PARABOLE DE LA VIGNE DU SEIGNEUR - L`Enseignement Catholique de 1863
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PARABOLE DE LA VIGNE DU SEIGNEUR - L`Enseignement Catholique de 1863
PARABOLE DE LA VIGNE DU SEIGNEUR
Par M. l'abbé GAUREL. - L`Enseignement Catholique de 1863
Que faites -vous là toute la journée sans travailler ? Allez vous aussi à ma vigne . ( Mathieu ch. 20,6)
Mes frères, Les philosophes païens, dont la science était si fausse , sont tombés dans diverses erreurs touchant la fin de l'homme . Les uns la plaçaient dans la contemplation des grandes et des sublimes choses ; d'autres dans la joie de l'esprit ; ceux- ci dans la richesse et dans l'abondance des biens qu'elle procure ; ceux- là dans la tranquillité de l'âme; quelques-uns dans la santé du corps . De sorte que si vous vous étiez successivement adressé à chacun d'eux et que vous lui eussiez dit : Pourquoi es- tu dans ce monde ? l'un vous eût répondu : pour jouir de ma santé ; celui- ci : Pour y manger, boire et m'amuser.
A Dieu ne plaise qu’un chrétien délire à ce point que de faire de semblables réponses. La foi chrétienne nous enseigne, en effet, que la fin de l'homme est bien plus élevée. Quelle est cette fin ? L'Évangile nous la fait connaître : c'est de travailler à la vigne du Seigneur, et d'obtenir , par ce travail, le denier de la vie éternelle. Le céleste Père de famille appelle à ce labeur les hommes de toutes les conditions et de tous les âges, le riche et le pauvre , l'enfant et l'adolescent, l'homme fait et le vieillard . Je vous disais tout à l'heure à quel point les païens s'éloignaient de leur véritable fin ; savez- vous , quels sont ceux, parmi les chrétiens, qui s'en éloignent encore davantage ? Ce sont les pécheurs. C'est bien à eux qu'on peut jeter à la face ces mots du Père de famille : Que faites - vous donc là tout le jour dans l'oisiveté ? Toute chose; en effet, qui n'est pas bonne pour la fin qui lui est assignée est inutile, comme, par exemple , un couteau qui ne couperait pas, un champ qui ne fructifierait pas, un cheval qui ne pourrait ni traîner un char, ni porter son cavalier . Toutes ces choses, je le répète, sont inutiles , et on n'en a que faire.
De même, l'homme qui passé sa vie dans le péché, qui s'est rendu inapte au service de Dieu , qui n'a aucun goût pour les choses d'en haut, est un être oisif. Je puis donc aujourd'hui me servir, en m'adressant aux pécheurs, des paroles que le Père de famille adresse aux ouvriers de notre Évangile : Que faites - vous là toute la journée sans travailler ? De ce que je viens de dire , il s'ensuit, Chrétiens, Chrétiennes, que la fin de l'homme comprend deux choses : le service de Dieu en ce monde et, dans l'autre, la gloire qui en est la récompense. Le pécheur se soustrait honteusement à cet ordre de dispensation , d'abord dans cette vie en refusant de suivre la Loi du Seigneur (10 Commandements), et puis dans l'autre en se frustrant lui-même des prix réservés à la vertu . Je vais tâcher de porter la lumière dans ces choses déjà si claires. La raison naturelle suffit pour comprendre que de toutes les choses créées, il n'en est pas une seule qui soit créée pour elle -même. Toutes, sans exception , se trouvent, vis-à -vis les unes des autres, dans une subordination pleine de beauté.
Considérons les plus humbles : Ce nuage qui passe , existe-t - il pour lui- même ? Non, il doit se résoudre en pluie, salutaire. Et cette pluie ? Elle a mission d’humecter la terre, et par la suite, de la féconder. Et cette fécondation , a-t -elle une fin ? Oui, certes, celle de faire germer des moissons, de toutes sortes ; et ces moissons, à leur tour, ont pour fin de nourrir les animaux et les hommes. Il faut raisonner de même, pour toutes les autres créatures, et dire sans exception de toutes qu'elles existent pour une fin : le soleil pour éclairer le monde, la lune pour orner, la nuit et en chasser les ténèbres, l'eau pour étancher la soif, les fruits de toutes sortes pour être un aliment à la faim . Et c'est pourquoi nulle chose créée n'a de repos qu'après avoir atteint la fin qui lui est propre ; l'oiseau enfermé dans une cage, pour si délicatement qu'on le nourrisse, désire en sortir, parce qu'il est né pour la liberté ; le fleuve, arrêté dans sa course , bouillonne, cherche à franchir ses digues, parce qu'il tend vers la mer. ... Je pourrais multiplier les exemples; mais ceux-là suffisent, et je demande maintenant pourquoi l'homme a été créé . Nous venons de voir que toutes les créatures convergent vers l'homme : il est leur fin à toutes. Quelle est donc la sienne ? Il ne peut pas, évidemment, en avoir d'autre que de servir Dieu en ce monde et le posséder ensuite dans une vie meilleure. Or, le pécheur renverse cet ordre admirable, et pendant que toutes les autres créatures tendent vers la fin qui leur est marquée, lui ne veut avoir d'autre fin que lui-même.
Mettons cette pensée dans tout son jour. Le propre de Dieu, c'est une indépendance absolue, c'est de n'être soumis à rien, c'est, en conséquence, d’être à lui-même sa loi. C'est pourquoi lui seul peut vouloir ce qu'il veut d'une volonté propre ; et par là même, cette volonté très-haute, cette volonté suprême est la règle et comme la reine de toutes les autres volontés . Que fait donc le pécheur téméraire ? Ce diadème de la divine indépendance, il ose, pour ainsi dire, l'ôter du front de Dieu pour en couronner le sien . Il semble dire : Quelle est cette volonté souveraine dont vous me parlez ? Je n'en connais pas d'autre que la mienne. C'est ma volonté qui est ma règle et ma loi .
Je ne reconnais pas ce maître dont vous m'entretenez sans cesse . Et passant aussitôt de cette folle théorie à la pratique, il secoue la Loi du Seigneur, se préfère ouvertement lui-même au législateur divin, ce qui n'est rien autre chose que se déclarer Dieu. Nous lisons dans les saintes Écritures que Dieu , avant de faire l'homme, tint conseil en lui-même et dit : «Faisons l'homme à notre ressemblance et à notre image.» Ces paroles n'expriment pas seulement le mode de création , ni la forme de l'âme raisonnable ; elles indiquent aussi quelle est sa fin . Les docteurs entendent généralement par l'image de Dieu son intelligence ou sa connaissance, et par la ressemblance, ils entendent l'amour. Ils concluent de là que la création humaine n'a pas d'autre but que d'imiter et d'exprimer les opérations divines, qui sont de connaître et d'aimer, et que par conséquent, l'homme a été créé à cette fin de connaître Dieu, et en le connaissant, de l'aimer.
Maintenant, Chrétiens, Chrétiennes, supposons que Dieu , après avoir tiré l'homme du néant par sa toute -puissance, lui dise : « Voilà, mon fils Adam, que je t'ai formé du limon de la terre afin que tu sois à mon service ; » et qu’Adam lui réponde: « Je ne vous servirai pas, j'entends vivre indépendant de vous et me suffire à moi-même ; » se pourrait- il, Chrétiens, Chrétiennes, rien de plus impudent, de plus choquant et ingrat? Mais ce qui n'est ici qu'une simple supposition , devient, dans la personne du pécheur, une vérité flagrante. Chaque fois , en effet, qu'il consent au péché, il brise la Loi de Dieu, il se constitue sa fin à lui même, il s'établit son propre législateur. Le prophète Jérémie a déploré cet immense malheur dans ces paroles pathétiques : «Tu as brisé mon joug, tu as rompu mes liens, tu as dit : Je ne servirai point.» Certes, Chrétiens, Chrétiennes, un tel langage serait bien impudent dans une famille; qu'est- il donc de créature à Créateur? J'ai dit que la fin de l'homme comprenait deux choses : le service de Dieu et la gloire éternelle qui en est le prix. Entrons dans ce second point. La vie éternelle, c'est - à -dire, la gloire et le bonheur, voilà le terme sacré vers lequel nous marchons , et auquel nous espérons arriver enfin après le voyage de notre vie . Cette vie mortelle est, en effet, un vrai voyage, suivant l'expression de l'Apôtre et le terme de ce voyage est l'éternel repos, l'éternelle béatitude .
Saint Cyprien appelle le paradis la patrie de l'homme : 0 heureuse patrie ! tu es le laurier du vainqueur après la course haletante ! tu es le denier après le labeur du jour ! tu es le repos après la fatigue ! tu es la consolation après les larmes ! tu es le miel divin après la traversée des flots amers ! Ma patrie, elle est là -haut, à côté de Jésus et de Marie, parmi les saints, tout près des choeurs des bienheureux anges ! Tels ne sont pas, Chrétiens, Chrétiennes, les sentiments du pécheur. Sa patrie, c'est la terre; son bonheur, ce sont les biens qu'il y trouve. Assis sur les fleuves de Babylone (la ville de la Confusion), il rit au lieu de gémir ; l'exil ne lui pèse point, et il voudrait, au contraire, qu'il fût éternel. Il a perdu le goût des vrais biens. Esclave de la matière, il borne, son être à ses propres passions : ce n'est que pour eux qu'il vit , qu'il respire. Au lieu de se proposer pour, modèle l'exemple de Jésus- Christ et des saints, il se modèle sur des hommes nonchalants ou pervers. Il voit que les uns s'enrichissent par des moyens rapides, mais équivoques que les autres poursuivent le plaisir , que ceux-ci passent leur vie dans une molle oisiveté, que ceux- là, se font un Dieu de la bonne chère, et il s'anime du désir de faire comme eux ; il pense qu'ils ont donné dans le but, et que les biens qu'ils poursuivent sont les vrais biens. L'éternelle félicité des cieux ne lui paraît plus qu'un songe. Mais, hélas ! il est bientôt déçu dans ses espérances, et une cruelle expérience lui enseigne que le monde ne tient pas ce qu'il promet.
Nous venons de voir, Chrétiens, Chrétiennes, par les textes des saints et des bienheureux apôtres, que la gloire du ciel est la fin de l'homme . On peut faire maintenant une question : avons-nous droit à cette gloire ? Oui, certainement, nous acquérons ce droit par la grâce, et c'est pourquoi l'Apôtre parle dans ses épîtres de la couronne de justice que le juste juge lui réserve. C'est de ce droit magnifique a héritage céleste que se prive le pécheur dès le moment où il consent au péché. Et, en échange de quoi y consent- il ? En échange d'un gain de nulle valeur, d'une volupté grossière. O folie vraiment inconcevable. 0 pécheur, pourrais -je lui dire, vois d'une part Jésus présent près de toi avec sa sainte Mère et toute la cour céleste, qui t'invite aux noces du royaume divin . Vois, d'une autre part, l'ennemi de ton âme qui t'offre un injuste lucre, un vain honneur, ou quelque volupté indigne de toi. Le Christ, ton maître, t'ordonne de t'abstenir de ces choses, et , pour prix de ton obéissance à sa parole , il te promet des félicités éternelles. Que feras-tu , pécheur? Si tu violes le précepte de Dieu , c'est comme si tu disais à ton créateur : Auteur de toutes choses, je crois et je sais que tu es ce bien infini qui est ma fin , je te déclare néanmoins que je quitte ton service pour jouir de ma libre volonté. Je renonce à l'héritage de la patrie céleste, je ne veux plus être compté au nombre de tes enfants . Je n'ignore pas, à la vérité, que pour moi tu es né, que pour moi tu as souffert sur la croix, que pour moi tu es mort; mais il n'importe - j'abandonne tes drapeaux, j'oublie ton sang, j`oublie ta cruelle passion et ta mort d'amour pour tous les hommes ; je préfère à toutes ces choses la volupté d'un seul moment. Esprit divin , éloigne - toi de mon coeur. Et toi, Reine des cieux, tu n`es plus ma mère, je préfère la satisfaction de cet attrait qui me pousse vers les plaisirs interdits. Anges des cieux, portez à d'autres vos secours : les appétits de la chair ont le dessus, et je leur cède. ;
Si ce n'est pas là , Chrétiens, Chrétiennes, le langage des pécheurs, c'est du moins ainsi qu'on peut traduire en toute vérité les sentiments qui les gouvernent. et je n'ai fait que les rendre faiblement: Telle est l’imprudence et la folie de l'âme qui ne se souvient pas de sa fin ! Non sans doute , ces paroles ne sont pas sur les lèvres, mais elles sont au fond du coeur. Reconnaissez donc aujourd'hui, cette imprudence et cette folie, et détestez le péché qui vous éloigne de votre fin glorieuse. Dites avec saint Augustin : O Dieu mon espérance et ma fin, ou êtes-vous! ou vous êtes- vous caché ? Ne fuyez pas , mon Dieu, lorsque je vous cherche! J'ai fait le dessein de changer; je me donne tout entier à vous, afin que vous vous donniez tout entier à moi: Conduisez -moi vous-même vers vous. Ne souffrez plus que j’erre l'aventure au milieu des folies de ce monde, parce que, Seigneur, vous m'avez fait pour vous, et mon coeur n'aura de repos que lorsqu'il lui sera donné de se reposer en vous. Amen!
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
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