La pratique des vertus chrétiennes - devoir de tous les hommes - Angleterre - année 1722
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La pratique des vertus chrétiennes - devoir de tous les hommes - Angleterre - année 1722
La pratique des vertus chrétiennes ou tous les devoirs des hommes
Par Richard Allestree (1621 - 1681) Il était un homme d`église royaliste anglais et provost au Collège de Eton a partir de 1665.
Année 1722 – Angleterre – traduit de l`Anglais - Livre nécessaire aux familles
Ce livre a été très populaire à son époque en Grande-Bretagne et en France.
Introduction
Le but unique de ce livre est de donner aux Chrétiens qui ont de faible connaissance de la foi des directions courtes et faciles pour se conduire en cette vie de façon à pouvoir obtenir le bonheur éternel dans la vie à venir. Mais parce que il est inutile de parler aux hommes de leurs Devoirs, jusqu`à ce que on leur a fait comprendre la Nécessité qu`il y a de les accomplir, je tacherai de les porter à un Devoir Général qui les disposera tout le reste; je veux dire au devoir de penser sérieusement au Salut de leur Âme, sans quoi il est impossible qu`ils se croient intéressés à s`acquitter des autres.
L`Homme, comme tout le monde le sait, est composé de deux parties, le Corps et l`Âme. Le Corps n`est que l`étui de l`Âme; ce n`est qu`une masse de chair organisée, sujette à plusieurs Maux pendant tout le cours de la vie et enfin à la mort même ou il devra être abandonné à la corruption du tombeau. Cependant nous prenons un soin extrême de notre chair qui est cependant la partie la moins importante de notre Être. Tous nos travaux et toutes nos peines ne sont que pour cette partie de nous-même. L`Âme en est la partie la plus précieuse et de beaucoup mais on ne s`embarrasse guères de son état; on n`y pense point; on la néglige absolument, comme si s`était une chose sans intérêts. Ce peu de soins que nous prenons de nos âmes est justement la source de tous nos péchés.
Ainsi, celui qui se propose de mener une vie Chrétienne, doit avant toute chose se guérir d`une si dangereuse négligence. Tout homme est capable de suivre les règles simples qui seront expliquées. Parmi les choses que nous considérons comme importantes et sur lesquelles nous exerçons une grande vigilance il y a quatre choses. La première est la Valeur de la chose : la seconde est l`utilité de cette chose pour nous comme le fait de ne pouvoir s`en passer sans souffrir des incommodités: la troisième est le Danger ou nous la voyons exposée : la quatrième est l`Apparence qu`il y a que les soins que nous prendrons pour les conserver ne seront pas inutiles.
Pour la première, chacun sait que nos soins pour les choses du monde sont toujours proportionnée à l`idée que nous avons de leur mérite ou de leur valeur. Quand elles nous paraissent de grand prix, nous n`épargnons aucun soin pour les garantir de toutes sortes d`accidents et nous sommes toujours dans la crainte de les perdre.
On serre avec soin son argent et les autres choses que l`on estime précieuses et on les mets dans un coffre-fort mais pas les bagatelles que l`on estime de peu de valeur.
Or qu`y a-t-il au Monde qui mérite plus de soin que l`Âme puisque elle vaut infiniment plus que tout le reste? Car premièrement elle est faite à l`image de Dieu; c`est Dieu qui a « soufflé en l`homme cette respiration de vie.» ( Genèse 2, 7) Et Dieu étant le plus grand, le plus excellent, et le plus parfait de tous les êtres, il est indubitable que plus les choses lui ressemblent et plus elles sont estimables. Or, il est certain que de toutes les créatures que nous voyons sur la Terre, il n`y a que l`âme de l`homme qui porte l`Image de la divinité. C`est donc l`âme de l`homme qui mérite ses plus grands soins. Secondement, l`Âme ne meurt jamais : et nous sommes accoutumés à mesurer les choses à proportion de leur durée, et de regarder celles qui durent comme plus estimable. Or, l`Âme dure éternellement.
Les richesses, la beauté, la force et nos corps eux-mêmes passent et s`évanouissent. Mais l`Âme survit aux débris de toutes ces choses qui l`environnent. Ainsi à cet égard, l`Âme est de plus grand prix que toutes autres choses. Quelle étrange folie de la négliger comme nous faisons! Nous employons les jours, les semaines, les mois, les années, et même la vie entière à la poursuite des biens matériels, qui nous abandonne souvent et que nous devons abandonner à la mort; Et nous souffrons que notre Âme, cet éternel trésor nous soit enlevée par le démon! (l`ange déchu)
L`utilité des choses pendant que nous les possédons, ou le grand préjudice que leur perte nous causerait est un second motif qui nous porte à en prendre soin. C`est ce que le sens commun nous enseigne sur les choses de cette vie. Si les cheveux nous tombe, nous n`en sommes pas beaucoup touché parce que nous pouvons nous en passer. Mais si nous sommes en danger de perdre la vue, ou quelque membre alors nous ne croyons jamais prendre trop de soins pour éviter une telle perte parce que nous comprenons quel malheur cela sera.
Pourtant il n`y a pas de malheur pire que la perte de notre Âme. Il est vrai que elle est éternelle et ne cessera pas d`être. Mais d`une autre manière nous pouvons la perdre en perdant l`état de bonheur pour laquelle l`âme a été créée, et la voir plonger dans une affreuse misère. En un mot, nous pouvons la perdre dans les Enfers, d`où il n`y a point de retour; et la perdre à jamais.
Et cette considération intéresse aussi le corps, objet de notre tendresse et de tous nos soins puisque il doit un jour ressusciter et être réuni à l`Âme pour partager avec elle son bonheur ou son malheur. Si nos soins pour le corps prennent tout notre temps et ne nous laissent rien pour l`Âme, il est bien évident que faute des soins que le corps lui dérobe, l`Âme risque d`être éternellement misérable.
Si vous avez donc une véritable tendresse pour votre corps, vous devez aussi prendre soin de votre Âme. Pensez en vous-même comment vous pourrez endurer les ardeurs éternelles. Si la moindre petite étincelle sur le corps est insupportable que sera-ce pour le corps entier dans un feu éternel? Pensez-y bien et pensez que cela sera le prix pour avoir négligé votre Âme. Donnez-lui donc quelques soins à cette Âme précieuse; même si cela est simplement par compassion pour le corps qui doit avoir part à la misère.
Le troisième motif du soin que l`on prend des choses; c`est le danger ou on les voit exposées de la part des ennemis du dehors, ou par une mauvaise disposition intérieure. Je dis premièrement de la part des ennemis du dehors, comme la brebis qui est continuellement en danger d`être dévorée par le loup. Voyez comment ce danger augmente le soin et la vigilance du berger. Or, c`est la précisément l`état de l`Âme ; car elle est sans cesse exposée a de grands dangers de la part de ses ennemis, le Monde, la Chair et Satan; des ennemis si bien déclarés et connus que le premier acte que nous faisons en faveur de notre Âme est de leur déclarer une guerre éternelle.
Car c`est ce que chacun fait à son Baptême : et quiconque après cela fait la moindre trêve avec eux, ne trahit pas seulement son Âme, mais viole son vœux solennel ; et devint parjure; considération qui mérite bien que l`on y fasse une attention sérieuse. Mais afin de mieux comprendre en quel danger l`Âme se trouve considérons a quelle espèce d`Ennemis elle a affaire. Dans la guerre, il y a diverses choses qui rendent un Ennemi redoutable. La première est la ruse, qui a souvent fait remporter des victoires; et à cet égard, Satan est un dangereux adversaire. Il y a longtemps que il a donné des preuves de sa finesse en séduisant nos premiers Parents, quoique ils fussent beaucoup plus habiles que nous; de sorte que il n`y a pas de lieu de s`étonner s`il nous surprend et s`il nous trompe.
Secondement, la vigilance et l`activité doivent faire craindre un Ennemi ; et c`est en quoi Satan et ses anges déchus surpassent toutes les autres créatures. Il fait son métier et sa grande affaire de travailler à notre ruine, et il n`oublie rien pour en venir à bout. «Il tourne tout alentour de nous cherchant qui il pourra dévorer.»(1 Pierre 5,8)
Il épie avec une telle application toutes les occasions qui lui donne quelque avantage sur nous, qu`il n`en laisse jamais échapper aucune. Un Ennemi à nos portes est bien plus à craindre que éloigné; car alors que il est encore loin, on a du temps pour s`armer et pour se préparer à le recevoir; au lieu que s`il est près de nous, il a mille occasions de nous surprendre, lorsque nous y pensons le moins et que nous sommes le plus au dépourvu.
La Chair (les passions du corps humain) est un Ennemi de cette espèce : nous l`avons toujours à nos côtés, nous la portons toujours dans notre sein; et elle est toujours à portée de profiter des occasions de nous nuire. Plus un Ennemi est traître et perfide et plus il est à craindre. Celui qui cache ses mauvaises intentions sous le visage de l`amitié est le plus dangereux et peux nous faire beaucoup plus de mal. Et c`est ce que fait la Chair qui ; comme de Joab a Abner, ( 2 Samuel 3, 27) en faisant semblant de nous parler de paix, nous porte des coups mortels. Elle est très empressée à nous fournir des divertissements et des plaisirs; elle s`insinue par la dans nos cœurs; elle nous fait accroire que elle a pour nous de la tendresse; mais elle cache un hameçon, sous cet appât et si l`on y mord; on est perdu.
Le plus grand nombre des Ennemis qu`on a, les rends plus terribles. Le Monde est une armée innombrable que nous avons contre nous; il n`y a point d`état, point de condition, presque point de créature qui ne combattent quelquefois contre l`Âme.
Les Honneurs du Monde tâchent de nous blesser par l`orgueil, les Richesses par l`avarice : la prospérité nous tente et nous fait oublier Dieu. L`Adversité nous fait murmurer contre lui; notre propre table devient un piège contre nous; les mets et les liqueurs qu`on y présente nous portant à l`intempérance. Nos compagnons et même nos amis les plus intimes, prennent quelquefois parti contre nous en cette guerre; quand par leurs persuasions ou leurs mauvais exemples, ils nous engagent à offenser Dieu.
Pensez bien à toutes ces choses, et dites-moi après cela, si l`Âme, entourée et assiégée de si nombreux dangers et d`ennemis, peut dormir avec quelques sûreté. Dalila même criait a Samson qu`il était temps de se réveiller alors que les Philistins étaient sur lui. Et Notre Seigneur nous dit : « que si le maître de la maison eut su à quelle heure de la nuit venait le voleur, il eut veillé, et n`aurait pas souffert que sa maison eut été percée. »( Matthieu 24, 43).
Or nous vivons parmi des brigands, alors ne devons-nous pas nous tenir constamment sur nos gardes? Et cependant, qui parmi nous prend plus de soin de son Âme, la chose la plus précieuse qu`il possède, que de sa maison ou des autres choses qui lui appartiennent? Je crains bien que notre Âme puisse nous faire le même reproche que Christ faisait a ses disciples : «Est-il possible que vous n`aillez pu veiller une heure avec moi?» (Matthieu 26,40)
Car plusieurs seraient en peine de dire quand ils ont donné une heure de leurs veilles a la conservation de leur Âme quoique ils la sachent continuellement environnée d`Ennemis très dangereux. Que deviendra cette pauvre Âme, contre laquelle l`Ennemi emploi sans cesse tout ce qu`il a de force et d`adresse pour la détruire, sans que de notre côté nous ne voulions faire aucun effort pour la conservée? Comment pourrait-elle éviter le sort d`une ville assiégée qui n`ayant ni corps de garde, ni sentinelles, ne saurait manquer de tomber dans les mains de l`ennemi?
Considérez ceci, « vous qui oubliez Dieu et qui vous oubliez vous-mêmes, de peur que vous ne soyez arrachez, et qu`il n`y ait personne qui vous délivre.» ( Psaumes 50,22)
Mais j`ai dit aussi que les choses peuvent être en danger d`une seconde manière; c`est lorsque qu`il s`y rencontre quelque désordre, quelque mauvaise dispositions au-dedans. Telle est souvent la condition de nos corps; ils ne sont pas seulement exposés aux violences du dehors, Ils ont aussi leurs maladies et leurs indispositions intérieures; et alors nous sentons assez qu`ils sont en danger nous prenons les moyens pour le guérir. Mais c`est aussi malheureusement l`état de notre Âme. On dit que le corps est malade quand une de ses parties a une mauvaise fonction. Et on doit faire le même jugement sur notre Âme quand elle se trouve en mauvaise fonction dans ses facultés.
Les trois facultés principales de cette Âme sont l`Entendement, la Volonté et les Affections. Et il n`est pas besoin de beaucoup de preuves pour montrer qu`il n`y en a pas une qui n`y ait du désordre. Que l`on examine seulement un peu sérieusement son cœur. Que l`on considère combien on connait peu les choses spirituelles ; et que l`on dise après si l`Entendement n`est pas obscurci : combien on est enclin à vouloir plus le mal que le bien (tel que défini dans les Évangiles); et que l`on juge, si la Volonté n`est point dépravée : combien est ardente la passion que l`on a pour les plaisirs du péché, et au contraire, combien est tiède notre amour pour Dieu, combien sont languissantes nos inclinations pour la sainteté; et que l`on dise si nos Affections ne sont pas déréglées et si elle ne sont pas même rebelle a la voix de la raison qui ne cesse de nous crier que nous avons tort.
Or, comme dans les maladies de notre corps, le premier pas vers la guérison est de connaitre la cause du mal et il est nécessaire de savoir comment l`Âme est tombée premièrement en cette triste maladie. Dieu créa le premier homme sans péché et lui donna une parfaite connaissance de son devoir, avec des forces que le rendait capable de faire tout ce qui était requis de lui, pourvu qu`il voulut vraiment s`en servir. Après l`avoir créé, il traita une Alliance avec lui, qui disait en substance, que s`il continuait dans l`Obéissance aux Commandements de Dieu, sans se laisser aller à commettre aucun péché, Ces forces qu`avait son Âme ne lui seraient jamais ôtées; et que outre cela, il ne mourrait pas; mais il serait enlevé dans le Ciel pour y jouir de la béatitude éternelle : mais si au contraire il péchait en désobéissant à Dieu, que tant lui que ses descendants perdraient cette Connaissance et ces Forces complètes dont Dieu l`avait revêtu pour accomplir sa volonté; et de plus, il serait sujet a la mort, et non simplement a la mort, mais a la damnation éternelle dans les enfers.
Tel fut l`accord fait avec Adam et tout le genre humain en sa personne. C`est cet accord que nous appelons la Première Alliance; en conséquence de la quelle, Dieu lui fit un Commandement particulier, qui était seulement de s`abstenir de manger du fruit d`un certain arbre qui était dans le Jardin ou Dieu l`avait placé. Mais Adam, séduit par les raisonnements artificieux de l`Ange déchu, mange du fruit de l`arbre défendu et par cette transgression, attire la malédiction de Dieu sur lui et sur toute sa postérité.
Ainsi, par un seul péché, il perdit la parfaite Connaissance que il avait de son devoir et le pouvoir de l`accomplir. Et nous étant fait a son image depuis son péché, sommes aussi naturellement dans un état d`ignorance et de faiblesse qui nous rend également incapable de connaitre et d`accomplir ce que Dieu demanda de nous, ayant une grande répugnance pour le bien et une inclination naturelle qui nous porte a toute sorte de mal. Vous voyez maintenant d`où nous est venu cette maladie de l`Âme et que c`est une maladie qui doit naturellement aboutir à la mort.
Nous allons maintenant parler du quatrième motif de nos soins de l`Âme. Le quatrième motif est l`apparence que ces soins ne seront pas inutiles pour conserver ce qui nous est utile. Un médecin abandonne le malade quand il désespère de pouvoir le guérir mais tant qu’il y a espoir de guérison, il donne remède sur remède. Ainsi nous devons prendre soin de nos âmes pour la conservation et la guérison.
Car quoi que par le péché d`Adam tout le genre humain soit enveloppé dans l`arrêt d`une condamnation éternelle, néanmoins, la Miséricorde de Dieu a été si grande envers nous qu`il nous a donné son Fils et qu`il a bien voulu traité par Sa Médiation une Nouvelle Alliance avec nous, quoique nous avions violé la première. Cette seconde alliance se fit avec Adam et en sa personne avec Nous après sa chute. Elle est brièvement contenue en cet endroit de la Genèse ou Dieu déclare : « que la semence de la femme brisera la tête du serpent.» (Genèse 3,15) Elle comprend comme la précédente, d`un côté des grâces que Dieu doit nous communiquer; et de l`autre certains devoirs dont nous sommes obligés de nous acquitter pour y avoir droit.
Dans cette Alliance, Dieu promet d`envoyer son Fils unique, qui est Dieu égal à lui, pour être fait homme semblable à nous en toute chose excepté le péché; et pour entreprendre en notre faveur les choses que je vais dire. Premièrement de nous faire connaitre toutes les Volontés de son Père; en nous assurant que nos efforts pour l`accomplir lui seront agréables et que nous en recevront même une glorieuse récompense de sa main.
Comme s`était là une importante partie de sa mission et de son avènement, nous voyons que il s`en est acquitté avec tant de soin, dans les sermons et dans les préceptes que nous trouvons répandus en son Évangile. A cet Égard, il a été notre Prophète. Car la charge des anciens prophètes ne consistait pas seulement s prédire l`avenir, mais à instruire.
Et notre devoir est de l`écouter soigneusement, d`être toujours prêt et disposé à être instruit en la connaissance de la volonté de Dieu que ce bon rédempteur est venu révéler aux hommes.
La seconde chose qu`il devait faire pour nous était de satisfaire à la Justice de Dieu pour nos péchés : non seulement pour celui d`Adam, mais pour ceux de tous les hommes qui se repentent véritablement et qui réforment sérieusement leur vie; et de nous obtenir par ce moyen, le pardon de nos péchés et la faveur de Dieu; et par conséquent de nous affranchir de l`Enfer et de la damnation éternelle qui était la peine due à notre péché.
C`est aussi ce qu`il a fait par sa mort. Il s`est offert en sacrifice pour les péchés de tous ceux qui les pleurent amèrement et qui les abandonnent. Par là il s`est rendu notre souverain sacrificateur. Car s`était l`office du souverain-sacrificateur que d`offrir des sacrifices pour les péchés du peuple. Notre devoir ici, est de nous repentir sincèrement et véritablement de nos péchés et de nous en retirer; sans quoi la mort du Christ ne nous servira de rien et nous n`obtiendrons pas le pardon.
Et deuxièmement, d`être persuadé que si nous avons cette véritable repentance, nous aurons tous les fruits de son sacrifice; que tous nos péchés seront pardonnés; et que nous serons sauvé des peines éternelles auxquels ces péchés nous avaient assujettis. Une autre partie essentielle de la charge des Sacrificateurs était de bénir le peuple et de prier pour lui. Et c`est aussi ce que le Christ a fait pour nous. Il avait ordre expressément du père de nous bénir, selon ce que nous dit St-Pierre au chapitre 3 du livre des Actes des Apôtres. « Dieu a envoyé son Fils Jésus pour vous bénir en retirant chacun de vous de vos iniquités.»
Les moyens qu`il a employé pour nous retirer de nos iniquités doivent donc être regardés comme plus grand que toutes les bénédictions. Et pour ce qui est de son Intercession, il ne s`en est pas seulement acquitté sur la terre pendant le séjour qu`il y a fait, mais il a continué aussi dans le Ciel. Il est assis a la droite de Dieu, ou il fait requête pour nous, dit St-Paul ( Romains 8, 33).
Notre devoir ici, c`est de ne pas rejeter ces grandes et excellentes bénédictions, mais de vouloir les recevoir en nous détournant de nos péchés et de ne pas rendre ses prières et intercessions pour nous inutiles car elles ne sauraient être efficace à notre égard tant que nous demeurons dans le péché. La troisième chose que le Christ devait faire pour nous, c`est de nous rendre capable d`accomplir ce que Dieu nous commande, en nous donnant des forces suffisantes pour cela. Et c`est ce qu`il fait premièrement en relâchant de la rigueur de la loi donnée a Adam, qui condamnait le moindre péché à des peines éternelles; en exigeant seulement que nous fassions de bonne foi et sincèrement tout ce que nous pourrons; et en se contentant, quand nous y manquons, de notre repentance, pourvu qu`elle soit sincère.
Secondement, il le fait en envoyant son St-Esprit dans nos cœur pour nous conduire, pour nous gouverner et nous donner la force de surmonter les tentations, et de faire tout ce qu`il demande de nous sous l`Évangile. Et en ceci, il est notre Roi : car c`est là la charge des Rois, de conduire et de gouverner leurs sujets, et de vaincre et assujettir leurs ennemis.
Notre devoir a cet égard, c`est d`être des sujets obéissants, en nous laissant conduire à lui, et en nous soumettant a toutes ses lois, sans jamais prendre parti avec aucun rebelle, c`est-à-dire, en ne vivant jamais dans l`habitude d`aucun péché favori; en invoquant ardemment le secours de Sa Grace pour les surmonter tous. Enfin, il a acquis à tous ceux qui lui obéiront fidèlement, un héritage éternel de gloire, qui est le Royaume des Cieux, dont il est allé prendre possession pour nous et où il nous introduira chacun dans son temps. Notre devoir ici, est d`être très soigneux afin de ne pas perdre la part que nous avons à ce très glorieux héritage, ce qui arriverait si nous persévérions dans nos péché et l`impénitence.
Et secondement de ne pas trop nous attacher aux choses de ce monde et de porter plus haut nos pensées, suivant le précepte de l`Apôtre St-Paul : « Pensez aux choses qui sont en-haut, et non pas aux choses qui sont sur la Terre.» (Colossiens 3,2); aspirant sans-cesse a la possession de ce bienheureux héritage qui nous est préparé, en comparaison duquel toutes les choses d`ici-bas nous doivent paraître viles et méprisables.
Voilà le précis de la Seconde Alliance sous laquelle nous vivons maintenant. Ou en voyant ce que le Christ a fait pour nous, et comment il s`est acquitté de ces trois grandes charges de Roi, de Sacrificateur et de Prophète; vous voyez aussi ce qu`il nous demande, que nous devons fidèlement accomplir : sans quoi tout ce que ce bon Sauveur a fait en notre faveur ne nous sera d`aucune utilité.
Car il ne sera jamais le Sacrificateur, de ceux qui ne le regarderont pas comme Prophète et comme Roi; comme Prophète pour recevoir Ses instructions : et comme Roi pour se soumettre à Ses Lois et Son Gouvernement.
Tout cela ne nous servira de rien, si nous sommes assez malheureux pour négliger de faire de notre côté ce que cette Alliance demande de nous; notre condition sera infiniment plus triste qu`elle ne l`eut été sans cette Alliance; car nous aurons non seulement à répondre comme sous la Première d`avoir violé la Loi, mais d`avoir abusé de la Miséricorde de Dieu, qui de tous les péchés est le plus outrageant.
Au lieu que si nous accomplissons fidèlement les conditions en nous appliquant sincèrement et de bon cœur à obéir aux préceptes du Christ, en ne demeurant volontairement dans aucun péché et en déplorant et abandonnant ceux dans lesquels nous avons eu le malheur de vivre, il est très certain que nous aurons part a toutes les Grâces du Christ.
Voyez comment vous avez peu de raison d`abandonner les soins de votre âme. Si elles n`avaient pas été rachetées par le Christ, elles seraient dans une condition tout à fait désespérée. Et après tous ce que Dieu a fait pour la salut de nos âmes, nous ne voulons pas en prendre le moindre soin ne sommes-nous pas responsable du malheur éternel qui risque de nous frapper.
Si un homme est très malade et en danger de mort et que un médecin vient pour guérir. Le médecin prescrit des soins et médicaments et une règle à suivre pour guérir le mal. Mais si le malade refuse de suivre la règle et de prendre le médicament n`est-il pas responsable de son état? Ainsi, il faut qu`un homme soit ennuyer de son âme pour qu`il veuille la laisser périr, lorsqu`il en abandonne le soin et refuse d`accepter des conditions aussi aisées que celles qui lui sont proposées pour la sauver.
Vous voyez l`immense Charité que Dieu a pour nos Âmes. Toutes les personnes de la Glorieuse Trinité, le Père, le Fils et le St-Esprit ont fait pour elle tout ce qui peut se faire. Le Père a donné son Fils unique : le Fils s`est donné, il s`est dépouillé de sa Gloire pour venir sur Terre, il a enduré la cruelle et ignominieuse Passion et mort sur la Croix, uniquement dans le but d`empêcher les Âmes de périr. Le St-Esprit se tient continuellement a côté de nous, prêt à nous communiquer sa Grace.
Et Dieu désire tellement que nous acceptions ses offres que quand nous refusons l`Écriture nous dit «qu`il en est contristé» (Éphésiens 4, 30) Quel affront pour Dieu de mépriser ce qu`il considère comme le plus important et de ne pas juger dignes de nos soins les Âme pour lesquelles Jésus-Christ a répandu son précieux sang. Puisque Dieu est le Créateur de nos Âmes, il en connait la valeur et puisqu`il les a mise a si haut prix, ayons honte de négliger le soin de nos Âmes.
J`ai donc fait un bref parcours des quatre motifs qui nous portent à prendre soin des choses et qui doivent nous porter à prendre soin de nos Âmes. Je vais conclure par ces paroles du Prophètes Isaïe : « Remettez-vous bien ces choses dans l`esprit; reprenez courage; et revenez a votre sens.» (Isaïe XLVI,8) Car c`est de l`Âme que vous vient cette raison par laquelle vous vous conduisez dans toutes vos affaires. Vous savez que votre pauvre âme sera précipitée dans un abîme de misère a jamais si vous en négligée toujours le soin. Votre dernier recours est la miséricorde de Dieu, mais si vous en avez abusé, que restera-t-il?
Pensez-y donc sérieusement!
Fin de l`extrait de Pratique des vertus Chrétiennes.
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Par Richard Allestree (1621 - 1681) Il était un homme d`église royaliste anglais et provost au Collège de Eton a partir de 1665.
Année 1722 – Angleterre – traduit de l`Anglais - Livre nécessaire aux familles
Ce livre a été très populaire à son époque en Grande-Bretagne et en France.
Introduction
Le but unique de ce livre est de donner aux Chrétiens qui ont de faible connaissance de la foi des directions courtes et faciles pour se conduire en cette vie de façon à pouvoir obtenir le bonheur éternel dans la vie à venir. Mais parce que il est inutile de parler aux hommes de leurs Devoirs, jusqu`à ce que on leur a fait comprendre la Nécessité qu`il y a de les accomplir, je tacherai de les porter à un Devoir Général qui les disposera tout le reste; je veux dire au devoir de penser sérieusement au Salut de leur Âme, sans quoi il est impossible qu`ils se croient intéressés à s`acquitter des autres.
L`Homme, comme tout le monde le sait, est composé de deux parties, le Corps et l`Âme. Le Corps n`est que l`étui de l`Âme; ce n`est qu`une masse de chair organisée, sujette à plusieurs Maux pendant tout le cours de la vie et enfin à la mort même ou il devra être abandonné à la corruption du tombeau. Cependant nous prenons un soin extrême de notre chair qui est cependant la partie la moins importante de notre Être. Tous nos travaux et toutes nos peines ne sont que pour cette partie de nous-même. L`Âme en est la partie la plus précieuse et de beaucoup mais on ne s`embarrasse guères de son état; on n`y pense point; on la néglige absolument, comme si s`était une chose sans intérêts. Ce peu de soins que nous prenons de nos âmes est justement la source de tous nos péchés.
Ainsi, celui qui se propose de mener une vie Chrétienne, doit avant toute chose se guérir d`une si dangereuse négligence. Tout homme est capable de suivre les règles simples qui seront expliquées. Parmi les choses que nous considérons comme importantes et sur lesquelles nous exerçons une grande vigilance il y a quatre choses. La première est la Valeur de la chose : la seconde est l`utilité de cette chose pour nous comme le fait de ne pouvoir s`en passer sans souffrir des incommodités: la troisième est le Danger ou nous la voyons exposée : la quatrième est l`Apparence qu`il y a que les soins que nous prendrons pour les conserver ne seront pas inutiles.
Pour la première, chacun sait que nos soins pour les choses du monde sont toujours proportionnée à l`idée que nous avons de leur mérite ou de leur valeur. Quand elles nous paraissent de grand prix, nous n`épargnons aucun soin pour les garantir de toutes sortes d`accidents et nous sommes toujours dans la crainte de les perdre.
On serre avec soin son argent et les autres choses que l`on estime précieuses et on les mets dans un coffre-fort mais pas les bagatelles que l`on estime de peu de valeur.
Or qu`y a-t-il au Monde qui mérite plus de soin que l`Âme puisque elle vaut infiniment plus que tout le reste? Car premièrement elle est faite à l`image de Dieu; c`est Dieu qui a « soufflé en l`homme cette respiration de vie.» ( Genèse 2, 7) Et Dieu étant le plus grand, le plus excellent, et le plus parfait de tous les êtres, il est indubitable que plus les choses lui ressemblent et plus elles sont estimables. Or, il est certain que de toutes les créatures que nous voyons sur la Terre, il n`y a que l`âme de l`homme qui porte l`Image de la divinité. C`est donc l`âme de l`homme qui mérite ses plus grands soins. Secondement, l`Âme ne meurt jamais : et nous sommes accoutumés à mesurer les choses à proportion de leur durée, et de regarder celles qui durent comme plus estimable. Or, l`Âme dure éternellement.
Les richesses, la beauté, la force et nos corps eux-mêmes passent et s`évanouissent. Mais l`Âme survit aux débris de toutes ces choses qui l`environnent. Ainsi à cet égard, l`Âme est de plus grand prix que toutes autres choses. Quelle étrange folie de la négliger comme nous faisons! Nous employons les jours, les semaines, les mois, les années, et même la vie entière à la poursuite des biens matériels, qui nous abandonne souvent et que nous devons abandonner à la mort; Et nous souffrons que notre Âme, cet éternel trésor nous soit enlevée par le démon! (l`ange déchu)
L`utilité des choses pendant que nous les possédons, ou le grand préjudice que leur perte nous causerait est un second motif qui nous porte à en prendre soin. C`est ce que le sens commun nous enseigne sur les choses de cette vie. Si les cheveux nous tombe, nous n`en sommes pas beaucoup touché parce que nous pouvons nous en passer. Mais si nous sommes en danger de perdre la vue, ou quelque membre alors nous ne croyons jamais prendre trop de soins pour éviter une telle perte parce que nous comprenons quel malheur cela sera.
Pourtant il n`y a pas de malheur pire que la perte de notre Âme. Il est vrai que elle est éternelle et ne cessera pas d`être. Mais d`une autre manière nous pouvons la perdre en perdant l`état de bonheur pour laquelle l`âme a été créée, et la voir plonger dans une affreuse misère. En un mot, nous pouvons la perdre dans les Enfers, d`où il n`y a point de retour; et la perdre à jamais.
Et cette considération intéresse aussi le corps, objet de notre tendresse et de tous nos soins puisque il doit un jour ressusciter et être réuni à l`Âme pour partager avec elle son bonheur ou son malheur. Si nos soins pour le corps prennent tout notre temps et ne nous laissent rien pour l`Âme, il est bien évident que faute des soins que le corps lui dérobe, l`Âme risque d`être éternellement misérable.
Si vous avez donc une véritable tendresse pour votre corps, vous devez aussi prendre soin de votre Âme. Pensez en vous-même comment vous pourrez endurer les ardeurs éternelles. Si la moindre petite étincelle sur le corps est insupportable que sera-ce pour le corps entier dans un feu éternel? Pensez-y bien et pensez que cela sera le prix pour avoir négligé votre Âme. Donnez-lui donc quelques soins à cette Âme précieuse; même si cela est simplement par compassion pour le corps qui doit avoir part à la misère.
Le troisième motif du soin que l`on prend des choses; c`est le danger ou on les voit exposées de la part des ennemis du dehors, ou par une mauvaise disposition intérieure. Je dis premièrement de la part des ennemis du dehors, comme la brebis qui est continuellement en danger d`être dévorée par le loup. Voyez comment ce danger augmente le soin et la vigilance du berger. Or, c`est la précisément l`état de l`Âme ; car elle est sans cesse exposée a de grands dangers de la part de ses ennemis, le Monde, la Chair et Satan; des ennemis si bien déclarés et connus que le premier acte que nous faisons en faveur de notre Âme est de leur déclarer une guerre éternelle.
Car c`est ce que chacun fait à son Baptême : et quiconque après cela fait la moindre trêve avec eux, ne trahit pas seulement son Âme, mais viole son vœux solennel ; et devint parjure; considération qui mérite bien que l`on y fasse une attention sérieuse. Mais afin de mieux comprendre en quel danger l`Âme se trouve considérons a quelle espèce d`Ennemis elle a affaire. Dans la guerre, il y a diverses choses qui rendent un Ennemi redoutable. La première est la ruse, qui a souvent fait remporter des victoires; et à cet égard, Satan est un dangereux adversaire. Il y a longtemps que il a donné des preuves de sa finesse en séduisant nos premiers Parents, quoique ils fussent beaucoup plus habiles que nous; de sorte que il n`y a pas de lieu de s`étonner s`il nous surprend et s`il nous trompe.
Secondement, la vigilance et l`activité doivent faire craindre un Ennemi ; et c`est en quoi Satan et ses anges déchus surpassent toutes les autres créatures. Il fait son métier et sa grande affaire de travailler à notre ruine, et il n`oublie rien pour en venir à bout. «Il tourne tout alentour de nous cherchant qui il pourra dévorer.»(1 Pierre 5,8)
Il épie avec une telle application toutes les occasions qui lui donne quelque avantage sur nous, qu`il n`en laisse jamais échapper aucune. Un Ennemi à nos portes est bien plus à craindre que éloigné; car alors que il est encore loin, on a du temps pour s`armer et pour se préparer à le recevoir; au lieu que s`il est près de nous, il a mille occasions de nous surprendre, lorsque nous y pensons le moins et que nous sommes le plus au dépourvu.
La Chair (les passions du corps humain) est un Ennemi de cette espèce : nous l`avons toujours à nos côtés, nous la portons toujours dans notre sein; et elle est toujours à portée de profiter des occasions de nous nuire. Plus un Ennemi est traître et perfide et plus il est à craindre. Celui qui cache ses mauvaises intentions sous le visage de l`amitié est le plus dangereux et peux nous faire beaucoup plus de mal. Et c`est ce que fait la Chair qui ; comme de Joab a Abner, ( 2 Samuel 3, 27) en faisant semblant de nous parler de paix, nous porte des coups mortels. Elle est très empressée à nous fournir des divertissements et des plaisirs; elle s`insinue par la dans nos cœurs; elle nous fait accroire que elle a pour nous de la tendresse; mais elle cache un hameçon, sous cet appât et si l`on y mord; on est perdu.
Le plus grand nombre des Ennemis qu`on a, les rends plus terribles. Le Monde est une armée innombrable que nous avons contre nous; il n`y a point d`état, point de condition, presque point de créature qui ne combattent quelquefois contre l`Âme.
Les Honneurs du Monde tâchent de nous blesser par l`orgueil, les Richesses par l`avarice : la prospérité nous tente et nous fait oublier Dieu. L`Adversité nous fait murmurer contre lui; notre propre table devient un piège contre nous; les mets et les liqueurs qu`on y présente nous portant à l`intempérance. Nos compagnons et même nos amis les plus intimes, prennent quelquefois parti contre nous en cette guerre; quand par leurs persuasions ou leurs mauvais exemples, ils nous engagent à offenser Dieu.
Pensez bien à toutes ces choses, et dites-moi après cela, si l`Âme, entourée et assiégée de si nombreux dangers et d`ennemis, peut dormir avec quelques sûreté. Dalila même criait a Samson qu`il était temps de se réveiller alors que les Philistins étaient sur lui. Et Notre Seigneur nous dit : « que si le maître de la maison eut su à quelle heure de la nuit venait le voleur, il eut veillé, et n`aurait pas souffert que sa maison eut été percée. »( Matthieu 24, 43).
Or nous vivons parmi des brigands, alors ne devons-nous pas nous tenir constamment sur nos gardes? Et cependant, qui parmi nous prend plus de soin de son Âme, la chose la plus précieuse qu`il possède, que de sa maison ou des autres choses qui lui appartiennent? Je crains bien que notre Âme puisse nous faire le même reproche que Christ faisait a ses disciples : «Est-il possible que vous n`aillez pu veiller une heure avec moi?» (Matthieu 26,40)
Car plusieurs seraient en peine de dire quand ils ont donné une heure de leurs veilles a la conservation de leur Âme quoique ils la sachent continuellement environnée d`Ennemis très dangereux. Que deviendra cette pauvre Âme, contre laquelle l`Ennemi emploi sans cesse tout ce qu`il a de force et d`adresse pour la détruire, sans que de notre côté nous ne voulions faire aucun effort pour la conservée? Comment pourrait-elle éviter le sort d`une ville assiégée qui n`ayant ni corps de garde, ni sentinelles, ne saurait manquer de tomber dans les mains de l`ennemi?
Considérez ceci, « vous qui oubliez Dieu et qui vous oubliez vous-mêmes, de peur que vous ne soyez arrachez, et qu`il n`y ait personne qui vous délivre.» ( Psaumes 50,22)
Mais j`ai dit aussi que les choses peuvent être en danger d`une seconde manière; c`est lorsque qu`il s`y rencontre quelque désordre, quelque mauvaise dispositions au-dedans. Telle est souvent la condition de nos corps; ils ne sont pas seulement exposés aux violences du dehors, Ils ont aussi leurs maladies et leurs indispositions intérieures; et alors nous sentons assez qu`ils sont en danger nous prenons les moyens pour le guérir. Mais c`est aussi malheureusement l`état de notre Âme. On dit que le corps est malade quand une de ses parties a une mauvaise fonction. Et on doit faire le même jugement sur notre Âme quand elle se trouve en mauvaise fonction dans ses facultés.
Les trois facultés principales de cette Âme sont l`Entendement, la Volonté et les Affections. Et il n`est pas besoin de beaucoup de preuves pour montrer qu`il n`y en a pas une qui n`y ait du désordre. Que l`on examine seulement un peu sérieusement son cœur. Que l`on considère combien on connait peu les choses spirituelles ; et que l`on dise après si l`Entendement n`est pas obscurci : combien on est enclin à vouloir plus le mal que le bien (tel que défini dans les Évangiles); et que l`on juge, si la Volonté n`est point dépravée : combien est ardente la passion que l`on a pour les plaisirs du péché, et au contraire, combien est tiède notre amour pour Dieu, combien sont languissantes nos inclinations pour la sainteté; et que l`on dise si nos Affections ne sont pas déréglées et si elle ne sont pas même rebelle a la voix de la raison qui ne cesse de nous crier que nous avons tort.
Or, comme dans les maladies de notre corps, le premier pas vers la guérison est de connaitre la cause du mal et il est nécessaire de savoir comment l`Âme est tombée premièrement en cette triste maladie. Dieu créa le premier homme sans péché et lui donna une parfaite connaissance de son devoir, avec des forces que le rendait capable de faire tout ce qui était requis de lui, pourvu qu`il voulut vraiment s`en servir. Après l`avoir créé, il traita une Alliance avec lui, qui disait en substance, que s`il continuait dans l`Obéissance aux Commandements de Dieu, sans se laisser aller à commettre aucun péché, Ces forces qu`avait son Âme ne lui seraient jamais ôtées; et que outre cela, il ne mourrait pas; mais il serait enlevé dans le Ciel pour y jouir de la béatitude éternelle : mais si au contraire il péchait en désobéissant à Dieu, que tant lui que ses descendants perdraient cette Connaissance et ces Forces complètes dont Dieu l`avait revêtu pour accomplir sa volonté; et de plus, il serait sujet a la mort, et non simplement a la mort, mais a la damnation éternelle dans les enfers.
Tel fut l`accord fait avec Adam et tout le genre humain en sa personne. C`est cet accord que nous appelons la Première Alliance; en conséquence de la quelle, Dieu lui fit un Commandement particulier, qui était seulement de s`abstenir de manger du fruit d`un certain arbre qui était dans le Jardin ou Dieu l`avait placé. Mais Adam, séduit par les raisonnements artificieux de l`Ange déchu, mange du fruit de l`arbre défendu et par cette transgression, attire la malédiction de Dieu sur lui et sur toute sa postérité.
Ainsi, par un seul péché, il perdit la parfaite Connaissance que il avait de son devoir et le pouvoir de l`accomplir. Et nous étant fait a son image depuis son péché, sommes aussi naturellement dans un état d`ignorance et de faiblesse qui nous rend également incapable de connaitre et d`accomplir ce que Dieu demanda de nous, ayant une grande répugnance pour le bien et une inclination naturelle qui nous porte a toute sorte de mal. Vous voyez maintenant d`où nous est venu cette maladie de l`Âme et que c`est une maladie qui doit naturellement aboutir à la mort.
Nous allons maintenant parler du quatrième motif de nos soins de l`Âme. Le quatrième motif est l`apparence que ces soins ne seront pas inutiles pour conserver ce qui nous est utile. Un médecin abandonne le malade quand il désespère de pouvoir le guérir mais tant qu’il y a espoir de guérison, il donne remède sur remède. Ainsi nous devons prendre soin de nos âmes pour la conservation et la guérison.
Car quoi que par le péché d`Adam tout le genre humain soit enveloppé dans l`arrêt d`une condamnation éternelle, néanmoins, la Miséricorde de Dieu a été si grande envers nous qu`il nous a donné son Fils et qu`il a bien voulu traité par Sa Médiation une Nouvelle Alliance avec nous, quoique nous avions violé la première. Cette seconde alliance se fit avec Adam et en sa personne avec Nous après sa chute. Elle est brièvement contenue en cet endroit de la Genèse ou Dieu déclare : « que la semence de la femme brisera la tête du serpent.» (Genèse 3,15) Elle comprend comme la précédente, d`un côté des grâces que Dieu doit nous communiquer; et de l`autre certains devoirs dont nous sommes obligés de nous acquitter pour y avoir droit.
Dans cette Alliance, Dieu promet d`envoyer son Fils unique, qui est Dieu égal à lui, pour être fait homme semblable à nous en toute chose excepté le péché; et pour entreprendre en notre faveur les choses que je vais dire. Premièrement de nous faire connaitre toutes les Volontés de son Père; en nous assurant que nos efforts pour l`accomplir lui seront agréables et que nous en recevront même une glorieuse récompense de sa main.
Comme s`était là une importante partie de sa mission et de son avènement, nous voyons que il s`en est acquitté avec tant de soin, dans les sermons et dans les préceptes que nous trouvons répandus en son Évangile. A cet Égard, il a été notre Prophète. Car la charge des anciens prophètes ne consistait pas seulement s prédire l`avenir, mais à instruire.
Et notre devoir est de l`écouter soigneusement, d`être toujours prêt et disposé à être instruit en la connaissance de la volonté de Dieu que ce bon rédempteur est venu révéler aux hommes.
La seconde chose qu`il devait faire pour nous était de satisfaire à la Justice de Dieu pour nos péchés : non seulement pour celui d`Adam, mais pour ceux de tous les hommes qui se repentent véritablement et qui réforment sérieusement leur vie; et de nous obtenir par ce moyen, le pardon de nos péchés et la faveur de Dieu; et par conséquent de nous affranchir de l`Enfer et de la damnation éternelle qui était la peine due à notre péché.
C`est aussi ce qu`il a fait par sa mort. Il s`est offert en sacrifice pour les péchés de tous ceux qui les pleurent amèrement et qui les abandonnent. Par là il s`est rendu notre souverain sacrificateur. Car s`était l`office du souverain-sacrificateur que d`offrir des sacrifices pour les péchés du peuple. Notre devoir ici, est de nous repentir sincèrement et véritablement de nos péchés et de nous en retirer; sans quoi la mort du Christ ne nous servira de rien et nous n`obtiendrons pas le pardon.
Et deuxièmement, d`être persuadé que si nous avons cette véritable repentance, nous aurons tous les fruits de son sacrifice; que tous nos péchés seront pardonnés; et que nous serons sauvé des peines éternelles auxquels ces péchés nous avaient assujettis. Une autre partie essentielle de la charge des Sacrificateurs était de bénir le peuple et de prier pour lui. Et c`est aussi ce que le Christ a fait pour nous. Il avait ordre expressément du père de nous bénir, selon ce que nous dit St-Pierre au chapitre 3 du livre des Actes des Apôtres. « Dieu a envoyé son Fils Jésus pour vous bénir en retirant chacun de vous de vos iniquités.»
Les moyens qu`il a employé pour nous retirer de nos iniquités doivent donc être regardés comme plus grand que toutes les bénédictions. Et pour ce qui est de son Intercession, il ne s`en est pas seulement acquitté sur la terre pendant le séjour qu`il y a fait, mais il a continué aussi dans le Ciel. Il est assis a la droite de Dieu, ou il fait requête pour nous, dit St-Paul ( Romains 8, 33).
Notre devoir ici, c`est de ne pas rejeter ces grandes et excellentes bénédictions, mais de vouloir les recevoir en nous détournant de nos péchés et de ne pas rendre ses prières et intercessions pour nous inutiles car elles ne sauraient être efficace à notre égard tant que nous demeurons dans le péché. La troisième chose que le Christ devait faire pour nous, c`est de nous rendre capable d`accomplir ce que Dieu nous commande, en nous donnant des forces suffisantes pour cela. Et c`est ce qu`il fait premièrement en relâchant de la rigueur de la loi donnée a Adam, qui condamnait le moindre péché à des peines éternelles; en exigeant seulement que nous fassions de bonne foi et sincèrement tout ce que nous pourrons; et en se contentant, quand nous y manquons, de notre repentance, pourvu qu`elle soit sincère.
Secondement, il le fait en envoyant son St-Esprit dans nos cœur pour nous conduire, pour nous gouverner et nous donner la force de surmonter les tentations, et de faire tout ce qu`il demande de nous sous l`Évangile. Et en ceci, il est notre Roi : car c`est là la charge des Rois, de conduire et de gouverner leurs sujets, et de vaincre et assujettir leurs ennemis.
Notre devoir a cet égard, c`est d`être des sujets obéissants, en nous laissant conduire à lui, et en nous soumettant a toutes ses lois, sans jamais prendre parti avec aucun rebelle, c`est-à-dire, en ne vivant jamais dans l`habitude d`aucun péché favori; en invoquant ardemment le secours de Sa Grace pour les surmonter tous. Enfin, il a acquis à tous ceux qui lui obéiront fidèlement, un héritage éternel de gloire, qui est le Royaume des Cieux, dont il est allé prendre possession pour nous et où il nous introduira chacun dans son temps. Notre devoir ici, est d`être très soigneux afin de ne pas perdre la part que nous avons à ce très glorieux héritage, ce qui arriverait si nous persévérions dans nos péché et l`impénitence.
Et secondement de ne pas trop nous attacher aux choses de ce monde et de porter plus haut nos pensées, suivant le précepte de l`Apôtre St-Paul : « Pensez aux choses qui sont en-haut, et non pas aux choses qui sont sur la Terre.» (Colossiens 3,2); aspirant sans-cesse a la possession de ce bienheureux héritage qui nous est préparé, en comparaison duquel toutes les choses d`ici-bas nous doivent paraître viles et méprisables.
Voilà le précis de la Seconde Alliance sous laquelle nous vivons maintenant. Ou en voyant ce que le Christ a fait pour nous, et comment il s`est acquitté de ces trois grandes charges de Roi, de Sacrificateur et de Prophète; vous voyez aussi ce qu`il nous demande, que nous devons fidèlement accomplir : sans quoi tout ce que ce bon Sauveur a fait en notre faveur ne nous sera d`aucune utilité.
Car il ne sera jamais le Sacrificateur, de ceux qui ne le regarderont pas comme Prophète et comme Roi; comme Prophète pour recevoir Ses instructions : et comme Roi pour se soumettre à Ses Lois et Son Gouvernement.
Tout cela ne nous servira de rien, si nous sommes assez malheureux pour négliger de faire de notre côté ce que cette Alliance demande de nous; notre condition sera infiniment plus triste qu`elle ne l`eut été sans cette Alliance; car nous aurons non seulement à répondre comme sous la Première d`avoir violé la Loi, mais d`avoir abusé de la Miséricorde de Dieu, qui de tous les péchés est le plus outrageant.
Au lieu que si nous accomplissons fidèlement les conditions en nous appliquant sincèrement et de bon cœur à obéir aux préceptes du Christ, en ne demeurant volontairement dans aucun péché et en déplorant et abandonnant ceux dans lesquels nous avons eu le malheur de vivre, il est très certain que nous aurons part a toutes les Grâces du Christ.
Voyez comment vous avez peu de raison d`abandonner les soins de votre âme. Si elles n`avaient pas été rachetées par le Christ, elles seraient dans une condition tout à fait désespérée. Et après tous ce que Dieu a fait pour la salut de nos âmes, nous ne voulons pas en prendre le moindre soin ne sommes-nous pas responsable du malheur éternel qui risque de nous frapper.
Si un homme est très malade et en danger de mort et que un médecin vient pour guérir. Le médecin prescrit des soins et médicaments et une règle à suivre pour guérir le mal. Mais si le malade refuse de suivre la règle et de prendre le médicament n`est-il pas responsable de son état? Ainsi, il faut qu`un homme soit ennuyer de son âme pour qu`il veuille la laisser périr, lorsqu`il en abandonne le soin et refuse d`accepter des conditions aussi aisées que celles qui lui sont proposées pour la sauver.
Vous voyez l`immense Charité que Dieu a pour nos Âmes. Toutes les personnes de la Glorieuse Trinité, le Père, le Fils et le St-Esprit ont fait pour elle tout ce qui peut se faire. Le Père a donné son Fils unique : le Fils s`est donné, il s`est dépouillé de sa Gloire pour venir sur Terre, il a enduré la cruelle et ignominieuse Passion et mort sur la Croix, uniquement dans le but d`empêcher les Âmes de périr. Le St-Esprit se tient continuellement a côté de nous, prêt à nous communiquer sa Grace.
Et Dieu désire tellement que nous acceptions ses offres que quand nous refusons l`Écriture nous dit «qu`il en est contristé» (Éphésiens 4, 30) Quel affront pour Dieu de mépriser ce qu`il considère comme le plus important et de ne pas juger dignes de nos soins les Âme pour lesquelles Jésus-Christ a répandu son précieux sang. Puisque Dieu est le Créateur de nos Âmes, il en connait la valeur et puisqu`il les a mise a si haut prix, ayons honte de négliger le soin de nos Âmes.
J`ai donc fait un bref parcours des quatre motifs qui nous portent à prendre soin des choses et qui doivent nous porter à prendre soin de nos Âmes. Je vais conclure par ces paroles du Prophètes Isaïe : « Remettez-vous bien ces choses dans l`esprit; reprenez courage; et revenez a votre sens.» (Isaïe XLVI,8) Car c`est de l`Âme que vous vient cette raison par laquelle vous vous conduisez dans toutes vos affaires. Vous savez que votre pauvre âme sera précipitée dans un abîme de misère a jamais si vous en négligée toujours le soin. Votre dernier recours est la miséricorde de Dieu, mais si vous en avez abusé, que restera-t-il?
Pensez-y donc sérieusement!
Fin de l`extrait de Pratique des vertus Chrétiennes.
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ou cherchez ce titre - La pratique des vertus chrétiennes ou tous les devoirs des hommes - traduit de l`anglois
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
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