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LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE 1842.

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LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Empty LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE 1842.

Message par MichelT Jeu 8 Aoû 2024 - 13:35

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE

JOURNAL DES FAMILLES, RÉDIGÉ PAR UNE SOCIÉTÉ D'HOMMES DE LETTRES.

NOUVELLE-ORLÉANS, SAMEDI, 12 NOVEMBRE 1842.

VOL. 1. N°.1

La Louisiane devient un État américain en 1812

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Belle_Creole_New_Orleans_Wharf_late_1840s
Nouvelle Orléans - Louisiane au 19 eme siècle

Articles venant du Propagateur catholique de 1842 – en Louisiane

1 – Prospectus
2 – St-Élizabeth de Hongrie
3 – Appel aux jeunes gens de la Nouvelle-Orléans et de Louisiane
4 – La Présentation de la Vierge Marie
5 – L`Avent
6 – Saint Ambroise – Docteur de l`Église Latine
7 - Association catholique
8 – La Veille de Noël
9 – La Fête de Noël
10 – La premier de l`An – La Circoncision – L`Enfance de Notre-Seigneur
11 – L`Épiphanie
12 – Le Saint Nom de Jésus
13 – La Conversion de Saint Paul
14 – La Présentation de l`Enfant Jésus au Temple – La Purification de la St-Vierge Marie

15 - Saint Jean de Matha - Ordre de la Rédemption des Captifs
16 - Noble hommage rendu a l'autorité des faits Évangéliques
17 - Saint Pierre-Damien, Docteur de l'Église.
18 - Le Jour des Cendres ( Mercredi des Cendres)

19 - Saint Thomas d`Aquin, Docteur de l`Église.
20 - Saint-Grégoire le Grand - Pape et Docteur de l`Église
21 - Saint-Joseph, Époux de la Sainte Vierge Marie
22 - Nouvelle-Orléans - Clôture de la retraite ecclésiastique.
23 - La Fête du Précieux Sang de Notre Seigneur Jésus-Christ.
24 - La Fête de la Compassion de la Sainte-Vierge.
25 - Le Dimanche des Rameaux. La Semaine-Sainte.
26 - Résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ
27 - Saint Léon - Pape et Docteur de l'Église.
28 - Le Mois de Marie.
29 - Saint Grégoire de Naziance - Docteur de l'Église.


1 - PROSPECTUS.

Depuis longtemps les catholiques de la Louisiane, s'affligeaient que leur religion, dominante dans cet État, fût privée du plus puissant moyen de publicité, le secours de la presse périodique. Tous réclamaient avec instance un organe consciencieux et désintéressé, dévoué par conviction aux progrès du catholicisme, au maintien de ses doctrines, et à la défense des droits des catholiques ; un organe dont la voix fidèle exprimât leurs craintes et leurs voeux ; manifestât leurs désirs et leurs espérances, fît entendre leurs plaintes et leurs réclamations. Jusqu'ici les circonstances pénibles et difficiles dans lesquelles se trouvait le diocèse de la Louisiane, n'avaient point permis de satisfaire ce voeu de la population catholique. Ce contretemps était forcé; il n'en a pas moins eu des résultats fâcheux qu'il est temps d'arrêter. Peut-être est-ce principalement à cette cause qu'il faut attribuer cette ignorance religieuse dans laquelle une partie de la Louisiane est encore plongée, ignorance qui a laissé stationnaire et par conséquent arriéré, un pays qui sous tous les rapports et pour tant de raisons devrait être à la tête de la civilisation américaine. L'ignorance enfante cet état de marasme religieux et d'engourdissement moral dans lequel on perd et la connaissance et le sentiment des devoirs et alors tous les liens sociaux se relâchant dans une indifférence apathique, la dissolution de la société se prépare.

Cette situation est trop critiquée pour qu'il soit permis d'y rester plus longtemps. C'est le devoir de tout homme de bien de contribuer pour sa part à la régénération sociale ; pour nous qui savons que pour les peuples comme pour les individus il n'y a de régénération possible que par la religion, nous pensons que le moyen le plus efficace de l'opérer, c'est de renouveler la connaissance des vérités religieuses, et avec elle la connaissance et l'amour des devoirs ,  et pour obtenir ce résultat, le moyen le plus efficace et le plus sûr est sans contredit l'usage de la presse périodique, ce levier moral, si puissant aujourd'hui, et avec lequel tous les jours tant d'hommes remuent le monde en sens divers. La création d'un journal religieux est donc tout à la fois une œuvre de religion et de patriotisme à laquelle nous espérons que tout homme d'honneur applaudira.


2 - STE-ELISABETH DE HONGRIE

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Leighton_Reproductions_001N_c
Sainte Elizabeth de Hongrie

Nous ne nous proposions pas d'abord d'ouvrir dès aujourd'hui a nos lecteurs le Calendrier catholique que nous leur avons promis dans notre prospectus. Mais nous n'avons pu résister au plaisir d'offrir à l'admiration des Catholiques, et spécialement aux chastes méditations de nos pieuses lectrices un des types les plus parfaits de la piété du moyen-âge; de cette piété si naïve dans ses croyances, si touchante dans ses épanchements, si pure dans ses élans d'amour, et en même temps si puissante dans ses oeuvres, si héroïque dans ses sacrifices. Au milieu des glaives et des lances dont était encore hérissé le treizième siècle, se dessine la douce et innocente physionomie de sainte Elisabeth de Hongrie, comme une de ces suaves et gracieuses apparitions que le jeune homme au coeur chaste aime à se créer dans ses rêves d'avenir et de bonheur, au milieu des sombres réalités de la vie positive. Un écrivain qui brille parmi les illustrations littéraires de la France catholique, M. de Montalembert, a enrichi la religion et les lettres d'une histoire de sainte Elisabeth, monument précieux de l'esprit élevé et de la piété antique de l'auteur. C'est en résumant quelques-uns des faits principaux de cette histoire que nous avons tracé l`esquisse que nous offrons ici.

On était au milieu de l'hiver, en l'année 1227, tandis qu'un froid rigoureux retenait les plus intrépides autour du foyer domestique, une jeune femme de vingt ans, vêtue d'habits de deuil, descendait péniblement la montagne sur laquelle était situé le château de Wartbourg, au duché de Thuringe, et s'avançait lentement vers la ville d'Eisenach, portant dans ses bras son enfant nouveau-né, et entourée de ses trois autres petits enfants qui la suivaient tout en pleurs. La douleur qui altérait les traits parfaitement réguliers de son visage, n'avait point effacé cependant son éclatante beauté. La noblesse et la majesté de sa démarche annonçaient une origine illustre. Mais cet air de grandeur était tempéré par une ineffable douceur, et ses yeux surtout semblaient un foyer de tendresse, de charité et de miséricorde.

Cependant elle frappe en vain à la porte des habitants d'Eisenach, tous la repoussent sans pitié, et ce n'est que dans un réduit infect d'une mauvaise hôtellerie, qu'il lui est permis de trouver un asile. Cette femme, c'était Elisabeth de Hongrie, veuve du prince Louis, duc de Thuringe ; fille de André II, Roi de Hongrie, et de Gertrude de Méranie, Elisabeth hérita de la piété de ses illustres parents. Les historiens nous disent que les premières paroles que bégaya cette enfant prédestinée furent les noms sacrés si doux au coeur du vrai chrétien, et que ses premiers actes furent des oeuvres de charité. Fiancée dès l'âge de quatre ans au prince Louis, fils aîné de Hermann, duc de Thuringe, Elisabeth fut élevée auprès de celui qui lui était destiné pour époux. Entourée de la splendeur d'une cour magnifique et brillante, elle ne fut ni éblouie par l'éclat des richesses, ni séduite par l'attrait des plaisirs sa joie était dans la prière, sa gloire dans les oeuvres de miséricorde. Les malades étaient les amis qu'elle aimait à visiter, et les pauvres l'objet de sa tendresse et de ses soins.

Devenue duchesse de Thuringe à l'âge de treize ans, par son union avec le prince Louis, qui avait hérité des états de son père, Elisabeth ne vit dans la puissance et l'accroissement des richesses, que des moyens de répandre plus de bienfaits sur les pauvres, objet continuel de son inépuisable charité. Elle se sanctifiait ainsi par les oeuvres les plus parfaites de religion et de miséricorde, lorsque son jeune et noble époux, digne émule de sa piété, voulut prendre part à une de ces glorieuses expéditions dans lesquelles les chrétiens d'Europe tentèrent d'arracher aux profanations des infidèles les lieux sanctifiés par la présence du Sauveur. Il mourut en marchant à cette expédition, et veuve à vingt ans, Elisabeth se vit chassée de son palais et dépouillée de tous ses domaines par un lâche et cruel usurpateur, le prince Henri, le propre frère de son malheureux époux.

C'était donc elle que nous avons vue errante avec ses enfants, sans ressource et sans abri, au milieu de ce peuple sur qui elle avait versé tant de bienfaits. Personne ne daignait même faire un signe de compassion à cette fille des rois, car tous craignaient la colère du nouveau maître. Un seul homme se trouva, c'était un prêtre, qui, pauvre lui-même, ne craignit point d'offrir son humble asile à la veuve et aux orphelins. Dieu permettait toutes ces épreuves, pour faire éclater dans cette créature angélique tout ce que l'esprit de douceur et de pardon a de plus touchant, tout ce qu'il y a de générosité dans l'esprit de sacrifice, d'héroïsme dans la patience. Mais au moment marqué par sagesse ,le Seigneur sut bien mettre un terme aux maux de sa fidèle servante. Les grands et les chevaliers du duché de Thuringe, indignés de la lâche persécution suscitée contre une femme timide et de faibles enfants, contraignirent le prince Henri de rendre à Elisabeth tout ce qu'il lui avait enlevé. La pieuse princesse conserva en rentrant dans les grandeurs, le calme avec lequel elle les avait quittés. Les richesses qui lui étaient rendues ne furent pour elle qu'un moyen de satisfaire les saints mouvements de sa bienfaisance.

Enfin, après avoir confié à des mains sûres les droits et l'avenir de ses enfants, Elisabeth pût s'abandonner sans réserve aux impressions de la grâce qui l'appelait à une vie plus parfaite encore, et sous l'humble habit du Tiers-Ordre de saint François, elle alla se consacrer sans retour au service de ses amis de coeur, les malades et les pauvres. En jetant les yeux sur ce tableau abrégé d'une vie remplie de tant d'œuvres de vertu et marquée de tant de vicissitudes, nos lecteurs croiront peut-être que tant d'événements variés ont exigé le cours de longues années. Ils se trompent. A l'âge de vingt-quatre ans, Elisabeth était conviée aux noces éternelles de l'époux céleste, et allait recevoir la récompense d'une vie, qui, courte devant les hommes, avait été si pleine devant Dieu. Mais son nom n'est point mort avec elle. Tous les historiens de l'époque se disputèrent l'honneur de célébrer ses vertus. Le peuple, dont elle avait été la protectrice et l'amie, conserva son souvenir dans de touchantes traditions qui sont arrivées jusqu'à nous.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. 380935.ori
Louisiane

3- APPEL AUX JEUNES-GENS CATHOLIQUES DE LA NOUVELLE ORLÉANS ET DE LA LOUISIANE.

La foi qui n'agit pas, est-ce une foi sincère ?
RACINE, Athalie.


Un sentiment naturel au coeur de l'homme véritablement heureux, c'est de vouloir communiquer aux autres son bonheur, et par conséquent de leur révéler la source où il est puisé. Voilà ce qu'éprouvé nécessairement tout vrai catholique: il a été l'objet des grâces et des miséricordes de son Dieu; il a connu, il goûte chaque jour le bonheur ineffable de croire; il a le courage de confesser et de pratiquer sa religion; ce bonheur et ce courage il voudrait les communiquer à tous les chrétiens; il voudrait les appeler, les réunir tous au pied du même autel, à une même table sacrée, à cette table mystique où nous convie si tendrement un Dieu d'amour et de pardon.

Mais, ce sentiment si naturel au coeur de tout homme heureux, est de plus un devoir sacré pour le catholique en particulier; c'est un devoir de reconnaissance envers Dieu, de zèle et de charité envers ses frères. Tous, nous sommes appelés, chacun selon ses moyens, à travailler à la grande œuvre, la gloire de Dieu. Tous, nous devons apporter notre pierre pour l'édifice sacré de la religion. A ce compte, on comprend que le simple fidèle peut avoir le mérite et les honneurs de l'apostolat; lui aussi, il peut être missionnaire infatigable dans le cercle agrandi de ses attributions et de son action journalière; et pour lui comme pour l'ouvrier évangélique, il y a toujours des moissons jaunissantes, qui n'attendent que les travailleurs.

Telles sont les réflexions que nous ont inspiré la pensée d'une association de jeunes gens catholiques, dont le but unique, dans leurs efforts constants et multipliés, sera de propager la morale chrétienne dans cette ville et dans la Louisiane. Animé d`un esprit de zèle de de prosélytisme apostolique, liés par l`amour et l`obéissance au chef du clergé, leur père spirituel, ils se feront voir au grand jour, ils marcheront en phalange pour être plus forts, disons mieux, pour être invincibles. Ils n'oublieront pas que la vie et la force tiennent essentiellement à l'unité; que le caractère de la vérité, c'est de tout rapprocher, pour tout unir: le caractère de l'erreur de tout diviser, pour tout disséminer et détruire: aussi l'erreur, c'est le sable mouvant, la poussière, que le moindre vent soulève et disperse au loin; la vérité, c'est le roc et le ciment qui durcissent avec les siècles, et qui résistent à tous les efforts des flots, et des tempêtes, aussi bien qu'aux ravages du temps.

Ainsi réunis et guidés par une même foi, comme un corps bien discipliné, nos catholiques s'avanceront d'un pas égal et ferme vers le même but. Foulant aux pieds l'amour propre, le respect humain et la fausse honte, ils pratiqueront ouvertement, publiquement, prouveront ainsi leur foi par la pratique, et par la pratique feront rougir tous ceux qui ont la foi sans avoir la force de confesser hautement Jésus-Christ. Un grand philosophe de l'antiquité ne demandait qu'un point d'appui pour soulever et lancer la terre dans l'espace, ce point d'appui, nous le donnerons à tous ceux qui manqueront encore de force morale, ils pourront venir s'associer à nous, s'appuyer sur nous, et grossir ainsi chaque jour la phalange qui combat pour la cause éternelle.

Venez donc, quel que soit votre nombre jeunes gens catholiques qui pratiquez, et qui avez à coeur la gloire de Dieu, et le règne de la vérité dans cette ville; venez, et réunissons-nous dans la pratique du bien, pour être plus visibles à tous les yeux ; pour donner l'exemple et ôter tout prétexte, aux croyants lâches de ne pas pratiquer, aux esprits forts de ne pas croire. Les défenseurs de l'erreur et du mal se montrent partout, et paraissent plus forts qu'ils ne sont, montrons-nous aussi, pressons-nous autour du Pasteur légitime, représentant de Jésus-Christ comme les disciples autour de leur maître. En nous voyant ainsi unis de coeur, d'esprit et d'action, le faible dans la foi se ranimera, l'infirme qui chancelle et n'ose encore pratiquer ce qu'il croit au fond de son coeur s'écriera avec confusion, comme St-Augustin au temps de sa conversion : Quoi ! tu ne pourras ce que peuvent ceux-là? et dès lors, nous le compterons dans nos rangs ; et ce sera pour nous sur la terre, comme pour les anges dans le ciel, une source d'allégresse et de bonheur.



4 - LA PRÉSENTATION DE LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Marie-au-temple
Présentation de la Sainte Vierge Marie enfant au Temple de Jérusalem


Nos lecteurs n'ont point oublié que nous avons mis notre oeuvre sous la protection de Marie. Serviteurs fidèles de cette Vierge sainte, nous l'honorons comme notre Reine ; enfants dociles et reconnaissants, nous entourons de notre amour filial cette mère toute aimable ; pleins d'une foi vive en sa puissance et sa bonté, nous invoquons avec une confiance sans bornes, celle qui a écrasé la tête du serpent, et dont la puissance comme nous le dit l'Église, arrête les progrès du schisme et de l'hérésie. Ce sera donc un bonheur pour nous, chaque fois que nous pourrons parler de Marie à nos lecteurs catholiques ; ce sera un bonheur pour eux aussi, car tout vrai catholique honore Marie. Nos jeunes lectrices surtout aimeront que nous leur parlions de cette femme, modèle de toutes les femmes ; de celle qui a si glorieusement opéré la réhabilitation d'un sexe dont les nobles destinées méconnues autrefois par le paganisme, sont méconnues encore aujourd'hui par l'incrédulité, et ne peuvent être comprises et apprécier que par le christianisme.

Comme dans un ciel pur le lever du soleil est toujours précédé par le doux éclat de l'aurore naissante ; comme aux premières influences du printemps, la terre ouvrant ses trésors, commence à revêtir sa riche et gracieuse parure; comme à la première brise du matin les fleurs laissent exhaler leur doux parfum dans les airs embaumés : ainsi Marie, ce radieux soleil de sainteté, brille dès son aurore, de l'éclat de ses perfections célestes ; ainsi dès son printemps, enrichie des trésors de la grâce, elle paraît revêtue de la sainte et noble parure de ses angéliques vertus ; ainsi dès le matin de sa vie cette fleur éclose sur la racine de David, pure comme le lys des vallées, odoriférante comme la rose de Jéricho, s'ouvrant au souffle des inspirations, divines, exhale un parfum de virginité qui réjouit la maison de Dieu.

Tel fut le spectacle qu'offrit cette vierge sans tache à l'admiration de la cour céleste dans le mystère que l'Église nous fait honorer sous le titre de la Présentation de la Bienheureuse Vierge Marie. Une pieuse tradition nous apprend que Marie, conçue sans péché et douée dès les premiers instants de son existence bénie du parfait développement de son intelligence, et du plein usage de sa raison, voulût dès l'âge de trois ans consacrer sa personne au Seigneur par un solennel engagement. Conduite à Jérusalem par St-Joachim et Ste-Anne, ses parents, elle fut présentée dans le Temple et confiée aux prêtres du Très-Haut, pour être élevée, loin, du monde et à l'ombre du sanctuaire, dans la pratique des plus pures vertus. Cette solennité de la Présentation de Marie, connue dès les premiers siècles dans l'Église d'Orient, et célébrée par plusieurs Églises d'Occident a reçu depuis plus de trois siècles la sanction de l'Église catholique par la voix du pasteur universel. Cette fête où nous honorons le premier des mystères de Marie, dans lequel elle ait pris une part active; cette fête où nous voyons cette enfant de prédilection, bénie entre toutes les femmes, consacrer la première sa virginité au Seigneur, cette fête est par excellence la fête de la Virginité.

Aussi toutes les âmes choisies qui ont été invitées à se ranger sous l'étendard glorieux de la virginité, les prêtres du Seigneur appelés à un mystère de pureté angélique, les vierges qui, dans les différents ordres et congrégations font l'ornement et la consolation de l'Église, tous en cet heureux jour, renouvelant au pieds des saints autels, les engagements sacrés qu'ils ont pris avec le Seigneur. Le lecteur chrétien voudra sans doute s'unir à toute l'Église dans cette belle fête de Marie. Les mères de famille comprendront qu'à l'exemple de Sainte Anne, elles doivent assurer pour l'avenir la vertu et le bonheur de leurs enfants chéris en mettant de bonne heure leur innocence à l'abri des perfides séductions du monde, sous la sainte influence de la religion ; nos jeunes lectrices, pour plaire à Marie, leur mère, voudront, comme elle conserver pure et sans tache cette parure céleste de la pudeur et de la modestie, ce saint et si gracieux ornement de la beauté chrétienne, et tous les catholiques, pour honorer leur reine, voudront être purs, chacun selon ses voies, ou de cette pureté virginale qui égale aux anges, ou du moins de cette chasteté qui est de tous les états; car à tout catholique, et au catholique seul appartient cette vertu à laquelle l'incrédulité ne croit pas, et dont la religion seule a le secret.


5 - L'AVENT. (les 4 semaines avant Noel)

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. OIP

L'Église catholique recommence aujourd'hui à nous faire parcourir cette série de prodiges et de mystères accomplis en faveur des hommes pécheurs par un Dieu de miséricorde et d'amour. Chaque année l'Église, à des époques fixes nous fait célébrer chacun de ces mystères séparément, et en fait l'objet d'une fête spéciale. Ce cours des solennités saintes qui en nourrissant notre foi, raniment notre ferveur, forme ce qu'on appelle l'année ecclésiastique, qui commence au premier dimanche de l'Avent, et qui se termine à la dernière semaine après la Pentecôte. Comme nous entrons aujourd'hui dans ce saint temps de l'Avent, le lecteur chrétien attend sans doute quelques explications qui l'aident à faire un religieux usage de ces jours de bénédiction. Nous allons satisfaire ce pieux désir.

Le mot Avent signifie avènement ou arrivée, et nous indique que tout ce temps doit être consacré par les chrétiens à se préparer à l'arrivée ou à l'avènement du fils de Dieu sur la terre, avènement qui s'accomplit dans le mystère de la naissance de Jésus-Christ. Ainsi l'Église, notre mère, nous invite à nous préparer pendant tout l'Avent à la grande solennité de Noël ; nous ne serons point sourds à cette tendre et maternelle invitation. La préparation à laquelle l'Église nous invite, est conforme à l'esprit des solennités qu'elle nous appelle à célébrer, et nous offre une opposition bien marquée avec l'esprit du monde. Les fêtes de l'homme charnel sont sensuelles, comme l'est son esprit et son coeur. C'est dans la dissipation qu'il s'y prépare ; c'est dans les excès qu'il les célèbre ; c'est avec fatigue qu'il s'en éloigne, emportant le dégoût, et souvent le remords, s'il est encore accessible. Il n'en est point ainsi des fêtes du chrétien. Il s'y prépare dans le recueillement, il célèbre dans les pures effusions d'un amour tout céleste, et ce n'est qu'avec regret qu'il les voit finir, mais elles ne passent point sans laisser dans son âme un souvenir vivifiant et consolateur, accompagné des doux effets de la grâce divine.

C'est que nos fêtes sont entièrement saintes et toutes spirituelles. C'est donc par la prière, la pénitence et les bonnes oeuvres, que l'Église veut nous préparer à l'avènement de ce divin enfant que nous irons bientôt adorer dans son berceau. Dans les siècles anciens le temps de l'Avent était, comme le Carême l'est encore aujourd'hui, consacré tout entier a l`abstinence et au jeûne. En mémoire de cette ferveur des temps antiques, l`Église fait encore pratiquer a ses enfants les mêmes œuvres de pénitence  le Mercredi et le Vendredi de chaque semaine de l`Avent.  Par une indulgence spéciale, le chef de l'Église prenant en considération les circonstances dans lesquelles se trouvent les catholiques dans ce pays, en raison du climat et d'autres difficultés de même nature, a entièrement supprimé ce jeûne. Les catholiques fervents suppléeront sans doute à ce qui leur manque du côté de la pénitence par des prières plus vives et plus multipliées.

Au temps de nos pères, lorsque la foi agissait jusque dans les plus petits détails sur la société et sur la famille, c'était un pieux usage, pendant l'Avent, de célébrer dans des cantiques populaires, connus sous le nom de Noëls, les circonstances du grand mystère de l'avènement du Sauveur. Dans toutes les maisons, depuis le riche manoir du seigneur suzerain, jusqu'à la pauvre chaumière de l'humble vassal, au retour de la nuit, chaque famille réunie à la veillée autour du foyer domestique, faisait retentir ces chants sacrés. Pendant que les hommes serrés autour de l'âtre étincelant, prêtaient une oreille attentive, et que les enfants rangés autour de leur mère, tenaient attachés sur elle leurs regards humides, craignant de perdre un seul mot de ces récits naïfs, les jeunes filles redisaient d'une voix pure et mélodieuse les angoisses et la pauvreté de la vierge dans l'étable de Bethléem, les charmes de son divin enfant, la joie des anges, la piété des bergers, l'adoration des Mages. Avec quelle charité bienveillante on interrompait ces chants religieux pour admettre au foyer hospitalier l'étranger surpris par la nuit, ou donner asile à la veuve qui venait, son enfant dans ses bras, réclamer un abri pour l'amour de l'enfant Jésus.

Ces usages antiques ont passé ; nous les avons cependant retrouvés encore dans quelques familles patriarcales, et ces grâcieux tableaux reviennent souvent réjouir notre pensée et rafraîchir notre coeur. Un usage non moins touchant s'est perpétué jusqu'à nous dans la plupart des pays catholiques. Au temps de l'Avent, les riches, tous ceux qui ont quelque aisance, choisissent un enfant pauvre, pour le vêtir en l'honneur de l'enfant Jésus, afin que les pauvres aussi puissent mieux prendre part aux joies que l'avènement du fils de Dieu est venu apporter à la terre. Cet usage, qui tend à rapprocher toutes les conditions autour du berceau du Sauveur, pour apprendre aux riches à sanctifier leurs richesses, aux pauvres à supporter patiemment leurs privations, cet usage si chrétien, ne peut qu'entrer dans les goûts de nos lecteurs catholiques. Tant d'occasions de faire cette bonne œuvre s'offrent autour de nous! Nos pieuses lectrices entendront la voix suppliante de tant de mères qui souffrent, moins de leurs privations propres, que des privations de leurs enfants. Elles considéreront ces asiles où des femmes inspirées par la charité tiennent lieu de mères à tant d'enfants privés de leurs mères selon la nature. Ces asiles élevés par la charité, ne peuvent subsister que par la charité. Nos lectrices voudront éprouver quelle douceur délicieuse il y a dans le sourire caressant de l'enfance qu'on a soulagée ; et combien sont efficaces les prières innocentes de ces âmes jeunes et pures, auprès de celui qui a tant aimé les enfants sur la terre, et qui pour l'l'amour de nous à voulu lui-même devenir un petit enfant.


6 - SAINT-AMBROISE de Milan (Italie)

ÉVÊQUE ET DOCTEUR DE L'EGLISE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Saint-ambrose-icon-701

Une des plus éclatantes magnificences de l'Église catholique, est sans contredit, cette suite glorieuse d'illustres témoins qui, dans leurs écrits immortels, ont constaté de siècle en siècle et transmis jusqu'à nous, l'intégrité du dépôt sacré confié par Jésus-Christ à ses apôtres. Dieu, fidèle a ses promesses, suscita toujours dans son Église, de génération en génération, des hommes puissants pour exhorter selon la saine doctrine, et qui, s'opposant comme un mur impénétrable aux progrès de l'erreur, maintinrent contre les hérétiques et les schismatiques qui, de tous temps ont désolé l'Église, l'inviolable pureté de la doctrine catholique, l'incorruptible sainteté de la morale de l'Évangile, et les sages dispositions de la discipline ecclésiastique. Ce sont ces hommes dont le front est couronné de la double auréole du génie et de la vertu, que la religion présente à nos hommages et à notre vénération, sous le titre de pères et docteurs de l'Église. Tous les siècles chrétiens s'enorgueillissent de quelques-uns de ces hommes choisis et envoyés par le Seigneur pour défendre l'Église par la puissance de leurs écrit, en même temps qu'ils la réjouissaient par l'innocence de leur vie et la sainteté de leurs œuvres. Mais, le quatrième et cinquième siècles, nous présentent, plus que tous les autres, une masse imposante de ces noms glorieux, si précieux et si chers au chrétien. Dans l'Église grecque, les Athanase, les Basile, les Grégoire, les Éphrem, les Épiphane, les Chrysostome, les Cyrilles ; dans l'Église latine, les Hilaire, les Jérôme, les Augustin, les Léon, firent briller un tel jour sur tous les points de la doctrine et de la morale catholiques, que leurs écrits nous offrent la réfutation anticipée de toutes les erreurs enfantées depuis, par l'hérésie ou l'incrédulité.

Entre tous ces grands hommes, un des plus célèbres fut celui que nous offrons aujourd'hui à l'admiration de nos lecteurs. SAINT-AMBROISE est un des pères connus sous le nom des quatre grands docteurs de l'Église Latine. Il partage avec Saint Jérôme, Saint-Augustin et Saint-Grégoire, pape, l'honneur d'être au premier rang dans cette milice sainte, armée de la parole pour combattre et vaincre l'esprit de mensonge et d'erreur. Mais, cet illustre docteur, fut en même temps un des plus sainte évêques qui aient honoré l'épiscopat et édifié l'église. Quelques détails rapides suffiront pour le faire connaître au lecteur catholique.

Issu d'une famille ancienne et puissante, Ambroise naquit dans les Gaules dont son père était gouverneur. Son enfance se passa dans l'innocence et la pureté, sous la conduite d'une mère vertueuse, et d'une pieuse soeur qui avait consacré à Dieu sa virginité. Dès sa première jeunesse, son génie développé par des études sérieuses, lui permit de prétendre aux postes les plus honorables et aux plus importantes fonctions. Appelé successivement à plusieurs emplois distingués, Ambroise âgé alors de 34 ans, siégeait à Milan, en qualité de gouverneur de la Ligurie, lorsque Dieu, dans des vues de miséricorde sur son église, voulût le retirer des embarras du siècle, et lui faire quitter le faux éclat des grandeurs temporelles, pour lui imposer le fardeau de la sollicitude pastorale, et l'appeler aux fonctions plus humbles selon le monde, mais bien plus importantes de l'épiscopat. C'est ainsi que le Seigneur tient en réserve dans les trésors de son amour les hommes de sa droite, qu'il donne au temps convenable à son église pour la défendre dans ses dangers et la consoler dans ses afflictions.

La vocation d'Ambroise à l'épiscopat, accompagnée de circonstances miraculeuses et marquée clairement du sceau de Dieu, devait faire concevoir aux catholiques les plus douces espérances. Elles furent pleinement réalisées. Élevé sur la chaire épiscopale, comme la lumière placée sur le chandelier, Ambroise éclaira la maison de Dieu, qui est l'Église, par l'éclat de ses admirables vertus. L'histoire nous a précieusement conservé le souvenir de sa vigilance active, pour conserver dans son clergé la sainte sévérité de la discipline, de son zèle infatigable pour maintenir les catholiques dans la foi de leurs pères, et ramener à la vérité, les hérétiques engagés dans les erreurs impies d'Arius. Sa charité sans bornes le porta dès le commencement de son épiscopat à distribuer aux pauvres son riche patrimoine ; et dans les calamités qui vinrent fondre sur l'empire, il n'hésita point à donner les vases mêmes des temples du Seigneur pour le rachat des captifs et le soulagement des malheureux. Sa compassion pour les pécheurs était si tendre que, lorsqu'ils venaient lui faire l'aveu de leurs fautes, il versait une si grande abondance de larmes, qu'il forçait à pleurer avec lui, ceux qui étaient les plus endurcis. Son affabilité paternelle avec les petits, son inébranlable sévérité avec les puissants du siècle, sa douceur inaltérable avec tous, révélait en lui cette paix que donne le témoignage d'une bonne conscience, et cette égalité d'âme qu'enfante la vertu.

Dieu ne voulut point que tant de trésors demeurassent renfermés dans l'église de Milan, tout illustre qu'elle était. La réputation d'Ambroise amenait auprès de lui les savants qui venaient admirer son éloquence et son génie ; et, ce fût cette curiosité, tout humaine d'abord, qui attira vers le Saint Évêque, Augustin, encore livré à cette époque, aux erreurs de l'incrédulité et aux égarements de la nature corrompue. Cet indomptable génie se sentit bientôt subjugué par la puissance irrésistible de l'homme de Dieu, et par l'aspect de ses vertus ; et Ambroise eût le mérite et l'honneur d'offrir à l'Église, dans la personne de Saint Augustin, une des plus glorieuses conquêtes dont le catholicisme ait à s'enorgueillir.

Ce n'étaient pas seulement les Grands et les Princes qui avaient recours aux conseils de l'Évêque de Milan : les Empereurs, plus d'une fois se trouvèrent heureux d'employer sa médiation ; et les évêques le consultaient comme leur oracle, et ce furent principalement ses efforts qui préparèrent en Italie, l'entière extirpation de l'Arianisme qui y avait été si puissant. C'est au milieu de toutes ces sollicitudes qui semblaient devoir absorber tous ses instants, qu'il trouva le loisir de travailler et d'écrire de sa propre main, tant d'ouvrages précieux qui nous sont parvenus, et où l'élévation, la noblesse et la pénétration de son génie se déploient dans une élocution facile et gracieuse, dont la douceur et la dignité forment les caractères distinctifs. Entre tous ses ouvrages, ceux qui peuvent offrir le plus d'intérêt et d'utilité à tout lecteur catholique, et surtout à nos pieuses lectrices, sont ses traités sur la virginité, où il parle de la pureté avec un enthousiasme qui montre combien cette vertu lui était chère, et qui nous donne le secret de toutes les qualités renfermées dans cette âme virginale dont la vigueur n'avait point été altérée par le souffle impur du vice.

Cette multitude d'écrits, au milieu de tant de travaux, paraît incroyable à l'homme du monde dont la vie s'éparpille sur tant d'inutilités. Mais les saints, par une vie retirée, sobre et parfaitement réglée, ont trouvé le secret de racheter le temps, ainsi que le dit l'apôtre, et d'en doubler l'usage. Ambroise réparait ses forces dans la prière et pour lui l'étude était le délassement de ses immenses travaux. Il eut manqué quelque chose à la gloire de ce grand homme, s'il eût été privé des honneurs de la persécution. Dieu ne les lui refusa point. Les Ariens, fiers de la protection d'une princesse impie, et soutenus de la faveur de courtisans corrompus, essayèrent d'enlever à Ambroise les églises qui appartenaient aux catholiques.

Ce fût alors que cet homme si humble, si doux et si patient pour ses injures personnelles, déploya dans la cause de Dieu, l'inexpugnable fermeté de son caractère, et toute l'énergie de son âme vraiment épiscopale. Ni les menaces violentes des empereurs, ni les armes des soldats qui entouraient le temple du Seigneur, ne purent l'intimider. Plusieurs fois renfermé dans son église avec son peuple, il offrit à Dieu le sacrifice de sa vie. Mais le Seigneur qui ne voulait qu'éprouver son serviteur, fit cesser tout d'un coup, quand il lui plût, cette persécution qui s'était renouvelée à diverses reprises pendant plusieurs années. Les Ariens tachèrent de se venger de leur défaite, en attaquant la réputation de celui dont ils n'avaient pu ébranler la vertu. Ils accusèrent d'intolérance et de tyrannie, cet homme que leur tyrannie intolérante avait vainement essayé d'opprimer. C'est ainsi que l'impiété a toujours recours aux mêmes armes, et que dans tous les temps elle a été accoutumée à calomnier ses victimes, en les frappant.

Quelques années après ce glorieux triomphe, Ambroise donna un des exemples les plus mémorables de cette vigueur épiscopale qui, dans l'accomplissement de ses devoirs, ne fait acception de personne. Un empereur aussi illustre par les vertus qui font le chrétien, que par les qualités qui font les grands princes, Théodose avait eu le malheur dans un premier mouvement de colère d'exercer un châtiment cruel contre une ville où son autorité avait été méconnue. Ambroise se présenta devant le prince, qui, souillé du sang innocent, venait prier dans le temple du Seigneur. Le saint Pontife lui reprochant sa faute, lui interdit l'entrée du lieu saint, et le soumit à la pénitence publique, alors usitée dans l'église pour les grands crimes. Théodose, rentrant en lui-même, s'humilia devant le ministre du Très-Haut, reconnût et pleura sa faute, et accepta la peine qui lui était imposée, se montrant plus grand par cette victoire remportée sur lui-même, que par toutes les victoires obtenues sur les ennemis de l'empire. Ce fût après vingt-trois années d'épiscopat, dans l'année 397 Ap J.C. qu' Ambroise, chéri de Dieu et des hommes alla recevoir la couronne due à tant de vertus que le Ciel avait déjà récompensées dès cette vie, en accordant au saint le don des miracles. Mais, ses exemples et ses écrits sont restés à l'église comme un héritage précieux qu'elle a soigneusement conservé, et auquel tous les catholiques sont appelés à participer.






Gloria du Missa Salve - Tomás Luis de Victoria (Espagne - 1548-1611)
Ensemble Vocal de l'Académie Vocale de Paris



7 - ASSOCIATION CATHOLIQUE.


Nous avions annoncé dans notre prospectus, qu'une association s'organisait parmi les catholiques pratiquants, de la Nouvelle-Orléans, sous le titre de : Société Catholique pour la propagation de la morale chrétienne. Nous ajoutions que notre journal devait être considère comme l'organe de cette association. Les catholiques apprendront avec joie, que cette société a reçu son organisation définitive. Les membres de la société étant assemblés dimanche dernier, 27 novembre, pour leur troisième réunion préparatoire, dans un des appartements de l'évêché, que Mgr. Blanc a mis à leur disposition ; sur le désir exprimé par les sociétaires, Mgr à bien voulu honorer l'assemblée de sa présence. Après avoir approuvé les statuts et règlements de la société, il a nommé Mr. l'abbé Perché et Mr. l'abbé Jamey, directeur et vice-directeur ecclésiastiques de l'association. Les sociétaires ont procédé ensuite à l'élection de cinq membres laïques, pour former le conseil de la société. La conception de la Sainte Vierge étant la fête principale de l'Association, dimanche prochain, 11 décembre, qui est le Dimanche de l'Octave de la conception, la messe sera célébrée pour la société dans l'Église de Saint Augustin. Cette cérémonie aura lieu à huit heures. Elle offrira cette année un intérêt tout particulier, en ce que ce sera le jour de la réception solennelle des membres qui sont admis à faire partie de la société.

Les mères de famille, et toutes les femmes chrétiennes salueront avec amour la naissance de cette société, qui offre à leurs époux, à leurs pères, à leurs frères, les moyens de participer comme elles, aux bienfaits, de la religion, en écartant le respect humain, la fausse honte, et les autres motifs qui détournent le plus les hommes de la pratique des devoirs religieux. Ces heureux résultats ne seront point circonscrits dans la Nouvelle-Orléans. Déjà, nous ayons dans quelques paroisses des membres correspondants, et la formation de cette société, jointe à la création d'un journal catholique, sera, nous l'espérons, l'époque d'une ère nouvelle pour les catholiques de la Louisiane.



8 - LA VEILLE DE NOËL


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. New_Orleans_Jackson_Square_Credit_And_Ant_Shutterstock_CNA
La Nouvelle Orléans a Noël


Nous avons vu que c'est par la pénitence, la prière, et les bonnes œuvres, que l'Église nous prépare aux grandes solennités de la Religion. A mesure que ces solennités approchent , nos prières doivent devenir plus ferventes, notre pénitence plus étroite, nos bonnes oeuvres plus multipliées; et quant le moment est venu où nous devons célébrer le souvenir des grands mystères accomplis pour nous, l'Église nous invite à faire trêve, autant qu'il nous est possible, aux soins et aux sollicitudes du siècle, et bien plus encore, aux divertissements et aux plaisirs, afin que, dégagés des objets matériels et terrestres, et purifiés de ce qu'il y avait de naturel en nous, nous puissions plus facilement entrer dans l'esprit de ces solennités saintes. C'est pour cela que les jours qui précédent les grandes fêtes, sont consacrés par l'Église, sous le nom de vigiles ou de veilles, et destinés à un redoublement de ferveur et de piété. Par ce moyen, l'Église nous fait passer à travers les désordres du monde, sans que ce contact impur puisse nous souiller; et marchant d'une fête à une autre fête, d'une solennité à une autre solennité, nous nous purifions sans cesse de la contagion du siècle, et nous nous maintenons dans la foi et la pratique des vérités de la religion.

Cet esprit n'a jamais changé dans l'église, par ce qu'il fait partie de son essence, et que rien ne pourrait la rendre infidèle à la mission sainte que son époux divin lui a confiée. Aussi, voyons-nous l'usage des vigiles établi dans l'Église dès les premiers siècles : et la plupart des cérémonies qui accompagnent encore nos grandes solennités, sont des restes précieux de cette discipline antique, dont l'origine remonte jusqu'aux Apôtres même. C'est la remarque que fait St. François de Sales, avec la naïveté et la piété ordinaires de son style, dans l'exorde d'un sermon pour la veille de Noël. La Très Sainte Église, dit-il, comme très soigneuse du salut de ces enfants, a accoutumé de nous préparer dès la veille des grandes solennités, afin que par ce moyen nous venions à être mieux disposés pour reconnaître les grands bénéfices que nous y avons reçus de Dieu. En la primitive église, les chrétiens qui voulaient rendre en quelque manière satisfaction à Notre Seigneur, du sang qu'il avait fraîchement répandu pour notre salut, en mourant sur la croix, avaient un très grand soin de bien employer le temps des solennités, et pour ce sujet il n'y avait point de fête qui n'eût sa vigile, dès laquelle ils commençaient à se préparer pour la solenniser; et non seulement cela s'est observé dans la primitive église, mais encore en l'ancienne loi, le jour du sabat étant toujours précédé de plusieurs préparations.

Nous ne devons donc pas nous étonner que la veille de Noël soit un jour de jeûne et de prières, en un mot un jour de préparation, et que l'église, comme le remarque encore le saint évêque de Genève, adresse dans l'office de ce jour à tous ses enfants, ces paroles de la Sainte Écriture. Aujourd'hui vous saurez que le Seigneur viendra demain et dès le matin vous verrez sa gloire. La tradition nous apprend en effet que ce fût au milieu même de la nuit et par conséquent dès le matin du jour où nous célébrons la fête de Noël, que le grand mystère de l'amour fût manifesté aux hommes et que celui qui embrasse l'univers dans son immensité, daigna se montrer à nous sous la forme d'un petit enfant. C'était afin de pouvoir célébrer ce mystère à l'heure même où il s'était accompli, que dès les premiers siècles les chrétiens furent dans l'usage de passer toute cette nuit en prières. Ainsi la vigile de Noël commencée dans le jeûne et la pénitence, se terminait par le chant des psaumes et des cantiques d'action de grâces, et cet usage subsiste encore dans la plupart des pays catholiques. Avec quels sentiments de ferveur et d'amour l'âme pieuse s'unit dans ces moments précieux aux bergers qui veillaient cette nuit là sur leurs troupeaux, et qui méritèrent d'entendre les premiers de la bouche des anges, l'annonce de la bonne nouvelle.

Ceux qui ont assisté à ces pieuses cérémonies de la nuit de Noël, savent quelles douces émotions elles produisent sur ceux qui y viennent avec simplicité de foi et pureté de coeur. Il nous a souvent été donné d'éprouver ces émotions toutes saintes et toutes célestes, et leur souvenir est ineffaçable en nous. Tandis que les flots de lumières inondent le lieu saint, et rendent cette nuit plus brillante que le plus beau jour, tandis que l'imagination et les sens sont pieusement exaltés par la pompe et l'éclat des cérémonies, par le chant des hymnes, et des cantiques, où la voix pure des enfants et des jeunes filles, s'unit si harmonieusement à la voix grave et sévère des ministres sacrés, avec quel bonheur l'âme fidèle se reporte vers les lieux où tous ces mystères furent accomplis, et se plaît à se rappeler toutes les circonstances de ce grand prodige, et à méditer chacune des paroles, qui servent à l'expliquer dans les saintes écritures.

L'état du catholicisme parmi nous, ne nous permet guères de déployer la magnificence de ces augustes et pieuses cérémonies; et sans doute un grand nombre de nos lecteurs sont étrangers aux impressions de la messe de minuit. Mais s'il ne nous est point donné de nous réunir à nos frères, qui dans presque toutes les parties de l'univers catholique, passeront la nuit de Noël dans le lieu saint, pour y adorer Jésus enfant, du moins faisons en sorte d'entrer dans l'esprit de l'Église, en consacrant la vigile de Noël, à la prière, au recueillement et à la méditation. Nos pieuses lectrices désireront sans doute que nous leur parlions encore de cet aimable mystère d'un Dieu devenu enfant pour notre amour; nous en ferons donc encore la matière de quelques réflexions pieuses dans notre prochain numéro. Qu'elles se mettent en état de célébrer cette fête par une grande pureté de coeur ; ce sont les coeurs purs, simples et droits que Jésus enfant appelle à son berceau. Il est d'usage, le jour de Noël, que chaque prêtre célèbre trois messes, quoiqu'il suffise d'en entendre une seule pour satisfaire au précepte de la sanctification des fêtes. Ces trois messes ont pour objet d'honorer les trois générations de notre Seigneur ; sa génération divine, par laquelle il est engendré par le père dans les splendeurs des saints, de toute éternité ; sa génération humaine par laquelle il a voulu naître dans le temps, de la Bienheureuse Vierge Marie, dans l'abjection et la pauvreté; et sa génération spirituelle et mystique, par laquelle il prend en quelque sorte naissance dans notre coeur, lorsqu'étant régénérés par la grâce, nous vivons de la vie de Jésus-Christ, et nous sommes animés de son esprit. C'est en nous purifiant dans le bain salutaire de la pénitence, et en nous unissant à Jésus-Christ dans le sacrement de son amour, que nous lui donnerons dans notre coeur cette naissance mystique et spirituelle ; et que cet ineffable mystère portera en nous des fruits abondants de grâces et de bénédictions.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Jeu 8 Aoû 2024 - 13:38

9 - LA FÊTE DE NOËL

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. 5f52ad8daad6b811bd9967297fde40d4

Voici enfin ce beau jour auquel l'église nous préparait depuis quatre semaines. Le grand mystère de l'amour est accompli, ce mystère éminemment chrétien, comme le remarque St. François de Sales, et que l'esprit de l'homme n'eût jamais pu inventer, si Dieu même, ne nous eût jamais fait la promesse, et montré l'accomplissement. Les Anges ont déjà annoncé aux bergers, et en leur personne à tout le genre humain, la bonne nouvelle qui pour tous, doit être le sujet d`une grande joie. Pour nous faire célébrer dignement cet adorable mystère, l'Église consacre huit jours entiers, ainsi qu'elle a coutume de le faire pour les grandes solennités. Nous aiderons, par quelques réflexions, nos lecteurs catholiques à entrer dans l'esprit de l'Église et dans la participation des fruits de ce mystère divin.

Dès le moment même que Dieu punit la désobéissance d'Adam, il lui promit un réparateur qui rétablirait la nature humaine dans sa noblesse primitive d'où elle venait de déchoir par le péché. Ce libérateur qui était appelé à nous arracher à la servitude du péché et à la puissance du Démon ( l`ange déchu), devait avoir la même nature que nous; il devait naître d'une femme, et cette femme était promise comme devant écraser la tête du serpent, c'est-à-dire, préparer la ruine de la puissance infernale. Cette promesse d'un Rédempteur et d'un Sauveur, transmise fidèlement par nos premiers pères à leurs descendants, se retrouve dans l'enseignement théologique de toutes les religions, et a fait partie des croyances de tous les peuples. Les mythologies païennes avaient toutes conservé et transmis le souvenir de cette vérité, défigurée, comme tant d'autres, par les fables ingénieuses que l'imagination toute sensuelle des Païens avait semées avec profusion dans leur théologie poétique. Mais, ce dogme était conservé dans toute sa pureté chez le peuple choisi de Dieu. Là, nous voyons pendant quatre mille ans, les patriarches soupirer après la venue de celui qui était le désiré des Nations, et en qui tous les peuples devaient espérer. Tous les prophètes l`annonçaient au Peuple Juif ; tous les Saints de la loi ancienne l'appelaient de leurs désirs et de leurs voeux, et c'est à lui que se rapportaient comme autant d'images symboliques et de figures prophétiques, tous les faits importants de l'Ancien Testament. Des hommes inspirés de Dieu, avaient annoncé jusque dans les plus petits détails, les circonstances de sa naissance, de sa vie et de sa mort; sa gloire au milieu des humiliations, les richesses qu'il devait nous apporter dans sa pauvreté, et le bonheur qu'il venait nous préparer par ses souffrances. Il devait naître d'une Vierge, de la famille de David, à Bethléem. Toutes ces prophéties, conservées intactes jusqu'à nous, par les Juifs eux-mêmes, ont eu leur entier accomplissement dans le mystère de la naissance de Notre Seigneur Jésus-Christ.

L'Univers se reposait alors dans une paix générale, sous l'autorité d'Auguste, empereur des Romains. Il plût à l'empereur de faire faire le dénombrement de tous les habitants de l'empire, et chacun eût ordre d'aller se faire enrôler dans la ville d'où il était originaire. Auguste ne pensait qu'à satisfaire sa vanité ou tout au plus à suivre les mouvements d'une politique humaine ; mais il servait sans s'en douter, à l'accomplissement des prophéties. St. Joseph qui était de la famille de David, dût quitter Nazareth, où il habitait, pour se rendre à Bethléem, petite ville de la tribu de Juda, à deux lieues de Jérusalem, et d'où la famille de David était sortie. Marie qui était unie à St. Joseph, par le mariage, afin que son honneur et, sa réputation fussent mis à couvert aux yeux des hommes qui ignoraient le grand mystère que Dieu avait opéré en elle. Marie accompagna son époux dans ce voyage assez long et assez pénible.

Lorsqu'ils arrivèrent à Bethléem, ils ne purent trouver où se loger, la ville étant remplie déjà d'une multitude d'étrangers. La pauvreté de Joseph, l'état dans lequel était la Sainte Vierge, n'excitèrent point la compassion des habitants de Bethléem ; et notre seigneur voulut dès avant sa naissance, que la parole qui devait s'accomplir en lui et dans ses disciples, jusqu'à la fin des temps, pût déjà lui être appliquée: Il est venu parmi les siens, et les siens ne l'ont pas reçu. Joseph et Marie se retirèrent dans une étable, qui servait de retraite aux animaux de l'hôtellerie où on leur avait refusé un asile. Le moment était venu où le mystère accompli en Marie dès le moment de son Annonciation, devait être manifesté. Marie, sans cesser d'être parfaitement pure et ayant toujours conservé une inviolable virginité, donna naissance dans cette étable à celui qui étant, comme Dieu, le maître du Ciel et de la Terre, voulut bien par amour pour nous, prendre toutes les faiblesses et les misères de notre nature, sans pourtant contracter la souillure du péché. Ainsi se trouvaient déjà justifiées les paroles que Jésus-Christ adressait dans la suite à ses disciples: le fils de l'homme n'a pas une place à lui, où il puisse reposer sa tête. Car Marie enveloppant de langes son premier-né, le coucha dans une crèche ; et, à ce moment, il y avait selon une tradition populaire, deux animaux dans l'étable où le Sauveur naquit.

Ce fût ainsi, que Dieu dont les vues sont impénétrables, et dont les voies, comme il nous le dit lui-même, sont aussi élevées au dessus des voies de l'homme, que le Ciel l'est au-dessus de la Terre, accomplit dans le silence et l'obscurité, un mystère, qui, depuis quatre mille ans, était l'objet des espérances et des désirs de tout le genre humain. C'est ici que commence cette série de mystères qui sont pour l'homme charnel, un scandale et une folie, mais où le chrétien voit éclater la toute puissance et la sagesse infinie de Dieu. Les trois grandes plaies de l'homme, sont, l'orgueil, la cupidité, et la volupté ; et Notre Seigneur qui venait dans sa miséricorde pour guérir toutes nos misères, voulut, avant de nous montrer par ses leçons, comment appliquer le remède, nous donner l'enseignement plus persuasif et plus efficace encore de ses exemples.

C'est pour cela qu'il voulut naître dans l'obscurité et l'humiliation, pour terrasser notre orgueil ; il naquit dans la pauvreté la plus profonde et le dénuement le plus absolu, pour déraciner de notre cœur l'esprit de cupidité ; et, dès le premier instant, il voulut éprouver les rigueurs d'une dure saison, les incommodités du lieu où il naquit, et les privations les plus pénibles à la nature, afin d'étouffer en nous cet esprit de volupté que la nature corrompue entretient et nourrit au fond de nos coeurs. Que de grands enseignements renfermés dans ce mystère, quel inépuisable sujet de pieuses et saintes méditations.

Au milieu de ces humiliations, le Seigneur voulut laisser cependant briller quelques rayons de la gloire de son divin fils. Il y avait dans la campagne, autour de Bethléem, des bergers qui veillaient pendant la nuit à la garde de leurs troupeaux. Tout à coup l'ange du Seigneur leur apparût, environné d'une grande clarté : et leur annonçant la bonne nouvelle il leur dit: ne craignez point. Il vous est né aujourd'hui un Sauveur dans la ville de David. Une troupe nombreuse de la milice sacrée se joignit aussitôt à l'ange, et ils firent retentir les airs du cantique céleste ; gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. (Gloria in Exelcis Deo)

Les bergers fidèles à l'avertissement d'en haut se rendirent à Bethléem, et virent de leurs propres yeux l'accomplissement de ce que l'ange leur avait annoncé. Ainsi le Seigneur se révéla d'abord aux humbles et aux petits. C'est que devant lui la gloire et la grandeur humaines, les richesses et la puissance ne sont que de vains titres. Il aime ceux qui ont leur coeur droit, et c'est à ceux qui marchent devant lui dans la sincérité et la simplicité de leur âme, qu'il se plaît à faire entendre sa voix. Allons donc nous aussi à Jésus naissant, avec un coeur simple et droit. Pressons-nous avec amour autour du berceau de ce Dieu enfant. Il ne vient point dans l'éclat de sa majesté, ni entouré de sa force et de sa puissance ; ses cris enfantins ne sont que des cris de miséricorde et d'amour.

Son excès de charité nous laissera-t-il le coeur sec et glacé? Sa tendresse nous trouvera-t-elle insensibles? Oh! non. Nous mêlerons nos larmes de douleur et de reconnaissance aux larmes de ce divin enfant. Pendant tous ces saints jours, notre bonheur sera de nous tenir auprès de la crèche du Sauveur, et de rester à ses pieds dans le silence et l'admiration. Comme Marie, nous conserverons en nous tous ces prodiges, nous le savourerons ; la méditation de ces grands mystères nourrira délicieusement notre âme. Nous apprendrons à l'école de Jésus naissant l'humilité, la pauvreté, la mortification, l'obéissance, toutes ces vertus dont le monde se moque, parcequ'il ne peut les comprendre; et lorsque nous serons forcés de quitter l'étable de Bethléem, et de nous arracher à ce spectacle qui fait l'admiration du ciel et de la terre, nous en sortirons, comme les bergers, louant et glorifiant Dieu de tout ce que nous y aurons vu et entendu.


10 - LE PREMIER DE L'AN. Année 1849

CIRCONCISION, - ENFANCE DE N. S. JÉSUS-CHRIST.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. XEmofilia

Dociles à l'invitation maternelle de l'église, nos lecteurs catholiques se sont sans doute tenus pendant les saints jours de Noël, autour de la crèche où un Dieu naissant nous prêchait d'une manière si éloquente et si persuasive l'humilité, le mépris des plaisirs, et l'amour de sa pauvreté. Aujourd'hui un nouveau mystère, mystère douloureux, nous, rappelle encore autour du berceau du Divin Enfant. Selon le témoignage de l'évangile, le huitième jour, auquel l`enfant devait être circoncis étant arrivé, on lui donna le nom de Jésus, qui était celui que l'ange lui avait donné, avant qu'il fût conçu dans le sein de sa mère.

C'est ainsi que l'esprit saint nous révèle un des mystères adorables où Notre Seigneur manifesta ce désir des souffrances, que lui inspirait dès sa naissance son amour infini pour nous. Dans l'Évangile, l'énoncé de ce mystère nous offre deux circonstances également dignes de notre admiration et de notre reconnaissance. L'enfant voulut être circoncis, et recevoir le nom de Jésus. La circoncision, donnée par le Seigneur à Abraham, comme un signe de son alliance avec ce saint patriarche était d'une obligation rigoureuse pour toute sa postérité ; et Moïse n'avait fait que renouveler de la part du Seigneur, cette loi qui, sous le rapport religieux, politique et cérémoniel, était chez les Juifs, de la plus haute importance, et avait une grande signification. Le Sauveur, en qualité de législateur, ne pouvait être soumis à une loi qu'il avait, lui-même établie ; il daigne cependant se soumettre à cette cérémonie, ainsi qu'à toutes les autres prescriptions données aux Juifs par Moïse, afin de montrer qu'il était venu, non pour détruire la loi, mais pour l`accomplir, et pour remplir toute justice. Notre Divin Sauveur voulut donc dans ce mystère, nous donner une leçon profonde d'humilité, de patience, d'obéissance et de mortification. Ainsi, dans tous les mystères de la vie de Jésus-Christ, se retrouve l'enseignement de ces vertus qui sont la base de la morale chrétienne, et qui sont si opposées à la nature corrompue. Ces vertus, le fils de Dieu ne les a prêchées par ses paroles que pendant les trois dernières années de sa vie  mais il nous les avait enseignées dès le commencement, par son exemple, la plus efficace de toutes les prédications.

Notre miséricordieux et tout aimable Rédempteur, commença dans le mystère de sa circoncision, ce sacrifice qui ne devait avoir sa consommation parfaite que sur la croix. Les prémices de ce sang précieux, répandu pour l'expiation de nos péchés, et offert au Père céleste pour désarmer sa colère, étaient plus que suffisantes pour nous réconcilier avec Dieu et venger sa gloire. Mais, ce qui pouvait suffire à la gloire de Dieu, n'aurait pas suffi à notre instruction, et à cet excès d'amour que le Sauveur voulait nous témoigner ; et en versant son sang pour nous dans ce mystère, il ne faisait que préluder aux souffrances, aux persécutions et aux sacrifices de toute sa vie, et à sa douloureuse passion, où il devait verser jusqu'à la dernière goutte de son sang pour notre amour.

C'était l'usage chez les Juifs que le nom fût donné à l'enfant au moment de la circoncision, comme il l'est au baptême parmi nous. Ce fût pour se conformer à cet usage, que Notre Seigneur ne voulût recevoir le nom de Jésus, que le huitième jour après sa naissance, qui était le jour marqué par la loi pour la circoncision, quoique ce nom lui eût été donné par son Père Céleste dès avant sa naissance, selon cette parole de l'ange à Marie : Vous lui donnerez le nom de Jésus. Le nom de Jésus, signifie Sauveur. L'Église a institué une fête spéciale pour honorer ce nom adorable. Lorsque nous célébrerons cette fête, nous parlerons à nos lecteurs de la douceur et de la force de ce nom si aimable et si puissant. Avant même d'avoir reçu ce nom glorieux, le Sauveur avait déjà commencé à en remplir les obligations par les mérites de sa naissance ; mais, aujourd'hui il commence par l'effusion de son sang à accomplir ce qu'il y avait de plus pénible et de plus douloureux, dans les devoirs attachés pour lui à ce titre de Sauveur. C'est donc dans ce jour que Notre Seigneur commença à devenir Jésus ou Sauveur, dans toute l'étendue de ce mot, de nom et en réalité.

Pour honorer ce mystère, entrons dans cet esprit de sacrifice, qui résume dans une seule idée toute la vie de Jésus-Christ, et tout le christianisme, et faisons en sorte que le Divin Enfant soit véritablement pour nous, Jésus ou Sauveur, par la pratique des leçons et des exemples qu'il nous a donnés. Tout le temps qui s'écoule depuis Noël jusqu'à la fête de la Purification, c'est-à-dire un espace de quarante jours, est consacré à honorer la Sainte Enfance de Notre Seigneur. Ce temps est précisément celui que les mondains profanent le plus par des plaisirs opposés à la sainteté du christianisme. Nos pieuses lectrices, comprenant mieux l'esprit de la religion, sanctifieront ce temps par le recueillement et la méditation des mystères de l'Enfant Jésus, et y trouveront plus de joie et de paix intérieure, que dans des divertissements profanes qui ne laissent après eux, qu'un vide effrayant, le trouble et l'inquiétude. Dans beaucoup d'endroits, le temps de la Sainte Enfance est sanctifié par des exercices de piété à peu près dans le même genre que ceux par lesquels nous honorons Marie dans le mois de Mai. Nous invitons nos pieuses lectrices à se livrer avec ferveur à cette dévotion si tendre et si touchante, que l'Église a encouragée par d'abondantes indulgences. Parmi les mystères de la Sainte Enfance, quelques uns sont l'objet d'une fête spéciale, comme ceux que nous célébrons à Noël, dans la circoncision, à l'Épiphanie; d'autres sont offerts à notre dévotion, sans être publiquement solennisés par l'Église, tels que, la fuite en Égypte, le séjour dans cette terre d`exil, le retour d'Égypte, la vie cachée à Nazareth, et la présence de Jésus dans le temple, au milieu des docteurs.

Étudions les grandes leçons que le Sauveur nous donne dans ces ineffables mystères. Quel bonheur pour vous, jeunes et pieux catholiques, si l'on peut dire de vous, comme de Jésus, qu'en croissant en âge, vous croissez, en sagesse et en vraie science devant Dieu et devant les hommes ! Quelles bénédictions se répandront sur vous, et vous savez comprendre et pratiquer l'exemple que Jésus vous donne, lorsqu'il est dit de lui, que, vivant avec Marie et Joseph, il leur était soumis. L'Évangile a renfermé dans ce mot, toute la vie cachée du Sauveur. Mille fois heureux ceux à qui l'Esprit Saint aura donné l'intelligence de cette parole. Tous, rappelons-nous que c'est seulement à ceux qui deviendront comme de petits enfants, qu'est promis le royaume des cieux. Ayons donc l'obéissance et l'humilité de l'Enfant Jésus, soyons purs, innocents, simples et dociles comme des enfants. Par cette dévotion pratique à l'enfance du Sauveur, nous attirerons sur nous ses regards de miséricorde et d'amour, et nous acquerrons de nouveaux droits à la tendresse et à la protection de Marie, de cette mère très-pure et toujours vierge, qui ne connut point ici-bas d'autres richesses d'autre gloire, d'autres délices que l'amour du Divin Enfant Jésus.

Le jour de la circoncision est aussi le premier jour de l'an. Pour les chrétiens comme pour ceux que conduit l'esprit du monde, c'est un jour de voeux et de souhaits. Mais il y a cette différence que l'esprit de la religion n'inspire que des voeux conformes à la vertu, et des souhaits dignes d'une âme qui a d'autres espérances que celles d'une vie fragile et fugitive, et ces voeux, dans un chrétien, partent toujours d'une âme droite, et d'un coeur sincère et vrai dans ses épanchements. Dans le monde au contraire bien des voeux sont trompeurs, bien des souhaits sont mensongers. Trop souvent à cette époque les baisers donnés avec l'expression la plus vive de franchise et de cordialité, sont des baisers perfides, et les caresses, un voile à la trahison. Et lors même que ces voeux partent d'un coeur sincère, pour le mondain il ne s'étendent point au-delà d'objets futiles et périssables, ils se concentrent dans des espérances d'un jour. Pour nous, fidèles à un usage qui est louable et saint, et qui tend à rapprocher tous les hommes, en étouffant les haines, et mettant un terme aux dissensions, nous faisons aussi nos souhaits de bonne année, mais nous les faisons en chrétien. Nos vœux nous sont inspirés par un amour franc cordial, et ces voeux nous les adressons à tous. Nos frères sans doute ont la première place, tous ceux qui nous sont unis par les liens précieux de l'association que nous avons formée, nos abonnés, nos lecteurs, tous les catholiques enfin. Mais nos ennemis eux-mêmes ne sont point exclus de nos souhaits. Ceux même qui nous haïssent et nous persécutent, ne nous forceront point à les haïr. S'ils agissent de manière à nous empêcher d'avoir pour eux de l'estime, ils ne nous empêcheront pas pour cela de les aimer ; et nos prières s'adresseront au Seigneur aussi vraies et aussi ferventes pour eux, que pour nos fidèles amis.

En exprimant aujourd'hui nos voeux pour la gloire et la prospérité du pays, pour le bonheur temporel des individus et des familles, nous ne faisons que manifester un sentiment qui est profondément et intimement gravé dans nos coeurs. Mais nos voeux ne s'arrêtent point là. Nous souhaitons que ceux que Dieu a appelés à la conduite des affaires publiques, soient pénétrés de cette pensée que la grandeur et le bonheur d'un pays ne peuvent être solidement assis que sur les principes de la vérité et de la vertu ; que les pères de famille cherchent dans la religion les conditions d'union, de paix, et de soumission, sans lesquelles la félicité des familles est toujours compromise.  Nous souhaitons que tous les hommes aveuglés ouvrent les veux à la lumière, que ceux qui se sont égarés, reviennent aux saines doctrines de la vraie religion, et que tous nous soyons unis dans un même esprit et dans un même coeur. Aucune époque n'est plus propre que le renouvellement de l'année, à nous rappeler la brièveté du temps, la vanité de cette vie, et la futilité de tout ce qui doit passer avec elle. Usons donc de cette vie dans le but pour lequel elle nous a été donnée; alors nous verrons sans regret les années passer rapidement les unes après les autres, et s'engloutir sans retour dans l'abyme du passé, et quand le moment sera venu où le temps aura fini pour nous, nous entrerons avec confiance et avec joie dans la demeure de notre éternité.



11- L'ÉPIPHANIE

MANIFESTATION DE NOTRE SEIGNEUR AUX GENTILS. (aux nations)


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. R.85681e5b66afa5778c98aaa9a787bebb?rik=f2FtBpReehdmSg&riu=http%3a%2f%2fchristroidumonde.c.h.pic.centerblog.net%2f849db18b

Cette fête que nous avons célébrée il y a deux jours, et à laquelle la semaine presque toute entière est consacrée, nous rappelle un des mystères les plus propres à exciter notre reconnaissance et notre amour envers le Sauveur. Le mot Épiphanie, veut dire manifestation ; et c'est à pareil jour, en effet, que Notre Seigneur voulût se manifester aux Gentils dans la personne des Mages.

On appelle Gentils, tous les peuples, distincts du peuple Juif, et qui, avant la venue de Jésus-Christ, étaient assis à l'ombre de la mort, c'est-à-dire, plongés dans les ténèbres de l'idolâtrie. Le Messie promis à nos premiers parents, devait venir pour tout le genre humain ; nul peuple, nul homme, ne devait être exclu du bienfait de la rédemption, car, comme nous le dit l'apôtre Saint Paul, Dieu, notre Sauveur, veut que tous les hommes soient sauvés, et viennent à la connaissance de la vérité. Dieu, il est vrai, s'était choisi un peuple privilégié, dépositaire des promesses, chargé de les conserver intactes et de les transmettre fidèlement; mais les promesses n’étaient point exclusivement données au peuple juif. C'était bien de la race d Abraham que le messie devait naître, dans la tribu de Juda, et dans la famille de David ; mais le Seigneur avait annoncé au père de la nation juive, à Abraham, que dans celui qui devait naître de lui, c'est-à-dire, dans le Messie, toutes les nations seraient bénies. Jacob parlant de la part du Seigneur, appelait le Sauveur, le Désiré des Nations ; et les prophètes, exaltant dans les termes les plus pompeux, la gloire et la majesté de ce grand Roi, avaient annoncé qu'il règnerait sur tous les peuples, et commanderait à toutes les nations. Cette croyance était familière à tous les Juifs, comme on le voit par l'interprétation charnelle et grossière qu’ ils en avaient faite, en se flattant que ce nouveau Roi rétablirait le royaume de Juda, et que, par la force de ses armes, il conquérerait tout  l`Univers. Cette opinion était également répandue chez tous les peuples anciens, qui, ayant connaissance des livres sacrés des Hébreux, en avaient aussi défiguré le sens ; et les historiens profanes nous apprennent que le monde entier était dans attente d’un grand conquérant, qui devait sortir de la Judée, et soumettre tout l`univers; ce qui ne devait s'entendre que de cette domination pacifique que le sauveur, ce véritable prince de la paix, devait exercer sur tous les hommes, par la puissance de sa divine parole.

Ce n'était donc point assez que Notre-Seigneur se fût manifesté aux Juifs dans la personne des bergers, dès les premiers instants de sa naissance. Il fallait que les Gentils fussent invités aussi à venir honorer le berceau de leur nouveau Roi, et saluer celui qui devait être leur libérateur. L'Évangile nous dit que des Mages vinrent de l'Orient à Jérusalem, pour adorer le Sauveur. Ces Mages, qu'une tradition fort ancienne nous apprend avoir été au nombre de trois, étaient des hommes considérés dans leur pays par leur puissance et leur savoir. Ils se livraient à l'étude des astres, selon l'usage des Orientaux, et Dieu se servit de ce moyen pour leur faire connaître le messie. On pense que les Mages, quoique vivant au milieu de peuples idolâtres, avaient conservé la connaissance du vrai Dieu, et que par leur fidélité à son culte, il se préparèrent à obtenir le don précieux de la foi.

Dieu fit donc briller à leurs yeux une étoile extraordinaire et miraculeuse, et la grâce éclairant leurs âmes, en même temps que cet astre nouveau leur apparaissait, ils comprirent que c'était le signe qui indiquait l'avènement du messie, de ce grand Roi prédit tant de siècles à l'avance, sous la figure d'une étoile qui devait se lever de Jacob. Dociles à l'avertissement d'en haut, les Mages quittèrent leur pays, leurs parents, leurs amis, et s'exposant aux fatigues et aux dangers d'une longue route, ils vinrent chercher
le Sauveur dans un pays inconnu. Dieu, ayant permis que l'étoile qui les conduisait, disparût, quand ils furent dans la Judée, ils vinrent à Jérusalem, capitale de tout le pays, s'attendant sans doute à trouver le Roi des Juifs dans la pompe et l'éclat de la Majesté royale. C'est que les mystères d'un Dieu pauvre et humilié ne leur avaient point encore été révélés. Mais, ce ne fut point à la cour d'Hérode qu'ils trouvèrent le Sauveur ; instruits par les princes des prêtres et les docteurs de la loi, ils se rendirent à Bethléem, sous la conduite de l'étoile que le Seigneur avait fait de nouveau briller à leurs yeux. Là, ils ne trouvèrent qu'une pauvre demeure qui n'annonçait que l'abjection et la misère ;
cette vue ne ralentit point leur foi. En entrant dans la maison, ils trouvèrent l'enfant avec Marie, sa mère, et, se prosternant, ils l'adorèrent ; puis, ouvrant leurs trésors, ils lui offrirent pour présents, de l'or, de l'encens et de la myrrhe.

Dans ce récit si simple de l'Évangile, nous voyons éclater les effets de la miséricorde de Dieu sur les Mages, et en général sur tous les peuples païens qui étaient convoqués au berceau du Sauveur, pour participer au bienfait de la Rédemption. Les Mages ont été les prémices des Gentils. Cette fête est donc par excellence notre fête à nous qui sommes les descendants de ces peuples, qui, pendant tant des siècles, demeurèrent livrés aux extravagances et aux égarements de l'idolâtrie. Avec quels transports d'amour ne devons nous pas célébrer ce grand jour où le soleil de justice commença à se lever sur le monde païen, et où la lumière de la vérité, fut révélée aux nations ? Grâces soient rendues à Dieu, s'écrie l'apôtre, pour le don ineffable qu'il nous a fait ! et ce don n'est autre que le présent inestimable de la foi. Pour apprécier ce présent, rappelons-nous à quels excès étaient livrés nos pères, dans les ténèbres du paganisme, et quel est l'état des nations que le christianisme n'a point encore éclairés. C'est la miséricorde du Seigneur qui nous a arrachés à la puissance de l'empire des ténèbres, et nous a transportés dans un royaume céleste éclairé de son admirable lumière, en nous introduisant dans son Église. Nous voyons dans ce mystère, ce mélange de force et de faiblesse, de gloire et d'humiliation, de grandeur et de pauvreté, qui éclate dans tous les mystères du Sauveur, et y imprime le double caractère de son humilité et de sa divinité.

Il naît dans une étable, entre deux animaux, mais les anges descendent du ciel pour publier aux hommes de bonne volonté, la merveille qui vient de s'opérer. Il est enveloppé de langes, sans mouvement et sans force, et par la puissance de sa grâce il appelle à lui les Mages du fond de l'Orient ; il est dans la pauvreté et le dénuement, et il voit les grands et les puissants du siècle, venir à ses pieds ouvrir leurs trésors, et lui offrir de riches présents. C'est ainsi que plus tard, l'Église devait croître dans les épreuves, se fortifier au milieu des persécutions, et dénuée de tout secours humain, subjuguer et conquérir au christianisme, les princes de la terre et les maîtres du monde.

Tandis que les Mages conduits par une foi vive, allaient adorer avec amour celui qu'ils étaient venus chercher dans la simplicité de leur coeur, et qu'ils avaient mérité de trouver, un prince ambitieux et cruel méditait la perte de celui qui venait sauver le monde. Hérode, cachant ses coupables desseins du voile d'une piété mensongère, feignait de vouloir connaître où était le nouveau roi des Juifs, afin, disait-il, d'aller aussi l'adorer. Il recommanda donc aux Mages de revenir vers lui, quand ils auraient trouvé l'enfant, espérant pouvoir détruire ainsi dans son berceau, celui qu'il regardait déjà comme un rival dangereux. Mais le Seigneur déjoue, comme il lui plaît, les complots des méchants. Les Mages, avertis en songe par l'ange du Seigneur, retournèrent dans leur pays par un autre chemin ; et Hérode dont la cruauté ne reculait devant aucun crime, ne vit point d'autre moyen de rassurer son ambition inquiète, que d'envelopper dans une proscription générale tous les petits enfants de Bethléem et des environs ; et ce sont ces victimes immolées aux craintes sanguinaires d'Hérode, que l'Église honore sous le nom des Saints Innocents.

Les saints Pères ont vu dans Hérode l'image des hypocrites qui ne paraissent chercher le Sauveur avec respect que pour l'immoler, et ne témoignent de la bienveillance pour la religion, qu'afin de mieux travailler à l'anéantir. Ceux-là, comme Hérode, ne parviennent jamais à la connaissance de la vérité, et leurs tentatives impies retombent sur leurs têtes. Les Mages au contraire sont l'image de ces âmes droites qui cherchent Dieu dans la sincérité de leur coeur, et méritent de le trouver. Venons donc au berceau du Sauveur, comme les Mages, avec une foi vive, pure et sincère, avec un amour ardent, et les sentiments de la plus tendre reconnaissance. Rendons hommage à sa divinité adorable, à son humanité sainte, à sa glorieuse royauté, ainsi que le firent les Mages en lui offrant de l'or comme à un roi, de l'encens comme à leur Dieu, et indiquant par la myrrhe, qui était un parfum dont on se servait pour embaumer, qu'ils le reconnaissaient pour un homme capable de souffrir et de mourir. Nous aussi pour participer aux fruits de ce mystère, nous offrirons de la myrrhe à Jésus-Enfant, par notre esprit de pénitence et de mortification ; nous ferons monter vers lui l'encens de nos prières, pour reconnaître en lui notre Dieu, et pour honorer ce grand Roi, nous lui offrirons l'or très pur de notre amour et d'une ardente charité.


12 - LE SAINT NOM DE JÉSUS.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. R.5c1c3c9ddc3a7f23aca7f154f7c39103?rik=RNU7tf7UorXuMw&riu=http%3a%2f%2freflexionchretienne.e-monsite.com%2fmedias%2fimages%2fe9d104de-2

De même que dans les personnes qui nous sont chères, nous aimons jusqu'au nom qu'elles portent, que c'est un bonheur pour nous de le célébrer, et que nous ne pouvons l'entendre prononcer sans sentir se renouveler notre affection ; ainsi, l'Église Catholique, pour entretenir dans le coeur de ses enfants, l'amour de son époux céleste, leur fait souvent répéter le doux nom de Jésus, et non contente de nous le rappeler sans cesse dans toutes ses prières et ses cérémonies, elle a institué une fête spéciale dont l'objet est le nom adorable de Jésus. Nos lecteurs catholiques, et surtout nos pieuses lectrices aimeront que nous les préparions par quelques réflexions édifiantes à célébrer dignement cette solennité.

L'église a choisi pour la fête du saint nom de Jésus, le second dimanche après l’Épiphanie, c'est-à-dire une époque où déjà nos coeurs ont dû s'embraser d'amour par la célébration des grands mystères de l'enfance du Sauveur, tels que sa naissance, sa manifestation aux Gentils, et d'autres, dont nous avons déjà parlé. L'église, dans ses solennités, nous offre toujours quelque objet spirituel et moral, rendu accessible à nos sens par une forme extérieure; et en cela elle montre sa profonde sagesse, et la connaissance qu'elle a du coeur de l'homme et de ses besoins. Les objets spirituels, privés d'un symbole visible qui les représente extérieurement, seraient inaccessibles au grand nombre ; des êtres purement extérieurs et matériels, sans rapport à un objet spirituel et moral, ne constitueraient qu'un culte grossier, sensuel et tendant à l'idolâtrie. L'église catholique seule, en s'adressant d'abord à l'intelligence et au coeur, sait aussi parler aux sens et à l'imagination, et diriger ainsi l'homme tout entier vers les objets célestes et divins. C'est ainsi que l'église nous rend en quelque sorte sensible et palpable dans le nom de Jésus, tout ce qui se trouve renfermé dans les titres les plus aimables et les plus tendres que Notre Seigneur a voulu prendre envers nous.

L'église, en nous faisant honorer le nom mystérieux et divin de Jésus, ne nous invite donc pas à honorer seulement un mystère particulier, mais plutôt la réunion de tous les mystères qui se trouvent renfermés dans ce nom adorable. Car, si le fils de Dieu a voulu s'unir à notre nature en s'incarnant, s'il a voulu naître dans l'humilité et la pauvreté, s'il a consenti à se révéler aux nations, s'il a voulu fuir dans la terre étrangère, et passer son enfance dans l'exil, s'il a embrassé l'obscurité d'une vie cachée, les fatigues d'une vie pénible et laborieuse, s'il a prêché au milieu des épreuves, des calomnies, et des persécutions, s'il s'est dévoué aux souffrances et à la mort, s'il est ressuscité pour notre justification, s'il est allé à la droite de son père, nous préparer une place dans son royaume, tous ces mystères, il ne les a accomplis, que pour remplir toutes les obligations qu'il s'était imposées en prenant le titre de Sauveur; tous ces mystères se trouvent donc renfermés dans le nom mystérieux de Jésus; et, pour honorer dignement ce précieux nom, nous devons chercher à exciter en nos âmes, toutes les impressions diverses et les mouvements affectueux que produisent en nous les différents mystères que l'église nous fait célébrer dans tout le cours de l'année.

Ce doux nom de Jésus renferme éminemment tous les autres noms sous lesquels un Dieu fait homme se présente à notre amour et à nos hommages. Le nom de Jésus nous rappelle et la divinité de celui qui nous a sauvés par ses mérites infinis, et son humanité, selon laquelle il a pu souffrir et mourir. C'est en sa qualité de Jésus, qu'il a été Rédempteur, car, pour nous sauver il a payé le prix de notre rédemption ou de notre rachat, et ce prix n'a point été de l'or ou de l' argent, mais son sang précieux. Comme Jésus ou Sauveur, il a été médiateur entre son père et les hommes pécheurs, et il a opéré entre le Ciel et la Terre, cette réconciliation qui ne pouvait être l'oeuvre d'une pure créature. C'est à cause de ce beau nom de Jésus, que toute puissance lui a été donnée au Ciel et sur la Terre, et qu'il est notre maître et notre roi, et en même temps notre bienfaiteur, notre ami, notre frère, et le premier né de tous les élus.  Et sur le nom de Jésus est fondé aussi le pouvoir qui lui a été donné de juger les vivants et le morts, car il lui appartient de venir dans son second avènement, nous demander compte des miséricordes, que, dans son premier avènement, il avait répandues sur nous. Nous ne devons donc point nous étonner que ce nom qui renferme tant de mystères ait été indiqué par l'ange à Marie, au moment même de l'incarnation. Et, ne croyons pas, dit St. Bernard, que ce nom lui soit imposé par un homme ou par un ange ; c'est un nom qui lui appartient de toute éternité, et que l'ange ne fait que révéler de la part du père. En effet, ajoute le saint docteur il n'en est point de ce Jésus, notre Sauveur, comme de tant d'autres, qui avaient porté ce nom avant lui.

Chez les autres ce n'était qu'un vain nom, ou tout au plus une figure. Ainsi Jésus ou Josué, introduisant le peuple Juif dans la terre promise, n'était qu'une image et une ombre du Sauveur, nous faisant entrer par sa grâce dans la véritable terre promise, c'est-à-dire ici-bas, dans son église, et un jour dans le lieu du repos d'une éternelle félicité. Venons donc honorer par nos humbles hommages ce nom divin de Jésus, nom de gloire, de grandeur et de majesté ; mettons-nous sous la protection invincible de ce nom si fort et si puissant. Il n'est point d'autre nom donné aux hommes, sous le ciel, par lequel ils puissent être sauvés. C'est par ce nom que la puissance du fort armé, c'est-à-dire du démon (l`ange déchu), a été vaincue, par ce nom que le prince des ténèbres a été enchaîné, et que son joug de fer a été brisé. C'est aussi par ce nom que nous vaincrons tous nos ennemis. Avec le nom de Jésus, nous repousserons toutes les tentations, nous surmonterons toutes les difficultés, nous passerons à travers tous les dangers, sans y succomber. L'enfer, le monde et la chair réunissant leurs efforts, ne pourront rien contre celui qui a mis toute sa confiance dans le nom de Jésus; et au nom, de Jésus tout genou doit fléchir, par crainte ou par amour, au Ciel, sur la Terre et dans les Enfers. Mais comment pourrions-nous exprimer ce qu'il y a de suave et de délicieux dans de doux nom de Jésus? Celui-là seul le peut comprendre, qui en a fait l'heureuse expérience. L'Église, dans les hymnes sacrées qu'elle nous fait chanter en ce jour, multiplie les comparaisons les plus vives, les termes les plus énergiques, pour nous faire comprendre ce qu'il y a d'harmonieux pour l'oreille chrétienne, dans ce nom de Jésus, combien la prononciation de ce nom sacré est douce, plus douce à la bouche, que le pur rayon de miel : combien la pensée de ce saint nom est délectable à l'âme, combien son souvenir est consolant. Sommes-nous plongés dans la tristesse, nous dit le Saint Docteur que nous avons déjà cité, que le nom de Jésus nous vienne aussitôt à l'esprit qu'il nous vienne à la bouche; et à la lumière douce et efficace de ce nom divin, les nuages de la douleur, du chagrin et de l'ennui, se dissiperont, la sérénité, le calme et la paix renaîtront dans notre âme.

Si nous tombons dans quelque faute, et que la vue de nos péchés nous abatte et nous décourage, invoquons le nom de Jésus, et ce nom vivifiant fera rentrer l'espérance et l'amour dans notre âme. Pour moi, ajoute saint Bernard, tout ce que je vois et tout ce que j'entends, ce que je puis sentir et goûter, m'est sec et insipide, s'il n'est assaisonné du doux nom de Jésus. Cherchons donc Jésus dans la simplicité de nos coeurs. Nous verrons combien il est bon pour ceux qui l'invoquent; combien miséricordieux envers ceux qui le cherchent ; mais que n'est-il point pour ceux qui l'ont trouvé? Oh! pour ceux-là il est tout aimable, toujours plus désirable. Il est à leur intelligence une pure et vive lumière, dans leur âme une source d'eau vive, à leur coeur une douceur ineffable qui comble tous leurs désirs, et le sinon d'une joie sainte et de célestes délices. Faisons dans cette sainte solennité l'heureuse expérience de ce bonheur des prédestinés.

Appelons Jésus par nos soupirs, attirons le par nos larmes, tournons vers lui seul toute l'ardeur de nos voeux, toute la vivacité de nos pieux désirs. Plus nous le goûterons, plus nous aurons faim et soif de lui ; et la vérité brillant à nos yeux, et nous faisant voir la vanité de tout ce qui n'est pas Dieu, notre âme s'embrasera du feu d'une ardente charité. Heureux alors de voir ce nom adorable de notre aimable Sauveur, loué et glorifié au plus haut des cieux, de voir sa puissance invincible redoutée par les démons (ange déchus) tremblants au fond des enfers, nous travaillerons aussi à établir de plus en plus son règne sur la terre, et nous voudrons faire goûter à tous nos frères, comme nous les aurons goûtés nous-mêmes, la force et la douceur du saint nom de Jésus.


13 - LA CONVERSION DE SAINT PAUL.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Conversion+sa+pablo

Entre les événements les plus remarquables des premiers jours du christianisme et qui influèrent le plus sur les destinées futures de l'église, un des plus frappants, fût la conversion de St. Paul, ce vase d'élection, choisi pour porter le nom du Seigneur devant les Nations, devant les Rois et devant les enfants d'Israël. Chrétiens et incrédules, tous ont également senti la force de cet événement, sur lequel le Saint Esprit à semblé vouloir appeler particulièrement notre attention, en permettant que les circonstances de ce fait nous fûssent développées avec tous leurs détails, dans plusieurs passages des Saintes Écritures. Des écrivains chrétiens, parmi les protestants mêmes, ont écrit des ouvrages excellents pour prouver la divinité du christianisme par le seul fait de la conversion de St. Paul. Il n'est donc point étonnant que l'église nous invite à célébrer par une fête spéciale ce mémorable et miraculeux événement où Dieu manifesta les richesses de sa miséricorde, non seulement sur le Grand Apôtre, mais sur tous ceux qui devaient croire par sa parole, et être sauvés par ses prédications.

En recueillant ce que St. Paul nous dit de lui-même dans les actes des Apôtres et dans ses épîtres, et ce que les écrivains des temps Apostoliques nous en ont transmis, nous voyons qu'il naquît de la tribu de Benjamin, à Tarse, ville de Cilicie, qui avait le droit de bourgeoisie, droit honorifique et utile, que les Romains accordaient à des villes privilégies, chez les peuple conquis. St. Paul, quoique juif de nation, était donc citoyen romain. Son nom était Saul, qui fût changé en celui de Paul, après qu'il eût converti le proconsul Sergius Paulus, et sans doute en mémoire de cette conversion. Envoyé à Jérusalem par son père qui était de la secte des Pharisiens, il fût élevé auprès de Gamaliel, un des plus habiles docteurs de la Nation Juive, et initié par lui à toutes les connaissances qui étaient familières aux docteurs de la loi. Les amis comme les ennemis du nom chrétien, s'accordent à représenter Saint Paul comme un homme d'une haute et puissante intelligence, d'une indomptable force d'âme, d'une énergie qu'aucun obstacle ne pouvait rompre, et d'une activité et d'une persévérance infatigables.  En même temps qu'il faisait dans l'étude de la loi des progrès qui le firent distinguer entre tous les jeunes gens de son âge ; il puisa dans la secte des Pharisiens, une haine violente contre le christianisme. Il consentit à la mort de St. Etienne, premier martyr, et pendant qu'on lapidait le St. Diacre, Paul gardait les vêtements de ses bourreaux, témoignant ainsi la part qu'il prenait à cet acte d'iniquité. Mais Etienne, à l'exemple de son divin maître, avait prié pour ses bourreaux. En mourant il avait crié à haute voix: Seigneur ne leur imputez point ce péché.

Ce cri de miséricorde et de pardon fût entendu, et un des plus heureux fruits du martyr de St. Etienne, fût la conversion de son plus ardent persécuteur. Voici comment les livres saints nous racontent cette conversion. « Paul, ne respirant encore que menaces et que carnage contre les disciples du Seigneur, vint trouver le Grand Prêtre, et lui demanda des lettres pour les synagogues de Damas, afin que, s'il trouvait quelques personnes de cette secte, hommes ou femmes, il les amenât prisonniers à Jérusalem. Mais comme il était en chemin et qu'il approchait de Damas, il fût tout d'un coup environné d'une lumière du ciel, et étant tombé par terre, il entendit une voix qui lui disait: Saul, Saul, pourquoi me persécutez-vous? Il répondit : qui êtes-vous, Seigneur ? et le Seigneur lui dit : Je suis Jésus que vous persécutez. Alors tout tremblant et tout effrayé, il dit : Seigneur, que voulez-vous que je fasse? Le Seigneur lui répondit: levez-vous, et entrez dans la ville, et on vous y dira ce qu'il faut que vous fassiez.» Paul, docile aux mouvements de la grâce, et ne résistant point à la vision céleste, entra dans Damas, conduit par ses compagnons de voyage, et après être resté trois jours entiers sans boire et sans prendre de nourriture, il fût visité de la part du Seigneur par un des disciples, nommé Ananie, qui lui imposant les mains, lui rendit la vue ; et Paul se levant, fût baptisé, et aussitôt il prêcha Jésus dans les synagogues assurant qu'il était le fils de Dieu.

Cette conversion de St. Paul fût aussi solide, qu'elle avait été prompte et complète. Aussitôt que le Seigneur lui eût parlé, il n'écouta point la voix de la chair, ni du sang, mais renonçant pour le nom de Jésus-Christ à toutes les espérances qu'il pouvait concevoir de la part des Juifs, il s'exposa volontiers aux suites de leurs persécutions et de leur haine. Ce ne fût point seulement, pour un court espace de temps, mais pendant plus de 30 années, et jusqu'à la fin, que St. Paul se dévoua à des fatigues incroyables, à des persécutions sans nombre, aux privations et aux épreuves les plus pénibles, pour prêcher le nom du Sauveur à une multitude de nations, opposées d'habitudes, de moeurs et de langage, sachant se faire tout à tous, afin de les gagner tous à Jésus Christ; et après avoir fait entendre en quelque sorte à tout le genre humain la bonne nouvelle du salut, après avoir confessé le nom de Jésus dans la gloire et dans l`ignominie dans l`abondance et dans le dénuement, devant les tribunaux, en présence des rois, et des gouverneurs, devant une multitude furieuse, en présence des Païens et des Juifs, après avoir souffert pour ce nom sacré, la prison et les chaines, après avoir été plusieurs fois battu de verges, lapidé, laissé pour mort, il rendit enfin au nom adorable de son divin maître, un dernier et glorieux témoignage, en donnant pour lui ce qui lui restait d'une vie épuisée par ses travaux apostoliques.

Ajoutant à l'honneur de l'apostolat celui du martyre, St.Paul fut mis à mort le même jour que St. Pierre, par l'ordre de l'empereur romain Néron, à l'époque de la première persécution, qui fût suscitée par ce prince féroce. Pour tout esprit droit, la conversion de St. Paul serait sans doute suffisante pour convaincre de la divinité de notre sainte religion. Les incrédules n'ont voulu voir dans cette lumière qui brilla aux regards de Paul, et dans cette voix céleste qu'il entendit, que l'effet du tonnerre, ou de quelque autre semblable événement tout naturel. Son zèle ne fût produit que par l'enthousiasme et le fanatisme, moyens très simples pour rendre compte de ses travaux apostoliques, et du succès de ses prédications. C'est ainsi que les ennemis de la religion ne craignent point de recourir aux interprétations les plus forcées, aux suppositions les plus grossières plutôt que de rendre hommage à la vérité qui les importune. Combien notre foi doit être fortifiée, quand nous voyons l'incrédule, contraint pour combattre nos croyances, de se réfugier dans des opinions impies ! Selon eux un événement naturel et tout ordinaire aurait opéré dans une intelligence et une volonté comme celle de St. Paul, une révolution soudaine et complète ; et cette révolution intellectuelle et morale, opérée sans cause raisonnable, eût cependant déterminé en lui un plan de conduite habilement combiné, sagement concerté et conduit jusqu'au bout avec une prudence, une supériorité de vues et de lumières, et une énergie d'action, qui ne se démentirent jamais !

Pour nous qui croyons à la toute-puissance de Dieu, et aux miracles qu'elle enfante, combien il nous est doux et consolant de penser que Dieu en appelant l'Apôtre des Nations d'une manière si extraordinaire, voulait nous donner à nous-mêmes des moyens d'affermir notre foi ! Combien ce récit de l'écriture si court et si simple nous paraît clair, irrécusable, convainquant pour celui qui cherche sincèrement la vérité ! Mais en y admirant les moyens secrets que Dieu tient cachés dans les trésors de sa sagesse et de sa puissance, nous devons bien plus encore y adorer cette inépuisable miséricorde qui éclaire les plus aveugles et change, quand il lui plaît, les coeurs les plus endurcis.

C'est une parole pleine de vérité, et que nous devons recevoir en toute reconnaissance, nous dit le Grand Apôtre lui-même, Que Jésus- Christ est venu pour sauver les pêcheurs, dont je suis moi-même tout le premier. Parole ineffable en effet, parole consolante qui à réjoui tout l'univers, plongé jusqu'alors dans l'horreur du désespoir. Qui n'eût cru à l'infinie miséricorde d'un Dieu Sauveur en entendant cette miséricorde prêchée par celui même qui en avait été l'objet d'une manière si frappante ? Quel pêcheur n'eût espéré en entendant des promesses de pardon faites au nom de Dieu par un homme qui tout le premier avait été un pécheur, et était alors un vase d'élection? Et, maintenant encore, quel est celui d'entre nous qui a la foi, et ne se sente rempli d'espérance, à la vue de ce prodige d'amour opéré dans la conversion de l'Apôtre des Gentils ? Espérons-donc tous pour nous mêmes, espérons pour nos frères et nos amis. Quels qu'ils soient, ils n'ont point encore persécuté l'église comme l'avait fait St. Paul.

Les Saints nous font remarquer dans la conversion de St. Paul un caractère qui doit servir de modèle à notre conversion propre. Aussitôt que le Seigneur l'a terrassé, Paul fait entendre ce cri de repentir et de conversion : Seigneur, que voulez-vous que je fasse? Puisque tous tant que nous sommes, nous avons besoin de conversion, sous bien des rapports, poussons aussi vers Dieu ce cri du coeur: Seigneur que voulez-vous que je fasse? Le Seigneur se révèle toujours à ceux qui le cherchent dans la sincérité de leur âme. Que l'incrédule demande avec droiture à être éclairé, et la lumière brillera à ses yeux. Que le pécheur demande ce qu'il doit faire pour rentrer dans les sentiers de la justice; et Dieu lui enverra un Ananie, pour le lui faire connaître. Puisse ainsi la conversion du Grand Apôtre, en affermissant notre foi, être pour nous le modèle d'une prompte et parfaite conversion.



14- LA PURIFICATION DE LA VIERGE MARIE, ET LA PRÉSENTATION DE l`ENFANT JÉSUS AU TEMPLE.

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. SimeonAnna-e1422461981465-1

Le mystère que nous célébrons en ce jour, termine le temps consacré à la sainte enfance de Notre Seigneur. Si nous avons médité avec amour sur les mystères de l'enfant Jésus, et si cette méditation a excité en nous des sentiments d'une tendre reconnaissance ; il nous sera facile de puiser dans le mystère de la purification, les grandes instructions que Notre Seigneur et sa Sainte Mère nous y ont données, et les sentiments de piété que cette solennité est propre à nous inspirer.

Selon la loi de Moïse, tout enfant mâle, premier né, devait être consacré au Seigneur, et racheté à prix d'argent. Cette cérémonie qui devait rappeler aux Juifs l'extermination des premiers nés des Égyptiens, et la délivrance de la servitude d'Égypte, les faisait souvenir aussi que tout appartient au Seigneur, et c'est pour cela que les prémices des fruits et des animaux lui étaient également consacrés. La loi ordonnait aussi que le trente-troisième jour après la circoncision de l'enfant, et par conséquent le quarantième jour après sa naissance, la mère accomplit la cérémonie de sa purification qui consistait à offrir un agneau et une tourterelle, ou deux tourterelles seulement, si sa pauvreté ne lui permettait point d'offrir un agneau. Ces lois ne pouvaient rigoureusement regarder Notre Seigneur, ni sa Sainte Mère.  Jésus-Christ auteur de la Loi, ne pouvait être astreint aux obligations d`une Loi de servitude qu`il venait remplacer par une loi plus parfaite, une Loi de Grâce et d`Amour; et Marie, parfaitement pure, n`avait pas besoin de purification.

Mais, il convenait que le Sauveur accomplit ainsi toute justice et qu'il nous donnât cet exemple d'obéissance, afin de nous rendre plus facile la soumission à la loi qu'il devait plus tard substituer à la loi de Moïse ; et il était également convenable que Marie cherchât à dérober aux regards des hommes la glorieuse prérogative dont le Seigneur l'avait honorée. Tous les deux nous donnèrent donc dans cette cérémonie, un exemple parfait d'obéissance et d'humilité, qui ne doit pas être pour nous l'objet d'une stérile admiration. Mais, nous comprendrons mieux ce que nous devons admirer et imiter dans ce mystère, en lisant les détails que le Saint Esprit nous en donne dans l'Évangile.

«Le temps de la purification de Marie étant accompli selon la loi de Moïse, ils portèrent l'enfant à Jérusalem, pour le présenter au Seigneur, selon qu'il  est écrit dans la loi du Seigneur : tout enfant mâle, qui naîtra le premier, sera consacré au Seigneur, et pour donner ce qui devait être offert en sacrifice, selon qu'il est écrit dans la loi du Seigneur, deux tourterelles ou deux petits de colombes. Or, il y avait alors à Jérusalem, un homme juste et craignant Dieu, nommé Siméon. Il lui avait été révélé par le Saint Esprit; qu'il ne mourrait point, qu'auparavant il n'eût vu le Christ du Seigneur. Il  vînt donc au temple, conduit par l'Esprit de Dieu, au moment où on y entrait l'Enfant Jésus, pour accomplir à son égard les cérémonies de la loi ; et alors, le saint vieillard prenant lui-même l'Enfant entre ses bras, rendit grâces à Dieu.» (Saint Luc, chap. 2.)

Admirons, nous dit St. Ambroise, ce mélange de justice et de miséricorde qui fait que Dieu se cache aux méchants, et se révèle à ceux qui le cherchent avec droiture. Mais, imitons en même temps la foi du saint vieillard que l'évangile nous présente ici pour modèle. Ses sens ne lui offrent qu'un enfant pauvre, faible et obscur, porté dans le temple, sans bruit et sans éclat, par des parents que leur pauvreté contraignait à offrir les victimes des plus indigents. Car, nous ne pouvons douter que l'extérieur de Joseph et de Marie ne fût conforme à l'humble et pauvre sacrifice qu'ils venaient offrir. Mais éclairé par sa foi, Siméon, dans cet enfant reconnaît son Dieu ; dans celui que l'on offre au Seigneur, il voit la victime qui doit être offerte un jour pour le salut du monde, et celui qui est maintenant racheté pour quelques pièces d'argent, lui apparaît comme celui qui doit être un jour le Rédempteur de son peuple, et donner son propre sang pour la rançon du genre humain.

Quel eut été notre bonheur, si nous eussions pu comme ce saint vieillard, tenir dans nos bras et serrer sur notre coeur l'Enfant Divin qui venait déjà s'offrir pour nous à son père, et préluder à l'oeuvre de notre rédemption ! Que les bonnes oeuvres que la foi nous fera produire, nous dit Saint Ambroise, soient comme les bras avec lesquels nous pourrons presser l'Enfant Jésus. Si nous avons cette foi qui opère par la charité, si tous nos désirs et toutes nos espérances n'ont pour objet que de voir le Christ du Seigneur, nous pourrons comme Siméon, jouir des caresses et du sourire de Jésus Enfant.

Ce fût dans l'enthousiasme de sa reconnaissance, que Siméon fit entendre ce cantique d'actions de grâces, que l'Église met tous les jours à la bouche de ses ministres. Seigneur, s'écrie le prophète, maintenant vous laisserez mourir votre serviteur en paix, parceque mes yeux ont vu le Sauveur que vous nous donnez, et qui doit être la lumière qui éclairera les Nations. C'est en mémoire de ces paroles prophétiques, et pour nous rappeler leur accomplissement que ce jour là la messe est précédé d'une cérémonie qui consiste à bénir des cierges, et à les porter processionnellement allumés. Pour entrer dans l'esprit de cette cérémonie qui n'a rien que de louable, nous devons nous proposer d'honorer Notre Seigneur, comme la lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde, de marcher à la clarté de cette lumière divine, comme étant maintenant les enfants de la lumière, et témoignera Dieu notre reconnaissance de ce qu'il a bien voulu par l'admirable lumière de son évangile, dissiper les ténèbres dans lesquelles nos pères étaient plongés, et où tant de peuples sont encore ensevelis.

L'offrande que notre seigneur fit de lui même à son père, doit être le modèle de la nôtre. Sans doute, nous dit St. Bernard, il y avait une grande différence de ce sacrifice du matin, où Jésus offert à Dieu dans les bras d'un vieillard était racheté, et rendu à sa mère, et cet autre sacrifice sanglant qu'il devait offrir à la fin, mourant pour ses frères, entre les bras de la Croix, et sous les yeux de Marie, sans qu'aucune autre victime pût être mise à sa place. Cependant Dieu voulut que dans les joies mêmes de cette cérémonie, Marie entrevit les douleurs de la Croix et la passion de son Divin Fils. Votre âme, dit Siméon, s'adressant à Marie, votre âme à vous-même sera transpercée d'un glaive. Cette parole, s'écrie St. Bernard, cette parole prophétique ne fût-elle pas pour vous, ô mère de douleur, un glaive à deux tranchants, qui déchira votre âme, bien longtemps avant que votre coeur maternel ressentit le coup de la lance qui ouvrit le coeur de votre Divin Fils. Commençons donc dès à présent à compatir aux douleur de Jésus et de Marie.

L'Évangile termine le récit de cette solennité, en nous présentant une sainte femme qui avait passé de longues années de sa vie dans le recueillement du temple, le jeûne et la prière. Anne, la prophétesse survenant à ce moment là même, rendit grâces au Seigneur, et parlait de l`enfant à tous ceux qui attendaient la rédemption d'Israël. Nous aussi rendons grâces à Dieu qui, en appelant au berceau de son fils, dans les divers mystères de son enfance, les différents sexes, les différents âges et les diverses conditions, a voulu nous faire connaître qu'auprès de lui il n'y a point acception de personnes, et que comme il a trouvé tous les hommes coupables c'est à tous aussi qu'il est venu offrir la miséricorde et le pardon.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Jeu 8 Aoû 2024 - 13:39

15 - ST. JEAN DE MATHA

PRÊTRE, FONDATEUR DE L'ORDRE DE LA TRINITÉ POUR LE RACHAT DES CAPTIFS.


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Saint Jean de Matha


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Croix



Dieu, dont la providence paternelle ne cessa de veiller sur son église lui a suscité dans tous les temps des hommes puissants en oeuvres et en paroles qui par la sainteté de leur vie et par l'efficacité de leurs exhortations et de leurs exemples, ont ouvert à un grand nombre, le chemin du salut et de la perfection. Les fondateurs d'ordre tiennent un rang distingué parmi les hommes d'élite appelés par le Seigneur à réparer les pertes de la religion et à renouveler l'esprit de la piété dans les peuples. On appelle fondateurs d'ordres, ceux qui ont formé quelque nouvel ordre religieux, société, ou congrégation, ayant ses lois propres, un but spécial, et une organisation distincte. Ces hommes ont été en général, des hommes remarquables par leur sainteté, et une sagesse évangélique qui éclata dans la formation de leur oeuvre. La plupart furent des hommes d'un esprit élevé, d'une âme ardente et généreuse, des hommes de génie qui auraient pu, autant et plus que beaucoup d'autres parcourir avec succès et avec gloire les différentes carrières que l'ambition humaine ouvre aux mondains, et qui préfèrent par une ambition mieux entendue, s'ouvrir un chemin à une gloire durable, et y conduire les autres. Lorsque les constitutions d'un ordre religieux ont été solennellement approuvées, cette sanction, que l'on peut regarder comme un hommage public, rendu par l'église, à la sagesse des fondateurs, donne à leur ouvrage un nouveau droit au respect, à l'estime et à la considération des catholiques.

Quant à ceux qui n'ont point cette approbation solennelle, il suffit qu'ils soient approuvés tacitement par l'église, et appuyés de l'autorité des premiers pasteurs, pour inspirer la confiance à ceux qui sont dévoués à l'esprit et aux institutions du catholicisme. Un grand nombre de fondateurs n'ont pas seulement obtenu pour leurs sociétés l'approbation formelle de l'église, mais encore ils ont mérité parieurs vertus personnelles, d'être inscrits dans le catalogue de ceux que l'église offre à la vénération publique de ses enfants et propose à leur imitation. Tel fut le saint que l'église honore aujourd'hui : fondateur d'un ordre célèbre que l'église a hautement et solennellement approuvé, St. Jean de Matha n'est pas moins illustre par ses vertus propres, que par l'ordre qu'il a fondé, et qui, pendant plusieurs siècles a rendu de si grands services.

St. Jean de Matha naquit en Provence, d'une famille distinguée, vers le milieu du douzième siècle.  A cette époque la célèbre Université de Paris jouissait déjà d'une réputation qui y attirait de toutes parts ceux qui voulaient atteindre à la perfection, dans quelque science que ce fût. C'est là que Jean de Matha fut envoyé par sa famille pour achever ses études qu'il avait commencées à Aix. Heureusement pourvu des dons de la nature, en même temps que le Seigneur l'avait miséricordieusement prévenu de ses grâces et de ses bénédictions, il se fit remarquer au milieu de la nombreuse et florissante jeunesse de l'Université, autant par l'innocence de ses moeurs et la pureté de sa vie, que par sa science et ses succès dans les études ordinaires à cette époque.  Après avoir passé par tous les degrés, il ne tarda point à obtenir le titre de docteur. Mais le Seigneur l'appelait a une dignité plus élevée. Le célèbre Maurice de Sully, qui avait succédé sur le siège épiscopal de Paris, au savant Pierre Lombard, touché des vertus éclatantes de Jean, lui conféra le sacerdoce, quelles que fussent les répugnances du saint, dont l'humilité s'effrayait d'avoir à porter un fardeau si redoutable.

L'Évêque de Paris en élevant Jean de Matha à la prêtrise, ne se proposait que de conserver au milieu de la jeunesse, trop souvent licencieuse des écoles, un homme dont les exhortations et les exemples ne pouvaient que contribuer à la réforme des moeurs ; mais Dieu avait sur lui d'autres desseins. Lorsque pour la première fois il offrait le saint sacrifice, il reçut du Ciel une faveur dont le récit ferait sourire sans doute l'incrédulité, mais que les événements justifièrent pleinement. Ravi en extase, il reconnut par révélation que Dieu l'appelait à fonder un ordre religieux dont le but serait de délivrer les chrétiens retenus en captivité chez les infidèles.

Cette oeuvre n'avait rien d'attrayant selon la nature, pour un homme qui eût pu aspirer aux premières dignités. Se dévouer au rachat des chrétiens captifs, était se dévouer à une vie pénible, laborieuse, pauvre et mortifiée; c'était s'exposer à des privations, à des souffrances et à des dangers sans cesse renaissants. Mais la grâce ne raisonne point comme la nature. Ces difficultés ne firent qu'enflammer le zèle du saint. Toutefois, joignant à la vivacité du zèle cette prudence que donne l'esprit de Dieu, et cette sage lenteur nécessaire pour rendre le bien durable, il se retira pendant plusieurs années dans une solitude profonde, où, de concert avec St. Félix de Valois qui avait quitté la cour et les espérances qu'elle lui offrait, pour embrasser la vie érémitique, il forma le plan et dressa les règlements du nouvel ordre qu'il voulait fonder, et à la fin du douzième siècle, cet ordre fut solennellement approuvé par le pape Innocent III, un des pontifes les plus remarquables qui aient occupé la chaire de St. Pierre.

Depuis ce moment, la vie de St. Jean de Matha ne fut qu'une suite non interrompue d'actes héroïques de générosité et de dévouement. A sa voix un grand nombre de prêtres et de laïques quittèrent le monde pour embrasser une vie qui joignait aux mortifications et au recueillement de la vie contemplative, les oeuvres du zèle le plus ardent et de la plus parfaite charité. Les exemples de ces saints religieux inspirèrent aux Rois et aux peuples, une pieuse émulation pour concourir à la délivrance des chrétiens dont un grand nombre gémissaient depuis de longues années dans les prisons des Maures. Ces gens, maîtres encore d'une partie de l'Espagne, faisaient peser sur elle leur joug écrasant, après avoir établi dans la plus belle portion de l'Afrique la domination musulmane, qui donna naissance aux puissances barbaresques qui furent pendant tant de siècles la terreur de la chrétienté. Jean de Matha également intrépide et infatigable, parcouraient ces pays occupés par des peuples ennemis du nom de chrétien; partout, il réussit à briser les fers d'un grand nombre de captifs qui, au milieu des horreurs d'une longue et dure servitude, ne courraient pas seulement le risque de perdre une vie périssable, mais étaient encore exposés au danger bien plus terrible de perdre la foi.

Dieu bénit les travaux de son serviteur. L'Europe fut bientôt couverte de monastères, et d'hôpitaux construits par un moine qui n'avait de ressources que dans sa charité. Quarante ans après la fondation de l'ordre de la Trinité; on comptait plus de six cents maisons dont tous les membres se dévouaient par voeu au rachat des captifs, et au soulagement de leurs misères corporelles et spirituelles. Quant au saint fondateur, exténué par ses travaux et ses fatigues, dévoré par le zèle qui le consumait pour la gloire de Dieu et le salut du prochain, il mourut à Rome, à l'âge de 53 ans, en exhortant ses frères à persévérer dans l'accomplissement de l'oeuvre que le Ciel leur avait inspirée. Si cet héroïsme de charité nous paraît trop élevé pour que nous puissions nous le proposer pour modèle, sachons du moins admirer les effets de la grâce sur des hommes qui avaient la même nature que nous, les mêmes penchants et les mêmes faiblesses. Pourrions-nous douter de la force divine et toute puissante d'une religion qui enfante de tels prodiges, et apprend ainsi à l'homme à s'élever au-dessus de lui-même pour se dévouer sans réserve et sans intérêt pour cette vie au bien de ses frères ?

Pour nous qui peut être nous sommes souvent applaudis en secret des bonnes oeuvres que nous faisions, et qui n'avons trouvé qu'un aliment à notre vanité dans les aumônes, et les autres oeuvres d'une charité commode et facile, rougissons plutôt, en nous comparant aux saints. Puisque nous participons à la même foi, et que nous partageons les mêmes espérances, travaillons aussi à ressentir leur charité, et essayons du moins de suivre de loin ces grands et parfaits modèles.



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Bayou en Louisiane


16 - NOBLE HOMMAGE RENDU A L'AUTORITÉ DES FAITS ÉVANGÉLIQUES.

M. Chs. Lenormant, de l'Académie des Inscriptions, vient de recommencer à la faculté des lettres de Paris, son cours d'histoire moderne. Il a fait, à cette occasion, une profession de foi religieuse qui nous a paru d'autant plus remarquable, qu'elle implique le noble aveu des erreurs qu'il a pu quelquefois partager. A propos de ce mélange providentiel d'obscurités et de lumières qui entourent le berceau du christianisme, «Jamais, a dit M. Lenormant, jamais rien n'a sollicité de l'intelligence à la fois tant de docilité et de pénétration. En présence de ces témoignages, ( des Évangélistes, ) une intelligence orgueilleuse se trouble et s'obscurcit. L'intelligence évidemment ne suffit pas, il faut rassembler toutes les ressources de l'âme ; conscience, amour du vrai et du beau, pour pénétrer dans le sanctuaire ; ou plutôt, comme un humble catéchumène, on s'arrête sur le seuil. L'histoire ici, ne peut rien démontrer, rien rejeter. L'histoire évangélique a quelque chose d'absolu, d'inévitable, d'auguste comme les mystères qu'elle renferme. Plus j'ai réfléchi à ces conditions prodigieuses de l'histoire évangélique, plus j'ai reconnu clairement l'effet d'une volonté providentielle.» On exprimerait difficilement l'impression produite sur un très nombreux auditoire par ces paroles prononcées solennellement et avec la conviction la plus profonde!



17 - St. PIERRE-DAMIEN, ÉVÊQUE ET DOCTEUR DE L'ÉGLISE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Saint-Pierre-Damien-Cardinal-Eveque-dOstie-


Parmi les personnages illustres qui contribuèrent le plus à conserver intacte la pureté de la foi et de la discipline de l'Église dans le moyen âge, St-Pierre Damien, fut un des plus distingués. Contemporain de Grégoire VII, il lui fut uni par une constante conformité de vues, et par le zèle invincible et infatigable qu'il déploya, comme ce grand Pape, contre les vices et les désordres de son siècle. Mais n'ayant pas eu comme Grégoire VII, le dangereux honneur d'être assis sur la chaire de St-Pierre, il n'a pas été autant que lui, l'objet de la haine et des attaques de l'irréligion.

Pierre Damien naquit à Ravenne, vers le commencement du onzième siècle. Sa famille était d'une condition médiocre, et ses premières années furent pour lui un temps d'épreuves et de privations. Il commença dès lors à prendre les habitudes austères qu'il conserva toujours. Aidé cependant par un de ses frères, il put suivre l'attrait qu'il avait pour les sciences, et fut bientôt en état d'enseigner lui-même avec distinction. Mais la sainteté de sa vie le rendit plus célèbre encore que son savoir. Porté dès son enfance à une tendre et vive piété, il consacrait à la prière les moments de loisir que lui laissaient ses études. A la régularité d'une vie laborieuse et sévère, il joignit le jeûne, les veilles prolongées, et l'usage des mortifications et des pénitences qui étaient ordinaires dans ce temps là, et qu'il sût propager avec autant de prudence que de zèle. Par ces moyens il se maintint, au milieu des dangers qui entourent la jeunesse, dans une pureté de moeurs que ses ennemis mêmes n'osèrent jamais attaquer.

Dès ce temps là aussi il se fit remarquer par un admirable esprit de désintéressement, et par sa compassion pour les pauvres qu'il trouvait moyen de soulager, tout pauvre qu'il était lui-même, ses habitudes pénitentes et mortifiées l'ayant accoutumé à se refuser tout superflu, et à se contenter de peu. Pour s 'affermir dans la pratique des vertus, il se retira dans le monastère d'Avellane où ses exhortations jointes à la force de ses exemples, ne tardèrent pas à porter des fruits de bénédiction. Les monastères du moyen âge étaient le plus sûr asile de la science et de la vertu. C'était là que les princes, les grands et les riches du siècle, fatigués de leur opulence et de leur autorité, venaient apprendre à se faire pauvres et petits, et à expier dans la pratique de l'humilité, l'abus des richesses et les vanités de la gloire humaine. Là, des jeunes gens de toute condition, désenchantés d'avance d'un avenir qui en séduit tant d'autres, venaient chercher au pied de la croix, ce que le monde ne pouvait leur donner.

Là, les enfants des puissants seigneurs, des fiers suzerains, assis auprès des fils de l'humble vassal, donnaient l'exemple de cette égalité parfaite que le christianisme seul peut réaliser. C'était ordinairement des monastères que l'on tirait ceux qui devaient, dans l'épiscopat et les autres dignités ecclésiastiques, éclairer et gouverner l'Église. Et parmi ces hommes, un grand nombre, dont le nom était obscur selon le monde, ne dûrent leur élévation qu'à leurs talents et à leurs vertus, que Dieu voulait rendre utiles à toute l'Église.
Tel fut Pierre Damien. Élu abbé de son monastère, il y fit tellement fleurir la piété, et étendit tellement sa congrégation par les nouveaux monastères qu'il éleva, qu'il mérita d'être considéré comme le second fondateur de son ordre. Il ne pensait qu'à travailler dans le silence et l'obscurité à sa sanctification et à la sanctification de ses frères: mais la providence en disposa autrement. La sainteté de sa vie, sa prudence et sa fermeté l'avaient déjà fait connaître au loin. Déjà, plus d'une fois, les évêques et les peuples avaient eu recours à ses lumières et à ses conseils ; et la réputation d'un grand nombre de ses disciples, dont plusieurs sont honorés comme saints, ne fit qu'augmenter la réputation du maître.

Lors donc qu'il ne cherchait qu'à se faire oublier, le Pape Etienne IX, sachant discerner le mérite qui se cachait, éleva le saint à l'éminente dignité de cardinal, évêque d'Ostie. Mais ce ne fut que par des ordres réitérés, accompagnés de menaces, que le souverain pontife pût déterminer l'humble solitaire à accepter une dignité qu'il ne considérait que comme un brillant fardeau. Les honneurs ne changèrent rien au genre de vie que Pierre Damien s'était imposé dès sa plus tendre jeunesse. Fidèle au principe qu'il avait adopté, de faire consister uniquement sa grandeur dans la pureté et la sainteté de sa vie, il offrit au milieu du luxe des cours l'exemple de la modestie, de la frugalité, de la pauvreté.

Employé par les souverains pontifes dans les affaires les plus délicates, et qui demandaient tout-à-la fois le plus de prudence et d'énergie, il se montra toujours le zélé défenseur des canons de l'église, et l'intrépide vengeur de leurs infractions; il contribua surtout à guérir une plaie que l'avarice et l'ambition avaient faite à l'Église. Souvent des hommes puissants, trouvaient moyen par leurs intrigues, par menaces, par corruption, et à prix d'argent, d'obtenir pour eux-mêmes ou pour leurs créatures, les charges et les dignités ecclésiastiques, et introduisaient ainsi dans le clergé, des hommes que la saine partie du clergé repoussait avec horreur. Ce mal qui provenait surtout de la part que les princes cherchaient à s'arroger de leur propre autorité dans le choix des pasteurs, ce mal faisait dans l`Église d'affreux ravages. Les peuples et les grands, les rois et les empereurs mêmes, s'habituaient à cette iniquité que la coutume rendait moins odieuse. Ce ne fut qu'après beaucoup d'efforts que des hommes puissants en paroles, et faits pour inspirer le respect aux peuples et aux rois par leur sainteté, leur désintéressement et leur force d'âmes, purent arrêter les progrès du mal. St-Pierre Damien y contribua puissamment, souvent au péril de sa vie, sans que les menaces ni les dangers pussent jamais ébranler sa vigueur apostolique.

Il soupirait cependant toujours après la vie pieuse et paisible de son monastère. Ayant obtenu enfin la permission de se démettre de son évêché, il retourna dans sa chère solitude, où il consacra ses loisirs à écrire les ouvrages pleins d'érudition et de piété, qui lui ont mérité d'être inscrit au rang des docteurs de l'Église. Plusieurs fois cependant il fut encore tiré de sa retraite pour servir l'Église dans des occasions importantes qui demandaient toute sa prudence et son habileté. Ce fut au retour d'une de ses légations qu'il succomba aux fatigues d'une longue vie toute consacrée à la gloire de Dieu et aux intérêts de l'Église. Les sollicitudes d'un ministère si actif et si éclatant ne lui avaient point fait négliger ces pratiques de piété. Les personnes dévotes aiment à se rappeler que St-Pierre Damien fut un de ceux qui contribuèrent le plus à répandre la dévotion envers les saints anges, et surtout le culte de la Sainte-Vierge. Il rendit commune parmi les fidèles la récitation du petit office, la dévotion du samedi en l'honneur de Marie, et suggéra plusieurs autres pratiques utiles qui sont encore en usage dans l'Église, et qui toutes sont faites pour élever à Dieu, entretenir la ferveur et nourrir la piété.



18 - LE JOUR DES CENDRES ( Mercredi des Cendres)



LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. St-joseph-church-new-orleans-andy-crawford



Le premier jour de Carême, qui est le mercredi après le dimanche de la Quinquagésime, est appelé le Mercredi des Cendres. Ce nom est fort ancien, on le trouve dans des livres liturgiques d'une haute antiquité, et telle est la force de la coutume, qu'en Angleterre même, les Anglicans ont conservé ce jour, ce nom de Mercredi des Cendres ( Ash Wednesday).

Le nom donné à ce jour vient de la coutume observée dans l'Église catholique, que ce jour-là les fidèles se présentent devant les prêtres, et à genoux, reçoivent sur leur tête des cendres bénites que le prêtre leur impose en forme de croix, en prononçant à chacun ces paroles tirées de la Genèse, et que Dieu adressa à notre premier père, en le chassant du Paradis Terrestre : Souviens-toi, homme, que tu n'es que poussière et que tu retourneras en poussière.

Dans les premiers siècles de l'Église, qui étaient des siècles de ferveur et de sainteté, les pénitences étaient longues et sévères. On en peut juger par les canons pénitentiaux qui étaient en usage dans les premiers temps, et qui nous ont été transmis par les auteurs ecclésiastiques. Ces canons déterminaient la rigueur et la durée de la pénitence, et lorsque les péchés énormes avaient été publics et scandaleux, la pénitence était publique aussi. S'il nous était possible d'entrer dans le détail de ces lois d'une discipline qui appartient aux plus beaux siècles de l'Église, nous verrions combien est légère la pénitence qui nous est maintenant imposée, et combien nous sommes injustes de nous plaindre, des moyens pleins de douceur et de condescendance que l'Église emploie pour nous ramener à Dieu, quand nous nous sommes éloignés de lui par le péché. Ceux qui étaient soumis à la pénitence publique, passaient ce temps-là dans le jeûne et les autres exercices de la pénitence. Ils vivaient dans la retraite, la solitude et le silence, étaient vêtus pauvrement, et témoignaient par leur extérieur les sentiments de douleur et de componction dont leurs coeurs étaient pénétrés. Quoique ces oeuvres extérieures ne fussent que la moindre partie de la pénitence que l'Église faisait consister essentiellement dans le changement du coeur, cependant elles étaient propres à exciter dans les pécheurs l'horreur du péché ; en les éloignant des occasions dangereuses, elles les prémunissaient plus efficacement contre les rechutes, et elles servaient en même temps à faire expier aux pécheurs les fautes qu'ils déploraient.

Car ce serait une grave erreur, également répréhensible aux yeux de la raison et de la foi, de penser que le changement de vie pour l'avenir, suffise pour une véritable pénitence ; cette résolution de changer de vie, devant produire en nous le regret du passé et une sainte indignation contre nous-mêmes. A ne juger que selon la chair, on serait tenté de croire que la sainte sévérité de l'Église devait rebuter un grand nombre de pécheurs ; l'expérience cependant prouve le contraire. C'était dans ces temps que l'Église convertissait les païens, et voyait ses enfants donner ces éclatants exemples de vertu, qui ont servi de modèle à tous les siècles suivants. La fureur même des persécutions, qui aurait paru un motif suffisant pour se relâcher de la sévérité des canons, trouvait toujours l'Église aussi inflexible contre le péché, par tendresse et par charité pour le pécheur ; et en cela nous devons admirer la profonde sagesse de l'Église, et la connaissance intime qu'elle montrait du coeur humain, de ses besoins, de ses maladies, et les remèdes qu'il fallait y apporter.

La plupart des oeuvres de pénitence étaient une imitation des marques de douleur que les prophètes de la loi ancienne avaient coutume de donner. Rien n'est plus ordinaire dans l'Écriture sainte que ces expressions : faire pénitence dans le cilice et la cendre.

Conformément à ces pratiques, tant que la pénitence publique fut en vigueur, ceux qui y étaient soumis, se présentaient à l'église au commencement du Carême, l'évêque leur mettait des cendres sur la tête, après quoi se prosternant avec le clergé et le peuple, il récitait pour les pénitents les psaumes de la pénitence et les Litanies des Saints ; après cette cérémonie les pénitents étaient mis hors de l'église, et privés de la participation aux saints mystères, jusqu'au Jeudi Saint où ils venaient recevoir l'absolution de leur pénitence, puis après avoir reçu l'absolution sacramentelle, s'ils s'en étaient rendus dignes, ils étaient admis à la réception de la sainte Eucharistie.

Lorsque l'usage de la pénitence publique a été aboli, l'Église a conservé la pratique d'imposer les cendres, comme un monument précieux de la discipline antique. Dans cette cérémonie l'Église nous rappelle la brièveté de la vie, parceque rien n'est plus propre que la pensée de la mort à nous faire embrasser avec joie les oeuvres de pénitence.  Reconnaissons que dans les plus petites pratiques l'Église est toujours conduite par l'esprit de Dieu. Admirons le grand enseignement qu'elle donne à tous ses enfants, en leur rappelant à tous si énergiquement, et par une cérémonie si simple, le néant des grandeurs humaines, la vanité des plaisirs et des joies périssables, et ce terrible nivellement de la mort, dont le prêtre pose le signe sur toutes les têtes, jusqu'à ce qu'en effet la mort dans sa toute puissante égalité, n'ait laissé de nous tous ici-bas, qu'un peu de cendre et de poussière. Si nous prenons part à la cérémonie des cendres avec ces graves et austères pensées, nous n'aurons point de peine à entrer dans les dispositions nécessaires, pour passer saintement le Carême.


19 - ST-THOMAS D'AQUIN, DOCTEUR DE L'ÉGLISE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Saint-Thomas_d%27Aquin_2
St-Thomas d`Aquin

Quoique nous ayons l'intention de donner à nos lecteurs, pendant le Carême, quelques explications sur l'institution du jeûne ecclésiastique, nous continuerons cependant de donner une notice, quoique plus courte, sur quelqu'un des saints que l'Église propose chaque semaine à nos hommages et à notre imitation. St-Thomas d'Aquin, dont la fête se célèbre cette semaine doit être regardé comme une des illustrations du christianisme par son génie, eh même temps qu'il réjouit et consola l'Église par le spectacle édifiant de ses admirables vertus. Ses contemporains lui donnèrent les titres glorieux d'Ange de l'école, de Docteur Angélique, d'Aigle des Théologiens; et la postérité lui a conservé ces titres honorables. Ses œuvres, conservées en un grand nombre de volumes, et surtout sa somme de théologie, révèlent l'étendue, la pénétration, et la force de son esprit, et la Solidité de son jugement.

Sous sa plume puissante, la théologie scolastique prit une forme régulière, déterminée et fixe, et tous les écrivains ecclésiastiques qui l'on suivi n'ont pas cru pouvoir mieux faire que de le suivre. Dans les sujets les plus difficiles de religion, de morale, de gouvernement, de politique, il n'est guère de questions dont on ne puisse trouver la solution dans ses écrits. La plupart de nos lecteurs, sans doute, sont étrangers à ces études longues et difficiles ; mais il sort de ces observations une réflexion que tout le monde saisira.

St-Thomas d'Aquin, né en 1227, fut confié dès l'âge de cinq ans, par le comte d'Aquin, son père, aux religieux du Mont-Cassin. A l'âge de seize ans, remarquable déjà par ses talents précoces, il entra dans l'ordre de St-Dominique. Cette pieuse détermination excita la fureur de sa famille qui fondait sur lui des espérances humaines; et au moment oui ses supérieurs l'envoyaient à Paris, pour y achever ses études, il fut enlevé de force par ses frères, et enfermé étroitement dans un château, où tous les moyens furent employés pour lui faire changer de détermination; ses frères aveuglés par cet esprit de haine qui irrite les mondains contre tous ceux qui veulent être à Dieu ; poussèrent l'impiété jusqu'à essayer de tenter la vertu du saint jeune-homme. Mais il résista à toutes les sollicitations comme aux menaces, et sa courageuse résistance lui obtint du Seigneur la grâce d'une inaltérable chasteté, qui lui mérita autant que Ses écrits, le titre de Docteur angélique. Enfin, échappé de sa prison après plus d'une année de captivité, il put accomplir son pieux dessein. A un âge où les autres jeunes gens sont encore sous la conduite de leurs maîtres il enseigna lui-même avec gloire. Mais quelles que fussent ses connaissances il comptait moins sur son érudition et ses études prolongées que sur la prière, et ce fut au pied du crucifix qu'il disait avoir acquis toute sa science ; il mérita ainsi d'être du petit nombre de ceux à qui la science n'enfle point l'esprit, et ne dessèche point le coeur.

Désireux de se faire oublier, cherchant la retraite et l'obscurité avec autant d'empressement que les mondains cherchent la gloire, il refusa constamment toutes les dignités ecclésiastiques Sa piété tendre et affectueuse égalait sa profonde humilité, et cette piété se fait sentir à chaque mot dans ce bel office du saint sacrement, office qu'il composa par l'ordre du pape Urbain IV, et dont l'Église se sert encore aujourd'hui. Ses hymnes et ses proses unissent au langage le plus rigoureux de la plus exacte théologie, la plus touchante expression d'une foi vive et d'une dévotion ardente. Le pape Grégoire X avant convoqué un concile général à Lyon, en 1274, on donna à St-Thomas de s'y rendre. Mais le Seigneur, entrant dans les vues d'humilité de ce grand Saint, l'appela à lui, avant qu'il eût paru devant cette illustre assemblée. St-Thomas d'Aquin mourut dans le voyage, le 7 mars 1274, dans la quarante neuvième année de son âge. Une vie pleine et ce parfait emploi du temps, le mirent à même d'écrire dans une carrière si courte, des ouvrages dont l`étude seule suffirait pour remplir la vie la plus longue et la mieux employée; et ce pendant une grande partie de son temps était consacrée à la prière et aux pieuses méditations. Puissions-nous apprendre des Saints la grande science de l'utile emploi du temps !

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Jeu 8 Aoû 2024 - 13:39

20 - SAINT-GRÉGOIRE LE GRAND

PAPE ET DOCTEUR DE L'ÉGLISE.

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Gregoire-le-Grand

Lorsque ce grand-homme monta sur la chaire de St-Pierre, l'Église se trouvait dans les circonstances les plus difficiles. Les Églises d'Orient étaient en proie aux divisions causées par les erreurs de Nestorius et d'Eutychès. Dans l'Occident, l'Angleterre était encore plongée dans les superstitions du Paganisme. Les Wisigoths, en s'emparant de l'Espagne, l'avaient infectée des erreurs de l’Arianisme; l'Afrique était désolée pas les excès des Donatistes : une grande partie de l'Italie était tombée sous la domination des Lombards, qui étaient ariens ou païens.

Les débris mutilés de l'Empire d'Occident ne pouvaient trouver dans les faibles Empereurs de Constantinople un secours efficace contre les invasions sanglantes des Barbares. De telles conjectures demandaient un homme tel que Grégoire, c'est-à-dire un homme joignant à une sainteté consommée, une capacité supérieure, une profonde connaissance des hommes et des affaires, et un courage à toute épreuve. Né à Rome, l'an 540 Ap J.C., St-Grégoire comptait dans sa famille des hommes élevés aux premières dignités de l'Empire, des papes, et des saints ; et seul il sut réunir sur sa tête tous ces genres d'illustrations. Joignant à l'éclat de la naissance, d'immenses richesses, et aux plus heureuses dispositions de l'esprit, tous les avantages d'une éducation achevée, Grégoire jeune encore, fut élevé par l'empereur Justin II, à la dignité de Préfet de Rome, ce qui était la première magistrature de la ville.

Rien ne lui manquait pour être de ceux que le monde appelle heureux ; mais il fallait à cette âme choisie, des biens plus solides et plus vrais. Effrayé des dangers de la grandeur et de la fortune, il n'avait que trente-quatre ans, lorsqu`il quitta ses richesses qu'il distribua aux églises et aux monastères, et renonça à toutes les espérances du siècle pour se consacrer à Dieu dans la vie religieuse. Forcé bientôt malgré son humilité, de prendre la conduite d'un monastère qu'il avait lui-même fondé, et où il ne s'était retiré que pour vivre dans l'obéissance, dans l'oubli, et dans la pratique obscure des plus austères vertus, Grégoire se vit bientôt arraché de sa douce et paisible solitude, et lancé de nouveau au milieu du tourbillon des affaires, auquel il croyait s'être dérobé pour toujours.

Faisant violence à ses goûts, les papes le contraignirent plusieurs fois à se charger de missions importantes qui, pour être utiles à l'Église, n'en étaient pas moins opposées au désir qu'il avait, dit-il lui-même, de vivre éloigné des choses sensibles, et de n'être uniquement occupé que de la contemplation des biens célestes. Choisi en l`an 590 Ap J.C. pour succéder au pape Pelage II, Grégoire épouvanté se cacha pendant trois jours dans une caverne, pour échapper au redoutable honneur qui le poursuivait, tandis que le peuple, dont il avait toujours été l'idole, demandait à Dieu avec larmes aux pieds des autels la grâce d'avoir un tel pasteur.

Découvert par un miracle dans la retraite qu'il avait choisie, il se vit contraint enfin d'accepter cette dignité pour ne pas résister à la volonté divine. L'événement fit voir, en effet, que c'était bien véritablement le Seigneur qui l'avait appelé. Pendant le court espace de son pontificat qui fut de treize ans et demi, il remédia par un mélange admirable de douceur et de fermeté aux maux qui affligeaient l'Église. Son esprit vaste et infatigable descendait aux plus petits détails, sans négliger ce qui était plus important. Il n'était point de désordres qu'il n'attaqua avec une vigueur toute apostolique, point d'erreur qu'il ne combattit avec une inflexible énergie.

Accablé de la sollicitude de toutes les églises, il avait encore le temps d'exercer l'hospitalité envers les étrangers, et de soulager par des aumônes immenses une multitude de pauvres dont il tenait registre, et pour lesquels il avait une tendresse paternelle. Tant d'affaires semblaient devoir absorber tous ses instants. Cependant il
trouva encore le loisir de faire une foule de règlements utiles et des canons pour l'ordre et la beauté des cérémonies saintes. C'est à lui que l'on doit principalement la disposition de l'office canonial, et la plupart des pratiques religieuses, telles qu'on les observe encore aujourd'hui. La liturgie contenue dans le Sacramentaire Grégorien, a servi de règle pour la disposition du rituel, du bréviaire et du missel, c'est-à-dire pour tout ce qui sert à régler le culte extérieur.

Doué d'une oreille délicate et d'un goût exquis, il introduisit dans l'Église ce chant, appelé de son nom, grégorien, ce chant si noble, si grave et si pieux, et il y formait lui-même les clercs de son église. Pourra-t-on croire qu'au milieu de tant de travaux si variés, il pût encore écrire ces beaux et nombreux écrits, où malgré le défaut de style ordinaires de son siècle, on trouve partout avec la pureté de la doctrine, cette piété et cette onction qui forment son caractère particulier ? On pensera peut-être que ces saints pour faire tant de grandes choses, étaient, par une grâce spéciale, affranchis des misères et des infirmités de la nature matérielle. Il n'en était rien cependant. Exténué par ses austérités, St-Grégoire fut, pendant tout te court de son pontificat, en proie à des maladies douloureuses et à de cruelles infirmités, qui ne lui permettaient souvent de rester debout que le temps nécessaire pour célébrer les saints mystères. Ce fut, enrichi du double trésor de tant d'oeuvres admirables et de tant de souffrances héroïquement endurées, que St-Grégoire alla recevoir la couronne d'immortalité, au commencement du septième siècle, en 604 Ap J.C. Si les saints après une vie si pleine, ont dû dire encore : nous sommes des serviteurs inutiles, que dirons-nous, nous qui dépensons si follement, peut-être si criminellement, une vie, une santé, des forces qui devraient être entièrement consacrées à la gloire de Dieu, et à notre propre sanctification.


21 - ST-JOSEPH, ÉPOUX DE LA SAINTE VIERGE MARIE

LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Sjg-hc4

Quoique nous célébrions cette semaine, une solennité qui semblerait devoir être préférablement à toute autre, l'objet de nos réflexions, l'Annonciation de la Sainte-Vierge, et l'accomplissement du mystère de l'Incarnation, cependant comme nous avons plus souvent l'occasion de rappeler ces grands mystères à nos lecteurs catholiques, nous offrirons aujourd'hui à leurs pieuses méditations le souvenir du saint Patriarche qui fut choisi par le Seigneur, pour être le témoin fidèle des merveilles qui devaient s'opérer dans la plus pure et la plus sainte des vierges, dans Marie, Avec quel bonheur l'âme chrétienne aime à joindre le nom vénéré de Joseph aux doux noms de Jésus et de Marie, et à contempler dans cette famille sainte le modèle le plus parfait de toutes les vertus !

La gloire de Joseph, en effet, fut d'avoir été le chef de la famille la plus sainte et la plus auguste qui ait jamais pu être proposée à l'admiration des anges et des hommes ; et si toutes les gloires de Marie se résument dans son titre de mère de Dieu, toutes les gloires de St-Joseph sont renfermées dans ces titres d'époux de la Sainte-Vierge et père nourricier de Notre-Seigneur Jésus-Christ, titres qui lui donnèrent des droits à l'obéissance d'un Dieu devenu enfant et de sa très sainte mère. Combien doit être puissant aujourd'hui, dans la gloire, celui qui dans l'obscurité d'une vie humble et cachée, commandait à Jésus et à Marie ! Quoique le Seigneur n'ait point voulu nous révéler aucune des particularités de la naissance et de la jeunesse de St-Joseph, nous savons cependant que cet illustre descendant des patriarches, plus glorieux qu'eux tous, était de la famille de David, ainsi que la Sainte-Vierge. Selon la tradition constante et universelle, St-Joseph était pauvre, et vivait du travail de ses mains ; mais cet état de pauvreté et d'abjection ne l'empêcha point d'être grand et riche en grâces et en mérites devant le Seigneur. Uni à Marie par un chaste mariage, St-Joseph entra dans les desseins du Seigneur, et se considéra que comme le gardien de la pureté de la Sainte-Vierge, et de l'enfance du Sauveur.

Cette union virginale où les sens n'eurent point de part, était voulu par le Seigneur, pour donner à Marie un protecteur et un témoin de son innocence, pour éloigner d'elle la calomnie et jusqu'à l'apparence de tout soupçon injurieux. C'est ainsi que la Providence qui conduit tout à ses fins avec un mélange admirable de force et de douceur, couvre les plus ineffables mystères et les plus merveilleux prodiges sous des formes simples et communes. Les traits de la vie de St-Joseph, que l'Écriture nous a conservée, sont en petit nombre, mais bien suffisants pour nous montrer son humilité, sa charité, sa patience, son esprit de foi, sa confiance inaltérable, et la parfaite soumission à la volonté divine. Le Seigneur a permis que les dernières années et la mort de ce grand Patriarche fussent enveloppées de ténèbres comme sa naissance et les années de sa jeunesse. Cependant l'opinion la plus générale est qu'il mourut avant la passion de Notre-Seigneur, et même avant le commencement de sa prédication, et qu'ainsi il eut la consolation de mourir dans les bras de Jésus et de Marie.

Combien les voies de Dieu sont admirables, et différentes de celles des hommes ! Il permet que tant de personnages fameux par leurs crimes ou leurs folies, jouissent de cette gloire dont ils avaient fait leur idole, et que les plus petits détails de leur vie soient portés à la postérité la plus reculée, et il laisse inconnue la vie des deux créatures qui furent le plus intimement unies à son divin Fils, Marie et Joseph ! Quelle leçon pour notre orgueil ! Oh ! si le Seigneur dans sa miséricorde nous a appelés à une vie obscure, réjouissons-nous de celle obscurité qui dans les vues de Dieu sera notre sauvegarde.

Pour arriver à une éminente sainteté nous n'avons pas besoin d'enfanter des miracles, de faire des oeuvres éclatantes ; comme St-Joseph prêtons une oreille attentive aux inspirations de l'esprit de Dieu, suivons ces inspirations avec docilité, et tenons-nous-en silence et en paix dans la sainte et aimable compagnie de Jésus et de Marie. Imitez surtout St-Joseph, vous âmes privilégiées qui êtes appelées, soit dans le monde, ou hors du monde, à goûter combien le Seigneur est doux, dans les chastes et spirituelles délices de la vie intérieure. Modèle de tous les états et de tous les âges, modèle des personnes mariées comme des vierges, modèle pour la vie active, comme pour la vie contemplative, St-Joseph est néanmoins tout spécialement le modèle des âmes intérieures à qui Dieu révèle dans le secret les mystères de son amour.

Les saints nous citent leur expérience pour nous faire connaître combien est puissante l'intercession de St-Joseph ; et pourrait-il en être autrement ? Mais pour avoir droit de l'invoquer avec plus de confiance, efforçons-nous de l'imiter. L'Église pour nous encourager à cette dévotion, l'a favorisée d'un grand nombre d'indulgences. Les personnes pieuses sont dans l'usage d'honorer St-Joseph en faisant en son honneur, pendant le mois de mars, qui est le mois de sa fête, les prières et les méditations connues sous le nom de Mois de Joseph.

Toutes les semaines le mercredi lui est consacré, des neuvaines ont été établies en son honneur, ainsi que des pratiques pieuses pour honorer sous le nom des Sept-Joies
et des Sept-Douleurs de Joseph, la part qu'il a prise à plusieurs de nos mystères. Les trésors dont l'Église a enrichi ces saints exercices, prouvent combien ils lui sont agréables. Puissions-nous comme St-Joseph, pratiquer dans le silence, à l'abri des séductions de l'orgueil, et des dangers de la vaine gloire, ces humbles et obscures vertus qui n'ont que Dieu pour témoin ! Puissions-nous comme lui, dans nos derniers moments, avoir auprès de notre couche funèbre Jésus et Marie, et que notre voix mourante s'éteigne en invoquant ces noms bénis, les premiers qu'une mère pieuse nous avait appris à bégayer : Jésus, Marie, Joseph.


22 - NOUVELLE-ORLÉANS.  Clôture de la retraite ecclésiastique.

La retraite ecclésiastique a eu lieu au temps fixé par Mgr l'Évêque dans son mandement du Carême. Tous les ecclésiastiques du Diocèse qui ont pu s'absenter de leurs paroisses se sont rendus à cette retraite dont les exercices ont été dirigés par le Révd. M. Armengoll, supérieur du séminaire diocésain. Commencée le mardi 7 mars, la retraite s'est terminée mardi dernier, quatorze Ces pieux exercices ont été clos par la messe célébrée par Mgr. Blanc, à laquelle tous les prêtres ont renouvelé entre les mains de leur Évêque les promesses cléricales. Avant la rénovation, Monseigneur, dans une courte et vive allocution, a fait sentir aux prêtres combien ils étaient heureux d'avoir pu interrompre pour quelques jours leurs pénibles travaux, pour venir dans le calme et le recueillement de la retraite penser à eux-mêmes, et s'occuper uniquement de leur propre sanctification. Retrempés dans la solitude, ils n'avaient plus qu'à en sortir, comme les Apôtres du Cénacle, pleins d'une nouvelle ferveur et d'un zèle infatigable, pour répandre sur leur peuples les lumières et l'ardeur de ce feu divin qui leur avait été communiqué pendant la retraite.

S'adressant ensuite aux fidèles qui se pressaient en foule dans l'église, l'Évêque leur a rappelé l'obligation où ils étaient eux-mêmes de se livrer aux oeuvres de zèle, chacun selon sa position, et de travailler par tous les moyens en leur pouvoir, surtout par l'exemple et la prière, à la conversion de leurs parents, de leurs proches, de leurs amis ; le zèle, quoiqu'il soit la vertu propre des prêtres, devant être néanmoins exercé par les simples fidèles, puisqu'il n'est autre chose qu'une effusion de cet esprit de charité dont tout chrétien doit être animé. Le chant du Te Deum a terminé cette imposante cérémonie, qui quoique renouvelé tous les ans, offre toujours le même intérêt à ceux qui en sont les témoins, et laisse en eux d'utiles et édifiants souvenirs.


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23 - LA FÊTE DU PRÉCIEUX SANG DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. 73738411


Quoique l'Église nous remette continuellement sous les yeux la passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, et que tout dans la religion se rapporte au grand mystère de la croix, et tende à exciter en nous l'amour et la reconnaissance pour ce mystère ineffable ; cependant le jour où il a été accompli a toujours été pour les fidèles, dès les premiers siècles, un jour spécial de prières, de pénitence et d'expiation. C'est ainsi que nous voyons par les écrivains ecclésiastiques, que dès la primitive église, le Vendredi était sanctifié par l'abstinence et le jeûne, en mémoire de la passion de Notre Seigneur, et c'est encore pour la même raison, que dans toute l'Église Catholique, les fidèles se soumettent à la loi de l'abstinence qui est imposée ce jour-là ; loi qui était déjà établie par l'usage et la piété des fidèles avant que l'Église en eût fait un commandement exprès. Il était convenable, en effet, que les chrétiens témoignassent par quelque acte extérieur de pénitence la part qu'ils prenaient à la passion du Sauveur, et la douleur qu` ils ressentaient de ses souffrances, et de leurs péchés qui ont été la cause de ses tourments et de sa mort.

Mais, c'est surtout pendant le Carême, qui est un temps de repentir et de pénitence, qu'il convient plus particulièrement aux chrétiens de méditer sur les circonstances de la passion de Jésus-Christ, afin que par cette méditation ils puissent s'exciter plus efficacement à la douleur de leurs fautes, prendre des résolutions plus fermes de conversion, et s'animer à suivre plus généreusement leur Dieu dans la voie des souffrances et des expiations par une pénitence plus parfaite.  L'intention de l'Église est donc que les Vendredis du Carême soient plus particulièrement encore que tous les autres de l'année, consacrés au souvenir de la passion. Saint Charles Borromée recommanda cette pratique dans plusieurs de ses conciles provinciaux, dans ses synodes diocésains, et dans ses avis aux prêtres de son diocèse. La plupart des conciles provinciaux et des synodes tenus depuis, ont parlé de la même manière que ce grand saint, et fait des décrets ou des statuts dans cet esprit.

La piété envers la passion ayant inspiré aux fidèles dans plusieurs monastères et dans diverses églises, d'honorer séparément les instruments des souffrances du Sauveur, les souverains pontifes encouragèrent cette dévotion, et autorisèrent le clergé de plusieurs pays qui avaient réclamé cette faveur, à célébrer dans l'office public de l'Église, chaque Vendredi de Carême, et à quelques autres époques déterminées, les principales circonstances et les instruments de la passion. Ainsi, parmi nous, le Vendredi de la première semaine de Carême est consacré à l'honneur de la sainte couronne d'épines ; la seconde semaine, nous vénérons la lance qui ouvrit le coeur de Jésus, et les clous qui l'attachèrent à la croix. Dans la troisième semaine, nous honorons ses cinq plaies. Dans la quatrième semaine, nous adorons spécialement son précieux sang versé pour notre amour.  Le Vendredi de la semaine de la Passion est consacré au souvenir des douleurs de la Sainte-Vierge ; et la Semaine-Sainte toute entière est consacrée à la mémoire de ces mystères divins.

Les catholiques savent tous que le culte rendu aux instruments de la passion du sauveur, tels que la lance, les clous et la croix elle-même, n'est qu'un culte relatif, de même nature que celui que nous rendons aux reliques des saints et dans ce culte il n`y a rien que de raisonnable, puisque ces objets ont été sanctifiés par Jésus-Christ et teint de son sang précieux ; et s`ils ont été entre les mains de ses bourreaux les instruments d'une haine criminelle, ils n'en ont pas moins été de la part de notre Divin Sauveur des instruments de grâce et de miséricorde.  Quant au sang de notre Seigneur, que nous vénérons cette semaine; il est directement et en lui-même l'objet d'un culte d'adoration, comme faisant partie de l'humanité sainte, et par conséquent de la personne adorable de notre Seigneur Jésus-Christ. La dévotion au précieux sang est fort répandue parmi les catholiques fervents. Diverses pratiques de piété ont été établies on son honneur, et sans doute rien n'est plus propre à nourrir notre piété que les hommages rendus à ce sang précieux qui a effacé nos taches, et purifié notre âme de ses souillures. Les miracles récemment opérés par l'intercession d'un saint prêtre qui avait une dévotion particulière au sang adorable de notre Seigneur; nous prouvent combien ce culte est agréable à Dieu et avantageux pour nous. Puissions-nous voir cette dévotion s'établir et se propager parmi nous, et devenir aussi pour nous une source intarissable de grâces et de conversions.


24 - LA FÊTE DE LA COMPASSION DE LA SAINTE-VIERGE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Carte-medaille-plastique-notre-dame-des-7-douleurs


Nous voici arrivés à ces jours saints que l'Église a spécialement consacrés à la mémoire des souffrances de son céleste époux. Demain nous commençons la semaine de la Passion, ainsi appelée, parce qu’elle est destinée à nous faire entrer dans les sentiments que la passion du Sauveur doit nous inspirer, et à nous pénétrer des dispositions nécessaires pour assurer en nous l'effet de ces mystères d'amour
. Qui n'admirerait ici la sagesse divine de l'Église! Elle nous a fait passer par quatre semaines de jeûnes, de prières et d'instructions fréquentes, avant de nous appeler à la contemplation d'un Dieu souffrant et mourant. Ce n'est, en effet, qu'en domptant sa chair par la mortification; en nourrissant son âme par la prière dans la retraite et le recueillement, et en puisant la vérité à sa source, dans la parole de Dieu, expliquée par les instructions de l'Église, que le chrétien peut se mettre en état de voir et de goûter ces grands dogmes que l'homme charnel méprise comme une folie, parce qu'il ne les comprend point, et que le chrétien sensuel redoute d'envisager, parce qu'ils épouvantent sa faiblesse, et le scandalisent.

Après cette préparation de quatre semaines de douleur et de componction, l'Église, pendant toute la semaine de la Passion; laisse encore mûrir dans notre esprit et dans notre cœur les fruits de pénitence ; et ce n'est qu'après que nous avons traversé toutes ces préparations, et subi toutes ces épreuves, que l'Église nous introduira dans la grande semaine, la semaine excellemment sainte, et alors tirant le voile qui couvre le saint des saints, elle nous fera voir l'accomplissement de ces mystères à la célébration desquels nos âmes: s'étaient préparées par les saintes austérités du Carême.

Dans cette semaine de la Passion se rencontre une de ces solennités dont le christianisme seul a le secret, une de ses fêtes toute intérieure et toute mystique, une fête qui inonde le cœur des sentiments les plus vifs et les plus doux, les plus tendre et les plus déchirants; une fête où la joie se mêle aux pleurs, la douleur; à la reconnaissance et la componction à l'amour. Cette fête, c'est la compassion de la Sainte Vierge, ou la fête des Sept Douleurs de Marie.

L'objet de cette fête est d'honorer la part que prit Marie dans le sacrifice de Jésus pendant tout le cours de la vie mortelle de son divin Fils. Toute ta vie de la Sainte-Vierge, fut un sacrifice continuel, au moins depuis que le saint vieillard Siméon lui eut fait entendre ces paroles prophétiques : Votre âme sera transpercée d'un glaive. Cependant l'Église honore spécialement les Sept Mystères Douloureux de Marie, parce que dans la longue suite de douleurs par lesquelles le Seigneur a voulu éprouver cette vierge sainte, on a choisi sept circonstances principales dans lesquelles son coeur maternel fut soumis à de plus rudes épreuves.

Nous n'expliquons point en quoi consistent ces sept douleurs de Marie, parce que chacune d'elles en particulier est considérée et méditée dans chacun des jours de la neuvaine qui précède cette fête, et deux autres y ont été ajoutées pouf compléter le nombre de neuf jours. Mais nous invitons les lecteurs catholiques et surtout nos pieuses lectrices à redoubler de ferveur envers Marie pendant cette neuvaine qui est la plus ancienne pratique de piété envers la Sainte Vierge, qui existe à la Nouvelle-Orléans, et peut-être est-ce à cette pratique que nous sommes redevables de cette dévotion avec laquelle Marie a toujours été honorée parmi nous, dévotion qui nous a valu, même dans les jours les plus mauvais, la conversion d'un reste de foi, qui maintenant recommence à se développer d'une manière si admirable, toujours sous les auspices de Marie.

Que toutes les personnes pieuses unissent donc leurs efforts et leurs voeux pendant cette neuvaine, pour faire descendre sur nous, par l'entremise de Marie, des bénédictions abondantes, et des grâces de retour et de conversion. Il était bien convenable que les douleurs de la Sainte Vierge fussent l'objet d'une fête spéciale. Après le sacrifice adorable du Sauveur, avec lequel rien ne peut être comparé, aucun sacrifice ne fut plus douloureux, ni offert par une créature plus parfaite, que le sacrifice de Marie ; tout son mérite il est vrai, ne vient que de son union au sacrifice de Jésus-Christ, et on l'appelle aussi compassion, ou participation à la passion du Sauveur.

Mais ce sacrifice n'en mérite pas moins de notre part un souvenir spécial d'hommages et de douleur ; et sans doute nous ne pouvions mieux nous disposer à adorer un Dieu mourant pour notre amour, qu'en honorant les souffrances de sa sainte Mère. Mais combien est admirable cette pensée de nous faire entrer ainsi dans le coeur de Marie, dans ce coeur de mère, pour nous en faire sonder les blessures, et étudier les douleurs, et mollir par-là la dureté de notre propre coeur ! Une telle pensée ne pouvait venir que de l'Église catholique, Mère si tendre elle-même pour ses enfants ! L'Église catholique seule pouvait comprendre les souffrances de Marie! Les douleurs d'une mère ne peuvent être comprises que par un coeur de mère. Que l'Église, épouse mystique et spirituelle de Jésus, ait ainsi honoré les souffrances de la mère de Jésus ; oh ! il y a là une magnifique idée! Un sentiment sublime ! Cette fête doit être spécialement la fête des âmes intérieures, des âmes parfaitement dégagées des sens, et habituées à goûter
la douceur des larmes saintes que la Religion fait répandre.

Cette fête sera comprise surtout par les coeurs tendres et affectueux en qui la piété a perfectionné la délicatesse du sentiment, par ces coeurs purs en qui la chasteté a épuré l'amour. Marie a été une créature bien privilégiée dans sa conception, bien sainte dans sa nativité, bien grande et bien glorieuse dans son Assomption : mais combien bonne, tendre et aimable dans ses douleurs et dans la fête de sa Compassion ; car là elle verse des pleurs, des pleurs de mère; et c'est pour nous !  Oh! Marie, je vous le dis au nom de tant de chrétiens, qui pendant cette neuvaine, sont prosternés devant vos autels, nous vous aimons bien ! Nous vous aimons de tout l'amour que des enfants affectueux peuvent avoir pour une tendre mère. Tournez aussi vers nous vos regards maternels : et aidez nous à augmenter le nombre des coeurs qui vous sont dévoués, afin que notre bonheur soit plein, et notre joie parfaite.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Jeu 8 Aoû 2024 - 13:41

25 - LE DIMANCHE DES RAMEAUX. LA SEMAINE-SAINTE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. Chemin-de-croix_2018

Combien il est malheureux, celui qui n'est point habitué à prendre part aux touchantes cérémonies de l'église, et qui, étranger à nos saintes et augustes solennités, ne vient jamais, les jours de fête, s'agenouiller dans le lieu saint avec les fidèles, et unir sa voix à leurs pieux cantiques ! Son intelligence resserrée dans la sphère étroite des plaisirs ou des intérêts matériels ne peut s'élever à rien de noble, de pur, de divin. Son coeur dur et froid comme l'or qu'il touche ou qu'il convoite, est fermé à ces douces et tendres émotions que la religion inspire, et son âme, impure comme les jouissances auxquelles il la tient asservie, ne sait point goûter les chastes délices de la vertu. Ces pensées s'offrent naturellement à nous, au moment d'entretenir nos lecteurs des saints jours dans lesquels nous entrons. Pour celui qui ne croit pas, la semaine qui commence ne sera qu'une semaine ordinaire et semblable aux autres, amenant invariablement, comme elles toutes, son Insipide uniformité, et sa fatigante monotonie.

Pour nous, c'est la Semaine-Sainte, la Grande- Semaine, une semaine de douleur et de repentir, de reconnaissance et d'amour ; et ces douces et puissantes émotions agissant toutes à la fois sur l'âme la dégageront des sens, relèveront au-dessus des créatures et lui donneront un avant-goût des joies pures de l'éternité. Oh! pour nous une telle semaine, c'est bien assez pour consoler des douleurs et des épreuves de toute une année, pour fortifier et préparer aux épreuves et aux afflictions à venir.

Que de miracles en effet, que de mystères dans cette grande semaine ! Mystères et miracles d'amour de la part d'un Dieu, et, il faut bien le dire, mystères et prodiges d'ingratitude de la part de l'homme pécheur. Comme l'église connaît bien le coeur de l'homme ! comme elle sait le besoin que nous avons d'émotions vives et variées! comme elle va remuer fortement notre âme en offrant successivement tous ces mystères de grâce et de miséricorde à nos méditations et à nos hommages, en nous les décrivant avec le style sublime de l'Écriture, en nous les peignant avec le poétique coloris des prophètes, en les couvrant du voile transparent de cérémonies si expressives, si pittoresques, si dramatiques, et si saintes en même temps, qu'elles subjuguent et purifient les sens, exaltent et ravissent l'imagination, tandis qu'elles aident l'esprit et le coeur à s'élever en haut.

Dès le premier jour, l'église dans une cérémonie pleine d'une pompe joyeuse, et riche d'enseignements, nous fait prendre part au modeste et glorieux triomphe de Jésus, dans son entrée à Jérusalem. Que de piété, que d'onction, que de tendres et joyeux souvenirs dans la bénédiction des Rameaux, et la procession qui la suit, lorsque ces cérémonies se font avec les circonstances que l'église prescrit ! Nous invitons les fidèles qui ont le livre de la Semaine-Sainte entre les mains, à méditer ces cérémonies que nous ne pouvons qu'indiquer. Dès le commencement quel magnifique début, et si nous osons le dire, quelle entrée en scène, que ces paroles que le choeur fait entendre : Hosanna, gloire au Fils de David, béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. 0 Roi d'Israël, gloire à vous au plus haut des cieux. Après l'oraison du prêtre et le chant du sous-diacre qui rappelle les merveilles opérés par le Seigneur pour son peuple dans le désert, le choeur rappelle les pièges tendus à Jésus par les Pharisiens. Il nous semble qu'il y a une assez belle poésie dans le choix de ces morceaux, empruntés presque tous aux livres inspirés, où l'Église prie, raconte, peint les objets de manière à vous faire successivement passer de la joie à la douleur, du souvenir des anciens prodiges, à la célébration de nouveaux miracles. C'est alors que le diacre chante le passage de l'Évangile où est racontée l'entrée de Jésus à Jérusalem. Il y a dans ce récit si simple un ton de vérité qui commande la foi, et tout de suite à cette foi il se mêle de l'amour. C'est
un Roi de paix et de mansuétude qui s'avance.


Tout cela fut fait de manière à accomplir la parole du prophète qui avait dit: Dites à la fille de Sion, voici votre Roi qui vient à vous plein de douceur. Vient ensuite la bénédiction des Rameaux. Nous voudrions pouvoir expliquer ici les nombreuses et magnifiques prières que le prêtre adresse à Dieu dans cette bénédiction. L'objet commémoratif de cette cérémonie, les souvenirs de l'ancienne loi qui se rattachent à l'usage des Rameaux, Noé, la colombe de l'arche, Moïse sortant d'Égypte, puis le sens spirituel des Palmes, leur signification mystique ; tout se trouve exprimé dans ces prières où le prêtre fait entendre au Seigneur ces élans du coeur, ces soupirs, ces demandes, ces supplications que l'Église adresse à Dieu pour tous les fidèles, dans ce style d'amour et d'inspiration qu'elle sait si bien employer, quand elle parle à son céleste époux.

Après la bénédiction des Rameaux, il y a quelque chose d'imposant à voir toute cette forêt de palmes s'agiter, le peuple s'ébranler et commencer la marche sainte de la procession, figurant ainsi la marche triomphale de Jésus! Quel moment solennel que celui où le ministre sacré frappant du bâton de la croix les portes fermées du temple, ces portes s'ouvrent tout-à-coup, et laissent entrer la foule qui chante avec joie les paroles de triomphe : Quand le Seigneur entra dans la ville sainte, les enfants des Hébreux chantaient gloire à Dieu au plus haut des cieux. Nous pensons que l'âme chrétienne qui sait comprendre et goûter ces spectacles religieux, n'a point besoin pour se délasser, de recourir aux émotions sensuelles et voluptueuses d'un spectacle profane et passionné.

Du reste, de peur que ces cérémonies joyeuses ne nous fassent perdre de vue l'objet principal de cette semaine, pendant la messe qui suit immédiatement l'Église nous met sous les yeux dans l'Évangile le récit des souffrances de Jésus, et nous rappelle ainsi aux pensées graves et douloureuses de la passion. Après le dimanche des Rameaux, l'Église nous laissera nous recueillir pendant deux jours, puis le mercredi elle commence ses chants de douleur, et ses lamentations dans l'office des Ténèbres. Le jeudi, elle revêt ses ornements de fête pour célébrer l'institution du grand mystère de l'amour. Mais cette solennité passée, les autels dépouillés demeurent tristes et silencieux, l'Église reprend ses vêtements de deuil et ses lugubres cantiques, tandis que les pieux fidèles entourent Jésus au sépulcre. Mais c'est le vendredi surtout que l'Église révèle tout ce qu'il y a de touchant et de sublime dans l'immense affliction que lui inspirent les souffrances de son époux divin. Dans ce grand jour quels accents déchirants de douleur, quelles tristes et imposantes cérémonies ! Le samedi, c'est le jour que Jésus passa tout entier dans le tombeau ; c'est un jour de recueillement et de silence. Mais bientôt l'Église ne peut contenir sa joie de la résurrection prochaine du Sauveur, et cette joie éclate dans le chant répété de l'Alléluia. Nous aurions voulu pouvoir développer ces magnifiques cérémonies à nos pieux lecteurs. Ce que nous en disons suffira pour les aider à sanctifier cette grande semaine dont les ravissantes solennités verseront dans leur âme tant de consolation et de bonheur.


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26 - RÉSURRECTION DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST

Voici le jour que le Seigneur a fait, la solennité des solennités; c'est notre Pâques, et le jour où Jésus-Christ Notre Sauveur est ressuscité selon la chair. Ce sont là les paroles pleines d'allégresse, par lesquelles l'Église nous annonce dès la veille, la grande fête, l'accomplissement du grand mystère, le jour de victoire et de triomphe. Aujourd'hui la pénitence est interrompue, le deuil de l'Église est fini, les jours de douleur sont passés ; la sainte épouse du Sauveur, transportée de joie à la vue de son époux divin, vainqueur de la mort, et sortant glorieux du tombeau, oublie toutes ses afflictions et ses angoisses; elle a séché ses larmes, ses lugubres vêtements de veuve ont fait place aux riches et gracieux ornements de fête; elle a déployé toutes ses pompes, toute sa magnificence pour aller au-devant de Jésus qui revient chargé des dépouilles enlevées à l'enfer ; et dans son pieux enthousiasme, dans les élans de son chaste amour, elle appelle tous ses enfants à unir leurs voix à ses chants d'actions de grâces, et bien des fois dans l'office de ce jour elle leur répète cette pressante invitation: Voici le jour que le Seigneur a fait, réjouissons-nous et tressaillons d'allégresse dans ce jour heureux.

Pour comprendre cette joie de l'Église, et pour y prendre part, nous n'avons qu'à nous rappeler quel est l'objet de cette solennité. Jésus avait annoncé qu'il sortirait du sein de la terre, c'est-à-dire du tombeau, le troisième jour. Il avait annoncé que ce temple que ses ennemis détruisaient, et qui était le temple de son corps, il le rebâtirait dans trois jours. Amis et ennemis, tous connaissaient la prophétie, tous attendaient avec anxiété le moment marqué. S'il sortait du tombeau, il était ce qu'il prétendait être, le Fils de Dieu, et voici que son corps mis dans le tombeau le vendredi, en sort glorieux le dimanche au matin ; il est ressuscité.

Nous comprenons que les Pères et les Docteurs, depuis les temps apostoliques, aient appelé jour de Pâques la fête des fêtes, et l'aient considéré comme le grand jour pour les chrétiens : et il n'est point étonnant que cette solennité, instituée par les Apôtres eux-mêmes, ait été dans tous les siècles une époque de saintes réjouissances pour les chrétiens. Ce mystère en effet est, si nous pouvons le dire, la clef de voûte de tout l'édifice du christianisme. C'est le complément de tous les mystères inspirés par l'amour à un Dieu miséricordieux pour le salut des hommes pécheurs. Sans la résurrection, tout demeure imparfait ; ou plutôt sans la résurrection, les mystères proposés à nos adorations, ne seraient plus que des impostures, objets de notre mépris. Si Jésus-Christ n'est pas ressuscité, disait l'Apôtre, notre prédication est vaine, et votre foi et inutile. Si Jésus-Christ n'était pas ressuscité, il aurait trompé, car il avait donné sa résurrection comme le sceau de sa mission divine ; mais puisqu'il est ressuscité, il est vraiment l'envoyé de Dieu, il est le prophète qui devait venir en ce monde, il est le Fils de Dieu ; sa religion est une œuvre divine, ses dogmes sont vrais, et les mystères, que nos yeux ne voient pas, deviennent pour nous des faits accomplis, aussi clairs, aussi visibles que les faits matériels qui leur servent d'enveloppe. Aussi le grand prodige de la résurrection est entouré de tant d'éclat, qu'il serait impossible à un homme de bonne foi d'y trouver matière à un doute sérieux ; ainsi Dieu l'a voulu pour l'affermissement de notre foi.

Mais ce n'est pas seulement notre croyance qui trouve son plus solide fondement dans le fait de la résurrection du Sauveur ; et ce mystère n'est point destiné seulement à être l'objet de notre foi. Il est aussi pour nous une source d'espérances, et un gage d'immortalité. Jésus ressuscité est le premier-né d'entre les morts, en lui sont les prémices de la résurrection ; car de même que par un seul homme la mort était entrée dans le genre humain, ainsi par un seul homme nous vient la résurrection. Nous ressusciterons donc tous. Il y a donc une autre vie non seulement pour nos âmes qui ne meurent point, mais pour nos corps qui ressuscitent. Mais dans cette résurrection tous ne seront pas changés et renouvelés; car les uns ressusciteront pour la gloire, les autres pour l'opprobre, chacun selon ses œuvres; et ceux-là seulement participeront à la gloire de Jésus ressuscité, qui auront participé aux souffrances de sa passion et de sa mort. De là les grands enseignements que l'Église nous donne dans le langage du Grand Apôtre : Vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Jésus- Christ en Dieu. Vous êtes morts, et vous vivez ! Paroles mystérieuses! Mystère de morale, aussi absurde aux yeux de l'homme charnel, que les mystères que la doctrine offre à notre croyance, mais mystère que l'âme chrétienne comprend, et qu'elle met en pratique. Quelle grande pensée ! quelle salutaire leçon ! quelle sainte sévérité dans ces paroles jetées sur la foule au milieu des pompes de la fête et des joies du triomphe ! Comme elle est divinement  inspirée, cette Église qui nous offre avec tant de puissance de si hauts enseignements, et les rend sensibles, d'une manière si énergique, si entraînante, aussi bien aux sens et à l'imagination qu'à l'esprit et au coeur!

Élevées par la contemplation de ces grandes vérités, nos âmes ne soupirent-elles pas après l'heureux jour où le mystère de la résurrection sera pleinement accompli en nous?
Mais pour ressusciter glorieux avec Jésus-Christ, nous avons dû d'abord ressusciter avec l'homme nouveau, à une vie nouvelle, toute sainte, toute spirituelle; et pour ressusciter à cette vie nouvelle, nous avons dû d'abord mourir à nous-mêmes, à la chair, aux sens, à la nature corrompue. Si vous êtes ainsi ressuscites avec Jésus- Christ, nous dit l'Apôtre, cherchez ce qui est en haut là où est Jésus- Christ, assis à la droite du Père, goûtez ce qui est en haut, et non plus ce qui est sur la terre. Et si nous sommes ainsi ressuscités à une vie sainte, conservons-la précieusement, car le chrétien ressuscité à la grâce, ne doit plus mourir par le péché, de même que Jésus-Christ ressuscité ne meurt plus, et que la mort n'aura plus d`empire sur lui.

Telles sont les grandes et salutaires réflexions que l`Église nous suggère aujourd'hui. Non contente de se réjouir de la résurrection de son divin époux pendant un jour, elle va consacrer une semaine toute entière à la célébration de ce grand mystère, et sa joie surabondante, elle ne cessera point de la manifester pendant tout le temps pascal; mais cette joie ne lui fait point perdre de vue les dangers dont nous sommes entourés, et l'incertitude où nous sommes encore de notre sort futur. Entrons dans cet esprit de l'Église, et que les saintes joies de nos pieuses solennités ne nous laissent oublier les sentiments de pénitence dont le chrétien doit toujours être animé, jusqu'à ce que le grand mystère de la résurrection glorieuse ait reçu son parfait accomplissement en lui.


27 - SAINT LÉON

PAPE ET DOCTEUR DE L'EGLISE.


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Les cinq premiers siècles de l'Église offrent à l'observateur chrétien le spectacle le plus digne de ses études et de son admiration. Jamais la grande lutte entre la vérité et l'erreur, ne fut plus vive et plus acharnée. Dès le commencement toute l'habileté des rhéteurs, toute la subtilité des philosophes, toutes les impostures des prêtres païens étaient venues stimuler la haine des persécuteurs et la rage des bourreaux contre l'Église naissante ; mais en dépit de tant d'efforts réunis, l'Église baignée dans le sang de ses enfants ne fit que jeter de plus profondes racines dans un sol qui semblait vouloir la dévorer et l'engloutir ; illustrée par le sang de ses martyrs, elle n'eut pas moins à s'enorgueillir des lumières et de la science de ses enfants qui dans les prisons et sous le glaive de tyrans écrivaient ces apologies qui ont fourni aux écrivains religieux de tous les siècles des armes invincibles contre l'incrédulité,

Lorsque de guerre lasse les persécuteurs se furent faits chrétiens, l'hypocrite hérésie, plus dangereuse que les persécutions ouvertes, vint renouveler le combat du mensonge contre la vérité avec tous les moyens astucieux et perfides qu'ont toujours employés les hérésiarques des âges suivants, jusqu'à nos jours ; et quand ils furent en force, les hérétiques joignirent volontiers à leur dialectique captieuse, l'action plus énergique et plus violente des prisons, des tortures et des échafauds. Ce fut alors que parurent ces hommes puissants par l'énergie de leurs paroles, par la force et leurs raisonnements, par la profondeur et l'étendue de leurs connaissances, et plus remarquables encore par l'invariable fermeté de leur foi, la noblesse et l'élévation de leur caractère.

Dignes successeurs des premiers apologistes, les pères du quatrième et du cinquième siècles jetèrent sur cette glorieuse époque. Tous les dogmes de la foi catholique, attaqués par les Ariens, les Nestoriens, les Eutychiens, les Pélagiens, et par tant d'autres hérétiques, furent expliqués et développés avec une clarté, une précision qui ne laissèrent aucun subterfuge à l'erreur, et confondirent d'avance les impostures et les impiétés des modernes sectaires. Avec quel noble et saint orgueil l'Église catholique présente à ses amis et à ses ennemis des noms tels que ceux d'un Athanase, d'un Grégoire de Nazianze, d'un Basile, d'un Chrysostome, dans l'Orient, et dans l'Église latine, quels noms que ceux des Hilaire, des Ambroise, des Jérôme, des Augustin ! Enfin pour terminer glorieusement cette magnifique série de noms illustres, apparaît Saint Léon, surnommé le Grand, et qui eut la gloire de convoquer et de présider par ses envoyés le dernier des quatre grands conciles dont St-Grégoire comparait l'autorité à l'autorité des quatre Évangiles.

Appelé par le Seigneur à de grandes choses, St-Léon ne parait dans l'histoire qu'au moment où le bras de Dieu veut l'employer comme l'instrument de ses merveilles. On ne sait rien de certain de la famille, de la patrie, ni de l'époque de la naissance de l'homme qui joua le plus grand rôle dans le mouvement de son siècle. Prêtre selon l'ordre de Melchisédech, comme ce patriarche, il semble être sans père, sans aïeux, sans généalogie. L'histoire le fait connaître comme pape, gouvernant l'Église avec un mélange admirable de force et de sagesse dans les circonstances les plus critiques ; c'était-là sa mission. Diacre de l'Église romaine, Léon était occupé dans les Gaules à réconcilier deux généraux romains, qui sur les débris palpitants de l'Empire se disputaient une ombre d'autorité, lorsque le pape Sixte III mourut l'an 440. Léon choisi pour lui succéder, fut aussitôt rappelé à Rome, et jamais pontife ne se montra plus digne du haut rang où il était élevé. L'Église avait à combattre les Manichéens, les Priscillianisme, les Pélagiens, et surtout les Eutychiens. Il fallait définir le dogme, rétablir et fortifier la discipline, relever la majesté de l'Empire, faire reconnaître la suprématie de la chaire pontificale, opposer une digue au torrent des mauvaises mœurs.

Pour cela il fallait réunir l'esprit le plus délié au caractère le plus vigoureux, une science consommée à toute l'élévation de l'éloquence, les vertus les plus humbles aux qualités les mieux faites pour le commandement. On sentait le besoin d'un tel homme, mais sans pouvoir l'espérer. Saint-Léon surpassa toutes les espérances par les grandes actions qui illustrèrent son pontificat. Les Manichéens chassés d'Afrique s'étaient réfugiés à Rome. Saint-Léon dévoila leurs artifices, leurs abominations secrètes, et ne leur laissa de ressource que dans la fuite ou la rétraction de leurs erreurs. Le Pélagianisme commençait à reparaître en Italie ; St-Léon le comprime aussitôt par son zèle, et parvient à l'étouffer. Le Priscillianisme dominait en Espagne; le saint Pape réussit à l'en extirper. Mais l'hérésie la plus formidable était celle d'Eutychès, qui, appuyé de la puissance séculière, avait bouleversé tout l'Orient. Saint-Léon soutient noblement la cause de la foi, l'honneur des prélats orthodoxes, et les droits de la hiérarchie, et termine heureusement cette grande affaire, dans le concile de Calcédoine, qui est le quatrième concile œcuménique. L'Occident était en proie à la fureur des barbares. Attila, surnommé le fléau de Dieu, ravageait les provinces de l'Empire. Rome incapable de se défendre, tremblait à l'approche du farouche conquérant ; St-Léon va au-devant d'Attila, et autant par l'autorité que par la persuasion de ses paroles, il détermine Attila à repasser les Alpes, et à se retirer au-delà du Danube. Ce ne fut pas la seule fois que Rome dût son salut à son pontife. Quelques années après, Genséric, roi des Vandales, s'étant montré aux portes de Rome, St-Léon réussit encore par ses prières à épargner le sang de son troupeau.

Au milieu de ces agitations religieuses et politiques, sa sollicitude vraiment pastorale s'étendait à toutes les églises du monde. De là une correspondance non-interrompue avec tous les évêques, de là cette multitude de discours et de lettres qui ont eu dans tous les siècles tant d'autorité pour fixer la discipline de l'Église, et régler les dispositions du droit canon. Quant à l'éloquence de ce grand homme, elle a un caractère spécial, et qui n'appartient qu'à lui. Qu'il fût né d'une famille illustre, comme on le croit, ou qu'il fût d'une naissance médiocre, on ne peut douter que son génie naturellement riche et élevé n'eût été admirablement secondé par une éducation distinguée. Son éloquence est grave, sans passion, pleine de dignité, telle qu'elle convient au vicaire de Jésus-Christ. C'est vraiment la religion du Roi des rois, qui assise sur son trône, dicte ses oracles par la bouche de son pontife. Il doit être compté, dit un critique célèbre, parmi les plus illustres écrivains qui aient ennobli cette langue romaine, devenue classique depuis le règne d'Auguste.

Son style rappelle l'élocution de Cicéron, et ses tableaux ont une onction et un éclat qui en reproduisent quelquefois l'éloquence. Chargé de gloire et d'années, chéri de Dieu et des hommes, ce grand pontife mourut après vingt et un ans de pontificat. Du reste, l'époque précise de sa mort est incertaine comme celle de sa naissance. En offrant à nos lecteurs cet aperçu des actions et des écrits de ce grand Saint, nous nous sommes moins proposés de leur offrir un modèle à imiter que de ranimer la foi des fidèles, en leur montrant cette foi si glorieusement défendue par des hommes qui font tant d'honneur à l'humanité. Combien nous devons être fiers d'appartenir à cette Église catholique qui a vu les plus beaux génies consacrer à sa gloire leurs talents, leurs travaux et leur vie.


28 - LE MOIS DE MARIE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. 29328b5f55b9fab67ffb8ca2ba23741e
Le mois de Mai a la Nouvelle Orléans - Mois de Marie

Quelque riche que soit le Calendrier de cette semaine, nous passons sous silence les belles fêtes et les noms glorieux qu'il offre à notre vénération et à nos hommages, pour entretenir nos lecteurs de ces pieux et saints exercices par lesquels les fidèles honorent Marie pendant tout le cours du mois de Mai. Cette pratique de dévotion, si tendre et si affectueuse, est répandue dans toute l'Église catholique, et partout elle a porté des fruits de bénédiction si abondants que nous croirions manquer à notre devoir, si nous n'encouragions pas de plus en plus parmi nos frères catholiques, cette dévotion autorisée par le chef de l'Église, enrichie de nombreuses indulgences, et déjà si populaire parmi nous.

Le mois de Mai a perdu maintenant pour nous son nom profane, qui rappelait les souvenirs du paganisme, et bientôt les fidèles ne le connaîtront plus que sous le nom si pieux, si grâcieux et si poétique de Mois de Marie. C'a été une heureuse idée de consacrer le mois de Mai à Marie, le mois des fleurs à celle qui est comparée aux roses de Jéricho et aux lys des vallées, le plus doux et le plus beau de tous les mois, à celle qui a été la plus aimable et la plus douce, comme la plus pure et la plus sainte de toutes les femmes. Ce mois, dit un pieux écrivain, ne semble-t-il pas par le renouvellement qu'il amène dans la nature, et par les fleurs qu'il fait éclore, inviter l'âme à renaître à la grâce, et à former par les purs hommages d'une piété sincère, comme la couronne de la reine des vertus ? Aussi dans le culte que l'Église rend à Marie, dans ce culte si fécond en sentiments affectueux, et si riche d'une poésie céleste, il n'y a rien de plus suave, de plus tendre, de plus attrayant que cette consécration du mois de Mai à Marie.

L'époque de cette dévotion ajoute encore à ce qu'elle a en elle-même d'entraînant. De même que tous les jours nous consacrons à Marie quelques instants de la journée, le matin, à midi et le soir, au son de l`angélus, et que toutes les semaines nous lui offrons spécialement un jour, qui est le samedi, ainsi que chaque année un mois tout entier lui est consacré, et aucun mois ne pouvait être aussi bien approprié à cette dévotion que le mois de Mai, ainsi que nous l'avons dit ; et grâces à cette dévotion, ce mois que le retour du printemps rend si dangereux, par l'attrait des plaisirs auxquels il invite, est devenu pour les fidèles une époque de piété plus fervente, de prières, de vigilance, et par la même de modestie et de pureté. Le mois de Mai se trouvant toujours dans le temps pascal, offre par ses pieux exercices un secours puissant aux pécheurs dont la conversion avait été préparée pendant le Carême, et un moyen efficace de persévérance pour ceux qui se sont renouvelés à Pâques.

Il n'est donc pas étonnant que l'Église ait encouragé une pratiqué si utile et dont les résultats doivent être si avantageux ; et nous devons remarquer la conduite pleine de sagesse et de condescendance que tient l'Église par rapport à ces dévotions. Elle n'a jamais imposé à ses enfants aucune de ces nombreuses pratiques par lesquelles nous honorons quelques mystères de Notre-Seigneur, de la Sainte-Vierge, ou les anges et les saints ; elle n'a même jamais été la première à suggérer ces pratiques aux fidèles, de peur que son autorité ne semblât leur imposer une obligation qui eût été à charge aux tièdes et aux faibles. Mais Dieu dans les différents siècles a suscité des hommes quelquefois remarquables par leur savoir autant que par leurs vertus, d'autres fois obscurs et inconnus au monde, qui ont les premiers conçu l'idée de ces diverses pratiques de dévotion, et les ont embrassées et fait embrasser aux autres. Puis quand l'Église voit par une expérience suffisamment prolongée, l'effet que peuvent produire ces pratiques de dévotion, et le bien qui doit en résulter, elle les encourage par une approbation formelle, et manifeste le désir qu'elle a de voir tous ses enfants y prendre part, sans néanmoins leur en faire un devoir rigoureux.

C'est ainsi que se sont établies toutes les confréries qui sont si utiles pour maintenir la piété parmi les fidèles, comme les confréries du Rosaire, du Scapulaire, la dévotion au Sacré Cœur, aux anges gardiens, et tant d'autres qui sont variés de manière à ce que chacun puisse trouver ce qui convient à ses goûts, à ses inclinations, à son caractère et à son esprit. C'est ainsi que notre siècle vu naître la confrérie du Rosaire-Vivant, et l'Association de la Propagation de la Foi ; et c'est de la même manière que se sont établis les pieux exercices du mois de Mai. Cette dévotion qui avait commencé en Italie, ne tarda pas à y produire des fruits admirables de sanctification. Le saint pape Pie VII, l'approuva et l'enrichit d'indulgences. Quelques années après cette pratique se répandit en France, où cependant elle ne devint populaire qu'après mil huit cent trente. A cette époque la France catholique, toujours si dévouée à Marie, et qui avait reçu dans la médaille miraculeuse, un nouveau gage de sa protection, embrassa avec amour les saintes pratiques du mois de Mai ; et cet élan devenu universel en France, ne pouvant plus demeurer renfermé dans des limites si étroites, la France catholique par ses missionnaires et ses pieux fidèles porta de toutes parts la pratique du mois de Mai, et c'est de ce moment que cette dévotion est devenue familière à tous les catholiques.

La dévotion du mois de Marie, aussitôt qu'elle fût connue dans la Louisiane, offrit un merveilleux attrait aux Créoles chez qui la piété envers Marie s'est toujours conservée, comme une planche de salut dans le naufrage presque général de la foi et de la piété parmi nous. Notre renouvellement date de l'époque où ces pieux exercices commencèrent à être suivis à la Nouvelle-Orléans. Depuis lors Marie n'a cessé de nous donner des marques de sa protection maternelle. Quel motif pour nous de lui témoigner de plus en plus notre amour et notre reconnaissance ! Demeurons fidèles à son culte, et elle continuera de veiller miséricordieusement sur nous. Nous ne doutons point que les exercices du mois de Marie ne soient suivis avec autant et même plus d'assiduité que les années précédentes, et que pendant ce mois les églises ne soient fréquentées comme pendant le Carême ; une indulgence partielle est accordée chaque jour du mois aux personnes qui honorent la Sainte-Vierge par quelque prière : et une indulgence plénière est accordée aux personnes qui, remplissant chaque jour ce devoir, se confessent et communient dans le cours du mois. Aux prières il est d'usage d'ajouter quelques pratiques extérieures de dévotion, comme d'orner quelque image ou statue de la Sainte- Vierge. Les indulgences peuvent être gagnées même par les personnes qui suivent ces pratiques en particulier et dans l'intérieur de leurs familles ; il y a lieu d'espérer qu'aucun vrai catholique ne voudra se priver de grâces si précieuses et si faciles à obtenir.


29 - ST. GRÉGOIRE DE NAZIANZE

ÉVÊQUE ET DOCTEUR DE L'ÉGLISE.


LE PROPAGATEUR CATHOLIQUE - Journal - NOUVELLE-ORLÉANS, LOUISIANE - ANNÉE  1842. 0_gregoire_1_plus


Le nom de ce grand saint a toujours été si célèbre dans l'église, qu'il aurait une sorte de honte pour des chrétiens à ne pas connaître au moins les circonstances les plus remarquables de la vie de cet illustre docteur, une des plus belles gloires de l'Église catholique. Le nom de Théologien que lui donnèrent ses contemporains, et que lui a confirmé la postérité, fait voir quelle idée on avait de sa science profonde, et quelle était sa connaissance de l'écriture et de nos saints mystères. St-Grégoire né de parents illustres par leur naissance et leurs richesses, et recommandables par leur piété, fut formé de bonne heure et avec un même soin, à la pratique de la vertu et à la connaissance des belles lettres. Envoyé pour achever ses études à Athènes qui était le rendez-vous des savants de toute la Grèce et d'une partie de l'Asie, Grégoire se lia d'une étroite amitié avec Basile-le-Grand, son compatriote, et Dieu permit que ces deux grands hommes qui ont été la gloire de leur siècle, offrirent au monde entier, et surtout à la jeunesse chrétienne et studieuse, un modèle parfait d'une amitié sainte et solide, fondée sur la vertu. Quoique d'un caractère différent, tous deux avaient pour but de renoncer aux espérances du siècle, pour se consacrer entièrement à Dieu, et cette conformité de vues chrétiennes et de goûts graves et studieux, en rendant plus douce et plus intime leur amitié, les préserva des dangers de leur âge, et de la corruption trop ordinaire, à une jeunesse nombreuse, turbulente et sans frein.

Il est impossible de lire la description que St-Grégoire nous a laissée, sans voir combien ces deux belles âmes étaient faites pour apprécier une amitié chrétienne, et en savourer les douceurs. « La science, qui est la chose du monde, qui porte le plus à la jalousie, dit ce grand saint, était notre but commun, et cependant il n'y avait entre nous aucune jalousie. Chacun de nous regardait la gloire de l'autre comme la sienne propre. Nous n'avions aucun commerce, ajoute-t-il, avec les jeunes gens qui étaient impudiques; les plus chastes étaient nos seuls compagnons. Nous ne connaissions que deux chemins, celui qui conduisait à l'église et aux saints docteurs qui y étaient, l'autre qui nous menait aux académies et chez nos professeurs. Nous laissions aux autres les chemins qui conduisaient aux fêtes, aux spectacles, aux assemblées et aux festins.»

Quels exemples pour les jeunes gens ! quel bonheur pour un jeune homme, quand il rencontre un ami vertueux, et qu'il peut former de bonne heure de ces pures et saintes liaisons qui servent de préservatif contre le vice, et répandent sur votre vie toute entière tant de joie et de douceur ! Avec de telles dispositions Grégoire après avoir achevé ses études, ne pensait qu'à s'ensevelir dans la retraite, pour échapper tout à la fois et aux dangers du monde, et au redoutable honneur du sacerdoce, et pour se livrer sans obstacle à son goût pour les sciences et les lettres. Mais Dieu avait d'autres desseins. Arraché de sa retraite, il se vit contraint, avant même d'avoir reçu l'onction sainte, de travailler à la conduite et au gouvernement spirituel des peuples. Élevé à l'épiscopat, deux fois il retourna dans la solitude, deux fois il en fut tiré pour gouverner des églises qui imploraient son secours.

Ce n'est pas qu'il cherchât dans la solitude la mollesse et le repos. Sa nourriture était très frugale. Il n'avait qu'un seul habit, nous disent ses historiens, ne portait point de souliers, supportait le froid et la chaleur, et ne couchait que sur la paille. Son corps était courbé moins par les années que par les austérités et les fatigues. Son visage était desséché par les larmes, le jeûne et les veilles. Son temps était partagé entre la prière et l'étude ; et c'est dans la retraite qu'il composa une grande partie de ses ouvrages, surtout ses poésies où l'on trouve tout le feu de la jeunesse, et la fraîcheur d'une belle imagination.

Ce fut à cette vie paisible et retirée qu'il se vit enlevé encore une fois pour venir à Constantinople combattre les Hérétiques, et surtout les Ariens.« Ce fut un spectacle assez nouveau, dit un historien, de voir un inconnu, de fort petite taille, d'une tournure peu avantageuse, pauvre et mal vêtu, sans argent et sans équipage, venir tout seul déclarer la guerre à l'hérésie et aux grandeurs du siècle, dans la capitale de l'empire. Il fut mal reçu d'abord, et n'opposa aux outrages que la patience. Mais son genre de vie simple, austère, fixa bientôt le respect et l'affection du peuple. Ses prédications en eurent plus de poids. Les hommes les plus habiles accoururent pour l'entendre, et St-Jérôme vint à Constantinople exprès pour recueillir de sa bouche des explications sur l'Écriture. Les Hérétiques eux-mêmes et les païens se pressaient auteur de sa chaire, tant on admirait sa profonde connaissance des divines Écritures, la vigueur de ses raisonnements, la brillante fécondité de son imagination, sa prodigieuse facilité à s'exprimer sur les mystères les plus relevés, et sur les questions les plus épineuses comme les plus délicates.»

Génie, en effet, égal à la majesté de la religion, dit un critique moderne, il en sonde toutes les profondeurs, en parcourt tout le domaine, et laisse partout la lumière sur ses traces ; et ce n'est pas seulement l'étendue et la précision de la doctrine qu'il faut admirer en lui ; il n'est pas moins distingué par son éloquence. Quoi qu'il semblât la dédaigner, et n'avoir qu'un sentiment de mépris pour cet art de la rhétorique dont il avait pris des leçons à Athènes, elle l'accompagne dans tous ces discours, et presque malgré lui la plénitude de son érudition et de sa dialectique. On ne sera point étonné sans doute que les évêques d'Orient crussent devoir pour le bien de la religion l'élever sur le trône épiscopal de Constantinople. Mais Grégoire, à qui les honneurs pesaient, voyant que son élection occasionnait des troubles, se retira de nouveau à Nazianze qu'il administra encore quelque temps, et rentra pour n'en plus sortir, dans sa chère solitude. C'est là que ce grand homme s'endormit dans la paix du Seigneur, apprenant par son exemple à ceux qui vivent dans la solitude, à chérir et sanctifier cet heureux état, et montrant à ceux qui sont engagés dans les soins extérieurs ou dans les embarras du siècle, ce qu'ils ont à faire pour échapper aux dangers qui les entourent, en tenant leur esprit attentif à la seule affaire importante, et leur coeur élevé vers les biens qui ne passeront jamais.

FIN

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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