vous le donnera » (Jean 16. 23).
Pour ce qui concerne les étendards, je vous en dirai aussi quelques mots. Vous savez que l'Église se compose de trois ordres distincts selon les âmes qui en font partie : l'Église triomphante, composée des Saints qui jouissent de la gloire du ciel ; l`Église militante, composée des hommes qui combattent encore sur la terre et à laquelle nous avons le bonheur d'appartenir, et enfin l'Église souffrante, à laquelle appartiennent les âmes du Purgatoire.
Les étendards n'ont donc d'autre but que de signifier que, semblables aux soldats réunis autour de leur drapeau, nous voulons nous rassembler sous l'étendard de Jésus-Christ, afin de combattre pour la gloire de Dieu et le salut de notre âme les ennemis visibles et invisibles. Les étendards représentent encore le triomphe et la victoire du Sauveur, au jour de sa résurrection, remportée sur le péché, le démon et ses ennemis. Ils rappellent en même temps victoire solennelle remportée par notre foi au moyen de la sueur et des travaux des Apôtres, celle du sang des martyrs, sur l'idolâtrie des païens, la rage des tyrans qui persécutaient l'Église, ainsi que sur les erreurs et les hérésies. De même qu'une armée victorieuse déploie fièrement ses drapeaux, de même aussi nous portons l'étendard de la croix publiquement et à la vue de tous; devant l'impiété et l'erreur, et paraissant dire avec saint Jean : « Notre foi, c'est la victoire qui a vaincu le monde ! »
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN SIXIÈME.
DEPUIS LA FÊTE DE L'ASCENSION JUSQU’À LA FÊTE-DIEU.
Résumé. Ascension. — Vigile de la Pentecôte. Bénédiction des fonts baptismaux. Eau bénite. Aspersion de l'eau bénite ; sa signification, ses vertus, son usage. Pentecôte. Pourquoi les Juifs célèbrent cette fête. Les Quatre-Temps. Temps pascal. Communion pascale. Fête de la Sainte Trinité.. Renouvellement des vœux du Baptême. Les dimanches de l'année. Le signe de la croix.
Monsieur le curé, débuta Simon, voilà déjà longtemps que nous réfléchissons et que nous sommes à nous demander l'un à l'autre quelles questions nous devons vous faire aujourd'hui, mais nous ne trouvons rien. Nous avons consulté le calendrier et, ne trouvant que les fêtes de l'Ascension et de la Pentecôte, nous sommes obligés de vous avouer que nous ne nous rappelons pas le moindre usage ni la moindre cérémonie qui exige une explication quelconque.
Le Curé. Hé bien, mes amis, je vous viendrai en aide. II est vrai que ces fêtes n'offrent pas tant de particularités que celles dont nous avons parlé en dernier lieu, nous y trouverons cependant matière à nous occuper aujourd'hui, tout en nous instruisant. Comme je vous l'ai déjà fait remarquer, c'est le jour de l'Ascension que Jésus-Christ a quitté le monde pour se trouver auprès de son Père comme il l'avait prédit lui-même : « Je quitte le monde et je vais à mon Père : » (Jean. 16. 18). Après avoir conversé pendant quarante jours avec ses Apôtres, il se sépara d'eux pour retourner au ciel.
L`Ascension de Jésus Christ au Mont des Oliviers quarante jours après la Résurrection (Luc 24,50)
En s’élevant vers les Cieux, il a rendu la captivité captive (c'est-à-dire, il a délivré de la captivité les âmes esclaves de Satan) et enrichi les hommes de ses dons (Psaume 67. 19. Éphésiens. 4. 8).L'eau signifie la grâce du Saint-Esprit que Jésus-Christ promit de répandre sur son Église, ainsi que dans nos cœurs, après qu'il serait remonté vers son Père, comme le prophète Ézéchiel (36. 25) l'exprime eu disant : « Je répandrai sur vous de l'eau pure. Passons maintenant à la vigile de la Pentecôte.
Simon. Souvent j'ai lu et entendu ce mot vigile sans en connaître la signification.
Le Curé. Ce mot signifie proprement une veille parce qu'autrefois la nuit qui précédait les grandes solennités religieuses, se passait dans la maison de Dieu. Déjà le Psalmiste nous invite à veiller en présence du Seigneur : « Élevez, dit-il, pendant la nuit vos mains vers le sanctuaire et bénissez le Seigneur (Psaume 133. 2). » Il dit encore : Je me lèverai à minuit pour vous louer, Seigneur. Les chrétiens des premiers siècles réalisaient ces paroles du roi prophète. Dès la veille, ou au moins dans la matinée des grandes fêtes, on les voyait se réunir et veiller pour se préparer par la prière et la méditation à la solennité du jour.
Ils imitaient en cela l'exemple des Apôtres qui, après l'Ascension du divin Maître, s'étaient réunis à Jérusalem et s'étaient renfermés dans une chambre, pour s'y préparer par la prière à la réception du Saint-Esprit. Aux vigiles, on observe ordinairement l'abstinence et le jeûne, afin que la prière unie au jeûne et à l'aumône devienne, selon les paroles de Tobie, plus agréable à Dieu. Ces réunions nocturnes étaient déjà en usage parmi les chrétiens du temps des persécutions. Pline-le-Jeune, qui était païen et gouverneur romain dans la Bithynie environ soixante-dix ans après la mort de Jésus-Christ, nous le fait voir dans un rapport qu'il adresse sur leur compte à l'empereur Trajan : « A un jour marqué, dit-il, les chrétiens se rassemblent avant le lever du soleil, et chantent en deux chœurs des hymnes en l'honneur du Christ, qu'ils regardent comme un Dieu.» Et Tertullien, que j'ai déjà cité plus haut, voulant empêcher le mariage des femmes chrétiennes avec les païens, leur dit : « Quel homme païen verra sans soupçons sa femme le quitter pour assister à l'office de la nuit? » Ces réunions nocturnes, il est vrai, tombèrent plus tard en désuétude, l'Église les défendit même à cause des nombreux abus auxquels elles avaient donné lieu. C'est pourquoi nous célébrons actuellement les vigiles au jour qui précède la fête; vous savez maintenant pourquoi cette préparation solennelle s'appelle vigile ou veille.
Simon. La veille de la Pentecôte, on bénit encore les fonts, comme la veille de Pâques ; la bénédiction est-elle la même qu'au Samedi-Saint?
Le Curé. Tout-à-fait, sauf les extraits de l'Écriture-Sainte, que l`on nomme prophéties. Aujourd'hui on n'en dit que six. Mais, comme nous en sommes venus à parler encore une fois de l'eau du Baptême, j'ajouterai cette fois une circonstance que j'aurais dû déjà vous rapporter en parlant du saint jour de Pâques. A Pâques, aussi bien qu'à la Pentecôte, on n'asperge pas avec l'eau bénite ordinaire, mais avec les fonts bénits la veille. Cette coutume est très propre à nous faire ressouvenir de notre baptême en ces grands jours ; et à nous exciter à la reconnaissance envers Dieu de ce qu'il a bien voulu nous rendre participants d'une si grande grâce. Ajoutez à cela que c'est encore une exhortation à la pureté qui convient à l'homme purifié par le bain de la régénération, à la pénitence et au changement de vie qui nous dit d'en éviter dorénavant jusqu'à la moindre tache qui pourrait détruire ou diminuer en nous la grâce du saint Baptême.
Simon. Il y a donc une différence entre l'eau bénite ordinaire et les fonts baptismaux?
Le Curé. L'eau bénite ordinaire, que l'on bénit tous les dimanches pendant l'année ou chaque fois que le besoin l'exige, ne sert pas à conférer le Baptême, mais uniquement pour l'aspersion. Dans les prières que le prêtre récite en la bénissant, il prie le Seigneur de remplir cette eau d'une vertu céleste, afin que, par son usage, le démon (l`ange déchu) soit mis en fuite, que les maux corporels soient éloignés et l'âme fortifiée des grâces du Ciel. Il demande que Dieu veuille purifier et sanctifier toutes les choses qui en seront arrosées et éloigner par elle tout ce qui pourrait être nuisible à l'homme. Il prie ainsi en s'adressant à Dieu : Que cette eau que vous avez créée, servant à vos mystères, reçoive l'effet de votre grâce divine pour chasser les démons et les maladies; afin que ce qui en sera arrosé dans les maison sou dans les lieux où se trouvent les fidèles, soit préservé de toute impureté et de tous maux; que tout ce qui peut corrompre l'air qu'ils y respirent, en soit chassé; qu'ils y soient délivrés des embûches secrètes de l'ennemi, et de tout ce qui pourrait y nuire à leur santé ou troubler leur repos, et qu'enfin la prospérité que nous demandons en invoquant votre saint nom, soit à l'abri de toute attaque. Le prêtre met ensuite du sel bénit dans l'eau, après quoi il récite la prière suivante : « Nous vous supplions, Seigneur, avec tremblement et respect, de regarder favorablement ce sel et cette eau qui sont vos créatures et de répandre sur elles vos bénédictions et vos grâces, afin que tous les lieux qui en seront arrosés, soient préservés, par l'invocation de votre saint Nom, des illusions de l'esprit impur et du souffle empoisonné du serpent; et qu'en implorant votre miséricorde , nous soyons éclairés des lumières de votre Esprit-Saint. Par Jésus-Christ, Notre-Seigneur. Ainsi soit-il. »
Simon. Pourquoi mélange-t-on du sel avec l'eau ?
Le Curé. Pourquoi vous servez-vous du sel dans votre ménage, par exemple? N'est-il pas vrai, c'est pour préserver de la pourriture les choses que vous salez. Ici le sel nous fait entendre qu'après avoir obtenu la purification de notre âme figurée par l'eau, nous devons la préserver de la corruption du péché, de l'impureté et de toute malice de l'ennemi de notre salut. Telle est la double matière de l'eau bénite et sa signification.
Simon. Pourquoi le prêtre fait-il l'aspersion de l'eau bénite tous les dimanches, avant et après l'office divin?
Le Curé : Cela se pratique pour rappeler aux hommes qu'ils ne doivent se présenter devant Dieu, pour la prière et le service divin que purifiés de toute souillure; c'est pour la même raison que nous prenons de l'eau bénite en entrant dans l'église. C'est encore un souvenir de la grâce du Baptême, dans lequel nous avons été sanctifiés par l'eau qui renferme en même temps une exhortation à conserver notre âme dans l'innocence dont nous fûmes alors revêtus, ou à ne pas tarder à la reconquérir par les larmes de la pénitence, si nous avions été assez malheureux pour la perdre. Cette pratique nous dit encore que nous avons été rachetés, arrosés et purifiés par le sang précieux de Jésus-Christ, selon les paroles de saint Pierre (1 Épître de St-Pierre 1.2.) qui nous dit arrosés du sang de Jésus-Christ, et de saint Jean (Apocalypse 1. 5.) lorsqu'il écrit : « Il nous a lavés dans son sang.» C'est pourquoi aussi on chante les paroles du Psalmiste dont je vous ai parlé ailleurs : « Asperges me. « Arrosez moi avec l'hysope, Seigneur, et je serai purifié, lavez-moi et je deviendrai plus blanc que la neige.» Vous comprendrez mieux encore la convenance et la beauté de ces paroles, si je vous dis qu'elles font allusion à la manière dont le peuple Juif était purifié selon la loi de Moïse, qui ordonnait que l'on se servit de l'hysope pour en faire un aspersoir, afin de jeter sur ceux qui étaient censés impurs, par exemple les lépreux, de l'eau mêlée avec les cendres d'une victime.
L'aspersion du sang de l'Agneau pascal sur les parois des maisons se faisait de même avec un bouquet d'hysope, qui est une petite plante dont les feuilles touffues sont très-propres à retenir les gouttes d'eau pour l'aspersion. Après avoir donc entonné l'Asperge me, le prêtre, à genoux sur le premier degré, asperge l'autel en jetant par trois fois de l'eau bénite: il asperge ensuite le sanctuaire dont il fait le tour. L'Église se propose par-là d'éloigner du lieu saint l'esprit de ténèbres ( l`ange déchu), qui, au sentiment des saints Pères, fait tous ses efforts pour troubler les prêtres et les fidèles pendant le saint Sacrifice ; cette pratique signifie encore que toute force et toute pureté viennent du Christ symbolisé par l'autel, et l'aspersion du peuple à la fin de l'office remémore vivement à tous ceux qui sont présents que tout dépend de la bénédiction du Seigneur, et que, pour l'obtenir, ils doivent remplir les devoirs de leur état avec toute la pureté d'intention et la sainteté dont ils sont capables, afin d'être préservés de tous les maux du corps et de l'âme. Telles sont aussi les raisons pour lesquelles nous conservons et nous nous servons de l'eau bénite dans nos demeures.
Thomas. Je dois avouer, monsieur le curé, que cette explication de l'eau bénite a redressé la plupart des idées que je m'étais faites sur ce sujet.
Pourquoi se servir de l'eau bénite pour en arroser les maisons, la nourriture ou même les étables et les bestiaux ?
Le Curé : Dans les prières de l'Église que je viens de rapporter tout au long : N'y est-il pas dit « que tout ce qui en sera arrosé dans les maisons ou autres lieux, soit préservé des embûches de l'ennemi ? » Pourquoi donc le chrétien ferait-il mal en arrosant, avec l'esprit de foi nécessaire, tous les objets qu'il possède ou qui servent à son usage, pour étendre par ce moyen, la prière de l'Église sur tout ce qui l'entoure ? L'Église elle-même nous en donne l'exemple en se servant de l'eau bénite dans mille occasions : elle en arrose les nouvelles maisons des vivants et la tombe du trépassé, les vêtements ecclésiastiques et en général tous les différents objets qui sont bénits pour l'usage des fidèles; — elle fait tout cela pour obtenir les grâces qu'elle mentionne dans les prières dont elle se sert en bénissant l'eau.
Fête de la Pentecôte
Simon prit la parole en demandant pourquoi les Juifs célébraient aussi la fête de la Pentecôte, laquelle, pensait-il, ne concernait que les chrétiens, puisqu'elle rappelait la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres.
Le Curé. Les Juifs solennisent ce jour en mémoire du Décalogue donné par Dieu à Moïse, sur le mont Sinaï. Cela arriva cinquante jours après qu'ils eurent mangé l'Agneau pascal avant de quitter l'Égypte. Ceci n'était qu'une figure de ce qui devait avoir lieu sous la nouvelle alliance. A pareil jour, c'est-à-dire, cinquante jours après la Pâque nouvelle, le Saint-Esprit descendit, pour fortifier les Apôtres avant la prédication de la loi nouvelle, savoir la doctrine de Jésus-Christ, et conférer à tous les chrétiens la lumière et la grâce nécessaires pour croire en Jésus-Christ et vivre selon ses préceptes. De même que la loi ancienne fut donnée à Moïse, au milieu des éclairs et du bruit du tonnerre, de même le Saint Esprit descendit sur les Apôtres au bruit d'un vent impétueux et sous la forme de langues de feu, et enfin de même que Moïse proclama la volonté de Dieu en présence du peuple rassemblé, de même aussi le Prince des Apôtres, saint Pierre, fit connaître au peuple Juif, rassemblé pour la fête de la Pentecôte, la doctrine de l'Évangile.
La Pentecôte est aussi la naissance de l`Église
Pour prévenir une question que, sans doute, vous alliez me faire, je vous dirai que le mot de Pentecôte est d'origine grecque et signifie le cinquantième, c'est-à-dire le cinquantième jour après Pâques.
Note : Le jour de la Pentecôte, le Saint-Esprit descendit sous la forme de langues de feu et, au baptême de Jésus-Christ, il apparut sous la forme d'une colombe. La colombe a été adoptée pour représenter le Saint-Esprit. Il n'est pas rare, dans les anciens monument, de voir sept colombes, pour rappeler les sept dons du Saint-Esprit. Parfois aussi les artistes lui donnaient une forme humaine, portant le livre de la Sagesse, pour exprimer par là que c'est la troisième personne de l'adorable Trinité qui a enseigné aux Apôtres toute vérité, ou bien le volume de l'ancien Testament, pour indiquer que les Prophètes ont écrit sous son inspiration.
Simon. Nous vous remercions de cette explication, que j'allais demander effectivement. Soyez maintenant assez bon pour nous dire un mot de la fête de la sainte Trinité.
Le Curé. Pour ne rien omettre, parlons d'abord des Quatre-Temps, puisque nous rencontrons ces jours de pénitence dans la semaine qui suit la Pentecôte. — Déjà les Juifs devaient jeûner plusieurs fois pendant l'année, comme nous lisons dans le prophète Zacharie (8. 19) : « Le jeûne du quatrième, du cinquième, du septième et du dixième mois sera changé pour la maison de Juda en des jours de joie et d'allégresse, en des jours de brillantes solennités.» Or, il n'est pas croyable que les Apôtres aient fait de ces prescriptions un devoir pour les chrétiens, puisqu'ils dispensaient ordinairement les nouveaux convertis de l'observance de la loi de Moïse pour autant qu'elle se rapportait aux cérémonies du culte : toutefois il est à présumer que les premiers successeurs des Apôtres ont reconnu la convenance en même temps que l'utilité salutaire de ces jeûnes, en les rendant aussi obligatoires pour les chrétiens. Le pape saint Léon, qui vivait vers l'an 440 après Jésus-Christ, les dit d'origine judaïque, et également introduits parmi les chrétiens. C'est ainsi que nous observons encore aujourd'hui les Quatre-Temps ou le jeûne des quatre saisons. Comme nous voici encore revenus au jeûne, je dois porter votre attention sur une chose à laquelle vous n'avez peut-être jamais fait attention, savoir que, depuis Pâques jusqu'à la veille de la Pentecôte, l'Église n'a prescrit aucun jeûne. Elle ne l'a pas fait, parce que ces sept semaines sont un temps de réjouissance. Ainsi, de même qu'elle juge convenable de prescrire le jeûne pendant tout le temps de carême, qui est un temps de deuil, de même aussi elle s'en abstient pendant les jours qui sont destinés à l'allégresse religieuse et au souvenir du Sauveur ressuscité et conversant avec ses disciples, et en cela elle ne fait que diriger sa conduite d'après ce que le divin Maître répondit aux disciples de saint Jean-Baptiste, lorsque ceux ci lui demandèrent, pourquoi les Apôtres n'observaient pas de jeûne : « Les enfants de l'Époux ne peuvent gémir pendant que l'Époux est avec eux ; des jours viendront où l'Époux leur sera ôté, et alors (savoir après son Ascension) ils jeûneront. » (Mathieu 9- 15). Telle fut la pratique de la sainte Église dès les temps les plus reculés , et encore aujourd'hui les jeûnes prescrits la veille de la Pentecôte et aux Quatre-Temps de la semaine suivante, sont les premiers que nous rencontrions après Pâques. — Ainsi donc, mes amis, nous sommes arrivés maintenant à la fin du temps pascal, que clôture le samedi après la Pentecôte.
Simon. J'avais cru que le temps pascal signifiait le dernier jour auquel on peut faire ses pâques, c'est-à-dire recevoir la communion pascale.
Le Curé. Je vais aussi vous en dire un mot d'explication. La communion pascale se faisait autrefois en un seul et même jour par tous les chrétiens, et cela au jour de l'institution de la sainte Eucharistie, c'est-à-dire le Jeudi-Saint. Les fidèles voulaient par là célébrer la mémoire du grand amour du divin Maître, et se réunir autour de la sainte Table, à l'imitation des Apôtres qui reçurent en ce jour le corps du Sauveur pour la première fois. Mais le nombre des chrétiens se multipliant, il devint bientôt impossible de distribuer la sainte communion à tous en un seul jour, surtout pour la raison que les confesseurs n'auraient pu suffire à entendre toutes les confessions en si peu de temps. Force fut donc à l'Église de prolonger le temps destiné à l'accomplissement de ce que tous regardaient déjà comme un devoir, de considérer comme accompli le Jeudi-Saint, ce devoir rempli dans le temps assigné par elle. C'est ce temps désigné pour la communion pascale que l'on de nomme ordinairement temps pascal. Mais, à proprement parler, le temps pascal n'est pas le temps pendant lequel on peut accomplir le devoir pascal, mais on appelle ainsi les cinquante jours depuis Pâques jusqu'à la Pentecôte, auxquels il faut encore ajouter l'octave de cette dernière fête, de sorte que le dimanche de la sainte Trinité est le premier jour qui n'appartienne plus au temps pascal. Je vous dirai encore, mes amis, qu'il fut longtemps inutile d'engager les fidèles à communier, tellement nos pères dans la foi étaient zélés pour se fortifier de la nourriture céleste. Mais ce premier zèle étant venu à se ralentir, le Concile général qui se tint dans l'église de saint Jean de Latran, à Rome, en 1215, ordonna à tous les chrétiens parvenus à l'âge de discrétion, de communier au moins une fois chaque année, à Pâques.
Les sept dons du Saint Esprit
Fête de la Sainte Trinité
Le trèfle irlandais
Simon. Pourrons-nous passer maintenant à la fête de la sainte-trinité? — Et, dans ce cas, ayez la bonté de nous dire pourquoi on la célèbre le dimanche après la Pentecôte.
Le Curé. Parce que le mystère de la très-sainte Trinité est la doctrine fondamentale de la religion chrétienne, qui a été annoncée par les Apôtres, et crue par les peuples, selon les paroles du Sauveur : Allez et enseignez toutes les nations, et baptisez-les au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. (Mathieu. 28. 19.) Cette fête nous exhorte donc à croire fermement toutes les vérités qui nous ont été proposées par toutes les autres fêtes de l'année que celle-ci résume, en quelque sorte, et à ne pas rougir de confesser cette croyance devant le monde. L'Avent nous rappelait, vous vous en souvenez, la création de l'homme, par conséquent aussi le Créateur, Dieu le Père. A partir du temps de Noël jusqu'à l'Assomption, nous nous sommes occupés à méditer le Fils de Dieu fait homme, et la Pentecôte portait notre souvenir sur la descente du Saint-Esprit. Or, comme ces trois Personnes ne font qu'un seul Dieu, nous les réunissons, pour ainsi parler, en ce jour consacré à la sainte Trinité, afin de rendre nos humbles hommages et nos adorations à la Majesté divine, c'est-à-dire aux trois Personnes divines à la fois. Ajoutez encore que cette fête est comme un mémorial des bienfaits dont nous sommes redevables à ces personnes divines, bienfaits qui nous ont été rappelés par les solennités dont nous avons parlé jusqu'ici plus amplement , savoir notre création, notre rédemption et notre sanctification. Pour tous ces bienfaits Dieu a droit à nos actions de grâces, qu'il convient de lui rendre surtout en ce jour. Mais ce qui nous a donné le droit à jouir de toutes ces faveurs, c'est notre Baptême, qui nous a été administré au nom de la sainte Trinité. Ayant donc entendu dans le courant de l'année tout ce que Dieu a fait pour nous, il convient bien certainement de nous rappeler en ce jour, d'une manière solennelle, les promesses que nous avons faites dans le saint Baptême, en formant de nouveau le ferme propos de remplir, avec une fidélité de plus en plus grande, les devoirs que nous nous sommes engagés de remplir en devenant chrétiens. C'est ce que l'on appelle Renouveler les vœux du Baptême
Note : Au moyen-âge, on représentait la sainte Trinité comme sait : Dieu le Père tenant devant lui le Fils en croix et le Saint-Esprit, sous la forme d'une colombe, planant au haut de la croix, — ou bien : par trois cercles égaux enlacés les uns dans les autres, — ou bien encore on enveloppait d'un même manteau les trois personnes divines pour représenter l'unité, et on donnait pour attribut au Père la boule du monde, au Fils la croix et au Saint-Esprit, représenté par la colombe, le livre de la Sagesse. Dans les siècles de foi, le symbole de la Trinité était imprimé au plan général aussi bien qu'aux différentes parties des édifices religieux. Le nombre trois s'y retrouve de préférence dans les absides, les fenêtres, les nefs, etc. A côté de la forme de la croix, qui exprime le mystère de la Rédemption, nos pères représentaient de préférence le mystère fondamental d'un Dieu en trois personnes, de sorte que la majesté du Très-Haut semblait remplir l'édifice. Majestas Domini implevit domum- L'Église de Paray-le-Monial en est un exemple frappant. Partout cet édifice présente le nombre 3. Cette église, en forme de croix, est divisée en trois nefs, chaque nef est composée de trois travées, chaque travée a une arcade formée de trois arcs et surmontée de trois fenêtres, etc. A l'extérieur nous voyons trois clochers qui proclament la même pensée de foi, renfermée dans le nombre 3 si souvent répété.
La Sainte Trinité en cercle au Moyen-Âge
La Sainte Trinité
Simon. D'après votre explication et l'importance évidente de la fête, il est étrange qu’elle soit célébrée d'une manière si peu solennelle.
Le Curé. Je répondrai à votre observation par les paroles du pape Alexandre III, qui s'exprime ainsi: « Il n'y a pas de jour consacré spécialement à la sainte Trinité, parce que nous la célébrons tous les dimanches, voire même tous les jours sans exception. » Dans l'ancien Ordo romain, il est dit : « L'Église romaine n'a pas coutume de fêter ce jour d'une manière solennelle , parce que tous les jours on prie le Gloria Patri et autres prières en l'honneur de la sainte Trinité. » Effectivement l'Église a, de tous temps, porté la pensée des chrétiens sur ce grand mystère avec une prédilection visible. La pieuse louange : « Gloire soit au Père, et au Fils et au Saint-Esprit, » que nous employons si fréquemment, a son origine dans les temps les plus reculés de l'Église, puisqu'on la retrouve déjà dans les écrits des saints Basile, Athanase, et autres Pères de l'Église; oui, même déjà dans les épîtres de saint Paul. Ce fut vraisemblablement le Concile tenu à Nicée, en 325, qui y ajouta les mots: « Ainsi qu'il était au commencement, maintenant et par tous les siècles des siècles. » Le saint Synode fit cette addition en vue de détruire par-là l'hérésie des Ariens, qui enseignaient que le Fils de Dieu n'était pas éternel, mais engendré dans le temps par Dieu le Père. — A cela j'ajouterai encore que, chaque fois que nous faisons le signe de la croix, nous prononçons les paroles : « Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. »
C'est par ce signe et par le nom du Dieu trois fois saint que nous commençons et que nous finissons la journée, la prière, le travail et le repos. Le prêtre ne prononce pas seulement ces mots en administrant le Baptême, comme l'a ordonné notre divin Sauveur, mais il en fait usage en administrant presque tous les autres Sacrements; tout ce que l'Église bénit se fait au nom des trois personnes divines.
La Sainte Trinité
Disons encore que chaque dimanche de l'année est consacré particulièrement à l'honneur et à l'adoration de la très-sainte Trinité, car le jour du Seigneur est le jour commémoratif de la création du monde, le jour auquel Dieu le Fils sortit glorieux du tombeau, et auquel enfin le Saint-Esprit descendit visiblement sur les Apôtres. Ainsi donc, toute la vie du chrétien est pleine de souvenirs qui nous rappellent le grand mystère d'un Dieu en trois personnes, et voilà aussi pourquoi, dans les temps anciens, on ne lui consacrait aucun jour de fête particulier. Mais comme, vers le neuvième siècle, il se manifesta une dévotion toute particulière envers la divine Trinité, on lui consacra un jour spécial d'abord dans quelques endroits, usage qui se propagea tellement dans le monde catholique que l'Église jugea à propos de le sanctionner en le rendant général. Toutefois elle n'en fit pas un jour de grande solennité extérieure pour les mêmes raisons qui l'avaient portée à ne pas le célébrer du tout.
Le Dimanche
Simon. Il est heureux que vous ayez parlé du dimanche. Cette occasion nous vaudra sans doute quelques observations utiles. Pourquoi, par exemple, sanctifions-nous le dimanche et non le Sabbat, comme Dieu le prescrivait dans la loi ancienne.
Le Curé. Comme la Résurrection de Notre Seigneur avait eu lieu, selon l'Évangile (Marc, 16. 2.), le jour qui suivait le Sabbat, donc le dimanche, ce jour fut regardé par les premiers chrétiens comme particulièrement saint. Inspirés par l'Esprit-Saint, qui leur avait été donné et qui dirigeait leur conduite, ils transférèrent en conséquence la solennité du Sabbat au dimanche, afin de mieux glorifier la résurrection du Rédempteur et d'affirmer ce grand mystère de notre sainte religion dans la mémoire des fidèles. C'est aussi pourquoi on nomme le dimanche jour du Seigneur ; car il est consacré d'une manière particulière au souvenir et à l'adoration du divin Sauveur. Comme je vous le disais encore, il n'y a qu'un instant, ce fut un dimanche que le Saint-Esprit descendit sur les Apôtres, et mit, pour ainsi parler, la dernière main à la sanctification des hommes : car, dès le grand jour de la Pentecôte, l'Église était fondée. — Il est vrai que nous devons rapporter à Dieu tous les jours sans exception ; mais devant penser à servir Dieu d'une manière spéciale un jour dans la semaine, pourrait-on en trouver un qui fût plus propre que celui qui est illustré par des souvenirs si beaux et si importants ? Et quel jour pourrions-nous prier avec plus de zèle et une ferveur plus grande qu'en celui où Dieu a donné aux hommes les plus beaux dons de sa grâce.
Le Signe de Croix
Simon. Vous parliez tantôt du signe de la croix ; c'est donc en l'honneur de la sainte Trinité que nous le faisons?
Le Curé. Nous avons encore d'autres raisons de le faire. Avant tout veuillez distinguer entre les paroles que nous prononçons en le faisant et le signe en lui-même. Ces paroles servent à exprimer notre foi au grand mystère d'un Dieu en trois personnes, et à la confesser d'une manière franche et publique. Or, la doctrine de la sainte Trinité est l'abrégé de toute la doctrine chrétienne, que nous confessons de la même manière chaque fois que nous faisons le signe de la croix. Ainsi nous commençons nos prières ou notre travail en disant : « Au nom du Père, etc. ; » c'est une déclaration solennelle par laquelle nous exprimons que nous voulons tout faire au nom et au service de la sainte Trinité, afin d'obtenir d'elle la bénédiction, la grâce et le succès dans nos entreprises.
Simon. Maintenant que nous comprenons le sens de ces paroles, veuillez nous dire quelque chose du signe que nous faisons en les prononçant.
Le Curé. Le signe de la croix proprement dit nous sert : 1° Pour exprimer en face du monde que nous sommes chrétiens, c'est-à-dire que nous croyons que Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, nous a rachetés par la mort de la croix, selon qu'il est écrit : « C'est Jésus-Christ qui a porté en son corps nos péchés sur la croix. » (1 Pierre 2. 24.) ; 2° Pour nous faire souvenir que nous ne devons jamais rougir du Fils de Dieu crucifié, mais, qu'au contraire, nous devons le confesser résolument devant amis et ennemis, avec les mêmes sentiments qui faisaient dire à saint Paul : « Loin de nous, de nous glorifier en autre chose qu'en la croix de Notre- Seigneur Jésus Christ ! (Galates 6.14.), de laquelle nous est venu le salut, la vie et la résurrection. C'est par cette profession de foi que nous nous distinguons de tous les ennemis du Seigneur 3° Pour exprimer le désir et la prière d'être préservés, par les mérites de Jésus crucifié, de tous les malheurs corporels et spirituels, et obtenir, par ces mêmes mérites de la mort et passion du divin Maître, la réussite dans nos entreprises et nos travaux, et en recueillir ainsi des mérites pour notre âme. 4° Nous témoignons encore, par ce moyen, notre reconnaissance envers Dieu de ce qu'il nous a sauvés par sa croix, et nous nous excitons à persévérer dans ces mêmes sentiments de gratitude. En résumé, nous confessons notre foi de deux manières en faisant le signe de la croix : les paroles que nous prononçons témoignent de notre croyance à la sainte Trinité et nous manifestons par le signe lui-même, notre assentiment aux mystères de l'Incarnation et de la Rédemption.
Simon. Cet usage de se signer est sans doute bien ancien dans l'Église.
Le Curé. Oui, mes amis, et saint Jérôme va jusqu'à soutenir que Jésus-Christ lui-même a employé ce signe vénérable lorsqu'il bénit ses Apôtres (Luc. 24. 50.), et leur ordonna de baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Il est donc certain qu'il faut chercher son origine dans les premiers temps de l'Église. Saint Cyprien s'écrie : « Ç'est vous, Seigneur, qui nous avez donné le signe de la croix et l'exemple de la mortification. » Ce que nous venons de dire se rapporte au signe proprement dit; car l'usage de prononcer simultanément les mots : Au nom du Père, etc., provient apparemment du troisième siècle de notre ère.
Sainte Foy ( d`Agen) – vierge et martyre en Gaule romaine vers 287 Ap J.C.
Vers l'an 287, sainte Foy scella de son sang la foi chrétienne, avec plusieurs de ses compagnes. En ces occasions, les chrétiens ne manquaient pas de rapporter scrupuleusement par écrit tout ce qui se passait, afin de s'édifier et de s'affermir mutuellement dans la foi par le récit des exemples d'héroïsme donnés par les saints martyrs. Or, dans ces rapports ou actes qui parlent du martyre de sainte Foy, il est mentionné formellement qu'avant de se livrer au bourreau la Sainte fit le signe de la croix sur le front, la bouche et la poitrine, donc tout-à-fait comme nous le pratiquons encore avant la lecture de l'Évangile. Tertullien, qui vivait dans le deuxième siècle, écrit, en parlant des chrétiens de son temps: « Chaque fois que nous nous mettons en mouvement, que nous rentrons ou sortons, que nous nous habillons, que nous nous baignons, que nous nous mettons à table, nous marquons notre front du signe de la croix.» La raison pour laquelle les chrétiens faisaient à chaque occasion le signe de la croix, était le grand nombre de superstitions pratiquées par les païens dont ils tâchaient de se distinguer le plus sévèrement possible. Saint Cyrille, qui était évêque de Jérusalem de l'an 350 à 386, instruisant ses catéchumènes, leur disait entre autres : « Marquez votre front du signe de la croix, afin que les démons ( anges déchus) soient remplis de crainte à la vue de ce signe vraiment royal et qu'ils prennent la fuite. Faites ce signe avant de boire et de manger, avant de vous asseoir ou de vous coucher, en vous levant, en parlant, en marchant, en un mot, à toute occasion. Car celui qui a été crucifié ici-bas est maintenant dans le ciel. Si le Crucifié était demeuré dans le tombeau, nous pourrions en avoir honte et en rougir; mais comme il est ressuscité, nous ne pouvons avoir aucune raison de rougir du signe de sa victoire.» C'est par ces mots que saint Jérôme (né en 331) exhorte une vierge chrétienne, dans une de ses lettres, à faire le signe de la croix à chaque chose qu'elle entreprend, et saint Augustin dit des chrétiens de son temps: « Nous portons sur notre front la croix à laquelle Jésus-Christ a été crucifié.»
Simon. Je plains les malheureux qui méprisent cette ancienne coutume chrétienne, ou qui l'omettent par respect humain.
Le Curé. Et vous avez raison de le faire : car ces paroles que l'Apôtre des Gentils adressait aux habitants de Philippes (3. 18.), les concernent particulièrement : Il y a plusieurs dont je vous ai souvent entendu parler et dont je vous parle encore avec larmes, qui se conduisent en ennemis de la croix de Jésus-Christ, dont la fin sera la damnation. Car, si déjà par l'immoralité de leur vie, ils ne se sont montrés les ennemis de la croix, pourquoi la redoutent-ils? Ou bien ont-ils honte de passer pour chrétiens, et dans ce cas, de quelle ingratitude ne se rendent-ils pas coupables envers le Sauveur qui a voulu souffrir pour nous tous les genres d'affronts et d'ignominies ! Quelle indignité de rougir ainsi de son Rédempteur et de son plus grand bienfaiteur, tandis qu'un sujet ou un serviteur ne rougirait pas de porter les livrées de son roi ou de son maître!
Quelle folie encore de rougir de sa foi qui n'est même plus méprisée comme aux temps des persécutions, mais qui est l'objet de l'amour de plusieurs millions d'âmes ! Oui, il est bien dangereux pour l'éternité d'avoir honte de confesser Jésus-Christ, qui nous a dit: Je rougirai devant mon Père qui est dans les deux et devant les anges du ciel de celui qui aura rougi de moi devant les hommes (Luc. 12).
je me contenterai de vous rapporter de mémoire quelques paroles prononcées par saint Jean Chrysostôme, dans un de ses sermons. Je vous ai déjà fait remarquer que ce saint évêque vivait dans le quatrième siècle après Jésus- Christ. Il dit donc : « Que personne ne rougisse du signe vénérable de notre salut ; mais considérons la croix de Jésus-Christ comme une couronne précieuse; c'est par elle que tout ce qui nous concerne, reçoit son accomplissement. S'agit-il de notre régénération : la croix y est; mangeons-nous le pain mystérieux, est-il question de l'ordination des prêtres, en un mot, partout je retrouve le signe de la victoire. C'est pourquoi nous en marquons nos maisons, nos parois, nos fenêtres et nos fronts. N'est-ce pas là le signe de notre Rédemption, de notre commun affranchissement et de la miséricorde du Seigneur qui, semblable à un agneau, se laissa conduire à la boucherie. C'est pourquoi, chaque fois que vous faites le signe de la croix , pensez à ce qu'il signifie, à ce que signifie la croix, et appliquez-vous à réprimer en vous la colère et toutes vos mauvaises inclinations, et ayez grande confiance. Car il ne convient pas de faire ce signe sacré à la légère. En le faisant avec ferveur et confiance, vous vous rendrez plus forts qu'aucun des ennemis impurs qui voient dans ce signe l'épée qui leur a donné la mort. Si déjà nous regardons avec horreur l'endroit où un criminel a été mis à mort, vous pouvez en conclure avec quelle horreur les esprits infernaux regardent l'arme avec laquelle Jésus-Christ a abattu leur puissance et froissé la tête du dragon. Gardez-vous donc de jamais rougir de ce signe sublime, afin que Jésus ne soit forcé de faire de même envers vous, lorsqu'il viendra un jour, rempli de gloire, portant, comme trophée de sa victoire, la croix plus brillante que les rayons du soleil. Car alors la croix apparaîtra réellement, et sa vue servira, dans tout le monde, de témoignage en faveur de la cause de Dieu, et elle proclamera les bontés infinies du Créateur. Dès les temps de nos aïeux et jusqu'à nos jours, ce signe a ouvert les portes fermées, rendu inoffensives la nourriture et la boisson, guéri de la morsure des animaux venimeux. Faut-il s'en étonner? S'il a pu briser les portes de l'enfer, ouvrir l'entrée du ciel, faciliter le chemin du Paradis et briser les chaînes par lesquelles Satan nous tenait attachés, pourquoi la force d'anéantir les poisons les plus dangereux et les morsures les plus mortelles lui aurait-elle manqué? Implantez donc profondément dans votre âme le souvenir de la croix. C'est elle qui a sauvé et converti le monde, détruit l'erreur, introduit la vérité, transformé la terre en ciel et les hommes en anges. Par la croix, les démons ne sont plus à redouter ; il faut plutôt s'en moquer. Par la croix, la mort a cessé d'être la mort; elle n'est plus maintenant qu'un court et léger sommeil. Par la croix, tout ce qui s'opposait à nous a été atterré. Si donc quelqu'un vous demande : « Adorez-vous le Crucifié? » répondez-lui d'une voix joyeuse et l'œil serein : « Je l'adore et je veux l'adorer à jamais! »
Que s'il vient à se moquer de votre réponse, déplorez devant Dieu son aveugle ment, et remerciez Dieu, de votre côté, de tous les bienfaits que vous connaissez par sa révélation. Telles sont à peu près les paroles du saint Père de l'Église; je vous conjure de les prendre à coeur, de croire à la vertu de ce signe salutaire, et de ne jamais l'omettre par respect humain.
Simon. Je crois pouvoir dire, au nom de tous, que nous vous en faisons la promesse avec bonheur.
Simon. Pourquoi fait-on trois croix avant la lecture de l'Évangile.?
Le Curé. Nous formons une croix avec le pouce d'abord sur le front. Nous faisons entendre par là que nous sommes prêts à confesser la doctrine du saint Évangile, selon l'exemple de l'Apôtre, qui disait de lui-même (Romain 1.16.): Je ne rougis point de l'Évangile. Nous formons ensuite la croix sur la bouche, pour exprimer que nous voulons aussi confesser, par nos paroles, la doctrine de Jésus-Christ, chaque fois que notre devoir le demandera, et la défendre au besoin, selon ce que dit le Sauveur : Quiconque m'avouera devant les hommes, moi aussi je l'avouerai devant mon Père. (Matthieu 10. 52.) Enfin nous faisons la croix sur la poitrine, afin d'indiquer que nous devons être intérieurement tels que le demande saint Paul, lorsqu'il dit : Ayez les mêmes sentiments que Jésus-Christ. (Philippiens 2. 5.). Nous voulons encore par-là prier Dieu de nous donner, par la force de la sainte croix, la grâce de comprendre l'Évangile et de connaître les devoirs qu'il nous prescrit, de le professer de bouche et de l'aimer du cœur; enfin, de cette manière, nous offrons encore à Dieu nos pensées, nos paroles, nos désirs et nos actions, pour qu'elles deviennent de plus en plus conformes aux exemples que nous a laissés le Fils de Dieu crucifié.
Simon. Les prêtres font encore le signe de la croix sur le peuple à la fin de la messe et en terminant le sermon?
Le Curé. Oui, afin que Dieu daigne répandre sur les chrétiens réunis dans le lieu saint sa bénédiction et les grâces qu'il a acquises pour nous à l'arbre de la croix, comme dit saint Paul : Béni soit Dieu, le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis par toutes les grâces spirituelles et les faveurs célestes par le Christ. Il est dit déjà, dans les actes de plusieurs Conciles, qui se sont tenus vers l'an 500 après Jésus-Christ, qu'il ne faut pas laisser sortir le peuple de l'église sans lui donner la bénédiction, et ces mêmes Conciles recommandent, en même temps aux fidèles de ne pas quitter la maison de Dieu avant de l'avoir obtenue.
Comme les questions tarissaient, le curé reprit la parole après une courte pause : Nous avons parlé, leur dit-il, du signe de la croix et de la bénédiction ; il convient maintenant que je vous la donne au nom du Seigneur, avant de nous séparer. Donc : que la bénédiction du Dieu tout-puissant, du Père, du Fils et du Saint-Esprit descende sur vous et y demeure à jamais ! » Ayant fait le signe de la croix sur la foule prosternée, tout le monde reprit le chemin de son logis en silence et visiblement ému des choses édifiantes qu'on venait d'entendre.
DEPUIS LA FÊTE DE L'ASCENSION JUSQU’À LA FÊTE-DIEU.
Résumé. Ascension. — Vigile de la Pentecôte. Bénédiction des fonts baptismaux. Eau bénite. Aspersion de l'eau bénite ; sa signification, ses vertus, son usage. Pentecôte. Pourquoi les Juifs célèbrent cette fête. Les Quatre-Temps. Temps pascal. Communion pascale. Fête de la Sainte Trinité.. Renouvellement des vœux du Baptême. Les dimanches de l'année. Le signe de la croix.
Monsieur le curé, débuta Simon, voilà déjà longtemps que nous réfléchissons et que nous sommes à nous demander l'un à l'autre quelles questions nous devons vous faire aujourd'hui, mais nous ne trouvons rien. Nous avons consulté le calendrier et, ne trouvant que les fêtes de l'Ascension et de la Pentecôte, nous sommes obligés de vous avouer que nous ne nous rappelons pas le moindre usage ni la moindre cérémonie qui exige une explication quelconque.
Le Curé. Hé bien, mes amis, je vous viendrai en aide. II est vrai que ces fêtes n'offrent pas tant de particularités que celles dont nous avons parlé en dernier lieu, nous y trouverons cependant matière à nous occuper aujourd'hui, tout en nous instruisant. Comme je vous l'ai déjà fait remarquer, c'est le jour de l'Ascension que Jésus-Christ a quitté le monde pour se trouver auprès de son Père comme il l'avait prédit lui-même : « Je quitte le monde et je vais à mon Père : » (Jean. 16. 18). Après avoir conversé pendant quarante jours avec ses Apôtres, il se sépara d'eux pour retourner au ciel.
L`Ascension de Jésus Christ au Mont des Oliviers quarante jours après la Résurrection (Luc 24,50)
En s’élevant vers les Cieux, il a rendu la captivité captive (c'est-à-dire, il a délivré de la captivité les âmes esclaves de Satan) et enrichi les hommes de ses dons (Psaume 67. 19. Éphésiens. 4. 8).L'eau signifie la grâce du Saint-Esprit que Jésus-Christ promit de répandre sur son Église, ainsi que dans nos cœurs, après qu'il serait remonté vers son Père, comme le prophète Ézéchiel (36. 25) l'exprime eu disant : « Je répandrai sur vous de l'eau pure. Passons maintenant à la vigile de la Pentecôte.
Simon. Souvent j'ai lu et entendu ce mot vigile sans en connaître la signification.
Le Curé. Ce mot signifie proprement une veille parce qu'autrefois la nuit qui précédait les grandes solennités religieuses, se passait dans la maison de Dieu. Déjà le Psalmiste nous invite à veiller en présence du Seigneur : « Élevez, dit-il, pendant la nuit vos mains vers le sanctuaire et bénissez le Seigneur (Psaume 133. 2). » Il dit encore : Je me lèverai à minuit pour vous louer, Seigneur. Les chrétiens des premiers siècles réalisaient ces paroles du roi prophète. Dès la veille, ou au moins dans la matinée des grandes fêtes, on les voyait se réunir et veiller pour se préparer par la prière et la méditation à la solennité du jour.
Ils imitaient en cela l'exemple des Apôtres qui, après l'Ascension du divin Maître, s'étaient réunis à Jérusalem et s'étaient renfermés dans une chambre, pour s'y préparer par la prière à la réception du Saint-Esprit. Aux vigiles, on observe ordinairement l'abstinence et le jeûne, afin que la prière unie au jeûne et à l'aumône devienne, selon les paroles de Tobie, plus agréable à Dieu. Ces réunions nocturnes étaient déjà en usage parmi les chrétiens du temps des persécutions. Pline-le-Jeune, qui était païen et gouverneur romain dans la Bithynie environ soixante-dix ans après la mort de Jésus-Christ, nous le fait voir dans un rapport qu'il adresse sur leur compte à l'empereur Trajan : « A un jour marqué, dit-il, les chrétiens se rassemblent avant le lever du soleil, et chantent en deux chœurs des hymnes en l'honneur du Christ, qu'ils regardent comme un Dieu.» Et Tertullien, que j'ai déjà cité plus haut, voulant empêcher le mariage des femmes chrétiennes avec les païens, leur dit : « Quel homme païen verra sans soupçons sa femme le quitter pour assister à l'office de la nuit? » Ces réunions nocturnes, il est vrai, tombèrent plus tard en désuétude, l'Église les défendit même à cause des nombreux abus auxquels elles avaient donné lieu. C'est pourquoi nous célébrons actuellement les vigiles au jour qui précède la fête; vous savez maintenant pourquoi cette préparation solennelle s'appelle vigile ou veille.
Simon. La veille de la Pentecôte, on bénit encore les fonts, comme la veille de Pâques ; la bénédiction est-elle la même qu'au Samedi-Saint?
Le Curé. Tout-à-fait, sauf les extraits de l'Écriture-Sainte, que l`on nomme prophéties. Aujourd'hui on n'en dit que six. Mais, comme nous en sommes venus à parler encore une fois de l'eau du Baptême, j'ajouterai cette fois une circonstance que j'aurais dû déjà vous rapporter en parlant du saint jour de Pâques. A Pâques, aussi bien qu'à la Pentecôte, on n'asperge pas avec l'eau bénite ordinaire, mais avec les fonts bénits la veille. Cette coutume est très propre à nous faire ressouvenir de notre baptême en ces grands jours ; et à nous exciter à la reconnaissance envers Dieu de ce qu'il a bien voulu nous rendre participants d'une si grande grâce. Ajoutez à cela que c'est encore une exhortation à la pureté qui convient à l'homme purifié par le bain de la régénération, à la pénitence et au changement de vie qui nous dit d'en éviter dorénavant jusqu'à la moindre tache qui pourrait détruire ou diminuer en nous la grâce du saint Baptême.
Simon. Il y a donc une différence entre l'eau bénite ordinaire et les fonts baptismaux?
Le Curé. L'eau bénite ordinaire, que l'on bénit tous les dimanches pendant l'année ou chaque fois que le besoin l'exige, ne sert pas à conférer le Baptême, mais uniquement pour l'aspersion. Dans les prières que le prêtre récite en la bénissant, il prie le Seigneur de remplir cette eau d'une vertu céleste, afin que, par son usage, le démon (l`ange déchu) soit mis en fuite, que les maux corporels soient éloignés et l'âme fortifiée des grâces du Ciel. Il demande que Dieu veuille purifier et sanctifier toutes les choses qui en seront arrosées et éloigner par elle tout ce qui pourrait être nuisible à l'homme. Il prie ainsi en s'adressant à Dieu : Que cette eau que vous avez créée, servant à vos mystères, reçoive l'effet de votre grâce divine pour chasser les démons et les maladies; afin que ce qui en sera arrosé dans les maison sou dans les lieux où se trouvent les fidèles, soit préservé de toute impureté et de tous maux; que tout ce qui peut corrompre l'air qu'ils y respirent, en soit chassé; qu'ils y soient délivrés des embûches secrètes de l'ennemi, et de tout ce qui pourrait y nuire à leur santé ou troubler leur repos, et qu'enfin la prospérité que nous demandons en invoquant votre saint nom, soit à l'abri de toute attaque. Le prêtre met ensuite du sel bénit dans l'eau, après quoi il récite la prière suivante : « Nous vous supplions, Seigneur, avec tremblement et respect, de regarder favorablement ce sel et cette eau qui sont vos créatures et de répandre sur elles vos bénédictions et vos grâces, afin que tous les lieux qui en seront arrosés, soient préservés, par l'invocation de votre saint Nom, des illusions de l'esprit impur et du souffle empoisonné du serpent; et qu'en implorant votre miséricorde , nous soyons éclairés des lumières de votre Esprit-Saint. Par Jésus-Christ, Notre-Seigneur. Ainsi soit-il. »
Simon. Pourquoi mélange-t-on du sel avec l'eau ?
Le Curé. Pourquoi vous servez-vous du sel dans votre ménage, par exemple? N'est-il pas vrai, c'est pour préserver de la pourriture les choses que vous salez. Ici le sel nous fait entendre qu'après avoir obtenu la purification de notre âme figurée par l'eau, nous devons la préserver de la corruption du péché, de l'impureté et de toute malice de l'ennemi de notre salut. Telle est la double matière de l'eau bénite et sa signification.
Simon. Pourquoi le prêtre fait-il l'aspersion de l'eau bénite tous les dimanches, avant et après l'office divin?
Le Curé : Cela se pratique pour rappeler aux hommes qu'ils ne doivent se présenter devant Dieu, pour la prière et le service divin que purifiés de toute souillure; c'est pour la même raison que nous prenons de l'eau bénite en entrant dans l'église. C'est encore un souvenir de la grâce du Baptême, dans lequel nous avons été sanctifiés par l'eau qui renferme en même temps une exhortation à conserver notre âme dans l'innocence dont nous fûmes alors revêtus, ou à ne pas tarder à la reconquérir par les larmes de la pénitence, si nous avions été assez malheureux pour la perdre. Cette pratique nous dit encore que nous avons été rachetés, arrosés et purifiés par le sang précieux de Jésus-Christ, selon les paroles de saint Pierre (1 Épître de St-Pierre 1.2.) qui nous dit arrosés du sang de Jésus-Christ, et de saint Jean (Apocalypse 1. 5.) lorsqu'il écrit : « Il nous a lavés dans son sang.» C'est pourquoi aussi on chante les paroles du Psalmiste dont je vous ai parlé ailleurs : « Asperges me. « Arrosez moi avec l'hysope, Seigneur, et je serai purifié, lavez-moi et je deviendrai plus blanc que la neige.» Vous comprendrez mieux encore la convenance et la beauté de ces paroles, si je vous dis qu'elles font allusion à la manière dont le peuple Juif était purifié selon la loi de Moïse, qui ordonnait que l'on se servit de l'hysope pour en faire un aspersoir, afin de jeter sur ceux qui étaient censés impurs, par exemple les lépreux, de l'eau mêlée avec les cendres d'une victime.
L'aspersion du sang de l'Agneau pascal sur les parois des maisons se faisait de même avec un bouquet d'hysope, qui est une petite plante dont les feuilles touffues sont très-propres à retenir les gouttes d'eau pour l'aspersion. Après avoir donc entonné l'Asperge me, le prêtre, à genoux sur le premier degré, asperge l'autel en jetant par trois fois de l'eau bénite: il asperge ensuite le sanctuaire dont il fait le tour. L'Église se propose par-là d'éloigner du lieu saint l'esprit de ténèbres ( l`ange déchu), qui, au sentiment des saints Pères, fait tous ses efforts pour troubler les prêtres et les fidèles pendant le saint Sacrifice ; cette pratique signifie encore que toute force et toute pureté viennent du Christ symbolisé par l'autel, et l'aspersion du peuple à la fin de l'office remémore vivement à tous ceux qui sont présents que tout dépend de la bénédiction du Seigneur, et que, pour l'obtenir, ils doivent remplir les devoirs de leur état avec toute la pureté d'intention et la sainteté dont ils sont capables, afin d'être préservés de tous les maux du corps et de l'âme. Telles sont aussi les raisons pour lesquelles nous conservons et nous nous servons de l'eau bénite dans nos demeures.
Thomas. Je dois avouer, monsieur le curé, que cette explication de l'eau bénite a redressé la plupart des idées que je m'étais faites sur ce sujet.
Pourquoi se servir de l'eau bénite pour en arroser les maisons, la nourriture ou même les étables et les bestiaux ?
Le Curé : Dans les prières de l'Église que je viens de rapporter tout au long : N'y est-il pas dit « que tout ce qui en sera arrosé dans les maisons ou autres lieux, soit préservé des embûches de l'ennemi ? » Pourquoi donc le chrétien ferait-il mal en arrosant, avec l'esprit de foi nécessaire, tous les objets qu'il possède ou qui servent à son usage, pour étendre par ce moyen, la prière de l'Église sur tout ce qui l'entoure ? L'Église elle-même nous en donne l'exemple en se servant de l'eau bénite dans mille occasions : elle en arrose les nouvelles maisons des vivants et la tombe du trépassé, les vêtements ecclésiastiques et en général tous les différents objets qui sont bénits pour l'usage des fidèles; — elle fait tout cela pour obtenir les grâces qu'elle mentionne dans les prières dont elle se sert en bénissant l'eau.
Fête de la Pentecôte
Simon prit la parole en demandant pourquoi les Juifs célébraient aussi la fête de la Pentecôte, laquelle, pensait-il, ne concernait que les chrétiens, puisqu'elle rappelait la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres.
Le Curé. Les Juifs solennisent ce jour en mémoire du Décalogue donné par Dieu à Moïse, sur le mont Sinaï. Cela arriva cinquante jours après qu'ils eurent mangé l'Agneau pascal avant de quitter l'Égypte. Ceci n'était qu'une figure de ce qui devait avoir lieu sous la nouvelle alliance. A pareil jour, c'est-à-dire, cinquante jours après la Pâque nouvelle, le Saint-Esprit descendit, pour fortifier les Apôtres avant la prédication de la loi nouvelle, savoir la doctrine de Jésus-Christ, et conférer à tous les chrétiens la lumière et la grâce nécessaires pour croire en Jésus-Christ et vivre selon ses préceptes. De même que la loi ancienne fut donnée à Moïse, au milieu des éclairs et du bruit du tonnerre, de même le Saint Esprit descendit sur les Apôtres au bruit d'un vent impétueux et sous la forme de langues de feu, et enfin de même que Moïse proclama la volonté de Dieu en présence du peuple rassemblé, de même aussi le Prince des Apôtres, saint Pierre, fit connaître au peuple Juif, rassemblé pour la fête de la Pentecôte, la doctrine de l'Évangile.
La Pentecôte est aussi la naissance de l`Église
Pour prévenir une question que, sans doute, vous alliez me faire, je vous dirai que le mot de Pentecôte est d'origine grecque et signifie le cinquantième, c'est-à-dire le cinquantième jour après Pâques.
Note : Le jour de la Pentecôte, le Saint-Esprit descendit sous la forme de langues de feu et, au baptême de Jésus-Christ, il apparut sous la forme d'une colombe. La colombe a été adoptée pour représenter le Saint-Esprit. Il n'est pas rare, dans les anciens monument, de voir sept colombes, pour rappeler les sept dons du Saint-Esprit. Parfois aussi les artistes lui donnaient une forme humaine, portant le livre de la Sagesse, pour exprimer par là que c'est la troisième personne de l'adorable Trinité qui a enseigné aux Apôtres toute vérité, ou bien le volume de l'ancien Testament, pour indiquer que les Prophètes ont écrit sous son inspiration.
Simon. Nous vous remercions de cette explication, que j'allais demander effectivement. Soyez maintenant assez bon pour nous dire un mot de la fête de la sainte Trinité.
Le Curé. Pour ne rien omettre, parlons d'abord des Quatre-Temps, puisque nous rencontrons ces jours de pénitence dans la semaine qui suit la Pentecôte. — Déjà les Juifs devaient jeûner plusieurs fois pendant l'année, comme nous lisons dans le prophète Zacharie (8. 19) : « Le jeûne du quatrième, du cinquième, du septième et du dixième mois sera changé pour la maison de Juda en des jours de joie et d'allégresse, en des jours de brillantes solennités.» Or, il n'est pas croyable que les Apôtres aient fait de ces prescriptions un devoir pour les chrétiens, puisqu'ils dispensaient ordinairement les nouveaux convertis de l'observance de la loi de Moïse pour autant qu'elle se rapportait aux cérémonies du culte : toutefois il est à présumer que les premiers successeurs des Apôtres ont reconnu la convenance en même temps que l'utilité salutaire de ces jeûnes, en les rendant aussi obligatoires pour les chrétiens. Le pape saint Léon, qui vivait vers l'an 440 après Jésus-Christ, les dit d'origine judaïque, et également introduits parmi les chrétiens. C'est ainsi que nous observons encore aujourd'hui les Quatre-Temps ou le jeûne des quatre saisons. Comme nous voici encore revenus au jeûne, je dois porter votre attention sur une chose à laquelle vous n'avez peut-être jamais fait attention, savoir que, depuis Pâques jusqu'à la veille de la Pentecôte, l'Église n'a prescrit aucun jeûne. Elle ne l'a pas fait, parce que ces sept semaines sont un temps de réjouissance. Ainsi, de même qu'elle juge convenable de prescrire le jeûne pendant tout le temps de carême, qui est un temps de deuil, de même aussi elle s'en abstient pendant les jours qui sont destinés à l'allégresse religieuse et au souvenir du Sauveur ressuscité et conversant avec ses disciples, et en cela elle ne fait que diriger sa conduite d'après ce que le divin Maître répondit aux disciples de saint Jean-Baptiste, lorsque ceux ci lui demandèrent, pourquoi les Apôtres n'observaient pas de jeûne : « Les enfants de l'Époux ne peuvent gémir pendant que l'Époux est avec eux ; des jours viendront où l'Époux leur sera ôté, et alors (savoir après son Ascension) ils jeûneront. » (Mathieu 9- 15). Telle fut la pratique de la sainte Église dès les temps les plus reculés , et encore aujourd'hui les jeûnes prescrits la veille de la Pentecôte et aux Quatre-Temps de la semaine suivante, sont les premiers que nous rencontrions après Pâques. — Ainsi donc, mes amis, nous sommes arrivés maintenant à la fin du temps pascal, que clôture le samedi après la Pentecôte.
Simon. J'avais cru que le temps pascal signifiait le dernier jour auquel on peut faire ses pâques, c'est-à-dire recevoir la communion pascale.
Le Curé. Je vais aussi vous en dire un mot d'explication. La communion pascale se faisait autrefois en un seul et même jour par tous les chrétiens, et cela au jour de l'institution de la sainte Eucharistie, c'est-à-dire le Jeudi-Saint. Les fidèles voulaient par là célébrer la mémoire du grand amour du divin Maître, et se réunir autour de la sainte Table, à l'imitation des Apôtres qui reçurent en ce jour le corps du Sauveur pour la première fois. Mais le nombre des chrétiens se multipliant, il devint bientôt impossible de distribuer la sainte communion à tous en un seul jour, surtout pour la raison que les confesseurs n'auraient pu suffire à entendre toutes les confessions en si peu de temps. Force fut donc à l'Église de prolonger le temps destiné à l'accomplissement de ce que tous regardaient déjà comme un devoir, de considérer comme accompli le Jeudi-Saint, ce devoir rempli dans le temps assigné par elle. C'est ce temps désigné pour la communion pascale que l'on de nomme ordinairement temps pascal. Mais, à proprement parler, le temps pascal n'est pas le temps pendant lequel on peut accomplir le devoir pascal, mais on appelle ainsi les cinquante jours depuis Pâques jusqu'à la Pentecôte, auxquels il faut encore ajouter l'octave de cette dernière fête, de sorte que le dimanche de la sainte Trinité est le premier jour qui n'appartienne plus au temps pascal. Je vous dirai encore, mes amis, qu'il fut longtemps inutile d'engager les fidèles à communier, tellement nos pères dans la foi étaient zélés pour se fortifier de la nourriture céleste. Mais ce premier zèle étant venu à se ralentir, le Concile général qui se tint dans l'église de saint Jean de Latran, à Rome, en 1215, ordonna à tous les chrétiens parvenus à l'âge de discrétion, de communier au moins une fois chaque année, à Pâques.
Les sept dons du Saint Esprit
Fête de la Sainte Trinité
Le trèfle irlandais
Simon. Pourrons-nous passer maintenant à la fête de la sainte-trinité? — Et, dans ce cas, ayez la bonté de nous dire pourquoi on la célèbre le dimanche après la Pentecôte.
Le Curé. Parce que le mystère de la très-sainte Trinité est la doctrine fondamentale de la religion chrétienne, qui a été annoncée par les Apôtres, et crue par les peuples, selon les paroles du Sauveur : Allez et enseignez toutes les nations, et baptisez-les au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. (Mathieu. 28. 19.) Cette fête nous exhorte donc à croire fermement toutes les vérités qui nous ont été proposées par toutes les autres fêtes de l'année que celle-ci résume, en quelque sorte, et à ne pas rougir de confesser cette croyance devant le monde. L'Avent nous rappelait, vous vous en souvenez, la création de l'homme, par conséquent aussi le Créateur, Dieu le Père. A partir du temps de Noël jusqu'à l'Assomption, nous nous sommes occupés à méditer le Fils de Dieu fait homme, et la Pentecôte portait notre souvenir sur la descente du Saint-Esprit. Or, comme ces trois Personnes ne font qu'un seul Dieu, nous les réunissons, pour ainsi parler, en ce jour consacré à la sainte Trinité, afin de rendre nos humbles hommages et nos adorations à la Majesté divine, c'est-à-dire aux trois Personnes divines à la fois. Ajoutez encore que cette fête est comme un mémorial des bienfaits dont nous sommes redevables à ces personnes divines, bienfaits qui nous ont été rappelés par les solennités dont nous avons parlé jusqu'ici plus amplement , savoir notre création, notre rédemption et notre sanctification. Pour tous ces bienfaits Dieu a droit à nos actions de grâces, qu'il convient de lui rendre surtout en ce jour. Mais ce qui nous a donné le droit à jouir de toutes ces faveurs, c'est notre Baptême, qui nous a été administré au nom de la sainte Trinité. Ayant donc entendu dans le courant de l'année tout ce que Dieu a fait pour nous, il convient bien certainement de nous rappeler en ce jour, d'une manière solennelle, les promesses que nous avons faites dans le saint Baptême, en formant de nouveau le ferme propos de remplir, avec une fidélité de plus en plus grande, les devoirs que nous nous sommes engagés de remplir en devenant chrétiens. C'est ce que l'on appelle Renouveler les vœux du Baptême
Note : Au moyen-âge, on représentait la sainte Trinité comme sait : Dieu le Père tenant devant lui le Fils en croix et le Saint-Esprit, sous la forme d'une colombe, planant au haut de la croix, — ou bien : par trois cercles égaux enlacés les uns dans les autres, — ou bien encore on enveloppait d'un même manteau les trois personnes divines pour représenter l'unité, et on donnait pour attribut au Père la boule du monde, au Fils la croix et au Saint-Esprit, représenté par la colombe, le livre de la Sagesse. Dans les siècles de foi, le symbole de la Trinité était imprimé au plan général aussi bien qu'aux différentes parties des édifices religieux. Le nombre trois s'y retrouve de préférence dans les absides, les fenêtres, les nefs, etc. A côté de la forme de la croix, qui exprime le mystère de la Rédemption, nos pères représentaient de préférence le mystère fondamental d'un Dieu en trois personnes, de sorte que la majesté du Très-Haut semblait remplir l'édifice. Majestas Domini implevit domum- L'Église de Paray-le-Monial en est un exemple frappant. Partout cet édifice présente le nombre 3. Cette église, en forme de croix, est divisée en trois nefs, chaque nef est composée de trois travées, chaque travée a une arcade formée de trois arcs et surmontée de trois fenêtres, etc. A l'extérieur nous voyons trois clochers qui proclament la même pensée de foi, renfermée dans le nombre 3 si souvent répété.
La Sainte Trinité en cercle au Moyen-Âge
La Sainte Trinité
Simon. D'après votre explication et l'importance évidente de la fête, il est étrange qu’elle soit célébrée d'une manière si peu solennelle.
Le Curé. Je répondrai à votre observation par les paroles du pape Alexandre III, qui s'exprime ainsi: « Il n'y a pas de jour consacré spécialement à la sainte Trinité, parce que nous la célébrons tous les dimanches, voire même tous les jours sans exception. » Dans l'ancien Ordo romain, il est dit : « L'Église romaine n'a pas coutume de fêter ce jour d'une manière solennelle , parce que tous les jours on prie le Gloria Patri et autres prières en l'honneur de la sainte Trinité. » Effectivement l'Église a, de tous temps, porté la pensée des chrétiens sur ce grand mystère avec une prédilection visible. La pieuse louange : « Gloire soit au Père, et au Fils et au Saint-Esprit, » que nous employons si fréquemment, a son origine dans les temps les plus reculés de l'Église, puisqu'on la retrouve déjà dans les écrits des saints Basile, Athanase, et autres Pères de l'Église; oui, même déjà dans les épîtres de saint Paul. Ce fut vraisemblablement le Concile tenu à Nicée, en 325, qui y ajouta les mots: « Ainsi qu'il était au commencement, maintenant et par tous les siècles des siècles. » Le saint Synode fit cette addition en vue de détruire par-là l'hérésie des Ariens, qui enseignaient que le Fils de Dieu n'était pas éternel, mais engendré dans le temps par Dieu le Père. — A cela j'ajouterai encore que, chaque fois que nous faisons le signe de la croix, nous prononçons les paroles : « Au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. »
C'est par ce signe et par le nom du Dieu trois fois saint que nous commençons et que nous finissons la journée, la prière, le travail et le repos. Le prêtre ne prononce pas seulement ces mots en administrant le Baptême, comme l'a ordonné notre divin Sauveur, mais il en fait usage en administrant presque tous les autres Sacrements; tout ce que l'Église bénit se fait au nom des trois personnes divines.
La Sainte Trinité
Disons encore que chaque dimanche de l'année est consacré particulièrement à l'honneur et à l'adoration de la très-sainte Trinité, car le jour du Seigneur est le jour commémoratif de la création du monde, le jour auquel Dieu le Fils sortit glorieux du tombeau, et auquel enfin le Saint-Esprit descendit visiblement sur les Apôtres. Ainsi donc, toute la vie du chrétien est pleine de souvenirs qui nous rappellent le grand mystère d'un Dieu en trois personnes, et voilà aussi pourquoi, dans les temps anciens, on ne lui consacrait aucun jour de fête particulier. Mais comme, vers le neuvième siècle, il se manifesta une dévotion toute particulière envers la divine Trinité, on lui consacra un jour spécial d'abord dans quelques endroits, usage qui se propagea tellement dans le monde catholique que l'Église jugea à propos de le sanctionner en le rendant général. Toutefois elle n'en fit pas un jour de grande solennité extérieure pour les mêmes raisons qui l'avaient portée à ne pas le célébrer du tout.
Le Dimanche
Simon. Il est heureux que vous ayez parlé du dimanche. Cette occasion nous vaudra sans doute quelques observations utiles. Pourquoi, par exemple, sanctifions-nous le dimanche et non le Sabbat, comme Dieu le prescrivait dans la loi ancienne.
Le Curé. Comme la Résurrection de Notre Seigneur avait eu lieu, selon l'Évangile (Marc, 16. 2.), le jour qui suivait le Sabbat, donc le dimanche, ce jour fut regardé par les premiers chrétiens comme particulièrement saint. Inspirés par l'Esprit-Saint, qui leur avait été donné et qui dirigeait leur conduite, ils transférèrent en conséquence la solennité du Sabbat au dimanche, afin de mieux glorifier la résurrection du Rédempteur et d'affirmer ce grand mystère de notre sainte religion dans la mémoire des fidèles. C'est aussi pourquoi on nomme le dimanche jour du Seigneur ; car il est consacré d'une manière particulière au souvenir et à l'adoration du divin Sauveur. Comme je vous le disais encore, il n'y a qu'un instant, ce fut un dimanche que le Saint-Esprit descendit sur les Apôtres, et mit, pour ainsi parler, la dernière main à la sanctification des hommes : car, dès le grand jour de la Pentecôte, l'Église était fondée. — Il est vrai que nous devons rapporter à Dieu tous les jours sans exception ; mais devant penser à servir Dieu d'une manière spéciale un jour dans la semaine, pourrait-on en trouver un qui fût plus propre que celui qui est illustré par des souvenirs si beaux et si importants ? Et quel jour pourrions-nous prier avec plus de zèle et une ferveur plus grande qu'en celui où Dieu a donné aux hommes les plus beaux dons de sa grâce.
Le Signe de Croix
Simon. Vous parliez tantôt du signe de la croix ; c'est donc en l'honneur de la sainte Trinité que nous le faisons?
Le Curé. Nous avons encore d'autres raisons de le faire. Avant tout veuillez distinguer entre les paroles que nous prononçons en le faisant et le signe en lui-même. Ces paroles servent à exprimer notre foi au grand mystère d'un Dieu en trois personnes, et à la confesser d'une manière franche et publique. Or, la doctrine de la sainte Trinité est l'abrégé de toute la doctrine chrétienne, que nous confessons de la même manière chaque fois que nous faisons le signe de la croix. Ainsi nous commençons nos prières ou notre travail en disant : « Au nom du Père, etc. ; » c'est une déclaration solennelle par laquelle nous exprimons que nous voulons tout faire au nom et au service de la sainte Trinité, afin d'obtenir d'elle la bénédiction, la grâce et le succès dans nos entreprises.
Simon. Maintenant que nous comprenons le sens de ces paroles, veuillez nous dire quelque chose du signe que nous faisons en les prononçant.
Le Curé. Le signe de la croix proprement dit nous sert : 1° Pour exprimer en face du monde que nous sommes chrétiens, c'est-à-dire que nous croyons que Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, nous a rachetés par la mort de la croix, selon qu'il est écrit : « C'est Jésus-Christ qui a porté en son corps nos péchés sur la croix. » (1 Pierre 2. 24.) ; 2° Pour nous faire souvenir que nous ne devons jamais rougir du Fils de Dieu crucifié, mais, qu'au contraire, nous devons le confesser résolument devant amis et ennemis, avec les mêmes sentiments qui faisaient dire à saint Paul : « Loin de nous, de nous glorifier en autre chose qu'en la croix de Notre- Seigneur Jésus Christ ! (Galates 6.14.), de laquelle nous est venu le salut, la vie et la résurrection. C'est par cette profession de foi que nous nous distinguons de tous les ennemis du Seigneur 3° Pour exprimer le désir et la prière d'être préservés, par les mérites de Jésus crucifié, de tous les malheurs corporels et spirituels, et obtenir, par ces mêmes mérites de la mort et passion du divin Maître, la réussite dans nos entreprises et nos travaux, et en recueillir ainsi des mérites pour notre âme. 4° Nous témoignons encore, par ce moyen, notre reconnaissance envers Dieu de ce qu'il nous a sauvés par sa croix, et nous nous excitons à persévérer dans ces mêmes sentiments de gratitude. En résumé, nous confessons notre foi de deux manières en faisant le signe de la croix : les paroles que nous prononçons témoignent de notre croyance à la sainte Trinité et nous manifestons par le signe lui-même, notre assentiment aux mystères de l'Incarnation et de la Rédemption.
Simon. Cet usage de se signer est sans doute bien ancien dans l'Église.
Le Curé. Oui, mes amis, et saint Jérôme va jusqu'à soutenir que Jésus-Christ lui-même a employé ce signe vénérable lorsqu'il bénit ses Apôtres (Luc. 24. 50.), et leur ordonna de baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Il est donc certain qu'il faut chercher son origine dans les premiers temps de l'Église. Saint Cyprien s'écrie : « Ç'est vous, Seigneur, qui nous avez donné le signe de la croix et l'exemple de la mortification. » Ce que nous venons de dire se rapporte au signe proprement dit; car l'usage de prononcer simultanément les mots : Au nom du Père, etc., provient apparemment du troisième siècle de notre ère.
Sainte Foy ( d`Agen) – vierge et martyre en Gaule romaine vers 287 Ap J.C.
Vers l'an 287, sainte Foy scella de son sang la foi chrétienne, avec plusieurs de ses compagnes. En ces occasions, les chrétiens ne manquaient pas de rapporter scrupuleusement par écrit tout ce qui se passait, afin de s'édifier et de s'affermir mutuellement dans la foi par le récit des exemples d'héroïsme donnés par les saints martyrs. Or, dans ces rapports ou actes qui parlent du martyre de sainte Foy, il est mentionné formellement qu'avant de se livrer au bourreau la Sainte fit le signe de la croix sur le front, la bouche et la poitrine, donc tout-à-fait comme nous le pratiquons encore avant la lecture de l'Évangile. Tertullien, qui vivait dans le deuxième siècle, écrit, en parlant des chrétiens de son temps: « Chaque fois que nous nous mettons en mouvement, que nous rentrons ou sortons, que nous nous habillons, que nous nous baignons, que nous nous mettons à table, nous marquons notre front du signe de la croix.» La raison pour laquelle les chrétiens faisaient à chaque occasion le signe de la croix, était le grand nombre de superstitions pratiquées par les païens dont ils tâchaient de se distinguer le plus sévèrement possible. Saint Cyrille, qui était évêque de Jérusalem de l'an 350 à 386, instruisant ses catéchumènes, leur disait entre autres : « Marquez votre front du signe de la croix, afin que les démons ( anges déchus) soient remplis de crainte à la vue de ce signe vraiment royal et qu'ils prennent la fuite. Faites ce signe avant de boire et de manger, avant de vous asseoir ou de vous coucher, en vous levant, en parlant, en marchant, en un mot, à toute occasion. Car celui qui a été crucifié ici-bas est maintenant dans le ciel. Si le Crucifié était demeuré dans le tombeau, nous pourrions en avoir honte et en rougir; mais comme il est ressuscité, nous ne pouvons avoir aucune raison de rougir du signe de sa victoire.» C'est par ces mots que saint Jérôme (né en 331) exhorte une vierge chrétienne, dans une de ses lettres, à faire le signe de la croix à chaque chose qu'elle entreprend, et saint Augustin dit des chrétiens de son temps: « Nous portons sur notre front la croix à laquelle Jésus-Christ a été crucifié.»
Simon. Je plains les malheureux qui méprisent cette ancienne coutume chrétienne, ou qui l'omettent par respect humain.
Le Curé. Et vous avez raison de le faire : car ces paroles que l'Apôtre des Gentils adressait aux habitants de Philippes (3. 18.), les concernent particulièrement : Il y a plusieurs dont je vous ai souvent entendu parler et dont je vous parle encore avec larmes, qui se conduisent en ennemis de la croix de Jésus-Christ, dont la fin sera la damnation. Car, si déjà par l'immoralité de leur vie, ils ne se sont montrés les ennemis de la croix, pourquoi la redoutent-ils? Ou bien ont-ils honte de passer pour chrétiens, et dans ce cas, de quelle ingratitude ne se rendent-ils pas coupables envers le Sauveur qui a voulu souffrir pour nous tous les genres d'affronts et d'ignominies ! Quelle indignité de rougir ainsi de son Rédempteur et de son plus grand bienfaiteur, tandis qu'un sujet ou un serviteur ne rougirait pas de porter les livrées de son roi ou de son maître!
Quelle folie encore de rougir de sa foi qui n'est même plus méprisée comme aux temps des persécutions, mais qui est l'objet de l'amour de plusieurs millions d'âmes ! Oui, il est bien dangereux pour l'éternité d'avoir honte de confesser Jésus-Christ, qui nous a dit: Je rougirai devant mon Père qui est dans les deux et devant les anges du ciel de celui qui aura rougi de moi devant les hommes (Luc. 12).
je me contenterai de vous rapporter de mémoire quelques paroles prononcées par saint Jean Chrysostôme, dans un de ses sermons. Je vous ai déjà fait remarquer que ce saint évêque vivait dans le quatrième siècle après Jésus- Christ. Il dit donc : « Que personne ne rougisse du signe vénérable de notre salut ; mais considérons la croix de Jésus-Christ comme une couronne précieuse; c'est par elle que tout ce qui nous concerne, reçoit son accomplissement. S'agit-il de notre régénération : la croix y est; mangeons-nous le pain mystérieux, est-il question de l'ordination des prêtres, en un mot, partout je retrouve le signe de la victoire. C'est pourquoi nous en marquons nos maisons, nos parois, nos fenêtres et nos fronts. N'est-ce pas là le signe de notre Rédemption, de notre commun affranchissement et de la miséricorde du Seigneur qui, semblable à un agneau, se laissa conduire à la boucherie. C'est pourquoi, chaque fois que vous faites le signe de la croix , pensez à ce qu'il signifie, à ce que signifie la croix, et appliquez-vous à réprimer en vous la colère et toutes vos mauvaises inclinations, et ayez grande confiance. Car il ne convient pas de faire ce signe sacré à la légère. En le faisant avec ferveur et confiance, vous vous rendrez plus forts qu'aucun des ennemis impurs qui voient dans ce signe l'épée qui leur a donné la mort. Si déjà nous regardons avec horreur l'endroit où un criminel a été mis à mort, vous pouvez en conclure avec quelle horreur les esprits infernaux regardent l'arme avec laquelle Jésus-Christ a abattu leur puissance et froissé la tête du dragon. Gardez-vous donc de jamais rougir de ce signe sublime, afin que Jésus ne soit forcé de faire de même envers vous, lorsqu'il viendra un jour, rempli de gloire, portant, comme trophée de sa victoire, la croix plus brillante que les rayons du soleil. Car alors la croix apparaîtra réellement, et sa vue servira, dans tout le monde, de témoignage en faveur de la cause de Dieu, et elle proclamera les bontés infinies du Créateur. Dès les temps de nos aïeux et jusqu'à nos jours, ce signe a ouvert les portes fermées, rendu inoffensives la nourriture et la boisson, guéri de la morsure des animaux venimeux. Faut-il s'en étonner? S'il a pu briser les portes de l'enfer, ouvrir l'entrée du ciel, faciliter le chemin du Paradis et briser les chaînes par lesquelles Satan nous tenait attachés, pourquoi la force d'anéantir les poisons les plus dangereux et les morsures les plus mortelles lui aurait-elle manqué? Implantez donc profondément dans votre âme le souvenir de la croix. C'est elle qui a sauvé et converti le monde, détruit l'erreur, introduit la vérité, transformé la terre en ciel et les hommes en anges. Par la croix, les démons ne sont plus à redouter ; il faut plutôt s'en moquer. Par la croix, la mort a cessé d'être la mort; elle n'est plus maintenant qu'un court et léger sommeil. Par la croix, tout ce qui s'opposait à nous a été atterré. Si donc quelqu'un vous demande : « Adorez-vous le Crucifié? » répondez-lui d'une voix joyeuse et l'œil serein : « Je l'adore et je veux l'adorer à jamais! »
Que s'il vient à se moquer de votre réponse, déplorez devant Dieu son aveugle ment, et remerciez Dieu, de votre côté, de tous les bienfaits que vous connaissez par sa révélation. Telles sont à peu près les paroles du saint Père de l'Église; je vous conjure de les prendre à coeur, de croire à la vertu de ce signe salutaire, et de ne jamais l'omettre par respect humain.
Simon. Je crois pouvoir dire, au nom de tous, que nous vous en faisons la promesse avec bonheur.
Simon. Pourquoi fait-on trois croix avant la lecture de l'Évangile.?
Le Curé. Nous formons une croix avec le pouce d'abord sur le front. Nous faisons entendre par là que nous sommes prêts à confesser la doctrine du saint Évangile, selon l'exemple de l'Apôtre, qui disait de lui-même (Romain 1.16.): Je ne rougis point de l'Évangile. Nous formons ensuite la croix sur la bouche, pour exprimer que nous voulons aussi confesser, par nos paroles, la doctrine de Jésus-Christ, chaque fois que notre devoir le demandera, et la défendre au besoin, selon ce que dit le Sauveur : Quiconque m'avouera devant les hommes, moi aussi je l'avouerai devant mon Père. (Matthieu 10. 52.) Enfin nous faisons la croix sur la poitrine, afin d'indiquer que nous devons être intérieurement tels que le demande saint Paul, lorsqu'il dit : Ayez les mêmes sentiments que Jésus-Christ. (Philippiens 2. 5.). Nous voulons encore par-là prier Dieu de nous donner, par la force de la sainte croix, la grâce de comprendre l'Évangile et de connaître les devoirs qu'il nous prescrit, de le professer de bouche et de l'aimer du cœur; enfin, de cette manière, nous offrons encore à Dieu nos pensées, nos paroles, nos désirs et nos actions, pour qu'elles deviennent de plus en plus conformes aux exemples que nous a laissés le Fils de Dieu crucifié.
Simon. Les prêtres font encore le signe de la croix sur le peuple à la fin de la messe et en terminant le sermon?
Le Curé. Oui, afin que Dieu daigne répandre sur les chrétiens réunis dans le lieu saint sa bénédiction et les grâces qu'il a acquises pour nous à l'arbre de la croix, comme dit saint Paul : Béni soit Dieu, le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis par toutes les grâces spirituelles et les faveurs célestes par le Christ. Il est dit déjà, dans les actes de plusieurs Conciles, qui se sont tenus vers l'an 500 après Jésus-Christ, qu'il ne faut pas laisser sortir le peuple de l'église sans lui donner la bénédiction, et ces mêmes Conciles recommandent, en même temps aux fidèles de ne pas quitter la maison de Dieu avant de l'avoir obtenue.
Comme les questions tarissaient, le curé reprit la parole après une courte pause : Nous avons parlé, leur dit-il, du signe de la croix et de la bénédiction ; il convient maintenant que je vous la donne au nom du Seigneur, avant de nous séparer. Donc : que la bénédiction du Dieu tout-puissant, du Père, du Fils et du Saint-Esprit descende sur vous et y demeure à jamais ! » Ayant fait le signe de la croix sur la foule prosternée, tout le monde reprit le chemin de son logis en silence et visiblement ému des choses édifiantes qu'on venait d'entendre.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN SEPTIÈME.
LA FÊTE-DIEU.
Résumé : Fête-Dieu. Son nom. Procession du Saint-Sacrement. Origine de la fête et de la procession. But et explication de la procession du Saint Sacrement. Respect humain. Différentes manières de vénérer le Saint-Sacrement. Office
Procession de la Fête-Dieu dans la campagne
Simon. Monsieur le curé, vous allez donc répondre aux questions que nous voulons vous faire sur la Fête-Dieu.
Le Curé. Effectivement, nous parlerons aujourd'hui de cette belle fête; mais vous permettrez que nous intervertissions les rôles. C'est moi qui ferai les questions et vous répondrez.
Simon. Oui, mais si nous venons à trébucher dans nos réponses, vous voudrez bien alors nous tirer d'affaire en répondant pour nous.
Le Curé. Le sujet de l'entretien d'aujourd'hui vous est connu, de sorte qu'il vous sera facile de me satisfaire. Vous pourriez, par exemple, me donner de suite la signification du nom de Fête-Dieu.
Simon. Comme c'est la Fête du Saint-Sacrement et que Jésus-Christ lui-même est renfermé tout entier comme Dieu et comme Homme dans la sainte Hostie, il me parait naturel qu'on ait donné le nom de Fête de Dieu ou Fête-Dieu à ce grand jour.
Le Curé. Mais votre explication est excellente. Oui, l'Église a établi cette fête solennelle avec octave, pour rappeler aux chrétiens que le divin Sauveur habite au milieu de nous comme Dieu et comme Homme, réellement et substantiellement présent, sous les espèces du pain et du vin, dans l'auguste Sacrement de l'autel, comme aussi pour le remercier de ce que son amour infini l'a porté à nous gratifier de ce plus grand de tous les bienfaits et pour l'adorer avec plus de dévotion et de respect.
Procession de la Fête-Dieu ( Corpus Christi dans les pays anglophones)
Simon. Vraiment, nous ne pourrons jamais témoigner suffisamment notre reconnaissance pour une si grande grâce; car, comme vous le disiez naguère dans l'un de vos sermons, le Sauveur nous a aimés à tel point qu'il a voulu mourir pour nous, mais son amour l'a porté bien plus loin encore, puisqu'il n'a pu se résoudre à se séparer de nous, même après sa mort sur la croix : il veut encore demeurer continuellement au milieu de ses enfants et réaliser par la sainte Eucharistie ce qu'il disait à ses disciples : Voilà que je suis avec vous , tous les jours , jusqu'à la fin du monde (Matthieu28.20).
Le Curé. C'est aussi la raison pour laquelle l'Église n'a rien négligé afin de rehausser la splendeur de cette fête.
Simon. Surtout en établissant la procession solennelle du Saint-Sacrement.
Le Curé. Tout ce qui se fait à l'église en ce jour, porte cette empreinte; mais, comme vous le dites très-bien, la partie la plus éclatante de la fête, c'est la grande Procession.
Simon. Dont vous voudrez bien nous donner l'explication. Pourquoi, par exemple, une procession et une procession si solennelle en ce jour?
Le Curé. En voici les raisons principales : Le Sauveur est porté en triomphe avec grand appareil.
1° Afin de nous donner occasion de manifester notre foi en ce divin Sacrement et de témoigner ouvertement, même devant les ennemis de notre foi, que nous sommes prêts à la confesser avec joie et sans respect humain.
2° Nous voulons témoigner par là au Fils de Dieu nos adorations d'une manière publique et lui faire amende honorable ou réparation des abus que l'on a faits de ce divin Sacrement, tant du côté des infidèles et des hérétiques que de la part des mauvais catholiques. Nous voudrions rendre non avenus tant d'outrages dont la divine Eucharistie a été l'objet par les communions indignes, inutiles, faites avec peu de préparation ; par les messes mal célébrées ou mal entendues, par les blasphèmes, par les irrévérences commises à l'église, telles sont les causeries dans le Lieu saint, le luxe, la vanité et le scandale des nudités ou autres profanations.
3° Nous voulons, par cette pompe magnifique, rappeler la dignité et la sublimité de ce saint Sacrifice et nous encourager mutuellement à célébrer ses grandeurs.
4° Autant que possible, nous voulons remercier le Sauveur de l'amour inénarrable qu'il nous a montré en instituant ce saint Sacrement et des bienfaits dont il nous comble dans la sainte communion. Ce souvenir de l'amour d'un Dieu envers nous est bien propre à nous exciter à la réception fréquente de Jésus-Christ au banquet sacré.
5° Nous voulons, en quelque sorte, transformer nos rues et nos places publiques en autant de temples consacrés à Dieu et sanctifier nos habitations et nos campagnes par la présence du Saint des Saints qu'on transporte en ces lieux et le supplier de bénir la ville, les champs par lesquels il passe et les hommes qui les habitent.
6° Cette marche triomphale est enfin destinée à nous consoler et à nous réjouir spirituellement et à nous donner un avant-goût de la vie éternelle où les justes, dit l'Écriture, suivent l'Agneau partout où il va. (Apocalypse 14. 4).
La Sainte Eucharistie
Simon. Cette procession est-elle ancienne?
Le Curé. Elle se fait que depuis environ six cents ans. Mais, comprenez-moi bien, je dis pas que l'on a commencé seulement alors à adorer le Saint-Sacrement et à lui faire honneur extérieurement, car vous savez que, dès les temps les plus reculés, on célébrait la mémoire de son institution le Jeudi-Saint. Or, vous avez entendu, lorsque nous nous sommes entretenus de ce saint jour, combien sont nombreuses les solennités qui se font à l'église : elles l'étaient plus encore dans les temps plus reculés : les pénitents publics étaient réconciliés, on procédait à la bénédiction des saintes huiles et du saint chrême. Et puis nous sommes si préoccupés de la passion et de la mort du Sauveur qu'il nous serait impossible de prêter toute notre attention à la solennité du Saint-Sacrement. Outre ces considérations, d'autres circonstances contribuèrent à faire choisir un autre jour auquel les chrétiens pussent s'adonner tout entiers à l'adoration du mystère de la sainte Eucharistie.
Vers l'an 1250, vivait à Liège une sainte religieuse nommée Julienne. Dieu qui choisit, selon ses desseins impénétrables, les instruments pour l'exécution de ses plans, qu'il cache aux yeux des sages et qu'il dévoile aux petits et aux simples, inspira à la pieuse Julienne la pensée de demander aux chefs de l'Église la permission de consacrer un jour de l'année spécialement à l'adoration du Saint-Sacrement de l'Autel. Elle s'ouvrit d'abord à l'Évêque de Liège et à d'autres membres du clergé de cette ville.
La Fête-Dieu en Alsace
Après avoir examiné sa proposition on y accéda, et la Fête-Dieu fut en effet célébrée pour la première fois à Liège dans l'église de saint Martin (en 1246), d'où cet usage se répandit dans toutes les villes des Pays-Bas. L'un des prêtres consultés à Liège par la sainte hospitalière devint pape sous le nom d'Urbain IV; et son intention était de rendre générale la fête du Saint-Sacrement. Si même la mort fit rentrer dans l'ombre le projet du vénérable Pontife, on y revint plus tard, et le concile de Vienne, en France, tenu en 1311, sous le pontificat de Clément V, décréta que cette solennité serait célébrée par tout le monde catholique. Les papes qui suivirent, favorisèrent la célébration de cette fête en accordant différentes indulgences et en encourageant les fidèles à la fêter d'une manière solennelle.
La Fête-Dieu
Thomas. Pourquoi une procession précisément en ce jour?
Le Curé. La procession est cependant en rapport avec la fêle, en tant qu'elle est un moyen de témoigner notre respect et de rendre nos adorations au mystère adorable de l'autel.
Thomas. Oui, mais il est aussi facile de témoigner notre respect et nos sentiments d'adoration à l'église.
Le Curé. C'est aussi ce que vous devez faire; mais l'un n'exclut pas l'autre, et cela n'empêche nullement de le faire une fois publiquement et d'une manière plus solennelle. Ayez du respect pour un homme et témoignez-le lui de toutes vos forces; néanmoins, lorsqu'une occasion vient à se présenter de lui témoigner publiquement ce respect, par exemple, en prenant part à une ovation qui se fait en son honneur, vous vous garderez bien de blâmer celui qui douterait de la sincérité de vos sentiments. Celui qui honore véritablement Jésus-Christ, n'ira pas cacher ses sentiments dans son intérieur, mais il se trouvera heureux de pouvoir trouver occasion d'en donner des preuves à l'extérieur.
Nous devons aussi montrer que nous sommes prêts à confesser notre foi devant ceux qui ne croient pas ou qui sont attachés à l'erreur, nous devons faire voir que nous ne craignons pas de nous exposer à leurs sarcasmes et de mériter leur dédain, résolus que nous sommes de souffrir toutes ces avanies par amour pour Jésus-Christ. Semblables aux apôtres et aux premiers chrétiens, nous devons confesser Jésus-Christ devant les hommes, sans nous laisser induire en erreur par le mépris et la contradiction, si nous voulons que le Sauveur, à son tour, nous reconnaisse un jour pour ses disciples.
Le mystère de l'autel, au contraire, outre qu'il renferme la doctrine distinctive de l'Église, la plus combattue et la plus souvent niée par tous les ennemis de la religion, est en quelque sorte le centre de toute la foi catholique. C'est pourquoi le cortège solennel que nous faisons au Saint-Sacrement, est plus propre que quoi que ce soit à glorifier ce mystère et à donner témoignage de notre foi personnelle en même temps que de celle de l'Église toute entière. Aussi tout s'y rapporte-t-il dans la procession de la Fête-Dieu. Le temple cesse d'être temple, toute la terre y est transformée; ses portes s'ouvrent et le prince de la paix s'avance escorté de la multitude de ses fidèles chantant des cantiques de jubilation. Comme autrefois à Jérusalem, les chemins qu'il parcourt, sont jonchés de branches et de fleurs, et, de même qu'il passa sur la terre en faisant le bien, de même il répand encore la plénitude de ses bénédictions partout où il passe : Cela est exprimé par la bénédiction qui se donne avec le Saint-Sacrement aux différents autels ou reposoirs qui ont été construits pour cette fin. Son peuple de prédilection l'accompagne plein d'allégresse pour la faveur dont l'a gratifié la grâce du Seigneur eu l'appelant à la vraie foi, lui accordant de pouvoir la manifester aux yeux de tout le monde. C'est la croix qui ouvre la marche, ce signe sacré dans lequel nous devons nous glorifier, selon la remarque de saint Paul. Vous y voyez des étendards qui nous disent dans leur langage : Voyez, la croix a vaincu Satan et le monde; c'est au moyen de ce bois sacré que votre Rédempteur a terrassé la mort et l'enfer : vous aussi, qui êtes les serviteurs du Crucifié, combattez, afin de remporter la victoire. On entend de toutes parts des cantiques d'allégresse qui semblent imiter le : Saint, Saint, Saint que les esprits bienheureux répètent sans cesse au pied du trône de l'Éternel. Les cierges allumés signifient Jésus-Christ, la lumière véritable qui éclaire tout le monde et qui est vraiment ici présent sous les espèces du pain; ils symbolisent encore notre foi et notre amour envers ce grand mystère, et les nuées d'encens s'élèvent vers le ciel comme un emblème de notre dévotion.
Fête-Dieu
Mais plus notre ferveur est grande, plus aussi nous ressentons combien nous sommes impuissants pour louer Dieu d'une manière digne de lui, et nous tâchons d'y remédier autant que possible. Or, il y a encore une autre Église que nous appelons triomphante : plusieurs de nos frères et sœurs en Jésus-Christ, qui ont vécu autrefois en fervents serviteurs de Dieu sur la terre et qui nous ont précédés dans l'éternité, en font partie. Nous voudrions inviter ces bienheureux habitants du ciel, qui sont bien plus dignes que nous, à venir se réunir à nous pour bénir le Fils de Dieu que mille mondes ne pourraient glorifier comme il le mérite, et appeler à notre aide les milliers d'anges et d'esprits bienheureux qui entourent le Dieu eucharistique de leurs hommages et de leurs adorations. Nous voudrions également pouvoir connaître, aimer et adorer le Rédempteur comme ils le font, et c'est pour exprimer ces désirs, que nous faisons porter les images des Saints dans nos rangs. En faisant cela, nous confessons encore un autre point de la doctrine catholique, savoir qu'il existe une communion durable et Intime entre ceux qui combattent ici-bas, et les justes qui jouissent de la possession pleine et entière de Dieu, et qu'il est conforme à l'esprit de l'Évangile d'honorer les Saints. Enfin, pour rendre complète cette profession de foi, on chante, à quatre autels différents, le commencement des quatre Évangiles. Nous donnons par la témoignage, non-seulement de l'amour que nous portons à la parole de Dieu , mais aussi de notre croyance à la présence réelle de Jésus-Christ dans le saint Sacrement, qui repose sur cette divine parole comme sur son fondement. Cette lecture implique en même temps la condamnation du démon (l`ange déchu) vaincu, formulée en présence du ciel et de la terre, et elle exprime de plus le désir que nous ressentons intérieurement de voir la parole du salut annoncée à tous les peuples du monde.
Mais le temps m'avertit de finir. Encore un mot cependant, mes amis, pour vous encourager à demeurer ou à devenir de zélés adorateurs du Saint-Sacrement, parce que plus vous serez animés d'une sainte ferveur pour adorer le Dieu caché du tabernacle, plus aussi vous serez embrasés d'amour pour le recevoir souvent et dignement dans la sainte communion. Loué soit Jésus-Christ. — A jamais.
LA FÊTE-DIEU.
Résumé : Fête-Dieu. Son nom. Procession du Saint-Sacrement. Origine de la fête et de la procession. But et explication de la procession du Saint Sacrement. Respect humain. Différentes manières de vénérer le Saint-Sacrement. Office
Procession de la Fête-Dieu dans la campagne
Simon. Monsieur le curé, vous allez donc répondre aux questions que nous voulons vous faire sur la Fête-Dieu.
Le Curé. Effectivement, nous parlerons aujourd'hui de cette belle fête; mais vous permettrez que nous intervertissions les rôles. C'est moi qui ferai les questions et vous répondrez.
Simon. Oui, mais si nous venons à trébucher dans nos réponses, vous voudrez bien alors nous tirer d'affaire en répondant pour nous.
Le Curé. Le sujet de l'entretien d'aujourd'hui vous est connu, de sorte qu'il vous sera facile de me satisfaire. Vous pourriez, par exemple, me donner de suite la signification du nom de Fête-Dieu.
Simon. Comme c'est la Fête du Saint-Sacrement et que Jésus-Christ lui-même est renfermé tout entier comme Dieu et comme Homme dans la sainte Hostie, il me parait naturel qu'on ait donné le nom de Fête de Dieu ou Fête-Dieu à ce grand jour.
Le Curé. Mais votre explication est excellente. Oui, l'Église a établi cette fête solennelle avec octave, pour rappeler aux chrétiens que le divin Sauveur habite au milieu de nous comme Dieu et comme Homme, réellement et substantiellement présent, sous les espèces du pain et du vin, dans l'auguste Sacrement de l'autel, comme aussi pour le remercier de ce que son amour infini l'a porté à nous gratifier de ce plus grand de tous les bienfaits et pour l'adorer avec plus de dévotion et de respect.
Procession de la Fête-Dieu ( Corpus Christi dans les pays anglophones)
Simon. Vraiment, nous ne pourrons jamais témoigner suffisamment notre reconnaissance pour une si grande grâce; car, comme vous le disiez naguère dans l'un de vos sermons, le Sauveur nous a aimés à tel point qu'il a voulu mourir pour nous, mais son amour l'a porté bien plus loin encore, puisqu'il n'a pu se résoudre à se séparer de nous, même après sa mort sur la croix : il veut encore demeurer continuellement au milieu de ses enfants et réaliser par la sainte Eucharistie ce qu'il disait à ses disciples : Voilà que je suis avec vous , tous les jours , jusqu'à la fin du monde (Matthieu28.20).
Le Curé. C'est aussi la raison pour laquelle l'Église n'a rien négligé afin de rehausser la splendeur de cette fête.
Simon. Surtout en établissant la procession solennelle du Saint-Sacrement.
Le Curé. Tout ce qui se fait à l'église en ce jour, porte cette empreinte; mais, comme vous le dites très-bien, la partie la plus éclatante de la fête, c'est la grande Procession.
Simon. Dont vous voudrez bien nous donner l'explication. Pourquoi, par exemple, une procession et une procession si solennelle en ce jour?
Le Curé. En voici les raisons principales : Le Sauveur est porté en triomphe avec grand appareil.
1° Afin de nous donner occasion de manifester notre foi en ce divin Sacrement et de témoigner ouvertement, même devant les ennemis de notre foi, que nous sommes prêts à la confesser avec joie et sans respect humain.
2° Nous voulons témoigner par là au Fils de Dieu nos adorations d'une manière publique et lui faire amende honorable ou réparation des abus que l'on a faits de ce divin Sacrement, tant du côté des infidèles et des hérétiques que de la part des mauvais catholiques. Nous voudrions rendre non avenus tant d'outrages dont la divine Eucharistie a été l'objet par les communions indignes, inutiles, faites avec peu de préparation ; par les messes mal célébrées ou mal entendues, par les blasphèmes, par les irrévérences commises à l'église, telles sont les causeries dans le Lieu saint, le luxe, la vanité et le scandale des nudités ou autres profanations.
3° Nous voulons, par cette pompe magnifique, rappeler la dignité et la sublimité de ce saint Sacrifice et nous encourager mutuellement à célébrer ses grandeurs.
4° Autant que possible, nous voulons remercier le Sauveur de l'amour inénarrable qu'il nous a montré en instituant ce saint Sacrement et des bienfaits dont il nous comble dans la sainte communion. Ce souvenir de l'amour d'un Dieu envers nous est bien propre à nous exciter à la réception fréquente de Jésus-Christ au banquet sacré.
5° Nous voulons, en quelque sorte, transformer nos rues et nos places publiques en autant de temples consacrés à Dieu et sanctifier nos habitations et nos campagnes par la présence du Saint des Saints qu'on transporte en ces lieux et le supplier de bénir la ville, les champs par lesquels il passe et les hommes qui les habitent.
6° Cette marche triomphale est enfin destinée à nous consoler et à nous réjouir spirituellement et à nous donner un avant-goût de la vie éternelle où les justes, dit l'Écriture, suivent l'Agneau partout où il va. (Apocalypse 14. 4).
La Sainte Eucharistie
Simon. Cette procession est-elle ancienne?
Le Curé. Elle se fait que depuis environ six cents ans. Mais, comprenez-moi bien, je dis pas que l'on a commencé seulement alors à adorer le Saint-Sacrement et à lui faire honneur extérieurement, car vous savez que, dès les temps les plus reculés, on célébrait la mémoire de son institution le Jeudi-Saint. Or, vous avez entendu, lorsque nous nous sommes entretenus de ce saint jour, combien sont nombreuses les solennités qui se font à l'église : elles l'étaient plus encore dans les temps plus reculés : les pénitents publics étaient réconciliés, on procédait à la bénédiction des saintes huiles et du saint chrême. Et puis nous sommes si préoccupés de la passion et de la mort du Sauveur qu'il nous serait impossible de prêter toute notre attention à la solennité du Saint-Sacrement. Outre ces considérations, d'autres circonstances contribuèrent à faire choisir un autre jour auquel les chrétiens pussent s'adonner tout entiers à l'adoration du mystère de la sainte Eucharistie.
Vers l'an 1250, vivait à Liège une sainte religieuse nommée Julienne. Dieu qui choisit, selon ses desseins impénétrables, les instruments pour l'exécution de ses plans, qu'il cache aux yeux des sages et qu'il dévoile aux petits et aux simples, inspira à la pieuse Julienne la pensée de demander aux chefs de l'Église la permission de consacrer un jour de l'année spécialement à l'adoration du Saint-Sacrement de l'Autel. Elle s'ouvrit d'abord à l'Évêque de Liège et à d'autres membres du clergé de cette ville.
La Fête-Dieu en Alsace
Après avoir examiné sa proposition on y accéda, et la Fête-Dieu fut en effet célébrée pour la première fois à Liège dans l'église de saint Martin (en 1246), d'où cet usage se répandit dans toutes les villes des Pays-Bas. L'un des prêtres consultés à Liège par la sainte hospitalière devint pape sous le nom d'Urbain IV; et son intention était de rendre générale la fête du Saint-Sacrement. Si même la mort fit rentrer dans l'ombre le projet du vénérable Pontife, on y revint plus tard, et le concile de Vienne, en France, tenu en 1311, sous le pontificat de Clément V, décréta que cette solennité serait célébrée par tout le monde catholique. Les papes qui suivirent, favorisèrent la célébration de cette fête en accordant différentes indulgences et en encourageant les fidèles à la fêter d'une manière solennelle.
La Fête-Dieu
Thomas. Pourquoi une procession précisément en ce jour?
Le Curé. La procession est cependant en rapport avec la fêle, en tant qu'elle est un moyen de témoigner notre respect et de rendre nos adorations au mystère adorable de l'autel.
Thomas. Oui, mais il est aussi facile de témoigner notre respect et nos sentiments d'adoration à l'église.
Le Curé. C'est aussi ce que vous devez faire; mais l'un n'exclut pas l'autre, et cela n'empêche nullement de le faire une fois publiquement et d'une manière plus solennelle. Ayez du respect pour un homme et témoignez-le lui de toutes vos forces; néanmoins, lorsqu'une occasion vient à se présenter de lui témoigner publiquement ce respect, par exemple, en prenant part à une ovation qui se fait en son honneur, vous vous garderez bien de blâmer celui qui douterait de la sincérité de vos sentiments. Celui qui honore véritablement Jésus-Christ, n'ira pas cacher ses sentiments dans son intérieur, mais il se trouvera heureux de pouvoir trouver occasion d'en donner des preuves à l'extérieur.
Nous devons aussi montrer que nous sommes prêts à confesser notre foi devant ceux qui ne croient pas ou qui sont attachés à l'erreur, nous devons faire voir que nous ne craignons pas de nous exposer à leurs sarcasmes et de mériter leur dédain, résolus que nous sommes de souffrir toutes ces avanies par amour pour Jésus-Christ. Semblables aux apôtres et aux premiers chrétiens, nous devons confesser Jésus-Christ devant les hommes, sans nous laisser induire en erreur par le mépris et la contradiction, si nous voulons que le Sauveur, à son tour, nous reconnaisse un jour pour ses disciples.
Le mystère de l'autel, au contraire, outre qu'il renferme la doctrine distinctive de l'Église, la plus combattue et la plus souvent niée par tous les ennemis de la religion, est en quelque sorte le centre de toute la foi catholique. C'est pourquoi le cortège solennel que nous faisons au Saint-Sacrement, est plus propre que quoi que ce soit à glorifier ce mystère et à donner témoignage de notre foi personnelle en même temps que de celle de l'Église toute entière. Aussi tout s'y rapporte-t-il dans la procession de la Fête-Dieu. Le temple cesse d'être temple, toute la terre y est transformée; ses portes s'ouvrent et le prince de la paix s'avance escorté de la multitude de ses fidèles chantant des cantiques de jubilation. Comme autrefois à Jérusalem, les chemins qu'il parcourt, sont jonchés de branches et de fleurs, et, de même qu'il passa sur la terre en faisant le bien, de même il répand encore la plénitude de ses bénédictions partout où il passe : Cela est exprimé par la bénédiction qui se donne avec le Saint-Sacrement aux différents autels ou reposoirs qui ont été construits pour cette fin. Son peuple de prédilection l'accompagne plein d'allégresse pour la faveur dont l'a gratifié la grâce du Seigneur eu l'appelant à la vraie foi, lui accordant de pouvoir la manifester aux yeux de tout le monde. C'est la croix qui ouvre la marche, ce signe sacré dans lequel nous devons nous glorifier, selon la remarque de saint Paul. Vous y voyez des étendards qui nous disent dans leur langage : Voyez, la croix a vaincu Satan et le monde; c'est au moyen de ce bois sacré que votre Rédempteur a terrassé la mort et l'enfer : vous aussi, qui êtes les serviteurs du Crucifié, combattez, afin de remporter la victoire. On entend de toutes parts des cantiques d'allégresse qui semblent imiter le : Saint, Saint, Saint que les esprits bienheureux répètent sans cesse au pied du trône de l'Éternel. Les cierges allumés signifient Jésus-Christ, la lumière véritable qui éclaire tout le monde et qui est vraiment ici présent sous les espèces du pain; ils symbolisent encore notre foi et notre amour envers ce grand mystère, et les nuées d'encens s'élèvent vers le ciel comme un emblème de notre dévotion.
Fête-Dieu
Mais plus notre ferveur est grande, plus aussi nous ressentons combien nous sommes impuissants pour louer Dieu d'une manière digne de lui, et nous tâchons d'y remédier autant que possible. Or, il y a encore une autre Église que nous appelons triomphante : plusieurs de nos frères et sœurs en Jésus-Christ, qui ont vécu autrefois en fervents serviteurs de Dieu sur la terre et qui nous ont précédés dans l'éternité, en font partie. Nous voudrions inviter ces bienheureux habitants du ciel, qui sont bien plus dignes que nous, à venir se réunir à nous pour bénir le Fils de Dieu que mille mondes ne pourraient glorifier comme il le mérite, et appeler à notre aide les milliers d'anges et d'esprits bienheureux qui entourent le Dieu eucharistique de leurs hommages et de leurs adorations. Nous voudrions également pouvoir connaître, aimer et adorer le Rédempteur comme ils le font, et c'est pour exprimer ces désirs, que nous faisons porter les images des Saints dans nos rangs. En faisant cela, nous confessons encore un autre point de la doctrine catholique, savoir qu'il existe une communion durable et Intime entre ceux qui combattent ici-bas, et les justes qui jouissent de la possession pleine et entière de Dieu, et qu'il est conforme à l'esprit de l'Évangile d'honorer les Saints. Enfin, pour rendre complète cette profession de foi, on chante, à quatre autels différents, le commencement des quatre Évangiles. Nous donnons par la témoignage, non-seulement de l'amour que nous portons à la parole de Dieu , mais aussi de notre croyance à la présence réelle de Jésus-Christ dans le saint Sacrement, qui repose sur cette divine parole comme sur son fondement. Cette lecture implique en même temps la condamnation du démon (l`ange déchu) vaincu, formulée en présence du ciel et de la terre, et elle exprime de plus le désir que nous ressentons intérieurement de voir la parole du salut annoncée à tous les peuples du monde.
Mais le temps m'avertit de finir. Encore un mot cependant, mes amis, pour vous encourager à demeurer ou à devenir de zélés adorateurs du Saint-Sacrement, parce que plus vous serez animés d'une sainte ferveur pour adorer le Dieu caché du tabernacle, plus aussi vous serez embrasés d'amour pour le recevoir souvent et dignement dans la sainte communion. Loué soit Jésus-Christ. — A jamais.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
LES FÊTES DE NOTRE SEIGNEUR MOINS SOLENNELLES.
Résumé. La Circoncision de Notre-Seigneur. Étrennes du nouvel an. — Fête du Saint Nom de Jésus. Litanies du Saint Nom de Jésus. — Invention et Exaltation de la sainte Croix. Les Lieux saints. Chemin de la croix. — Fête du Sacré Coeur de Jésus. — La Transfiguration.
Entre le dernier entretien et celui d'aujourd'hui, était survenue la fête de la transfiguration de Notre-Seigneur, qui se célèbre le 6 du mois d'août. Comme elle tombait justement un dimanche, le pasteur en avait dit un mot dans son prône. Tout le monde pria donc M. le curé de parler un peu plus amplement de cette fête dans la réunion d'aujourd'hui.
Très- volontiers, répondit celui-ci, c'est même ce que je m'étais proposé de faire. Car, après avoir parcouru les fêtes principales de l'année ecclésiastique, il ne convient pas non plus d'oublier entièrement les autres moins solennelles qui se rapportent à la mémoire du divin Sauveur. Au moins devez-vous connaître ce que vous solennisez. Seulement permettez-moi de commencer par la première de ces petites fêtes qui est celle de la Circoncision de Jésus-Christ que l'Église célèbre le huitième jour après la Nativité ou Noël, car ce fut également le huitième jour après sa naissance que l'Homme-Dieu subit la circoncision.
Simon. Le jour du nouvel an, n'est-ce pas ?
Le Curé. Oui, cette fête chrétienne coïncide avec notre nouvel an civil, et c'est même à cette circonstance qu'elle doit d'avoir été instituée dès les temps les plus anciens. Car, déjà au concile tenu à Tours, en 870, il en est parlé comme d'une fête très-ancienne.
Circoncision et Saint Nom de Jésus - 1 et 3 Janvier
Le souvenir de la circoncision de Notre-Seigneur est du reste pour nous une exhortation à ne pas demeurer incirconcis selon le cœur et les oreilles comme les païens, ni à résister au Saint-Esprit, mais à commencer la nouvelle année par un changement de vie radical. Considérons comme une précieuse étrenne de nouvel an la circonstance que le nom de Jésus ait été donné au Sauveur ; car quoique nous ayons célébré seulement huit jours auparavant le joyeux avènement du Fils de Dieu, ce ne fut qu'en ce jour qu'il fut, pour ainsi parler, proclamé solennellement notre Sauveur et Rédempteur : car voilà ce que signifie le mot Jésus.
Fête du Très Saint Nom de Jésus – le 3 Janvier – Au Nom de Jésus, tout doit ployer le genou sur la terre, au purgatoire, au paradis et dans les enfers.
Simon. Je pensais qu'on célébrait une fête particulière du saint Nom de Jésus.
Le Curé. Oui, elle a lieu le 3 Janvier, et peut-être que le pieux désir de glorifier selon ses forces le nom de Rédempteur peut y avoir donné lieu. Car au nom de Jésus, dit l'Apôtre, doit ployer le genou tout ce qui est sur la terre, dans le ciel et dans les enfers ; c'est pourquoi nous ne prononçons jamais ce nom sacré sans nous prosterner ou du moins sans baisser la tête selon la belle coutume de nos pères.
Si nous avons soin de donner de la sorte un témoignage extérieur du respect qui nous anime intérieurement, il est donc convenable que nous le fassions un jour de l'année d'une manière toute particulière et plus solennelle. C'est la raison pour laquelle cette fête fut introduite dans différentes communautés religieuses, il y a déjà plusieurs siècles, avec le consentement du souverain Pontife, et l'an 1721, elle fut étendue à toute l'Église à la demande de l'empereur d'Allemagne, Charles VI. Que tout chrétien se souvienne donc en ce jour de mettre toute sa confiance en Jésus, nom qui signifie Sauveur, parce qu'il nous a sauvés en nous délivrant de nos péchés. Ce saint nom de Jésus fait à lui seul une prière parfaite, si nous le prononçons avec respect, amour et confiance. Invoquons-le donc souvent, et nous sentirons chaque fois combien sont vraies ces paroles de saint Bernard, affirmant que ce doux nom est à la fois une lumière qui éclaire nos pas dans les voies du Seigneur,
une nourriture qui nous fortifie dans la pratique de la vertu et enfin une médecine pour ceux qui ont le malheur d'être en état de péché.
Aux âges de foi, ce doux nom du Sauveur reparaissait dans les salutations ordinaires et donnait lieu à mille saintes pensées. Au lieu de bonjour, bon soir etc., on disait : loué soit Jésus-Christ, et pour rendre la salutation, on répondait : A jamais, Ainsi soit-il. Il est touchant pour un coeur chrétien d'entendre ce salut significatif dans plusieurs contrées de l'Allemagne comme en Tyrol, en Westphalie etc, et de voir par la piété et la simplicité patriarcales des populations qui ont conservé cette belle coutume, qu'effectivement cet usage les encourage dans le bien, leur inspire une grande aversion du péché, les console dans leurs peines, les fortifie dans leur faiblesse, et les tranquillise dans leurs craintes.
Simon. Et puis, l'invocation du saint nom de Jésus, qui est déjà par elle-même une si belle prière, a encore l'avantage d'être courte : nous pouvons donc la pratiquer en toute circonstance et surtout lorsque le temps ne nous permet pas de faire une longue prière, par exemple, lorsque nous sommes malades.
Un membre de la réunion. Je sais aussi, par expérience, que rien n`égale la vertu d'une pareille prière. Dans une longue et douloureuse maladie que j'ai faite, j'ai éprouvé combien le souvenir du Sauveur et l'invocation de son nom allégeaient mes douleurs corporelles en me fortifiant dans la patience. — Et encore, M. le curé, comme elles sont belles les Litanies du saint Nom de Jésus!
Le Curé. Vous avez raison, mon cher ami, cette prière nous rappelle, d'une manière détaillée, tout ce que le Sauveur a été à notre égard et quels biens nous pouvons attendre de lui. Elle nous remémore en premier lieu sa divinité, puisque nous l'appelons Fils du Dieu vivant, splendeur du Père, Roi de gloire; ensuite son incarnation, lorsque nous le nommons Fils de la Vierge Marie; après cela, nous considérons l'Homme-Dieu tantôt selon ses perfections divines, tantôt selon les vertus qu'il a pratiquées comme homme, nous l'adorons comme le Dieu tout-puissant et fort, la sagesse éternelle et la bonté infinie, comme le Père de la gloire future , puis comme le Fils de l'homme le plus obéissant, patient et doux ; nous nous rappelons son tendre amour envers nous, nous l'invoquons comme le modèle de toutes les vertus et l'auteur de notre vie spirituelle, jaloux de posséder les âmes ; nous l'implorons comme notre refuge, le père des pauvres, le trésor des fidèles, le bon pasteur et la lumière véritable, comme notre voie et notre vie ; nous reconnaissons que rien n'existe sans lui ; il est la joie des anges, le maître des Apôtres ; c'est lui qui a donné la force aux martyrs, la lumière aux confesseurs, et aux vierges la pureté ; de lui tous les Saints attendent leur couronne. Après avoir ainsi glorifié le Sauveur, nous lui adressons nos prières en lui demandant de nous délivrer de tout péché et de toute impureté, ainsi que des suites du péché qui sont la colère divine et la mort éternelle ; de nous préserver du malheur de jamais mépriser les inspirations de Dieu, et de nous protéger contre les embûches du démon. Nous conjurons le Seigneur de nous exaucer et de nous faire grâce partout ce qu'il a fait pour nous, par son incarnation et sa nativité, par sa vie divine, sa passion et sa mort, par sa Résurrection, son Ascension, ses joies et sa gloire; nous demandons enfin à l'Agneau de Dieu qui a voulu effacer nos péchés d'avoir pitié de nous et de nous rendre participants de ses miséricordes.
Simon. Je vous avoue n'avoir jamais fait attention à ce magnifique ensemble, quoique j'aie toujours prié ces litanies avec prédilection et grande édification. Je les réciterai encore plus volontiers à l'avenir.
Exaltation de la Sainte Croix - 14 septembre
Le Curé. Oui, faites-le souvent et avec grande ferveur, car jamais nous ne pourrons assez louer le Sauveur, ni reconnaître suffisamment les bienfaits dont il nous a comblés. —Disons maintenant quelques mots de la fête de l`Invention de la Sainte Croix, la première que nous rencontrons dans notre marche et qui se célèbre le 3 du mois de Mai ( avant 1960).
Simon. Je suis content que vous alliez nous expliquer cette fête dont nous ne connaissons que le nom... Et il y a encore une autre fête, l`Exaltation de la Croix, qui se célèbre le 14 Septembre et dont vous voudrez sans doute aussi nous dire un mot.
Le Curé. J'espère vous contenter par rapport à ces deux solennités. Lorsqu'après l'époque des persécutions, un empereur chrétien fut monté sur le trône en la personne de Constantin-le-Grand, celui-ci résolut de faire construire un temple magnifique, sur la place où Jésus-Christ avait souffert la mort pour nous. Mais comme, dès les temps les plus reculés, les chrétiens avaient eu un respect particulier pour les lieux consacrés par les grands souvenirs de la foi et les visitaient souvent, les païens avaient mis tout en œuvre pour les en détourner. C'est ainsi qu'ils avaient rempli de décombres la grotte du Saint-Sépulcre, afin de rendre cet endroit méconnaissable et, sur le Sépulcre lui-même ainsi que sur la place où avait été plantée la croix, ils avaient élevé les statues de Jupiter et de Vénus, parce qu'ils savaient qu'en y plaçant leurs obscènes divinités, ils inspireraient aux chrétiens de l'horreur pour ces lieux.
Du temps de Constantin il fut donc facile de retrouver ces différents endroits, car, sans le vouloir, les païens n'avaient que contribué à les indiquer, de sorte que précisément ce qui s'était fait par haine contre les chrétiens et par mauvaise intention, servit à faire retrouver avec certitude les lieux de la passion, de la mort et de la sépulture de Jésus-Christ, lorsque les temps orageux eurent cessé. Cependant on souhaitait posséder plus encore. Sainte Hélène, la pieuse mère de l'empereur, désirait ardemment retrouver la croix qui avait servi au Rédempteur, et comme il était d'usage chez les Juifs d'enfouir en terre tout ce qui avait servi à l'exécution des condamnés, on ne pouvait douter que pareille chose ne fut arrivée par rapport au Crucifié du Golgotha. On retrouva, en effet, après des fouilles bien longues et difficiles, trois croix ainsi que les clous avec lesquels le divin Sauveur avait été attaché au bois de la croix et l'inscription qui avait été fixée au haut du gibet. Mais le plus difficile était de reconnaître la vraie croix. L'inscription semblait, il est vrai, s'adapter mieux à l'une qu'aux deux autres; mais on voulait savoir avec certitude sur laquelle de ces croix Jésus-Christ avait été crucifié, pour la distinguer de celles des larrons.
L`Impératrice romaine St-Hélène et la vraie Croix a Jérusalem vers l`an 326 Ap J.C. – La Fête de l`Exaltation de la Sainte-Croix est le 14 septembre.
Alors saint Macaire, évêque de Jérusalem, qui avait été présent avec sainte Hélène pendant les recherches qu'on avait faites, pria Dieu avec ferveur de faire connaître, d'une manière évidente, l'instrument de sa passion, et ce ne fut pas sans une inspiration divine qu'il lui vint une pensée dont l'exécution fut couronnée de succès. Il y avait à Jérusalem une femme très-riche qui était dangereusement malade. En présence de l'impératrice et du peuple, on lui fit toucher les croix retrouvées. En vain elle toucha les deux premières, mais à la troisième, la santé lui fut rendue subitement. Ce fut en mémoire de cet événement que fut établie la fête que nous appelons l`Invention de la Sainte Croix.
Thomas. Cette histoire est-elle bien vraie et non controuvée ?
Simon. Qu'est donc devenue la sainte Croix?
Le Curé. Sainte Hélène envoya les clous et une partie de la croix à son fils, l'empereur Constantin ; elle en fit enchâsser la plus grande partie dans une châsse en argent et la donna à l'évêque de Jérusalem, pour qu'elle y fût conservée et vénérée par les chrétiens. Lorsque Constantin reçut ce pieux don de sa mère, il écrivit à l'évêque de Jérusalem pour le charger de faire construire sur le Lieu saint une église qui surpassât en magnificence toutes celles du monde chrétien. La vraie Croix y fut déposée. Elle y demeura jusqu'en 614, époque à laquelle les Perses firent invasion dans la Palestine.
Le Curé. Ce fut en 326 Ap J.C. que la vraie croix fut retrouvée, et c'est saint Cyrille, né en Palestine, et qui fut évêque de Jérusalem en 350, qui raconte tous les détails de ce fait. Comme il mourut en l'an 386, il est très-probable qu'il vivait déjà de ce temps et qu'il a pu en être un témoin oculaire. Du moins a-t-il été à portée de s'aboucher avec ceux qui avaient été témoins du fait. Au contraire, il n'en aurait pas parlé dans ses écrits, s'il n'avait eu des garanties suffisantes de sa réalité, parce qu'autrement ses contemporains n'auraient pas manqué de lui reprocher son erreur. Mais il n'est pas seul parmi les écrivains ecclésiastiques à nous signaler ces choses mémorables : Eusèbe, qui vivait à la cour de Constantin, saint Paulin, évêque de Nole, en Italie, né en 353, Sulpice-Sévère, contemporain et ami du précédent, saint Jean Chrysostôme, archevêque de Constantinople, né en 347, Rufin, né en 330, en Italie, saint Ambroise, enfin, né en 340, et plusieurs auteurs sont d'accord là-dessus. Or, tous ces hommes vivaient à une époque si rapprochée de ce temps, qu'il n'est pas même raisonnable de supposer qu'ils aient pu ajouter foi à un conte fait à loisir.
Le Saint-Sépulcre de Jérusalem, construit au 4 eme siècle sur l`ordre de l`empereur romain Constantin
Les Perses réduisirent Jérusalem en cendres, tuèrent plusieurs milliers d'habitants, et emmenèrent d'autres captifs, y compris l'évêque. Ils enlevèrent aussi les vases sacrés et toutes les richesses que la piété des fidèles avait accumulées dans les saints Lieux ; mais la perte la plus sensible aux chrétiens fut celle de la vraie Croix, que chacun d'eux aurait voulu racheter de sa propre vie. Les Perses l'emportèrent enfermée dans un étui, où, longtemps avant leur invasion, on avait mis le sceau de l'évêque.
Ce ne fut que l'an 628 que, forcés par les victoires de Héraclius, empereur de Constantinople, à faire un accommodement, ces infidèles renvoyèrent tous les chrétiens qui avaient été faits captifs, entre autres le patriarche de Zacharie, avec la sainte Croix, qui avait été enlevée quatorze ans auparavant. Durant tout ce temps-là elle était restée dans son étui et les Perses n'avaient pas même eu la curiosité d'en rompre le sceau, qui fut reconnu intact par le patriarche. Elle fut donc remise entre ses mains, dans le même état où elle était lorsqu'elle fut enlevée. L'année suivante, l'empereur en personne reporta en triomphe à Jérusalem le plus glorieux trophée de ses victoires, la vraie Croix du Sauveur, qu'il replaça dans l'église de la Résurrection, voulant lui-même suivre les traces du Sauveur et porter la croix sur ses épaules jusqu'au haut du Calvaire. Ce fut pour tous les chrétiens une fête solennelle, et l'Église en célèbre encore la mémoire le 14 Septembre, de sorte que le nom d'Exaltation de la Sainte Croix signifie : Reddition, glorification de la vraie Croix.
L`empereur de Constantinople Héraclius ( empire romain d`Orient) récupèrent la vraie Croix des Perses et la retourne lui-même a Jérusalem en l`an 628 Ap J.C.
Simon. Existe-t-elle encore, cette église construite par Constantin sur le tombeau du Sauveur?
Le Curé. Ce temple devint, comme la ville de Jérusalem, la proie des flammes à l'arrivée des Perses, dont je vous parlais tantôt. Après avoir été reconstruit, il fut encore incendié par les Mahométans en 1009, et la nouvelle église que l'empereur Michel-le-Paphlagonien avait fait rebâtir, fut une troisième fois réduite en cendres, le 12 octobre 1806.
Simon. Est-ce que les saints Lieux ne sont pas la propriété exclusive des catholiques?
Le Curé. La Terre-Sainte est actuellement sous la domination des Turcs. (19 ème siècle) Quant aux Lieux saints proprement dits, les Grecs et les Arméniens en possèdent aussi une partie. A proprement parler, l'église du Saint-Sépulcre est composée d'une série de sanctuaires et renferme tous les endroits rendus mémorables par la Passion et la Résurrection du Sauveur, et chacun de ces endroits est, comme le Saint-Sépulcre, surbâti d'une chapelle particulière. Ce sont ces chapelles qui appartiennent en partie aux Grecs et aux Arméniens. Dans la partie catholique, les Pères de la Terre-Sainte, de l'ordre de saint François, font l'office divin et donnent l'hospitalité aux pèlerins catholiques qui vont vénérer les saints Lieux.
Le Chemin de Croix
Simon. Qui aurait le bonheur de pouvoir faire ce pèlerinage !...
Le Curé. Je partage le vœu bien légitime que vous exprimez. Mais comme ni vous, ni moi, nous n'en viendrons jamais au point de pouvoir le réaliser, je vous dirai cependant de quelle manière nous pouvons nous en dédommager, de sorte que notre âme en retire un profit aussi grand que si nous avions visité en personne les Lieux de la Passion et de la mort de Jésus-Christ.
Simon. Que voulez-vous dire par là ?
Le Curé. Tenez, Simon, le désir que vous venez de manifester, a été ressenti, comme vous pouvez le penser, longtemps avant vous, par une foule de chrétiens qui, eux aussi, auraient souhaité vivement de pouvoir se rendre de temps en temps aux Lieux saints, pour suivre Jésus-Christ du Mont des Olives au Calvaire. Mais ils prévoyaient comme nous qu'ils ne pourraient jamais y parvenir, et, pour y suppléer en quelque sorte, ils transportèrent dans leur voisinage le Calvaire et les lieux consacrés par Jésus-Christ. C'est ainsi qu'ils choisirent quelque chemin éloigné du bruit du monde, et de préférence ceux qui conduisaient sur une hauteur; ils appelèrent cette hauteur le Calvaire. Il leur vint ensuite l'excellente idée de représenter les scènes principales de la Passion et de les placer de distance en distance, pour en rappeler ainsi plus facilement les circonstances telles qu'elles nous sont rapportées par les Évangiles et par la tradition. On y écrivait aussi quelque sainte aspiration ou prière, pour venir au secours à la dévotion et donner lieu à quelques saintes résolutions. Comme on s'arrêtait au pied de ces représentations des douleurs du Crucifié, qu'on y faisait station, pour prier ou méditer sur le mystère douloureux dont on avait devant soi la représentation, on les nomma aussi stations, et pratiquer cette dévotion s'appella faire les stations ou le chemin de la croix. On compte ordinairement quatorze stations que je vais vous nommer :
I. Pilate condamne Jésus-Christ à la mort.
II. Jésus se charge de la croix.
III. Jésus tombe pour la première fois sous la croix.
IV. Jésus rencontre sa sainte Mère.
V. Simon de Cyrène aide à Jésus à porter sa croix.
VI. Sainte Véronique présente le suaire à Jésus.
VII. Jésus tombe pour la deuxième fois.
VIII. Jésus console les femmes de Jérusalem.
IX. Jésus tombe pour la troisième fois.
X. Jésus est dépouillé de ses vêtements.
XI. Jésus est attaché à la croix (1).
XII. Jésus meurt sur la croix.
XIII. Jésus, descendu de la croix, est déposé sur les genoux de
sa sainte Mère.
XIV. Jésus dans le tombeau.
Le chemin de Croix
Simon. Si nous avions un Calvaire de ce genre, je ne manquerais pas d'aller souvent faire les stations, et je sais que tout le monde est de mon avis sur ce point.
Le Curé. Nous pouvons au moins ériger les stations dans l'église, à défaut d'un terrain convenable pour le faire à l'extérieur. Entre-temps, mes amis, je vous dirai que le chemin de la croix est le moyen le plus simple pour nous représenter la marche douloureuse du Sauveur, tout-à-fait comme si nous l'accompagnions sur le chemin vers Golgotha. J'ai même connu de fervents chrétiens qui, n`ayant pas l'occasion de pouvoir faire le chemin de la croix, s'en dédommageaient en appendant aux murailles de leur chambre des images représentant les sujets des quatorze stations, et ils y faisaient leurs prières en méditant les mystères de la passion. Il n'y a pas d'exercice plus utile à la vie de l'âme que de méditer sur les souffrances du Fils de Dieu. Et, en effet, comment pourrions-nous encore ressentir de la haine contre notre prochain, envoyant l'amour immense qui porte Jésus-Christ à se sacrifier lui-même ? Comment aimer le mensonge et la fourberie, en considérant que ce furent de faux témoins qui livrèrent le Juste à la mort? Comment s'adonner à la mollesse de la vie, en contemplant le Sauveur suspendu au bois de la croix? Comment les souffrances que Dieu nous envoie, pourraient-elles nous paraître insupportables ou injustes, à nous qui sommes coupables, tandis que Celui qui est l'innocence par excellence, se soumet aux supplices les plus atroces? Comment enfin pourrions-nous aimer encore le péché, lorsque nous prenons en considération tout ce qu'il a fallu de peines, d'ignominie et de sacrifices de la part d'un Dieu pour effacer nos iniquités?
Simon. Oui, certes, monsieur le curé, ces considérations devraient toucher même les pécheurs les plus endurcis et les changer en vrais chrétiens.
Le Curé. Telle était du moins l'intention de l'Église catholique en multipliant les occasions propres à nous inspirer de pareilles réflexions, car, outre les fêtes de la sainte Croix dont je vous ai entretenus jusqu'ici, elle en a institué d'autres qui sont également destinées à nous exciter à la méditation des souffrances du divin Rédempteur. Parmi ces fêtes, il faut compter celle du Sacré-Cœur de Jésus, qui tend à nous rappeler l'amour infini que Jésus-Christ nous a prouvé en se donnant pour nous sur la croix et sur l'autel.
Le Sacré-Coeur de Jésus
Simon. J'aime beaucoup la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, et je vous serais reconnaissant, si vous vouliez nous donner quelques détails sur son origine.
Le Curé. D'autant plus volontiers que je sais qu'en parlant de cette belle fête, je ne manquerai pas de vous faire plaisir à tous.
Thomas. Pour ce qui me concerne, je ne vois pas en quoi un cœur pourrait être adorable ou digne d'un culte.
Le Curé. Tout doucement, Thomas. Je vous accorde que l'humanité de Jésus-Christ, prise à elle seule, n'est pas digne d'adoration, pour la raison bien simple que, toute merveilleuse qu'elle est, elle est un objet créé : cependant elle en devient digne par son union à la divinité de Jésus-Christ; c'est l'humanité et la divinité tout à la fois que nous adorons, ainsi que nous le dit saint Thomas d'Aquin.
Vous auriez déjà pu avancer votre objection, lorsque je vous parlais de la fête de l'Exaltation de la sainte Croix, en disant que la croix, qui est faite de bois, ne mérite aucunement notre respect, notre vénération. Mais je vous dirai que, dans toutes les fêtes, dans toutes les dévotions qui regardent la sainte Humanité du Sauveur, il faut distinguer deux objets, l'un extérieur et sensible, l'autre spirituel et invisible. Mais ces deux objets sont unis très-intimement, et c'est l'objet spirituel qui communique sa dignité à l'objet visible, et c'est ordinairement ce dernier qui donne son nom à la fête. Prenons encore pour exemple la fête de l'Exaltation de la sainte Croix, et vous y distinguerez facilement ces deux objets. L'objet que l'on peut voir, c'est la croix; l'objet invisible, c'est Jésus crucifié ; et c'est aussi ce dernier qui communique sa dignité à la croix, tandis que le premier, savoir la Croix, a donné son nom à la fête de l'Exaltation de la Croix.
Sacré-Cœur de Jésus
Eh bien, dans la fête du Sacré-Cœur de Jésus, vous distinguez également ces deux objets ; l'objet extérieur, c'est le cœur de Jésus, c'est-à-dire cette partie de notre organisme qui s'appelle cœur; et l'objet spirituel , invisible, ce sont les sentiments d'amour dont ce cœur a été l'organe. Cela posé, je vous dirai que, de même que la Fête-Dieu est la glorification du corps de Jésus-Christ, de sa chair sacrée, de même la fête du Sacré-Cœur a été instituée pour inviter les chrétiens à rendre leurs hommages à la plus noble partie de ce corps adorable, car le cœur n'est-il pas la plus noble partie du corps ? N'est-il pas le siège de nos affections et n'a-t-il pas été le siège de l'amour infini du Rédempteur? C'est dans le cœur que se forme le sang, et n'est-ce pas dans le cœur de Jésus que s'est perfectionné ce sang divin qui lava toutes les iniquités du monde? Donc le culte du Sacré-Cœur est noble autant que légitime à cause de l'union intime qu'il a avec le Verbe.
Thomas. Oui, je comprends un peu mieux la convenance de cette fête.
Le Curé. Et vous la comprendrez tout-à-fait, si je vous dis, comme je viens de l'indiquer en passant, qu'il y a un objet plus digne encore de notre adoration dans la fête dont nous parlons, c'est la mémoire de ce que Jésus-Christ a fait pour vous et pour moi. Jésus-Christ, Fils de Dieu, tout-puissant, infini dans ses perfections comme Dieu le Père, nous a aimés, nous qui étions pécheurs, plus qu'un père ne peut aimer son enfant, il nous a aimés jusqu'à la mort de la croix. Mais le cœur de Jésus était ainsi fait que cet amour qu'il nous portait, était, comme l'amour maternel, par exemple, un amour nécessaire. Est-ce qu'une mère, dit-il, peut oublier le fruit de ses entrailles ?... Mais quand elle l'oublierait, je ne vous oublierais jamais. Telles sont les paroles que fait retentir à la porte de notre cœur le père de nos âmes, parlant par la bouche de son prophète. L'amour du Sauveur envers nous est constant et persévérant. Il a pris la forme d'un esclave en devenant homme comme nous; lui, Verbe, c'est-à-dire, le Fils uni que de Dieu, descend jusqu'à la boue pour se faire chair. Homme, il a voulu passer par la pauvreté, la misère, le travail, les souffrances, pour en venir à mourir pour les hommes, alors qu'ils étaient encore ses ennemis.
Simon. Depuis quand cette fête existe-t-elle dans l'Église?
Le Curé. La fête du Sacré-Cœur de Jésus est l'une des plus récentes, puisqu'elle n'existe que depuis le dix-septième siècle. Comme pour toutes les grandes œuvres, Dieu a voulu se servir d'un de ces moyens qui semblent le moins propres à atteindre le but proposé. Comme il avait choisi sainte Julienne, l'humble hospitalière, pour l'institution de la fête du Saint-Sacrement, il choisit cette fois encore, pour faire connaître sa volonté sur la dévotion au Sacré-Cœur, une pauvre religieuse de la Visitation, nommée Marguerite-Marie Alacoque. Un jour que cette sainte âme était au pied de l'autel toute absorbée dans la considération de la tendresse immense du Fils de Dieu pour les hommes, Jésus-Christ lui apparut, et, lui faisant comprendre quel était son amour pour nous, il lui annonça qu'il l'avait choisie pour propager le culte de son Cœur adorable, mais qu'elle n'y réussirait que par les souffrances et les humiliations qu'elle aurait à supporter.
Sainte Marguerite-Marie Alacoque – religieuse de la Visitation – 1647-1690 – Paray-le-Monial
Effectivement, cette révélation fut pour Marguerite-Marie l'objet de grandes contradictions dans le commencement; mais peu à peu l'œuvre de Dieu prospéra ; les Évêques de France, réunis en 1765, adoptèrent généralement la fête du Sacré-Cœur, qui se répandit toujours plus jusqu'au pontificat du pape Pie VI, lequel donna une nouvelle approbation à cette dévotion salutaire et condamna ceux qui osaient la combattre. La fête du Sacré-Cœur fut fixée, suivant la révélation faite à la vénérable Marguerite-Marie, au vendredi dans l'octave du Saint-Sacrement. Je terminerai cette explication en vous recommandant de vous unir tous ensemble, afin de dédommager Jésus-Christ, autant qu'il est en votre pouvoir, des outrages sans nombre dont il est l'objet de la part des pécheurs.
Simon. Aurions-nous déjà parcouru toutes les fêtes de Notre-Seigneur?
Le Curé. Non, mon ami; à part quelques fêtes de moindre importance, il nous reste encore à parler de la Transfiguration, dont nous célébrons aujourd'hui la fête. Cependant, comme c'est en parlant de la méditation des souffrances du Sauveur que j'ai pris occasion de vous dire un mot du Sacré-Cœur, je dois revenir sur mes pas pour vous faire observer que, dans plusieurs diocèses, on célèbre encore la fête des Armes de Jésus-Christ, par lesquelles on entend les instruments de sa passion. Afin de donner bien souvent aux fidèles l'occasion de se souvenir des douleurs de l'Homme-Dieu, l'Église a multiplié les fêtes qui les rappellent, comme, par exemple : celle du précieux Sang, que l'Église célèbre le premier dimanche de juillet, celle des cinq plaies de Notre-Seigneur et autres qu'il faut ajouter à celles que nous avons expliquées et dont le temps ne nous permet pas de parler. C'est pour la même raison que la piété des chrétiens a consacré à ce souvenir le vendredi de chaque semaine, parce que ce fut un vendredi que le Rédempteur expira sur la croix. Vers les trois heures de l'après-dîner, on donne un signal avec la cloche pour porter l'attention des fidèles sur l'heure du trépas de Jésus-Christ et provoquer par-là de bonnes pensées, de saintes affections et de salutaires résolutions.
Fête de la Transfiguration de Notre-Seigneur - 6 août
La Transfiguration de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur le Mont Thabor (Luc 9, 28 – Marc 9,2 – Matthieu 17,1)
Nous pouvons passer maintenant à l'explication de la fête de la Transfiguration de Notre-Seigneur. Vous savez déjà quel événement de la vie de Jésus-Christ l'Église propose à notre dévotion par ce jour de fête, je ne le rappellerai donc que très-brièvement. Le Sauveur se rendit un jour au sommet du Mont-Thabor avec trois de ses disciples, et ceux-ci le virent entouré d'une splendeur céleste, et ils entendirent, sortant des nuages, une voix qui disait : « Voici mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis ma confiance; écoutez-le. » Ce qui rend surtout important ce fait, c'est la manière solennelle dont le Rédempteur est reconnu et proclamé Fils de Dieu en présence de l'élite de ses Apôtres, qui semblent ici représenter les hommes.
Le Mont Thabor en Israël – le mont de la Transfiguration de Notre-Seigneur
Car, effectivement, c'est comme si tous les chrétiens avaient entouré Jésus-Christ et comme si le Père céleste leur avait dit à tous : « Croyez fermement en Jésus-Christ et suivez-le , car il est le vrai Dieu. » — Il est à remarquer que les Apôtres qui l'accompagnaient sur le Thabor sont précisément les mêmes qu'il admit pour devenir les témoins de son agonie au Jardin des Olives : c'est ainsi que Dieu envoie parfois aux hommes des grâces particulières ou qu'il leur fait goûter des joies extraordinaires, afin de les préparer aux souffrances qu'il leur destine après les avoir d'abord fortifiés. Que personne donc ne s'enorgueillisse, quand Dieu l'avantage de quelque manière que ce soit : bien certainement, c'est un signe qu'il veut l'associer à ses souffrances. Mais, d'autre part, personne n'a raison de s'attrister, lorsque la main de Dieu semble s'appesantir sur lui ; qu'il se souvienne, au contraire, des nombreux témoignages d'amour qu'il en a déjà reçus pendant sa vie.
Église de la Transfiguration au mont Thabor
Église de la Transfiguration au mont Thabor
La scène miraculeuse qui se passe sur le Thabor, est une bien belle image du royaume de Dieu fondé par Jésus-Christ sur la terre, que nous appelons l'Église. Nous y voyons d'abord Jésus-Christ, son chef divin et maintenant invisible, une main tendue vers nous et l'autre vers son Père céleste, qui fait entendre à toutes les âmes d'une voix distincte ces paroles : « Voici mon Fils bien-aimé, écoutez-le! » Nous y voyons les justes de l'ancienne alliance qui sont aussi des membres du royaume de Dieu : ils sont représentés sur la sainte montagne par Moïse, auquel Dieu confia les Tables de la Loi, et par Elie, le plus grand des prophètes. La nouvelle Alliance y est également présente.
Comme le nouveau Testament est l'Alliance de l'amour, c'est saint Jean, le même qui, pendant la dernière cène, avait reposé sur le sein de Jésus, en y puisant la plénitude de la charité, qui a été choisi pour tenir la place de tous ceux qui persévèrent dans l'amour de Dieu. Mais l'alliance de l'amour est aussi celle de la grâce et de la force telle qu'elle se manifeste dans les saints martyrs et dans tous les chrétiens, chaque fois qu'il y a à souffrir pour la foi et la vertu en combattant les tentations, soit intérieures, soit extérieures.
Saint Jacques est un digne représentant de la longue lignée des martyrs et des confesseurs de la foi, lui, cet apôtre courageux qui ne recula pas devant cette demande du Sauveur : « Pouvez-vous boire le calice de mes souffrances?
Charité, pénitence, persévérance, voilà ce qui fait le chrétien, et ici nous voyons la charité en saint Jean, la pénitence en saint Pierre, qui pleura si amèrement le triple reniement de son maître, et la persévérance dans l'apôtre saint Jacques. Saint Pierre est encore présent en qualité de chef suprême de l'Église. Enfin, non-seulement les vivants sont représentés sur la montagne de la Transfiguration, mais ceux-là aussi qui se sont endormis du sommeil de la paix. Car, en mourant, ils n'ont pas cessé de faire partie du royaume de Dieu, soit qu'ils appartiennent à l'Église souffrante, soit qu'ils soient devenus membres de l'Église triomphante. Mais toutes se trouvent sur la montagne pour exprimer la solidité de la sainte Église de Dieu, contre laquelle viennent se briser les efforts du malin esprit et la rage de tous ses adhérents.
Simon. Vraiment, voilà une représentation de l'Église que je trouve admirable!
Le Curé. Si seulement tous les chrétiens désiraient, comme saint Pierre, devenir les témoins de la gloire du Rédempteur et voulaient, comme lui, y bâtir leur tente! Mais cela ne suffit pas encore : nous devons aussi contribuer par nos efforts à glorifier Jésus-Christ; et comment pourrions-nous mieux le faire, qu'en suivant la voix du Père céleste et celle de Jésus-Christ, son Fils, et en accomplissant ses commandements. Car le chrétien est, comme dit un saint Père, un autre Jésus-Christ; le Sauveur est glorifié dans la vie de tout chrétien fervent, tout aussi bien qu'il le fut sur le mont Thabor. Notre main le glorifie en faisant l'aumône; nos pieds le glorifient en se portant là où nous pouvons être utiles à la gloire de Dieu et au salut du prochain ; notre langue, lorsqu'elle évite la fourberie et le mensonge, en louant Dieu, défendant l’innocence, consolant les affligés, instruisant ceux qui sont dans l'ignorance ou dans l'erreur.
Simon. De la sorte, nous pouvons transformer tous les jours de l'année en autant de fêtes de la Transfiguration de Notre- Seigneur.
Le Curé. Aussi l'Église exige-t-elle de nous, et la fête particulière qu'elle a instituée pour nous rappeler tous les ans la Transfiguration de Jésus-Christ sur la montagne, n'est-elle pas l'expression de ce qu'elle attend de notre bonne volonté? Que de chrétiens ont été édifiés de la solennité de ce jour depuis que cette fête existe! Car déjà le Pape saint Léon a prononcé, sur cette solennité, un sermon que nous possédons encore et qui prouve que les chrétiens la célébraient déjà au milieu du quatrième siècle.
Simon. Vous nous avez expliqué les fêtes les plus importantes de Notre-Seigneur. Ne pourrions-nous pas nous réunir encore avant le jour de l'Assomption, pour apprendre à connaître la grandeur et l'importance de cette fête principale de la Sainte Vierge ?
Le Curé. Oui, mes amis , c'était aussi mon intention de vous entretenir des fêtes de la sainte Vierge. Mais il me semble qu'il convient mieux de suivre un certain ordre dans ces explications. Nous commencerons donc dès après-demain par la fête de l'Immaculée-Conception, pour passer en revue toutes les autres solennités qui se rapportent à la Mère de Dieu, et, si d'ici là nous n'avons pu encore parler de la plus grande fêle de la sainte Vierge, qui est l'Assomption, nous nous réunirons encore le jour même de cette
fête, pour nous entretenir des grandeurs de la Reine du ciel.
Simon. Comme je suis heureux d'apprendre que vous allez nous parler de la sainte Vierge, que nous aimons tous de l'amour le plus tendre !
Le Curé. Ainsi, c'est convenu; nous nous retrouverons ici après demain, pour nous entretenir de l'Immaculée Conception; je vous prie d'y assister en grand nombre, car vous savez que c'est le dogme que l'Église a défini et déclaré article de foi le 8 décembre 1854, que c'est en l'honneur de ce grand privilège de Marie que, comme signe de votre adhésion à la foi de l'Église catholique, vous avez témoigné la joie la plus sainte, il y a quelques mois ; que vous avez décoré et illuminé vos maisons, tout en fortifiant vos âmes par la réception des saints Sacrements. Vous voyez donc que l'intérêt de l'actualité ne manquera pas à cet entretien. — Entre-temps, n'oubliez pas ce que je vous ai dit de la Transfiguration et tâchez de glorifier Jésus-Christ dans toute votre conduite , afin qu'un jour aussi vous soyez vous-mêmes glorifiés.
Plusieurs : Ainsi soit-il.
Résumé. La Circoncision de Notre-Seigneur. Étrennes du nouvel an. — Fête du Saint Nom de Jésus. Litanies du Saint Nom de Jésus. — Invention et Exaltation de la sainte Croix. Les Lieux saints. Chemin de la croix. — Fête du Sacré Coeur de Jésus. — La Transfiguration.
Entre le dernier entretien et celui d'aujourd'hui, était survenue la fête de la transfiguration de Notre-Seigneur, qui se célèbre le 6 du mois d'août. Comme elle tombait justement un dimanche, le pasteur en avait dit un mot dans son prône. Tout le monde pria donc M. le curé de parler un peu plus amplement de cette fête dans la réunion d'aujourd'hui.
Très- volontiers, répondit celui-ci, c'est même ce que je m'étais proposé de faire. Car, après avoir parcouru les fêtes principales de l'année ecclésiastique, il ne convient pas non plus d'oublier entièrement les autres moins solennelles qui se rapportent à la mémoire du divin Sauveur. Au moins devez-vous connaître ce que vous solennisez. Seulement permettez-moi de commencer par la première de ces petites fêtes qui est celle de la Circoncision de Jésus-Christ que l'Église célèbre le huitième jour après la Nativité ou Noël, car ce fut également le huitième jour après sa naissance que l'Homme-Dieu subit la circoncision.
Simon. Le jour du nouvel an, n'est-ce pas ?
Le Curé. Oui, cette fête chrétienne coïncide avec notre nouvel an civil, et c'est même à cette circonstance qu'elle doit d'avoir été instituée dès les temps les plus anciens. Car, déjà au concile tenu à Tours, en 870, il en est parlé comme d'une fête très-ancienne.
Circoncision et Saint Nom de Jésus - 1 et 3 Janvier
Le souvenir de la circoncision de Notre-Seigneur est du reste pour nous une exhortation à ne pas demeurer incirconcis selon le cœur et les oreilles comme les païens, ni à résister au Saint-Esprit, mais à commencer la nouvelle année par un changement de vie radical. Considérons comme une précieuse étrenne de nouvel an la circonstance que le nom de Jésus ait été donné au Sauveur ; car quoique nous ayons célébré seulement huit jours auparavant le joyeux avènement du Fils de Dieu, ce ne fut qu'en ce jour qu'il fut, pour ainsi parler, proclamé solennellement notre Sauveur et Rédempteur : car voilà ce que signifie le mot Jésus.
Fête du Très Saint Nom de Jésus – le 3 Janvier – Au Nom de Jésus, tout doit ployer le genou sur la terre, au purgatoire, au paradis et dans les enfers.
Simon. Je pensais qu'on célébrait une fête particulière du saint Nom de Jésus.
Le Curé. Oui, elle a lieu le 3 Janvier, et peut-être que le pieux désir de glorifier selon ses forces le nom de Rédempteur peut y avoir donné lieu. Car au nom de Jésus, dit l'Apôtre, doit ployer le genou tout ce qui est sur la terre, dans le ciel et dans les enfers ; c'est pourquoi nous ne prononçons jamais ce nom sacré sans nous prosterner ou du moins sans baisser la tête selon la belle coutume de nos pères.
Si nous avons soin de donner de la sorte un témoignage extérieur du respect qui nous anime intérieurement, il est donc convenable que nous le fassions un jour de l'année d'une manière toute particulière et plus solennelle. C'est la raison pour laquelle cette fête fut introduite dans différentes communautés religieuses, il y a déjà plusieurs siècles, avec le consentement du souverain Pontife, et l'an 1721, elle fut étendue à toute l'Église à la demande de l'empereur d'Allemagne, Charles VI. Que tout chrétien se souvienne donc en ce jour de mettre toute sa confiance en Jésus, nom qui signifie Sauveur, parce qu'il nous a sauvés en nous délivrant de nos péchés. Ce saint nom de Jésus fait à lui seul une prière parfaite, si nous le prononçons avec respect, amour et confiance. Invoquons-le donc souvent, et nous sentirons chaque fois combien sont vraies ces paroles de saint Bernard, affirmant que ce doux nom est à la fois une lumière qui éclaire nos pas dans les voies du Seigneur,
une nourriture qui nous fortifie dans la pratique de la vertu et enfin une médecine pour ceux qui ont le malheur d'être en état de péché.
Aux âges de foi, ce doux nom du Sauveur reparaissait dans les salutations ordinaires et donnait lieu à mille saintes pensées. Au lieu de bonjour, bon soir etc., on disait : loué soit Jésus-Christ, et pour rendre la salutation, on répondait : A jamais, Ainsi soit-il. Il est touchant pour un coeur chrétien d'entendre ce salut significatif dans plusieurs contrées de l'Allemagne comme en Tyrol, en Westphalie etc, et de voir par la piété et la simplicité patriarcales des populations qui ont conservé cette belle coutume, qu'effectivement cet usage les encourage dans le bien, leur inspire une grande aversion du péché, les console dans leurs peines, les fortifie dans leur faiblesse, et les tranquillise dans leurs craintes.
Simon. Et puis, l'invocation du saint nom de Jésus, qui est déjà par elle-même une si belle prière, a encore l'avantage d'être courte : nous pouvons donc la pratiquer en toute circonstance et surtout lorsque le temps ne nous permet pas de faire une longue prière, par exemple, lorsque nous sommes malades.
Un membre de la réunion. Je sais aussi, par expérience, que rien n`égale la vertu d'une pareille prière. Dans une longue et douloureuse maladie que j'ai faite, j'ai éprouvé combien le souvenir du Sauveur et l'invocation de son nom allégeaient mes douleurs corporelles en me fortifiant dans la patience. — Et encore, M. le curé, comme elles sont belles les Litanies du saint Nom de Jésus!
Le Curé. Vous avez raison, mon cher ami, cette prière nous rappelle, d'une manière détaillée, tout ce que le Sauveur a été à notre égard et quels biens nous pouvons attendre de lui. Elle nous remémore en premier lieu sa divinité, puisque nous l'appelons Fils du Dieu vivant, splendeur du Père, Roi de gloire; ensuite son incarnation, lorsque nous le nommons Fils de la Vierge Marie; après cela, nous considérons l'Homme-Dieu tantôt selon ses perfections divines, tantôt selon les vertus qu'il a pratiquées comme homme, nous l'adorons comme le Dieu tout-puissant et fort, la sagesse éternelle et la bonté infinie, comme le Père de la gloire future , puis comme le Fils de l'homme le plus obéissant, patient et doux ; nous nous rappelons son tendre amour envers nous, nous l'invoquons comme le modèle de toutes les vertus et l'auteur de notre vie spirituelle, jaloux de posséder les âmes ; nous l'implorons comme notre refuge, le père des pauvres, le trésor des fidèles, le bon pasteur et la lumière véritable, comme notre voie et notre vie ; nous reconnaissons que rien n'existe sans lui ; il est la joie des anges, le maître des Apôtres ; c'est lui qui a donné la force aux martyrs, la lumière aux confesseurs, et aux vierges la pureté ; de lui tous les Saints attendent leur couronne. Après avoir ainsi glorifié le Sauveur, nous lui adressons nos prières en lui demandant de nous délivrer de tout péché et de toute impureté, ainsi que des suites du péché qui sont la colère divine et la mort éternelle ; de nous préserver du malheur de jamais mépriser les inspirations de Dieu, et de nous protéger contre les embûches du démon. Nous conjurons le Seigneur de nous exaucer et de nous faire grâce partout ce qu'il a fait pour nous, par son incarnation et sa nativité, par sa vie divine, sa passion et sa mort, par sa Résurrection, son Ascension, ses joies et sa gloire; nous demandons enfin à l'Agneau de Dieu qui a voulu effacer nos péchés d'avoir pitié de nous et de nous rendre participants de ses miséricordes.
Simon. Je vous avoue n'avoir jamais fait attention à ce magnifique ensemble, quoique j'aie toujours prié ces litanies avec prédilection et grande édification. Je les réciterai encore plus volontiers à l'avenir.
Exaltation de la Sainte Croix - 14 septembre
Le Curé. Oui, faites-le souvent et avec grande ferveur, car jamais nous ne pourrons assez louer le Sauveur, ni reconnaître suffisamment les bienfaits dont il nous a comblés. —Disons maintenant quelques mots de la fête de l`Invention de la Sainte Croix, la première que nous rencontrons dans notre marche et qui se célèbre le 3 du mois de Mai ( avant 1960).
Simon. Je suis content que vous alliez nous expliquer cette fête dont nous ne connaissons que le nom... Et il y a encore une autre fête, l`Exaltation de la Croix, qui se célèbre le 14 Septembre et dont vous voudrez sans doute aussi nous dire un mot.
Le Curé. J'espère vous contenter par rapport à ces deux solennités. Lorsqu'après l'époque des persécutions, un empereur chrétien fut monté sur le trône en la personne de Constantin-le-Grand, celui-ci résolut de faire construire un temple magnifique, sur la place où Jésus-Christ avait souffert la mort pour nous. Mais comme, dès les temps les plus reculés, les chrétiens avaient eu un respect particulier pour les lieux consacrés par les grands souvenirs de la foi et les visitaient souvent, les païens avaient mis tout en œuvre pour les en détourner. C'est ainsi qu'ils avaient rempli de décombres la grotte du Saint-Sépulcre, afin de rendre cet endroit méconnaissable et, sur le Sépulcre lui-même ainsi que sur la place où avait été plantée la croix, ils avaient élevé les statues de Jupiter et de Vénus, parce qu'ils savaient qu'en y plaçant leurs obscènes divinités, ils inspireraient aux chrétiens de l'horreur pour ces lieux.
Du temps de Constantin il fut donc facile de retrouver ces différents endroits, car, sans le vouloir, les païens n'avaient que contribué à les indiquer, de sorte que précisément ce qui s'était fait par haine contre les chrétiens et par mauvaise intention, servit à faire retrouver avec certitude les lieux de la passion, de la mort et de la sépulture de Jésus-Christ, lorsque les temps orageux eurent cessé. Cependant on souhaitait posséder plus encore. Sainte Hélène, la pieuse mère de l'empereur, désirait ardemment retrouver la croix qui avait servi au Rédempteur, et comme il était d'usage chez les Juifs d'enfouir en terre tout ce qui avait servi à l'exécution des condamnés, on ne pouvait douter que pareille chose ne fut arrivée par rapport au Crucifié du Golgotha. On retrouva, en effet, après des fouilles bien longues et difficiles, trois croix ainsi que les clous avec lesquels le divin Sauveur avait été attaché au bois de la croix et l'inscription qui avait été fixée au haut du gibet. Mais le plus difficile était de reconnaître la vraie croix. L'inscription semblait, il est vrai, s'adapter mieux à l'une qu'aux deux autres; mais on voulait savoir avec certitude sur laquelle de ces croix Jésus-Christ avait été crucifié, pour la distinguer de celles des larrons.
L`Impératrice romaine St-Hélène et la vraie Croix a Jérusalem vers l`an 326 Ap J.C. – La Fête de l`Exaltation de la Sainte-Croix est le 14 septembre.
Alors saint Macaire, évêque de Jérusalem, qui avait été présent avec sainte Hélène pendant les recherches qu'on avait faites, pria Dieu avec ferveur de faire connaître, d'une manière évidente, l'instrument de sa passion, et ce ne fut pas sans une inspiration divine qu'il lui vint une pensée dont l'exécution fut couronnée de succès. Il y avait à Jérusalem une femme très-riche qui était dangereusement malade. En présence de l'impératrice et du peuple, on lui fit toucher les croix retrouvées. En vain elle toucha les deux premières, mais à la troisième, la santé lui fut rendue subitement. Ce fut en mémoire de cet événement que fut établie la fête que nous appelons l`Invention de la Sainte Croix.
Thomas. Cette histoire est-elle bien vraie et non controuvée ?
Simon. Qu'est donc devenue la sainte Croix?
Le Curé. Sainte Hélène envoya les clous et une partie de la croix à son fils, l'empereur Constantin ; elle en fit enchâsser la plus grande partie dans une châsse en argent et la donna à l'évêque de Jérusalem, pour qu'elle y fût conservée et vénérée par les chrétiens. Lorsque Constantin reçut ce pieux don de sa mère, il écrivit à l'évêque de Jérusalem pour le charger de faire construire sur le Lieu saint une église qui surpassât en magnificence toutes celles du monde chrétien. La vraie Croix y fut déposée. Elle y demeura jusqu'en 614, époque à laquelle les Perses firent invasion dans la Palestine.
Le Curé. Ce fut en 326 Ap J.C. que la vraie croix fut retrouvée, et c'est saint Cyrille, né en Palestine, et qui fut évêque de Jérusalem en 350, qui raconte tous les détails de ce fait. Comme il mourut en l'an 386, il est très-probable qu'il vivait déjà de ce temps et qu'il a pu en être un témoin oculaire. Du moins a-t-il été à portée de s'aboucher avec ceux qui avaient été témoins du fait. Au contraire, il n'en aurait pas parlé dans ses écrits, s'il n'avait eu des garanties suffisantes de sa réalité, parce qu'autrement ses contemporains n'auraient pas manqué de lui reprocher son erreur. Mais il n'est pas seul parmi les écrivains ecclésiastiques à nous signaler ces choses mémorables : Eusèbe, qui vivait à la cour de Constantin, saint Paulin, évêque de Nole, en Italie, né en 353, Sulpice-Sévère, contemporain et ami du précédent, saint Jean Chrysostôme, archevêque de Constantinople, né en 347, Rufin, né en 330, en Italie, saint Ambroise, enfin, né en 340, et plusieurs auteurs sont d'accord là-dessus. Or, tous ces hommes vivaient à une époque si rapprochée de ce temps, qu'il n'est pas même raisonnable de supposer qu'ils aient pu ajouter foi à un conte fait à loisir.
Le Saint-Sépulcre de Jérusalem, construit au 4 eme siècle sur l`ordre de l`empereur romain Constantin
Les Perses réduisirent Jérusalem en cendres, tuèrent plusieurs milliers d'habitants, et emmenèrent d'autres captifs, y compris l'évêque. Ils enlevèrent aussi les vases sacrés et toutes les richesses que la piété des fidèles avait accumulées dans les saints Lieux ; mais la perte la plus sensible aux chrétiens fut celle de la vraie Croix, que chacun d'eux aurait voulu racheter de sa propre vie. Les Perses l'emportèrent enfermée dans un étui, où, longtemps avant leur invasion, on avait mis le sceau de l'évêque.
Ce ne fut que l'an 628 que, forcés par les victoires de Héraclius, empereur de Constantinople, à faire un accommodement, ces infidèles renvoyèrent tous les chrétiens qui avaient été faits captifs, entre autres le patriarche de Zacharie, avec la sainte Croix, qui avait été enlevée quatorze ans auparavant. Durant tout ce temps-là elle était restée dans son étui et les Perses n'avaient pas même eu la curiosité d'en rompre le sceau, qui fut reconnu intact par le patriarche. Elle fut donc remise entre ses mains, dans le même état où elle était lorsqu'elle fut enlevée. L'année suivante, l'empereur en personne reporta en triomphe à Jérusalem le plus glorieux trophée de ses victoires, la vraie Croix du Sauveur, qu'il replaça dans l'église de la Résurrection, voulant lui-même suivre les traces du Sauveur et porter la croix sur ses épaules jusqu'au haut du Calvaire. Ce fut pour tous les chrétiens une fête solennelle, et l'Église en célèbre encore la mémoire le 14 Septembre, de sorte que le nom d'Exaltation de la Sainte Croix signifie : Reddition, glorification de la vraie Croix.
L`empereur de Constantinople Héraclius ( empire romain d`Orient) récupèrent la vraie Croix des Perses et la retourne lui-même a Jérusalem en l`an 628 Ap J.C.
Simon. Existe-t-elle encore, cette église construite par Constantin sur le tombeau du Sauveur?
Le Curé. Ce temple devint, comme la ville de Jérusalem, la proie des flammes à l'arrivée des Perses, dont je vous parlais tantôt. Après avoir été reconstruit, il fut encore incendié par les Mahométans en 1009, et la nouvelle église que l'empereur Michel-le-Paphlagonien avait fait rebâtir, fut une troisième fois réduite en cendres, le 12 octobre 1806.
Simon. Est-ce que les saints Lieux ne sont pas la propriété exclusive des catholiques?
Le Curé. La Terre-Sainte est actuellement sous la domination des Turcs. (19 ème siècle) Quant aux Lieux saints proprement dits, les Grecs et les Arméniens en possèdent aussi une partie. A proprement parler, l'église du Saint-Sépulcre est composée d'une série de sanctuaires et renferme tous les endroits rendus mémorables par la Passion et la Résurrection du Sauveur, et chacun de ces endroits est, comme le Saint-Sépulcre, surbâti d'une chapelle particulière. Ce sont ces chapelles qui appartiennent en partie aux Grecs et aux Arméniens. Dans la partie catholique, les Pères de la Terre-Sainte, de l'ordre de saint François, font l'office divin et donnent l'hospitalité aux pèlerins catholiques qui vont vénérer les saints Lieux.
Le Chemin de Croix
Simon. Qui aurait le bonheur de pouvoir faire ce pèlerinage !...
Le Curé. Je partage le vœu bien légitime que vous exprimez. Mais comme ni vous, ni moi, nous n'en viendrons jamais au point de pouvoir le réaliser, je vous dirai cependant de quelle manière nous pouvons nous en dédommager, de sorte que notre âme en retire un profit aussi grand que si nous avions visité en personne les Lieux de la Passion et de la mort de Jésus-Christ.
Simon. Que voulez-vous dire par là ?
Le Curé. Tenez, Simon, le désir que vous venez de manifester, a été ressenti, comme vous pouvez le penser, longtemps avant vous, par une foule de chrétiens qui, eux aussi, auraient souhaité vivement de pouvoir se rendre de temps en temps aux Lieux saints, pour suivre Jésus-Christ du Mont des Olives au Calvaire. Mais ils prévoyaient comme nous qu'ils ne pourraient jamais y parvenir, et, pour y suppléer en quelque sorte, ils transportèrent dans leur voisinage le Calvaire et les lieux consacrés par Jésus-Christ. C'est ainsi qu'ils choisirent quelque chemin éloigné du bruit du monde, et de préférence ceux qui conduisaient sur une hauteur; ils appelèrent cette hauteur le Calvaire. Il leur vint ensuite l'excellente idée de représenter les scènes principales de la Passion et de les placer de distance en distance, pour en rappeler ainsi plus facilement les circonstances telles qu'elles nous sont rapportées par les Évangiles et par la tradition. On y écrivait aussi quelque sainte aspiration ou prière, pour venir au secours à la dévotion et donner lieu à quelques saintes résolutions. Comme on s'arrêtait au pied de ces représentations des douleurs du Crucifié, qu'on y faisait station, pour prier ou méditer sur le mystère douloureux dont on avait devant soi la représentation, on les nomma aussi stations, et pratiquer cette dévotion s'appella faire les stations ou le chemin de la croix. On compte ordinairement quatorze stations que je vais vous nommer :
I. Pilate condamne Jésus-Christ à la mort.
II. Jésus se charge de la croix.
III. Jésus tombe pour la première fois sous la croix.
IV. Jésus rencontre sa sainte Mère.
V. Simon de Cyrène aide à Jésus à porter sa croix.
VI. Sainte Véronique présente le suaire à Jésus.
VII. Jésus tombe pour la deuxième fois.
VIII. Jésus console les femmes de Jérusalem.
IX. Jésus tombe pour la troisième fois.
X. Jésus est dépouillé de ses vêtements.
XI. Jésus est attaché à la croix (1).
XII. Jésus meurt sur la croix.
XIII. Jésus, descendu de la croix, est déposé sur les genoux de
sa sainte Mère.
XIV. Jésus dans le tombeau.
Le chemin de Croix
Simon. Si nous avions un Calvaire de ce genre, je ne manquerais pas d'aller souvent faire les stations, et je sais que tout le monde est de mon avis sur ce point.
Le Curé. Nous pouvons au moins ériger les stations dans l'église, à défaut d'un terrain convenable pour le faire à l'extérieur. Entre-temps, mes amis, je vous dirai que le chemin de la croix est le moyen le plus simple pour nous représenter la marche douloureuse du Sauveur, tout-à-fait comme si nous l'accompagnions sur le chemin vers Golgotha. J'ai même connu de fervents chrétiens qui, n`ayant pas l'occasion de pouvoir faire le chemin de la croix, s'en dédommageaient en appendant aux murailles de leur chambre des images représentant les sujets des quatorze stations, et ils y faisaient leurs prières en méditant les mystères de la passion. Il n'y a pas d'exercice plus utile à la vie de l'âme que de méditer sur les souffrances du Fils de Dieu. Et, en effet, comment pourrions-nous encore ressentir de la haine contre notre prochain, envoyant l'amour immense qui porte Jésus-Christ à se sacrifier lui-même ? Comment aimer le mensonge et la fourberie, en considérant que ce furent de faux témoins qui livrèrent le Juste à la mort? Comment s'adonner à la mollesse de la vie, en contemplant le Sauveur suspendu au bois de la croix? Comment les souffrances que Dieu nous envoie, pourraient-elles nous paraître insupportables ou injustes, à nous qui sommes coupables, tandis que Celui qui est l'innocence par excellence, se soumet aux supplices les plus atroces? Comment enfin pourrions-nous aimer encore le péché, lorsque nous prenons en considération tout ce qu'il a fallu de peines, d'ignominie et de sacrifices de la part d'un Dieu pour effacer nos iniquités?
Simon. Oui, certes, monsieur le curé, ces considérations devraient toucher même les pécheurs les plus endurcis et les changer en vrais chrétiens.
Le Curé. Telle était du moins l'intention de l'Église catholique en multipliant les occasions propres à nous inspirer de pareilles réflexions, car, outre les fêtes de la sainte Croix dont je vous ai entretenus jusqu'ici, elle en a institué d'autres qui sont également destinées à nous exciter à la méditation des souffrances du divin Rédempteur. Parmi ces fêtes, il faut compter celle du Sacré-Cœur de Jésus, qui tend à nous rappeler l'amour infini que Jésus-Christ nous a prouvé en se donnant pour nous sur la croix et sur l'autel.
Le Sacré-Coeur de Jésus
Simon. J'aime beaucoup la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, et je vous serais reconnaissant, si vous vouliez nous donner quelques détails sur son origine.
Le Curé. D'autant plus volontiers que je sais qu'en parlant de cette belle fête, je ne manquerai pas de vous faire plaisir à tous.
Thomas. Pour ce qui me concerne, je ne vois pas en quoi un cœur pourrait être adorable ou digne d'un culte.
Le Curé. Tout doucement, Thomas. Je vous accorde que l'humanité de Jésus-Christ, prise à elle seule, n'est pas digne d'adoration, pour la raison bien simple que, toute merveilleuse qu'elle est, elle est un objet créé : cependant elle en devient digne par son union à la divinité de Jésus-Christ; c'est l'humanité et la divinité tout à la fois que nous adorons, ainsi que nous le dit saint Thomas d'Aquin.
Vous auriez déjà pu avancer votre objection, lorsque je vous parlais de la fête de l'Exaltation de la sainte Croix, en disant que la croix, qui est faite de bois, ne mérite aucunement notre respect, notre vénération. Mais je vous dirai que, dans toutes les fêtes, dans toutes les dévotions qui regardent la sainte Humanité du Sauveur, il faut distinguer deux objets, l'un extérieur et sensible, l'autre spirituel et invisible. Mais ces deux objets sont unis très-intimement, et c'est l'objet spirituel qui communique sa dignité à l'objet visible, et c'est ordinairement ce dernier qui donne son nom à la fête. Prenons encore pour exemple la fête de l'Exaltation de la sainte Croix, et vous y distinguerez facilement ces deux objets. L'objet que l'on peut voir, c'est la croix; l'objet invisible, c'est Jésus crucifié ; et c'est aussi ce dernier qui communique sa dignité à la croix, tandis que le premier, savoir la Croix, a donné son nom à la fête de l'Exaltation de la Croix.
Sacré-Cœur de Jésus
Eh bien, dans la fête du Sacré-Cœur de Jésus, vous distinguez également ces deux objets ; l'objet extérieur, c'est le cœur de Jésus, c'est-à-dire cette partie de notre organisme qui s'appelle cœur; et l'objet spirituel , invisible, ce sont les sentiments d'amour dont ce cœur a été l'organe. Cela posé, je vous dirai que, de même que la Fête-Dieu est la glorification du corps de Jésus-Christ, de sa chair sacrée, de même la fête du Sacré-Cœur a été instituée pour inviter les chrétiens à rendre leurs hommages à la plus noble partie de ce corps adorable, car le cœur n'est-il pas la plus noble partie du corps ? N'est-il pas le siège de nos affections et n'a-t-il pas été le siège de l'amour infini du Rédempteur? C'est dans le cœur que se forme le sang, et n'est-ce pas dans le cœur de Jésus que s'est perfectionné ce sang divin qui lava toutes les iniquités du monde? Donc le culte du Sacré-Cœur est noble autant que légitime à cause de l'union intime qu'il a avec le Verbe.
Thomas. Oui, je comprends un peu mieux la convenance de cette fête.
Le Curé. Et vous la comprendrez tout-à-fait, si je vous dis, comme je viens de l'indiquer en passant, qu'il y a un objet plus digne encore de notre adoration dans la fête dont nous parlons, c'est la mémoire de ce que Jésus-Christ a fait pour vous et pour moi. Jésus-Christ, Fils de Dieu, tout-puissant, infini dans ses perfections comme Dieu le Père, nous a aimés, nous qui étions pécheurs, plus qu'un père ne peut aimer son enfant, il nous a aimés jusqu'à la mort de la croix. Mais le cœur de Jésus était ainsi fait que cet amour qu'il nous portait, était, comme l'amour maternel, par exemple, un amour nécessaire. Est-ce qu'une mère, dit-il, peut oublier le fruit de ses entrailles ?... Mais quand elle l'oublierait, je ne vous oublierais jamais. Telles sont les paroles que fait retentir à la porte de notre cœur le père de nos âmes, parlant par la bouche de son prophète. L'amour du Sauveur envers nous est constant et persévérant. Il a pris la forme d'un esclave en devenant homme comme nous; lui, Verbe, c'est-à-dire, le Fils uni que de Dieu, descend jusqu'à la boue pour se faire chair. Homme, il a voulu passer par la pauvreté, la misère, le travail, les souffrances, pour en venir à mourir pour les hommes, alors qu'ils étaient encore ses ennemis.
Simon. Depuis quand cette fête existe-t-elle dans l'Église?
Le Curé. La fête du Sacré-Cœur de Jésus est l'une des plus récentes, puisqu'elle n'existe que depuis le dix-septième siècle. Comme pour toutes les grandes œuvres, Dieu a voulu se servir d'un de ces moyens qui semblent le moins propres à atteindre le but proposé. Comme il avait choisi sainte Julienne, l'humble hospitalière, pour l'institution de la fête du Saint-Sacrement, il choisit cette fois encore, pour faire connaître sa volonté sur la dévotion au Sacré-Cœur, une pauvre religieuse de la Visitation, nommée Marguerite-Marie Alacoque. Un jour que cette sainte âme était au pied de l'autel toute absorbée dans la considération de la tendresse immense du Fils de Dieu pour les hommes, Jésus-Christ lui apparut, et, lui faisant comprendre quel était son amour pour nous, il lui annonça qu'il l'avait choisie pour propager le culte de son Cœur adorable, mais qu'elle n'y réussirait que par les souffrances et les humiliations qu'elle aurait à supporter.
Sainte Marguerite-Marie Alacoque – religieuse de la Visitation – 1647-1690 – Paray-le-Monial
Effectivement, cette révélation fut pour Marguerite-Marie l'objet de grandes contradictions dans le commencement; mais peu à peu l'œuvre de Dieu prospéra ; les Évêques de France, réunis en 1765, adoptèrent généralement la fête du Sacré-Cœur, qui se répandit toujours plus jusqu'au pontificat du pape Pie VI, lequel donna une nouvelle approbation à cette dévotion salutaire et condamna ceux qui osaient la combattre. La fête du Sacré-Cœur fut fixée, suivant la révélation faite à la vénérable Marguerite-Marie, au vendredi dans l'octave du Saint-Sacrement. Je terminerai cette explication en vous recommandant de vous unir tous ensemble, afin de dédommager Jésus-Christ, autant qu'il est en votre pouvoir, des outrages sans nombre dont il est l'objet de la part des pécheurs.
Simon. Aurions-nous déjà parcouru toutes les fêtes de Notre-Seigneur?
Le Curé. Non, mon ami; à part quelques fêtes de moindre importance, il nous reste encore à parler de la Transfiguration, dont nous célébrons aujourd'hui la fête. Cependant, comme c'est en parlant de la méditation des souffrances du Sauveur que j'ai pris occasion de vous dire un mot du Sacré-Cœur, je dois revenir sur mes pas pour vous faire observer que, dans plusieurs diocèses, on célèbre encore la fête des Armes de Jésus-Christ, par lesquelles on entend les instruments de sa passion. Afin de donner bien souvent aux fidèles l'occasion de se souvenir des douleurs de l'Homme-Dieu, l'Église a multiplié les fêtes qui les rappellent, comme, par exemple : celle du précieux Sang, que l'Église célèbre le premier dimanche de juillet, celle des cinq plaies de Notre-Seigneur et autres qu'il faut ajouter à celles que nous avons expliquées et dont le temps ne nous permet pas de parler. C'est pour la même raison que la piété des chrétiens a consacré à ce souvenir le vendredi de chaque semaine, parce que ce fut un vendredi que le Rédempteur expira sur la croix. Vers les trois heures de l'après-dîner, on donne un signal avec la cloche pour porter l'attention des fidèles sur l'heure du trépas de Jésus-Christ et provoquer par-là de bonnes pensées, de saintes affections et de salutaires résolutions.
Fête de la Transfiguration de Notre-Seigneur - 6 août
La Transfiguration de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur le Mont Thabor (Luc 9, 28 – Marc 9,2 – Matthieu 17,1)
Nous pouvons passer maintenant à l'explication de la fête de la Transfiguration de Notre-Seigneur. Vous savez déjà quel événement de la vie de Jésus-Christ l'Église propose à notre dévotion par ce jour de fête, je ne le rappellerai donc que très-brièvement. Le Sauveur se rendit un jour au sommet du Mont-Thabor avec trois de ses disciples, et ceux-ci le virent entouré d'une splendeur céleste, et ils entendirent, sortant des nuages, une voix qui disait : « Voici mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis ma confiance; écoutez-le. » Ce qui rend surtout important ce fait, c'est la manière solennelle dont le Rédempteur est reconnu et proclamé Fils de Dieu en présence de l'élite de ses Apôtres, qui semblent ici représenter les hommes.
Le Mont Thabor en Israël – le mont de la Transfiguration de Notre-Seigneur
Car, effectivement, c'est comme si tous les chrétiens avaient entouré Jésus-Christ et comme si le Père céleste leur avait dit à tous : « Croyez fermement en Jésus-Christ et suivez-le , car il est le vrai Dieu. » — Il est à remarquer que les Apôtres qui l'accompagnaient sur le Thabor sont précisément les mêmes qu'il admit pour devenir les témoins de son agonie au Jardin des Olives : c'est ainsi que Dieu envoie parfois aux hommes des grâces particulières ou qu'il leur fait goûter des joies extraordinaires, afin de les préparer aux souffrances qu'il leur destine après les avoir d'abord fortifiés. Que personne donc ne s'enorgueillisse, quand Dieu l'avantage de quelque manière que ce soit : bien certainement, c'est un signe qu'il veut l'associer à ses souffrances. Mais, d'autre part, personne n'a raison de s'attrister, lorsque la main de Dieu semble s'appesantir sur lui ; qu'il se souvienne, au contraire, des nombreux témoignages d'amour qu'il en a déjà reçus pendant sa vie.
Église de la Transfiguration au mont Thabor
Église de la Transfiguration au mont Thabor
La scène miraculeuse qui se passe sur le Thabor, est une bien belle image du royaume de Dieu fondé par Jésus-Christ sur la terre, que nous appelons l'Église. Nous y voyons d'abord Jésus-Christ, son chef divin et maintenant invisible, une main tendue vers nous et l'autre vers son Père céleste, qui fait entendre à toutes les âmes d'une voix distincte ces paroles : « Voici mon Fils bien-aimé, écoutez-le! » Nous y voyons les justes de l'ancienne alliance qui sont aussi des membres du royaume de Dieu : ils sont représentés sur la sainte montagne par Moïse, auquel Dieu confia les Tables de la Loi, et par Elie, le plus grand des prophètes. La nouvelle Alliance y est également présente.
Comme le nouveau Testament est l'Alliance de l'amour, c'est saint Jean, le même qui, pendant la dernière cène, avait reposé sur le sein de Jésus, en y puisant la plénitude de la charité, qui a été choisi pour tenir la place de tous ceux qui persévèrent dans l'amour de Dieu. Mais l'alliance de l'amour est aussi celle de la grâce et de la force telle qu'elle se manifeste dans les saints martyrs et dans tous les chrétiens, chaque fois qu'il y a à souffrir pour la foi et la vertu en combattant les tentations, soit intérieures, soit extérieures.
Saint Jacques est un digne représentant de la longue lignée des martyrs et des confesseurs de la foi, lui, cet apôtre courageux qui ne recula pas devant cette demande du Sauveur : « Pouvez-vous boire le calice de mes souffrances?
Charité, pénitence, persévérance, voilà ce qui fait le chrétien, et ici nous voyons la charité en saint Jean, la pénitence en saint Pierre, qui pleura si amèrement le triple reniement de son maître, et la persévérance dans l'apôtre saint Jacques. Saint Pierre est encore présent en qualité de chef suprême de l'Église. Enfin, non-seulement les vivants sont représentés sur la montagne de la Transfiguration, mais ceux-là aussi qui se sont endormis du sommeil de la paix. Car, en mourant, ils n'ont pas cessé de faire partie du royaume de Dieu, soit qu'ils appartiennent à l'Église souffrante, soit qu'ils soient devenus membres de l'Église triomphante. Mais toutes se trouvent sur la montagne pour exprimer la solidité de la sainte Église de Dieu, contre laquelle viennent se briser les efforts du malin esprit et la rage de tous ses adhérents.
Simon. Vraiment, voilà une représentation de l'Église que je trouve admirable!
Le Curé. Si seulement tous les chrétiens désiraient, comme saint Pierre, devenir les témoins de la gloire du Rédempteur et voulaient, comme lui, y bâtir leur tente! Mais cela ne suffit pas encore : nous devons aussi contribuer par nos efforts à glorifier Jésus-Christ; et comment pourrions-nous mieux le faire, qu'en suivant la voix du Père céleste et celle de Jésus-Christ, son Fils, et en accomplissant ses commandements. Car le chrétien est, comme dit un saint Père, un autre Jésus-Christ; le Sauveur est glorifié dans la vie de tout chrétien fervent, tout aussi bien qu'il le fut sur le mont Thabor. Notre main le glorifie en faisant l'aumône; nos pieds le glorifient en se portant là où nous pouvons être utiles à la gloire de Dieu et au salut du prochain ; notre langue, lorsqu'elle évite la fourberie et le mensonge, en louant Dieu, défendant l’innocence, consolant les affligés, instruisant ceux qui sont dans l'ignorance ou dans l'erreur.
Simon. De la sorte, nous pouvons transformer tous les jours de l'année en autant de fêtes de la Transfiguration de Notre- Seigneur.
Le Curé. Aussi l'Église exige-t-elle de nous, et la fête particulière qu'elle a instituée pour nous rappeler tous les ans la Transfiguration de Jésus-Christ sur la montagne, n'est-elle pas l'expression de ce qu'elle attend de notre bonne volonté? Que de chrétiens ont été édifiés de la solennité de ce jour depuis que cette fête existe! Car déjà le Pape saint Léon a prononcé, sur cette solennité, un sermon que nous possédons encore et qui prouve que les chrétiens la célébraient déjà au milieu du quatrième siècle.
Simon. Vous nous avez expliqué les fêtes les plus importantes de Notre-Seigneur. Ne pourrions-nous pas nous réunir encore avant le jour de l'Assomption, pour apprendre à connaître la grandeur et l'importance de cette fête principale de la Sainte Vierge ?
Le Curé. Oui, mes amis , c'était aussi mon intention de vous entretenir des fêtes de la sainte Vierge. Mais il me semble qu'il convient mieux de suivre un certain ordre dans ces explications. Nous commencerons donc dès après-demain par la fête de l'Immaculée-Conception, pour passer en revue toutes les autres solennités qui se rapportent à la Mère de Dieu, et, si d'ici là nous n'avons pu encore parler de la plus grande fêle de la sainte Vierge, qui est l'Assomption, nous nous réunirons encore le jour même de cette
fête, pour nous entretenir des grandeurs de la Reine du ciel.
Simon. Comme je suis heureux d'apprendre que vous allez nous parler de la sainte Vierge, que nous aimons tous de l'amour le plus tendre !
Le Curé. Ainsi, c'est convenu; nous nous retrouverons ici après demain, pour nous entretenir de l'Immaculée Conception; je vous prie d'y assister en grand nombre, car vous savez que c'est le dogme que l'Église a défini et déclaré article de foi le 8 décembre 1854, que c'est en l'honneur de ce grand privilège de Marie que, comme signe de votre adhésion à la foi de l'Église catholique, vous avez témoigné la joie la plus sainte, il y a quelques mois ; que vous avez décoré et illuminé vos maisons, tout en fortifiant vos âmes par la réception des saints Sacrements. Vous voyez donc que l'intérêt de l'actualité ne manquera pas à cet entretien. — Entre-temps, n'oubliez pas ce que je vous ai dit de la Transfiguration et tâchez de glorifier Jésus-Christ dans toute votre conduite , afin qu'un jour aussi vous soyez vous-mêmes glorifiés.
Plusieurs : Ainsi soit-il.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN NEUVIÈME.
CULTE ET FÊTES DE LA SAINTE VIERGE. IMMACULÉE CONCEPTION.
Résumé. Le culte de la Vierge est selon la Bible. Il est naturel. Ce que l'on entend par Immaculée Conception. Convenances de ce privilège en Marie. Définition de ce dogme. Manière de représenter l'Immaculée Conception.
Dans le village de Christenthal on s'était beaucoup entretenu des dernières paroles du curé concernant l'Immaculée Conception de la Sainte Vierge.
Le culte de la Vierge est selon la Bible.
Dieu l'a jugée digne, avant toutes les filles d'Ève, de devenir mère de Dieu, comme elle doit être pure et sainte, digne de respect et de vénération ! De quel prix elle doit nous être à cause de Jésus son Fils! Car c'est elle-même qui a donné les premiers soins à Jésus-Christ après l'avoir enfanté tout en demeurant vierge, et rien de plus juste que nous lui en soyons reconnaissants. Jésus-Christ lui-même l'a aimée de l'amour le plus tendrement filial, car, en mourant sur la croix, il l'a recommandée à son disciple bien-aimé. Il nous montre qu'il est prêt à exaucer nos prières par l'entremise de sa mère, puisque nous la voyons supplier pour d'autres pendant sa vie sur la terre, car c'est par suite des instances de Marie que le Sauveur fit son premier miracle aux noces de Cana. Voilà autant de raisons qui ont porté l'Église à favoriser de tout son pouvoir le culte de la Très-Sainte Vierge
Thomas. Monsieur le curé, dans les pays protestants par lesquels j'ai passé, j'ai entendu dire plus d'une fois une chose que je retrouve encore dans le petit livre que j'ai en main. J'y trouve que la Bible faisant très-rarement mention de la Sainte Vierge, celle -ci ne peut occuper dans la hiérarchie des êtres la place que lui désigne l'Église catholique.
Le Curé. L'idée de juger de la grandeur de Marie par le nombre plus ou moins grand des textes où il est parlé d'elle dans l'Écriture Sainte, me parait, extrêmement naïve. Si ce principe bizarre était admis, il faudrait dire que les Scribes et les Pharisiens ont plus de droit que la Mère de Dieu à la vénération des chrétiens, attendu qu'il en est bien plus souvent question dans les saints livres que de la bienheureuse Vierge. Peu importe donc le nombre des passages où il est parlé de Marie ; ce qui importe, c'est la manière dont il en est parlé dans l'Écriture.
D'ailleurs ne savons-nous pas qu'un grand nombre de personnages de la plus haute importance, tant de l'Ancien que du Nouveau Testament, obtiennent à peine une courte mention dans le texte sacré : tels sont, par exemple, Melchisédech, Siméon, les Rois Mages et autres. Il en est de même de la plupart des Sacrements, qui ne sont indiqués que tout au juste autant qu'il le faut, pour en faire connaître l'essence et l'origine divine. D'un autre côté, est-il bien vrai que l'Évangile parle si rarement de la Sainte Vierge? Voyez ; il donne d'abord sa généalogie ; il fait le récit de la mission de l'Ange Gabriel, qui la salue de la part de Dieu d'une manière plus respectueuse et l'exalte à un plus haut degré que ne l'a jamais fait prédicateur catholique ; il nous dévoile les grandeurs de sa belle âme dans les sublimes transports du Magnificat; nous y voyons la Mère du Sauveur présentant au temple son nouveau-né, conformément à la loi de Moïse, et le saint vieillard Siméon lui annonçant qu'un glaive de douleurs transpercera son âme.
Elle partage l'exil de son divin Fils persécuté par l'impiété d'Hérode; (en Égypte) c'est elle encore que nous retrouvons, quelques années après, avec Jésus enfant dans le temple. A Nazareth, le Verbe fait chair a voulu lui être soumis; commençant sa vie publique, son premier miracle, comme je vous le disais tantôt, est encore un acte de déférence pour sa sainte Mère. Nous la retrouvons au pied de la croix au moment où elle entend de la bouche de son Fils mourant ces paroles si pleines d'espérance pour tous les hommes : Femme, voilà votre Fils !
Enfin, nous la rencontrons avec les saintes femmes, après la résurrection. On le voit donc, les saints Livres ne manquent pas de faire mention de la Reine du Ciel chaque fois que le sujet l'exige; car n'oublions pas que Marie ne parut guère en public ; elle a réalisé, dans l'obscurité d'une vie retirée et dans les douces et saintes aspirations de la contemplation et de l'amour divin, cet idéal d'une vie parfaite devant Dieu qui commença par le glorieux privilège aujourd'hui proclamé par l'Église, savoir son Immaculée Conception, et qui obtint son complément par son Assomption également miraculeuse.
Et si maintenant nous nous arrêtons à considérer la manière dont les saints Livres parlent de cette Vierge des vierges, comment est-il possible d'avancer que le culte de Marie soit opposé à la Bible? Celle que l'Ange lui-même proclame pleine de grâces et bénie entre toutes les femmes, avec laquelle est le Seigneur; celle qu'Elisabeth reçoit par ces paroles : D'où me vient cet honneur et cette grâce que la mère de mon Seigneur me prévienne de sa visite? Celle à laquelle le Saint-Esprit dictait ces paroles sacrées : Et voilà que toutes les générations m'appelleront Bienheureuse ; car le Seigneur a fait en moi de grandes choses; celle dont la femme du peuple disait en voyant les prodiges de son Fils : Bienheureux le sein qui vous a portée! Celle enfin qui est à la fois la fille, la mère et l'épouse du Tout-Puissant, que l'Église entière a invoquée depuis tant de siècles, en lui disant : Priez pour nous, pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort, n'aurait pas de droit à nos hommages ! Non, mes amis!
Fête de l`Immaculée Conception - 8 décembre
Simon. J'aimerais que vous voulussiez nous expliquer clairement ce que signifient les mots Immaculée Conception.
Le Curé. Je ne pourrais mieux définir l'Immaculée Conception qu'en vous rapportant textuellement les paroles par lesquelles le Souverain Pontife a défini, d'une manière infaillible et au nom de l'Église catholique, ce que tout chrétien est obligé de croire sur le point qui nous occupe. Ces paroles, les voici : « Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine selon laquelle la Bienheureuse Vierge Marie fut, dès le premier instant de sa Conception, par une grâce et un privilège spécial de Dieu tout-puissant en vue des mérites de Jésus-Christ, sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute souillure de la faute originelle, est révélée de Dieu, qu'elle doit par conséquent être crue fermement et constamment par tous les fidèles... »
Mais veuillez observer, mes amis, qu'il ne faut pas confondre avec l'Immaculée Conception de Marie ni sa virginité, ni le privilège qu'elle eut d'être préservée durant sa vie mortelle de tous péchés, même de la moindre faute vénielle, ni la sanctification avant la naissance.
Simon. Si je comprends bien, saint Jean-Baptiste aurait été sanctifié avant que de naître, sans être pour cela conçu sans péché.
Le Curé. Votre remarque est très-juste, Simon. Saint Jean-Baptiste fut sanctifié dans le sein de sa mère par la présence de Jésus, et c'est pour cela qu'on honore solennellement sa nativité; mais il n'est pour cela jamais venu à l'idée de personne de vénérer sa conception, comme nous vénérons celle de la sainte Vierge. Saint Jean-Baptiste fut sanctifié avant de naître, mais il n'en avait pas moins été conçu avec la tache du péché originel.
Simon. Il me semble très-convenable que celle qui devait devenir la Mère du Rédempteur, ne fût point sujette à la malédiction qui avait frappé le premier homme.
Et encore : Ne voyons-nous pas qu'il existe une grande ressemblance entre la vie de Jésus et celle de Marie ? Elle partage en son cœur maternel les douleurs de son Fils depuis sa naissance jusqu'à sa mort sur la croix : elle meurt comme son Fils, elle est reçue au ciel en corps et en âme comme lui, et il faudrait admettre cette immense disparité entre Jésus et Marie au premier moment de son existence? Admettre le péché originel en Marie, ce serait encore la rendre inférieure à saint Jean-Baptiste, qui fut au moins sanctifié avant sa naissance, ou bien la faire son égale, ce qui serait encore inadmissible, car il y a une immense différence entre la dignité de précurseur et celle de Mère du Messie.
Thomas. J'admets ces raisons, mais je trouve dans mon petit volume que l`Écriture sainte ne parle pas de l`Immaculée Conception de la Vierge.
Le Curé. Elle ne parle pas du nom, mais elle indique et renferme suffisamment la chose elle-même. Car déjà au paradis terrestre, il fut dit à Satan : Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; elle t'écrasera la tête. Mais nier la Conception Immaculée de cette Femme que la prophétie a en vue, n'est-ce pas contredire cette parole sortie de la bouche de Dieu? N'est-ce pas transformer en amitié cette inimitié et montrer le serpent écrasant la tête de la femme, de la véritable Mère des vivants, au lieu d'en être écrasé lui-même? Je vous citerai encore la célèbre prophétie du prophète Isaïe : « Voilà qu'une Vierge concevra et enfantera un fils, et son nom sera Emmanuel.» (Isaïe 7,14).
Simon. Je n'oublierai jamais le jour auquel nous avons célébré la belle solennité que nous eûmes à cette occasion : comme tout le monde prenait part à la joie de l'Église! Tous, sans exception, nous avions fait notre possible pour décorer nos maisons, notre église n'était plus à reconnaître ; et puis l'illumination qui suivit durant toute la soirée, comme cela nous allait à l'âme !
Le Curé. Oui, Simon, et cette joie universelle qui s'est manifestée partout où se trouvaient des catholiques.
Simon. Il y a longtemps que j'aurais voulu vous demander pourquoi on représente ordinairement l'Immaculée Conception comme elle se trouve dans notre église, savoir : La Mère de Dieu est debout sur le globe terrestre, elle tient dans ses mains une fleur de lys et écrase de son pied le serpent. Elle a encore la lune sous les pieds, et un cercle d'étoiles entoure sa tête. Que signifient donc ces attributs qu'on lui a donnés ? Quant au lys, je suppose qu'il figure la pureté de la Vierge.
Le Curé. Oui, et le serpent écrasé sous son talon, signifie que Marie a été préservée de la tache originelle et que le séducteur de nos premiers parents n'a eu aucune puissance sur elle, puisque jamais l'ombre d'un péché ne souilla son âme : elle lui écrase la tête par sa pureté et sa sainteté ; élevée qu'elle est bien haut au-dessus de tous les hommes et par conséquent la Reine de la terre, on la fait planer au-dessus du globe terrestre. Et la lune sous ses pieds? Vous savez que la lune est sujette aux changements, qu'elle varie continuellement en croissant et décroissant sans cesse. Hé bien, comme la Sainte Vierge a sous ses pieds cet astre si inconstant, cela veut dire que la Mère de Dieu est élevée au-dessus des vicissitudes de la terre et des hésitations entre le bien et le mal. Si on entoure sa tête d'une couronne d'étoiles, c'est pour faire comprendre que par ses pensées et ses sentiments elle a toujours habité près de Dieu ; qu'elle ne s'est occupée que de lui.
Simon. Comme tout cela est beau et ingénieusement trouvé ! J'ai aussi à la maison une statue de Marie Immaculée qui me sera encore plus chère, depuis que je sais ce que toutes ces choses signifient.
Le Curé. Et vous pouvez encore retirer un grand profit de cette image ou de cette statue que vous possédez, si vous vous efforcez de réaliser en vous-même ce qu'elle vous enseigne. Vous n'avez pas été préservé du péché originel, cela est vrai ; mais vous en avez été délivré par le baptême : votre devoir est donc aussi d'écraser la tête du serpent en rejetant de vous toutes les tentations. Le serpent que vous voyez aux pieds de l'image de Marie, tient dans sa gueule la pomme de la première séduction ; d'ordinaire, on voit attachées à ce fruit quelques belles feuilles. C'est ainsi que l'ennemi du salut tâche de masquer le péché et de le faire paraître sous une forme attrayante. Mais nous devons prendre garde de nous laisser entraîner par sa ruse et fuir le mal, quand il nous parait le plus séduisant. Comme Marie, tenons ferme dans nos mains le lys, c'est-à-dire la pureté du cœur et la sainteté de la vie : comme elle, faisons-en sorte que nos pensées et nos affections nous élèvent jusqu'à Dieu par-dessus les astres, que nous foulions aux pieds tout ce qui est de la terre et assujetti au changement, ne voulant pas agir contre la volonté de Dieu notre Père céleste pour des intérêts périssables.
Notre première Mère nous a laissé un triste exemple; pour nous, suivons celui que nous donne la nouvelle Ève, la vraie Mère des vivants (c'est ce que signifie en hébreu le nom d'Ève) avec la même ardeur que nous avons imité jusqu'ici la première en nous laissant séduire par le démon (l`ange déchu). Après ces paternelles exhortations, le pasteur congédia l'assemblée en invitant les assistants à ne pas manquer le lendemain, puisqu'il s'agissait de la Sainte Vierge et qu'il convenait de se préparer à la grande fête de l'Assomption.
ENTRETIEN DIXIÈME.
Résumé : Nativité de la Sainte-Vierge. — Saint Nom de Marie ; sa signification — La Présentation. — Épousailles. — Annonciation. L`Angélus. — La Visitation; Salutation angélique. — Fêtes de précepte. — La Purification ; les Relevailles. — Fête des Douleurs de la Sainte Vierge.
Nativité de la Sainte Vierge – 8 septembre
St-Anne et St-Joachim a la naissance de la Sainte Vierge Marie
Après avoir, sur l'invitation du pasteur, chanté en l'honneur de la Sainte Vierge un cantique que tout le monde savait par coeur, le curé commença ainsi :
Mes chers amis, après avoir parlé de l'Immaculée Conception, je ne saurais mieux faire qu'en commençant aujourd'hui par la Nativité de la Sainte Vierge que nous fêtons le 8 du mois de septembre, car il est naturel que si déjà nous nous réjouissons de la Conception Sainte de notre Mère, sa naissance soit pour nous le sujet d'une joie plus grande encore.
C'est pour cette raison que, déjà dès les premiers siècles et très-certainement dès le cinquième, ce jour fut considéré comme un jour de fête, et l'esprit de ferveur qui l'avait provoqué ne manqua pas de s'étendre sur toute l'Église. D'après ce que je vous ai déjà fait remarquer dans notre entretien d'hier, vous voyez tout d'abord que la célébration de sa Nativité est un honneur exceptionnel que nous rendons à Marie. A part la nativité de saint Jean-Baptiste, l'Église ne célèbre celle d'aucun autre Saint. Cela ne doit pas vous surprendre, pour ce qui regarde le saint Précurseur, ( St-Jean le Baptiste) puisqu'il a été sanctifié déjà avant sa naissance (Luc. 1. 15.)
Le Saint Nom de Marie – 12 septembre
Le Curé. Le dimanche qui suit la fête de la Nativité de Notre- Dame, l'Église célèbre celle du saint nom de Marie. Le nom de ceux que nous aimons nous est cher, et comment celui de la mère de Dieu, par lequel nous implorons son intercession, nous serait-il indifférent? Et puis, ce nom sacré a été glorifié pour jamais par celle qui fut saluée pleine de grâce par l'ange Gabriel. C'est avec raison que les parents catholiques ont conservé le louable usage de donner ce nom à leurs filles et parfois aussi aux garçons, afin de les placer sous la protection spéciale de Marie et de leur donner, en leur patronne, le plus bel exemple de toutes les vertus qu'ils doivent s'efforcer d'imiter.
Simon. Le nom de Marie n'a-t-il pas une signification particulière ?
Le Curé. Il signifie 1° Reine ou souveraine, parce qu'après être devenue la mère de Jésus-Christ, elle partage aujourd'hui sa gloire dans le ciel ; 2° Étoile de la mer, parce que, de même que les navigateurs sont dirigés au port par une étoile, de même les chrétiens sont dirigés vers le ciel par l'exemple et par l'intercession de Marie ; 3 - Mère d'amertume, à cause des incroyables douleurs que Marie a souffertes durant toute sa vie.
Présentation de Notre-Dame ( au temple de Jérusalem) – 21 Novembre
Présentation de la sainte Vierge Marie enfant au temple de Jérusalem par St-Anne et St-Joachim
Passons maintenant à une autre fête qui nous rappelle encore l'enfance et l'adolescence de la mère de Dieu, je veux parler de la Présentation de Notre-Dame, que nous célébrons le 21 Novembre. Une pieuse tradition nous rapporte que les parents de la sainte Vierge, saint Joachim et sainte Anne avaient promis de consacrer leur enfant au service spécial de Dieu dans son temple. Lorsqu'elle eut atteint sa troisième année, ils conduisirent la sainte enfant à Jérusalem où, joignant le travail à la contemplation et travaillant de ses mains pour l'ornement du temple, elle fit aussi le vœu de virginité perpétuelle. C'est pour honorer cette circonstance si mémorable de la vie de la Sainte Vierge qu'a été instituée la fête de la Présentation. Ce souvenir renferme certainement une excellente leçon à l'adresse des chrétiens ; il leur apprend à sacrifier au Seigneur tout ce qu'ils ont et à ne vivre que pour son service qui est en même temps notre propre salut.
Note:Les artistes qui ont représenté ce trait de la vie de la sainte Vierge, ont tenu compte de la tradition qui porte que les parents de Marie, venus de Nazareth à Jérusalem, pour consacrer leur sainte enfant au Seigneur, s'arrêtèrent au pied de l'escalier au haut duquel attendait le grand prêtre « et la sainte Vierge, quoiqu'âgée seulement de trois ans, monta d'une égale force et résolution que l'eut su faire une personne de quinze ans. Elle monta ces 15 degrés avec tant de vitesse qu'on eût dit à la voir courir qu'elle était une colombe ou du moins qu'elle en avait pris les ailes » (Ribadeneira, 21 novembre). Souvent la Vierge porte un cierge allumé et elle est accompagnée d'autres vierges qui, comme elle , doivent se consacrer au grand Roi (Psaume 44).
La fête des Épousailles de Marie – 23 Janvier
La fête des Épousailles ( fiançailles) de Marie, le 23 janvier, nous fait ressouvenir, ainsi que l'indique déjà le nom, que la bienheureuse Vierge épouse un homme juste et craignant Dieu du nom de Joseph : (Matthieu 1,16) union angélique qui ne flétrit ni ne porta la moindre atteinte à sa virginité.
Fête de l`Annonciation de la Sainte-Vierge Marie – 25 mars
L`Archange Gabriel annonçant la naissance du Sauveur
Nous sommes parvenus maintenant à une solennité qui ne se rapporte pas seulement à la mère de Dieu, mais surtout au divin Sauveur lui-même : je veux parler de la fête de l' Annonciation, qui tombe le 25 du mois de mars. Elle nous représente le grand moment que., depuis des milliers d'années, les Saints de l'ancien Testament avaient souhaité voir arriver, le moment où le Rédempteur promis fut annoncé par l'ange et auquel le Saint-Esprit, couvrant la Sainte Vierge de son ombre, le Fils de Dieu fut conçu dans le sein virginal pour se revêtir de notre nature. C'est donc le premier moment de la Rédemption commencée que nous célébrons en ce jour, et les saintes aspirations avec lesquelles les saints Patriarches la souhaitaient, devraient être la mesure de notre joie et de notre reconnaissance de ce que, plus heureux qu'eux, nous la voyons réalisée.
C'est sans doute à cause de ces sentiments qui étaient bien vifs en eux, que les chrétiens des premiers siècles la fêtaient déjà : car tandis que les autres fêtes dont je viens de vous entretenir, sont d'une origine assez récente, celle-ci était déjà instituée quatre cents ans après Jésus-Christ et solennisée avec beaucoup de pompe dans tout le monde catholique. Oui, les chrétiens avaient une si grande reconnaissance envers Dieu à cause du bien fait de l'Incarnation que, non contents d'y penser spécialement une fois dans l'année, ils s'efforcèrent, pour ne point en perdre le souvenir, d'en renouveler la mémoire plusieurs fois le jour. Pourriez vous me dire quelle pratique de piété ils établirent pour cette fin ?
Simon. Je pense qu'oui. Vous voulez sans doute parler de l`Angelus.
Le Curé. C'est cela même. Cette pratique de prier la salutation angélique a donc pour but de nous rappeler sans cesse le grand mystère de l'Incarnation , pour en remercier Dieu et nous encourager à honorer la mère de Dieu à cause de son Fils. Il y a environ cinq cents ans que l'usage de prier l`Angelus le soir et de donner à cette fin un signal avec la cloche est établi. Afin d'encourager les chrétiens à la récitation de cette prière, le pape Jean XXII accorda à tous ceux qui la diraient des indulgences particulières. Plus tard l'usage de réciter trois fois par jour cette belle prière devint général et d'autres souverains Pontifes l'enrichirent encore de nouvelles faveurs. Voyez, mes chers amis, comme elle est sublime cette sainte coutume. Trois fois le jour : au lever du soleil, à midi et au coucher du soleil, la cloche nous invite à la prière. Or, comme les heures du jour ne sont pas les mêmes par toute la terre et que le soleil tournant de l'Est à l'Ouest fait le tour du globe en vingt-quatre heures, cette prière forme autour de la terre comme une triple ceinture spirituelle qui enlace tous les catholiques du monde dans le même amour.
L`Angélus du soir dans les campagnes
A mesure que le soleil s'avance dans sa course, ces saintes aspirations de la reconnaissance s'avancent de même de lieu en lieu, de bouche en bouche comme un mot d'ordre que les enfants de l'Église se transmettent l'un à l'autre, pour revenir après vingt-quatre heures à son point de départ et recommencer ensuite sa course de nouveau : « l'Ange du Seigneur a annoncé à Marie et elle a conçu du Saint-Esprit. — Voici la servante du Seigneur : qu’ il me soit fait selon sa parole. — Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous. » Et de ville en ville, de hameau en hameau, dans les chaumières comme dans les palais, les genoux se ploient, les fronts s'inclinent à la pensée du Dieu fait homme, et les âmes se réunissent aux pieds du trône du Tout-Puissant pour l'adorer et pour vénérer sa Mère.
S'il est déjà très-louable de se rappeler souvent le mystère de l`incarnation, auquel nous sommes redevables de notre salut et de notre sanctification, l'usage de prier l`Angélus renferme encore un autre avantage en ce que, interrompant le travail de l'homme, il le sanctifie et l'allège. Et, en effet, il n'y a rien de plus important, de plus nécessaire que de reporter de temps en temps notre pensée sur ce qui est éternel. Si nous négligeons de le faire, nous nous serons bientôt habitués à prendre plus de soin de notre corps que de notre âme, à travailler et à vivre comme si nous étions destinés n demeurer éternellement sur la terre et comme si nous n'avions pas à attendre une patrie meilleure. Mais lorsque, en labourant son champ, le campagnard et l'ouvrier occupé dans son atelier, ne sont occupés que de gagner des biens temporels et ne pensent qu'au pain matériel, voilà que le tintement de la petite cloche vient leur dire tendrement à l'oreille et au cœur qu'ils doivent oublier pour un moment les soucis matériels et terrestres pour penser à Dieu et à leur âme immortelle.
Simon. C'est bien la vérité : il ne faut qu'avoir omis sa prière pendant un seul jour, pour se sentir devenu tout terrestre.
Le Curé. Si seulement les chrétiens voulaient profiter des avantages que leur offre cette prière. La salutation angélique nous offre aussi un moyen de confesser notre foi, toutes les fois que, foulant aux pieds le qu'en dira-t-on, nous ne craignons pas de nous découvrir et de joindre nos mains en présence des autres.
Fête de la Visitation – 31 mai
Nous rencontrons ensuite dans notre marche la fête de la Visitation de la Sainte Vierge, qui nous rappelle la visite que Marie rendit à sainte Élisabeth, sa cousine, après avoir entendu de l'archange l'heureux message que Dieu l'avait élue pour devenir la mère du Messie. Cette fête se célèbre le 31 mai. Je n'ai pas besoin de vous dire que, dans, nos prières journalières, nous répétons, non-seulement les paroles de l'ange à Marie, mais aussi la salutation que lui adressa sainte Élisabeth en la recevant chez elle.
Simon. Oui, c'est ce qui se fait dans l`Ave Maria.
Le Curé. Allons, puisque vous en savez si loin, vous pourrez encore me dire quelles sont les paroles que l'ange prononça et celles que dit sainte Élisabeth.
Simon. Les paroles de l'ange Gabriel sont celles-ci : « Je vous salue (Marie), pleine de grâce, le Seigneur est avec vous! » et celles de sainte Elisabeth : « Vous êtes bénie entre les femmes et le fruit de vos entrailles est béni. »
Le Curé. Les chrétiens s'accoutumèrent à y ajouter encore le nom de Jésus, qui en ce moment était déjà connu de la sainte Vierge, mais pas encore d'Elisabeth. — Voyez, à proprement parler, ce sont les paroles d'un ange que nous empruntons pour saluer la mère de Dieu et pour la vénérer; et sainte Élisabeth y contribue aussi pour une part. Il est donc bien certain que nous ne pourrions trouver une salutation plus sainte, ni plus vénérable que celle qui nous a été enseignée par des maîtres d'une si grande sainteté. C'est bien là une salutation angélique, ainsi que nous l'appelons, et elle mérite que nous ne la prononcions qu'avec la ferveur et la pureté d'un ange.
Simon. Lorsque l'on considère toutes ces belles choses, la pensée de les avoir parfois prononcées sans attention et sans respect vous fait mal !... Mais d'où viennent les dernières paroles de l'Ave Maria ?
Le Curé. Ces paroles, par lesquelles nous implorons l'assistance de la sainte Vierge, furent ajoutées à la salutation angélique d'abord par de fervents chrétiens, ensuite examinées et approuvées par les pasteurs de l'Église et enfin prescrites pour tout le monde, de sorte que, dans tout le monde catholique, on ne prie plus l`Ave Maria qu'en y ajoutant ces mots : « Sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous , etc. » Nous avons parlé jusqu'ici des fêtes de la sainte Vierge qui précèdent la Nativité de Jésus-Christ et nous les avons rappelées toutes, si je ne me trompe.
Purification ou la fête de la Chandeleur. – 2 Février
Simon. En continuant selon l'ordre que nous avons suivi jusqu'ici, la première fête de la sainte Vierge après la Nativité du Sauveur, c'est sans doute la Purification ou la fête de la Chandeleur.
Le Curé. Effectivement, et nous avons déjà trouvé l'occasion de parler de l'usage de bénir les cierges en ce jour. Pour ce qui concerne la fête elle-même, qui se célèbre, comme vous savez, le 2 février, elle est d'une origine plus ancienne que cet usage; on a commencé à la solenniser généralement cinq cents ans après Jésus-Christ. De même que les cierges que l'on bénit en ce jour, cette fête doit nous rappeler la mère du Sauveur portant son nouveau-né au temple de Jérusalem afin d'y déposer l'offrande prescrite par la loi de Moïse. Ainsi que toutes les autres prescriptions de la loi ancienne, cette loi avait pour but de rappeler vivement aux hommes le péché originel et l'état de déchéance de tout le genre humain par suite de ce péché. Chaque fois qu'une femme était devenue mère, elle était considérée par la loi ancienne comme impure, pendant quarante jours lorsque c'était un garçon, et pendant quatre-vingts si c'était une fille. Pendant tout ce temps, elle n'osait toucher rien de sacré ; cela devait lui rappeler que cette naissance n'était pas un sujet de joie, puisqu'elle avait enfanté un pécheur auquel il fallait encore la grâce d'être racheté. Ces jours-là passés, elle devait se présenter au temple avec son enfant ; et parce que, à cause du péché originel, nul homme n'est digne de la vie, mais que tous méritaient la mort aux yeux de Dieu, si Dieu n'avait désiré la sanctification et le bonheur de l'homme au lieu de sa perte ; la mère devait venir racheter, pour ainsi dire, son enfant à Dieu, et, selon qu'elle était riche ou pauvre, elle devait offrir un agneau ou deux colombes que l'on immolait ensuite à la place de l'enfant. C'était en même temps un souvenir de ce qui s'était passé autrefois lors de la sortie d'Égypte, Dieu ayant épargné les premiers-nés des Hébreux à cause du sang de l'agneau dont ils avaient marqué leurs portes; tandis qu'il fit mourir tous les premiers-nés des Égyptiens en une seule nuit. Tout cela avait trait aussi au Sauveur qui devait venir nous délivrer du péché et de l'esclavage de Satan par les mérites de son sang; et les victimes qu'on immolait dans le temple n'étaient que la figure de ce Rédempteur à venir.
Simon. Mais Jésus-Christ n'avait jamais péché.
Le Curé. C'est très-juste; aussi cette loi ne s'appliquait-elle pas à la personne du Sauveur, cela est évident, puisqu'il était sans péché et que la sainte Vierge l'avait enfanté tout en demeurant vierge; cependant il voulut s'assujettir à cette loi générale, d'une part, pour nous donner un exemple d'obéissance, et d'autre part, parce que les animaux que l'on immolait étaient la figure du sacrifice qu'il voulait faire de lui-même pour la délivrance de l'humanité. Ici la sainte Vierge offrit deux colombes : mais Jésus ne fut racheté à ce prix que pour réserver sa vie pour la mort sur la croix qu'il devait subir trente-trois ans plus tard.
Simon. Comme le christianisme a admirablement changé toutes choses !
Le Curé. Oui, il a tout changé par la grâce de celui qui s'est livré à la mort pour chacun de nous. De sorte que nulle mère chrétienne n'ignore qu'elle a donné au monde un pécheur, et elle aurait raison de s'en affliger, si elle ne savait, qu'à peine né, ce fruit de ses entrailles est purifié dans les eaux du baptême par lequel l'Église le sanctifie. 0 vous, pères et mères, qui avez autour de vous vos petits enfants, n'oubliez pas que vous êtes environnés de saintes âmes, et plaise au ciel que vous ne soyez pas seuls entachés par le péché au milieu d'eux. Et chaque fois qu'il plaît à Dieu de multiplier votre famille, ne tardez pas, je vous en conjure, de faire purifier par la grâce du baptême ces nouveaux-nés. Alors seulement vos regards peuvent se reposer tranquillement et avec bonheur sur votre enfant. Préférez leur faire administrer ce sacrement dans le lieu saint, à l'église. Cela est bien plus convenable et, dans la suite, ce sera un bien plus doux souvenir pour vos enfants de penser qu'ils ont été baptisés dans la maison de Dieu que de l'avoir été à votre domicile. Et puis, c'est plus conforme à l'exemple donné par Votre-Seigneur; d'ailleurs, après le ciel, c'est la maison de Dieu que tout chrétien doit considérer comme sa maison paternelle.
Simon. Nous ne pouvons avoir de séjour plus beau et plus saint que là où le Sauveur est réellement présent.
Le Curé. Ce que David rapporte au temple de l'ancienne alliance s'applique mieux encore aux églises chrétiennes : Un jour dans votre sanctuaire ,
ô mon Dieu , dit le psalmiste, est préférable à mille partout ailleurs! (Psaume 84. 10).
Le Curé. Pour les enfants si leur coeur n'est pas accessible aux bonnes leçons et à une éducation chrétienne, ce sera en vain que les parents les plus consciencieux travailleront à façonner leur âme. Mais ce que les parents ne devraient jamais oublier, c'est de penser que tous leurs efforts seront nuls et sans résultat, si Dieu ne les bénit ; c'est pourquoi ils ne doivent pas se contenter d'offrir leurs enfants une seule fois, mais le faire continuellement en demandant pour eux la grâce de vivre saintement. Et lorsque vos enfants auront atteint l'âge de raison, faites-les s'avancer souvent vers l'endroit de l'église où ils furent régénérés par le saint sacrement de Baptême; choisissez de préférence les heures pendant lesquelles il n'y a personne à l'église et conduisez vos enfants jusqu'aux fonts baptismaux. Dites-leur : « Voyez, c'est ici que vous avez été purifiés du péché et que vous avez été marqués du caractère de chrétiens.»
C'est ici que votre parrain a dit en votre place : Je renonce à tout péché, à Satan, l'ami et l'auteur du péché; je veux être baptisé et appartenir par là à Jésus-Christ, l'ennemi de tout mal. Dites-leur encore : «Mes enfants, c'est en cet endroit que votre parrain dut promettre tout cela avant que cette grâce ne vous fût conférée; ne sortez pas, sans avoir vous-mêmes renouvelé la même promesse, de votre propre bouche, et par votre propre conviction. Mais ne vous contentez pas de le faire aujourd'hui, promettez très-souvent les mêmes choses à Dieu et gardez-vous bien de jamais les oublier. » De la sorte, vous pourrez espérer consolider dans le cœur de vos enfants les bonnes résolutions qui les porteront au bien tous les jours de leur vie. Vous avez tous déjà vu sans doute la représentation de la Sainte- Famille?
Simon. Oh oui! Marie et Joseph avec l'enfant Jésus.
Le Curé. Hé bien, cette famille doit être le modèle de toute famille chrétienne. La justice et la piété de saint Joseph et la suave pureté de Marie devraient se trouver chez tous les époux. On devrait retrouver en eux ce zèle pour le bien-être des enfants que Dieu leur a confiés et cet amour de la prière qui ont distingué la mère et le père nourricier du Sauveur, afin que, la bénédiction de Dieu aidant, leurs enfants deviennent une fidèle reproduction de l'enfant Jésus. Leurs enfants étant soumis, comme l'a voulu être le Fils de Dieu lui-même, les parents verront leurs forces et leur goût augmenter, pour travailler joyeusement à les rendre heureux. J'allais finir en vous souhaitant ce bonheur que Dieu ne refuse jamais aux parents qui l'invoquent, mais je me souviens que je dois encore vous parler d'une fête de la sainte Vierge , afin que demain , au grand jour de l'Assomption , je puisse commencer immédiatement par l'explication de cette belle fête, je veux parler de la Fête des douleurs de Marie, qu'on nomme aussi la Compassion.
Fête des douleurs de Marie – 15 septembre
Simon. Quel jour célèbre-t-on cette fête?
Le Curé. Le 15 septembre. Vous vous rappelez que le saint vieillard Siméon, en recevant l'enfant Jésus dans ses bras, rendit à Dieu ses actions de grâces de ce qu'il lui était donné devoir encore avant de mourir le Sauveur du monde. Mais à cette occasion aussi il prophétisa sur cet enfant et sa mère en disant : « Cet enfant sera la cause de la ruine et du salut de plusieurs; en lui les pensées de plusieurs seront manifestées. » Ces paroles avaient trait au divin Enfant. « Un glaive de douleurs transpercera votre âme, » ajouta-t-il ; ces mots regardaient la sainte Vierge (Luc. 2. 34).
Bientôt après, ces paroles obtinrent leur accomplissement, lorsque Marie dut s'enfuir en Égypte avec son enfant, pour le sauver de la cruauté du sanguinaire Hérode, et lorsqu'elle perdit son Fils âgé de douze ans, qu'elle retrouva enfin dans le temple de Jérusalem. Mais la prophétie s'accomplit entièrement, lorsque la plus tendre des mères dut voir son Fils devenu l'objet des opprobres et des ignominies les plus révoltantes, et que, debout aux pieds de la croix, elle dut être témoin de la mort la plus douloureuse. C'est cette douleur intérieure de la Vierge bénie que les chrétiens, qui ont les premiers célébré cette fête, ont voulu surtout se rappeler, et si nous ressentons réellement un amour filial envers Marie, nous devons certainement souhaiter de passer ce jour dans la compassion envers notre mère au souvenir de ses souffrances ; car c'est précisément à cause de nous et de nos péchés que Jésus-Christ a voulu subir tous ces tourments. Telle fut sans doute aussi la cause première pour laquelle cette fête, une fois introduite, se répandit par tout le monde catholique.
Simon. Et vraiment la sainte Vierge s'est acquis le nom de mère de douleurs à plus de titres que jamais homme n'ait pu le mériter.
Le Curé. Et voilà justement pourquoi elle est devenue à la fois l'exemple et la consolation, non-seulement des mères qui sont dans la souffrance, mais de tous les hommes qui sont dans l'adversité. Si Dieu n'a pas épargné celle qui fut trouvée la plus digne dans tout le genre humain, pour devenir la mère du Sauveur; s'il donnait boire à la Vierge immaculée le calice des souffrances jusqu'à la lie, dites-moi donc comment nous, qui sommes coupables, nous pouvons murmurer contre Dieu, quand il nous envoie des peines pour nous amender ou bien pour nous mettre à l'épreuve? En effet, comme elles durent être cuisantes les douleurs de la mère de Dieu souffrant à côté de son Fils ! « Oui , vraiment le glaive de douleurs a transpercé votre âme , ô Reine des Martyrs ! » dit saint Bernard , car comment le glaive aurait-il pu pénétrer jusqu'au coeur de votre fils sans transpercer tout-à fait votre âme!
CULTE ET FÊTES DE LA SAINTE VIERGE. IMMACULÉE CONCEPTION.
Résumé. Le culte de la Vierge est selon la Bible. Il est naturel. Ce que l'on entend par Immaculée Conception. Convenances de ce privilège en Marie. Définition de ce dogme. Manière de représenter l'Immaculée Conception.
Dans le village de Christenthal on s'était beaucoup entretenu des dernières paroles du curé concernant l'Immaculée Conception de la Sainte Vierge.
Le culte de la Vierge est selon la Bible.
Dieu l'a jugée digne, avant toutes les filles d'Ève, de devenir mère de Dieu, comme elle doit être pure et sainte, digne de respect et de vénération ! De quel prix elle doit nous être à cause de Jésus son Fils! Car c'est elle-même qui a donné les premiers soins à Jésus-Christ après l'avoir enfanté tout en demeurant vierge, et rien de plus juste que nous lui en soyons reconnaissants. Jésus-Christ lui-même l'a aimée de l'amour le plus tendrement filial, car, en mourant sur la croix, il l'a recommandée à son disciple bien-aimé. Il nous montre qu'il est prêt à exaucer nos prières par l'entremise de sa mère, puisque nous la voyons supplier pour d'autres pendant sa vie sur la terre, car c'est par suite des instances de Marie que le Sauveur fit son premier miracle aux noces de Cana. Voilà autant de raisons qui ont porté l'Église à favoriser de tout son pouvoir le culte de la Très-Sainte Vierge
Thomas. Monsieur le curé, dans les pays protestants par lesquels j'ai passé, j'ai entendu dire plus d'une fois une chose que je retrouve encore dans le petit livre que j'ai en main. J'y trouve que la Bible faisant très-rarement mention de la Sainte Vierge, celle -ci ne peut occuper dans la hiérarchie des êtres la place que lui désigne l'Église catholique.
Le Curé. L'idée de juger de la grandeur de Marie par le nombre plus ou moins grand des textes où il est parlé d'elle dans l'Écriture Sainte, me parait, extrêmement naïve. Si ce principe bizarre était admis, il faudrait dire que les Scribes et les Pharisiens ont plus de droit que la Mère de Dieu à la vénération des chrétiens, attendu qu'il en est bien plus souvent question dans les saints livres que de la bienheureuse Vierge. Peu importe donc le nombre des passages où il est parlé de Marie ; ce qui importe, c'est la manière dont il en est parlé dans l'Écriture.
D'ailleurs ne savons-nous pas qu'un grand nombre de personnages de la plus haute importance, tant de l'Ancien que du Nouveau Testament, obtiennent à peine une courte mention dans le texte sacré : tels sont, par exemple, Melchisédech, Siméon, les Rois Mages et autres. Il en est de même de la plupart des Sacrements, qui ne sont indiqués que tout au juste autant qu'il le faut, pour en faire connaître l'essence et l'origine divine. D'un autre côté, est-il bien vrai que l'Évangile parle si rarement de la Sainte Vierge? Voyez ; il donne d'abord sa généalogie ; il fait le récit de la mission de l'Ange Gabriel, qui la salue de la part de Dieu d'une manière plus respectueuse et l'exalte à un plus haut degré que ne l'a jamais fait prédicateur catholique ; il nous dévoile les grandeurs de sa belle âme dans les sublimes transports du Magnificat; nous y voyons la Mère du Sauveur présentant au temple son nouveau-né, conformément à la loi de Moïse, et le saint vieillard Siméon lui annonçant qu'un glaive de douleurs transpercera son âme.
Elle partage l'exil de son divin Fils persécuté par l'impiété d'Hérode; (en Égypte) c'est elle encore que nous retrouvons, quelques années après, avec Jésus enfant dans le temple. A Nazareth, le Verbe fait chair a voulu lui être soumis; commençant sa vie publique, son premier miracle, comme je vous le disais tantôt, est encore un acte de déférence pour sa sainte Mère. Nous la retrouvons au pied de la croix au moment où elle entend de la bouche de son Fils mourant ces paroles si pleines d'espérance pour tous les hommes : Femme, voilà votre Fils !
Enfin, nous la rencontrons avec les saintes femmes, après la résurrection. On le voit donc, les saints Livres ne manquent pas de faire mention de la Reine du Ciel chaque fois que le sujet l'exige; car n'oublions pas que Marie ne parut guère en public ; elle a réalisé, dans l'obscurité d'une vie retirée et dans les douces et saintes aspirations de la contemplation et de l'amour divin, cet idéal d'une vie parfaite devant Dieu qui commença par le glorieux privilège aujourd'hui proclamé par l'Église, savoir son Immaculée Conception, et qui obtint son complément par son Assomption également miraculeuse.
Et si maintenant nous nous arrêtons à considérer la manière dont les saints Livres parlent de cette Vierge des vierges, comment est-il possible d'avancer que le culte de Marie soit opposé à la Bible? Celle que l'Ange lui-même proclame pleine de grâces et bénie entre toutes les femmes, avec laquelle est le Seigneur; celle qu'Elisabeth reçoit par ces paroles : D'où me vient cet honneur et cette grâce que la mère de mon Seigneur me prévienne de sa visite? Celle à laquelle le Saint-Esprit dictait ces paroles sacrées : Et voilà que toutes les générations m'appelleront Bienheureuse ; car le Seigneur a fait en moi de grandes choses; celle dont la femme du peuple disait en voyant les prodiges de son Fils : Bienheureux le sein qui vous a portée! Celle enfin qui est à la fois la fille, la mère et l'épouse du Tout-Puissant, que l'Église entière a invoquée depuis tant de siècles, en lui disant : Priez pour nous, pécheurs, maintenant et à l'heure de notre mort, n'aurait pas de droit à nos hommages ! Non, mes amis!
Fête de l`Immaculée Conception - 8 décembre
Simon. J'aimerais que vous voulussiez nous expliquer clairement ce que signifient les mots Immaculée Conception.
Le Curé. Je ne pourrais mieux définir l'Immaculée Conception qu'en vous rapportant textuellement les paroles par lesquelles le Souverain Pontife a défini, d'une manière infaillible et au nom de l'Église catholique, ce que tout chrétien est obligé de croire sur le point qui nous occupe. Ces paroles, les voici : « Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine selon laquelle la Bienheureuse Vierge Marie fut, dès le premier instant de sa Conception, par une grâce et un privilège spécial de Dieu tout-puissant en vue des mérites de Jésus-Christ, sauveur du genre humain, préservée et exempte de toute souillure de la faute originelle, est révélée de Dieu, qu'elle doit par conséquent être crue fermement et constamment par tous les fidèles... »
Mais veuillez observer, mes amis, qu'il ne faut pas confondre avec l'Immaculée Conception de Marie ni sa virginité, ni le privilège qu'elle eut d'être préservée durant sa vie mortelle de tous péchés, même de la moindre faute vénielle, ni la sanctification avant la naissance.
Simon. Si je comprends bien, saint Jean-Baptiste aurait été sanctifié avant que de naître, sans être pour cela conçu sans péché.
Le Curé. Votre remarque est très-juste, Simon. Saint Jean-Baptiste fut sanctifié dans le sein de sa mère par la présence de Jésus, et c'est pour cela qu'on honore solennellement sa nativité; mais il n'est pour cela jamais venu à l'idée de personne de vénérer sa conception, comme nous vénérons celle de la sainte Vierge. Saint Jean-Baptiste fut sanctifié avant de naître, mais il n'en avait pas moins été conçu avec la tache du péché originel.
Simon. Il me semble très-convenable que celle qui devait devenir la Mère du Rédempteur, ne fût point sujette à la malédiction qui avait frappé le premier homme.
Et encore : Ne voyons-nous pas qu'il existe une grande ressemblance entre la vie de Jésus et celle de Marie ? Elle partage en son cœur maternel les douleurs de son Fils depuis sa naissance jusqu'à sa mort sur la croix : elle meurt comme son Fils, elle est reçue au ciel en corps et en âme comme lui, et il faudrait admettre cette immense disparité entre Jésus et Marie au premier moment de son existence? Admettre le péché originel en Marie, ce serait encore la rendre inférieure à saint Jean-Baptiste, qui fut au moins sanctifié avant sa naissance, ou bien la faire son égale, ce qui serait encore inadmissible, car il y a une immense différence entre la dignité de précurseur et celle de Mère du Messie.
Thomas. J'admets ces raisons, mais je trouve dans mon petit volume que l`Écriture sainte ne parle pas de l`Immaculée Conception de la Vierge.
Le Curé. Elle ne parle pas du nom, mais elle indique et renferme suffisamment la chose elle-même. Car déjà au paradis terrestre, il fut dit à Satan : Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; elle t'écrasera la tête. Mais nier la Conception Immaculée de cette Femme que la prophétie a en vue, n'est-ce pas contredire cette parole sortie de la bouche de Dieu? N'est-ce pas transformer en amitié cette inimitié et montrer le serpent écrasant la tête de la femme, de la véritable Mère des vivants, au lieu d'en être écrasé lui-même? Je vous citerai encore la célèbre prophétie du prophète Isaïe : « Voilà qu'une Vierge concevra et enfantera un fils, et son nom sera Emmanuel.» (Isaïe 7,14).
Simon. Je n'oublierai jamais le jour auquel nous avons célébré la belle solennité que nous eûmes à cette occasion : comme tout le monde prenait part à la joie de l'Église! Tous, sans exception, nous avions fait notre possible pour décorer nos maisons, notre église n'était plus à reconnaître ; et puis l'illumination qui suivit durant toute la soirée, comme cela nous allait à l'âme !
Le Curé. Oui, Simon, et cette joie universelle qui s'est manifestée partout où se trouvaient des catholiques.
Simon. Il y a longtemps que j'aurais voulu vous demander pourquoi on représente ordinairement l'Immaculée Conception comme elle se trouve dans notre église, savoir : La Mère de Dieu est debout sur le globe terrestre, elle tient dans ses mains une fleur de lys et écrase de son pied le serpent. Elle a encore la lune sous les pieds, et un cercle d'étoiles entoure sa tête. Que signifient donc ces attributs qu'on lui a donnés ? Quant au lys, je suppose qu'il figure la pureté de la Vierge.
Le Curé. Oui, et le serpent écrasé sous son talon, signifie que Marie a été préservée de la tache originelle et que le séducteur de nos premiers parents n'a eu aucune puissance sur elle, puisque jamais l'ombre d'un péché ne souilla son âme : elle lui écrase la tête par sa pureté et sa sainteté ; élevée qu'elle est bien haut au-dessus de tous les hommes et par conséquent la Reine de la terre, on la fait planer au-dessus du globe terrestre. Et la lune sous ses pieds? Vous savez que la lune est sujette aux changements, qu'elle varie continuellement en croissant et décroissant sans cesse. Hé bien, comme la Sainte Vierge a sous ses pieds cet astre si inconstant, cela veut dire que la Mère de Dieu est élevée au-dessus des vicissitudes de la terre et des hésitations entre le bien et le mal. Si on entoure sa tête d'une couronne d'étoiles, c'est pour faire comprendre que par ses pensées et ses sentiments elle a toujours habité près de Dieu ; qu'elle ne s'est occupée que de lui.
Simon. Comme tout cela est beau et ingénieusement trouvé ! J'ai aussi à la maison une statue de Marie Immaculée qui me sera encore plus chère, depuis que je sais ce que toutes ces choses signifient.
Le Curé. Et vous pouvez encore retirer un grand profit de cette image ou de cette statue que vous possédez, si vous vous efforcez de réaliser en vous-même ce qu'elle vous enseigne. Vous n'avez pas été préservé du péché originel, cela est vrai ; mais vous en avez été délivré par le baptême : votre devoir est donc aussi d'écraser la tête du serpent en rejetant de vous toutes les tentations. Le serpent que vous voyez aux pieds de l'image de Marie, tient dans sa gueule la pomme de la première séduction ; d'ordinaire, on voit attachées à ce fruit quelques belles feuilles. C'est ainsi que l'ennemi du salut tâche de masquer le péché et de le faire paraître sous une forme attrayante. Mais nous devons prendre garde de nous laisser entraîner par sa ruse et fuir le mal, quand il nous parait le plus séduisant. Comme Marie, tenons ferme dans nos mains le lys, c'est-à-dire la pureté du cœur et la sainteté de la vie : comme elle, faisons-en sorte que nos pensées et nos affections nous élèvent jusqu'à Dieu par-dessus les astres, que nous foulions aux pieds tout ce qui est de la terre et assujetti au changement, ne voulant pas agir contre la volonté de Dieu notre Père céleste pour des intérêts périssables.
Notre première Mère nous a laissé un triste exemple; pour nous, suivons celui que nous donne la nouvelle Ève, la vraie Mère des vivants (c'est ce que signifie en hébreu le nom d'Ève) avec la même ardeur que nous avons imité jusqu'ici la première en nous laissant séduire par le démon (l`ange déchu). Après ces paternelles exhortations, le pasteur congédia l'assemblée en invitant les assistants à ne pas manquer le lendemain, puisqu'il s'agissait de la Sainte Vierge et qu'il convenait de se préparer à la grande fête de l'Assomption.
ENTRETIEN DIXIÈME.
Résumé : Nativité de la Sainte-Vierge. — Saint Nom de Marie ; sa signification — La Présentation. — Épousailles. — Annonciation. L`Angélus. — La Visitation; Salutation angélique. — Fêtes de précepte. — La Purification ; les Relevailles. — Fête des Douleurs de la Sainte Vierge.
Nativité de la Sainte Vierge – 8 septembre
St-Anne et St-Joachim a la naissance de la Sainte Vierge Marie
Après avoir, sur l'invitation du pasteur, chanté en l'honneur de la Sainte Vierge un cantique que tout le monde savait par coeur, le curé commença ainsi :
Mes chers amis, après avoir parlé de l'Immaculée Conception, je ne saurais mieux faire qu'en commençant aujourd'hui par la Nativité de la Sainte Vierge que nous fêtons le 8 du mois de septembre, car il est naturel que si déjà nous nous réjouissons de la Conception Sainte de notre Mère, sa naissance soit pour nous le sujet d'une joie plus grande encore.
C'est pour cette raison que, déjà dès les premiers siècles et très-certainement dès le cinquième, ce jour fut considéré comme un jour de fête, et l'esprit de ferveur qui l'avait provoqué ne manqua pas de s'étendre sur toute l'Église. D'après ce que je vous ai déjà fait remarquer dans notre entretien d'hier, vous voyez tout d'abord que la célébration de sa Nativité est un honneur exceptionnel que nous rendons à Marie. A part la nativité de saint Jean-Baptiste, l'Église ne célèbre celle d'aucun autre Saint. Cela ne doit pas vous surprendre, pour ce qui regarde le saint Précurseur, ( St-Jean le Baptiste) puisqu'il a été sanctifié déjà avant sa naissance (Luc. 1. 15.)
Le Saint Nom de Marie – 12 septembre
Le Curé. Le dimanche qui suit la fête de la Nativité de Notre- Dame, l'Église célèbre celle du saint nom de Marie. Le nom de ceux que nous aimons nous est cher, et comment celui de la mère de Dieu, par lequel nous implorons son intercession, nous serait-il indifférent? Et puis, ce nom sacré a été glorifié pour jamais par celle qui fut saluée pleine de grâce par l'ange Gabriel. C'est avec raison que les parents catholiques ont conservé le louable usage de donner ce nom à leurs filles et parfois aussi aux garçons, afin de les placer sous la protection spéciale de Marie et de leur donner, en leur patronne, le plus bel exemple de toutes les vertus qu'ils doivent s'efforcer d'imiter.
Simon. Le nom de Marie n'a-t-il pas une signification particulière ?
Le Curé. Il signifie 1° Reine ou souveraine, parce qu'après être devenue la mère de Jésus-Christ, elle partage aujourd'hui sa gloire dans le ciel ; 2° Étoile de la mer, parce que, de même que les navigateurs sont dirigés au port par une étoile, de même les chrétiens sont dirigés vers le ciel par l'exemple et par l'intercession de Marie ; 3 - Mère d'amertume, à cause des incroyables douleurs que Marie a souffertes durant toute sa vie.
Présentation de Notre-Dame ( au temple de Jérusalem) – 21 Novembre
Présentation de la sainte Vierge Marie enfant au temple de Jérusalem par St-Anne et St-Joachim
Passons maintenant à une autre fête qui nous rappelle encore l'enfance et l'adolescence de la mère de Dieu, je veux parler de la Présentation de Notre-Dame, que nous célébrons le 21 Novembre. Une pieuse tradition nous rapporte que les parents de la sainte Vierge, saint Joachim et sainte Anne avaient promis de consacrer leur enfant au service spécial de Dieu dans son temple. Lorsqu'elle eut atteint sa troisième année, ils conduisirent la sainte enfant à Jérusalem où, joignant le travail à la contemplation et travaillant de ses mains pour l'ornement du temple, elle fit aussi le vœu de virginité perpétuelle. C'est pour honorer cette circonstance si mémorable de la vie de la Sainte Vierge qu'a été instituée la fête de la Présentation. Ce souvenir renferme certainement une excellente leçon à l'adresse des chrétiens ; il leur apprend à sacrifier au Seigneur tout ce qu'ils ont et à ne vivre que pour son service qui est en même temps notre propre salut.
Note:Les artistes qui ont représenté ce trait de la vie de la sainte Vierge, ont tenu compte de la tradition qui porte que les parents de Marie, venus de Nazareth à Jérusalem, pour consacrer leur sainte enfant au Seigneur, s'arrêtèrent au pied de l'escalier au haut duquel attendait le grand prêtre « et la sainte Vierge, quoiqu'âgée seulement de trois ans, monta d'une égale force et résolution que l'eut su faire une personne de quinze ans. Elle monta ces 15 degrés avec tant de vitesse qu'on eût dit à la voir courir qu'elle était une colombe ou du moins qu'elle en avait pris les ailes » (Ribadeneira, 21 novembre). Souvent la Vierge porte un cierge allumé et elle est accompagnée d'autres vierges qui, comme elle , doivent se consacrer au grand Roi (Psaume 44).
La fête des Épousailles de Marie – 23 Janvier
La fête des Épousailles ( fiançailles) de Marie, le 23 janvier, nous fait ressouvenir, ainsi que l'indique déjà le nom, que la bienheureuse Vierge épouse un homme juste et craignant Dieu du nom de Joseph : (Matthieu 1,16) union angélique qui ne flétrit ni ne porta la moindre atteinte à sa virginité.
Fête de l`Annonciation de la Sainte-Vierge Marie – 25 mars
L`Archange Gabriel annonçant la naissance du Sauveur
Nous sommes parvenus maintenant à une solennité qui ne se rapporte pas seulement à la mère de Dieu, mais surtout au divin Sauveur lui-même : je veux parler de la fête de l' Annonciation, qui tombe le 25 du mois de mars. Elle nous représente le grand moment que., depuis des milliers d'années, les Saints de l'ancien Testament avaient souhaité voir arriver, le moment où le Rédempteur promis fut annoncé par l'ange et auquel le Saint-Esprit, couvrant la Sainte Vierge de son ombre, le Fils de Dieu fut conçu dans le sein virginal pour se revêtir de notre nature. C'est donc le premier moment de la Rédemption commencée que nous célébrons en ce jour, et les saintes aspirations avec lesquelles les saints Patriarches la souhaitaient, devraient être la mesure de notre joie et de notre reconnaissance de ce que, plus heureux qu'eux, nous la voyons réalisée.
C'est sans doute à cause de ces sentiments qui étaient bien vifs en eux, que les chrétiens des premiers siècles la fêtaient déjà : car tandis que les autres fêtes dont je viens de vous entretenir, sont d'une origine assez récente, celle-ci était déjà instituée quatre cents ans après Jésus-Christ et solennisée avec beaucoup de pompe dans tout le monde catholique. Oui, les chrétiens avaient une si grande reconnaissance envers Dieu à cause du bien fait de l'Incarnation que, non contents d'y penser spécialement une fois dans l'année, ils s'efforcèrent, pour ne point en perdre le souvenir, d'en renouveler la mémoire plusieurs fois le jour. Pourriez vous me dire quelle pratique de piété ils établirent pour cette fin ?
Simon. Je pense qu'oui. Vous voulez sans doute parler de l`Angelus.
Le Curé. C'est cela même. Cette pratique de prier la salutation angélique a donc pour but de nous rappeler sans cesse le grand mystère de l'Incarnation , pour en remercier Dieu et nous encourager à honorer la mère de Dieu à cause de son Fils. Il y a environ cinq cents ans que l'usage de prier l`Angelus le soir et de donner à cette fin un signal avec la cloche est établi. Afin d'encourager les chrétiens à la récitation de cette prière, le pape Jean XXII accorda à tous ceux qui la diraient des indulgences particulières. Plus tard l'usage de réciter trois fois par jour cette belle prière devint général et d'autres souverains Pontifes l'enrichirent encore de nouvelles faveurs. Voyez, mes chers amis, comme elle est sublime cette sainte coutume. Trois fois le jour : au lever du soleil, à midi et au coucher du soleil, la cloche nous invite à la prière. Or, comme les heures du jour ne sont pas les mêmes par toute la terre et que le soleil tournant de l'Est à l'Ouest fait le tour du globe en vingt-quatre heures, cette prière forme autour de la terre comme une triple ceinture spirituelle qui enlace tous les catholiques du monde dans le même amour.
L`Angélus du soir dans les campagnes
A mesure que le soleil s'avance dans sa course, ces saintes aspirations de la reconnaissance s'avancent de même de lieu en lieu, de bouche en bouche comme un mot d'ordre que les enfants de l'Église se transmettent l'un à l'autre, pour revenir après vingt-quatre heures à son point de départ et recommencer ensuite sa course de nouveau : « l'Ange du Seigneur a annoncé à Marie et elle a conçu du Saint-Esprit. — Voici la servante du Seigneur : qu’ il me soit fait selon sa parole. — Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous. » Et de ville en ville, de hameau en hameau, dans les chaumières comme dans les palais, les genoux se ploient, les fronts s'inclinent à la pensée du Dieu fait homme, et les âmes se réunissent aux pieds du trône du Tout-Puissant pour l'adorer et pour vénérer sa Mère.
S'il est déjà très-louable de se rappeler souvent le mystère de l`incarnation, auquel nous sommes redevables de notre salut et de notre sanctification, l'usage de prier l`Angélus renferme encore un autre avantage en ce que, interrompant le travail de l'homme, il le sanctifie et l'allège. Et, en effet, il n'y a rien de plus important, de plus nécessaire que de reporter de temps en temps notre pensée sur ce qui est éternel. Si nous négligeons de le faire, nous nous serons bientôt habitués à prendre plus de soin de notre corps que de notre âme, à travailler et à vivre comme si nous étions destinés n demeurer éternellement sur la terre et comme si nous n'avions pas à attendre une patrie meilleure. Mais lorsque, en labourant son champ, le campagnard et l'ouvrier occupé dans son atelier, ne sont occupés que de gagner des biens temporels et ne pensent qu'au pain matériel, voilà que le tintement de la petite cloche vient leur dire tendrement à l'oreille et au cœur qu'ils doivent oublier pour un moment les soucis matériels et terrestres pour penser à Dieu et à leur âme immortelle.
Simon. C'est bien la vérité : il ne faut qu'avoir omis sa prière pendant un seul jour, pour se sentir devenu tout terrestre.
Le Curé. Si seulement les chrétiens voulaient profiter des avantages que leur offre cette prière. La salutation angélique nous offre aussi un moyen de confesser notre foi, toutes les fois que, foulant aux pieds le qu'en dira-t-on, nous ne craignons pas de nous découvrir et de joindre nos mains en présence des autres.
Fête de la Visitation – 31 mai
Nous rencontrons ensuite dans notre marche la fête de la Visitation de la Sainte Vierge, qui nous rappelle la visite que Marie rendit à sainte Élisabeth, sa cousine, après avoir entendu de l'archange l'heureux message que Dieu l'avait élue pour devenir la mère du Messie. Cette fête se célèbre le 31 mai. Je n'ai pas besoin de vous dire que, dans, nos prières journalières, nous répétons, non-seulement les paroles de l'ange à Marie, mais aussi la salutation que lui adressa sainte Élisabeth en la recevant chez elle.
Simon. Oui, c'est ce qui se fait dans l`Ave Maria.
Le Curé. Allons, puisque vous en savez si loin, vous pourrez encore me dire quelles sont les paroles que l'ange prononça et celles que dit sainte Élisabeth.
Simon. Les paroles de l'ange Gabriel sont celles-ci : « Je vous salue (Marie), pleine de grâce, le Seigneur est avec vous! » et celles de sainte Elisabeth : « Vous êtes bénie entre les femmes et le fruit de vos entrailles est béni. »
Le Curé. Les chrétiens s'accoutumèrent à y ajouter encore le nom de Jésus, qui en ce moment était déjà connu de la sainte Vierge, mais pas encore d'Elisabeth. — Voyez, à proprement parler, ce sont les paroles d'un ange que nous empruntons pour saluer la mère de Dieu et pour la vénérer; et sainte Élisabeth y contribue aussi pour une part. Il est donc bien certain que nous ne pourrions trouver une salutation plus sainte, ni plus vénérable que celle qui nous a été enseignée par des maîtres d'une si grande sainteté. C'est bien là une salutation angélique, ainsi que nous l'appelons, et elle mérite que nous ne la prononcions qu'avec la ferveur et la pureté d'un ange.
Simon. Lorsque l'on considère toutes ces belles choses, la pensée de les avoir parfois prononcées sans attention et sans respect vous fait mal !... Mais d'où viennent les dernières paroles de l'Ave Maria ?
Le Curé. Ces paroles, par lesquelles nous implorons l'assistance de la sainte Vierge, furent ajoutées à la salutation angélique d'abord par de fervents chrétiens, ensuite examinées et approuvées par les pasteurs de l'Église et enfin prescrites pour tout le monde, de sorte que, dans tout le monde catholique, on ne prie plus l`Ave Maria qu'en y ajoutant ces mots : « Sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous , etc. » Nous avons parlé jusqu'ici des fêtes de la sainte Vierge qui précèdent la Nativité de Jésus-Christ et nous les avons rappelées toutes, si je ne me trompe.
Purification ou la fête de la Chandeleur. – 2 Février
Simon. En continuant selon l'ordre que nous avons suivi jusqu'ici, la première fête de la sainte Vierge après la Nativité du Sauveur, c'est sans doute la Purification ou la fête de la Chandeleur.
Le Curé. Effectivement, et nous avons déjà trouvé l'occasion de parler de l'usage de bénir les cierges en ce jour. Pour ce qui concerne la fête elle-même, qui se célèbre, comme vous savez, le 2 février, elle est d'une origine plus ancienne que cet usage; on a commencé à la solenniser généralement cinq cents ans après Jésus-Christ. De même que les cierges que l'on bénit en ce jour, cette fête doit nous rappeler la mère du Sauveur portant son nouveau-né au temple de Jérusalem afin d'y déposer l'offrande prescrite par la loi de Moïse. Ainsi que toutes les autres prescriptions de la loi ancienne, cette loi avait pour but de rappeler vivement aux hommes le péché originel et l'état de déchéance de tout le genre humain par suite de ce péché. Chaque fois qu'une femme était devenue mère, elle était considérée par la loi ancienne comme impure, pendant quarante jours lorsque c'était un garçon, et pendant quatre-vingts si c'était une fille. Pendant tout ce temps, elle n'osait toucher rien de sacré ; cela devait lui rappeler que cette naissance n'était pas un sujet de joie, puisqu'elle avait enfanté un pécheur auquel il fallait encore la grâce d'être racheté. Ces jours-là passés, elle devait se présenter au temple avec son enfant ; et parce que, à cause du péché originel, nul homme n'est digne de la vie, mais que tous méritaient la mort aux yeux de Dieu, si Dieu n'avait désiré la sanctification et le bonheur de l'homme au lieu de sa perte ; la mère devait venir racheter, pour ainsi dire, son enfant à Dieu, et, selon qu'elle était riche ou pauvre, elle devait offrir un agneau ou deux colombes que l'on immolait ensuite à la place de l'enfant. C'était en même temps un souvenir de ce qui s'était passé autrefois lors de la sortie d'Égypte, Dieu ayant épargné les premiers-nés des Hébreux à cause du sang de l'agneau dont ils avaient marqué leurs portes; tandis qu'il fit mourir tous les premiers-nés des Égyptiens en une seule nuit. Tout cela avait trait aussi au Sauveur qui devait venir nous délivrer du péché et de l'esclavage de Satan par les mérites de son sang; et les victimes qu'on immolait dans le temple n'étaient que la figure de ce Rédempteur à venir.
Simon. Mais Jésus-Christ n'avait jamais péché.
Le Curé. C'est très-juste; aussi cette loi ne s'appliquait-elle pas à la personne du Sauveur, cela est évident, puisqu'il était sans péché et que la sainte Vierge l'avait enfanté tout en demeurant vierge; cependant il voulut s'assujettir à cette loi générale, d'une part, pour nous donner un exemple d'obéissance, et d'autre part, parce que les animaux que l'on immolait étaient la figure du sacrifice qu'il voulait faire de lui-même pour la délivrance de l'humanité. Ici la sainte Vierge offrit deux colombes : mais Jésus ne fut racheté à ce prix que pour réserver sa vie pour la mort sur la croix qu'il devait subir trente-trois ans plus tard.
Simon. Comme le christianisme a admirablement changé toutes choses !
Le Curé. Oui, il a tout changé par la grâce de celui qui s'est livré à la mort pour chacun de nous. De sorte que nulle mère chrétienne n'ignore qu'elle a donné au monde un pécheur, et elle aurait raison de s'en affliger, si elle ne savait, qu'à peine né, ce fruit de ses entrailles est purifié dans les eaux du baptême par lequel l'Église le sanctifie. 0 vous, pères et mères, qui avez autour de vous vos petits enfants, n'oubliez pas que vous êtes environnés de saintes âmes, et plaise au ciel que vous ne soyez pas seuls entachés par le péché au milieu d'eux. Et chaque fois qu'il plaît à Dieu de multiplier votre famille, ne tardez pas, je vous en conjure, de faire purifier par la grâce du baptême ces nouveaux-nés. Alors seulement vos regards peuvent se reposer tranquillement et avec bonheur sur votre enfant. Préférez leur faire administrer ce sacrement dans le lieu saint, à l'église. Cela est bien plus convenable et, dans la suite, ce sera un bien plus doux souvenir pour vos enfants de penser qu'ils ont été baptisés dans la maison de Dieu que de l'avoir été à votre domicile. Et puis, c'est plus conforme à l'exemple donné par Votre-Seigneur; d'ailleurs, après le ciel, c'est la maison de Dieu que tout chrétien doit considérer comme sa maison paternelle.
Simon. Nous ne pouvons avoir de séjour plus beau et plus saint que là où le Sauveur est réellement présent.
Le Curé. Ce que David rapporte au temple de l'ancienne alliance s'applique mieux encore aux églises chrétiennes : Un jour dans votre sanctuaire ,
ô mon Dieu , dit le psalmiste, est préférable à mille partout ailleurs! (Psaume 84. 10).
Le Curé. Pour les enfants si leur coeur n'est pas accessible aux bonnes leçons et à une éducation chrétienne, ce sera en vain que les parents les plus consciencieux travailleront à façonner leur âme. Mais ce que les parents ne devraient jamais oublier, c'est de penser que tous leurs efforts seront nuls et sans résultat, si Dieu ne les bénit ; c'est pourquoi ils ne doivent pas se contenter d'offrir leurs enfants une seule fois, mais le faire continuellement en demandant pour eux la grâce de vivre saintement. Et lorsque vos enfants auront atteint l'âge de raison, faites-les s'avancer souvent vers l'endroit de l'église où ils furent régénérés par le saint sacrement de Baptême; choisissez de préférence les heures pendant lesquelles il n'y a personne à l'église et conduisez vos enfants jusqu'aux fonts baptismaux. Dites-leur : « Voyez, c'est ici que vous avez été purifiés du péché et que vous avez été marqués du caractère de chrétiens.»
C'est ici que votre parrain a dit en votre place : Je renonce à tout péché, à Satan, l'ami et l'auteur du péché; je veux être baptisé et appartenir par là à Jésus-Christ, l'ennemi de tout mal. Dites-leur encore : «Mes enfants, c'est en cet endroit que votre parrain dut promettre tout cela avant que cette grâce ne vous fût conférée; ne sortez pas, sans avoir vous-mêmes renouvelé la même promesse, de votre propre bouche, et par votre propre conviction. Mais ne vous contentez pas de le faire aujourd'hui, promettez très-souvent les mêmes choses à Dieu et gardez-vous bien de jamais les oublier. » De la sorte, vous pourrez espérer consolider dans le cœur de vos enfants les bonnes résolutions qui les porteront au bien tous les jours de leur vie. Vous avez tous déjà vu sans doute la représentation de la Sainte- Famille?
Simon. Oh oui! Marie et Joseph avec l'enfant Jésus.
Le Curé. Hé bien, cette famille doit être le modèle de toute famille chrétienne. La justice et la piété de saint Joseph et la suave pureté de Marie devraient se trouver chez tous les époux. On devrait retrouver en eux ce zèle pour le bien-être des enfants que Dieu leur a confiés et cet amour de la prière qui ont distingué la mère et le père nourricier du Sauveur, afin que, la bénédiction de Dieu aidant, leurs enfants deviennent une fidèle reproduction de l'enfant Jésus. Leurs enfants étant soumis, comme l'a voulu être le Fils de Dieu lui-même, les parents verront leurs forces et leur goût augmenter, pour travailler joyeusement à les rendre heureux. J'allais finir en vous souhaitant ce bonheur que Dieu ne refuse jamais aux parents qui l'invoquent, mais je me souviens que je dois encore vous parler d'une fête de la sainte Vierge , afin que demain , au grand jour de l'Assomption , je puisse commencer immédiatement par l'explication de cette belle fête, je veux parler de la Fête des douleurs de Marie, qu'on nomme aussi la Compassion.
Fête des douleurs de Marie – 15 septembre
Simon. Quel jour célèbre-t-on cette fête?
Le Curé. Le 15 septembre. Vous vous rappelez que le saint vieillard Siméon, en recevant l'enfant Jésus dans ses bras, rendit à Dieu ses actions de grâces de ce qu'il lui était donné devoir encore avant de mourir le Sauveur du monde. Mais à cette occasion aussi il prophétisa sur cet enfant et sa mère en disant : « Cet enfant sera la cause de la ruine et du salut de plusieurs; en lui les pensées de plusieurs seront manifestées. » Ces paroles avaient trait au divin Enfant. « Un glaive de douleurs transpercera votre âme, » ajouta-t-il ; ces mots regardaient la sainte Vierge (Luc. 2. 34).
Bientôt après, ces paroles obtinrent leur accomplissement, lorsque Marie dut s'enfuir en Égypte avec son enfant, pour le sauver de la cruauté du sanguinaire Hérode, et lorsqu'elle perdit son Fils âgé de douze ans, qu'elle retrouva enfin dans le temple de Jérusalem. Mais la prophétie s'accomplit entièrement, lorsque la plus tendre des mères dut voir son Fils devenu l'objet des opprobres et des ignominies les plus révoltantes, et que, debout aux pieds de la croix, elle dut être témoin de la mort la plus douloureuse. C'est cette douleur intérieure de la Vierge bénie que les chrétiens, qui ont les premiers célébré cette fête, ont voulu surtout se rappeler, et si nous ressentons réellement un amour filial envers Marie, nous devons certainement souhaiter de passer ce jour dans la compassion envers notre mère au souvenir de ses souffrances ; car c'est précisément à cause de nous et de nos péchés que Jésus-Christ a voulu subir tous ces tourments. Telle fut sans doute aussi la cause première pour laquelle cette fête, une fois introduite, se répandit par tout le monde catholique.
Simon. Et vraiment la sainte Vierge s'est acquis le nom de mère de douleurs à plus de titres que jamais homme n'ait pu le mériter.
Le Curé. Et voilà justement pourquoi elle est devenue à la fois l'exemple et la consolation, non-seulement des mères qui sont dans la souffrance, mais de tous les hommes qui sont dans l'adversité. Si Dieu n'a pas épargné celle qui fut trouvée la plus digne dans tout le genre humain, pour devenir la mère du Sauveur; s'il donnait boire à la Vierge immaculée le calice des souffrances jusqu'à la lie, dites-moi donc comment nous, qui sommes coupables, nous pouvons murmurer contre Dieu, quand il nous envoie des peines pour nous amender ou bien pour nous mettre à l'épreuve? En effet, comme elles durent être cuisantes les douleurs de la mère de Dieu souffrant à côté de son Fils ! « Oui , vraiment le glaive de douleurs a transpercé votre âme , ô Reine des Martyrs ! » dit saint Bernard , car comment le glaive aurait-il pu pénétrer jusqu'au coeur de votre fils sans transpercer tout-à fait votre âme!
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN ONZIÈME.
Résumé :— Fête de l'Assomption — Explications des Litanies de la sainte Vierge.
15 août
A l'arrivée du vénérable chef de la paroisse tout le monde était occupé à chanter les louanges de la Mère de Dieu, ce qui charma le bon curé. Le cantique qu'ils chantaient était une imitation du Salve Regina que nous allons transcrire.
Je vous salue, auguste et sainte Reine,
Dont la beauté ravit les immortels.
Mère de grâce, aimable souveraine,
Je me prosterne aux pieds de vos autels.
Je vous salue, ô divine Marie,
Ah ! recevez l'hommage de nos coeurs,
Après Jésus, vous êtes notre vie,
Notre refuge et l'espoir des pécheurs.
Enfants proscrits d'une coupable mère,
Bannis du ciel, les yeux baignés de pleurs, ,
Par nos soupirs, de ce lieu de misère
Nous vous faisons entendre nos douleurs.
Écoutez-nous, puissante protectrice,
Tournez sur nous vos yeux compatissants,
Et montrez-nous, qu'à nos malheurs propice,
Du haut des Cieux vous aimez vos enfants.
O douce, ô tendre, ô pieuse Marie !
Vous dont Jésus, notre Dieu, prit le jour,
Faites qu'après l'exil de cette vie
Nous le voyions dans l'éternel séjour.
Le bon prêtre ne put s'empêcher de louer le zèle de ses paroissiens et de faire l'éloge de l'à plomb avec lequel ils avaient chanté ce cantique. Ensuite Thomas prit la parole :
Thomas. Il me parait inconvenant d'user d'expressions comme il s'en trouve dans ce cantique et même dans un grand nombre de prières, expressions qui nous portent à penser que la sainte Vierge ou les saints peuvent nous aider de leurs propres forces et pas seulement par leur intercession.
Le Curé. Il n'est pas un seul catholique instruit de sa religion qui ignore que les Saints ne peuvent nous venir en aide que par leurs intercessions pour nous auprès de Dieu et nullement par leur propre force ; c'est à la sagesse de Dieu qu'il incombe de juger s'il trouve bon de les exaucer.
Le Curé. Nous célébrons aujourd'hui la plus grande des fêtes de la sainte Vierge, sa glorieuse Assomption. Je vous disais, dans notre dernier entretien, combien il est juste de témoigner à Marie la part que nous prenons à ses douleurs. Pour les mêmes raisons, nous devons aussi partager ses joies et nous réjouir de sa glorification. Nous n'attendons pas, il est vrai, jusqu'à cette fête pour le faire; l'antienne que l'on chante depuis Pâques jusqu'à la fête de la Trinité et qui commence par les mots Regina Coeli, rappelle suffisamment que nous aimons à nous réjouir avec elle de ce que Jésus-Christ son Fils est sorti triomphant du tombeau : nous disons donc pendant le temps pascal : Reine des Cieux, réjouissez-vous, alleluia, Puisque celui que vous avez mérité de porter, alleluia est ressuscité, comme il l'avait dit, alleluia. Priez Dieu pour nous, alleluia.
Mais le jour où la gloire et la joie de Marie sont complètes et auquel nous avons par conséquent le plus de raisons d'unir notre allégresse à la sienne, c'est le jour que nous rappelle le 15 août, que nous fêtons aujourd'hui, c'est l'Assomption.
Thomas. Sans doute que le mot Assomption ne signifie pas la même chose qu’ Ascension. Pourquoi dit-on par exemple l'Ascension de Notre-Seigneur et l'Assomption, et non pas l` Ascension, de la sainte Vierge?
Le Curé. Le Fils de Dieu est monté au ciel par la propre vertu de sa divinité ; la Sainte Vierge au contraire, a été élevée dans le ciel par la vertu de son divin Fils pour y recevoir cette couronne de gloire qu'elle avait méritée comme la fidèle servante du Seigneur sur la terre. C'est pourquoi l'Église nomme cette fête l'Assomption ou la Réception de Marie, ce qui exprime mieux la manière dont elle est montée au ciel que le mot Ascension. Cependant l'objet principal de la fête d'aujourd'hui, c'est sa mort et son couronnement dans le royaume céleste.
Simon. Ce sont des faits qui certes doivent nous réjouir et nous exciter à prendre la part la plus vive aux solennités qui les rappellent.
LES FÊTES DES SAINTS. LA DÉDICACE DES ÉGLISES.
Résumé : Fête des Anges gardiens. Des Saints de l'Ancien Testament. Des Apôtres et des Évangélistes. Leurs attributs. Fêtes des martyrs. Actes des martyrs. Intercession des Saints. Qualités que doit avoir la prière. Les saints confesseurs. Martyrologe. Canonisation et béatification des Saints. Les saintes vierges et les saintes femmes. But de l'Église en instituant les fêtes des Saints.
Simon. A la réunion précédente nous nous sommes séparés en chantant; de là vient que nous ne savons pas de quoi il sera question aujourd'hui. Peut-être serez-vous assez bon, M. le curé, pour nous dire quelque chose des différents saints.
Le Curé. Telle est aussi mon intention ; cependant ne vous attendez pas à ce que j'en parle avec autant de détails que je l'ai fait jusqu'ici pour les autres fêtes; sans cela, nous ne pourrions pas épuiser ce sujet en une année entière. Nous passerons en revue les différentes catégories des saints et si quelqu'un d'entre vous demande à savoir quelques détails particuliers sur l'un ou sur l'autre, il lui sera libre de le faire.
Fête des Anges gardiens.
Le Curé. Parlons d'abord de quelques fêtes par lesquelles nous vénérons des saints qui n'ont jamais vécu sur la terre.
Simon. Comment?...
Le Curé. Oui, je veux parler des Anges, dont nous rencontrons plusieurs fêtes pendant l'année.
Attributs des saints Anges. Tous les Pères ont reconnu, d'après les saintes Écritures, neuf ordres ou choeurs composant la hiérarchie des esprits célestes. Ces neuf choeurs d'Anges ne se distinguent que par leurs fonctions et le degré de gloire dont ils jouissent.
1. Les Chérubins (Forts) sont représentés ordinairement avec quatre ailes , dont deux leur couvrent le corps par derrière et deux les enveloppent par devant.
2. Les Trônes sont représentés par des roues de feu ayant à l'entour des ailes garnies d'yeux; ils sont placés sons les pieds de Dieu et lui servent de trône.
3. Les Séraphins sont représentés par une tête avec deux, quatre ou six ailes : ils sont de couleur de feu et des flammes les entourent.
4. Les Dominations ,
5. les Puissances ,
6. les Principautés,
7. les Vertu portent des aubes , des ceintures et quelquefois des étoles ; elles tiennent des baguettes ou des sceptres à la main.
8. Les Archanges. Le nombre nous en est inconnu , mais l'Écriture Sainte en nomme trois : Michel, Gabriel, Raphaël. Saint Michel, l'ange des combats et de la justice, et dont le nom est le mot d'ordre des armées célestes : «Qui est semblable à Dieu?» est revêtu de la cotte d'armes d'un guerrier, il tient dans le bras gauche un bouclier , marqué quelquefois du mot d'ordre qui forme son nom : Quis ut Deus Une lance ou un glaive arme sa main droite : le démon, terrassé par les terribles coups de son adversaire , gît à ses pieds. — Quand on le représente hors d'un combat, il est revêtu d'une longue robe, sa lance est en repos , il porte le globe du monde ou bien la balance comme ministre de la justice divine.
Saint Gabriel, l'ange de la Rédemption , porte un lys à la main. Saint Raphaël ne se trouve que dans l'histoire de Tobie et, comme voyageur» on le représente avec un bourdon de pèlerin.
9. Les Anges adorateurs sont ou agenouillés, ou balançant l'encensoir, ou portant des flambeaux allumés ou bien soutenant une couronne sur la tête du Sauveur. Les anges ministres sonnent de la trompette, tiennent la balance a la pesée des âmes, etc. (Ext. de Crosnier : Iconographie chrétienne.)
Simon. C'est vrai, et d'abord la belle fête des saints Anges gardiens.
Fête des St Anges - 29 Septembre
Le Curé. Elle mérite en effet que nous la mentionnions avant toutes les autres ; car elle est une grande preuve de l'amour de Dieu envers nous, puisqu'il lui a plu de donner pour appuis à notre faiblesse l'assistance et la protection des esprits célestes. Mais c'est aussi pourquoi cette fête est pour nous une exhortation à aimer Dieu de toute notre âme et à le remercier pour un si grand bienfait, afin de nous montrer d'autant plus dignes de protecteurs si purs et si saints.
Joseph. Nous prions aussi tous les jours notre saint Ange gardien.
Le Curé. Vous faites très-bien, mon enfant, tous nous avons de grandes raisons de ne jamais négliger cette invocation. Car I ° l'ange que Dieu nous a donné pour protecteur est certainement en état d'implorer l'aide du Seigneur pour nos besoins spirituels et corporels. 2° Cette prière nous fait ressouvenir sans cesse que nous avons un ange gardien dont nous ne devons pas nous montrer indignes.
Si nous craignons souvent que les hommes ne soient témoins de nos actions, si parfois nous les redoutons plus que Dieu lui-même en osant faire en sa sainte présence ce que nous aurions honte de faire sous les yeux du moindre d'entre les hommes ; qu'au moins la pensée à la présence de notre saint ange nous empêche d'offenser Dieu de quelque manière que ce soit. Au jour du dernier jugement, le même ange sera à nos côtés et il sera notre avocat auprès du souverain Juge, si d'ailleurs nous l'avons mérité par notre conduite ; mais n'oublions pas qu'il sera aussi notre accusateur, si les peines qu'il s'est données pour nous ont été inutiles et si nous n'avons pas prêté l'oreille à ses inspirations. 3° La pensée à notre propre Ange gardien nous fait souvenir des anges gardiens de notre prochain et elle nous empêche d'être jamais pour qui que ce soit l'occasion du moindre péché. Le Sauveur rappelle spécialement que les Anges des enfants voient sans cesse la face du Père céleste et il prend de là occasion pour nous exhorter à ne point scandaliser ces petits, en les portant au péché, parce qu'autrement leurs anges protecteurs deviendraient nos accusateurs et qu'il vaudrait mieux pour nous avoir été précipités dans la mer avec une meule au cou que d'avoir à subir pareille accusation et pareille responsabilité (St. Matthieu 18, 1). Enfin 4° la pensée à notre saint Ange et à ses saintes fonctions doit nous porter à l'imiter, car, nous aussi, nous devons devenir en quelque sorte les anges gardiens visibles de ceux qui nous sont soumis ou confiés à nos soins, tout-à-fait comme les anges invisibles le sont à notre égard. S'il est bon de se rappeler ces choses tous les jours, il convient surtout de le faire le jour de la fête de ces esprits célestes, et c'est pour nous y exhorter et nous en donner l'occasion, que les supérieurs ecclésiastiques l'ont établie. Dans l'origine, on célébrait cette fête simultanément avec celle de saint Michel, archange, le 29 septembre
mais, depuis environ deux cents ans, elle a été transférée au 2 du mois d'octobre.
Simon. Vous venez de nommer une seconde fête qui se rapporte aux Anges.
Le Curé. Nous célébrons la fête de plusieurs anges en particulier: celle de saint Raphaël qui fut envoyé de Dieu pour protéger le jeune Tobie, celle de saint Gabriel à qui Dieu daigna confier la mission d'annoncer à la sainte Vierge Marie qu'elle deviendrait la mère du Messie; et enfin celle de saint Michel, que l'Écriture sainte nous représente comme un puissant combattant pour la gloire de Dieu contre le dragon infernal et les anges rebelles. Cette dernière fête surtout est très-ancienne ; car on la célébrait déjà pendant le quatrième siècle de l'ère chrétienne. Les noms de ces Anges indiquent déjà leurs fonctions : Michel signifie : Qui est comme Dieu? Gabriel veut dire : Force de Dieu et Raphaël : Guérison ou médecine de Dieu. Avant d'en venir aux Apôtres, je vous dirai un mot des saints qui appartiennent à l'Ancien Testament.
Simon. Quels sont-ils donc ?
Le Curé. D'abord les sept frères Machabées ainsi que leur héroïque mère, qui confessèrent les préceptes de leurs pères si courageusement qu'ils préférèrent mourir plutôt que de transgresser la loi de Dieu en sacrifiant aux idoles. Ces Juifs font honte à bien des chrétiens qui, sans avoir même à craindre les tourments ou la mort, sont assez lâches pour renier leur foi à la moindre occasion au lieu de la confesser généreusement.
La famille martyre des Maccabées a Jérusalem (2 Maccabées 7)
Puis, nous célébrons encore les fêtes de saint Joachim et de sainte Anne, parents de la sainte Vierge. Les chrétiens de tous les âges témoignèrent toujours un grand zèle pour la vénération de la sainte Mère de la Vierge; on voyait déjà avant l'an 650, à Constantinople, un temple qui lui était dédié et les parents chrétiens aimèrent toujours à donner le nom d'Anne à leurs enfants. Ils voulaient témoigner par là leur reconnaissance envers cette sainte pour les soins qu'elle avait donnés à celle qui a été élue par le Seigneur pour devenir sa mère; ils voulaient ensuite s'encourager mutuellement, au moyen de cette dévotion, à travailler avec le même zèle à l'éducation des enfants qui leur étaient confiés.
Saint Joachim et Sainte Anne - parents de la Saint Vierge Marie - Fête le 26 Juillet
Saint Joseph avait aussi son jour de fête dès les premiers âges, surtout parmi les Orientaux; elle s'étendit plus tard également dans tout l'Occident. Ce grand saint mérite sans doute toute notre vénération et celui que le Saint-Esprit lui-même appelle un homme juste et à qui Dieu confia la sainte Vierge et l'enfant Jésus, a bien des droits à notre imitation.
Saint Joseph – Fête le 19 mars
Il y a encore saint Jean-Baptiste, dont la Nativité se célébrait déjà du temps de saint Augustin ( 4 eme siècle), qui en parle comme d'une fête déjà ancienne. Celui qui tint de si près au Rédempteur, qui travailla si fidèlement à préparer la Nouvelle Alliance, qui, sanctifié dès le sein de sa mère, fut l'objet des éloges de Jésus-Christ lui-même, dut certainement occuper une belle place parmi les saints que l'Église rappelle avec prédilection au souvenir de ses enfants. Il faut remarquer que cette fête tombe à l'époque du solstice d'été (24 juin), lorsque les jours commencent à devenir plus courts.
La Nativité du Sauveur, au contraire, se célèbre au solstice d'hiver, lorsque les jours deviennent plus longs. Ainsi déjà le temps choisi par l'Église pour la célébration de ces deux fêtes ne semble-t-il pas déjà répéter ce que le saint Précurseur avait prédit du Sauveur : « Il faut qu'il croisse et que moi je diminue. » Mentionnons enfin la fête des saints Innocents.
Simon. Vous avez eu déjà la bonté de nous en parler en nous expliquant la fête de Noël.
Résumé :— Fête de l'Assomption — Explications des Litanies de la sainte Vierge.
15 août
A l'arrivée du vénérable chef de la paroisse tout le monde était occupé à chanter les louanges de la Mère de Dieu, ce qui charma le bon curé. Le cantique qu'ils chantaient était une imitation du Salve Regina que nous allons transcrire.
Je vous salue, auguste et sainte Reine,
Dont la beauté ravit les immortels.
Mère de grâce, aimable souveraine,
Je me prosterne aux pieds de vos autels.
Je vous salue, ô divine Marie,
Ah ! recevez l'hommage de nos coeurs,
Après Jésus, vous êtes notre vie,
Notre refuge et l'espoir des pécheurs.
Enfants proscrits d'une coupable mère,
Bannis du ciel, les yeux baignés de pleurs, ,
Par nos soupirs, de ce lieu de misère
Nous vous faisons entendre nos douleurs.
Écoutez-nous, puissante protectrice,
Tournez sur nous vos yeux compatissants,
Et montrez-nous, qu'à nos malheurs propice,
Du haut des Cieux vous aimez vos enfants.
O douce, ô tendre, ô pieuse Marie !
Vous dont Jésus, notre Dieu, prit le jour,
Faites qu'après l'exil de cette vie
Nous le voyions dans l'éternel séjour.
Le bon prêtre ne put s'empêcher de louer le zèle de ses paroissiens et de faire l'éloge de l'à plomb avec lequel ils avaient chanté ce cantique. Ensuite Thomas prit la parole :
Thomas. Il me parait inconvenant d'user d'expressions comme il s'en trouve dans ce cantique et même dans un grand nombre de prières, expressions qui nous portent à penser que la sainte Vierge ou les saints peuvent nous aider de leurs propres forces et pas seulement par leur intercession.
Le Curé. Il n'est pas un seul catholique instruit de sa religion qui ignore que les Saints ne peuvent nous venir en aide que par leurs intercessions pour nous auprès de Dieu et nullement par leur propre force ; c'est à la sagesse de Dieu qu'il incombe de juger s'il trouve bon de les exaucer.
Le Curé. Nous célébrons aujourd'hui la plus grande des fêtes de la sainte Vierge, sa glorieuse Assomption. Je vous disais, dans notre dernier entretien, combien il est juste de témoigner à Marie la part que nous prenons à ses douleurs. Pour les mêmes raisons, nous devons aussi partager ses joies et nous réjouir de sa glorification. Nous n'attendons pas, il est vrai, jusqu'à cette fête pour le faire; l'antienne que l'on chante depuis Pâques jusqu'à la fête de la Trinité et qui commence par les mots Regina Coeli, rappelle suffisamment que nous aimons à nous réjouir avec elle de ce que Jésus-Christ son Fils est sorti triomphant du tombeau : nous disons donc pendant le temps pascal : Reine des Cieux, réjouissez-vous, alleluia, Puisque celui que vous avez mérité de porter, alleluia est ressuscité, comme il l'avait dit, alleluia. Priez Dieu pour nous, alleluia.
Mais le jour où la gloire et la joie de Marie sont complètes et auquel nous avons par conséquent le plus de raisons d'unir notre allégresse à la sienne, c'est le jour que nous rappelle le 15 août, que nous fêtons aujourd'hui, c'est l'Assomption.
Thomas. Sans doute que le mot Assomption ne signifie pas la même chose qu’ Ascension. Pourquoi dit-on par exemple l'Ascension de Notre-Seigneur et l'Assomption, et non pas l` Ascension, de la sainte Vierge?
Le Curé. Le Fils de Dieu est monté au ciel par la propre vertu de sa divinité ; la Sainte Vierge au contraire, a été élevée dans le ciel par la vertu de son divin Fils pour y recevoir cette couronne de gloire qu'elle avait méritée comme la fidèle servante du Seigneur sur la terre. C'est pourquoi l'Église nomme cette fête l'Assomption ou la Réception de Marie, ce qui exprime mieux la manière dont elle est montée au ciel que le mot Ascension. Cependant l'objet principal de la fête d'aujourd'hui, c'est sa mort et son couronnement dans le royaume céleste.
Simon. Ce sont des faits qui certes doivent nous réjouir et nous exciter à prendre la part la plus vive aux solennités qui les rappellent.
LES FÊTES DES SAINTS. LA DÉDICACE DES ÉGLISES.
Résumé : Fête des Anges gardiens. Des Saints de l'Ancien Testament. Des Apôtres et des Évangélistes. Leurs attributs. Fêtes des martyrs. Actes des martyrs. Intercession des Saints. Qualités que doit avoir la prière. Les saints confesseurs. Martyrologe. Canonisation et béatification des Saints. Les saintes vierges et les saintes femmes. But de l'Église en instituant les fêtes des Saints.
Simon. A la réunion précédente nous nous sommes séparés en chantant; de là vient que nous ne savons pas de quoi il sera question aujourd'hui. Peut-être serez-vous assez bon, M. le curé, pour nous dire quelque chose des différents saints.
Le Curé. Telle est aussi mon intention ; cependant ne vous attendez pas à ce que j'en parle avec autant de détails que je l'ai fait jusqu'ici pour les autres fêtes; sans cela, nous ne pourrions pas épuiser ce sujet en une année entière. Nous passerons en revue les différentes catégories des saints et si quelqu'un d'entre vous demande à savoir quelques détails particuliers sur l'un ou sur l'autre, il lui sera libre de le faire.
Fête des Anges gardiens.
Le Curé. Parlons d'abord de quelques fêtes par lesquelles nous vénérons des saints qui n'ont jamais vécu sur la terre.
Simon. Comment?...
Le Curé. Oui, je veux parler des Anges, dont nous rencontrons plusieurs fêtes pendant l'année.
Attributs des saints Anges. Tous les Pères ont reconnu, d'après les saintes Écritures, neuf ordres ou choeurs composant la hiérarchie des esprits célestes. Ces neuf choeurs d'Anges ne se distinguent que par leurs fonctions et le degré de gloire dont ils jouissent.
1. Les Chérubins (Forts) sont représentés ordinairement avec quatre ailes , dont deux leur couvrent le corps par derrière et deux les enveloppent par devant.
2. Les Trônes sont représentés par des roues de feu ayant à l'entour des ailes garnies d'yeux; ils sont placés sons les pieds de Dieu et lui servent de trône.
3. Les Séraphins sont représentés par une tête avec deux, quatre ou six ailes : ils sont de couleur de feu et des flammes les entourent.
4. Les Dominations ,
5. les Puissances ,
6. les Principautés,
7. les Vertu portent des aubes , des ceintures et quelquefois des étoles ; elles tiennent des baguettes ou des sceptres à la main.
8. Les Archanges. Le nombre nous en est inconnu , mais l'Écriture Sainte en nomme trois : Michel, Gabriel, Raphaël. Saint Michel, l'ange des combats et de la justice, et dont le nom est le mot d'ordre des armées célestes : «Qui est semblable à Dieu?» est revêtu de la cotte d'armes d'un guerrier, il tient dans le bras gauche un bouclier , marqué quelquefois du mot d'ordre qui forme son nom : Quis ut Deus Une lance ou un glaive arme sa main droite : le démon, terrassé par les terribles coups de son adversaire , gît à ses pieds. — Quand on le représente hors d'un combat, il est revêtu d'une longue robe, sa lance est en repos , il porte le globe du monde ou bien la balance comme ministre de la justice divine.
Saint Gabriel, l'ange de la Rédemption , porte un lys à la main. Saint Raphaël ne se trouve que dans l'histoire de Tobie et, comme voyageur» on le représente avec un bourdon de pèlerin.
9. Les Anges adorateurs sont ou agenouillés, ou balançant l'encensoir, ou portant des flambeaux allumés ou bien soutenant une couronne sur la tête du Sauveur. Les anges ministres sonnent de la trompette, tiennent la balance a la pesée des âmes, etc. (Ext. de Crosnier : Iconographie chrétienne.)
Simon. C'est vrai, et d'abord la belle fête des saints Anges gardiens.
Fête des St Anges - 29 Septembre
Le Curé. Elle mérite en effet que nous la mentionnions avant toutes les autres ; car elle est une grande preuve de l'amour de Dieu envers nous, puisqu'il lui a plu de donner pour appuis à notre faiblesse l'assistance et la protection des esprits célestes. Mais c'est aussi pourquoi cette fête est pour nous une exhortation à aimer Dieu de toute notre âme et à le remercier pour un si grand bienfait, afin de nous montrer d'autant plus dignes de protecteurs si purs et si saints.
Joseph. Nous prions aussi tous les jours notre saint Ange gardien.
Le Curé. Vous faites très-bien, mon enfant, tous nous avons de grandes raisons de ne jamais négliger cette invocation. Car I ° l'ange que Dieu nous a donné pour protecteur est certainement en état d'implorer l'aide du Seigneur pour nos besoins spirituels et corporels. 2° Cette prière nous fait ressouvenir sans cesse que nous avons un ange gardien dont nous ne devons pas nous montrer indignes.
Si nous craignons souvent que les hommes ne soient témoins de nos actions, si parfois nous les redoutons plus que Dieu lui-même en osant faire en sa sainte présence ce que nous aurions honte de faire sous les yeux du moindre d'entre les hommes ; qu'au moins la pensée à la présence de notre saint ange nous empêche d'offenser Dieu de quelque manière que ce soit. Au jour du dernier jugement, le même ange sera à nos côtés et il sera notre avocat auprès du souverain Juge, si d'ailleurs nous l'avons mérité par notre conduite ; mais n'oublions pas qu'il sera aussi notre accusateur, si les peines qu'il s'est données pour nous ont été inutiles et si nous n'avons pas prêté l'oreille à ses inspirations. 3° La pensée à notre propre Ange gardien nous fait souvenir des anges gardiens de notre prochain et elle nous empêche d'être jamais pour qui que ce soit l'occasion du moindre péché. Le Sauveur rappelle spécialement que les Anges des enfants voient sans cesse la face du Père céleste et il prend de là occasion pour nous exhorter à ne point scandaliser ces petits, en les portant au péché, parce qu'autrement leurs anges protecteurs deviendraient nos accusateurs et qu'il vaudrait mieux pour nous avoir été précipités dans la mer avec une meule au cou que d'avoir à subir pareille accusation et pareille responsabilité (St. Matthieu 18, 1). Enfin 4° la pensée à notre saint Ange et à ses saintes fonctions doit nous porter à l'imiter, car, nous aussi, nous devons devenir en quelque sorte les anges gardiens visibles de ceux qui nous sont soumis ou confiés à nos soins, tout-à-fait comme les anges invisibles le sont à notre égard. S'il est bon de se rappeler ces choses tous les jours, il convient surtout de le faire le jour de la fête de ces esprits célestes, et c'est pour nous y exhorter et nous en donner l'occasion, que les supérieurs ecclésiastiques l'ont établie. Dans l'origine, on célébrait cette fête simultanément avec celle de saint Michel, archange, le 29 septembre
mais, depuis environ deux cents ans, elle a été transférée au 2 du mois d'octobre.
Simon. Vous venez de nommer une seconde fête qui se rapporte aux Anges.
Le Curé. Nous célébrons la fête de plusieurs anges en particulier: celle de saint Raphaël qui fut envoyé de Dieu pour protéger le jeune Tobie, celle de saint Gabriel à qui Dieu daigna confier la mission d'annoncer à la sainte Vierge Marie qu'elle deviendrait la mère du Messie; et enfin celle de saint Michel, que l'Écriture sainte nous représente comme un puissant combattant pour la gloire de Dieu contre le dragon infernal et les anges rebelles. Cette dernière fête surtout est très-ancienne ; car on la célébrait déjà pendant le quatrième siècle de l'ère chrétienne. Les noms de ces Anges indiquent déjà leurs fonctions : Michel signifie : Qui est comme Dieu? Gabriel veut dire : Force de Dieu et Raphaël : Guérison ou médecine de Dieu. Avant d'en venir aux Apôtres, je vous dirai un mot des saints qui appartiennent à l'Ancien Testament.
Simon. Quels sont-ils donc ?
Le Curé. D'abord les sept frères Machabées ainsi que leur héroïque mère, qui confessèrent les préceptes de leurs pères si courageusement qu'ils préférèrent mourir plutôt que de transgresser la loi de Dieu en sacrifiant aux idoles. Ces Juifs font honte à bien des chrétiens qui, sans avoir même à craindre les tourments ou la mort, sont assez lâches pour renier leur foi à la moindre occasion au lieu de la confesser généreusement.
La famille martyre des Maccabées a Jérusalem (2 Maccabées 7)
Puis, nous célébrons encore les fêtes de saint Joachim et de sainte Anne, parents de la sainte Vierge. Les chrétiens de tous les âges témoignèrent toujours un grand zèle pour la vénération de la sainte Mère de la Vierge; on voyait déjà avant l'an 650, à Constantinople, un temple qui lui était dédié et les parents chrétiens aimèrent toujours à donner le nom d'Anne à leurs enfants. Ils voulaient témoigner par là leur reconnaissance envers cette sainte pour les soins qu'elle avait donnés à celle qui a été élue par le Seigneur pour devenir sa mère; ils voulaient ensuite s'encourager mutuellement, au moyen de cette dévotion, à travailler avec le même zèle à l'éducation des enfants qui leur étaient confiés.
Saint Joachim et Sainte Anne - parents de la Saint Vierge Marie - Fête le 26 Juillet
Saint Joseph avait aussi son jour de fête dès les premiers âges, surtout parmi les Orientaux; elle s'étendit plus tard également dans tout l'Occident. Ce grand saint mérite sans doute toute notre vénération et celui que le Saint-Esprit lui-même appelle un homme juste et à qui Dieu confia la sainte Vierge et l'enfant Jésus, a bien des droits à notre imitation.
Saint Joseph – Fête le 19 mars
Il y a encore saint Jean-Baptiste, dont la Nativité se célébrait déjà du temps de saint Augustin ( 4 eme siècle), qui en parle comme d'une fête déjà ancienne. Celui qui tint de si près au Rédempteur, qui travailla si fidèlement à préparer la Nouvelle Alliance, qui, sanctifié dès le sein de sa mère, fut l'objet des éloges de Jésus-Christ lui-même, dut certainement occuper une belle place parmi les saints que l'Église rappelle avec prédilection au souvenir de ses enfants. Il faut remarquer que cette fête tombe à l'époque du solstice d'été (24 juin), lorsque les jours commencent à devenir plus courts.
La Nativité du Sauveur, au contraire, se célèbre au solstice d'hiver, lorsque les jours deviennent plus longs. Ainsi déjà le temps choisi par l'Église pour la célébration de ces deux fêtes ne semble-t-il pas déjà répéter ce que le saint Précurseur avait prédit du Sauveur : « Il faut qu'il croisse et que moi je diminue. » Mentionnons enfin la fête des saints Innocents.
Simon. Vous avez eu déjà la bonté de nous en parler en nous expliquant la fête de Noël.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
Le Curé. Passons donc maintenant aux saints du nouveau Testament et nommons d'abord les fêtes des Apôtres. Dans le principe on ne célébrait que celle des saints Pierre et Paul tout en y rattachant la mémoire des autres disciples du Seigneur. Ce ne fut qu'assez tard qu'on commença à en donner une à chaque apôtre en particulier ou en en réunissant deux ensemble (p. ex. saint Philippe et saint Jacques ; saint Simon et saint Jude). Nous célébrons encore d'autres fêtes spéciales en l'honneur de plusieurs apôtres : c'est ainsi que nous trouvons dans le calendrier différentes fêtes de saint Pierre dont l'une, saint Pierre-ès-Liens, nous rappelle sa captivité et sa délivrance miraculeuse; les autres nous remémorent la prise en possession de son siège successivement à Antioche , et plus tard à Rome. (Siège de saint Pierre à Rome, à Antioche). Nous pouvons encore classer parmi les fêtes des Apôtres celles des Évangélistes et de saint Barnabé. Montrons-nous donc, en ces jours, reconnaissants de la miséricorde que nous a témoignée le Sauveur, en délivrant le genre humain du péché et de l'ignorance dans laquelle il croupissait, avant qu'il n'eût envoyé ces messagers de l'Évangile parmi les nations; réjouissons-nous de compter parmi ceux qui ont eu le bonheur d'être instruits de la vérité évangélique et renouvelons le ferme propos de conformer notre conduite à notre croyance en nous montrant de dignes disciples de l'Évangile et de vrais apôtres de Jésus-Christ. Les Apôtres qui consacrèrent toute leur vie à la propagation de la parole de Dieu et qui tous , sauf une seule exception, en scellèrent la vérité de leur propre sang, sont certes encore prêts à favoriser, par leur intercession, notre foi au Rédempteur et l'extension de la vie chrétienne. Adressons-nous donc à eux par de ferventes prières, pour que, par leur intermédiaire, nous puissions conserver parmi nous la lumière de la vérité céleste et obtenir la protection de la grâce divine et afin que l'une et l'autre se propagent de plus en plus parmi tous les peuples qui sont encore assis dans les ombres de la mort.
Simon. Mais que signifient donc les attributs que l`on donne ordinairement aux Apôtres et aux Évangélistes?
Le Curé. Ceux des Apôtres vous sont déjà connus pour la plupart. Saint Pierre, en qualité de vicaire et successeur visible de Jésus-Christ, porte, pour emblème , les clefs du ciel ; on représente les autres apôtres avec les instruments de leur martyre : saint Paul porte une épée , saint André, une croix , etc. Pour ce qui concerne les Évangélistes , leurs attributs se rapportent au commencement de leur Évangile respectif. Saint Matthieu qui commence son Évangile par l'incarnation du Fils de Dieu, a à ses côtés un ange sous la forme humaine, pour représenter l’Incarnation du Sauveur, dont il parle; saint Marc commence son Évangile par le sermon de saint Jean dans le désert ; c'est pourquoi l'habitant des déserts, le lion, se trouve à ses côtés; saint Luc raconte, dès l'entrée de son Évangile, comment Zacharie exerçait dans le temple ses fonctions de prêtre, lorsque la naissance de saint Jean-Baptiste lui fut annoncée ; c'est pourquoi ou lui a donné pour attribut un taureau , comme les prêtres de l'Ancien Testament en sacrifiaient dans le temple ; enfin l'emblème avec lequel on représente saint Jean, c'est l'aigle ; parce que, dès les premières paroles de son Évangile, il plane pour ainsi dire, comme un aigle, dans les régions célestes , pour annoncer la naissance éternelle de l'Homme-Dieu du sein de son Père céleste. Ces signes peuvent également s'appliquer au Sauveur lui-même , de manière que l'aigle signifierait sa divinité, l'homme son humanité , le lion sa royauté et le taureau son sacerdoce.
Symboles des quatre Évangélistes
Maintenant que vous savez du moins l'essentiel concernant les apôtres , je vous dirai quelques mots des fêtes des martyrs qui sont, parmi tous les saints que célèbre l'Église catholique , ceux qu'elle a vénérés en premier lieu , même avant les apôtres : car déjà l'empereur Constantin (Empereur romain chrétien du 4 eme siècle) en établit plusieurs. La fête de saint Étienne, premier martyr, se célébrait déjà au quatrième siècle , comme de nos jours, le lendemain de Noël , du moins dans l'église grecque. Dans les premiers siècles, on célébrait la mémoire des martyrs dans les villes et les endroits où ils avaient versé leur sang pour la foi. C'est ainsi, par exemple, qu'on faisait la fête de saint Laurent à Rome. Peu à peu les fêtes se répandirent par toute la chrétienté. On se réjouissait de voir l'héroïsme avec lequel ces combattants de Jésus-Christ confessèrent leur foi jusqu'à la mort et on se faisait honneur de témoigner son amour envers l'Évangile en les vénérant. On voulait encore par là s'exciter mutuellement au même zèle pour la gloire de Dieu et de son Évangile. C'est pourquoi on ne manquait pas de recueillir avec le plus grand soin par écrit tout ce que les martyrs disaient ou faisaient en allant au supplice; on en consignait même jusqu'aux plus petits détails. Les Actes des martyrs (c'est ainsi qu'on nommait ces descriptions), les chrétiens se les communiquaient mutuellement et ils étaient lus dans leurs assemblées.
Telle est l'origine de ces descriptions si détaillées du supplice des premiers martyrs que nous possédons encore en partie et dont vous trouvez des extraits dans la Vie des Saints. Nous solennisons encore de nos jours les anniversaires de la mort des martyrs, afin que, comme eux, nous soyons fortifiés dans la foi et que, la grâce de Dieu aidant, nous ne soyons dégoûtés du combat pour la foi et la vertu, par aucun obstacle. Si jamais, mes amis, vous veniez à courir le danger de renier quelque vertu particulière, rappelez-vous ces âmes généreuses qui préférèrent donner leur vie plutôt que d'agir précisément contre cette même vertu et prions-les de nous obtenir de Dieu le courage nécessaire pour la pratiquer.
Thomas. Que faut-il donc penser de ceux qui, pour certaines nécessités particulières, maladies et souffrances corporelles, s'adressent de préférence à tel saint pour en obtenir par lui la guérison?
Le Curé. Lorsque la prière se fait comme il faut, c'est-à-dire avec la véritable résignation à la volonté de Dieu, il n'y a rien que de très-louable dans cet usage. L'expérience est là, du reste, pour prouver que souvent on ne s'est pas adressé en vain à tel ou tel saint en particulier pour tels besoins, tels maux, etc. Quoiqu'il n'y ait plus de souffrances corporelles dans le séjour des bienheureux, il n'est pas à croire que des martyrs qui ont souffert particulièrement telles douleurs corporelles les aient oubliées tout-à-fait, et, pour cette raison, il est également naturel qu'ils s'intéressent d'une manière particulière à ceux qui sont accablés des mêmes douleurs, qui courent les mêmes dangers, qui ont les mêmes besoins.
Le Curé. Tout chrétien qui comprend son catéchisme, sait bien que , pour les choses temporelles, nous ne pouvons jamais avoir la certitude d'être exaucés et que pour ce qui regarde notre âme, il faut qu'en priant nous coopérions à la grâce. Parmi toutes les prières qui existent, il n'en est point de plus excellente et de plus efficace à la fois que le Pater ( Notre Père), qui nous a été enseigné par le Sauveur lui-même, et cependant , dans tout l'Évangile, nous ne trouvons pas la moindre expression par laquelle une pareille vertu serait promise à cette formule de prière, comme celle, par exemple, de donner infailliblement le salut éternel ou de forcer Dieu à accorder des bienfaits temporels à ceux qui le prient. Ce ne seront pas les formules particulières, mais la manière de prier, ce ne seront pas les belles paroles, mais la foi ferme, unie à l'amour de Dieu, qui nous sauveront et qui porteront Dieu à nous exaucer. « Ce ne sera pas quiconque dira : Seigneur! Seigneur ! qui entrera dans le royaume des deux, mais celui qui fera la volonté de mon Père céleste, » dit le Sauveur. (Matthieu 7, 21 .) Il est vrai, et la promesse du Rédempteur ne peut nous tromper: « Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, il vous le donnera. (Jean. 14, 13), qu'il promet par là à tout chrétien qui prie avec une véritable confiance, avec humilité et persévérance, qu'il sera exaucé certainement.
Mais que de choses sont nécessaires, pour qu'une prière soit aussi parfaite que Jésus la demande ! Prier au nom de Jésus-Christ : ces simples paroles renferment bien des choses. Elles signifient premièrement qu'on doit demander à Dieu surtout les biens spirituels, la grâce d'être éclairé et converti intérieurement, celle de persévérer jusqu'à sa mort dans le chemin du salut et la pratique des vertus chrétiennes. Ces biens spirituels sont promis effectivement par Jésus-Christ lui-même à la prière humble, fervente et persévérante, et c'est en vue de ses mérites infinis que nous les obtenons du Père céleste. Prier au nom de Jésus-Christ, cela veut dire encore qu'on ne doit demander les biens temporels, que pour autant qu'ils plaisent à Dieu et qu'ils ne seront pas nuisibles au salut de notre âme, comme le divin Sauveur qui, dans le jardin des Olives, demandait à être délivré du calice de ses souffrances, mais avec pleine résignation à la volonté de son Père céleste. Les richesses, les honneurs, la santé, les biens temporels peuvent devenir pour nous des récifs dangereux auxquels notre âme pourrait facilement faire naufrage : exiger donc absolument de Dieu des biens temporels, ce ne serait pas prier au nom de Jésus-Christ. «En demandant une chose qui serait nuisible à notre âme, nous ne prions pas au nom du Rédempteur,» dit saint Augustin. Il s'en suit donc, qu'en demandant des faveurs temporelles, nous ne pouvons être certains d'être exaucés, puisque nous ne savons pas si ces choses seront profitables pour notre salut.
Prions enfin pour obtenir des grâces qui se rapportent directement à la grande affaire de notre salut, et cette prière sera certainement efficace en tant qu'elle nous attirera les grâces et les moyens de parvenir au bonheur éternel.
Simon. Qu'entend-on par confesseurs ? Si souvent déjà j'ai lu et entendu ce nom.
Le Curé. J'allais justement vous en parler. On nomme confesseurs ceux qui n'ont pas été dans le cas de devoir donner leur vie pour la foi, mais qui, par leurs sentiments et leur vie, se sont montrés de vrais serviteurs de Jésus-Christ. Tout chrétien doit être un martyr par ses sentiments, c'est-à-dire, qu'il doit être prêt à donner sa vie plutôt que d'offenser son Père céleste par un acte contraire à la foi ou à la vertu. Qu'il ait l'occasion de faire ce sacrifice ou qu'il ne la trouve point, cela ne fait rien à la chose. Si un chrétien possède en son âme la fermeté d'un martyr et persévère jusqu'à la fin dans l'accomplissement des commandements de Dieu, il mérite par là la récompense et la couronne des élus, tout comme l'obtiennent les vrais martyrs. Les derniers furent toujours spécialement en honneur dans l'Église, parce que, par leur mort, ils avaient donné le témoignage le plus éclatant de leur foi et de leur amour pour leurs devoirs de chrétiens ; cependant nous ne doutons nullement qu'on ne puisse mériter, aux yeux de Dieu, la même gloire par une vie sainte et fervente : car il se trouve peut-être des cas où il est plus difficile et partant aussi plus méritoire de passer une vie longue et remplie de tentations continuelles que de surmonter pendant quelques instants ou quelques heures la crainte de la mort et les tortures des persécuteurs.
Simon. Il y a même des hommes dont toute la vie n'est pour ainsi dire qu'une chaîne de souffrances et de persécutions.
Le Curé. Bon, et si ces hommes souffrent ces peines par amour pour Jésus-Christ, ou si seulement ils les lui offrent en dirigeant leur intention vers lui, Jésus-Christ à son tour ne manquera pas de les couronner comme autant de martyrs. Je vous dis ces choses pour vous engager à mener une vie bien chrétienne et pour vous faire aimer la vertu ; car une fois les temps des persécutions passés, le chrétien doit, à proprement parler, devenir un martyr non sanglant ou un confesseur. Tous les chrétiens morts en la grâce de Dieu sont de tels confesseurs ; vous-même en comptez tous parmi vos parents défunts, et en grand nombre, faut-il espérer. Malheur à nous, si après notre mort nous ne sommes pas de ce nombre.
Simon. M. le curé, les femmes de la réunion veulent des informations sur leurs représentantes dans le ciel.
Le Curé. Les vertus dont j'ai parlé se recommandent à l'imitation de tous sans exception, par conséquent aussi à celle des femmes. Je leur dis que l'Église a formé parmi elles deux classes de saintes particulières. Ce sont d'abord les saintes qui conservèrent jusqu'à la fin de leur vie l'état de virginité, et les autres qui, sans demeurer vierges, ont mené, selon leur état, une vie fervente et chrétienne. Déjà alors que j'expliquais les litanies de la sainte Vierge, je vous ai dit combien l'Église a toujours tenu en honneur l'état de virginité. Lorsque donc une vierge conserve intacte, pendant toute sa vie, la chasteté virginale, tout en s'exerçant à imiter l'exemple du divin Sauveur et le confessant par une vie de perfection, l'Église se réjouit de pouvoir insérer son nom au catalogue des saints et de la vénérer comme un de ses membres les plus nobles. Nous témoignons notre vénération d'une manière plus cordiale et plus prompte encore, envers ces vierges qui, à l'auréole de la virginité, surent unir la couronne du martyre.
Elles sont le digne émule des plus grands héros de l'Évangile. C'est pourquoi l'Église porte une si grande vénération envers sainte Agnès qui, n'étant encore qu'une enfant de treize ans, souffrit la mort pour l'Évangile; envers sainte Catherine d`Alexandrie ( Égypte) qui, selon une ancienne tradition, fut rouée, parce qu'elle n'avait pas voulu abjurer le christianisme; sainte Barbe qui préféra être emprisonnée dans une tour que de sacrifier aux idoles; sainte Agathe qui aima mieux souffrir toutes les tortures imaginables que de laisser porter atteinte à sa chasteté.
Sainte Agnès de Rome - vierge et martyre a 13 ans dans les persécutions de l`empereur romain païen Dioclétien en 304 Ap J.C.– Fêtée le 21 Janvier.
Sainte-Catherine d`Alexandrie – vierge et martyre ( Égypte gréco-romaine) – Fêtée le 25 novembre - la Sainte-Catherine – Elle fut torturée et rouée a 18 ans ans en l`an 312 Ap J.C. lors des persécutions de l`empereur romain païen Maximin II Daïa.
Le martyre de Sainte Barbe ( Barbara – vierge et martyre) sur une gravure allemande du 16 eme siècle - Fêtée le 4 décembre - Elle vivait en Anatolie gréco-romaine ( Turquie actuelle) et fut livré au supplices pour sa foi chrétienne au 3 eme siècle sous le règne de l`empereur romain païen Maximien
Sainte Agathe de Catane – vierge et martyre (Sicile en Italie) – Fêtée de 5 février – Elle vivait vers 251 Ap J.C. en Sicile dans une famille de noblesse romaine et fut dénoncée comme chrétienne et torturée lors des persécutions des empereurs romains païens
L'agneau de sainte Agnès; la palme de sainte Agathe, signe de son martyre; la tour de sainte Barbe et la roue de sainte Catherine : tous ces attributs avec lesquels sont représentées ces saintes martyres, nous sont pour cela des emblèmes éloquents de leur héroïsme. Si même les vierges chrétiennes n'ont plus à passer aujourd'hui par les tortures, ni à subir le mort pour conserver intacte leur innocence, l'exemple de ces fidèles servantes du Seigneur est très-propre à leur rappeler de quel prix est la belle vertu, et à les exciter à rejeter avec horreur les tentations infiniment moins dangereuses auxquelles elles pourraient être sujettes.
L'Église honore également les saintes femmes qui, sans avoir fait choix de l'état virginal pour plaire à Jésus-Christ, se sont montrées dignes du divin Rédempteur et de son Évangile , en remplissant d'une manière parfaite tous les devoirs de leur état : sainte Monique qui obtint par ses larmes et par ses prières la conversion de son fils St-Augustin; sainte Elisabeth qui aimait et assistait les pauvres, dont elle se faisait la mère; sainte Françoise de Chantal qui ne cessa de se perfectionner dans la vie intérieure et par les oeuvres de miséricorde ; sainte Marie-Magdeleine à laquelle peuvent s'appliquer ces paroles de l`Évangile : qu'il y a plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion ; — d'autres enfin que nous pourrions nommer encore, prouvent que l'Église s'applique à vénérer toutes les phases sous lesquelles se manifestent la piété et la sainteté, et à nous les proposer pour modèles. Je pense en avoir assez dit pour contenter la partie féminine de l'assemblée, en leur citant bien des exemples propres à leur servir de modèles. Mais comme j'ai déjà dit que l'exemple des saints les concerne également, je devrais ajouter ici que l'exemple des saintes ne doit pas moins être proposé comme modèle aux hommes. Nous ne pourrons jamais assez considérer et pratiquer la sainte modestie, la suave pureté, le courage héroïque tels que ces vertus nous apparaissent dans les saintes martyres. Ainsi nous pourrons nous apprendre mutuellement à connaître ce qui conduit au royaume de Dieu, afin qu'un jour nous puissions aussi, tous ensemble , nous retrouver au pied du Trône de l'Agneau sans tache en compagnie avec la sainte Vierge, les saints martyrs et confesseurs, les vierges et tous les choeurs des Anges.
Sainte Monique et son fils Saint Augustin - Évêque en Tunisie romaine et un des grands Docteurs de l`Église catholique (livres: Les Confessions - La Cité de Dieu) - Rome (Italie) et Carthage ( Tunisie romaine) de 354 a 430 Ap J.C.
Sainte Élisabeth de Hongrie vécut de 1211 à 1228 au château de Wartbourg auprès de son époux le landgrave Louis IV de Thuringe et de leurs enfants et de sa belle-mère, la landgravine douairière Sophie de Bavière. Des franciscains allemands font découvrir à la jeune Landgravine l'esprit de François d'Assise et elle décide alors de renoncer à une vie de luxe et de frivolité pour se mettre au service des pauvres.
Sainte Jeanne-Françoise Frémyot – baronne de Chantal – ( 1572 à 1641 – Moulins – France) -, est une dame française originaire de Bourgogne, fondatrice de l'ordre de la Visitation avec saint François de Sales
Sainte Marie Magdeleine - la pécheresse repentie qui change de vie ( Luc 7,37)
Simon. Pourquoi l'Église a institué les fêtes des saints.
Le Curé. Le but que l'Église s'est proposé en instituant les fêtes des saints est en effet 1° d'exciter les fidèles à les invoquer; 2° de nous offrir des modèles d'une vie chrétienne et de nous exhorter à les imiter. Saint Augustin dit là-dessus : « Les fêtes des martyrs doivent être pour nous une exhortation pressante à faire de toute notre vie au moins un martyre moral en mourant au péché et a la concupiscence. » C'est pourquoi le Fils de Dieu dit : Celui qui hait son âme, (c'est-à-dire, celui qui combat le péché et ses passions), la conservera pour la vie éternelle; 3 - afin que les saints soient vénérés sur la terre comme ils l'ont mérité par leurs vertus ; 4° enfin pour que nous louions Dieu dans ses saints, comme dit le roi-prophète. Si déjà le plus petit brin de paille, l'animal le plus imperceptible est propre à nous faire voir et admirer la toute-puissance, la sagesse et la bonté du Créateur et à nous en faire réjouir, pourquoi ne ressentirions-nous pas une joie bien plus grande et plus légitime encore en voyant les preuves de sa sainteté et de la puissance de sa grâce dans l'âme de ses saints si admirablement transformés?
Arrêtons ici nos considérations et retirons-nous en silence, pour méditer sur les choses que nous avons apprises aujourd'hui, et surtout n'oublions pas de suivre l'exemple des saints. Loué soit Jésus-Christ. — À jamais.
Simon. Mais que signifient donc les attributs que l`on donne ordinairement aux Apôtres et aux Évangélistes?
Le Curé. Ceux des Apôtres vous sont déjà connus pour la plupart. Saint Pierre, en qualité de vicaire et successeur visible de Jésus-Christ, porte, pour emblème , les clefs du ciel ; on représente les autres apôtres avec les instruments de leur martyre : saint Paul porte une épée , saint André, une croix , etc. Pour ce qui concerne les Évangélistes , leurs attributs se rapportent au commencement de leur Évangile respectif. Saint Matthieu qui commence son Évangile par l'incarnation du Fils de Dieu, a à ses côtés un ange sous la forme humaine, pour représenter l’Incarnation du Sauveur, dont il parle; saint Marc commence son Évangile par le sermon de saint Jean dans le désert ; c'est pourquoi l'habitant des déserts, le lion, se trouve à ses côtés; saint Luc raconte, dès l'entrée de son Évangile, comment Zacharie exerçait dans le temple ses fonctions de prêtre, lorsque la naissance de saint Jean-Baptiste lui fut annoncée ; c'est pourquoi ou lui a donné pour attribut un taureau , comme les prêtres de l'Ancien Testament en sacrifiaient dans le temple ; enfin l'emblème avec lequel on représente saint Jean, c'est l'aigle ; parce que, dès les premières paroles de son Évangile, il plane pour ainsi dire, comme un aigle, dans les régions célestes , pour annoncer la naissance éternelle de l'Homme-Dieu du sein de son Père céleste. Ces signes peuvent également s'appliquer au Sauveur lui-même , de manière que l'aigle signifierait sa divinité, l'homme son humanité , le lion sa royauté et le taureau son sacerdoce.
Symboles des quatre Évangélistes
Maintenant que vous savez du moins l'essentiel concernant les apôtres , je vous dirai quelques mots des fêtes des martyrs qui sont, parmi tous les saints que célèbre l'Église catholique , ceux qu'elle a vénérés en premier lieu , même avant les apôtres : car déjà l'empereur Constantin (Empereur romain chrétien du 4 eme siècle) en établit plusieurs. La fête de saint Étienne, premier martyr, se célébrait déjà au quatrième siècle , comme de nos jours, le lendemain de Noël , du moins dans l'église grecque. Dans les premiers siècles, on célébrait la mémoire des martyrs dans les villes et les endroits où ils avaient versé leur sang pour la foi. C'est ainsi, par exemple, qu'on faisait la fête de saint Laurent à Rome. Peu à peu les fêtes se répandirent par toute la chrétienté. On se réjouissait de voir l'héroïsme avec lequel ces combattants de Jésus-Christ confessèrent leur foi jusqu'à la mort et on se faisait honneur de témoigner son amour envers l'Évangile en les vénérant. On voulait encore par là s'exciter mutuellement au même zèle pour la gloire de Dieu et de son Évangile. C'est pourquoi on ne manquait pas de recueillir avec le plus grand soin par écrit tout ce que les martyrs disaient ou faisaient en allant au supplice; on en consignait même jusqu'aux plus petits détails. Les Actes des martyrs (c'est ainsi qu'on nommait ces descriptions), les chrétiens se les communiquaient mutuellement et ils étaient lus dans leurs assemblées.
Telle est l'origine de ces descriptions si détaillées du supplice des premiers martyrs que nous possédons encore en partie et dont vous trouvez des extraits dans la Vie des Saints. Nous solennisons encore de nos jours les anniversaires de la mort des martyrs, afin que, comme eux, nous soyons fortifiés dans la foi et que, la grâce de Dieu aidant, nous ne soyons dégoûtés du combat pour la foi et la vertu, par aucun obstacle. Si jamais, mes amis, vous veniez à courir le danger de renier quelque vertu particulière, rappelez-vous ces âmes généreuses qui préférèrent donner leur vie plutôt que d'agir précisément contre cette même vertu et prions-les de nous obtenir de Dieu le courage nécessaire pour la pratiquer.
Thomas. Que faut-il donc penser de ceux qui, pour certaines nécessités particulières, maladies et souffrances corporelles, s'adressent de préférence à tel saint pour en obtenir par lui la guérison?
Le Curé. Lorsque la prière se fait comme il faut, c'est-à-dire avec la véritable résignation à la volonté de Dieu, il n'y a rien que de très-louable dans cet usage. L'expérience est là, du reste, pour prouver que souvent on ne s'est pas adressé en vain à tel ou tel saint en particulier pour tels besoins, tels maux, etc. Quoiqu'il n'y ait plus de souffrances corporelles dans le séjour des bienheureux, il n'est pas à croire que des martyrs qui ont souffert particulièrement telles douleurs corporelles les aient oubliées tout-à-fait, et, pour cette raison, il est également naturel qu'ils s'intéressent d'une manière particulière à ceux qui sont accablés des mêmes douleurs, qui courent les mêmes dangers, qui ont les mêmes besoins.
Le Curé. Tout chrétien qui comprend son catéchisme, sait bien que , pour les choses temporelles, nous ne pouvons jamais avoir la certitude d'être exaucés et que pour ce qui regarde notre âme, il faut qu'en priant nous coopérions à la grâce. Parmi toutes les prières qui existent, il n'en est point de plus excellente et de plus efficace à la fois que le Pater ( Notre Père), qui nous a été enseigné par le Sauveur lui-même, et cependant , dans tout l'Évangile, nous ne trouvons pas la moindre expression par laquelle une pareille vertu serait promise à cette formule de prière, comme celle, par exemple, de donner infailliblement le salut éternel ou de forcer Dieu à accorder des bienfaits temporels à ceux qui le prient. Ce ne seront pas les formules particulières, mais la manière de prier, ce ne seront pas les belles paroles, mais la foi ferme, unie à l'amour de Dieu, qui nous sauveront et qui porteront Dieu à nous exaucer. « Ce ne sera pas quiconque dira : Seigneur! Seigneur ! qui entrera dans le royaume des deux, mais celui qui fera la volonté de mon Père céleste, » dit le Sauveur. (Matthieu 7, 21 .) Il est vrai, et la promesse du Rédempteur ne peut nous tromper: « Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, il vous le donnera. (Jean. 14, 13), qu'il promet par là à tout chrétien qui prie avec une véritable confiance, avec humilité et persévérance, qu'il sera exaucé certainement.
Mais que de choses sont nécessaires, pour qu'une prière soit aussi parfaite que Jésus la demande ! Prier au nom de Jésus-Christ : ces simples paroles renferment bien des choses. Elles signifient premièrement qu'on doit demander à Dieu surtout les biens spirituels, la grâce d'être éclairé et converti intérieurement, celle de persévérer jusqu'à sa mort dans le chemin du salut et la pratique des vertus chrétiennes. Ces biens spirituels sont promis effectivement par Jésus-Christ lui-même à la prière humble, fervente et persévérante, et c'est en vue de ses mérites infinis que nous les obtenons du Père céleste. Prier au nom de Jésus-Christ, cela veut dire encore qu'on ne doit demander les biens temporels, que pour autant qu'ils plaisent à Dieu et qu'ils ne seront pas nuisibles au salut de notre âme, comme le divin Sauveur qui, dans le jardin des Olives, demandait à être délivré du calice de ses souffrances, mais avec pleine résignation à la volonté de son Père céleste. Les richesses, les honneurs, la santé, les biens temporels peuvent devenir pour nous des récifs dangereux auxquels notre âme pourrait facilement faire naufrage : exiger donc absolument de Dieu des biens temporels, ce ne serait pas prier au nom de Jésus-Christ. «En demandant une chose qui serait nuisible à notre âme, nous ne prions pas au nom du Rédempteur,» dit saint Augustin. Il s'en suit donc, qu'en demandant des faveurs temporelles, nous ne pouvons être certains d'être exaucés, puisque nous ne savons pas si ces choses seront profitables pour notre salut.
Prions enfin pour obtenir des grâces qui se rapportent directement à la grande affaire de notre salut, et cette prière sera certainement efficace en tant qu'elle nous attirera les grâces et les moyens de parvenir au bonheur éternel.
Simon. Qu'entend-on par confesseurs ? Si souvent déjà j'ai lu et entendu ce nom.
Le Curé. J'allais justement vous en parler. On nomme confesseurs ceux qui n'ont pas été dans le cas de devoir donner leur vie pour la foi, mais qui, par leurs sentiments et leur vie, se sont montrés de vrais serviteurs de Jésus-Christ. Tout chrétien doit être un martyr par ses sentiments, c'est-à-dire, qu'il doit être prêt à donner sa vie plutôt que d'offenser son Père céleste par un acte contraire à la foi ou à la vertu. Qu'il ait l'occasion de faire ce sacrifice ou qu'il ne la trouve point, cela ne fait rien à la chose. Si un chrétien possède en son âme la fermeté d'un martyr et persévère jusqu'à la fin dans l'accomplissement des commandements de Dieu, il mérite par là la récompense et la couronne des élus, tout comme l'obtiennent les vrais martyrs. Les derniers furent toujours spécialement en honneur dans l'Église, parce que, par leur mort, ils avaient donné le témoignage le plus éclatant de leur foi et de leur amour pour leurs devoirs de chrétiens ; cependant nous ne doutons nullement qu'on ne puisse mériter, aux yeux de Dieu, la même gloire par une vie sainte et fervente : car il se trouve peut-être des cas où il est plus difficile et partant aussi plus méritoire de passer une vie longue et remplie de tentations continuelles que de surmonter pendant quelques instants ou quelques heures la crainte de la mort et les tortures des persécuteurs.
Simon. Il y a même des hommes dont toute la vie n'est pour ainsi dire qu'une chaîne de souffrances et de persécutions.
Le Curé. Bon, et si ces hommes souffrent ces peines par amour pour Jésus-Christ, ou si seulement ils les lui offrent en dirigeant leur intention vers lui, Jésus-Christ à son tour ne manquera pas de les couronner comme autant de martyrs. Je vous dis ces choses pour vous engager à mener une vie bien chrétienne et pour vous faire aimer la vertu ; car une fois les temps des persécutions passés, le chrétien doit, à proprement parler, devenir un martyr non sanglant ou un confesseur. Tous les chrétiens morts en la grâce de Dieu sont de tels confesseurs ; vous-même en comptez tous parmi vos parents défunts, et en grand nombre, faut-il espérer. Malheur à nous, si après notre mort nous ne sommes pas de ce nombre.
Simon. M. le curé, les femmes de la réunion veulent des informations sur leurs représentantes dans le ciel.
Le Curé. Les vertus dont j'ai parlé se recommandent à l'imitation de tous sans exception, par conséquent aussi à celle des femmes. Je leur dis que l'Église a formé parmi elles deux classes de saintes particulières. Ce sont d'abord les saintes qui conservèrent jusqu'à la fin de leur vie l'état de virginité, et les autres qui, sans demeurer vierges, ont mené, selon leur état, une vie fervente et chrétienne. Déjà alors que j'expliquais les litanies de la sainte Vierge, je vous ai dit combien l'Église a toujours tenu en honneur l'état de virginité. Lorsque donc une vierge conserve intacte, pendant toute sa vie, la chasteté virginale, tout en s'exerçant à imiter l'exemple du divin Sauveur et le confessant par une vie de perfection, l'Église se réjouit de pouvoir insérer son nom au catalogue des saints et de la vénérer comme un de ses membres les plus nobles. Nous témoignons notre vénération d'une manière plus cordiale et plus prompte encore, envers ces vierges qui, à l'auréole de la virginité, surent unir la couronne du martyre.
Elles sont le digne émule des plus grands héros de l'Évangile. C'est pourquoi l'Église porte une si grande vénération envers sainte Agnès qui, n'étant encore qu'une enfant de treize ans, souffrit la mort pour l'Évangile; envers sainte Catherine d`Alexandrie ( Égypte) qui, selon une ancienne tradition, fut rouée, parce qu'elle n'avait pas voulu abjurer le christianisme; sainte Barbe qui préféra être emprisonnée dans une tour que de sacrifier aux idoles; sainte Agathe qui aima mieux souffrir toutes les tortures imaginables que de laisser porter atteinte à sa chasteté.
Sainte Agnès de Rome - vierge et martyre a 13 ans dans les persécutions de l`empereur romain païen Dioclétien en 304 Ap J.C.– Fêtée le 21 Janvier.
Sainte-Catherine d`Alexandrie – vierge et martyre ( Égypte gréco-romaine) – Fêtée le 25 novembre - la Sainte-Catherine – Elle fut torturée et rouée a 18 ans ans en l`an 312 Ap J.C. lors des persécutions de l`empereur romain païen Maximin II Daïa.
Le martyre de Sainte Barbe ( Barbara – vierge et martyre) sur une gravure allemande du 16 eme siècle - Fêtée le 4 décembre - Elle vivait en Anatolie gréco-romaine ( Turquie actuelle) et fut livré au supplices pour sa foi chrétienne au 3 eme siècle sous le règne de l`empereur romain païen Maximien
Sainte Agathe de Catane – vierge et martyre (Sicile en Italie) – Fêtée de 5 février – Elle vivait vers 251 Ap J.C. en Sicile dans une famille de noblesse romaine et fut dénoncée comme chrétienne et torturée lors des persécutions des empereurs romains païens
L'agneau de sainte Agnès; la palme de sainte Agathe, signe de son martyre; la tour de sainte Barbe et la roue de sainte Catherine : tous ces attributs avec lesquels sont représentées ces saintes martyres, nous sont pour cela des emblèmes éloquents de leur héroïsme. Si même les vierges chrétiennes n'ont plus à passer aujourd'hui par les tortures, ni à subir le mort pour conserver intacte leur innocence, l'exemple de ces fidèles servantes du Seigneur est très-propre à leur rappeler de quel prix est la belle vertu, et à les exciter à rejeter avec horreur les tentations infiniment moins dangereuses auxquelles elles pourraient être sujettes.
L'Église honore également les saintes femmes qui, sans avoir fait choix de l'état virginal pour plaire à Jésus-Christ, se sont montrées dignes du divin Rédempteur et de son Évangile , en remplissant d'une manière parfaite tous les devoirs de leur état : sainte Monique qui obtint par ses larmes et par ses prières la conversion de son fils St-Augustin; sainte Elisabeth qui aimait et assistait les pauvres, dont elle se faisait la mère; sainte Françoise de Chantal qui ne cessa de se perfectionner dans la vie intérieure et par les oeuvres de miséricorde ; sainte Marie-Magdeleine à laquelle peuvent s'appliquer ces paroles de l`Évangile : qu'il y a plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion ; — d'autres enfin que nous pourrions nommer encore, prouvent que l'Église s'applique à vénérer toutes les phases sous lesquelles se manifestent la piété et la sainteté, et à nous les proposer pour modèles. Je pense en avoir assez dit pour contenter la partie féminine de l'assemblée, en leur citant bien des exemples propres à leur servir de modèles. Mais comme j'ai déjà dit que l'exemple des saints les concerne également, je devrais ajouter ici que l'exemple des saintes ne doit pas moins être proposé comme modèle aux hommes. Nous ne pourrons jamais assez considérer et pratiquer la sainte modestie, la suave pureté, le courage héroïque tels que ces vertus nous apparaissent dans les saintes martyres. Ainsi nous pourrons nous apprendre mutuellement à connaître ce qui conduit au royaume de Dieu, afin qu'un jour nous puissions aussi, tous ensemble , nous retrouver au pied du Trône de l'Agneau sans tache en compagnie avec la sainte Vierge, les saints martyrs et confesseurs, les vierges et tous les choeurs des Anges.
Sainte Monique et son fils Saint Augustin - Évêque en Tunisie romaine et un des grands Docteurs de l`Église catholique (livres: Les Confessions - La Cité de Dieu) - Rome (Italie) et Carthage ( Tunisie romaine) de 354 a 430 Ap J.C.
Sainte Élisabeth de Hongrie vécut de 1211 à 1228 au château de Wartbourg auprès de son époux le landgrave Louis IV de Thuringe et de leurs enfants et de sa belle-mère, la landgravine douairière Sophie de Bavière. Des franciscains allemands font découvrir à la jeune Landgravine l'esprit de François d'Assise et elle décide alors de renoncer à une vie de luxe et de frivolité pour se mettre au service des pauvres.
Sainte Jeanne-Françoise Frémyot – baronne de Chantal – ( 1572 à 1641 – Moulins – France) -, est une dame française originaire de Bourgogne, fondatrice de l'ordre de la Visitation avec saint François de Sales
Sainte Marie Magdeleine - la pécheresse repentie qui change de vie ( Luc 7,37)
Simon. Pourquoi l'Église a institué les fêtes des saints.
Le Curé. Le but que l'Église s'est proposé en instituant les fêtes des saints est en effet 1° d'exciter les fidèles à les invoquer; 2° de nous offrir des modèles d'une vie chrétienne et de nous exhorter à les imiter. Saint Augustin dit là-dessus : « Les fêtes des martyrs doivent être pour nous une exhortation pressante à faire de toute notre vie au moins un martyre moral en mourant au péché et a la concupiscence. » C'est pourquoi le Fils de Dieu dit : Celui qui hait son âme, (c'est-à-dire, celui qui combat le péché et ses passions), la conservera pour la vie éternelle; 3 - afin que les saints soient vénérés sur la terre comme ils l'ont mérité par leurs vertus ; 4° enfin pour que nous louions Dieu dans ses saints, comme dit le roi-prophète. Si déjà le plus petit brin de paille, l'animal le plus imperceptible est propre à nous faire voir et admirer la toute-puissance, la sagesse et la bonté du Créateur et à nous en faire réjouir, pourquoi ne ressentirions-nous pas une joie bien plus grande et plus légitime encore en voyant les preuves de sa sainteté et de la puissance de sa grâce dans l'âme de ses saints si admirablement transformés?
Arrêtons ici nos considérations et retirons-nous en silence, pour méditer sur les choses que nous avons apprises aujourd'hui, et surtout n'oublions pas de suivre l'exemple des saints. Loué soit Jésus-Christ. — À jamais.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
ENTRETIEN QUATORZIÈME.
LA FÊTE DE LA DÉDICACE DES ÉGLISES - 9 novembre
Résumé : Destination et origine des églises chrétiennes. Les premières églises. Consécration des églises; son origine. Cérémonies de la pose de la première pierre. Orientation. Cérémonies de la consécration.
Le Curé. Nous aurons à nous entretenir aujourd'hui d'une fête belle et importante à la fois. Je vous parlerai cependant moins de la fête elle-même que d'autres sujets qui s'y rattachent. Je veux vous expliquer la Dédicace des églises.
Simon. Nous vous serons bien reconnaissants de l'explication que vous allez nous en donner.
Le Curé. D'abord, je dois , avant d'entrer en matière, vous parler de la destination et de l'origine des temples chrétiens. Les églises sont bâties pour que les fidèles puissent se réunir pour la prière commune , pour le sacrifice, les louanges de Dieu; pour y écouter la parole de Dieu et y recevoir les saints sacrements. On peut, il est vrai , prier aussi à la maison et en d'autres lieux, mais nulle part on ne le fait si bien et d'une manière si fervente qu'à l'église, où l'exemple de la foule des fidèles recueillie, la majesté des cérémonies et enfin la communication intérieure de la grâce divine contribuent puissamment à relever l'âme du chrétien qui prie et à augmenter sa ferveur. Les soldats d'une armée combattent avec bien plus de bravoure et obtiennent plus certainement la victoire, lorsqu'ils sont rassemblés , que lorsqu'ils sont dispersés dans toutes les directions. Il en est de même de la prière des chrétiens réunis dans le temple commun, savoir à l'église. Secondement, le temple est de plus un bel emblème de l'Église catholique tout entière, de cette grande assemblée que nous appelons la communion des saints.
De même que dans cette assemblée de tous les fidèles tous sont réunis spirituellement et cimentés les uns aux autres par la même foi, les mêmes sacrements, par la prière et une vie édifiante, de même aussi les fidèles réunis dans un temple ne forment plus, pour ainsi dire, qu'une seule et sainte famille. Et comme Jésus-Christ est le chef de toute la sainte Église, ainsi est-il également présent parmi nous dans le temple sous les espèces du pain dans la sainte hostie. — Les temples chrétiens sont donc, à proprement parler, aussi anciens que le christianisme lui-même. Le cénacle de Jérusalem, cette salle où le Sauveur célébra la dernière cène, devint, par le changement du pain en son corps et du vin en son sang, une église chrétienne, et cette autre salle où les apôtres attendirent le Saint-Esprit, n'était autre chose non plus qu'une église. Mais lorsque le temps des persécutions fut venu, les fidèles durent souvent se réfugier dans des antres et des cavernes souterraines, pour y vaquer à la prière, et ces souterrains devenaient encore par-là des temples chrétiens, d'où partaient vers le ciel les prières et les louanges de Dieu. Elles ne lui étaient certainement pas moins agréables que celles qui se font dans les plus magnifiques cathédrales, et la grâce n'y descendait pas avec moins de profusion que dans nos plus somptueuses basiliques.
Simon. Il est bien certain que la ferveur des chrétiens n'a pas été moindre non plus, dans ces cavernes, qu'elle ne l'est aujourd'hui dans nos temples les plus splendides.
Le Curé. Faites en sorte que jamais notre paroisse ne mérite ce reproche. — Il est vrai que, dans les premiers siècles du christianisme, on construisait déjà des temples proprement dits : mais ils étaient en petit nombre et de courte durée ; car presque toujours ils étaient détruits par les païens. Ce ne fut qu'après les persécutions , donc environ trois siècles après Jésus-Christ, que l'on put songer à construire pour les assemblées des fidèles des bâtiments aussi somptueux et aussi vastes que ceux que nous sommes accoutumés de voir aujourd'hui. Constantin-le-Grand (empereur romain - 4 ème siècle Ap J.C.) fut le premier empereur qui accorda aux chrétiens le plein pouvoir et la liberté de bâtir partout des églises. J'ai déjà mentionné un temple que cet empereur fît construire lui-même ; qui de vous pourra encore me le nommer?
Simon. L'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem.
Le Curé. Très-bien. Cette église ne fut pas la seule qu'il fit construire; à Rome aussi il fit bâtir à côté de son palais de Latran l'église du saint Sauveur et l'église en l'honneur de saint Pierre. Une très-vieille tradition rapporte que Constantin avait voulu même tirer et emporter lui-même douze paniers de terre, lorsqu'on jeta les fondements de cette dernière basilique : il le fit en l'honneur des douze Apôtres.
Basilique du Saint Sauveur a Rome ( St-Jean de Latran) - dédidace en 324 Ap J.C.
Thomas. Vous nous avez déjà dit maintes fois que l'on construisait des églises en l'honneur des saints; est-ce qu'on les construit aussi pour eux?
Le Curé. Toute église est consacrée à Dieu et destinée à la réunion des fidèles. Toutefois il est d'usage de la désigner d'après le nom d'un saint ; on veut par là la recommander, ainsi que les fidèles qui s'y rassemblent, à la protection et aux prières de ce même saint, vénérant ainsi la mémoire de ce membre de l'Église triomphante.
Simon. La consécration des églises remonte t-elle aux premières années du christianisme ?
Le Curé- Elle date précisément de l'époque de l'empereur romain Constantin ( 4 eme siècle), c'est-à-dire que son origine remonte aux premières églises proprement dites qui furent élevées. Déjà alors, cette cérémonie se faisait de la manière la plus solennelle et avec la plus grande allégresse de la part des chrétiens. Les évêques du voisinage se réunissaient pour y prendre part et souvent ces solennités donnaient lieu à la réunion d'un concile pour se concerter sur les mesures à prendre pour le bien de l'Église ou le redressement des abus, l'amélioration des mœurs. Ce fut à l'occasion de la consécration ou dédicace d'une église qu'une de ces saintes assemblées eut lieu à Antioche en l`an 544, à laquelle se trouvèrent présents quatre-vingt-dix évêques. Les évêques qui assistaient à une semblable consécration relevaient et sanctifiaient la solennité soit par leurs prédications adressées au peuple, soit par le saint sacrifice qu'ils offraient, soit enfin par leurs prières.
Simon. Je voudrais bien pouvoir être témoin de la consécration solennelle d'une église ; j'ai déjà entendu souvent parler des cérémonies qui ont lieu à cette occasion.
Le Curé. Je vous en exposerai très-volontiers les principales. Avant tout, il nous faut cependant parler de la pose de la première pierre, que l'on bénit également d'une manière solennelle avant de commencer la construction de l'église. Le jour qui précède cette solennité, on plante une croix à l'endroit même où devra se trouver le maitre-autel. On prend en quelque sorte possession, par ce signe sacré, de la place qui va être consacrée à Dieu pour en faire un usage chrétien, tout-à-fait comme un roi plante son drapeau. — Il faut que je vous fasse encore observer que nos églises doivent être tournées vers l'Orient, c'est-à-dire que le choeur et l'autel doivent être tournés du côté du soleil levant toutes les fois que des obstacles sérieux ne viennent pas s'opposera cette orientation.
Simon. Et pourquoi donc cela ?
Le Curé. Le soleil se lève chaque jour du côté de l'est pour remplir la terre de sa lumière et de sa chaleur. Notre lumière et notre soleil, c'est Jésus-Christ, qui est apparu pour délivrer le monde de ses ténèbres et des ombres de la mort. Nous le symbolisons d'une manière très-frappante en dirigeant l'autel, sur lequel le Sauveur descend chaque fois au moment de la consécration, sur lequel il siège sans cesse dans le saint Sacrement, du côté où le soleil commence à nous apparaître à son lever.
Le Chœur et l`Autel sont quand cela est possible vers l`est
Simon. Je commence seulement à remarquer que notre église est également tournée de ce côté ; je n'y avais pas encore fait attention jusqu'ici.
Le Curé. J'ajouterai encore quelques mots sur la pose de la première pierre. On choisit pour pierre fondamentale une pierre détaillé, puisqu'elle doit nous rappeler que Jésus-Christ , comme il le dit lui-même, cette pierre angulaire rejetée par ceux qui édifiaient , est devenu ensuite la pierre fondamentale. La croix plantée le jour précédent ainsi que la pierre sont bénies par l'évêque, qui prie Dieu de vouloir purifier et sanctifier ce lieu, le choisir pour sa demeure et y demeurer à jamais par sa grâce ; il supplie le Tout-Puissant d'y faire fleurir la vraie foi, la crainte de Dieu et la charité fraternelle. Il demande encore, en terminant, que tous ceux qui contribuent à la construction de la maison de Dieu avec une intention pure, obtiennent ou conservent la santé du corps et la sanctification de leurs âmes. La pierre est ensuite placée en terre avec l'aide de l'évêque, qui bénit en outre les fondements de la future église. Souvent aussi toute la place est sanctifiée par la célébration du saint Sacrifice qui s'y fait en plein air à cette occasion.
Simon. C'est donc une action bien méritoire que celle de contribuer à la construction d'un temple qui a été inauguré d'une manière si édifiante et si sainte!...
Le Curé. Au commencement, le monde n'était qu'un temple magnifique et immense dédié à la gloire de Dieu ; le péché originel le profana et le transforma en un royaume de Satan. Le Fils de Dieu put seul l'arracher à sa hideuse domination en le consacrant de nouveau, par sa mort, en un sanctuaire du vrai Dieu, de sorte que tous ceux qui croient maintenant en lui et qui ne repoussent pas sa Rédemption peuvent acquérir la vie éternelle. Toute église chrétienne est, en petit, la copie de ce grand temple du monde.
LA FÊTE DE LA DÉDICACE DES ÉGLISES - 9 novembre
Résumé : Destination et origine des églises chrétiennes. Les premières églises. Consécration des églises; son origine. Cérémonies de la pose de la première pierre. Orientation. Cérémonies de la consécration.
Le Curé. Nous aurons à nous entretenir aujourd'hui d'une fête belle et importante à la fois. Je vous parlerai cependant moins de la fête elle-même que d'autres sujets qui s'y rattachent. Je veux vous expliquer la Dédicace des églises.
Simon. Nous vous serons bien reconnaissants de l'explication que vous allez nous en donner.
Le Curé. D'abord, je dois , avant d'entrer en matière, vous parler de la destination et de l'origine des temples chrétiens. Les églises sont bâties pour que les fidèles puissent se réunir pour la prière commune , pour le sacrifice, les louanges de Dieu; pour y écouter la parole de Dieu et y recevoir les saints sacrements. On peut, il est vrai , prier aussi à la maison et en d'autres lieux, mais nulle part on ne le fait si bien et d'une manière si fervente qu'à l'église, où l'exemple de la foule des fidèles recueillie, la majesté des cérémonies et enfin la communication intérieure de la grâce divine contribuent puissamment à relever l'âme du chrétien qui prie et à augmenter sa ferveur. Les soldats d'une armée combattent avec bien plus de bravoure et obtiennent plus certainement la victoire, lorsqu'ils sont rassemblés , que lorsqu'ils sont dispersés dans toutes les directions. Il en est de même de la prière des chrétiens réunis dans le temple commun, savoir à l'église. Secondement, le temple est de plus un bel emblème de l'Église catholique tout entière, de cette grande assemblée que nous appelons la communion des saints.
De même que dans cette assemblée de tous les fidèles tous sont réunis spirituellement et cimentés les uns aux autres par la même foi, les mêmes sacrements, par la prière et une vie édifiante, de même aussi les fidèles réunis dans un temple ne forment plus, pour ainsi dire, qu'une seule et sainte famille. Et comme Jésus-Christ est le chef de toute la sainte Église, ainsi est-il également présent parmi nous dans le temple sous les espèces du pain dans la sainte hostie. — Les temples chrétiens sont donc, à proprement parler, aussi anciens que le christianisme lui-même. Le cénacle de Jérusalem, cette salle où le Sauveur célébra la dernière cène, devint, par le changement du pain en son corps et du vin en son sang, une église chrétienne, et cette autre salle où les apôtres attendirent le Saint-Esprit, n'était autre chose non plus qu'une église. Mais lorsque le temps des persécutions fut venu, les fidèles durent souvent se réfugier dans des antres et des cavernes souterraines, pour y vaquer à la prière, et ces souterrains devenaient encore par-là des temples chrétiens, d'où partaient vers le ciel les prières et les louanges de Dieu. Elles ne lui étaient certainement pas moins agréables que celles qui se font dans les plus magnifiques cathédrales, et la grâce n'y descendait pas avec moins de profusion que dans nos plus somptueuses basiliques.
Simon. Il est bien certain que la ferveur des chrétiens n'a pas été moindre non plus, dans ces cavernes, qu'elle ne l'est aujourd'hui dans nos temples les plus splendides.
Le Curé. Faites en sorte que jamais notre paroisse ne mérite ce reproche. — Il est vrai que, dans les premiers siècles du christianisme, on construisait déjà des temples proprement dits : mais ils étaient en petit nombre et de courte durée ; car presque toujours ils étaient détruits par les païens. Ce ne fut qu'après les persécutions , donc environ trois siècles après Jésus-Christ, que l'on put songer à construire pour les assemblées des fidèles des bâtiments aussi somptueux et aussi vastes que ceux que nous sommes accoutumés de voir aujourd'hui. Constantin-le-Grand (empereur romain - 4 ème siècle Ap J.C.) fut le premier empereur qui accorda aux chrétiens le plein pouvoir et la liberté de bâtir partout des églises. J'ai déjà mentionné un temple que cet empereur fît construire lui-même ; qui de vous pourra encore me le nommer?
Simon. L'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem.
Le Curé. Très-bien. Cette église ne fut pas la seule qu'il fit construire; à Rome aussi il fit bâtir à côté de son palais de Latran l'église du saint Sauveur et l'église en l'honneur de saint Pierre. Une très-vieille tradition rapporte que Constantin avait voulu même tirer et emporter lui-même douze paniers de terre, lorsqu'on jeta les fondements de cette dernière basilique : il le fit en l'honneur des douze Apôtres.
Basilique du Saint Sauveur a Rome ( St-Jean de Latran) - dédidace en 324 Ap J.C.
Thomas. Vous nous avez déjà dit maintes fois que l'on construisait des églises en l'honneur des saints; est-ce qu'on les construit aussi pour eux?
Le Curé. Toute église est consacrée à Dieu et destinée à la réunion des fidèles. Toutefois il est d'usage de la désigner d'après le nom d'un saint ; on veut par là la recommander, ainsi que les fidèles qui s'y rassemblent, à la protection et aux prières de ce même saint, vénérant ainsi la mémoire de ce membre de l'Église triomphante.
Simon. La consécration des églises remonte t-elle aux premières années du christianisme ?
Le Curé- Elle date précisément de l'époque de l'empereur romain Constantin ( 4 eme siècle), c'est-à-dire que son origine remonte aux premières églises proprement dites qui furent élevées. Déjà alors, cette cérémonie se faisait de la manière la plus solennelle et avec la plus grande allégresse de la part des chrétiens. Les évêques du voisinage se réunissaient pour y prendre part et souvent ces solennités donnaient lieu à la réunion d'un concile pour se concerter sur les mesures à prendre pour le bien de l'Église ou le redressement des abus, l'amélioration des mœurs. Ce fut à l'occasion de la consécration ou dédicace d'une église qu'une de ces saintes assemblées eut lieu à Antioche en l`an 544, à laquelle se trouvèrent présents quatre-vingt-dix évêques. Les évêques qui assistaient à une semblable consécration relevaient et sanctifiaient la solennité soit par leurs prédications adressées au peuple, soit par le saint sacrifice qu'ils offraient, soit enfin par leurs prières.
Simon. Je voudrais bien pouvoir être témoin de la consécration solennelle d'une église ; j'ai déjà entendu souvent parler des cérémonies qui ont lieu à cette occasion.
Le Curé. Je vous en exposerai très-volontiers les principales. Avant tout, il nous faut cependant parler de la pose de la première pierre, que l'on bénit également d'une manière solennelle avant de commencer la construction de l'église. Le jour qui précède cette solennité, on plante une croix à l'endroit même où devra se trouver le maitre-autel. On prend en quelque sorte possession, par ce signe sacré, de la place qui va être consacrée à Dieu pour en faire un usage chrétien, tout-à-fait comme un roi plante son drapeau. — Il faut que je vous fasse encore observer que nos églises doivent être tournées vers l'Orient, c'est-à-dire que le choeur et l'autel doivent être tournés du côté du soleil levant toutes les fois que des obstacles sérieux ne viennent pas s'opposera cette orientation.
Simon. Et pourquoi donc cela ?
Le Curé. Le soleil se lève chaque jour du côté de l'est pour remplir la terre de sa lumière et de sa chaleur. Notre lumière et notre soleil, c'est Jésus-Christ, qui est apparu pour délivrer le monde de ses ténèbres et des ombres de la mort. Nous le symbolisons d'une manière très-frappante en dirigeant l'autel, sur lequel le Sauveur descend chaque fois au moment de la consécration, sur lequel il siège sans cesse dans le saint Sacrement, du côté où le soleil commence à nous apparaître à son lever.
Le Chœur et l`Autel sont quand cela est possible vers l`est
Simon. Je commence seulement à remarquer que notre église est également tournée de ce côté ; je n'y avais pas encore fait attention jusqu'ici.
Le Curé. J'ajouterai encore quelques mots sur la pose de la première pierre. On choisit pour pierre fondamentale une pierre détaillé, puisqu'elle doit nous rappeler que Jésus-Christ , comme il le dit lui-même, cette pierre angulaire rejetée par ceux qui édifiaient , est devenu ensuite la pierre fondamentale. La croix plantée le jour précédent ainsi que la pierre sont bénies par l'évêque, qui prie Dieu de vouloir purifier et sanctifier ce lieu, le choisir pour sa demeure et y demeurer à jamais par sa grâce ; il supplie le Tout-Puissant d'y faire fleurir la vraie foi, la crainte de Dieu et la charité fraternelle. Il demande encore, en terminant, que tous ceux qui contribuent à la construction de la maison de Dieu avec une intention pure, obtiennent ou conservent la santé du corps et la sanctification de leurs âmes. La pierre est ensuite placée en terre avec l'aide de l'évêque, qui bénit en outre les fondements de la future église. Souvent aussi toute la place est sanctifiée par la célébration du saint Sacrifice qui s'y fait en plein air à cette occasion.
Simon. C'est donc une action bien méritoire que celle de contribuer à la construction d'un temple qui a été inauguré d'une manière si édifiante et si sainte!...
Le Curé. Au commencement, le monde n'était qu'un temple magnifique et immense dédié à la gloire de Dieu ; le péché originel le profana et le transforma en un royaume de Satan. Le Fils de Dieu put seul l'arracher à sa hideuse domination en le consacrant de nouveau, par sa mort, en un sanctuaire du vrai Dieu, de sorte que tous ceux qui croient maintenant en lui et qui ne repoussent pas sa Rédemption peuvent acquérir la vie éternelle. Toute église chrétienne est, en petit, la copie de ce grand temple du monde.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
LES ÉGLISES CHRÉTIENNES.
Les tours et les clochers. La croix et le coq dont ils sont surmontés. Les cloches et l'orgue, leur origine.- Les bénédictions leur but, leur efficacité. Les nimbes ou auréoles.
Le Curé. Je répondrai aujourd'hui aux questions que vous m'avez faites la dernière fois. Mais avant de vous parler des cloches, vous me permettrez de vous dire quelques mots des clochers et des tours dans lesquels elles sont suspendues. Savez-vous bien que la tour a aussi une très-belle signification emblématique ? Elle s'élève bien haut dans les airs par-dessus les habitations des hommes et même par-dessus l'église elle-même et ressemble en quelque sorte à un doigt qui nous montre le ciel, unique objet vers lequel doivent tendre et nos désirs et nos travaux. Plus les hommes sont enclins à s'attacher à la terre par leurs affaires temporelles et leurs préoccupations journalières, plus aussi ils ont besoin de l'exhortation silencieuse de ce prédicateur en pierre qui leur dit sans cesse, chaque fois qu'ils le regardent : « Recherchez les choses du ciel, où Jésus-Christ est assis à la droite de Dieu. N'ayez de goût que pour les choses d'en haut, et non pour celles d'ici-bas.»
Puissent alors tous les chrétiens, animés de pareils sentiments, devenir aussi fermes et inébranlables dans l'accomplissement des commandements et de tous leurs devoirs ainsi que dans l'exécution de leurs bonnes résolutions, que cette tour est fermement assise sur ses fondements ! puisse chacun être fidèle à garder sa foi et confesser courageusement devant les hommes le Crucifié, comme l'est ce clocher à porter bien haut, aux yeux de tout le monde, la croix, le signe glorieux de notre salut.
Simon. C'est sans doute pour nous rappeler ce devoir que l'on a placé la croix au sommet de la tour.
Le Curé. Du moins en partie. Elle a aussi pour but de distinguer les églises chrétiennes des temples des infidèles. Enfin cet usage chrétien indique encore la victoire de la croix et du Crucifié sur le péché et sur la mort, sur l'incrédulité et sur l'hérésie : c'est pourquoi ce signe sacré plane bien haut dans les airs comme l'étendard de la victoire.
Simon. Que signifie maintenant le coq sur le sommet de la tour.
Le Curé. Le coq n'a pas seulement, ni même principalement pour but d'indiquer le vent en guise de girouette ; mais il a surtout une très-belle signification symbolique. D'abord il signifie la vigilance avec laquelle nous devons éviter toutes les tentations au péché et nous mettre en garde contre la sensualité et contre nos mauvaises inclinations. En second lieu, le coq, par sa vigilance et son chant matinal, représente le zèle avec lequel nous devons être prêts à nous adonner au service de Dieu et à la prière, en faisant même le sacrifice de nos propres aises et de notre repos. Enfin celui qui, comme l'apôtre saint Pierre, veut se rappeler ses péchés et l'obligation d'en faire pénitence, fera très-bien de porter parfois ses regards sur le sommet du clocher. — Disons maintenant un mot des cloches qui sont renfermées dans la tour.
Le coq signifie la vigilance pour éviter le péché, le zèle pour le service de Dieu et l`obligation de faire pénitence pour nos péchés.
Simon. Je me souviens d'avoir lu dans le temps quelque chose sur l'âge et l'origine des clochers, mais il m'est impossible de me le rappeler.
Le Curé. Les opinions sont partagées là-dessus. Cependant il est vraisemblable, qu'avant le sixième siècle, on trouvait déjà des cloches par-ci par-là. On dit qu'elles furent inventées à Nole, en Campanie, ou que du moins elles y furent perfectionnées : telle serait aussi la raison pour laquelle une cloche se nomme en latin campana et une sonnette nola. Quoi qu'il en soit, il est certain que les païens se sont servis, longtemps avant les chrétiens, de sonnettes et de clochettes en airain, mais ces derniers n'osaient encore faire usage de ces instruments, parce que ce bruit aurait suffi pour révéler à leurs persécuteurs les lieux dans lesquels ils se rassemblaient. En ces temps où on les traquait comme des bêtes fauves, les diacres avaient la charge de se rendre au domicile de tous les chrétiens pour leur dire secrètement quand et où l'office divin serait célébré, parce que l'on se rassemblait tantôt dans un souterrain, tantôt dans une maison particulière. Plus tard, sous Constantin-le-Grand, les chrétiens récupérèrent la paix et la liberté de pouvoir exercer publiquement leur culte ; comme je vous l'ai déjà dit, ils bâtirent dès lors des églises; mais ces édifices n'avaient pas encore de tours ni de cloches.
Simon. Sans cloche ni orgue, il ferait pourtant bien triste à l'église.
Le Curé. Il en est de l'orgue comme des cloches. Les orgues ne furent introduites dans les églises que bien longtemps après les cloches, c'est-à-dire du dixième au treizième siècle. Encore aujourd'hui les Grecs ne se servent, dans leurs temples, ni d'orgues ni d'instruments de musique quelconques. Toutefois il faut avouer que l'orgue contribue beaucoup à rehausser la solennité des offices et la régularité du chant ecclésiastique.
Sur les Bénédictions
Simon - Je ne comprends plus rien à toutes ces bénédictions. Il semble, en effet, que tout ce qui se trouve dans le monde soit maudit et qu'il faille tout purifier avant de faire usage du moindre objet.
Le Curé. Cette interpellation vient à propos pour me donner l'occasion de vous expliquer plus amplement quelles sont les intentions de l'Église en faisant ces différentes bénédictions. De même que l'homme lui-même, toutes les créatures, tout ce qui entoure l'homme et toutes les choses dont il se sert sont devenues mauvaises et en quelque sorte méchantes, depuis le péché de notre premier père. Car, du moment que l'homme eut désobéi à son père céleste, toutes les créatures à leur tour se révoltèrent contre l'homme ; pour le punir de son péché, Dieu avait prononcé la malédiction sur toute la nature. Dès lors, les hommes eurent à combattre contre les éléments; les champs, au lieu de récompenser son travail par des fruits abondants , ne produisirent plus que des ronces et des épines: les animaux, dont la destination était de le servir, devinrent errants et sauvages, souvent même ses ennemis; les plantes des champs se transformèrent en poisons, du moins en partie, et les autres perdirent une partie de leur vertu salutaire. Les choses créées ne se montrèrent pas seulement nuisibles au corps de l'homme, mais encore et surtout à son âme. Car de même que l'homme devint, par le péché, l'esclave de satan, de même il assujettît à satan, par sa chute, tout ce que Dieu avait placé dans le monde pour son usage , et comme le fruit défendu du Paradis , tout ce que la nature renfermait devint, pour le démon , un moyen de séduire l'homme au mal ; tout devint pour ses sens pervertis et sa concupiscence une occasion du péché : le vin , l'occasion de l'intempérance ; l'or , celle de l'avarice, du vol, du meurtre; la beauté corporelle, celle de la volupté, etc. Or, pour montrer que le christianisme peut et veut tout changer, en transformant toutes choses en moyens de salut, et que la prière de l'Église éloigne effectivement des objets ce qu'ils contiennent de nuisible pour le corps ou pour l'âme, nous les bénissons, avant de nous en servir, c'est-à-dire, que nous prions sur ces objets en les munissant du signe de la croix. Voilà pourquoi saint Paul assure que tout ce qui est créé soupire après la Rédemption , (Romains 8. 19.) et ailleurs : « Tout ce que Dieu a créé est bon parce que tout est sanctifié par la parole de Dieu et la prière. » (1 Timothée 4, 4, 5.). Voilà pourquoi encore nous prions Dieu, avant notre repas, de bénir les choses que nous allons manger ou boire, afin qu'elles nous soient profitables.
Encens et Nimbe
L'usage de brûler de l'encens devant les reliques est d'abord un emblème par lequel sont signifiées les vertus par lesquelles les saints se signalèrent pendant leur vie, elles sont ensuite une manière d'exprimer les mérites par lesquels ils se sont enrichis devant Dieu. L'encens signifie encore nos prières qui , réunies aux suffrages des bienheureux , s'élèvent jusqu'au trône du Très-Haut. En allumant les cierges devant les images , nous voulons dire que nous aimons et que nous vénérons les saints, qui sont les amis de Dieu et nos frères en Jésus-Christ avec lesquels nous espérons être réunis un jour dans la béatitude céleste. Ces lumières sont de plus le symbole de cette même béatitude et de cette clarté de la vision béatifique de Dieu dont jouissent ses élus. Jésus-Christ lui-même apparut sur le Thabor brillant de clarté pour rappeler aux Apôtres l'éclat de sa gloire , et saint Jean nous dit que les élus lui seront semblables : « Nous savons , dit-il , que nous lui ressemblerons , lorsqu'il apparaîtra. » (1. Jean. 3,2).
C'est aussi la raison pour laquelle nous avons coutume d'entourer de rayons tantôt le corps (gloires) , tantôt seulement la tête des saints (nimbes, auréoles , couronnes) lorsque nous, les représentons par la peinture. Comment , en effet , pourrions-nous exprimer plus convenablement la compagnie bienheureuse des anges et des élus dont jouissent les saints qu'en allumant des cierges devant leurs images, usage par lequel nous réalisons ces paroles du psalmiste : « Seigneur, vous êtes la source de la vie et nous verrons la lumière dans votre splendeur » (Psaume 35. 9.). Les trônes sur lesquels on place leurs images, les couronnes et les palmes dont on orne leur tête et leurs mains n'ont d'autre but que d'exprimer qu'ils règnent avec Jésus-Christ , le roi éternel dans le royaume des cieux. Le Seigneur les illuminera et ils régneront pendant toute l'éternité (2. Tim. 4. 8). Et saint Jean , parlant d'une manière figurée, dit des saints martyrs qu'ils se tiennent debout devant le trône de l'agneau portant des palmes en leurs mains (Apocalypse 7. 9.). — tout cela doit être pour nous un encouragement à imiter les vertus dont les saints nous ont donné l'exemple, afin que nous puissions leur devenir semblables dans la gloire éternelle, après l'avoir été sur la terre, et devenir participants de cette gloire véritable que nous ne pouvons rappeler ici-bas qu'au moyen de pâles emblèmes.
Nimbe au-dessus de la tête du saint
(1) Les couronnes des saints (nimbes , auréoles , gloires) sont ordinairement rondes, celles du Christ ont la forme d'une croix, celles des personnages encore vivants sont carrées. Le nimbe triangulaire (tel qu'on le représente souvent renfermant l`oeil de la Providence) ne convient qu'à Dieu et il exprime les trois personnes de la sainte Trinité.
Les tours et les clochers. La croix et le coq dont ils sont surmontés. Les cloches et l'orgue, leur origine.- Les bénédictions leur but, leur efficacité. Les nimbes ou auréoles.
Le Curé. Je répondrai aujourd'hui aux questions que vous m'avez faites la dernière fois. Mais avant de vous parler des cloches, vous me permettrez de vous dire quelques mots des clochers et des tours dans lesquels elles sont suspendues. Savez-vous bien que la tour a aussi une très-belle signification emblématique ? Elle s'élève bien haut dans les airs par-dessus les habitations des hommes et même par-dessus l'église elle-même et ressemble en quelque sorte à un doigt qui nous montre le ciel, unique objet vers lequel doivent tendre et nos désirs et nos travaux. Plus les hommes sont enclins à s'attacher à la terre par leurs affaires temporelles et leurs préoccupations journalières, plus aussi ils ont besoin de l'exhortation silencieuse de ce prédicateur en pierre qui leur dit sans cesse, chaque fois qu'ils le regardent : « Recherchez les choses du ciel, où Jésus-Christ est assis à la droite de Dieu. N'ayez de goût que pour les choses d'en haut, et non pour celles d'ici-bas.»
Puissent alors tous les chrétiens, animés de pareils sentiments, devenir aussi fermes et inébranlables dans l'accomplissement des commandements et de tous leurs devoirs ainsi que dans l'exécution de leurs bonnes résolutions, que cette tour est fermement assise sur ses fondements ! puisse chacun être fidèle à garder sa foi et confesser courageusement devant les hommes le Crucifié, comme l'est ce clocher à porter bien haut, aux yeux de tout le monde, la croix, le signe glorieux de notre salut.
Simon. C'est sans doute pour nous rappeler ce devoir que l'on a placé la croix au sommet de la tour.
Le Curé. Du moins en partie. Elle a aussi pour but de distinguer les églises chrétiennes des temples des infidèles. Enfin cet usage chrétien indique encore la victoire de la croix et du Crucifié sur le péché et sur la mort, sur l'incrédulité et sur l'hérésie : c'est pourquoi ce signe sacré plane bien haut dans les airs comme l'étendard de la victoire.
Simon. Que signifie maintenant le coq sur le sommet de la tour.
Le Curé. Le coq n'a pas seulement, ni même principalement pour but d'indiquer le vent en guise de girouette ; mais il a surtout une très-belle signification symbolique. D'abord il signifie la vigilance avec laquelle nous devons éviter toutes les tentations au péché et nous mettre en garde contre la sensualité et contre nos mauvaises inclinations. En second lieu, le coq, par sa vigilance et son chant matinal, représente le zèle avec lequel nous devons être prêts à nous adonner au service de Dieu et à la prière, en faisant même le sacrifice de nos propres aises et de notre repos. Enfin celui qui, comme l'apôtre saint Pierre, veut se rappeler ses péchés et l'obligation d'en faire pénitence, fera très-bien de porter parfois ses regards sur le sommet du clocher. — Disons maintenant un mot des cloches qui sont renfermées dans la tour.
Le coq signifie la vigilance pour éviter le péché, le zèle pour le service de Dieu et l`obligation de faire pénitence pour nos péchés.
Simon. Je me souviens d'avoir lu dans le temps quelque chose sur l'âge et l'origine des clochers, mais il m'est impossible de me le rappeler.
Le Curé. Les opinions sont partagées là-dessus. Cependant il est vraisemblable, qu'avant le sixième siècle, on trouvait déjà des cloches par-ci par-là. On dit qu'elles furent inventées à Nole, en Campanie, ou que du moins elles y furent perfectionnées : telle serait aussi la raison pour laquelle une cloche se nomme en latin campana et une sonnette nola. Quoi qu'il en soit, il est certain que les païens se sont servis, longtemps avant les chrétiens, de sonnettes et de clochettes en airain, mais ces derniers n'osaient encore faire usage de ces instruments, parce que ce bruit aurait suffi pour révéler à leurs persécuteurs les lieux dans lesquels ils se rassemblaient. En ces temps où on les traquait comme des bêtes fauves, les diacres avaient la charge de se rendre au domicile de tous les chrétiens pour leur dire secrètement quand et où l'office divin serait célébré, parce que l'on se rassemblait tantôt dans un souterrain, tantôt dans une maison particulière. Plus tard, sous Constantin-le-Grand, les chrétiens récupérèrent la paix et la liberté de pouvoir exercer publiquement leur culte ; comme je vous l'ai déjà dit, ils bâtirent dès lors des églises; mais ces édifices n'avaient pas encore de tours ni de cloches.
Simon. Sans cloche ni orgue, il ferait pourtant bien triste à l'église.
Le Curé. Il en est de l'orgue comme des cloches. Les orgues ne furent introduites dans les églises que bien longtemps après les cloches, c'est-à-dire du dixième au treizième siècle. Encore aujourd'hui les Grecs ne se servent, dans leurs temples, ni d'orgues ni d'instruments de musique quelconques. Toutefois il faut avouer que l'orgue contribue beaucoup à rehausser la solennité des offices et la régularité du chant ecclésiastique.
Sur les Bénédictions
Simon - Je ne comprends plus rien à toutes ces bénédictions. Il semble, en effet, que tout ce qui se trouve dans le monde soit maudit et qu'il faille tout purifier avant de faire usage du moindre objet.
Le Curé. Cette interpellation vient à propos pour me donner l'occasion de vous expliquer plus amplement quelles sont les intentions de l'Église en faisant ces différentes bénédictions. De même que l'homme lui-même, toutes les créatures, tout ce qui entoure l'homme et toutes les choses dont il se sert sont devenues mauvaises et en quelque sorte méchantes, depuis le péché de notre premier père. Car, du moment que l'homme eut désobéi à son père céleste, toutes les créatures à leur tour se révoltèrent contre l'homme ; pour le punir de son péché, Dieu avait prononcé la malédiction sur toute la nature. Dès lors, les hommes eurent à combattre contre les éléments; les champs, au lieu de récompenser son travail par des fruits abondants , ne produisirent plus que des ronces et des épines: les animaux, dont la destination était de le servir, devinrent errants et sauvages, souvent même ses ennemis; les plantes des champs se transformèrent en poisons, du moins en partie, et les autres perdirent une partie de leur vertu salutaire. Les choses créées ne se montrèrent pas seulement nuisibles au corps de l'homme, mais encore et surtout à son âme. Car de même que l'homme devint, par le péché, l'esclave de satan, de même il assujettît à satan, par sa chute, tout ce que Dieu avait placé dans le monde pour son usage , et comme le fruit défendu du Paradis , tout ce que la nature renfermait devint, pour le démon , un moyen de séduire l'homme au mal ; tout devint pour ses sens pervertis et sa concupiscence une occasion du péché : le vin , l'occasion de l'intempérance ; l'or , celle de l'avarice, du vol, du meurtre; la beauté corporelle, celle de la volupté, etc. Or, pour montrer que le christianisme peut et veut tout changer, en transformant toutes choses en moyens de salut, et que la prière de l'Église éloigne effectivement des objets ce qu'ils contiennent de nuisible pour le corps ou pour l'âme, nous les bénissons, avant de nous en servir, c'est-à-dire, que nous prions sur ces objets en les munissant du signe de la croix. Voilà pourquoi saint Paul assure que tout ce qui est créé soupire après la Rédemption , (Romains 8. 19.) et ailleurs : « Tout ce que Dieu a créé est bon parce que tout est sanctifié par la parole de Dieu et la prière. » (1 Timothée 4, 4, 5.). Voilà pourquoi encore nous prions Dieu, avant notre repas, de bénir les choses que nous allons manger ou boire, afin qu'elles nous soient profitables.
Encens et Nimbe
L'usage de brûler de l'encens devant les reliques est d'abord un emblème par lequel sont signifiées les vertus par lesquelles les saints se signalèrent pendant leur vie, elles sont ensuite une manière d'exprimer les mérites par lesquels ils se sont enrichis devant Dieu. L'encens signifie encore nos prières qui , réunies aux suffrages des bienheureux , s'élèvent jusqu'au trône du Très-Haut. En allumant les cierges devant les images , nous voulons dire que nous aimons et que nous vénérons les saints, qui sont les amis de Dieu et nos frères en Jésus-Christ avec lesquels nous espérons être réunis un jour dans la béatitude céleste. Ces lumières sont de plus le symbole de cette même béatitude et de cette clarté de la vision béatifique de Dieu dont jouissent ses élus. Jésus-Christ lui-même apparut sur le Thabor brillant de clarté pour rappeler aux Apôtres l'éclat de sa gloire , et saint Jean nous dit que les élus lui seront semblables : « Nous savons , dit-il , que nous lui ressemblerons , lorsqu'il apparaîtra. » (1. Jean. 3,2).
C'est aussi la raison pour laquelle nous avons coutume d'entourer de rayons tantôt le corps (gloires) , tantôt seulement la tête des saints (nimbes, auréoles , couronnes) lorsque nous, les représentons par la peinture. Comment , en effet , pourrions-nous exprimer plus convenablement la compagnie bienheureuse des anges et des élus dont jouissent les saints qu'en allumant des cierges devant leurs images, usage par lequel nous réalisons ces paroles du psalmiste : « Seigneur, vous êtes la source de la vie et nous verrons la lumière dans votre splendeur » (Psaume 35. 9.). Les trônes sur lesquels on place leurs images, les couronnes et les palmes dont on orne leur tête et leurs mains n'ont d'autre but que d'exprimer qu'ils règnent avec Jésus-Christ , le roi éternel dans le royaume des cieux. Le Seigneur les illuminera et ils régneront pendant toute l'éternité (2. Tim. 4. 8). Et saint Jean , parlant d'une manière figurée, dit des saints martyrs qu'ils se tiennent debout devant le trône de l'agneau portant des palmes en leurs mains (Apocalypse 7. 9.). — tout cela doit être pour nous un encouragement à imiter les vertus dont les saints nous ont donné l'exemple, afin que nous puissions leur devenir semblables dans la gloire éternelle, après l'avoir été sur la terre, et devenir participants de cette gloire véritable que nous ne pouvons rappeler ici-bas qu'au moyen de pâles emblèmes.
Nimbe au-dessus de la tête du saint
(1) Les couronnes des saints (nimbes , auréoles , gloires) sont ordinairement rondes, celles du Christ ont la forme d'une croix, celles des personnages encore vivants sont carrées. Le nimbe triangulaire (tel qu'on le représente souvent renfermant l`oeil de la Providence) ne convient qu'à Dieu et il exprime les trois personnes de la sainte Trinité.
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Re: BEAUTÉS DE L'ÉGLISE CATHOLIQUE: SON CULTE, SES MOEURS ET SES USAGES; SUR LES FÊTES CHRÉTIENNES - Allemagne - 1857
LA TOUSSAINT. 1 er novembre — LA COMMÉMORATION DES TRÉPASSÉS - 2 novembre
Résumé : La Toussaint. Signification de cette fête. Son origine remarquable. Le jour des morts. Doctrine catholique sur le purgatoire.
Le curé débuta ainsi :
Vous aviez raison, Simon , en nous disant hier que la fête de la Toussaint nous transporte en esprit dans le ciel qui est le séjour des bienheureux. Telle fut sans doute aussi l'intention de l'Église en instituant cette fête : elle a voulu nous exhorter à oublier entièrement, au moins un jour de l'année, ce qui est de la terre pour rendre en quelque sorte une visite à nos frères et sœurs qui sont dans la gloire. Ainsi que je vous l'ai dit déjà , il ne faut pas se figurer que tous les saints qui se trouvent au ciel soient inscrits dans le calendrier; le jour de la Toussaint nous fournit par conséquent l'occasion de témoigner notre vénération envers tous ceux dont les noms nous sont même inconnus et qui n'ont pas moins combattu le combat du Seigneur , pour obtenir la couronne de la bienheureuse immortalité, que ceux que nous connaissons et qui jouissent avec eux de la vision béatifique. II irait bien mal, en effet , si un certain nombre, nous espérons même le plus grand nombre de nos parents , de nos aïeux défunts ne se trouvaient pas dans le paradis : considérée sous ce point de vue , la solennité de la Toussaint est une belle fête de famille. Nous rendons donc en ce jour une visite à nos proches qui habitent les cieux , et notre coeur surabonde de joie à la pensée que ceux qui ont peut-être porté sous nos yeux le poids de la vie, espérant en Dieu et souffrant pour son amour, ont travaillé par-là à leur propre bonheur éternel.
Aujourd'hui ils sont dans la joie et se reposent des fatigues de la vie. Il est naturel de se demander en ce jour si on aura encore l'occasion de célébrer cette fête parmi les vivants , quand le cours de l'an l'aura ramenée de nouveau, ou bien si, après avoir passé cette année dans l'innocence et l'observance fidèle de nos devoirs , nous célébrerons les louanges du Très-Haut , réunis aux saints dans le séjour éternel des bienheureux. Plus qu'aucune autre fête de l'année , ce grand jour nous dit : les saints ont été hommes comme nous, ils ont été des hommes pécheurs régénérés par le baptême; ils ont appartenu en partie à notre état, à notre condition , à notre âge , à notre sexe ; ils ont vécu parmi les mêmes dangers , souvent même plus grands que ceux que nous courons ; eux aussi avaient à triompher de leurs mauvaises inclinations , de leurs passions, et plusieurs ont dû employer sans doute de plus grands efforts que nous pour les surmonter ; les mêmes obstacles et souvent de plus grands s'opposaient au bien qu'ils voulaient faire ; ils coopérèrent avec la même grâce qui nous est offerte peut-être plus abondamment qu'à eux : ils ont remporté la victoire et acquis par leur persévérance la couronne d'une félicité sans fin. Nous pourrions oublier ces vérités, s'il ne s'agissait que des saints de pays étrangers et de nations lointaines, ou ayant vécu longtemps avant nous ; mais la pensée de nos propres parents qui sont morts dans la grâce de Dieu , est bien propre à les raviver en nous. Or, comme tant de bienheureux nous touchent de si près par leur condition , leur âge , leur sexe , leur origine et même par les liens du sang, que nous pouvons espérer avec la confiance la plus fondée qu'ils appuieront de leurs suffrages nos propres supplications. Car , si même la mort a privé de l'amour terrestre et charnel nos parents qui sont aujourd'hui dans le ciel , il est bien certain cependant que le père n'est pas devenu pour cela indifférent envers son fils, la mère envers sa fille, l'époux envers l'épouse , l'ami envers son ami , et que ces âmes glorifiées aiment d'un amour bien plus ardent et plus pur à la fois et prennent, par leur intercession, un soin tout particulier du bien-être corporel et spirituel de ceux auxquels ils portaient un si grand intérêt de leur vivant.
Simon. Ces pensées, auxquelles donne lieu la fête de la Toussaint, sont bien consolantes, bien édifiantes.
Le Curé. Et plus loin nous nous abandonnons à ces pieuses réflexions, mieux aussi nous fêtons ce grand jour. Intéressante est surtout la manière dont cette fête s'introduisit dans le monde catholique. Il y avait à Rome un temple d'idoles appelé le Panthéon qui était dédié à tous les faux dieux. Il réunissait donc en quelque sorte entre ses murs toutes les abominations et toutes les superstitions. Or , lorsque le paganisme eut disparu, les chrétiens prirent possession de ce temple, pour le transformer en un sanctuaire dédié au vrai Dieu; le pape Boniface IV le consacra à l'honneur et à la mémoire de la très-sainte Vierge et de tous les saints et y fit transporter vingt-huit chars de saintes reliques qu'on avait déterrées dans les alentours de Rome. Comme les saints serviteurs de Dieu y étaient vénérés collectivement, le pape Grégoire IV ordonna, en 834, que toute la chrétienté célébrerait le 1er novembre une fête commune en l'honneur de tous les saints.
Venons-en maintenant à la sublime et touchante fête qui suit immédiatement la Toussaint; je veux dire le jour des âmes ou des trépassés. En nous transportant en esprit parmi les bienheureux, nous n'y retrouvons pas tous ceux qui ont vécu pour Dieu et qui se sont acquis la vie éternelle; un grand nombre d'entre eux n'ont pas été trouvés assez purs, ni assez saints pour jouir de suite de la vision de Dieu , qui est la pureté et la sainteté même; ils doivent donc encore séjourner dans le purgatoire , afin d'y être purifiés (car purgatoire signifie lieu de purification) et d'acquérir par les souffrances cette perfection qu'ils avaient négligé de s'approprier par leurs efforts, lorsqu'ils vivaient encore sur la terre. Dans ce lieu de douleur ils ne peuvent plus mériter pour eux-mêmes : après le saint sacrifice de la messe , le seul moyen qui puisse alléger leurs souffrances est la prière des fidèles, soit qu'ils se trouvent dans le ciel, soit qu'ils habitent encore la terre ; ils conjurent leur père commun de modérer les tourments de ces pauvres âmes en le suppliant de les recevoir dans le ciel après les avoir purifiées de leurs dernières souillures. La prière pour les morts est un devoir sacré dont l'accomplissement doit nous être bien cher !
Car nous retrouvons encore dans le purgatoire nos propres parents, nos amis, nos connaissances. Là se trouvent particulièrement, et peut-être pour la majeure partie, ceux qui ont vécu au milieu de nous, qui sont morts sous nos yeux , dont nous avons accompagné le convoi funèbre. Car il est bien petit , mes chers amis , le nombre de ces hommes qui , quittant cette terre, ont acquis une sainteté si accomplie qu'il ne leur reste plus de pénitence à faire avant d'entrer dans le séjour des bienheureux. Dans le purgatoire se trouvent donc ceux avec lesquels nous avons été en rapport pendant leur vie et qui doivent peut-être même souffrir pour des fautes dont nous avons été l'occasion ! Ce sont peut-être nos père et mère , nos proches parents , nos amis que nous avons le plus aimés durant leur vie , ceux auxquels nous n'eussions pas voulu refuser le moindre service.
Hé bien, il est encore en notre pouvoir de leur venir en aide et d'une manière beaucoup plus efficace que pendant leur vie; nous pouvons mieux encore leur témoigner notre amour, leur rendre un service plus important en priant pour eux. Peut-être dans un an, peut-être dans un jour, peut-être dans une semaine, demain ou aujourd'hui serons nous nous-mêmes dans la même position, réclamant ce service de la part de ceux qui nous auront aimés. D'ailleurs les pauvres âmes ne seront pas ingrates après que nous leur aurons rendu ce service si facile de notre part; bien certainement elles se souviendront de nous et nous récompenseront amplement de nos prières en intercédant à leur tour en notre faveur, non pas seulement lorsqu'elles jouiront du bonheur sans fin et que nous serons peut-être nous-mêmes dans la peine , mais déjà dès maintenant. Car , étant morts dans la grâce de Dieu , ces saints peuvent prier et mériter pour autrui , quoiqu'ils ne soient pas en état de mériter pour eux-mêmes. Telles sont les vérités que nous enseigne la fête de la commémoration des morts, solennité que l'Église a établie depuis plusieurs siècles pour nous les rappeler bien vivement.
LA COMMÉMORATION DES TRÉPASSÉS - 2 novembre
La circonstance que la fête des Trépassés suit immédiatement celle de la Toussaint, est très-propre à rendre ce jour très-fructueux pour les morts ; car, plus nous avons considéré le jour précédent la gloire et la félicité de l'Église triomphante, plus aussi les douleurs de l'Église souffrante nous touchent , attendu qu'il est un si grand nombre de fidèles trépassés qui sont encore privés de ce bonheur ; plus aussi nous prenons à coeur de leur procurer cette félicité en priant , offrant nos bonnes oeuvres , assistant à la messe, nous approchant des sacrements pour alléger leur peine et leur procurer le bonheur vers lequel elles soupirent depuis longtemps. « C'est une sainte et salutaire pensée, » est-il dit au 2e livre des Machabées (12. 46.), «de prier pour les morts, afin qu'ils soient délivrés de leurs péchés, »
Le Curé. On a prié pour les trépassés dès les temps les plus reculés du christianisme . En effet, il était d'usage chez les premiers chrétiens d'envoyer d'une église à l'autre, d'une communauté à l'autre, les noms des défunts, en demandant de recommander ces fidèles à Dieu dans les prières. On fit imprimer plus tard ces noms avec l'invitation à la prière : de cette coutume sont venus les mortuaires ou souvenirs pieux qu'on distribue encore dans un grand nombre d'églises aux messes d'enterrement et aux obsèques ou qu'on envoie aux absents. Saint Jean- Chrysostôme nous rapporte que, pendant la messe, le diacre disait à haute voix : « Prions pour nos frères qui sont morts en Jésus-Christ ! » Et saint Augustin dit : «Il n'y a pas de doute que les prières de la sainte Église, le sacrifice salutaire et l'aumône offerts pour les Trépassés , ne soient profitables à leur âme et que Dieu n'en prenne occasion d'user à leur égard de plus de miséricorde qu'ils ne l'ont mérité par leurs péchés. » Suivons la doctrine et le conseil du saint évêque d'Hippone , prions avec ferveur pour nos pauvres frères en Jésus-Christ qui sont dans la souffrance. De la sorte nous assisterons de saintes âmes qui ne peuvent s'aider elles-mêmes, à sortir des prisons dans lesquelles elles sont renfermées et nous augmenterons la gloire et les louanges de Dieu en rendant ces frères citoyens du ciel, où ils réuniront leur voix au concert des bienheureux qui célèbrent les louanges de l'Éternel.
Simon. Nous ne nous contentons pas de prier pour les Trépassés le jour des âmes, nous le faisons encore pendant toute l'année.
Le Curé. Vous avez raison : et nous le faisons parce que l'Église catholique regarde la prière pour les morts comme un pieux devoir qu'elle a hérité des apôtres. Le jour des morts est en effet spécialement consacré au souvenir des âmes du purgatoire ; cependant nous ne nous contenions pas de ne prier qu'une fois l'année pour nos frères , mais nous le faisons tous les jours, conformément à l'antique tradition chrétienne. Le prêtre à l'autel ne manque jamais de recommander à la miséricorde divine les âmes du Purgatoire : il le fait surtout pendant la messe, même aux plus grands jours de fête, et il demande, dans le Memento des morts un peu après l'Élévation, que Dieu daigne les recevoir dans le lieu de rafraîchissement , de lumière et de paix éternelle. Que de fois encore le saint sacrifice est offert pendant l'année pour les défunts, aux obsèques, anniversaires, etc
Fin
Résumé : La Toussaint. Signification de cette fête. Son origine remarquable. Le jour des morts. Doctrine catholique sur le purgatoire.
Le curé débuta ainsi :
Vous aviez raison, Simon , en nous disant hier que la fête de la Toussaint nous transporte en esprit dans le ciel qui est le séjour des bienheureux. Telle fut sans doute aussi l'intention de l'Église en instituant cette fête : elle a voulu nous exhorter à oublier entièrement, au moins un jour de l'année, ce qui est de la terre pour rendre en quelque sorte une visite à nos frères et sœurs qui sont dans la gloire. Ainsi que je vous l'ai dit déjà , il ne faut pas se figurer que tous les saints qui se trouvent au ciel soient inscrits dans le calendrier; le jour de la Toussaint nous fournit par conséquent l'occasion de témoigner notre vénération envers tous ceux dont les noms nous sont même inconnus et qui n'ont pas moins combattu le combat du Seigneur , pour obtenir la couronne de la bienheureuse immortalité, que ceux que nous connaissons et qui jouissent avec eux de la vision béatifique. II irait bien mal, en effet , si un certain nombre, nous espérons même le plus grand nombre de nos parents , de nos aïeux défunts ne se trouvaient pas dans le paradis : considérée sous ce point de vue , la solennité de la Toussaint est une belle fête de famille. Nous rendons donc en ce jour une visite à nos proches qui habitent les cieux , et notre coeur surabonde de joie à la pensée que ceux qui ont peut-être porté sous nos yeux le poids de la vie, espérant en Dieu et souffrant pour son amour, ont travaillé par-là à leur propre bonheur éternel.
Aujourd'hui ils sont dans la joie et se reposent des fatigues de la vie. Il est naturel de se demander en ce jour si on aura encore l'occasion de célébrer cette fête parmi les vivants , quand le cours de l'an l'aura ramenée de nouveau, ou bien si, après avoir passé cette année dans l'innocence et l'observance fidèle de nos devoirs , nous célébrerons les louanges du Très-Haut , réunis aux saints dans le séjour éternel des bienheureux. Plus qu'aucune autre fête de l'année , ce grand jour nous dit : les saints ont été hommes comme nous, ils ont été des hommes pécheurs régénérés par le baptême; ils ont appartenu en partie à notre état, à notre condition , à notre âge , à notre sexe ; ils ont vécu parmi les mêmes dangers , souvent même plus grands que ceux que nous courons ; eux aussi avaient à triompher de leurs mauvaises inclinations , de leurs passions, et plusieurs ont dû employer sans doute de plus grands efforts que nous pour les surmonter ; les mêmes obstacles et souvent de plus grands s'opposaient au bien qu'ils voulaient faire ; ils coopérèrent avec la même grâce qui nous est offerte peut-être plus abondamment qu'à eux : ils ont remporté la victoire et acquis par leur persévérance la couronne d'une félicité sans fin. Nous pourrions oublier ces vérités, s'il ne s'agissait que des saints de pays étrangers et de nations lointaines, ou ayant vécu longtemps avant nous ; mais la pensée de nos propres parents qui sont morts dans la grâce de Dieu , est bien propre à les raviver en nous. Or, comme tant de bienheureux nous touchent de si près par leur condition , leur âge , leur sexe , leur origine et même par les liens du sang, que nous pouvons espérer avec la confiance la plus fondée qu'ils appuieront de leurs suffrages nos propres supplications. Car , si même la mort a privé de l'amour terrestre et charnel nos parents qui sont aujourd'hui dans le ciel , il est bien certain cependant que le père n'est pas devenu pour cela indifférent envers son fils, la mère envers sa fille, l'époux envers l'épouse , l'ami envers son ami , et que ces âmes glorifiées aiment d'un amour bien plus ardent et plus pur à la fois et prennent, par leur intercession, un soin tout particulier du bien-être corporel et spirituel de ceux auxquels ils portaient un si grand intérêt de leur vivant.
Simon. Ces pensées, auxquelles donne lieu la fête de la Toussaint, sont bien consolantes, bien édifiantes.
Le Curé. Et plus loin nous nous abandonnons à ces pieuses réflexions, mieux aussi nous fêtons ce grand jour. Intéressante est surtout la manière dont cette fête s'introduisit dans le monde catholique. Il y avait à Rome un temple d'idoles appelé le Panthéon qui était dédié à tous les faux dieux. Il réunissait donc en quelque sorte entre ses murs toutes les abominations et toutes les superstitions. Or , lorsque le paganisme eut disparu, les chrétiens prirent possession de ce temple, pour le transformer en un sanctuaire dédié au vrai Dieu; le pape Boniface IV le consacra à l'honneur et à la mémoire de la très-sainte Vierge et de tous les saints et y fit transporter vingt-huit chars de saintes reliques qu'on avait déterrées dans les alentours de Rome. Comme les saints serviteurs de Dieu y étaient vénérés collectivement, le pape Grégoire IV ordonna, en 834, que toute la chrétienté célébrerait le 1er novembre une fête commune en l'honneur de tous les saints.
Venons-en maintenant à la sublime et touchante fête qui suit immédiatement la Toussaint; je veux dire le jour des âmes ou des trépassés. En nous transportant en esprit parmi les bienheureux, nous n'y retrouvons pas tous ceux qui ont vécu pour Dieu et qui se sont acquis la vie éternelle; un grand nombre d'entre eux n'ont pas été trouvés assez purs, ni assez saints pour jouir de suite de la vision de Dieu , qui est la pureté et la sainteté même; ils doivent donc encore séjourner dans le purgatoire , afin d'y être purifiés (car purgatoire signifie lieu de purification) et d'acquérir par les souffrances cette perfection qu'ils avaient négligé de s'approprier par leurs efforts, lorsqu'ils vivaient encore sur la terre. Dans ce lieu de douleur ils ne peuvent plus mériter pour eux-mêmes : après le saint sacrifice de la messe , le seul moyen qui puisse alléger leurs souffrances est la prière des fidèles, soit qu'ils se trouvent dans le ciel, soit qu'ils habitent encore la terre ; ils conjurent leur père commun de modérer les tourments de ces pauvres âmes en le suppliant de les recevoir dans le ciel après les avoir purifiées de leurs dernières souillures. La prière pour les morts est un devoir sacré dont l'accomplissement doit nous être bien cher !
Car nous retrouvons encore dans le purgatoire nos propres parents, nos amis, nos connaissances. Là se trouvent particulièrement, et peut-être pour la majeure partie, ceux qui ont vécu au milieu de nous, qui sont morts sous nos yeux , dont nous avons accompagné le convoi funèbre. Car il est bien petit , mes chers amis , le nombre de ces hommes qui , quittant cette terre, ont acquis une sainteté si accomplie qu'il ne leur reste plus de pénitence à faire avant d'entrer dans le séjour des bienheureux. Dans le purgatoire se trouvent donc ceux avec lesquels nous avons été en rapport pendant leur vie et qui doivent peut-être même souffrir pour des fautes dont nous avons été l'occasion ! Ce sont peut-être nos père et mère , nos proches parents , nos amis que nous avons le plus aimés durant leur vie , ceux auxquels nous n'eussions pas voulu refuser le moindre service.
Hé bien, il est encore en notre pouvoir de leur venir en aide et d'une manière beaucoup plus efficace que pendant leur vie; nous pouvons mieux encore leur témoigner notre amour, leur rendre un service plus important en priant pour eux. Peut-être dans un an, peut-être dans un jour, peut-être dans une semaine, demain ou aujourd'hui serons nous nous-mêmes dans la même position, réclamant ce service de la part de ceux qui nous auront aimés. D'ailleurs les pauvres âmes ne seront pas ingrates après que nous leur aurons rendu ce service si facile de notre part; bien certainement elles se souviendront de nous et nous récompenseront amplement de nos prières en intercédant à leur tour en notre faveur, non pas seulement lorsqu'elles jouiront du bonheur sans fin et que nous serons peut-être nous-mêmes dans la peine , mais déjà dès maintenant. Car , étant morts dans la grâce de Dieu , ces saints peuvent prier et mériter pour autrui , quoiqu'ils ne soient pas en état de mériter pour eux-mêmes. Telles sont les vérités que nous enseigne la fête de la commémoration des morts, solennité que l'Église a établie depuis plusieurs siècles pour nous les rappeler bien vivement.
LA COMMÉMORATION DES TRÉPASSÉS - 2 novembre
La circonstance que la fête des Trépassés suit immédiatement celle de la Toussaint, est très-propre à rendre ce jour très-fructueux pour les morts ; car, plus nous avons considéré le jour précédent la gloire et la félicité de l'Église triomphante, plus aussi les douleurs de l'Église souffrante nous touchent , attendu qu'il est un si grand nombre de fidèles trépassés qui sont encore privés de ce bonheur ; plus aussi nous prenons à coeur de leur procurer cette félicité en priant , offrant nos bonnes oeuvres , assistant à la messe, nous approchant des sacrements pour alléger leur peine et leur procurer le bonheur vers lequel elles soupirent depuis longtemps. « C'est une sainte et salutaire pensée, » est-il dit au 2e livre des Machabées (12. 46.), «de prier pour les morts, afin qu'ils soient délivrés de leurs péchés, »
Le Curé. On a prié pour les trépassés dès les temps les plus reculés du christianisme . En effet, il était d'usage chez les premiers chrétiens d'envoyer d'une église à l'autre, d'une communauté à l'autre, les noms des défunts, en demandant de recommander ces fidèles à Dieu dans les prières. On fit imprimer plus tard ces noms avec l'invitation à la prière : de cette coutume sont venus les mortuaires ou souvenirs pieux qu'on distribue encore dans un grand nombre d'églises aux messes d'enterrement et aux obsèques ou qu'on envoie aux absents. Saint Jean- Chrysostôme nous rapporte que, pendant la messe, le diacre disait à haute voix : « Prions pour nos frères qui sont morts en Jésus-Christ ! » Et saint Augustin dit : «Il n'y a pas de doute que les prières de la sainte Église, le sacrifice salutaire et l'aumône offerts pour les Trépassés , ne soient profitables à leur âme et que Dieu n'en prenne occasion d'user à leur égard de plus de miséricorde qu'ils ne l'ont mérité par leurs péchés. » Suivons la doctrine et le conseil du saint évêque d'Hippone , prions avec ferveur pour nos pauvres frères en Jésus-Christ qui sont dans la souffrance. De la sorte nous assisterons de saintes âmes qui ne peuvent s'aider elles-mêmes, à sortir des prisons dans lesquelles elles sont renfermées et nous augmenterons la gloire et les louanges de Dieu en rendant ces frères citoyens du ciel, où ils réuniront leur voix au concert des bienheureux qui célèbrent les louanges de l'Éternel.
Simon. Nous ne nous contentons pas de prier pour les Trépassés le jour des âmes, nous le faisons encore pendant toute l'année.
Le Curé. Vous avez raison : et nous le faisons parce que l'Église catholique regarde la prière pour les morts comme un pieux devoir qu'elle a hérité des apôtres. Le jour des morts est en effet spécialement consacré au souvenir des âmes du purgatoire ; cependant nous ne nous contenions pas de ne prier qu'une fois l'année pour nos frères , mais nous le faisons tous les jours, conformément à l'antique tradition chrétienne. Le prêtre à l'autel ne manque jamais de recommander à la miséricorde divine les âmes du Purgatoire : il le fait surtout pendant la messe, même aux plus grands jours de fête, et il demande, dans le Memento des morts un peu après l'Élévation, que Dieu daigne les recevoir dans le lieu de rafraîchissement , de lumière et de paix éternelle. Que de fois encore le saint sacrifice est offert pendant l'année pour les défunts, aux obsèques, anniversaires, etc
Fin
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
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