Pourquoi la gauche est idéologiquement coincée
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Pourquoi la gauche est idéologiquement coincée
POURQUOI LA GAUCHE EST AUJOURD'HUI
IDÉOLOGIQUEMENT COINCÉE
par Yvan Petitclerc
Dans le débat contemporain entre la droite et la gauche, le plus intéressant est souvent de constater à quel point l'immense majorité des commentateurs semble complètement ignorer que les discours issus de l'une comme de l'autre sont en fait majoritairement le fruit de 2% de la population qui argumente entre elle. C'est le cas autant au Canada qu'aux États-Unis. Ce 2%, c'est bien sûr le pourcentage de la population juive en Amérique du Nord. Résultat de cela? La gauche, qui citait à qui mieux mieux des auteurs juifs pour faire avancer sa cause depuis des années, se retrouve aujourd'hui coincée par la question israélienne et par le cul-de-sac résultant de son endossement préalable du discours sans nuances contre les riches.
Cul-de-sac idéologique
Considérez ce qui suit. Tous les noms célèbres suivants (la majorité d'entre eux associés aux grandes causes progressistes passées comme présentes) sont juifs: Eve Ensler, auteur des Vagina Monologues, Noam Chomsky, qui n'a plus besoin de présentation, Léa Roback, qui a fait les belles heures du syndicalisme québécois à ses débuts, Naomi Klein, auteur de No Logo, l'activiste gay américain Larry Kramer, le poète de la Beat Generation Allen Ginsberg, Robin Morgan, éditrice pendant 20 ans du magazine féministe Ms., Tristan Tzara, fondateur du Dadaïsme au début du siècle dernier, Betty Fridan, Gloria Steinheim, etc.
Il y a quelques années, la gauche était puissante. Or, il y a quelques années, la gauche gardait aussi une certaine unité et la question israélienne ne se posait pas avec la même acuité. Les Juifs et les Noirs américains ont longtemps fait cause commune dans leurs combats pour l'avancement des libertés civiles. Tout cela a bien changé et pour des raisons multiples. Les conversions à l'Islam sont nombreuses dans la communauté noire américaine. Une situation qui est loin de réjouir les Juifs américains en dépit du discours pro-diversité de certaines organisations pour sauver les apparences. Aujourd'hui, les Juifs accusent les Noirs d'avoir transformé le combat pour les droits civiques en « Black Power Trip » tandis que les Noirs, eux, accusent les Juifs de s'être détournés de ces mêmes combats en faveur de la seule cause israélienne. Or, cette question israélienne, c'est aussi celle qui illustre le cul-de-sac idéologique dans lequel se retrouve la gauche actuelle.
La gauche pense à Israël sous le seul angle de la question israélienne. Or, la question israélienne, c'est aussi la question juive. N'a-t-on pas encore remarqué qu'on utilise constamment – et de façon interchangeable – les expressions « État juif » ou « État israélien » dans les médias et qu'Ariel Sharon, pour solidariser son peuple, parle non seulement de survie du peuple israélien mais aussi bien souvent de « survie du peuple juif »?
Regardez maintenant ce qui se passe avec les accusations typiques de gauche selon lesquelles les riches s'enrichissent et les pauvres s'appauvrissent. Un manifestant de gauche brandit un ouvrage provenant d'un membre de ce 2% juif de la population nord-américaine pour attaquer les riches et le pouvoir « blanc » (sic) constitué à environ 20 ou 25% de ce même 2%...
« Un manifestant de gauche brandit un ouvrage provenant d'un membre de ce 2% juif de la population nord-américaine pour attaquer les riches et le pouvoir « blanc » (sic) constitué à environ 20 ou 25% de ce même 2%... »
Dans son ouvrage Like Everyone Else But Different, Morton Weinfeld de l'Université McGill rappelle que lorsque le magazine Forbes a dressé pour la première fois son palmarès des 400 citoyens américains les plus riches, en 1982, on retrouvait de 20 à 25 % de citoyens juifs. Or, faites le test aujourd'hui, 20 ans plus tard, et vous aurez un pourcentage pratiquement similaire tant pour les États-Unis que pour le Canada: Gerald Schwartz et Heather Reisman d'Onex Corporation et propriétaire des librairies Chapters et Indigo (talk about the people of the book!), les frères Reichmann, avec le projet immobilier de Canary Wharf à Londres – qui fonctionne maintenant bien –, la famille Asper, propriétaire du National Post, ou encore David Azrieli qui a complété l'Hôtel Sofitel sur la rue Sherbrooke à Montréal.
Pôles inversés
Aux État-Unis, on compte les frères Lauder, héritiers de la fondatrice de l'empire des cosmétiques Estée Lauder, Daniel Abraham, fondateur de l'empire des produits amaigrissants Slim Fast, Jeffrey Katzenberg, David Geffen et Steven Spielberg, fondateurs du studio Dreamworks, Michael Dell, fondateur de la compagnie de produits informatiques du même nom, le célèbre financier Georges Soros, Mark Cuban, de [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] et coloré propriétaire des Dallas Mavericks de la NBA, Ronald Perelman, de l'empire des cosmétiques Revlon, etc.
Tout cela fait en sorte que l'on se retrouve avec des situations souvent des plus loufoques. On pourra voir ainsi un militant de gauche brandir le livre de Naomi Klein (sans savoir qu'elle est juive) et crier des slogans hostiles aux grandes corporations ou s'en prendre aux grandes marques telles Calvin Klein, Ralph Lauren, Anne Klein, Donna Karan, Liz Claiborne, Guess jeans ou Levis... (tous designers juifs!). Il prendra ensuite part à une marche pro-palestinienne agrémentée parfois de slogans anti-israéliens à la limite de l'antisémitisme et ne comprendra pas pourquoi certains leaders, militants et organisations de la gauche traditionnelle ne le suivent plus. Faut le faire!
La gauche a moins d'impact vous dites? Nos débats politiques sont insignifiants? Évidemment. On ne comprend pas que le débat politique numéro un à l'échelle mondiale ce n'est pas Israël contre la Palestine, mais bien plutôt l'analyse du comment et du pourquoi. Comment en quelques décennies on a complètement inversé les pôles sur la question juive. Avant, les partis de droite était généralement associés à l'antisémitisme. Aujourd'hui de nombreux commentateurs juifs s'en prennent à la gauche universitaire anti-Israël et antimondialisation (une controverse a fait rage à ce sujet dans le quotidien montréalais Le Devoir au cours des dernières semaines). Et sur les sites juifs, on peut lire des articles expliquant pourquoi Bush est bon pour les Juifs. Renversement phénomenal dont l'étude est la véritable clé pour comprendre les contours présents et futurs de nos débats droite-gauche.
Enfin peut-on trouver meilleure illustration de la déroute de la gauche et du cul-de-sac idéologique dans lequel elle se retrouve que de voir le militant antimondialisation montréalais Jaggi Singh se faire arrêter... en Israël?
Articles précédents d'Yvan Petitclerc
IDÉOLOGIQUEMENT COINCÉE
par Yvan Petitclerc
Dans le débat contemporain entre la droite et la gauche, le plus intéressant est souvent de constater à quel point l'immense majorité des commentateurs semble complètement ignorer que les discours issus de l'une comme de l'autre sont en fait majoritairement le fruit de 2% de la population qui argumente entre elle. C'est le cas autant au Canada qu'aux États-Unis. Ce 2%, c'est bien sûr le pourcentage de la population juive en Amérique du Nord. Résultat de cela? La gauche, qui citait à qui mieux mieux des auteurs juifs pour faire avancer sa cause depuis des années, se retrouve aujourd'hui coincée par la question israélienne et par le cul-de-sac résultant de son endossement préalable du discours sans nuances contre les riches.
Cul-de-sac idéologique
Considérez ce qui suit. Tous les noms célèbres suivants (la majorité d'entre eux associés aux grandes causes progressistes passées comme présentes) sont juifs: Eve Ensler, auteur des Vagina Monologues, Noam Chomsky, qui n'a plus besoin de présentation, Léa Roback, qui a fait les belles heures du syndicalisme québécois à ses débuts, Naomi Klein, auteur de No Logo, l'activiste gay américain Larry Kramer, le poète de la Beat Generation Allen Ginsberg, Robin Morgan, éditrice pendant 20 ans du magazine féministe Ms., Tristan Tzara, fondateur du Dadaïsme au début du siècle dernier, Betty Fridan, Gloria Steinheim, etc.
Il y a quelques années, la gauche était puissante. Or, il y a quelques années, la gauche gardait aussi une certaine unité et la question israélienne ne se posait pas avec la même acuité. Les Juifs et les Noirs américains ont longtemps fait cause commune dans leurs combats pour l'avancement des libertés civiles. Tout cela a bien changé et pour des raisons multiples. Les conversions à l'Islam sont nombreuses dans la communauté noire américaine. Une situation qui est loin de réjouir les Juifs américains en dépit du discours pro-diversité de certaines organisations pour sauver les apparences. Aujourd'hui, les Juifs accusent les Noirs d'avoir transformé le combat pour les droits civiques en « Black Power Trip » tandis que les Noirs, eux, accusent les Juifs de s'être détournés de ces mêmes combats en faveur de la seule cause israélienne. Or, cette question israélienne, c'est aussi celle qui illustre le cul-de-sac idéologique dans lequel se retrouve la gauche actuelle.
La gauche pense à Israël sous le seul angle de la question israélienne. Or, la question israélienne, c'est aussi la question juive. N'a-t-on pas encore remarqué qu'on utilise constamment – et de façon interchangeable – les expressions « État juif » ou « État israélien » dans les médias et qu'Ariel Sharon, pour solidariser son peuple, parle non seulement de survie du peuple israélien mais aussi bien souvent de « survie du peuple juif »?
Regardez maintenant ce qui se passe avec les accusations typiques de gauche selon lesquelles les riches s'enrichissent et les pauvres s'appauvrissent. Un manifestant de gauche brandit un ouvrage provenant d'un membre de ce 2% juif de la population nord-américaine pour attaquer les riches et le pouvoir « blanc » (sic) constitué à environ 20 ou 25% de ce même 2%...
« Un manifestant de gauche brandit un ouvrage provenant d'un membre de ce 2% juif de la population nord-américaine pour attaquer les riches et le pouvoir « blanc » (sic) constitué à environ 20 ou 25% de ce même 2%... »
Dans son ouvrage Like Everyone Else But Different, Morton Weinfeld de l'Université McGill rappelle que lorsque le magazine Forbes a dressé pour la première fois son palmarès des 400 citoyens américains les plus riches, en 1982, on retrouvait de 20 à 25 % de citoyens juifs. Or, faites le test aujourd'hui, 20 ans plus tard, et vous aurez un pourcentage pratiquement similaire tant pour les États-Unis que pour le Canada: Gerald Schwartz et Heather Reisman d'Onex Corporation et propriétaire des librairies Chapters et Indigo (talk about the people of the book!), les frères Reichmann, avec le projet immobilier de Canary Wharf à Londres – qui fonctionne maintenant bien –, la famille Asper, propriétaire du National Post, ou encore David Azrieli qui a complété l'Hôtel Sofitel sur la rue Sherbrooke à Montréal.
Pôles inversés
Aux État-Unis, on compte les frères Lauder, héritiers de la fondatrice de l'empire des cosmétiques Estée Lauder, Daniel Abraham, fondateur de l'empire des produits amaigrissants Slim Fast, Jeffrey Katzenberg, David Geffen et Steven Spielberg, fondateurs du studio Dreamworks, Michael Dell, fondateur de la compagnie de produits informatiques du même nom, le célèbre financier Georges Soros, Mark Cuban, de [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] et coloré propriétaire des Dallas Mavericks de la NBA, Ronald Perelman, de l'empire des cosmétiques Revlon, etc.
Tout cela fait en sorte que l'on se retrouve avec des situations souvent des plus loufoques. On pourra voir ainsi un militant de gauche brandir le livre de Naomi Klein (sans savoir qu'elle est juive) et crier des slogans hostiles aux grandes corporations ou s'en prendre aux grandes marques telles Calvin Klein, Ralph Lauren, Anne Klein, Donna Karan, Liz Claiborne, Guess jeans ou Levis... (tous designers juifs!). Il prendra ensuite part à une marche pro-palestinienne agrémentée parfois de slogans anti-israéliens à la limite de l'antisémitisme et ne comprendra pas pourquoi certains leaders, militants et organisations de la gauche traditionnelle ne le suivent plus. Faut le faire!
La gauche a moins d'impact vous dites? Nos débats politiques sont insignifiants? Évidemment. On ne comprend pas que le débat politique numéro un à l'échelle mondiale ce n'est pas Israël contre la Palestine, mais bien plutôt l'analyse du comment et du pourquoi. Comment en quelques décennies on a complètement inversé les pôles sur la question juive. Avant, les partis de droite était généralement associés à l'antisémitisme. Aujourd'hui de nombreux commentateurs juifs s'en prennent à la gauche universitaire anti-Israël et antimondialisation (une controverse a fait rage à ce sujet dans le quotidien montréalais Le Devoir au cours des dernières semaines). Et sur les sites juifs, on peut lire des articles expliquant pourquoi Bush est bon pour les Juifs. Renversement phénomenal dont l'étude est la véritable clé pour comprendre les contours présents et futurs de nos débats droite-gauche.
Enfin peut-on trouver meilleure illustration de la déroute de la gauche et du cul-de-sac idéologique dans lequel elle se retrouve que de voir le militant antimondialisation montréalais Jaggi Singh se faire arrêter... en Israël?
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MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
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