...et ça continue...
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...et ça continue...
Après les chrétiens, les yézidis d’Irak massacrés par les djihadistes
Pierre Haski | Cofondateur Rue89
« Notre religion est en train d’être effacée de la surface de la Terre. » Depuis dimanche, et la prise au Nord de Sinjar, principale ville de cette minorité persécutée, les yézidis fuient vers le rempart kurde.
Ça s’est passé cette semaine au Parlement de Bagdad : une élue interpelle ses collègues sur le sort de la minorité yézidie en train d’être attaquée et massacrée par les djihadistes de l’Etat islamique dans le nord de l’Irak. L’émotion est forte, la députée est au bord des larmes, ses collègues restent silencieux, regardent le sol.
La jeune femme non voilée, Vian Dakhil, s’exclame alors :
« Nous sommes massacrés au nom de la doctrine “La ilaha illallah [il n’y a de Dieu qu’Allah, ndlr]”. »
« Je vous en supplie, au nom de l’humanité »
Tumulte sur les bancs musulmans de l’Assemblée de Bagdad, mais personne n’ose interrompre la sortie émotionnelle de la représentante des yézidis, interpellant le pouvoir irakien sur la tragédie humaine et politique que vit à son tour cette minorité.
« Nous sommes en train d’être massacrés. Notre religion est en train d’être effacée de la surface de la Terre, je vous en supplie, au nom de l’humanité. »
Elle termine son discours sous les applaudissements.
Les yézidis ? Vous n’en avez sans doute jamais entendu parler, mais c’est pourtant une minorité moyen-orientale dont les origines sont parmi les plus anciennes. Le calendrier yézidi nous place en l’an 6764, là où les juifs se situent en 5774, les chrétiens en 2014, et les musulmans en 1435...
300 000 yézidis dans le nord de l’Irak
Les yézidis sont rattachés aux Kurdes, notamment par la langue ; ils sont non-musulmans, adeptes d’une religion monothéiste qui tire ses racines de l’Iran ancien mais a incorporé des éléments d’autres cultes, notamment le baptême chrétien et des rites de l’islam soufi. Ils seraient de l’ordre de 300 000 dans le nord de l’Irak, avec d’autres minorités dispersées dans la région, jusque dans les ex-républiques soviétiques du Caucase.
Leur ennemi, aujourd’hui, ce sont les djihadistes de l’Etat islamique (EI, ex-Etat islamique en Irak et au Levant), qui sont passés à l’offensive en juin dernier, capturant Mossoul après avoir mis en déroute une armée irakienne qui n’a même pas combattu.
Les combattants de l’EI sont des djihadistes sunnites, alliés à d’anciens éléments de l’armée baassiste de Saddam Hussein, qui avancent, drapeau noir au vent, pour imposer leur foi et combattre les « hérétiques ». Tous les hérétiques : l’ennemi héréditaire chiite au pouvoir à Bagdad, bien sûr, mais aussi les chrétiens chassés de Mossoul, et les autres minorités religieuses au nombre desquels les yézidis.
Exécutions et exode
Dimanche dernier, les djihadistes se sont emparés de la principale ville de la communauté, Sinjar, près de la frontière syrienne, pourtant défendue par des guerriers kurdes, apparemment moins bien armés que les assaillants. Selon des témoignages, 30 personnes auraient été exécutées dans cette ville par l’EI pour avoir refusé de se convertir à l’islam.
Face à l’avancée des djihadistes, les populations yézidies s’enfuient. Selon les humanitaires des Nations unies, plusieurs dizaines de milliers de personnes seraient actuellement réfugiées dans les montagnes désertiques de Sinjar, privées d’eau et de ravitaillement. Des dizaines d’enfants auraient déjà trouvé la mort par déshydratation.
Les rares photos de cet exode ont des allures bibliques, avec des hommes, des femmes et des enfants avançant en ordre dispersé dans un paysage aride, sans un arbre.
Le rempart kurde
Persécutés avant et sous Saddam Hussein, victimes collatérales de la guerre civile consécutive à l’invasion américaine de 2003 (un blog du Monde rappelle qu’en 2007, ils avaient été victimes du pire attentat jamais commis sur le sol irakien : quatre camions suicides avaient tué plusieurs centaines de personnes et fait d’innombrables blessés), les yézidis sont aujourd’hui l’une des cibles de l’avancée du djihadisme sunnite.
Ils se tournent vers les Kurdes, auxquels ils sont apparentés, les seuls dans l’Irak d’aujourd’hui, à pouvoir assurer un rempart face à l’avancée des djihadistes bien armés et déterminés. Des milliers de yézédis se sont ainsi dirigés vers la zone autonome kurde du nord de l’Irak, protégée par les combattants peshmerga.
Les Kurdes se mobilisent pour faire face à l’avancée de l’EI, mobilisant les peshmerga et recevant même des renforts de Kurdes venus des autres pays de la région, Syrie et Turquie, et d’autres factions que celle qui contrôle le Kurdistan irakien. C’est la mobilisation générale pour un affrontement qui prend des allures de bataille décisive pour l’avenir de cette partie du Moyen-Orient et bien au-delà.
Un des enjeux stratégiques est le contrôle du barrage de Mossoul (ex-barrage Saddam...), toujours aux mains des Kurdes mais dont les djihadistes souhaitent s’emparer, leur donnant un contrôle déterminant sur le nord du pays.
Autour du sort des minorités persécutées, dans l’affrontement décisif entre Kurdes et djihadistes, mais aussi dans la crise politique qui secoue le pouvoir chiite de Bagdad, c’est une partie de l’avenir du Moyen-Orient qui se joue.
Pierre Haski | Cofondateur Rue89
« Notre religion est en train d’être effacée de la surface de la Terre. » Depuis dimanche, et la prise au Nord de Sinjar, principale ville de cette minorité persécutée, les yézidis fuient vers le rempart kurde.
Ça s’est passé cette semaine au Parlement de Bagdad : une élue interpelle ses collègues sur le sort de la minorité yézidie en train d’être attaquée et massacrée par les djihadistes de l’Etat islamique dans le nord de l’Irak. L’émotion est forte, la députée est au bord des larmes, ses collègues restent silencieux, regardent le sol.
La jeune femme non voilée, Vian Dakhil, s’exclame alors :
« Nous sommes massacrés au nom de la doctrine “La ilaha illallah [il n’y a de Dieu qu’Allah, ndlr]”. »
« Je vous en supplie, au nom de l’humanité »
Tumulte sur les bancs musulmans de l’Assemblée de Bagdad, mais personne n’ose interrompre la sortie émotionnelle de la représentante des yézidis, interpellant le pouvoir irakien sur la tragédie humaine et politique que vit à son tour cette minorité.
« Nous sommes en train d’être massacrés. Notre religion est en train d’être effacée de la surface de la Terre, je vous en supplie, au nom de l’humanité. »
Elle termine son discours sous les applaudissements.
Les yézidis ? Vous n’en avez sans doute jamais entendu parler, mais c’est pourtant une minorité moyen-orientale dont les origines sont parmi les plus anciennes. Le calendrier yézidi nous place en l’an 6764, là où les juifs se situent en 5774, les chrétiens en 2014, et les musulmans en 1435...
300 000 yézidis dans le nord de l’Irak
Les yézidis sont rattachés aux Kurdes, notamment par la langue ; ils sont non-musulmans, adeptes d’une religion monothéiste qui tire ses racines de l’Iran ancien mais a incorporé des éléments d’autres cultes, notamment le baptême chrétien et des rites de l’islam soufi. Ils seraient de l’ordre de 300 000 dans le nord de l’Irak, avec d’autres minorités dispersées dans la région, jusque dans les ex-républiques soviétiques du Caucase.
Leur ennemi, aujourd’hui, ce sont les djihadistes de l’Etat islamique (EI, ex-Etat islamique en Irak et au Levant), qui sont passés à l’offensive en juin dernier, capturant Mossoul après avoir mis en déroute une armée irakienne qui n’a même pas combattu.
Les combattants de l’EI sont des djihadistes sunnites, alliés à d’anciens éléments de l’armée baassiste de Saddam Hussein, qui avancent, drapeau noir au vent, pour imposer leur foi et combattre les « hérétiques ». Tous les hérétiques : l’ennemi héréditaire chiite au pouvoir à Bagdad, bien sûr, mais aussi les chrétiens chassés de Mossoul, et les autres minorités religieuses au nombre desquels les yézidis.
Exécutions et exode
Dimanche dernier, les djihadistes se sont emparés de la principale ville de la communauté, Sinjar, près de la frontière syrienne, pourtant défendue par des guerriers kurdes, apparemment moins bien armés que les assaillants. Selon des témoignages, 30 personnes auraient été exécutées dans cette ville par l’EI pour avoir refusé de se convertir à l’islam.
Face à l’avancée des djihadistes, les populations yézidies s’enfuient. Selon les humanitaires des Nations unies, plusieurs dizaines de milliers de personnes seraient actuellement réfugiées dans les montagnes désertiques de Sinjar, privées d’eau et de ravitaillement. Des dizaines d’enfants auraient déjà trouvé la mort par déshydratation.
Les rares photos de cet exode ont des allures bibliques, avec des hommes, des femmes et des enfants avançant en ordre dispersé dans un paysage aride, sans un arbre.
Le rempart kurde
Persécutés avant et sous Saddam Hussein, victimes collatérales de la guerre civile consécutive à l’invasion américaine de 2003 (un blog du Monde rappelle qu’en 2007, ils avaient été victimes du pire attentat jamais commis sur le sol irakien : quatre camions suicides avaient tué plusieurs centaines de personnes et fait d’innombrables blessés), les yézidis sont aujourd’hui l’une des cibles de l’avancée du djihadisme sunnite.
Ils se tournent vers les Kurdes, auxquels ils sont apparentés, les seuls dans l’Irak d’aujourd’hui, à pouvoir assurer un rempart face à l’avancée des djihadistes bien armés et déterminés. Des milliers de yézédis se sont ainsi dirigés vers la zone autonome kurde du nord de l’Irak, protégée par les combattants peshmerga.
Les Kurdes se mobilisent pour faire face à l’avancée de l’EI, mobilisant les peshmerga et recevant même des renforts de Kurdes venus des autres pays de la région, Syrie et Turquie, et d’autres factions que celle qui contrôle le Kurdistan irakien. C’est la mobilisation générale pour un affrontement qui prend des allures de bataille décisive pour l’avenir de cette partie du Moyen-Orient et bien au-delà.
Un des enjeux stratégiques est le contrôle du barrage de Mossoul (ex-barrage Saddam...), toujours aux mains des Kurdes mais dont les djihadistes souhaitent s’emparer, leur donnant un contrôle déterminant sur le nord du pays.
Autour du sort des minorités persécutées, dans l’affrontement décisif entre Kurdes et djihadistes, mais aussi dans la crise politique qui secoue le pouvoir chiite de Bagdad, c’est une partie de l’avenir du Moyen-Orient qui se joue.
jaimedieu- Date d'inscription : 02/03/2011
Age : 67
Localisation : Montréal, Québec Canada
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