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LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix

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Message par MichelT Mer 3 Mai 2017 - 20:13

LE SIGNE DE LA CROIX

MGR GAUME

PROTONOTAIRE APOSTOLIQUE – année 1863 – Paris ( EXTRAITS)

Source: Le signe de la Croix au 19 eme siècle - Msg Gaume

LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix Croix


AVANT-PROPOS.

Au mois de novembre de cette année 1862 est arrivé à Paris, pour suivre les cours du Collège de France, un jeune Allemand catholique, de grande distinction. Fidèle à l'usage traditionnel de son pays de faire le signe de la croix, avant et après les repas , il est devenu , dès le premier jour, l'étonnement de ses camarades de pension. Le lendemain, en vertu de la liberté des cultes, il était l'objet de leurs moqueries. Dans une de ses visites, il nous a prié de lui dire ce que nous pensions de la pratique dont on essayait de le
faire rougir, et du signe de la croix en général. Les lettres suivantes sont la réponse à ces deux questions


PREMIÈRE LETTRE. - Paris, 25 novembre 1862.

État de la question. — Le monde actuel ne fait plus, où il fait rarement, où il fait mal le signe de la croix. — Les premiers chrétiens le faisaient, ils le faisaient souvent, ils le faisaient bien. — Nous avons raison, et ils avaient tort ; ou nous avons tort , et ils avaient raison : lequel des deux ?

Mon cher Frédéric,

Le monde actuel, ce monde qui se dit encore chrétien, et auquel sans doute appartiennent tes jeunes camarades, offre plus d'un trait de ressemblance avec un navire en danger. Les furieuses tempêtes qui, depuis longtemps, n'ont cessé de battre le vaisseau de l’Église, ont fait des dommages. Par là sont entrées à grands flots des doctrines , des mœurs, des usages, des tendances antichrétiennes. Gare , non pas au navire, qui est impérissable, mais aux passagers, qui ne le sont pas.

LE SIGNE DE LA CROIX

Où est la prière en commun dans les familles?  Les lectures pieuses, la méditation?  La bénédiction de la table? L'assistance habituelle au saint sacrifice, le scapulaire, le chapelet?  La sanctification sérieuse du dimanche par l'assistance aux instructions et aux offices, par la visite des pauvres, des affligés et des malades ? La pratique régulière des sacrements, les lois du jeûne et de l'abstinence?  L'esprit de simplicité dans le vêtement , dans l'ameublement, dans le logement, dans la nourriture? Le crucifix, les images saintes, l'eau bénite dans les appartements ?

L'esprit chrétien diminue ; l'esprit contraire gagne à vue d'œil. On se jette sur des embarcations, je veux dire dans des espèces de religions qu'on se fait suivant son âge, sa position, son tempérament, ses goûts, le milieu dans lequel on vit. Assister à une messe basse le dimanche : et comment? A la grand'messe, trois ou quatre fois l'an ; à vêpres, jamais. Fréquenter les spectacles et les bals; lire tout ce qui se présente; ne se refuser rien, excepté ce qu'on ne peut pas se donner : voilà les frêles esquifs auxquels on confie son salut. Faut-il s'étonner de tant de naufrages ?

Parmi les usages catholiques , si imprudemment abandonnés par le monde actuel, il en est un, respectable entre tous, que je voudrais à tout prix sauver du naufrage. C'est celui que méprisent, sans savoir ce qu'ils font, tes jeunes camarades : J'ai nommé le signe de la croix. Il est temps de pourvoir à sa conservation.

Encore un peu, et il aura le sort de tant d'autres pratiques traditionnelles , que nous devons à la sollicitude maternelle de l'Église et à la piété intelligente des siècles chrétiens.

C'est donc un fait : les chrétiens d'aujourd'hui ne font plus, ou font rarement, ou font mal le signe de la croix. Sur ce point, comme sur beaucoup d'autres, nous sommes aux antipodes de nos aïeux, les chrétiens de la primitive église. Eux faisaient le signe de la croix ; ils le faisaient bien ; ils le faisaient très-souvent. En Orient comme en Occident, à Jérusalem, à Athènes, à Rome, les hommes et les femmes, les jeunes gens et les vieillards, les riches et les pauvres, les prêtres et les simples fidèles, toutes les classes de la société observaient religieusement cet usage traditionnel. L'histoire n'offre pas de fait plus certain. Tous les Pères de l'Église , témoins oculaires, en font foi , tous les historiens le constatent.

Rien ne me serait plus facile que de te citer leurs paroles. Tu les trouveras dans l'ouvrage De Cruce, de ton savant compatriote Gretzer. Au nom de tous écoute seulement Tertullien : « A chaque mouvement et à chaque pas, en entrant et en sortant, en nous habillant, en nous chaussant, en nous baignant, en nous mettant à table, en allumant les flambeaux, en dormant (Les mains croisées sur la poitrine), en nous asseyant, quoi que nous fassions et où que nous allions, nous marquons notre front du signe de la croix . »

Voilà qui est entendu : à chaque instant nos aïeux faisaient, d'une manière ou d'une autre, le signe de la croix. Ils le faisaient non-seulement sur leur front, mais encore sur leurs yeux , sur leurs bouche , sur leur poitrine . Il résulte delà que si les premiers chrétiens reparaissaient sur nos places publiques ou dans nos maisons , et faisaient aujourd'hui ce qu'ils faisaient il y a dix-huit siècles, nous serions tentés de les prendre pour des maniaques. Tant il est vrai, encore un coup, qu'à l'égard du signe de la croix, nous sommes à leurs antipodes. Ils avaient tort, et nous avons raison; ou ils avaient raison, et nous avons tort. C'est l'un ou l'autre : il n'y a pas de milieu. Lequel des deux ?

Telle est la question. Elle est grave, très grave, beaucoup plus grave assurément que ne le pensent tes camarades et ceux qui leur ressemblent. J'espère t'en convaincre dans mes prochaines lettres.

DEUXIÈME LETTRE.

Examen de la question. — Préjugés en faveur des premiers chrétiens. — Premier préjugé : leurs lumières. Second préjugé : leur sainteté. — Troisième préjugé : la pratique des vrais chrétiens dans tous les siècles. — Les Pères de l'Église furent-ils de grands génies ?

Mon cher ami,

Premier préjugé en faveur des premiers chrétiens : leur voisinage des apôtres. Les apôtres avaient conversé avec le Verbe incarné lui-même, la Vérité en personne. Ils l'avaient vu de leurs yeux, et touché de leurs mains. Ils étaient les dépositaires et les organes infaillibles de sa doctrine. Ordre leur avait été donné de l'enseigner tout entière, rien de plus, rien de moins. A leur tour les premiers chrétiens avaient vu les apôtres et les hommes apostoliques. Ils les avaient fréquentés, entendus. De leur bouche ils avaient reçu la foi, de leur main le baptême. A la source même ils avaient bu la vérité.

Cette vérité à laquelle ils devaient tout, ils s'en nourrissaient , ils en faisaient la règle de leurs actions, ils la gardaient avec une fidélité inviolable, persévérantes. Personne évidemment ne fut jamais dans de meilleures conditions pour connaître la pensée des apôtres et de Notre-Seigneur lui-même. Si donc les premiers chrétiens faisaient le signe de la croix à chaque instant, on est bien forcé de conclure qu'ils obéissaient à une recommandation apostolique. Autrement les apôtres et leurs premiers successeurs, gardiens infaillibles du triple dépôt de la foi, des mœurs et de la discipline, se seraient empressés d'interdire un usage inutile, superstitieux et propre à exposer les néophytes aux moqueries du paganisme ignorant. Ainsi, je le répète, en faisant très-souvent le signe de la croix, les chrétiens de la primitive Église agissaient en pleine connaissance de cause. Premier préjugé en faveur de leur conduite.

Second préjugé en faveur des premiers chrétiens : leur sainteté. Non-seulement les premiers chrétiens étaient très-instruits de la doctrine des apôtres; ils étaient de plus très-fidèles à la mettre en pratique. La preuve en est qu'ils étaient très-saints. Qu'une haute sainteté fut le caractère général des premiers chrétiens, rien n'est mieux établi.

1° Ils aimaient mieux tout perdre, les biens et même la vie au milieu des supplices, plutôt que d'offenser Dieu. Leur héroïsme dura autant que les persécutions, trois siècles.

2° Ils étaient très-charitables. Le ciel et la terre se sont réunis pour faire de leur amour mutuel un éloge unique dans les annales du monde. Ils n'étaient qu'un cœur et qu'une âme, a dit Dieu lui-même. Voyez comme ils s'aiment et comme ils sont toujours prêts à mourir les uns pour les autres, s'écriaient les païens!

3° Ils étaient pleins d'une respectueuse tendresse pour les apôtres, auxquels ils obéissaient avec une soumission filiale. Saint Paul, qui ne faisait pas de compliments , écrit aux chrétiens de Rome que leur foi est célèbre dans le monde entier ; et à ceux d'Asie, qu'ils l'aimaient tellement, que s'ils l'avaient pu ils se seraient arraché les yeux pour les lui donner. A sa prière toutes les églises volent au secours des frères de Jérusalem, et Philémon reçoit Onésime.

4° Les Pères de l'Église, témoins oculaires, ont continué de rendre le plus éclatant témoignage à leur sainteté. S'adressant aux juges, aux préteurs, aux proconsuls de l'Empire, Tertullien leur jetait ce défi solennel : « J'en appelle à vos procédures , magistrats chargés de rendre la justice. Parmi cette multitude d'accusés qui chaque jour paraissent à la barre de vos tribunaux, quel est l'empoisonneur, l'assassin, le sacrilège, le corrupteur, le voleur qui soit chrétien? C'est des vôtres que regorgent les prisons; c'est des vôtres que sont peuplées les mines ; c'est des vôtres que s'engraissent les bêtes de l'amphithéâtre ; c'est des vôtres que sont formés les troupeaux de gladiateurs. Parmi eux pas un seul chrétien, à moins qu'il n'y soit pour le seul crime d'être chrétien »

5° Les historiens païens reconnaissaient leur innocence , et les persécuteurs eux-mêmes rendaient hommage à leur vertu. Tacite, cet auteur beaucoup trop surfait et si injuste à l'égard de nos pères, raconte l'affreuse boucherie des chrétiens sous Néron. « Une multitude énorme, dit-il, périt dans les plus affreux supplices . Ils étaient innocents de ce qu'on leur reprochait ; mais ils étaient coupables de la haine du genre humain» Voilà le mot.

Quel était le genre humain de Tacite ? Lui-même le dit : c'était la boue vivante, la cruauté vivante. Pourquoi sa haine? Parce que le mal est l'ennemi irréconciliable du bien. La sainteté de nos pères était la condamnation impitoyable des crimes monstrueux dont se souillaient les païens. De là , les bûchers de Néron et ses flambeaux vivants. Quarante ans après Néron, Pline le jeune, gouverneur de Bithynie, est chargé par Trajan d'informer contre les chrétiens.

Courtisan zélé, il exécute avec rigueur les ordres de son maître et fait traquer nos aïeux. Appliqués à la torture , lui-même les interroge. Quel résultat lui donnent ses sanglantes procédures? « Tout le crime des chrétiens , écrit-il à Trajan , consiste à s'assembler certain jour avant le lever de l'aurore , pour chanter des louanges à Christ comme à un dieu; à s'obliger par serment, non à commettre aucun crime, mais à éviter le vol, le brigandage, l'adultère , le parjure. J'en ai fait mettre à la torture, et je ne les ai trouvés coupables que d'une mauvaise et excessive superstition. »

Troisième préjugé en faveur des premiers chrétiens : la pratique des vrais chrétiens dans les siècles suivants. De très bonne heure il se forma, en Orient et en Occident, des communautés religieuses d'hommes et de femmes. C'est dans ces asiles séparés du monde qu'on trouve sinon immobilisé, du moins perpétué avec le plus de fidélité, le véritable esprit de l'Évangile et la pure tradition des enseignements apostoliques. Au nombre des anciens usages, conservés avec un soin jaloux, figure le signe de la croix. « Nos pères, les anciens moines, écrit un de leurs historiens, pratiquaient très-fréquemment et très-religieusement le signe de la croix. Ils le faisaient surtout en se levant, en se couchant, avant de travailler, en sortant de leurs cellules et du monastère, en y rentrant, en se mettant à table, sur le pain, sur le vin, sur chaque mets» .

Dans le monde marche sur une ligne parallèle l'usage traditionnel du signe rédempteur. Tous ces grands hommes qui, pendant plus de cinq cents ans, se sont succédé en Orient et en Occident; ces génies incomparables qu'on appelle les Pères de l'Église : Tertullien , Cyprien , Athanase, Grégoire , Basile , Augustin, Chrysostome, Jérôme, Ambroise, et tant d'autres dont la liste effrayante pour l'orgueil l'écrase de son poids ; toutes ces hautes intelligences faisaient très-assidûment le signe de la croix et recommandaient avec instance à tous les chrétiens de le faire dans chaque occasion.


Dernière édition par MichelT le Sam 13 Nov 2021 - 3:54, édité 8 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Mer 3 Mai 2017 - 20:19

TROISIÈME LETTRE. ( extraits)

Suite du troisième préjugé : Les docteurs de l'Orient et de l'Occident. — Constantin, Théodose , Charlemagne, saint Louis, Bayard, don Juan d'Autriche, Sobieski. — Quatrième préjugé : La conduite de l'Église. — Cinquième préjugé Ceux qui ne font pas le signe de la croix. — Résumé.

Or, mon cher ami, sans exception aucune, tous ces grands génies faisaient le signe de la croix. Ils le faisaient très-souvent et ne cessaient de recommander aux chrétiens de le faire en toute occasion. « Faire le signe de la croix, dit l'un d'eux, sur ceux qui mettent leur espérance en Jésus-Christ, est la première chose qui a lieu parmi nous et la plus connue » Un autre : « La croix Se trouve partout : chez les princes et chez les sujets, chez les femmes et chez les hommes, chez les vierges et chez les femmes mariées, chez les esclaves et chez les personnes libres, et tous en marquent le plus noble de leurs membres, le front... Jamais ne franchissez le seuil de vos maisons sans dire : Je renonce à Satan et je m'attache à Jésus-Christ, et sans accompagner ces paroles du signe de la croix. »

Un autre : « Nous devons faire le signe de la croix à chaque action du jour. » D'autres encore : « Que le signe de la croix se fasse constamment sur le cœur, sur la bouche, sur le front, à table, au bain, au lit, à l'entrée et à la sortie , dans la joie et dans la tristesse, assis, debout, en parlant, en marchant, bref, en toutes nos œuvres. Fai sons-le sur notre poitrine et sur tous nos membres, afin que notre être tout entier soit couvert de cette invincible armure des chrétiens. »

Jusqu'au dernier soupir , confirmant leurs paroles par leur exemple, nous voyons ces grands génies mourir comme l'illustre Chrysostome, le roi de l'éloquence , en faisant le signe de la croix. Formés à leur école, les plus nobles chrétiens marchent sur leurs traces. Parlant de sainte Paule, la petite-fille des Scipions, saint Jérôme dit : «Lorsqu'elle fut sur le point de rendre l'âme et qu'à peine nous l'entendions parler, elle tenait le doigt sur sa bouche, et, fidèle à l'usage, elle imprimait le signe de la croix sur ses lèvres. »

Franchissons les siècles et signalons quelques brillants anneaux de la chaîne traditionnelle. Sans parler de ces immortels empereurs, législateurs et guerriers, Constantin , Théodose, Charlemagne , si fidèles à l'usage du signe de la croix , arrivons au plus grand de nos rois, saint Louis. Son ami et son historien, le sire
de Joinville, nous a laissé ce témoignage : « A la table, au conseil, au combat, en toutes ses actions, le Roi commençait toujours par le signe de la croix. » Le chevalier sans peur et sans reproche, Bayard, est blessé à mort. Digne de sa vie , son dernier acte est le signe de la croix, qu'il fait avec son épée.

Représentées par deux flottes de plus de quatre cents voiles, la puissance catholique et la puissance musulmane sont en présence dans le golfe de Lépante. Du combat va dépendre le salut de la civilisation, ou le triomphe de la barbarie. Les destinées de l'Europe sont dans les mains de don Juan d'Autriche. Avant de donner le signal de l'attaque, le héros chrétien fait le signe la croix. Tous les capitaines le répètent, et l'islamisme subit une défaite dont il ne s'est jamais relevé.

Toutefois un siècle plus tard, il essaye de réparer son échec. Ses hordes innombrables s'avancent jusque sous les murs de Vienne. Sobieski est appelé. Comparées à celles de l'ennemi, ses forces ne sont rien. Mais Sobieski est chrétien. Avant de descendre dans la plaine , il fait faire le signe de la croix à son armée, lui-même se fait signe de croix vivant, entendant la messe les bras étendus en forme de croix. C'est là , dit un guerrier chrétien , que le grand vizir fut battu.

Je n'en finirais pas, mon cher ami, si je voulais citer les uns après les autres tous les faits qui établissent la perpétuité et la fréquence du signe de la croix, chez les vrais chrétiens de tous les siècles et de toutes les conditions, dans le monde, comme dans les cloîtres, en Orient et en Occident. Cette glorieuse tradition ne
forme-t-elle pas un préjugé passablement respectable, en faveur de nos aïeux de la primitive Église? Qu'en pensent tes jeunes camarades?

Quatrième préjugé en faveur des premiers chrétiens : l'usage de l'Église. Les siècles passent; et avec les siècles les hommes changent. Lois, habitudes, modes, langage, manières de voir et de juger : tout se modifie. Seule l'Église ne change pas. Immuable comme la vérité, dont elle est la maîtresse , ce qu'elle enseignait, ce qu'elle faisait hier, elle l'enseigne, elle le fait aujourd'hui, elle l'enseignera, elle le fera demain et toujours. Quelle est sa pensée, quelle est sa conduite à l'égard du signe de la croix? Nul point sur lequel se manifeste avec plus d'éclat sa divine immuabilité. Depuis dix-huit-siècles, on peut dire que l'Église vit du signe de la croix. Pas un instant elle ne cesse de l'employer. Elle commence , continue, achève tout par ce signe. De toutes ses pratiques le signe de la croix est la principale, la plus ordinaire, la plus familière. Il est l'âme de ses exorcismes, de ses prières et de ses bénédictions.

Ce que nous lui voyons faire sous nos yeux, dans nos basiliques, elle le faisait sous les yeux de nos pères dans les catacombes. « Sans le signe de la croix, disent-ils , rien parmi nous ne se fait légitimement, rien n'est parfait, rien n'est saint. »

Comme celui de son divin fondateur, le pouvoir de l'Église s'exerce sur les créatures et sur l'homme. Il s'étend au ciel et sur la terre. Comment l'exerce-t-elle ? Par le signe de la croix. Tout ce qu'elle destine à ses usages : l'eau, le sel , le pain , le vin , le feu , la pierre , le bois, l'huile, le baume , le linge, la soie, les bronzes, les métaux précieux ; tout ce qui appartient à ses enfants : leurs demeures , leurs champs , leurs troupeaux, leurs instruments de travail, les inventions de leur industrie : elle prend possession de tout par le signe de la croix.

Veut-elle préparer au Dieu du ciel une habitation sur la terre? Avant tout le signe de la croix doit consacrer l'emplacement de l'édifice. « Que personne , disent les conciles, ne se permette de bâtir une église sans que l'évêque vienne sur les lieux et y fasse le signe de la croix, afin d'en chasser les démons (les anges déchus). » Le signe de la croix est la première chose qu'elle emploie pour bénir les matériaux du temple. Elle le grave vingt fois sur le pavé, sur les piliers, sur l'autel. Pour l'immobiliser, elle le fabrique en fer et le place au sommet de l'édifice. Lorsque ses enfants viendront dans la maison de Dieu , que feront-ils avant d'en franchir le seuil? Le signe de la croix. Par où les chefs de la prière, les évêques et les prêtres commenceront-ils à célébrer les louanges du Très-Haut ? par le signe de la croix.

« Lorsque au commencement des offices nous faisons le signe de la croix, accompagné de ces paroles : Dieu, venez à mon aide; c'est comme si nous disions, écrit un ancien liturgiste : Seigneur, votre croix est notre aide ; la main vous en représente le signal, et la langue vous en prie. Le diable est le colonel de tous les ennemis de notre salut ; il gouverne le monde, il flatte la chair pour nous amorcer. Si donc par votre croix, Seigneur, vous nous donnez aide, lui et tous nos ennemis seront mis en déroute. »

Vois surtout sa conduite à l'égard de l'homme, temple vivant de la Trinité. La première chose qu'elle fait sur lui , au sortir du sein de sa mère, c'est le signe de la croix ; la dernière, lorsqu'il rentre dans les entrailles de la terre, c'est encore le signe de la croix. Au fils de sa tendresse , voilà son premier bonjour et son dernier adieu.

Dans l'intervalle qui sépare le berceau de la tombe, combien de signes de croix sur l'homme ! Au baptême, où il devient enfant de Dieu, le signe de la croix ; à la confirmation, où il devient soldat de la vertu, le signe de la croix; à l'eucharistie, où il se nourrit du pain des anges, le signe de la croix; à la pénitence, où il recouvre la vie divine , le signe de la croix ; à l 'extrême-onction, où il est fortifié pour le dernier combat, le signe de la croix; à l'ordre et au mariage, où il est associé à la paternité de Dieu lui-même , le signe de la croix. Toujours et partout, aujourd'hui comme autrefois, en Orient comme en Occident, le signe de la croix sur l'homme .

Cela n'est rien encore. Vois ce que fait l'Église lorsque , dans la personne du prêtre, elle monte à l'autel. Armée de la toute-puissance qui lui a été donnée, elle vient commander, non plus à la créature, mais au Créateur; non plus à l'homme, mais à Dieu. A sa voix le ciel s'ouvre; le Verbe s'incarne et renouvelle tous les mystères de sa vie, de sa mort et de sa résurrection. Est-il un acte qui doive être accompli avec une plus solennelle gravité, un acte duquel il faille bannir avec plus de soin tout ce qui serait étranger ou superflu ? Or, dans le cours de l'action par excellence, que fait l'Église ? Plus que jamais elle multiplie le signe de la croix ; elle s'enveloppe du signe de la croix; elle marche à travers le signe de la croix ; elle le répète si souvent, que le nombre auquel elle arrive pourrait paraître exagéré, s'il n'était pas profondément mystérieux.

Sais-tu combien de fois le prêtre fait le signe de la croix pendant la messe? Il le fait quarante-huit fois! ! Je dis mal : tant que dure l'auguste sacrifice, le prêtre est un signe de croix vivant. Et l'Église catholique, la grave institutrice des nations, la grande maîtresse de la vérité, s'amuserait à répéter si souvent, dans l'acte le plus solennel, un signe inutile, superstitieux ou d'une minime importance!

Cinquième préjugé en faveur des premiers chrétiens : Ceux qui ne font pas le signe de la croix. il y a sur la terre six catégories d'êtres qui ne font pas le signe de la croix. Les païens : Chinois , Indous , Tibétains, ect, les adorateurs d'idoles: ils ne font pas le signe de la croix. Les mahométans ne font pas le signe de la croix. Les juifs ne font pas le signe de la croix.

Les mauvais catholiques : renégats de leur baptême, esclaves du respect humain, qui souvent ne connaissent rien de leur doctrine, qui parlent de tout et qui ne savent rien, adorateurs du dieu matière, et dont la vie intime est un linge souillé : ils ne font pas le signe de la croix.

Telles sont les catégories d'êtres qui ne font pas le signe de la croix.  En résumé, relativement à l'usage très fréquent du signe de la croix, le monde se divise en deux camps opposés !


QUATRIÈME LETTRE.  ( extraits)

Réponse à une objection : Les temps sont changés. Raisons en faveur des premiers chrétiens, tirées de la nature même du signe de la croix. — Le signe de la croix est cinq choses. — Un signe divin qui ennoblit l'homme. — Preuves que le signe de la croix est divin.

« Autre temps , autres mœurs, disent-ils. Ce qui était utile, nécessaire même dans les premiers siècles de l'Église ne l'est plus aujourd'hui. Les temps sont changés ; il faut vivre avec son siècle. »

Saint Paul leur répond que : Jésus-Christ était hier, qu'il est aujourd'hui, et qu'il sera le même aux siècles des siècles. Tertullien ajoute que le Verbe incarné s'appelle la vérité et non pas la coutume. Or, la vérité ne change pas. Ce que les apôtres, les chrétiens de la primitive Église, les vrais chrétiens de tous les siècles ont tenu pour utile, et jusqu'à un certain point nécessaire, n'a pas cessé de l'être.

J'ose même affirmer qu'il l'est aujourd'hui plus que jamais. La raison en est dans les rapports de ressemblance qui existent entre la position des chrétiens des premiers siècles, et celle des chrétiens du dix-neuvième siècle. Quelle était la position de nos pères de la primitive Église ? Ils étaient en face d'un monde qui n`était pas chrétien , qui ne voulait pas le devenir, qui ne voulait pas qu'on le fût, et qui persécutait à outrance ceux qui s'obstinaient à l'être.

Et nous, ne sommes-nous pas en face d'un monde qui cesse d'être chrétien, qui ne veut pas le redevenir, qui ne veut pas qu'on le soit, et qui persécute tantôt par la ruse , tantôt par la violence, ceux qui s'obstinent à l'être?

Si, dans une pareille situation, les premiers chrétiens, formés à l'école des apôtres, ont regardé comme nécessaire l'usage si fréquent du signe de la croix, quelles raisons aurions-nous de l'abandonner? Sommes-nous plus habiles, ou plus forts? les dangers sont-ils moins grands , les ennemis moins nombreux, ou moins perfides? Poser de pareilles questions, c'est les résoudre. Passons.

Le signe de la croix est un signe divin qui nous ennoblit, le signe de la croix est un livre qui nous instruit; le signe de la croix est un trésor qui nous enrichit, le signe de la croix est une arme qui dissipe l'ennemi ; Voyageurs pour le ciel, le signe de la croix est un guide qui nous conduit. Fils de la poussière, le signe de la croix est un signe divin qui nous ennoblit.

Cet être (l`homme) est l'image de Dieu, le roi de la création : il ne faut pas qu'il se dégrade. Dieu le touche au front et lui imprime un signe divin qui l'ennoblit. Noblesse oblige. Respecté des autres, il se respectera lui-même. Ces lettres de noblesse, ce signe divin, c'est le signe de la croix. Il est divin, puisqu'il vient du ciel et non de la terre. Il vient du ciel, puisque le propriétaire seul a le droit de marquer ses produits au coin de son effigie. Il vient du ciel, puisque la terre avoue ne l'avoir pas inventé. Parcours tous les pays et
tous les siècles , nulle part tu ne trouveras l'homme qui a imaginé le signe de la croix, le saint qui l'a enseigné, le concile qui l'a imposé. « La tradition l'apprend, la coutume le confirme, la foi le pratique »

Dans Tertullien tu viens d'entendre la dernière moitié du second siècle de l'Église. Saint Justin parle pour la première et t'apprend non-seulement l'existence du signe de la croix, mais la manière dont il se faisait. Nous voilà dans ces temps primitifs , temps d'éternelle mémoire , que les hérétiques eux-mêmes appellent l'âge d'or du christianisme, et par la pureté de la doctrine et par la sainteté des mœurs. Or, nous y trouvons le signe de la croix en pleine pratique , en Orient comme en Occident.

Avançons de quelques pas, et nous donnons la main à saint Jean, le dernier sur vivant des apôtres. Tu vois le vénérable vieillard faisant le signe de la croix sur une coupe empoisonnée et buvant impunément la liqueur meurtrière. Un peu plus loin , voici ses illustres collègues Pierre et Paul. Comme Jean, le disciple chéri du divin Maître, Pierre et Paul, princes de l'apostolat, font religieusement le signe de la croix , et l'enseignent de l'Orient à l'Occident , à Jérusalem , à Antioche , à Athènes , à Rome, aux Grecs et aux barbares. Écoutons un irrécusable témoin de la tradition. « Paul, dit saint Augustin, porte partout le royal étendard de la croix. Il pêche les hommes , et Pierre marque les nations du signe de la croix. »

Non-seulement ils le font sur les hommes, ils le font encore sur les créatures inanimées, et ils le font faire. « Toute créature de Dieu est bonne, écrit le grand Apôtre, et il ne faut rien rejeter de ce qui peut être reçu avec actions de grâces; parce qu'il est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière. » Telle est la règle. Quel en est le sens? Dans l'étude du droit, si on rencontre un texte obscur, que fait-on? Pour l'élucider, on consulte l'interprète le plus autorisé et le plus voisin du législateur. Sa parole fait loi.

Écoute l'interprète le plus autorisé de saint Paul, le grand Chrysostome. « Paul, dit-il, établit ici deux choses : la première que nulle créature n'est immonde. La seconde , qu'en la supposant telle , le moyen de la purifier est sous la main.« Faites-lui le signe de la croix, rendez grâces et gloire à Dieu, et à l'instant toute souillure disparaît ». Voilà l'enseignement apostolique.

Les princes des apôtres ne font pas seulement le signe de la croix sur les créatures inanimées et sur les multitudes qui accourent à la foi ; on le fait sur eux-mêmes. Ce signe existait donc avant eux. Paul, le persécuteur, est renversé sur le chemin de Damas. Il faut qu'il devienne l'apôtre du Dieu qu'il poursuit. Quel sera le premier acte du Dieu vainqueur? Ce sera de marquer le vaincu du signe de la croix. « Va, dit-il à Ananie, et marque-le de mon signe »

Quel est donc l'auteur et l'instituteur du signe de la croix? Pour le trouver, il faut franchir tous les siècles, toutes les créatures visibles, toutes les hiérarchies angéliques; il faut s'élever jusqu'au Verbe éternel, la vérité en personne. Écoute encore un témoin parfaitement placé pour le savoir, témoin d'autant plus irréprochable qu'il a signé son témoignage de son sang. J'ai nommé l'immortel évêque de Carthage , saint Cyprien. « Seigneur, s'écrie-t-il, Prêtre saint, vous nous avez légué trois choses impérissables : le calice de votre sang , le signe de la croix, et l'exemple de vos douleurs. » Saint Augustin ajoute : « C'est vous-même qui avez voulu que ce signe nous fût imprimé sur le front. »


Dernière édition par MichelT le Sam 13 Nov 2021 - 3:55, édité 4 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Mer 3 Mai 2017 - 21:35

DIXIÈME LETTRE ( extraits)

Raison de la haine particulière du démon (des anges déchus) pour le signe de la croix.

N'oublie pas que mon but actuel est de montrer dans le signe de la croix un trésor qui nous enrichit. Pour être enrichi, il faut que l'homme demande et que Dieu l'exauce. Pour que Dieu exauce l'homme, il faut que l'homme soit agréable à Dieu. Il n'y a d'agréable à Dieu que son Fils et ceux qui lui ressemblent.

Or, le Fils de Dieu, cet unique médiateur entre Dieu et les hommes, est un signe de croix vivant ; et vivant éternellement signe de croix, depuis l'origine du monde. C'est le grand Crucifié; et ce grand Crucifié, c'est le nouvel Adam, c'est le type du genre humain. Pour être agréable à Dieu, il faut donc que l'homme ressemble à son divin modèle et soit un crucifié, un signe de croix vivant. Telle est, comme celle du Verbe lui-même, sa destinée sur la terre. Mendiant, telle est surtout l'attitude qu'il doit prendre, lorsqu'il se présente devant Dieu pour demander l'aumône.

La Providence n'a pas voulu qu'il ignorât cette condition nécessaire de succès. Pas plus que le souvenir de sa chute et l'espérance de sa rédemption, l'homme n'a perdu la connaissance de l'instrument rédempteur. De là l'existence et la pratique, sous une forme ou sous une autre, du signe de la croix en priant, chez tous les peuples, depuis l'origine des siècles jusqu'à nos jours. Dieu n'a pas seulement gravé l'instinct du signe de la croix dans le cœur de l'homme.

Pour tenir sans cesse présente, même à ses yeux corporels, la nécessité de ce signe salutaire et lui faire comprendre le rôle souverain qu'il doit jouer dans le monde moral, le Créateur a voulu que dans le monde matériel tout se fit par le signe de la croix; que tout en montrât l'action nécessaire et en reproduisit l'image.


Raison de la haine particulière du démon ( des anges déchus) pour le signe de la croix.

D'où viennent, dans les méchants de tous les siècles, ces dispositions, en apparence contradictoires , d'amour et de haine , de respect et de mépris pour le signe adorable? « De Satan lui-même, répond Tertullien. Esprit de mensonge , son rôle est d'altérer la vérité et de faire tourner les choses les plus saintes au profit des idoles. Il baptise ses fidèles, en les assurant que l'eau remettra leurs péchés : c'est ainsi qu'il initie au culte de Mithra. Il marque au front ses soldats. Il célèbre l'oblation du pain. Il promet la résurrection, et la couronne achetée par le glaive.

« Que dirai-je? Il a un souverain pontife à qui il interdit les secondes noces. Il a ses vierges, il a ses continents. Si nous examinons en détail les superstitions établies par Numa, les offices sacerdotaux, les insignes, les privilèges, l'ordre et le détail des sacrifices, les ustensiles sacrés, les vases même des sacrifices, tous les objets servant aux expiations et aux prières : n'est-il pas manifeste que le démon ( l`ange déchu), voleur de Moïse , a contrefait tout cela? Depuis l'Évangile la contrefaçon continue. »

Satan est allé plus loin. Connaissant toute la puissance de la croix, il a voulu s'en faire un attribut personnel , et se substituer ainsi, pour accaparer les hommages du monde, au Dieu crucifié. Aussi , le front marqué du signe sacré le fait frémir de rage. II ne trouve pas de supplices assez cruels, pour le punir d'avoir porté l'image du Verbe incarné. Vois, cher ami , comment il traite nos pères, nos mères, nos frères, nos sœurs, les martyrs de tous les temps et de tous les pays.  Grande leçon! Que la haine de Satan pour le signe de la croix, soit la mesure de notre amour et de notre confiance pour ce signe adorable.


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MichelT

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LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix Empty Re: LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix

Message par MichelT Mer 3 Mai 2017 - 21:42

ONZIÈME LETTRE. ( extraits)

Le signe de la croix est un trésor qui nous enrichit, parce qu'il est une prière : Preuves. — Prière puissante Preuves. — Prière universelle : Preuves. — Il pourvoit à tous les besoins. — Pour son Âme l'homme a besoin de lumières. Le signe de la croix les obtient : Preuves. — De force, le signe de la croix la procure : Preuves. — Exemples des martyrs. Le signe de la croix est un trésor qui nous enrichit : là, se trouve une de ses raisons d'être. Il nous enrichit, parce qu'il est une excellente prière.

Déjà la moitié de la preuve est faite. Elle est dans l'antiquité, l'universalité, la perpétuité du signe de la croix. Au milieu du naufrage dans lequel le monde idolâtre laissa avarier ou périr tant de révélations primitives, on voit surnager le signe de la croix. Que dit ce fait étrange , pour toi, incompréhensible pour un grand nouveau nombre , mais très-rationel pour le chrétien habitué à réfléchir? Il dit éloquemment la haute utilité du signe de la croix pour l'homme; parce qu'il dit sa puissante efficacité sur le cœur de Dieu.

Du raisonnement passons aux faits. Le signe de la croix est une prière : une prière puissante, une prière universelle. C'est une prière. Qu'est-ce qu'un homme qui prie? C'est un homme qui confesse devant Dieu son indigence : indigence intellectuelle, indigence morale, indigence matérielle. C'est le mendiant à la porte du riche. Or, le mendiant prie par sa voix, mais plus éloquemment par son visage blême et amaigri, par ses infirmités, par ses haillons, par son attitude. Ainsi priait sur la croix l'adorable Mendiant du Calvaire. Dans cet état, le Fils de Dieu était plus que jamais l'objet des complaisances infinies de son Père. Lui-même nous dit que cette prière éloquente, plus en action qu'en parole , fut le levier puissant qui attira tout à lui.

Que fait l'homme en formant le signe de la croix, soit avec la main, soit en étendant les bras? Il imprime sur lui-même l'image du divin Mendiant : il s'identifie avec lui. C'est Jacob se couvrant des vêtements d'Ésaü, pour obtenir la bénédiction paternelle. Par cette attitude de foi, d'humilité, de dévouement, que dit-il à Dieu? Il dit : Voyez en moi votre Christ. Prière plus éloquente que toutes les paroles : « elle monte, dit saint Ambroise, et l'aumône descend.» Tel est le signe de la croix, même sans formule. Il ne parle pas, et il dit tout.

C'est une prière puissante. Lorsqu'un agent de l'autorité, commissaire de police, maire ou gendarme, met la main sur un délinquant, il lui dit : Au nom de la loi, je t'arrête. Dans ce mot, au nom de la loi, le coupable voit l'autorité de son pays , la force armée, les juges, le roi lui-même. La peur lui prend et il se laisse arrêter. Quand l'homme, menacé d'un danger, assailli par le doute, persécuté par la tentation, en proie à la souffrance, à la maladie, prononce cette parole de solennelle autorité : Au nom du Père et du Fils et du Saint- Esprit; et qu'en la prononçant il fait le signe rédempteur du monde, le signe vainqueur de l'enfer : comment expliquerais-tu la résistance du mal? L'homme n'a-t-il pas rempli toutes les conditions de succès? Dieu n'est-il pas, en quelque sorte, mis en demeure d'intervenir, et, en intervenant, de glorifier son nom et la puissance de son Christ?

Aussi, l'efficacité particulière du signe de la croix n'a jamais été douteuse, ni pour l'Église, ni pour les siècles chrétiens. Les plus graves théologiens enseignent même que le signe de la croix opère par lui-même, et indépendamment des dispositions de celui qui le fait. Ils en donnent plusieurs preuves :je n'en citerai que deux.

La première, c'est l'usage incessamment répété du signe de la croix. « S'il ne produisait pas , disent-ils , ses effets de lui-même, les chrétiens n'auraient aucune raison d'en faire un si fréquent usage. A quoi bon y recourir, quand un mouvement de l'âme ou une bonne œuvre quelconque suffirait, pour obtenir et pour réaliser ce qu'ils espèrent obtenir et réaliser par le signe de la croix ? »

La seconde repose sur des faits célèbres dans l'histoire et d'une authenticité incontestable : en voici quelques-uns. Le premier est celui de Julien l'Apostat. Déserteur du vrai Dieu, cet empereur devient, comme cela est inévitable, adorateur du démon ( des anges déchus). Pour connaître les secrets de l'avenir, il cherche dans toute la Grèce les hommes en rapport avec le mauvais Esprit. Un évocateur se présente qui promet de satisfaire sa curiosité. Julien est conduit dans un temple d'idoles. Les évocations faites, l'empereur se voit entouré de démons, dont la figure l'épouvante.

Par un mouvement de crainte irréfléchi, il fait le signe de la croix, et tous les démons disparaissent. L'évocateur s'en plaint et recommence l'évocation. Les démons reparaissent. Julien s'oublie encore et fait le signe de la croix. Nouvelle disparition des esprits de ténèbres. Ce fait, rapporté par saint Grégoire de Nazianze, par Théodoret et les autres Pères de l'Église, fit grand bruit dans tout l'Orient. Le second est plus connu de l'Occident. Nous le devons au pape saint Grégoire. L'illustre pontife en commence le récit par ces mots : « Le fait que je vais raconter n'est pas douteux, car il a presque autant de témoins que la ville de Fondi compte d'habitants. Un Juif, venant de la Campanie et se rendant à Rome par la voie Appienne, arriva dans la petite ville de Fondi. Comme il était tard, il ne put trouver à loger et se retira, pour passer la nuit, dans un vieux temple d'Apollon. Cette antique demeure des démons lui fit peur, et bien qu'il ne fût pas chrétien, il eut soin de se munir du signe de la croix. A minuit, effrayé de sa solitude , il était encore éveillé. Tout à coup il voit une troupe de démons ( anges déchus) qui semblent venir rendre hommage à leur chef, assis au chevet du temple. A mesure qu'ils se présentent, celui-ci les interroge et demande à chacun en particulier, ce qu'il a fait pour porter les hommes au péché. Tous lui dévoilent leurs artifices. Au milieu de ces discours, un d'eux s'avance qui raconte la grave tentation, dont il est parvenu à faire sentir les atteintes au vénérable évêque de la ville. Jusqu'ici, disait-il, j'avais perdu ma peine; mais hier au soir j'ai réussi à lui faire donner un petit coup sur l'épaule de la sainte femme qui s'occupe de sa maison. Continue, lui répond l'antique ennemi du genre humain ; achève ce que tu as commencé, et une si grande victoire te vaudra une récompense exceptionnelle. Cependant le Juif témoin de ce spectacle respirait à peine.  Pour le faire mourir de frayeur, le président de l'infernale assemblée , instruit de sa présence , ordonne de s'informer quel est le téméraire qui a osé venir s'abriter dans le temple. Les mauvais esprits s'approchent, le regardent avec une attention curieuse, et le voyant marqué du signe de la croix, ils s'écrient : Malheur! malheur! vaisseau vide et scellé ! A ces mots, toute la troupe infernale disparut. De son côté, le Juif se hâte de sortir. Il se rend à l'église, où se trouve déjà le vénérable évêque. L'ayant pris à part, il lui raconte ce qui vient d'arriver, comment il a eu connaissance du coup donné la veille, et le but que se propose le démon. Surpris au-delà de toute expression, l'évêque renvoie immédiatement la sainte femme attachée à son service, et interdit l'entrée de sa demeure à toute personne du sexe. Il consacre à saint André le vieux temple d'Apollon et le Juif se convertit. »

Citons un autre fait. On lit dans l'Histoire ecclésiastique de Nicéphore que, sous l'empereur Maurice, le roi de Perse, Chosroès II, envoya en ambassade à Constantinople des Persans, qui avaient tous le signe de la croix marqué sur le front. L'empereur leur demanda pourquoi ils portaient ainsi un signe auquel ils ne croyaient pas. « Ce que vous voyez sur nos fronts, répondirent-ils, est le témoignage d'une insigne faveur que nous avons reçue autrefois. La peste ravageait notre pays. Quelques chrétiens nous conseillèrent de graver le signe de la croix sur notre front, comme un préservatif contre le fléau. Nous les avons crus et nous avons été sauvés, au milieu de nos familles moissonnées par la peste. »

A la suite de ces faits, se place naturellement la réflexion du grand évêque d'Hippone, qui paraît décisive en faveur de l'enseignement des théologiens. « Il ne faut pas s'étonner, dit-il, de la puissance du signe de la croix, quand il est fait par de bons chrétiens, puisqu'il a tant de force lorsqu'il est employé par des étrangers qui n'y croient pas, et cela pour l'honneur du grand Roi. »

Afin de rester dans les limites de l'orthodoxie, il faut cependant ajouter que le signe de la croix n'opère pas de lui-même, purement et simplement; mais en tant qu'il est utile à notre salut et à celui des autres. Il en est de même de certaines pratiques, telles, par exemple, que les exorcismes, auxquels nulle promesse divine n'attribue un effet infaillible et sans condition aucune. J'ajoute encore que la piété de celui qui fait le signe de la croix contribue à son efficacité. Le signe de la croix est une invocation tacite de Jésus crucifié, par conséquent il est d'autant plus efficace qu'il est fait avec une ferveur plus grande. Ainsi l'invocation de cœur ou de bouche est d'autant plus propre à obtenir son effet, que le fidèle est plus vertueux et plus agréable au Seigneur.

C'est une prière universelle. En un sens, le signe de la croix peut dire comme le Sauveur lui-même : Toute puissance m'a été donnée au ciel et sur la terre. Ici, plus qu'ailleurs, il faut, mon cher Frédéric , raisonner avec des faits. Ils sont tellement nombreux que la seule difficulté est de choisir. Tous, et chacun à sa manière, proclament, d'une part, la foi de nos aïeux, et de l'autre, l'empire du signe de la croix sur le monde visible et sur le monde invisible. Besoins de l'âme et besoins du corps, il pourvoit à tout. Pour son âme, l'homme a besoin de lumières, et le signe de la croix les obtient.

Saint Porphyre , évêque de Gaza , doit disputer contre une femme manichéenne. Afin de dissiper, par la clarté de ses raisonnements, les ténèbres dont la malheureuse est enveloppée, il fait le signe de la croix ; et la lumière éclate dans cette intelligence égarée. Julien , le sophiste couronné , provoque à une controverse Césaire, frère de saint Grégoire de Nazianze. Le généreux athlète entre en lice, muni du signe de la croix. A un ennemi consommé dans l'art de la guerre et habile à manier le raisonnement, il oppose l'étendard du Verbe ; et l'Esprit de mensonge se trouve pris dans ses propres filets.

Saint Cyrille de Jérusalem, si puissant d'ailleurs en paroles et en œuvres, ordonne de recourir au signe de la croix, toutes les fois qu'il s'agit de combattre les païens, et il assure qu'ils seront réduits au silence. Dans l'ordre temporel, non moins que dans l'ordre spirituel, les lumières divines sont nécessaires à l'homme : le signe de la croix les obtient. Aussi les empereurs d'Orient, successeurs de Constantin, avaient coutume, lorsqu'ils devaient parler devant le sénat, de commencer par le signe de la croix.

Comme nous l'avons vu, le roi de France saint Louis, avant de discuter en conseil les affaires de son royaume, se conformait à cette très ancienne et très-religieuse pratique. Si , à l'exemple des plus grands princes qui aient gouverné le monde, les empereurs et les rois du dix-neuvième siècle recouraient eux-mêmes au signe de la croix, penses-tu que les affaires en iraient plus mal? Pour moi, je suis convaincu, comme de mon existence, qu'elles iraient beaucoup mieux. Les gouvernants d'aujourd'hui ont-ils moins besoin de lumières que ceux d'autrefois? Ont-ils la prétention de les trouver ailleurs que dans Celui qui en est la source, lux mundi? Connaissent-ils un moyen plus éprouvé de l'invoquer avec succès, que le signe de la croix ? Tous les siècles ne déposent-ils pas de son efficacité?

L'Église, qui devrait être leur oracle, ne continue-t-elle pas de la proclamer ? Est-il un concile, un conclave, une assemblée religieuse qui ne commence par le signe de la croix? Fidèles héritiers de la tradition, les prêtres catholiques parlent-ils jamais du haut de la chaire, sans s'être armés de ce signe de force et de lumière? En cela ils observent les prescriptions des anciens Pères. « Faites le signe de la croix, écrit saint Cyrille de Jérusalem, et vous parlerez,»

Ce que j'ai dit des rois, mon cher ami, doit se dire de tous ceux qui sont chargés d'enseigner les autres. Le Verbe incarné n'est-il pas le Dieu des sciences et de toutes les sciences, le professeur des professeurs, le maître des maîtres? Si le signe de la croix présidait à toutes les leçons qui se donnent aujourd'hui, à tous les livres qui s'impriment, crois-tu que nous serions inondés , comme nous le sommes, d'erreurs, de sophismes, d'idées fausses, de systèmes incohérents, dont le résultat incontesté est de faire descendre, à vue d'œil, le monde moderne dans les ténèbres intellectuelles, d'où le christianisme l'avait tiré ?

Pour son âme, l'homme a besoin de force : le signe de la croix en est la source féconde. Regarde tes illustres aïeux, les martyrs. A qui demandent-ils le courage pour triompher dans leurs héroïques combats? Au signe de la croix. Généraux d'armée, centurions, soldats, magistrats, sénateurs, patriciens ou plébéiens, enfants ou vieillards , matrones et jeunes vierges, tous ont soin, en descendant dans l'arène, de se couvrir de cette invincible armure.


DOUZIÈME LETTRE.  ( extraits)

Nécessité perpétuelle du signe de la croix pour obtenir la force. — Recommandations et pratique des chefs de la lutte spirituelle. — Signe de la croix dans les tentations. — Signe de la croix à la mort. — Exemple des martyrs. — Exemple des vrais chrétiens mourant de mort naturelle. — Les mourants se faisant faire le signe de la croix par leurs frères.


Le signe de la croix n'a rien perdu de sa puissance, ni de sa nécessité. Il est vrai, les tyrans sont morts et les amphithéâtres en ruines. Le signe de la croix a vaincu les uns, fait écrouler les autres. Si les seconds ne se relèvent pas, les premiers , de temps en temps, sortent de leurs tombeaux. La race des Nérons ne sera jamais éteinte : le plus redoutable est encore à venir. Avec une fureur antique, ceux qui ont paru depuis les Césars ont décimé les chrétiens, cette autre race également, immortelle, race vouée à la mort, comme dit Tertullien. Ce qu'ils ont fait hier en Occident, ce qu'ils font aujourd'hui en Orient, ils peuvent le refaire demain partout ou ils régneront.

Avis aux combattants : que nul n'oublie où est la source de la force. En attendant, souviens-toi, cher ami , que la paix a aussi ses martyrs. Quel est l'homme qui ne porte en lui-même un ou plusieurs Nérons? Est-il un jour de sa vie raisonnable, et même une heure , où il n'ait à veiller et à combattre? Que dis-je? Vingt fois le jour, des objets séduisants se présentent à ses regards, des pensées mauvaises importunent son esprit , les sens révoltés sollicitent son cœur à de lâches trahisons. Oh ! qu'il a besoin de force !
Où la trouvera-t-il ? Dans le signe de la croix. Le témoignage des siècles, l'expérience des vétérans et des conscrits de la vertu, attestent aujourd'hui, comme ils l'attestaient hier, la puissance souveraine du signe divin, pour dissiper les charmes séducteurs, chasser les mauvaises pensées et réprimer les mouvements de la concupiscence.

Écoute le chantre des martyrs, Prudence , qui connut tout à la fois les détails de leurs triomphes et le secret de leurs victoires. « Lorsqu'à l'invitation du sommeil tu gagnes ton chaste lit , fais le signe de la croix sur ton front et sur ton cœur. La croix te préservera de tout péché : devant elle fuient les puissances de ténèbres ; l'âme, sanctifiée par ce signe, ne saurait vaciller (1). »

Écoute encore les chefs de l'éternel combat. Grands génies et grands saints , consommés dans l'art de la guerre spirituelle qu'on appelle l'ascétisme, tous n'ont qu'une voix pour recommander aux soldats chrétiens l'usage du signe de la croix. « Sens-tu ton cœur s'enflammer, dit saint Chrysostôme ? Fais le signe de la croix sur ta poitrine, et à l'instant la colère se dissipera comme la fumée. »

Et saint Augustin : « Amalech, votre ennemi, tente-t-il de vous barrer la route et de vous empêcher d'avancer? Faites le signe de la croix, et il sera vaincu. » Et le grand serviteur de Dieu, Marc, qui prédit à l'empereur Léon l'heure de sa mort : « J'ai connu par mon expérience que le signe de la croix apaise les troubles intérieurs et procure la santé de l'âme. Aussitôt après le signe de la croix, la grâce opère : tout s'apaise, la chair aussi bien que le coeur. »

Saint Maxime de Turin : « C'est du signe de la croix que nous devons attendre la guérison de nos blessures. Si le venin de l'avarice se répand dans nos veines, faisons le signe de la croix, et le venin est chassé. Si le scorpion de la volupté nous pique, recourons au même moyen, et nous sommes guéris. Si les pensées grossièrement terrestres cherchent à nous souiller, faisons encore le signe de la croix, et nous vivons de la vie divine . »

Saint Bernard : « Quel est l'homme assez maître de ses pensées pour ne jamais en éprouver d'impures ? Mais il faut sur-le-champ réprimer leurs attaques, afin de vaincre l'ennemi là où il espérait triompher. L'infaillible moyen d'y réussir, c'est de faire le signe de la croix. »

Saint Pierre Damien : « Si vous sentez une mauvaise pensée naître dans votre esprit, faites aussitôt avec le pouce le signe de la croix, et soyez certain qu'elle disparaîtra. »

Le pieux Ecberth : « Rien n'est plus efficace que le signe de la croix pour dissiper les tentations, même les plus honteuses . » Résumant tous ces témoignages : «Quelle que soit la tentation qui nous presse, conclut saint Grégoire de Tours , il faut la repousser. Pour cela, faites, non pas lâchement, mais courageusement le signe de la croix, ou sur votre front, ou sur votre poitrine. »

S'il en était besoin , mille faits viendraient confirmer ce que tu viens d'entendre. Un seul suffira. C'est la révélation dont fut favorisé un saint religieux, nommé Patrocle, et par laquelle Dieu lui fit voir la puissance souveraine du signe de la croix contre les tentations. Un jour le démon, se transformant en ange de lumière, se montra au vénérable abbé. II commença , par des paroles pleines d'astuce, à lui conseiller de quitter la solitude et de retourner dans le monde. Mais l'homme de Dieu, sentant tout aussitôt courir dans ses veines un feu pestilentiel, se prosterna en oraison, priant le Seigneur de lui faire accomplir sa volonté. Sa prière est exaucée. « Un ange lui apparaît et lui dit : Si tu veux connaître le monde, monte sur cette colonne et tu verras ce qu'il est. »

Ravi en extase , le pieux solitaire croit avoir devant lui une colonne d'une hauteur prodigieuse : il y monte. Du sommet, il voit des homicides, des vols, des massacres, des fornications et tous les plus grands crimes de l'univers. Hélas ! s'écrie-t-il en descendant, hélas ! Seigneur, ne permettez pas que je retourne jamais au milieu de tant d'abominations. Alors l'ange lui dit : « Cesse donc de regretter le monde ; de peur que tu ne périsses avec lui. Va-t-en plutôt dans ton oratoire prier le Seigneur de te faire trouver un soutien, au milieu des épreuves de ton pèlerinage. » Il s'y rendit; et trouva le signe de la croix sculpté sur une brique. Il comprit le don de Dieu et connut que ce signe était une forteresse inexpugnable contre les tentations.

Martyr de la guerre ou martyr de la paix : voilà l'homme pendant la vie. Qu'est-il à la mort? Vois-tu ce malade en proie à la douleur, délaissé de tout le monde, ou entouré de parents et d'amis impuissants? Derrière lui, le temps qui fuit; devant lui, l'éternité qui s'avance et dans laquelle il se sent couler, sans que désormais aucune puissance humaine puisse retarder le moment du départ, ou adoucir les angoisses du voyage.

Ce malade, c'est toi, cher ami, c'est moi , c'est tout homme , riche ou pauvre , sujet ou monarque. Si, pendant les combats de la vie, nous avons besoin de lumière , de force, de consolation et d'espérance , dis-moi , si nous n'en avons pas un besoin mille fois plus grand, dans les luttes décisives de la mort? Eh bien ! le signe de la croix est tout cela. Sous ce nouveau rapport, qu'il fut cher à nos aïeux, et qu'il doit nous être cher à nous-mêmes!

Comme les martyrs, en marchant au dernier combat, ne manquaient pas de se fortifier par le signe de la croix ; ainsi les vrais chrétiens des siècles passés recouraient sans cesse au même signe, pour adoucir leurs douleurs et sanctifier leur mort; citons quelques exemples. Parlant de sa sœur bien-aimée , sainte Macrine, que lui-même assista dans ses derniers moments, saint Grégoire de Nysse s'exprime ainsi : «Elle disait : Seigneur, pour mettre l'ennemi en fuite et protéger leur vie, vous avez donné à ceux qui vous craignent le signe de la croix. En prononçant ces paroles , elle formait le signe adorable sur ses yeux, sur ses lèvres et sur son cœur. »

Au lieu de le faire avec la main, souvent les premiers chrétiens , sur le point de mourir, faisaient le signe de la croix en étendant les bras. C'est ce qu'ils appelaient le sacrifice du soir de la croix dans les derniers moments. Achevons notre voyage par la France et assistons à la mort de quelques-uns de nos rois. Un instant arrêtons-nous à Aix-la- Chapelle, pour voir mourir le grand empereur. « Le lendemain étant venu, dit Un évêque, témoin oculaire, Charlemagne, sachant ce qu'il devait faire , étendit sa main droite et autant qu'il put, il fit le signe de la croix sur son front, sur sa poitrine et sur tout son corps. » Ainsi devait mourir ce grand homme. Voici son fils, Louis le Pieux. « Ayant mis ordre aux affaires et fait ses recommandations, il ordonna de réciter près de lui l'office de la nuit et de lui placer sur la poitrine une relique de la vraie croix. Pendant ce temps, lui-même, autant que ses forces le lui permirent, faisait le signe de la croix sur son front et sur son cœur. Quand il était trop fatigué , il priait son
frère de continuer (2). »


Voici une fille dévouée qui assiste sa tendre, son illustre mère. Aujourd'hui la plupart se contentent de donner à leurs plus chers malades des soins matériels. Ils se reprocheraient de manquer aux moindres prescriptions du médecin. Mais l'assistance chrétienne? Mais les prescriptions du divin médecin et de l'Église notre mère : quelle est leur sollicitude à les remplir? Aux soins les plus dévoués, nos aïeux, plus intelligents et meilleurs que nous, ajoutaient les remèdes de l'âme.

Donc, à Bethléem, l'illustre fille des Fabius, sainte Paule, va mourir. Près de son lit est Eustochium , digne fille de sa mère. Que fait cet ange de tendresse? « Elle ne cessait, dit saint Jérôme, de former le signe de la croix sur les lèvres et sur la poitrine de sa mère, s'efforçant d'adoucir ses souffrances par l'impression du signe consolateur . »

Tu le vois : à la vie et à la mort, le signe de la croix était, chez nos aïeux, le moyen constamment employé pour obtenir à soi-même et aux autres , lumière , force, résignation, courage, espérance. Que le signe de la croix est donc une grande chose ! s'écriait avec raison un témoin de ses admirables effets.


Dernière édition par MichelT le Sam 13 Nov 2021 - 3:58, édité 2 fois

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LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix Empty Re: LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix

Message par MichelT Jeu 4 Mai 2017 - 12:13

QUINZIÈME LETTRE. ( extraits)

Réponse à une question. — Le signe de la croix est une arme qui dissipe l'ennemi. — La vie est une lutte. — Contre qui. — Nécessité d'une arme à la portée de tous. — Quelle est cette arme. — Preuves que le signe de la croix est l'arme spéciale, l`arme de précision contre les mauvais esprits.

Si tu communiques ma dernière lettre à tes camarades, il est probable, mon cher ami, qu'ils te diront : Si le signe de la croix est aussi puissant qu'on vous l'écrit, pourquoi ne fait-il plus ce qu'il a fait? A cette question il y a plusieurs réponses.

La première est donnée par saint Augustin. En parlant des miracles , le grand docteur fait une observation très-juste. Il dit : « Les miracles rapportés dans le canon des livres saints ont une grande publicité. Tout le monde lisant ou entendant lire l'Écriture , personne ne les ignore. Il en devait être ainsi, puisqu'ils sont les
preuves de la foi.

Aujourd'hui encore il se fait des miracles au nom de Notre-Seigneur, par les sacrements, par les prières et aux tombeaux des saints ; mais ils n'ont pas , à beaucoup près, la même notoriété que les premiers. On les connaît là où ils se font , et même si la ville est considérable, c'est à peine si tout le monde en a connaissance. Il arrive même souvent qu'un très petit nombre en sont informés. Quand ils les racontent ailleurs et aux autres, l'autorité de leur témoignage n'est pas telle, qu'on les admette sans difficulté et sans hésitation, bien que rapportés par des chrétiens à des chrétiens. »

En preuve de ce qu'il avance, le saint raconte plusieurs miracles opérés sous ses yeux , dont quelques-uns par le signe de la croix. Ainsi , de ce que tes camarades ou d'autres personnes ne connaissent pas les miracles accomplis de nos jours par le signe de la croix, ce n'est pas une raison de conclure qu'il n'en fait plus.

A cette première réponse, s'enjoint naturellement une seconde. Elle est d'un autre grand docteur, le pape saint Grégoire. Distinguant les temps anciens des temps nouveaux : « Au commencement de l'Église, dit-il, les miracles furent nécessaires. C'est par eux que la foi des peuples devait s'affermir. Lorsque nous plantons un arbre, nous l'arrosons jusqu'à ce qu'il ait pris racine. Le jour où nous en sommes assurés, l'arrosement finit. Voilà pourquoi  l'apôtre dit : Le don des langues est un signe non pour les fidèles, mais pour les infidèles. »

Il en est de la culture morale comme de la culture matérielle. Aujourd'hui que le christianisme a pris racine dans les entrailles du monde, les miracles ne sont plus , à beaucoup près , aussi nécessaires que dans le moment de la divine plantation. Il y a quinze cents ans que saint Augustin disait déjà : De nos jours celui qui pour croire demande des prodiges est lui-même le plus grand des prodiges. Mais en admettant, ce que je n'admets pas, que le signe de la croix ne fasse plus de miracles, par combien d'effets surhumains ne révèle-t-il pas sa puissance , à chaque heure du jour et de la nuit, dans tous les lieux de la terre?

Si tu supposes cent millions de tentations dans un jour, tiens pour certain que plus des trois quarts sont dissipées par le signe de la croix. Qui n'en a pas fait l'expérience pour lui-même? Pars de là; et, te rappelant que ce que tu fais, les autres le font, tu pourras mesurer la puissance permanente et universelle du signe libérateur. Je vais plus loin, et j'admets que le signe de la croix ne réussit pas toujours à chasser les pensées importunes, à dissiper les charmes séducteurs , à retenir l'âme sur le penchant de l'abîme : à qui la faute?

N'est-ce pas au peu de foi des chrétiens de nos jours ? Ne faut-il pas dire de l'inefficacité du signe de la croix, ce qu'on dit avec raison de l'inutilité de la communion pour un grand nombre : le défaut n'est pas dans la nourriture, mais dans les dispositions de celui qui mange?

C'est en vue de guérir ce défaut de foi qui appauvrit et qui ruine les chrétiens , que j'ai entrepris notre correspondance. Je vais la continuer en développant un nouveau titre du signe de la croix, à la confiance des catholiques du dix-neuvième siècle.

Le signe de la croix est une arme qui dissipe l'ennemi. — Il y a plus de trois mille ans que Job a défini la vie : Une lutte incessante.   Les siècles ont passé; les générations ont succédé aux générations; les empires ont fait place à d'autres empires ; vingt fois la face du monde s'est renouvelée, et la définition de Job reste
toujours vraie.

La vie est une lutte , lutte pour toi comme pour moi, comme pour tes camarades; pour le riche comme pour le pauvre. Lutte commencée au berceau , pour ne finir qu'à la tombe ; lutte de tous les instants du jour et de la nuit, en santé comme en maladie. Lutte décisive; de la victoire ou de la défaite dépend non la fortune, non la santé, non les avantages temporels que nous estimons si fort, mais infiniment plus que tout cela : une éternité de bonheur ou une éternité de malheur. Telle est, mon cher ami, la condition de l'homme ici-bas : nous ne pouvons rien y changer.

Quels sont ses ennemis, les tiens et les miens? Eh ! qui ne les connaît non-seulement par leur nom, mais par leurs attaques? Le démon (l`ange déchu), la chair, le monde : trois puissances formidables acharnées à
notre perte. N'ayant nullement la pensée de te faire un cours complet d'ascétisme, je m'occuperai seulement de la première.

Aussi certain qu'il y a un Dieu, aussi certain il est qu'il y a des démons (anges déchus). « Pas de Satan, pas de Dieu, » disait Voltaire ; et il avait raison. S'il n'y a pas de Satan, il n'y a pas de chute; pas de chute, pas de rédemption; pas de rédemption, pas de christianisme ; pas de christianisme, tout est faux : le genre humain est fou, et Dieu n'est pas.

Or, les démons sont des anges déchus. Par l'intelligence , par la force , par l'agilité, ils sont bien supérieurs à l'homme. Leur nombre est incalculable. Jusqu'au jugement dernier ils ont pour séjour l'enfer et l'atmosphère qui nous environne. Jaloux des fils d'Adam appelés au bonheur qu'ils ont perdu, leur occupation du jour et de la nuit consiste à nous tendre des pièges , à fomenter nos passions , à faire naître des situations dangereuses, à obscurcir en nous le regard de la foi, à émousser le sens moral, à étouffer le remords, à nous faire les complices de leur révolte, pour nous faire les compagnons de leur supplice. Toutes ces vérités, je le répète, sont aussi certaines que l'existence de Dieu.

Tyrans de l'homme par le péché, les démons (les anges déchus)  le sont des créatures soumises à l'homme : le roi vaincu, son royaume appartient au vainqueur. Répandus dans toutes les parties de la création et dans chaque créature en particulier, ils les pénètrent de leurs malignes influences. Dans les limites du pouvoir qui leur est abandonné, ils en font les instruments de leur haine contre l'homme , contre son âme et contre son corps. C'est encore un dogme de la foi universelle.

Que sait celui qui l'ignore ? Rien. Celui qui en doute? Moins que rien. Celui qui le nie ne compte plus parmi les êtres intelligents. Étant donnés la lutte et l'homme tels qu'ils sont, concevrais-tu que la sagesse divine eût laissé le genre humain sans défense ? Comment ne pas comprendre, au contraire, comme on comprend que deux et deux font quatre, que, pour équilibrer la lutte, Dieu a donné à l'homme une arme puissante, universelle, toujours sous sa main et à la portée de tous ? Quelle est cette arme ?

Interrogeons tous les siècles, surtout les siècles chrétiens. D'une voix unanime , ils répondent que c'est le signe de la croix. L'usage constant qu'il en ont fait affirme leur réponse. Ce point de vue illumine toute l'histoire du signe adorable.  Il en montre la raison; il justifie hautement la conduite des premiers chrétiens, et non moins hautement il condamne la nôtre. Que le signe de la croix soit l'arme spéciale, l'arme de précision contre Satan et ses anges, rien n'est plus certain. Dis-moi : quand on veut connaître la valeur d'un canon, d'une carabine, ou de telle autre arme de nouvelle invention , quelle est la manière de procéder?

On ne s'en rapporte pas aveuglément à l'inventeur. L'autorité nomme une commission. L'arme est essayée en présence de juges compétents. Les expériences constatées par eux décident du mérite de l'engin de guerre soumis à leur examen. Qu'il en soit de même pour le signe de la croix. Rappelle-toi seulement que le signe divin n'est pas une arme de nouvelle fabrique. Elle est vieille, très -vieille ; mais elle n'est ni rouillée, ni affaiblie, ni hors de service. Quant au jury d'examen , il est formé depuis longtemps, et ne laisse rien à désirer . Il se compose des hommes les plus compétents de l'Orient et de l'Occident, hommes spéciaux, qui, d'ancienne date , connaissent l'arme en question et le métier de la guerre , non-seulement en théorie, mais en pratique. Voilà le tribunal ; écoute son jugement.

Croyait-il à la puissance du signe de la croix et à la bonté de cette arme divine contre les démons, le juge qui ex prime son vote en ces termes ? « Ne sors jamais de ta maison sans faire le signe de la croix. Il sera pour toi bâton, arme, et tour inexpugnable. Ni homme ni démon n'osera t'attaquer, en te voyant couvert d'une pareille armure. Qu'à toi-même ce signe apprenne que tu es un soldat prêt au combat contre le démon, et luttant pour la couronne de justice. Ignores-tu ce qu'a fait la croix ? La mort vaincue, le péché détruit, l'enfer vidé, Satan détrôné, l'univers ressuscité : et tu douterais de sa puissance! »

Y croyait-il ce second juge dont voici les paroles ? « Le signe de la croix est l'armure invincible des chrétiens. Soldat du Christ, que cette armure ne te quitte jamais, ni le jour, ni la nuit, ni dans aucun instant, ni dans aucun lieu. Sans elle n'entreprends rien. Mais que tu dormes ou que tu voyages, que tu veilles ou que tu travailles, que tu manges ou que tu boives, que tu navigues sur mer ou que tu traverses les fleuves, sois toujours revêtu de cette cuirasse. Orne et protège chacun de tes membres de ce signe vainqueur, et rien ne pourra te nuire. Nul bouclier aussi puissant contre les traits de l'ennemi. A la vue de ce signe, les puissances infernales, effrayées et tremblantes, prennent la fuite. »

Y croyait-il ce troisième juge qui adresse aux chrétiens et à lui-même la recommandation suivante? « Faisons hardiment le signe de la croix. Lorsque les démons ( les anges déchus) le voient, ils se rappellent le Crucifié, ils prennent la fuite, se cachent et nous laissent. »

Et ce quatrième qui dit ? « Portons sur nos fronts l'immortel étendard. Sa vue fait trembler les démons ( les anges déchus) . Eux qui ne craignent pas les Capitoles dorés ont peur de la croix. » Ainsi juge l'Orient par l'organe de ses plus grands hommes , saint Chrysostome , saint Éphrem, saint Cyrille de Jérusalem, Origène, auxquels il serait aisé d'ajouter d'autres noms également respectables.

Écoutons l'Occident. Saint Augustin disait aux catéchumènes : « C'est avec le symbole et le signe de la croix qu'il faut marcher à l'ennemi. Revêtu de ces armes, le chrétien triomphera sans peine de son antique et superbe tyran. La croix suffit pour faire évanouir toutes les machinations des esprits de ténèbres. »

Son illustre contemporain saint Jérôme : « Le signe de la croix est un bouclier qui nous met à couvert des flèches enflammées du démon . » Ailleurs : « Faites souvent le signe de la croix sur votre front, afin de ne pas donner prise à l'exterminateur de l'Égypte . »

Et Lactance : « Quiconque veut connaître la puissance du signe de la croix, n'a qu'à voir combien ce signe est redoutable aux démons : puisque, adjurés au nom de Jésus-Christ, il les fait sortir des corps des possédés. Qu'y a-t-il d'étonnant? Lorsque le Fils de Dieu était sur la terre, d'une parole il mettait les démons ( anges déchus) en fuite et rendait le repos et la santé à leurs malheureuses victimes. Aujourd'hui ses disciples chassent les mêmes esprits immondes, au nom de leur maître et par le signe de sa passion . »

L'Orient et l'Occident ont parlé. Les juges les plus compétents proclament le signe de la croix une arme excellente , l'arme spéciale contre le démon (l`ange déchu) . Des expériences en nombre incalculable servent de base à leur jugement. Aux premiers siècles de l'Église elles se répétaient chaque jour, en présence des chrétiens et des païens, sur tous les points de la terre. Elles étaient tellement concluantes qu'un témoin oculaire, le grand Athanase, disait sans crainte d'être démenti : « Par le signe de la croix tous les artifices de la magie sont impuissants, tous les enchantements inefficaces, toutes les idoles abandonnées.

Par lui sont modérées, apaisées, arrêtées les fougues de la volupté la plus brutale, et l'âme courbée vers la terre se relève vers le ciel. Autrefois les démons trompaient les hommes en prenant différentes formes ; et, se tenant au bord des fontaines et des fleuves , dans les bois et sur les rochers, ils surprenaient par leurs prestiges les mortels insensés. Mais depuis la venue du Verbe divin , leurs artifices sont impuissants, le signe de la croix suffit pour dé masquer toutes leurs fourberies.»

« Quelqu'un veut-il faire l'épreuve de ce que je dis ? Il n'a qu'à venir au milieu des prestiges des démons, des impostures des oracles, des miracles de la magie ; qu'il fasse le signe de la croix en invoquant le nom du Seigneur, et il verra comment, par crainte de ce signe sacré, les démons s'enfuient les oracles se taisent, les charmes et les maléfices sont frappées d'impuissance. »


Je vais te citer quelques-unes de ces expériences. Le précepteur du fils de Constantin , Lactance , qui connaissait mieux que personne les secrets de la cour impériale, rapporte celle-ci : « Pendant qu'il était en Orient , l'empereur Maximin, très-curieux scrutateur de l'avenir, immolait un jour des victimes et cherchait dans leurs entrailles le secret des choses futures. Quelques-uns de ses gardes, qui étaient chrétiens, firent sur leur front le signe immortel, immortelle signum. A l'instant les démons se sauvent et le sacrifice demeure muet. »

Si, à la vue du signe de la croix, le démon est obligé de fuir de ses temples, comment tiendrait-il dans les autres lieux? Laissons parler Lactance : « Lorsque les païens, dit-il, sacrifient à leurs dieux, si quelqu'un des assistants porte sur son front le signe de la croix, le sacrifice ne réussit pas et l'oracle consulté ne rend point de réponse. Telle a été souvent la cause pour laquelle les mauvais empereurs ont persécuté les chrétiens. Quelques-uns des nôtres, les accompagnant à leurs sacrifices, faisaient le signe de la croix, et les démons ( anges déchus), mis en fuite, ne pouvaient marquer dans les entrailles des victimes, les signes indicateurs de l'avenir. Lorsque les aruspices venaient à s'en apercevoir, ils ne manquaient pas, poussés par les démons ( anges déchus) auxquels ils sacrifiaient, de se plaindre de la présence des profanes. Les princes entraient en fureur et poursuivaient le christianisme à outrance, afin de pouvoir se souiller par des sacrilèges dont ils portèrent si cruellement la peine. »


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Message par MichelT Jeu 4 Mai 2017 - 12:27

SEIZIÈME LETTRE. ( extraits)

Le signe de la croix brise les idoles et en chasse les démons : exemples. — Il les chasse des possédés : exemples. — Anecdote récente. — Nouvelles preuves : les exorcismes. — Il rend vaines les attaques directes des démons : exemples. — Leurs attaques indirectes : preuves. — Toutes les créatures asservies au démon lui servent d'instruments pour nous nuire. — Le signe de la croix les affranchit et les empêche d'être nuisibles à notre corps et à notre âme. — Profonde philosophie des premiers chrétiens. — Usage qu'ils faisaient du signe de la croix. — Tableau par saint Chrysostôme.

La puissance du signe de la croix doit être, cher Frédéric, aussi étendue que celle de Satan. L'usurpateur infernal s'est emparé de toutes les parties de la création, le propriétaire légitime a dû l'en chasser et donner à ses ayant droit le moyen de l'expulser eux-mêmes.

Ainsi , non-seulement le signe de la croix empêche les démons ( les anges déchus) de parler, et les oblige à fuir des lieux qu'ils habitent, il les chasse encore des corps qu'ils possèdent. Quelques faits entre mille, à l'appui de ces vérités, évidentes par elles-mêmes.

C'était sous l'empereur Antonin. Le César philosophe persécutait cruellement les fidèles. Rome était pleine d'idoles. A leurs pieds on traînait nos aïeux pour les forcer à leur offrir de l'encens. Une de nos héroïques sœurs, Glycérie, paraît devant le gouverneur de la ville impériale. «Voyons, lui dit-il, prends ce flambeau et sacrifie à Jupiter. — Je n'en ferai rien, répond Glycérie. Je sacrifie au Dieu éternel, et pour cela je n'ai pas besoin de flambeaux qui répandent de la fumée. Fais-les donc éteindre , afin que mon sacrifice lui soit agréable. Le gouverneur dit, et les flambeaux sont éteints. Alors la noble et chaste vierge lève les yeux au ciel, et étendant la main vers le peuple : —Voyez-vous, leur dit-elle, le brillant flambeau qui est gravé sur mon front? A ces mots elle fait le signe de la croix et dit: «Dieu tout-puissant, que vos serviteurs glorifient par la croix de Jésus-Christ, brisez ce démon fait de main d'homme. » A l'instant un coup de tonnerre retentit; et le Jupiter de marbre tombe en morceaux .»

Nous lisons la même chose de saint Procope, martyr sous Dioclétien. Amené devant les idoles, le glorieux athlète se tient debout , tourné vers l'Orient ,et forme le signe de la croix sur tout son corps; puis, levant les yeux et les mains au ciel, il dit : « Seigneur Jésus-Christ ! » En même temps il fait contre les statues un signe de croix, qu'il accompagne de ces paroles : « Simulacres immondes, je vous le dis, craignez le nom de mon Dieu ; fondez-vous en eau et répandez-vous dans ce temple. Ce qui fut fait . »

Obligés à la vue du signe de la croix de laisser les lieux qu'ils habitent, les démons sont également contraints, par la vertu du même signe, de quitter les corps des malheureux dont ils se sont emparés. Ici encore les faits abondent, attestés par d'irrécusables témoins.

Aux attaques directes et palpables, les démons ( les anges déchus) ajoutent les attaques indirectes et masquées. Non moins dangereuses que les premières, elles sont beaucoup plus fréquentes. On en compte deux sortes : les unes intérieures et les autres extérieures.

Les premières sont les tentations proprement dites. Or, je te l'ai déjà dit, le signe de la croix est l'arme victorieuse qui les dissipe, et en le disant je ne suis que l'écho de la tradition universelle et de l'expérience journalière. « Lorsque vous faites le signe de la croix, dit saint Chrysostôme, rappelez vous ce que la croix signifie, et vous apaisez la colère et tous les mouvements désordonnés de l'âme.»

Les secondes attaques viennent du dehors. Pas une créature qui échappe à la maligne influence de Satan, et de toutes il fait les instruments de sa haine implacable contre l'homme. Ceci, je te l'ai montré , est un article du symbole du genre humain. Quelle arme Dieu nous a-t-il donnée, car il nous en a donné une, pour les délivrer, et, en les délivrant, préserver notre âme et notre corps des funestes atteintes de celui qui est appelé avec raison le grand Homicide?

Toutes les générations catholiques se lèvent de leurs tombeaux pour me crier : C'est le signe de la croix. Tous les catholiques actuellement vivants, dans les cinq parties du monde, unissent leur voix à celle de leurs ancêtres et répètent : C'est le signe de la croix.

Bouclier impénétrable, tour imprenable, arme spéciale contre le démon, arme universelle, également puissante contre les ennemis visibles et invisibles, arme facile pour les faibles, gratuite pour les pauvres : telle est, nous l'avons vu, la définition que les morts et les vivants nous donnent du signe adorable.

Ainsi, l'usage incessant du signe de la croix annonce chez nos aïeux une profonde philosophie. Ils connaissaient dans sa redoutable étendue la grande loi du monde moral, le dualisme. Ils comprenaient que l'attaque étant universelle et incessante, il fallait, pour maintenir l'équilibre, que la défense fût universelle et incessante. Encore un coup, quoi de plus logique?

Ils faisaient donc le signe de la croix sur chacun de leurs sens. Veux-tu savoir pourquoi? Les sens sont les portes de l'âme; ils servent d'intermédiaire entre elle et les créatures. Une fois qu'ils sont marqués du signe de la croix, les créatures ne peuvent plus entrer en communication avec l'âme, qu'en passant par un milieu sanctifié, où elles perdent leurs funestes influences.

Mais ce n'était pas assez pour nos pères. Ils faisaient le signe de la croix sur tous les objets à leur usage et même, autant qu'il était en eux, sur toutes les parties de la création. Les maisons, les meubles, les portes, les fontaines, les bornes des champs, les colonnes des édifices, les navires, les ponts, les médailles, les drapeaux, les casques, les boucliers, les anneaux : tout était marqué du signe adorable.

Empêchés par leurs occupations ou par la distance des lieux de le répéter partout et toujours, ils l'immobilisaient en le gravant, en le peignant, en le sculptant, au front de toutes les créatures , parmi lesquelles s'écoulait leur existence. Paratonnerre et monument de victoire, tel était alors le signe auguste.

Monument de victoire, attestant le triomphe du Verbe incarné sur le roi de ce monde : comme les colonnes élevées par le vainqueur sur le champ de bataille attestent la défaite de l'ennemi. Des hauteurs de Constantinople contemplons avec saint Chrysostome le monde émaillé de ces paratonnerres divins et de ces monuments de victoire.

«Plus précieuse que l'univers, dit l'éloquent patriarche , la croix brille sur le diadème des empereurs. Partout elle s'offre à mes regards : je la trouve chez les princes et chez les sujets, chez les femmes et chez les hommes , chez les vierges et chez les femmes mariées, chez les esclaves et chez les personnes libres. Tous la gravent incessamment sur la plus noble partie de leur corps, le front, où elle resplendit comme une colonne de gloire. A la table sacrée, elle y est; dans les ordinations des prêtres, elle y est; dans la cène mystique du Sauveur, elle y est. Elle se dessine à tous les points de l'horizon, au faîte des maisons, sur les places publiques , dans les lieux habités et dans les déserts, sur les routes, sur les montagnes, dans les bois, sur les collines, sur la mer, au sommet des navires, sur les îles, aux fenêtres, sur les portes, au cou des chrétiens, sur les lits, sur les vêtements, sur les livres, sur les armes, sur les lits de table , dans les festins, sur les vases d'or et d'argent , sur les pierres précieuses, dans les peintures des appartements.

On la fait sur les animaux malades , sur les possédés du démon, dans la guerre, dans la paix, le jour, la nuit, dans les réunions de plaisir et dans les assemblées de pénitence. C'est à qui cherchera la protection de ce signe admirable. Qu'y a-t-il d'étonnant ? Le signe de la croix est le symbole de notre délivrance, le monument de la liberté du monde , le souvenir de la mansuétude du Seigneur- Quand tu le fais, songe au prix qui a été compté pour ta rançon, et tu ne seras esclave de personne. Fais-le donc, non pas seulement avec ton doigt, mais avec ta foi. Si tu le graves ainsi sur ton front, il n'y a pas d'esprit immonde qui puisse tenir devant toi. Il voit le coutelas qui l'a blessé, l'épée qui l'a frappé à mort. Si à la vue des lieux patibulaires, nous sommes saisis d'horreur : pense à ce que doivent souffrir Satan et ses anges, en voyant l'arme dont le Verbe éternel s'est servi , pour abattre leur puissance et couper la tête du dragon. »


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LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix Empty Re: LE SIGNE DE LA CROIX - Par Mgr Gaume - Puissance de la Croix

Message par MichelT Ven 5 Mai 2017 - 0:55

DIX-SEPTIÈME LETTRE. ( extraits)

Résumé. — Nature du signe de la croix. — Le cas qu'on en fait aujourd'hui. — Ce qu'annonce l'oubli, le mépris du signe de la croix. — Spectacle du monde actuel. — Satan revient. — Rester fidèle au signe de la croix. — Surtout avant et après les repas. — La raison, l'honneur, la liberté le commandent. — La raison est-elle pour ou contre ceux qui font le signe de la croix sur la nourriture : exemples et raisonnements.

Arme universelle, arme invincible pour l'homme, paratonnerre pour les créatures, souvenir de liberté pour le monde et monument de victoire pour le Verbe Rédempteur : tel fut, mon cher Frédéric, le signe de la croix aux yeux des premiers chrétiens. De là, l'usage qu'ils en faisaient, les sentiments qu'il leur inspirait, le magnifique spectacle auquel nous venons d'assister.

Avons-nous conservé la foi de nos Pères? Pour les chrétiens du dix-neuvième siècle, qu'est-ce que le signe de la croix? Quel usage en font-ils pour eux-mêmes et pour les créatures? Sont-ils bien vifs, sont-ils même réels les sentiments de foi , de confiance , de respect , de reconnaissance et d'amour qu'il éveille en eux? La plupart de ceux qui le font ne le font-ils pas sans savoir ce qu'ils font, et sans y attacher ni grande valeur, ni grande importance? Combien qui ne le font plus? Combien qui rougissent de le faire? Combien même dont il fatigue les regards?

Et ils l'ont ôté du faîte de leurs maisons; ils l'ont banni de leurs appartements; ils l'ont effacé de leurs meubles. Ils l'ont fait disparaître des places publiques et des promenades de leurs cités, des jardins et des parcs de leurs villas, des chemins de leurs villages, de la plupart des lieux, où nos pères l'avaient arboré : ils ont brisé les croix !

Qu'est-ce que cela? Et qu'annoncent de pareils symptômes? Veux-tu le savoir? Remonte au principe qui illumine toute l'histoire : Deux esprits opposés se disputent l'empire du monde : l'Esprit du bien et l'Esprit du mal. Tout ce qui se fait est d'inspiration divine, ou d'inspiration satanique.

Mais si le signe de la croix pratiqué, répété, chéri, regardé comme ; l'arme invincible, universelle, permanente, nécessaire de l'humanité contre Satan, ses tentations et ses anges, est une inspiration divine : que veux -tu que je pense d'un monde qui ne comprend plus le signe de la croix, qui ne fait plus le signe de la croix, qui méprise le signe de la croix, qui rougit du signe de la croix, qui ne salue plus la croix, qui n'en veut plus ni devant ses yeux, ni à la face de son soleil?

A moins que la nature humaine n'ait radicalement changé et que le dualisme ne soit une chimère ; à moins que Satan ne se soit retiré du combat; à moins que les créatures n'aient cessé d'être les véhicules de ses funestes influences : le chrétien d'aujourd'hui, contempteur du signe de la croix, n'est plus que le rejeton dégénéré d'une noble race.

C'est un rationaliste insensé qui ne comprend plus la lutte ni les conditions de la lutte ; le dix-neuvième siècle, un soldat présomptueux qui, après avoir brisé ses armes et jeté son armure, se précipite en aveugle au milieu des épées et des lances, les bras liés et la poitrine nue ; la société moderne , une ville démantelée , environnée d'ennemis innombrables, impatients d'en faire une ruine et de passer la garnison par les armes.

Le signe de la croix de moins dans le monde , c'est Satan de plus. Le signe de la croix est le paratonnerre du monde; ôtez-le et la foudre tombe qui vous écrase et qui vous brûle. Le signe de la croix est un trophée qui atteste la domination du vainqueur. Le briser, c'est réjouir l'antique tyran de l'humanité et lui préparer la voie du retour.

Écoute ce qu'écrivait , il y a dix-sept siècles, un des hommes qui ont le mieux connu la mystérieuse puissance du signe de la croix. J'ai nommé le martyr, illustre entre tous les martyrs, saint Ignace d'Antioche. Contemple cet évêque, à cheveux blancs, chargé de fers, franchissant six cents lieues pour aller se faire dévorer par les lions , sous les yeux de la grande Rome. Le vois-tu, calme comme s'il était à l'autel, joyeux comme s'il se rendait à une fête, semant sur sa route des instructions et des encouragements pour les églises d'Asie, accourues à son passage?

Dans son admirable lettre aux chrétiens de Philippes, il dit : « Le prince de ce monde se réjouit , lorsqu'il voit quel qu'un renier la croix. Il sait que c'est la croix qui lui donne la mort ; car elle est l'arme destructive de sa puissance. Sa vue lui fait horreur, son nom l'épouvante. Avant qu'elle fût faite, il ne négligea rien pour la faire fabriquer. A cette œuvre il poussa les fils d'incrédulité, Judas, les Pharisiens, les Sadducéens, les vieillards, les jeunes gens, les prêtres.

Mais lorsqu'il la voit sur le point d'être achevée, il se trouble. Il jette le remords dans l'âme du traître; il lui présente la corde et le pousse à se pendre. Il épouvante par un songe pénible la femme de Pilate, et fait tous ses efforts pour empêcher la confection de la croix. Ce n'est pas qu'il eût des remords; s'il en avait, il ne serait pas complètement mauvais; mais il pressentait sa défaite. Il ne se trompait pas. La croix est le principe de sa condamnation, le principe de sa mort, le principe de sa ruine. »

Ainsi deux enseignements : Horreur et crainte du démon (ange déchu) à la vue de la croix et du signe de la croix; joie du démon, à l'absence de l'une et de l'autre. Voit-il une âme, un pays sans le signe de la croix, il y entre sans crainte, il y est à l'aise. Aussi inévitablement qu'au coucher du soleil les ténèbres succèdent à la lumière, aussi inévitablement il y rétablit son empire. Le monde actuel en est la preuve sensible.

Je ne parle pas de ce déluge de négations , d'impiétés , de blasphèmes inouïs, dont il est inondé. Que sont, pour qui ne veut pas se payer de mots, ces millions de tables tournantes et parlantes, ces esprits frappeurs ou familiers, ces apparitions, ces évocations, ces oracles, ces consultations médicales, ces conversations avec de prétendus morts, qui ont tout à coup envahi l'ancien et le nouveau monde ?

Ces choses sont- elles nouvelles? Non; déjà l'humanité les a vues. A quelle époque? Alors que le signe de la croix ne protégeait pas le monde, et que Satan était Dieu et Roi des sociétés. En reparaissant aujourd'hui, dans des proportions inconnues depuis l'ancien paganisme, que nous disent-elles? sinon que le signe libérateur cessant de protéger le monde , Satan en reprend possession. Tu vois, cher ami, combien peu sont intelligents ceux qui abandonnent le signe de la croix. Plaignons-les, mais ne les imitons pas. Entre toutes, il est une circonstance où il faut invariablement nous séparer d'eux. Pour nous, comme pour nos pères, le signe de la croix, avant savoir, font publiquement ce qu'on faisait, il y a deux mille ans, à Delphes, à Dodone, à Synope, dans toutes les villes de l'antiquité païenne. Les choses en sont venues à ce point que plusieurs évêques se sont vus forcés de prémunir par de nouveaux mandements, le clergé et les fidèles de leurs diocèses , contre l'envahissement satanique.

La raison. Si tu demandes à tes camarades pourquoi ils ne font pas le signe de la croix avant de prendre leur nourriture , chacun te dira : « Je ne veux pas me singulariser, en faisant autrement que les autres. Je ne veux pas me faire remarquer et moquer de moi, en observant une pratique inutile et passée de mode.»

Ils ne veulent pas se singulariser! Pour leur honneur, je veux croire qu'ils ne comprennent pas la valeur des mots. Se singulariser veut dire se mettre au singulier, s'isoler, ne pas faire comme tout le monde. Dans ce sens, on peut très-bien se singulariser sans être ridicule; quelquefois même on est obligé de le faire, sous peine d'être coupable. Au milieu d'un hôpital de fous, l'homme raisonnable qui fait des actes sensés ; dans un pays de voleurs, l'honnête homme qui respecte la propriété d'autrui, se mettent au singulier. Sont-ils ridicules?

Que l'élite de l'humanité ait toujours fait le signe de la croix avant de manger, rien n'est mieux établi. Les Pères que je t'ai cités , Tertullien , saint Cyrille , saint Éphrem, saint Chrysostôme, ne laissent aucun doute sur l'universalité de cette religieuse pratique , chez les chrétiens de la primitive Église. J'en ajoute quelques autres, a Lorsqu'on se met à table, dit saint Athanase, et qu'on prend le pain pour le rompre, on fait dessus trois signes de croix et on rend grâces . »

La bénédiction de la table par le signe de la croix n'était pas en usage seulement dans les familles et dans la vie civile; les soldats eux-mêmes, dans la vie des camps, l'observaient avec une religieuse fidélité. A ce propos, saint Grégoire de Nazianze rapporte un fait demeuré célèbre. Julien l'Apostat gratifie ses troupes d'une distribution extraordinaire de vivres et d'argent. Près de l'empereur est une cassolette allumée. Chaque soldat y laisse tomber quelques grains d'encens. Les soldats chrétiens le font comme les autres, sans soupçonner qu'ils se rendaient coupables d'un acte d'idolâtrie. La distribution terminée, on se réunit pour fêter le prince. Au commencement du repas, la coupe est présentée à un soldat chrétien qui, suivant l'usage, la bénit par le signe de la croix. Aussitôt une voix s'élève qui lui crie : Ce que tu fais répugne à ce que tu viens de faire. — Qu'ai-je fait? — As-tu donc oublié l'encens et la cassolette? Ne sais-tu pas que tu as fait un acte d'idolâtrie et renié ta foi?

A ces mots, lui et ses braves compagnons d'armes se lèvent de table, poussent des gémissements, s'arrachent les cheveux, sortent sur la place, se déclarent hautement chrétiens, accusent l'empereur de les avoir indignement trompés, et demandent une nouvelle épreuve pour confesser leur foi. L'apostat les fait arrêter, lier, condamner à mort, et conduire au lieu du supplice. Mais pour ne pas faire de martyrs , il leur accorde la vie et les relègue aux frontières les plus reculées de l'empire.

On regardait la bénédiction de la table comme tellement sainte, que nous voyons encore, au neuvième siècle, les Bulgares, convertis à la foi , demander au pape Nicolas Ier, si le simple fidèle pouvait remplacer le prêtre dans cette fonction. « Sans aucun doute, répondit le pape; car il a été donné à chacun de préserver par le signe de la croix, tout ce qui lui appartient, des embûches du démon, et par le nom de Notre-Seigneur de triompher de toutes ses attaques. »


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Message par MichelT Ven 5 Mai 2017 - 0:58

VINGT-DEUXIÈME LETTRE. ( extraits)

Prononcé du jugement entre nous et les premiers chrétiens. — Première obligation, faire résolument le signe de la croix, le faire souvent et le bien faire. — Faisons le résolument. — Honte et dangers de ne pas le faire. — État de la santé physique et morale du monde actuel. — Impossibilité pour l'homme de ne pas porter le signe de Dieu ou le signe du démon. — Ce qu'est le signe du démon.

Lorsque, dans les affaires civiles, un jugement sans appel est rendu, que reste-t-il aux parties? une seule chose. Sous peine de révolte et de toutes les conséquences de la révolte, elles doivent s'exécuter. II en est de même dans les questions de doctrine. Lorsqu'une autorité infaillible a décidé un point en litige, il reste une seule chose.

Sous peine d'une révolte bien plus grave, et de toutes les conséquences de cette révolte, il faut prendre pour règle de conduite l'arrêt du tribunal suprême. Un procès était engagé entre nous et les premiers chrétiens. Il s'agissait de savoir qui avait tort ou raison : des premiers chrétiens qui faisaient le signe de la croix, qui le faisaient très-souvent , qui le faisaient bien; ou des chrétiens modernes, qui ne font plus le signe de la croix, qui le font rarement, qui le font mal.

La cause a été soigneusement examinée ; les débats ont été publics, les plaidoyers entendus. Constituée en tribunal souverain, l'élite de l'humanité, ayant pour assesseurs : la foi, la raison, l'expérience, les peuples, même païens, a prononcé en faveur des chrétiens de la primitive Église.

Que nous reste-t-il ? II nous reste à renouer la glorieuse chaîne de nos antiques traditions , si malheureusement rompue , et à faire résolument le signe de la croix , le faire souvent et à le bien faire. Faire résolument, ostensiblement le signe de la croix. Et pourquoi ne le ferions nous pas ainsi? Pourquoi rougirions-nous de le faire? Remarque bien, mon cher ami , que faire ou ne pas faire le signe de la croix, n'est pas une chose facultative.

Qui le fait s'honore , qui ne le fait pas se déshonore. En faisant le signe de la croix, nous avons derrière nous, autour de nous, avec nous, tous les grands hommes et tous les grands siècles de l'Orient et de l'Occident, toute l'immortelle nation catholique.

En faisant le signe de la croix, nous nous couvrons, nous et les créatures, d'une armure invincible. En ne le faisant pas , nous nous désarmons et nous nous expo sons, nous et les créatures, aux plus graves périls. L'homme et le monde vivent nécessairement sous l'influence de l'Esprit du bien , ou sous l'influence de l'Esprit du mal. Maître de l'homme et des créatures, l'Esprit du mal leur fait sentir ses malignes influences : le corps et l'âme , l'esprit et la matière en sont viciés. Sur cette vérité fondamentale a vécu le genre humain.

Aussi, depuis dix-huit siècles surtout, les chefs de l'éternel combat n'ont qu'une voix, pour nous crier de nous couvrir, nous et les créatures, du signe de la croix : bouclier impénétrable aux flèches enflammées de l'ennemi. Et, soldats infidèles à la consigne, nous jetterions volontairement notre armure ! Et, la poitrine nue, nous resterions stupidement exposés aux coups mortels de l'armée ennemie ! Tout cela pour ne pas déplaire aux autres : et quels autres?

Je te rappelle seulement que l'homme moral, comme l'homme physique, est dans l'alternative inévitable de vivre sous l'influence salutaire du bon Esprit, ou sous l'influence malfaisante du mauvais Esprit. Le signe de la croix nous place sous la première, l'absence du signe de la croix nous abandonne à la seconde. Tel est encore l'enseignement de l'Église, confirmé par la pratique des siècles chrétiens. Cette expérience de dix-huit cents ans, n'est rien pour vous. Vous ne voulez plus du signe libérateur. Vous n'y avez plus de foi. Vous n'en marquez plus ni votre front, ni vos lèvres , ni votre cœur, ni vos aliments.

Eh bien ! le démon ( l`ange déchu) y marquera le sien. Sur tous ces fronts, sur toutes ces lèvres, sur tous ces cœurs , sur tous ces aliments , on verra, sans avoir besoin de microscope, le signe de la bête. Quel est le signe de la bête sur le front? C'est l'orgueil , l'insubordination, la colère, le mépris, l'effronterie, la vanité, l'agitation des traits; l'inaptitude aux sciences spiritualistes, le dégoût des études morales; les joues décolorées par le vice impur ou brûlées par le vin ; quelque chose d'épais dans la physionomie, de bas, de terne , de bestial ; enfin, ce cynisme des yeux pleins d'adultère, pleins d'un péché qui ne finit pas, et provocateurs incessants des âmes inconstantes.

Quel est-il sur les lèvres? Le rire immodéré ou impudique, niaisement impie ou cruellement moqueur; la loquacité sans règle, sans importance et sans but; les paroles obscènes, les paroles de mensonge, d'irréligion, de blasphème, de haine, de médisance, de jalousie, le trop plein des concupiscences qui sort en écume , infecte comme les exhalaisons d'un sépulcre, meurtrière comme le venin de la vipère.

Quel est-il sur le cœur? Les mauvaises pensées , les mauvais désirs , les fornications, les impuretés, les trahisons, les honteuses petitesses de l'égoïsme, les vols, les empoisonnements, les meurtres, le règne des courtisanes.

Cherche les fronts , les lèvres , les cœurs , les tables, où se conservent la sainteté, la dignité, la sobriété de l'homme et du chrétien; les vies mortifiées et pures; les vies fortes contre les tentations ; les vies dévouées à la charité et à la vertu; les vies qui peuvent sans rougir se révéler aux amis et aux ennemis : tu ne les trouveras que sous la protection du signe de la croix.


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Message par MichelT Ven 5 Mai 2017 - 1:07

VINGT-TROISIÈME LETTRE.  ( Extraits)

Raisons de la puissance et de la haute mission du signe de la croix. — Dogme fondamental. — Ce qui se passe dans l'ordre politique, image de ce qui a lieu dans l'ordre moral. — La Réforme, première fille de la Renaissance du paganisme, abat toutes les croix. — La Révolution française, seconde fille du paganisme, imite sa sœur. — Seconde obligation ; faire souvent le signe de la croix. — Raisons prises de l'état actuel . — Troisième obligation : bien faire le signe de la croix: condition. — Le signe de la croix signe éternel de victoire. — Constantin. — Louanges du signe de la croix.

Tu n'oublies pas, mon cher Frédéric, que nous tirons les conséquences, pratiques du jugement rendu entre nous et nos aïeux. La première est que nous devons faire résolument le signe de la croix. Bien que la décision sans appel du tribunal suffise à déterminer notre conduite, j'ai voulu pour la rendre plus respectable, te montrer la honte, les dangers et les malheurs qui seraient la conséquence d'une révolte théorique ou pratique.

Les faits ont parlé. Tu as vu le signe de la bête, gravé sur les fronts, sur les lèvres, sur les cœurs, sur les aliments que ne sanctifie pas le signe divin. D'où cela vient-il? J'ai promis de le dire. Que le signe de la bête soit inévitablement marqué sur tout homme et sur toute chose , que ne protège pas le signe libérateur de l'homme et du monde , il n'en peut-être, il n'en pourra jamais être autrement. Pour l'homme, il n'y a qu'un préservatif du démon (ange déchu), comme pour le monde il n'y a qu'un paratonnerre : c'est le signe de la croix. Là où il n'est pas, Satan est le maître.

Ce fait tient, comme nous l'avons plusieurs fois répété , au dogme le plus profond, et tout ensemble le plus incontestable , de l'humanité : l`asservissement de l'homme et du monde à l'Esprit du mal , depuis la chute originelle. Pour rendre palpable ce que je dis de la haute mission du signe de la croix, laisse-moi te rappeler quelques faits historiques trop peu remarqués.  Ce qui se passe dans l'ordre politique, n'est qu'un reflet de ce qui a lieu dans l'ordre moral. Or, lorsqu'une dynastie est sur le trône, elle a soin d'arborer partout son étendard, et de graver ses armoiries.

C'est le signe de sa domination. Vient-elle à être renversée? Le premier acte du vainqueur est d'abolir les emblèmes de la dynastie vaincue, et de les remplacer par les siens. Ainsi s'annonce aux yeux des peuples, l'inauguration du nouveau règne. Combien de fois, depuis soixante-dix ans, n'avons nous pas vu, en France et ailleurs, ce changement de couleurs et d'écussons !

En venant reprendre possession de son royaume, le Verbe incarné trouva Satan roi et dieu du monde. Les statues, les trophées, les armoiries , le blason de l'usurpateur étaient partout. Vaincu, tous ces signes de domination disparurent. A leur place brilla le blason du vainqueur, la croix. Quand, pour ses crimes, une âme ou un pays est de nouveau abandonné à Satan et qu'il en prend possession , le premier acte de l'usurpateur est de faire disparaître le signe de la croix. C'est alors, et alors seulement, que n'ayant plus à craindre ce signe redoutable, il agit en maître.

Sous les coups de hordes fanatisées, le 10 août 1792 vit s'écrouler dans le sang le trône et l'autel. Les massacres des Carmes et de Saint-Firmin, la proclamation de la république, l'assassinat de Louis XVI, les hécatombes de la Terreur, les immondices du Directoire, les apostasies, les sacrilèges, les déesses de la Raison, ne furent que les conséquences de cette lamentable journée. Éternellement elle marque l'heure précise où Satan fit sa rentrée triomphante dans le royaume très-chrétien.

Or, en ce moment, écrit un historien de cette époque, un orage sans exemple éclatait sur Paris. Une chaleur lourde et morte avait tout le jour étouffé la respiration. D'épais nuages, marbrés, vers le soir, de teintes sinistres , avaient comme englouti le soleil dans un océan suspendu. Vers dix heures, l'électricité se dégagea par des milliers d'éclairs, semblables à des palpitations lumineuses du ciel. Les vents , emprisonnés derrière ce rideau de nuages, s'en dégagèrent avec le mugissement des vagues, courbant les moissons , brisant les branches des arbres, emportant les toits. La pluie et la grêle retentirent sur le sol comme si la terre eût été lapidée d'en haut. Les maisons se fermèrent. Les rues et les routes se vidèrent en un instant.

La foudre , qui ne cessa d'éclater et de frapper, pendant huit heures de suite, tua un grand nombre de ces hommes et de ces femmes, qui viennent la nuit approvisionner Paris . Des sentinelles furent trouvées foudroyées dans la cendre de leurs guérites. Des grilles de fer, tordues par le vent et par le feu du ciel, furent arrachées des murs où elles étaient scellées par leurs gonds, et emportées à des distances incroyables.

Les deux dômes naturels qui s'élèvent au-dessus de l'horizon de la campagne de Paris, Montmartre et le mont Valérien, soutirèrent en plus grande surface le fluide, amoncelé dans les nues qui les enveloppaient. Le tonnerre, s'attachant de préférence à tous les monuments isolés et couronnés de fer, abattit toutes les croix qui s'élevaient dans la campagne, aux carrefours et routes, depuis la plaine d'Issy et les bois de Saint-Germain et de Versailles jusqu'à la croix du pont de Charenton.

Le lendemain, les bras de ces croix jonchaient partout le sol, comme si une armée invisible eût renversé, sur son passage, tous les signes répudiés du culte chrétien.  Il n'y a pas de hasard dans l'ordre moral, pas plus qu'il n'y a de saut dans la nature. Les faits que je viens de rappeler ont donc une signification. Or, les circonstances qui les ont accompagnés et suivis prouvent jusqu'à l'évidence, la raison d'être du signe de la croix dans un pays, ou sa raison de n'être pas.

Elles prouvent encore aux nations, aux provinces, aux villes, aux campagnes, aux hommes quels qu'ils soient, combien il leur importe de conserver, de multiplier, d'honorer le signe protecteur de la création tout entière.

Faire le signe de la croix souvent est la deuxième conséquence pratique du jugement rendu. Et pourquoi ne le ferions-nous pas? Pourquoi chacun, en ce qui le concerne, ne reviendrait-il pas à la pratique de nos pères ? Ils ne se croyaient pas en sûreté, même un instant, même dans les actions les plus ordinaires de la vie , s'ils n'étaient protégés par le signe salutaire.

Sommes-nous plus forts qu'eux ? Nos tentations sont-elles moins nombreuses ou moins vives , nos dangers moins pressants, nos obligations moins grandes? Chaque fois que nos pères sortaient de leurs demeures, leurs yeux étaient offensés par la vue de statues, de peintures, d'objets obscènes, d'usages et de fêtes, où l'Esprit du mal éclatait de toutes parts.

Quels discours , quelles conversations, quels chants frappaient leurs chastes oreilles? Sous toutes les formes les plus séduisantes, le sensualisme et le naturalisme des idées et des mœurs publiques et privées, étaient une conspiration permanente contre le surnaturalisme de leur vie , contre leur esprit de mortification, de simplicité, de pauvreté , de détachement .

Puis, ils avaient à défendre leur foi contre les sarcasmes, les mépris et les sophismes de la plèbe et de la philosophie païenne. Ils avaient à en répondre devant les juges et à la certifier dans les amphithéâtres. Pour se sauver de tant de périls, quel était leur secret? Le signe de la croix, toujours le signe de la croix. Et nous, catholiques du dix-neuvième siècle, quelle est notre condition? Tout, ou presque tout ce qui nous entoure, n'est-il pas redevenu païen ? Où trouver un mot d'évangile dans la plupart des hommes et des choses ? Comme celles d'autrefois, les villes de l'Europe actuelle ne sont-elles pas inondées de statues , de tableaux , de gravures, d'objets capables d'allumer, dans les âmes les plus froides, les feux impurs de la concupiscence?

Dans les rues, dans les salons, dans les lectures quotidiennes , de quoi sont frappées nos oreilles ?

Un pareil spectacle n'est-il pas un piège continuel ? Malheur à qui ne le verrait pas ! Malheur surtout à qui ne veillerait pas, nuit et jour, sur son cœur et ses sens ! S'il est difficile de défendre nos mœurs, quelle guerre nous avons à soutenir pour sauvegarder notre foi ! Ne vivons-nous pas à une époque où les idées fausses , les mensonges , les sophismes circulent dans la société, nombreux comme les atomes de l'air? Partout sont les amphithéâtres où nous devons combattre pour l'Église, pour nos croyances, pour nos traditions, pour nos usages, pour le surnaturalisme chrétien. L'arène n'est jamais fermée ; et un combat n'est pas fini qu'un autre recommence.

Placés dans les mêmes -conditions que nous, les premiers chrétiens n'ont connu qu'une arme victorieuse , une arme universelle, familière à tous, et dont ils faisaient un usage continuel : c'est le signe de la croix. En avons-nous une meilleure ?

Bien faire le signe de la croix, est la troisième application de la sentence prononcée. La régularité, le respect, l'attention, la confiance, la dévotion, doivent accompagner notre main, lorsqu'elle forme le signe adorable. La régularité ; elle veut que le signe de la croix, dans sa forme parfaite, se fasse suivant la loi traditionnelle, c'est à-dire de la main droite , et non de la main gauche, en portant lentement la main du front à la poitrine, de la poitrine à l'épaule gauche, puis à la droite, en prononçant le nom des trois personnes de l'auguste Trinité. Rien de tout cela n'est arbitraire.

S'ils sortaient de leurs tombeaux , c'est ainsi que les chrétiens des temps apostoliques feraient le signe de la croix. Écoutons un témoin oculaire : « Nous faisons le signe de la croix de la main droite sur les catéchumènes, dit saint Justin , parce que la main droite est censée plus noble que la gauche, bien qu'elle n'en diffère que par sa position, et non par sa nature ; ainsi , nous prions tournés vers l'orient, comme étant la partie la plus noble de la création. De qui l'Église a-t-elle reçu cette manière de prier? De ceux-là mêmes qui lui ont appris à prier : les Apôtres. »

On cite deux manières de tenir la main en faisant le signe de la croix. La première consiste à étendre les trois premiers doigts, en fermant les deux autres. Cette manière, qui exprime distinctement le mystère de la Sainte Trinité, était encore très-usitée au treizième siècle. La seconde consiste à étendre les cinq doigts de la main. Elle rappelle les cinq plaies de N.-S. Aujourd'hui elle est seule en usage dans
l'église d'occident.

Le respect est une autre condition pour bien faire le signe de la croix. Le respect ; parce que c'est un acte de religion quatre fois vénérable : par son origine, par son antiquité , par l'usage qu'en a fait tout ce que le monde a vu de plus grand et de plus saint, les apôtres, les martyrs, les vrais catholiques de la primitive Église et de tous les siècles ; par la gloire dont il brillera au dernier jour du monde, lors que, annonçant l'arrivée du souverain Juge, il apparaîtra dans les nues, éclatant de lumière, et viendra majestueusement se placer à côté du tribunal suprême , pour la consolation des justes et la confusion éternelle des méchants.

L'attention ; sans elle le signe rédempteur n'est plus qu'un mouvement machinal, trop souvent inutile à nous-mêmes et peut-être injurieux à celui dont il rappelle la majesté, l'amour et les bienfaits. La confiance ; mais une confiance filiale, vive , forte , fondée sur le témoignage des siècles, sur la pratique de l'Église, sur les effets merveilleux produits par ce signe , redoutable au démon (ange déchus) et libérateur de l'homme et du monde.

La dévotion, qui met le cœur à l'unis son des lèvres. En faisant le signe de la croix, que fais-je? Je me proclame le disciple , le frère , l'ami , l'enfant d'un Dieu crucifié. Sous peine de me mentir et de mentir à Dieu, je dois être ce que je dis. Écoute nos pères. « Lorsque tu te signes, songe à tous les mystères renfermés dans la croix. Il ne suffit pas de la former simplement avec le doigt, il faut auparavant la faire avec la foi et la bonne volonté... Lorsque tu marques du signe de la croix ta poitrine, tes yeux et tous tes membres, offre-toi en hostie agréable à Dieu.»

Former le signe de la croix et pécher, qu'est-ce faire ? C'est placer le signe de la vie sur sa bouche et s'enfoncer le poignard dans le cœur.  De là , ce proverbe des premiers chrétiens : Frères , ayez Jésus-Christ dans le cœur, et son signe sur le front.

De là encore , ce mot de saint Augustin : « Dieu demande non des peintres, mais des opérateurs de ses mystères. Si vous portez sur votre front le signe de l'humilité de Jésus-Christ , portez dans votre cœur l'imitation de l'humilité de Jésus-Christ . »

Nous avons toute raison d'en agir ainsi. Que nul ne dise : Faire bien ou mal le signe de la croix, c'est peu de chose. Autrement ont pensé les siècles chrétiens; autrement pense encore l'Église catholique, la maîtresse de la vérité; autrement a pensé la vérité en personne. En admettant même qu'un signe de croix est peu de chose, le Verbe incarné n'a-t-il pas dit : Celui qui est fidèle aux petites choses, sera fidèle aux grandes; comme celui qui est infidèle aux petites choses, sera infidèle aux grandes?

N'est-ce pas cette fidélité journalière qui forme la vie chrétienne et prépare la fortune éternelle? Dans l'affaire du salut, comme dans toute autre affaire , ce qui suffit ne suffit pas. Qui ne veut faire que le nécessaire, ne le fera pas longtemps. Dix fois le jour, je fais le signe de la croix. S'il est bien fait, voilà dix bonnes œuvres de plus, dix degrés de gloire et de bonheur de plus pour toute l'éternité. Voilà dix pièces de monnaie de plus pour payer mes dettes ou celles de mes frères de la terre et du purgatoire ; dix instances de plus pour obtenir la conversion des pécheurs et la persévérance des justes, éloigner du monde et des créatures les maladies, les dangers et les fléaux. Calcule la somme de mérites accumulés à la fin d'une semaine, d'une année, d'une vie de cinquante ans. Et on dira que cela est peu de chose !

In hoc vince, par ce signe tu vaincras. Ce mot divin est toujours ancien et toujours nouveau, car il est la formule d'une loi. Constantin, qui le premier mérita de l'entendre, est le type de l'homme. Le grand empereur s'avançait à marches forcées pour combattre Maxence, affreux tyran qui s'était emparé de la capitale du monde.

Tout à coup, par un temps serein, un peu après l'heure de midi, le signe de la croix paraît dans les airs, étincelant de lumière et se fait voir à Constantin et à toute son armée, avec cette inscription : Parce signe tu vaincras, In hoc vince. La nuit suivante, le Fils de Dieu apparaît à l'empereur, tenant en main le signe de la veille et lui ordonne d'en faire un semblable , dont il se servira dans les combats, avec promesse de la
victoire.

Constantin obéit. Le signe céleste , resplendissant d'or et de pierreries, brille aux regards des légions et devient le célèbre Labarum. Partout où paraît cette enseigne, la confiance anime les soldats de Constantin et épouvante ceux de Maxence. Les aigles romaines fuient devant la croix : le paganisme devant le christianisme ; Satan, le vieux tyran de Rome et du monde, devant Jésus-Christ, sauveur de Rome et du monde. Il en devait être ainsi. Maxence défait et noyé, Constantin entre dans Rome. Une statue le représente tenant la croix à la main, avec cette inscription qu'il dicte lui-même : « C'est par ce signe salutaire, vrai symbole de force, que j'ai délivré votre ville du joug de la tyrannie et que, rendant la liberté au sénat et au peuple romain, je les ai rétablis dans leur ancienne majesté et leur ancienne splendeur. »

Comme au fils de Constance, Dieu nous donne le même moyen de vaincre : le signe de la croix. Aujourd'hui comme autrefois, ce signe est la terreur des démons (anges déchus) Faisons-le avec foi, et le chemin de la Ville éternelle nous est ouvert.

Vainqueurs, et vainqueurs pour toujours, notre reconnaissance élèvera, aux regards des anges et des élus, une statue portant l'inscription constantinienne : C'est par ce signe salutaire , vrai symbole de force, que j'ai vaincu le démon, dé livré mon âme et mon corps de sa tyrannie , et qu'en rendant à mes sens , à mes facultés, à mon être tout entier la liberté véritable, je les ai établis pour toute l'éternité dans les splendeurs d'une gloire sans mélange et sans limites.

Salut donc, dirai-je en empruntant la voix des Pères et des Docteurs de l'Orient et de l'Occident, salut, signe de la croix ! Étendard du grand Roi, immortel trophée du Seigneur, signe de vie, signe de salut, signe de bénédiction, épouvante de Satan et des légions infernales , rempart inexpugnable, armure invincible, bouclier impénétrable , épée royale , honneur du front, espérance des chrétiens, remède des malades, résurrection des morts, guide des aveugles, soutien des faibles, consolation des pauvres, joie des bons, effroi des méchants, frein des riches, ruine des superbes, juge des injustes, liberté des esclaves, gloire des martyrs, chasteté des vierges, vertu des saints, fondement de l'Église.

Fin

MichelT

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