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Document du concile Vatican II

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Message par Francesco Mer 23 Fév 2011 - 3:03

Rappel du premier message :

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Message par Francesco Mer 6 Avr 2011 - 2:52

A. Normes générales

22. Le gouvernement de la liturgie

Le droit de régler l’organisation de la liturgie dépend uniquement de l’autorité de l’Église ; il appartient au Siège apostolique et, selon les règles du droit, à l’évêque.

En vertu du pouvoir donné par le droit, l’organisation de la liturgie, appartient aussi, dans les limites fixées, aux diverses assemblées d’évêques légitimement constituées, compétentes sur un territoire donné.

C’est pourquoi absolument personne d’autre, même prêtre, ne peut, de son propre chef, ajouter, enlever ou changer quoi que ce soit dans la liturgie.

Intéressant non?


36. La langue liturgique

1. L’usage de la langue latine, sauf droit particulier, sera conservé dans les rites latins

2. Toutefois, soit dans la messe, soit dans l’administration des sacrements, soit dans les autres parties de la liturgie, l’emploi de la langue du pays peut être souvent très utile pour le peuple ; on pourra donc lui accorder une plus large place, surtout dans les lectures et les monitions, dans un certain nombre de prières et de chants, conformément aux normes qui sont établies sur cette matière dans les chapitres suivants, pour chaque cas.

3. Ces normes étant observées, il revient à l’autorité ecclésiastique qui a compétence sur le territoire, mentionnée à l’article 22 (même, le cas échéant, après avoir délibéré avec les évêques des régions limitrophes de même langue), de statuer si on emploie la langue du pays et de quelle façon, en faisant agréer, c’est-à-dire ratifier, ses actes par le Siège apostolique.

4. La traduction du texte latin dans la langue du pays, à employer dans la liturgie, doit être approuvée par l’autorité ecclésiastique ayant compétence sur le territoire, dont il est question ci-dessus.

Ca donne parfois l'impression que c'est la langue du pays qui est devenue la langue litturgique non?


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Message par Francesco Jeu 7 Avr 2011 - 23:36

IV. Développement de la vie liturgique dans le diocèse et la paroisse

41. La vie liturgique du diocèse

L’évêque doit être considéré comme le grand prêtre de son troupeau ; la vie chrétienne de ses fidèles découle et dépend de lui en quelque manière.

C’est pourquoi tous doivent accorder la plus grande estime à la vie liturgique du diocèse autour de l’évêque, surtout dans l’église cathédrale ; ils doivent être persuadés que la principale manifestation de l’Église réside dans la participation plénière et active de tout le saint Peuple de Dieu, aux mêmes célébrations liturgiques, surtout à la même Eucharistie, dans une seule prière, auprès de l’autel unique où préside l’évêque entouré de son presbyterium et de ses ministres [35].

42. La vie liturgique de la paroisse

Comme l’évêque dans son Église ne peut présider en personne à tout son troupeau, ni toujours ni partout, il doit nécessairement constituer des assemblées de fidèles, parmi lesquelles les plus importantes sont les paroisses, organisées localement sous un pasteur qui tient la place de l’évêque ; car, d’une certaine manière, elles représentent l’Église visible établie dans l’univers.

C’est pourquoi il faut favoriser dans l’esprit et dans la pratique des fidèles et du clergé, la vie liturgique de la paroisse et sa relation à l’évêque ; et il faut travailler à ce que le sens de la communauté paroissiale s’épanouisse, surtout dans la célébration communautaire de la messe dominicale.



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Message par admin2 Dim 10 Avr 2011 - 2:41

V. Développement de la pastorale liturgique

43. Le renouveau liturgique, grâce de l’Esprit Saint

Le zèle pour le développement et la restauration de la sainte liturgie est tenu à juste titre pour un signe des dispositions providentielles de Dieu sur le temps présent, comme un passage du Saint-Esprit dans son Église ; et il confère à la vie de celle-ci, et même à toutes les formes de sensibilité et d’action religieuse d’aujourd’hui, une empreinte caractéristique.

C’est pourquoi, pour favoriser davantage encore cette pastorale liturgique, le saint Concile décrète :

44. Commission liturgique nationale

Il est à propos que l’autorité ecclésiastique ayant compétence sur le territoire, mentionnée à l’article 22 §2, institue une commission liturgique qui aura le concours d’experts en science liturgique, en musique sacrée, en art sacré et en pastorale. Cette commission, dans la mesure du possible, sera aidée par un Institut de pastorale liturgique composé de membres parmi lesquels on admettra, si c’est utile, des laïcs compétents en cette matière. Il reviendra à cette commission, sous la direction de l’autorité ecclésiastique territoriale mentionnée plus haut, de diriger la pastorale liturgique dans l’étendue de son ressort, de promouvoir les recherches et les expériences nécessaires chaque fois qu’il s’agira de proposer des adaptations au Siège apostolique.

45. Commission liturgique diocésaine

Dans la même ligne, il y aura une commission de liturgie dans chaque diocèse pour promouvoir l’action liturgique sous la direction de l’évêque.

Il pourra parfois être opportun que plusieurs diocèses établissent une seule commission qui fasse progresser la cause liturgique par un travail en commun.

46. Autres commissions

Outre la commission de liturgie, on établira aussi dans chaque diocèse, autant que possible, des commissions de musique sacrée et d’art sacré.

Il est nécessaire que ces trois commissions travaillent en associant leurs forces ; il sera même indiqué assez souvent de les regrouper en une seule commission.


CHAPITRE II :

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Message par Francesco Mer 13 Avr 2011 - 2:01

CHAPITRE II :
Le mystère de l'Eucharistie

47. La messe et le mystère pascal

Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu’à ce qu’il vienne, et pour confier ainsi à l’Église, son Épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection : sacrement de l’amour, signe de l’unité, lien de la charité [36], banquet pascal dans lequel le Christ est mangé, l’âme est comblée de grâce, et le gage de la gloire future nous est donné [37].

48. Participation active des fidèles

Aussi l’Église se soucie-t-elle d’obtenir que les fidèles n’assistent pas à ce mystère de la foi comme des spectateurs étrangers et muets, mais que, le comprenant bien dans ses rites et ses prières, ils participent de façon consciente, pieuse et active à l’action sacrée, soient formés par la Parole de Dieu, se restaurent à la table du Corps du Seigneur, rendent grâces à Dieu ; qu’offrant la victime sans tache, non seulement par les mains du prêtre, mais aussi en union avec lui, ils apprennent à s’offrir eux-mêmes et, de jour en jour, soient consommés, par la médiation du Christ [38], dans l’unité avec Dieu et entre eux pour que, finalement, Dieu soit tout en tous.

49. C’est pourquoi, afin que le sacrifice de la messe, même par sa forme rituelle, obtienne une pleine efficacité pastorale, le saint Concile, à l’égard des messes qui se célèbrent avec le concours du peuple, surtout les dimanches et fêtes de précepte, décrète ce qui suit :

50. Révision de l’ordinaire de la messe

Le rituel de la messe sera révisé de telle sorte que se manifestent plus clairement le rôle propre ainsi que la connexion mutuelle de chacune de ses parties, et que soit facilitée la participation pieuse et active des fidèles.

Aussi, en gardant fidèlement la substance des rites, on les simplifiera, on omettra ce qui, au cours des âges, a été redoublé ou a été ajouté sans grande utilité ; on rétablira, selon l’ancienne norme des saints Pères, certaines choses qui ont disparu sous les atteintes du temps, dans la mesure où cela apparaîtra opportun ou nécessaire.

51. Une plus grande richesse biblique

Pour présenter aux fidèles avec plus de richesse la table de la Parole de Dieu, on ouvrira plus largement les trésors de la Bible pour que, en l’espace d’un nombre d’années déterminé, on lise au peuple la partie la plus importante des Saintes Écritures.

52. L’homélie

L’homélie par laquelle, au cours de l’année liturgique, on explique à partir du texte sacré les mystères de la foi et les normes de la vie chrétienne est fortement recommandée comme faisant partie de la liturgie elle-même ; bien plus, aux messes célébrées avec le concours du peuple les dimanches et jours de fête de précepte, on ne l’omettra que pour un motif grave.

53. La prière des fidèles

La « prière commune », ou « prière des fidèles », sera rétablie après l’évangile et l’homélie, surtout les dimanches et fêtes de précepte, afin qu’avec la participation du peuple, on fasse des supplications pour la sainte Église, pour ceux qui détiennent l’aut orité publique, pour ceux qui sont accablés de diverses détresses, et pour tous les hommes et le salut du monde entier [39].

54. Latin et langue du pays à la messe

On pourra donner la place qui convient à la langue du pays dans les messes célébrées avec le concours du peuple, surtout pour les lectures et la « prière commune », et, selon les conditions locales, aussi dans les parties qui reviennent au peuple, conformément à l’article 36 de la présente Constitution.

On veillera cependant à ce que les fidèles puissent dire ou chanter ensemble, en langue latine, aussi les parties de l’ordinaire de la messe qui leur reviennent.

Mais si quelque part un emploi plus large de la langue du pays dans la messe semble opportun, on observera ce qui est prescrit à l’article 40 de la présente Constitution.

55. La communion, sommet de la participation à la messe ; la communion sous les deux espèces

On recommande fortement cette participation plus parfaite à la messe qui consiste en ce que les fidèles, après la communion du prêtre, reçoivent le Corps du Seigneur avec des pains consacrés à ce même sacrifice.

La communion sous les deux espèces, étant maintenus les principes dogmatiques établis par le Concile de Trente [40], peut être accordée, au jugement des évêques, dans les cas que le Siège apostolique précisera, tant aux clercs et aux religieux qu’aux laïcs ; par exemple : aux nouveaux ordonnés dans la messe de leur ordination, aux profès dans la messe de leur profession religieuse, aux néophytes dans la messe qui suit le baptême.

56. Unité de la messe

Les deux parties qui constituent en quelque sorte la messe, c’est-à-dire la liturgie de la parole et la liturgie eucharistique, sont si étroitement unies entre elles qu’elles constituent un seul acte de culte. Aussi, le saint Concile exhorte-t-il vivement les pasteurs d’âmes à enseigner soigneusement aux fidèles, dans la catéchèse, qu’il faut participer à la messe entière, surtout les dimanches et jours de fête de précepte.

57. La concélébration

§ 1. La concélébration, qui manifeste heureusement l’unité du sacerdoce, est restée en usage jusqu’à maintenant dans l’Église, en Occident comme en Orient. Aussi le Concile a-t-il décidé d’étendre la faculté de concélébrer aux cas suivants :

1. a) le Jeudi saint, tant à la messe chrismale qu’à la messe du soir ;

b) aux messes célébrées dans les conciles, les assemblées épiscopales et les synodes ;

c) à la messe de la bénédiction d’un abbé.

2. En outre, avec la permission de l’Ordinaire, à qui il appartient d’apprécier l’opportunité de la concélébration :

a) à la messe conventuelle et à la messe principale dans les églises, lorsque le bien spirituel des fidèles ne requiert pas que tous les prêtres présents célèbrent individuellement ;

b) aux messes des assemblées de prêtres de tout genre, aussi bien séculiers que religieux.

§2. 1. Il appartient à l’évêque de diriger et de régler la concélébration dans son diocèse.

2. Cependant, on réservera toujours à chaque prêtre la liberté de célébrer la messe individuellement, mais non pas au même moment dans la même église, ni le Jeudi saint.

58. On composera un nouveau rite de la concélébration qui devra être inséré dans le pontifical et le missel romains.



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Message par Francesco Mer 13 Avr 2011 - 2:04

Ce qu'est la messe:
Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu’à ce qu’il vienne, et pour confier ainsi à l’Église, son Épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection : sacrement de l’amour, signe de l’unité, lien de la charité [36], banquet pascal dans lequel le Christ est mangé, l’âme est comblée de grâce, et le gage de la gloire future nous est donné [37].



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Message par Francesco Sam 16 Avr 2011 - 1:54

CHAPITRE III :
Les autres sacrements et les sacramentaux

59. Nature des sacrements

Les sacrements ont pour fin de sanctifier les hommes, d’édifier le Corps du Christ, enfin de rendre le culte à Dieu ; mais, à titre de signes, ils ont aussi un rôle d’enseignement. Non seulement ils supposent la foi, mais encore, par les paroles et les choses, ils la nourrissent, ils la fortifient, ils l’expriment ; c’est pourquoi ils sont dits sacrements de la foi. Certes, ils confèrent la grâce, mais, en outre, leur célébration dispose au mieux les fidèles à recevoir fructueusement cette grâce, à rendre à Dieu le juste culte, et à exercer la charité.

Il est donc de la plus grande importance que les fidèles comprennent facilement les signes des sacrements et fréquentent de la façon la plus assidue les sacrements qui nourrissent la vie chrétienne.

60. Les sacramentaux

En outre, la sainte Mère l’Église a institué des sacramentaux. Ce sont des signes sacrés par lesquels, selon une certaine imitation des sacrements, des effets surtout spirituels sont signifiés et sont obtenus grâce à l’intercession de l’Église. Par eux, les hommes sont disposés à recevoir l’effet principal des sacrements, et les diverses circonstances de la vie sont sanctifiées.

61. Valeur pastorale de la liturgie et sa relation avec le mystère pascal

C’est pourquoi la liturgie des sacrements et des sacramentaux fait que, chez les fidèles bien disposés, presque tous les événements de la vie sont sanctifiés par la grâce divine qui découle du mystère pascal de la passion, de la mort et de la résurrection du Christ ; car c’est de lui que tous les sacrements et sacramentaux tirent leur vertu ; et il n’est à peu près aucun usage honorable des choses matérielles qui ne puisse être orienté vers cette fin : la sanctification de l’homme et la louange de Dieu.

62. Nécessité d’une révision des rites sacramentels

Mais au cours des âges sont entrés dans les rites des sacrements et des sacramentaux, des éléments qui, à notre époque, ne permettent pas d’en voir assez clairement la nature et la fin ; il est donc besoin d’y opérer certaines adaptations aux nécessités de notre temps, et le saint Concile décrète ce qui suit au sujet de leur révision.

63. Langue

Puisque assez souvent dans l’administration des sacrements et des sacramentaux l’emploi de la langue du pays peut être d’une grande utilité auprès du peuple, on lui donnera une plus large place selon les règles qui suivent :

a) dans l’administration des sacrements et des sacramentaux, on peut employer la langue du pays, conformément à l’article 36 ;

Rituel romain et rituels particuliers.

b) en suivant la nouvelle édition du rituel romain, des rituels particuliers, adaptés aux nécessités de chaque région, y compris en ce qui concerne la langue, seront préparés au plus tôt par l’autorité ecclésiastique qui a compétence sur le territoire, mentionnée à l’article 22 § 2 de la présente Constitution ; et, une fois les actes révisés par le Siège apostolique, ces rituels seront employés dans leurs régions respectives. Dans la composition de ces rituels ou de ces recueils particuliers de rites, on n’omettra pas les instructions mises en tête de chaque rite dans le rituel romain, qu’elles soient pastorales ou rubricales, ou bien qu’elles aient une importance particulière au point de vue social.

64. Le catéchuménat

On restaurera le catéchuménat des adultes, distribué en plusieurs étapes, dont la pratique sera soumise au jugement de l’Ordinaire du lieu : on obtiendra ainsi que le temps du catéchuménat, destiné à une formation appropriée, puisse être sanctifié par des rites sacrés dont la célébration s’échelonne dans le temps.

65. Dans les pays de mission, outre les éléments d’initiation qui appartiennent à la tradition chrétienne, il sera permis d’admettre ces autres éléments d’initiation dont on constate la pratique dans chaque peuple, pour autant qu’on peut les adapter au rite chrétien, conformément aux articles 37-40 de la présente Constitution.

66. Révision des rites du baptême

On révisera le double rite pour le baptême des adultes, le plus simple et le plus solennel, celui qui tient compte du catéchuménat restauré, et on introduira dans le missel romain une messe propre « lors de l’administration du baptême ».

67. On révisera le rite pour le baptême des enfants et on l’adaptera à la situation réelle des tout-petits ; en outre, le rôle des parents et des parrains, ainsi que leurs devoirs, seront mieux mis en évidence dans le rite lui-même.

68. Dans le rite du baptême ne manqueront pas les adaptations, à employer au jugement de l’Ordinaire du lieu, pour le cas d’un grand concours de candidats au baptême. On composera, en outre, un rituel bref dont puissent user, principalement, les catéchistes en pays de mission, et généralement, en cas de danger de mort, les fidèles, lorsqu’il n’y a là ni prêtre ni diacre.

69. Au lieu du rite appelé « rituel pour suppléer sur un enfant baptisé les cérémonies omises », on en composera un nouveau où il soit indiqué de façon plus claire et plus appropriée que cet enfant, baptisé auparavant avec le rite bref, a déjà été reçu dans l’Église. De même, pour ceux qui, déjà baptisés validement, se convertissent à la religion catholique, on composera un nouveau rite pour signifier qu’on les admet dans la communion de l’Église.

70. On peut bénir l’eau baptismale, en dehors du temps pascal, dans le rite même du baptême, avec une formule plus brève qui sera approuvée.

71. Révision du rite de la confirmation

Le rite de la confirmation sera révisé aussi pour manifester plus clairement le lien intime de ce sacrement avec toute l’initiation chrétienne, aussi est-il convenable que la rénovation des promesses baptismales précède la réception du sacrement. La confirmation, selon l’opportunité, peut être conférée au cours de la messe ; pour ce qui est du rite célébré hors de la messe, on préparera la formule à employer en guise d’introduction.

72. Révision du rite de la pénitence

Le rite et les formules de la pénitence seront révisés de façon à exprimer plus clairement la nature et l’effet du sacrement.

73. Révision du rite de l’onction des malades

« L’extrême-onction », qu’on peut appeler aussi et mieux l’onction des malades, n’est pas seulement le sacrement de ceux qui se trouvent à la dernière extrémité. Aussi, le temps opportun pour le recevoir est déjà certainement arrivé lorsque le fidèle commence à être en danger de mort par suite d’affaiblissement physique ou de vieillesse.

74. En dehors des rites séparés de l’onction des malades et du viatique, on composera un rituel continu selon lequel on conférera l’onction au malade après la confession et avant la réception du viatique.

75. Le nombre des onctions sera adapté aux circonstances, et les oraisons qui appartiennent au rite de l’onction des malades seront révisées pour correspondre aux diverses situations des malades qui reçoivent le sacrement.

76. Révision des rites du sacrement de l’ordre

Les rites des ordinations, soit quant aux cérémonies soit quant aux textes, seront révisés. Les allocutions de l’évêque au début de chaque ordination ou consécration peuvent se faire dans la langue du pays.

Dans la consécration épiscopale, il est permis à tous les évêques présents d’imposer les mains.

77. Révision du rite du mariage

Le rite de célébration du mariage qui se trouve dans le rituel romain sera révisé et enrichi pour signifier plus clairement la grâce du sacrement et souligner davantage les devoirs des époux.

« Si en certaines régions on utilise dans la célébration du mariage d’autres coutumes et cérémonies dignes d’être approuvées, le saint Concile souhaite beaucoup qu’on les garde complètement [41]. »

En outre, faculté est laissée à l’autorité ecclésiastique sur le territoire, ayant compétence, mentionnée à l’article 22 §2 de la présente constitution, d’élaborer, selon l’article 63, un rite propre qui s’accorde avec les usages des lieux et des peuples, mais à la condition expresse que le prêtre qui assiste au mariage demande et reçoive le consentement des contractants.

78. Le mariage sera célébré ordinairement au cours de la messe, après la lecture de l’Évangile et l’homélie, avant la « prière des fidèles ». L’oraison sur l’épouse, amendée de façon à souligner que les deux époux ont des devoirs égaux de mutuelle fidélité, peut se dire dans la langue du pays.

Mais, si le sacrement de mariage est célébré sans messe, l’épître et l’Évangile de la messe de mariage seront lus au début du rite, et la bénédiction sera toujours conférée aux époux.

79. Révision des sacramentaux

Les sacramentaux seront révisés, en tenant pour règle primordiale la participation des fidèles consciente, active et facile, et en étant attentif aux nécessités de notre époque. Dans la révision des rituels, conformément à l’article 63, on pourra même ajouter de nouveaux sacramentaux, selon que la nécessité le réclame. Les bénédictions réservées seront en très petit nombre, et seulement en faveur des évêques ou des Ordinaires.

On prévoira que certains sacramentaux, du moins dans des circonstances particulières et au jugement de l’Ordinaire, puissent être administrés par des laïcs dotés des qualités requises.

80. La profession religieuse

Le rite de la consécration des vierges, qui se trouve au pontifical romain, sera soumis à révision.

En outre, on élaborera un rite de la profession religieuse et de la rénovation des vœux en vue d’une plus grande unité, sobriété et dignité ; il devra être adopté par ceux qui accomplissent, au cours de la messe, leur profession ou la rénovation de leurs vœux, le droit particulier étant sauf.

Il est louable que la profession religieuse se fasse au cours de la messe.

81. Révision des rites des funérailles

Le rite des funérailles devra exprimer de façon plus claire le caractère pascal de la mort chrétienne, et devra répondre mieux aux situations et aux traditions de chaque région, même en ce qui concerne la couleur liturgique.

82. Le rite de l’ensevelissement des tout-petits sera révisé, et on le dotera d’une messe propre.



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Message par Francesco Sam 16 Avr 2011 - 1:59

On prévoira que certains sacramentaux, du moins dans des circonstances particulières et au jugement de l’Ordinaire, puissent être administrés par des laïcs dotés des qualités requises.

Est ce que quelqu'un(e) sait de quoi il est question?


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Message par Francesco Dim 17 Avr 2011 - 1:51

CHAPITRE IV :
L’office divin

83. L’office divin, œuvre du Christ et de l’Église

Le Grand Prêtre de la Nouvelle et Éternelle Alliance, le Christ Jésus, assumant la nature humaine, a introduit dans notre exil terrestre cet hymne qui se chante éternellement dans les demeures célestes. Il s’adjoint toute la communauté des hommes et se l’associe dans ce divin cantique de louange.

En effet, il continue à exercer cette fonction sacerdotale par son Église elle-même qui, non seulement par la célébration de l’Eucharistie, mais aussi par d’autres moyens et surtout par l’accomplissement de l’office divin, loue sans cesse le Seigneur et intercède pour le salut du Monde entier.

84. L’office divin, d’après l’antique tradition chrétienne, est constitué de telle façon que tout le déroulement du jour et de la nuit soit consacré par la louange de Dieu. Lorsque cet admirable cantique de louange est accompli selon la règle par les prêtres ou par d’autres, délégués à cela par l’institution de l’Église, ou par les fidèles priant avec le prêtre selon la forme approuvée, alors c’est vraiment la voix de l’Épouse elle-même qui s’adresse à l’Époux ; et mieux encore, c’est la prière du Christ que celui-ci, uni à son Corps, présente au Père.

85. Par conséquent, tous ceux qui assurent ce service accomplissent l’office de l’Église et, en même temps, participent de l’honneur suprême de l’Epouse du Christ, parce qu’en s’acquittant des louanges divines, ils se tiennent devant le trône de Dieu au nom de la Mère Église

86. Valeur pastorale de l’office divin

Les prêtres adonnés au ministère pastoral acquitteront les louanges des Heures avec d’autant plus de ferveur qu’ils seront plus vivement conscients d’avoir à mettre en pratique l’exhortation de saint Paul : « Priez sans relâche » (1 Th 5, 17) ; car le Seigneur seul peut assurer l’efficacité et le progrès de l’œuvre à laquelle ils travaillent, lui qui a dit : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5) ; c’est pourquoi les Apôtres dirent en instituant les diacres : « Quant à nous, nous resterons assidus à la prière et au service de la parole » (Ac 6, 4).

87. Mais, pour que l’office divin soit accompli, soit par les prêtres, soit par les autres membres de l’Église, de façon meilleure et plus parfaite dans les circonstances actuelles, le saint Concile, poursuivant l’œuvre heureusement inaugurée par le Siège apostolique, a décidé de décréter ce qui suit au sujet de l’office selon le rite romain.

88. Révision du cours traditionnel des Heures

Puisque la sanctification de la journée est la fin de l’office, le cours traditionnel des Heures sera restauré de telle façon que les Heures retrouveront leur vrai temps dans la mesure du possible et qu’il soit tenu compte des conditions de la vie présente, surtout pour ceux qui s’appliquent aux œuvres de l’apostolat.

89. Aussi dans la restauration de l’office, on observera les normes suivantes :

a) les laudes, comme prières du matin, et les vêpres, comme prières du soir, qui, d’après la vénérable tradition de l’Église universelle, constituent les deux pôles de l’office quotidien, doivent être tenues pour les heures principales et elles doivent être célébrées en conséquence ;

b) les complies seront organisées de façon à bien convenir à la fin de la journée ;

c) l’Heure qu’on appelle matines, bien qu’elle garde, dans la célébration chorale, son caractère de louange nocturne, sera adaptée de telle sorte qu’elle puisse être récitée à n’ « importe quelle heure du jour, et elle comportera un moins grand nombre de psaumes et des lectures plus étendues ;

d) l’Heure de prime sera supprimée ;

e) au chœur, on gardera les petites Heures de tierce, sexte et none. Hors du chœur, il est permis de choisir une seule de ces trois Heures, la plus appropriée au moment de la journée.

90. L’office divin, source de piété

Comme en outre l’office divin, en tant que prière publique de l’Église, est la source de la piété et l’aliment de la prière personnelle, les prêtres et tous ceux qui participent à l’office divin sont priés dans le Seigneur d’harmoniser lorsqu’ils l’acquittent leur âme avec leur voix ; et pour mieux y parvenir, ils se procureront une connaissance plus développée de la liturgie et de la Bible, et principalement des psaumes.

Dans l’accomplissement de cette restauration, le vénérable trésor séculaire de l’office romain sera adapté de telle sorte que ceux à qui il est confié puissent en profiter plus largement et plus facilement.

91. Répartition des psaumes

Pour que le cours des Heures proposé dans l’article 89 puisse être réellement observé, les psaumes ne seront plus répartis sur une seule semaine, mais sur un laps de temps plus long.

Le travail de révision du psautier, heureusement commencé, doit être mené à bonne fin dès que possible, en ayant égard à la latinité chrétienne, à l’usage liturgique, y compris dans le chant, ainsi qu’à toute la tradition de l’Église latine.

92. Organisation des lectures

En ce qui concerne les lectures, on observera ce qui suit :

a) la lecture de la Sainte Écriture sera organisée de telle sorte qu’il soit facile d’accéder plus largement au trésor de la parole divine ;

b) les lectures à tirer des œuvres des Pères, des docteurs et des écrivains ecclésiastiques seront mieux choisies ;

c) les Passions ou vies des saints seront rendues conformes à la vérité historique.

93. Révision des hymnes

Les hymnes, autant qu’il semblera utile, seront rendues à leur forme primitive, en supprimant ou en changeant tout ce qui sent la mythologie ou s’harmonise mal avec la piété chrétienne. On admettra, selon les besoins, d’autres hymnes prises dans le trésor hymnodique.

94. Moment de la récitation des Heures

Il importe, soit pour sanctifier véritablement la journée, soit pour réciter les Heures elles-mêmes avec fruit spirituel, que, dans la récitation des Heures, on observe le moment qui se rapproche le plus du temps véritable de chaque Heure canonique.

95. Obligation de l’office divin

Les communautés obligées au chœur, outre la messe conventuelle, sont tenues de célébrer l’office divin chaque jour au chœur, à savoir :

a) tout l’office : les ordres de chanoines, de moines et de moniales, et des autres réguliers astreints au chœur par le droit ou leurs constitutions ;

b) les Chapitres de cathédrales ou de collégiales : les parties de l’office qui leur sont imposées par le droit commun ou particulier ;

c) mais tous les membres de ces communautés qui sont ou bien établis dans les ordres majeurs, on bien profès solennels, les convers exceptés, doivent réciter individuellement les Heures canoniques qu’ils n’acquittent pas au chœur.

96. Les clercs non astreints au chœur, s’ils sont dans les ordres majeurs, sont tenus par l’obligation d’acquitter tout l’office chaque jour, soit en commun, soit seuls, selon la règle de l’article 89.

97. Les commutations souhaitables de l’office divin avec une action liturgique seront définies par les rubriques. Dans des cas particuliers et pour un juste motif, les Ordinaires pourront dispenser leurs sujets de l’office divin, totalement ou partiellement, ou leur en accorder commutation.

98. La louange divine dans les instituts religieux

Les membres de n’importe quel institut d’un état de perfection qui, en vertu des Constitutions, acquittent quelque partie de l’office, accomplissent la prière publique de l’Église.

De même, ils accomplissent la prière publique de l’Église si, en vertu de leurs Constitutions, ils récitent un petit office, pourvu que celui-ci soit composé à la manière de l’office divin et dûment approuvé.

99. Récitation commune

Puisque l’office divin est la voix de l’Église, c’est-à-dire de tout le Corps mystique adressant à Dieu une louange publique, il est recommandé que les clercs non astreints au chœur, et surtout les prêtres vivant en commun ou passagèrement réunis, acquittent en commun au moins une partie de l’office divin.

Mais tous ceux qui acquittent l’Office, soit au chœur soit en commun, accompliront la fonction qui leur est confiée le plus parfaitement possible, soit quant à la dévotion intérieure, soit quant à la réalisation extérieure.

Il importe en outre que l’office, au chœur ou en commun, soit chanté, selon l’opportunité.

100. Participation des fidèles

Les pasteurs veilleront à ce que les Heures principales, surtout les vêpres, les dimanches et jours de fêtes solennelles, soient célébrées en commun dans l’église. On recommande aux laïcs eux-mêmes la récitation de l’office divin, soit avec les prêtres, soit lorsqu’ils sont réunis entre eux, voire individuellement.

101. Langue

§ 1. Selon la tradition séculaire du rite latin dans l’office divin, les clercs doivent garder la langue latine ; toutefois, pouvoir est donné à l’Ordinaire de concéder l’emploi d’une traduction en langue du pays, composée conformément à l’article 36, pour des cas individuels, aux clercs chez qui l’emploi de la langue latine est un empêchement grave à acquitter l’office divin comme il faut.

§ 2.Quant aux moniales et aux membres, hommes non clercs ou femmes, des instituts des états de perfection, le supérieur compétent peut leur accorder d’employer la langue du pays dans l’office divin, même pour la célébration chorale, pourvu que la traduction soit approuvée.

Tout clerc astreint à l’office divin, s’il célèbre celui-ci dans la langue du pays, avec un groupe de fidèles ou avec ceux qui sont énumérés au §2, satisfait à son obligation du moment que le texte de la traduction est approuvé.



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Message par Francesco Dim 17 Avr 2011 - 1:58

89. Aussi dans la restauration de l’office, on observera les normes suivantes :

a) les laudes, comme prières du matin, et les vêpres, comme prières du soir, qui, d’après la vénérable tradition de l’Église universelle, constituent les deux pôles de l’office quotidien, doivent être tenues pour les heures principales et elles doivent être célébrées en conséquence ;

b) les complies seront organisées de façon à bien convenir à la fin de la journée ;

c) l’Heure qu’on appelle matines, bien qu’elle garde, dans la célébration chorale, son caractère de louange nocturne, sera adaptée de telle sorte qu’elle puisse être récitée à n’ « importe quelle heure du jour, et elle comportera un moins grand nombre de psaumes et des lectures plus étendues ;



On recommande aux laïcs eux-mêmes la récitation de l’office divin, soit avec les prêtres, soit lorsqu’ils sont réunis entre eux, voire individuellement.

Connaissez vous la lecture des heures(ou office divin)?


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Message par Francesco Mar 19 Avr 2011 - 1:41

CHAPITRE V :
L’année liturgique

102. Sens de l’année liturgique

Notre Mère la sainte Église estime qu’il lui appartient de célébrer l’œuvre salvifique de son divin Epoux par une commémoration sacrée, à jours fixes, tout au long de l’année. Chaque semaine, au jour qu’elle a appelé « jour du Seigneur », elle fait mémoire de la résurrection du Seigneur, qu’elle célèbre encore une fois par an, en même temps que sa bienheureuse passion, par la grande solennité de Pâques.

Et elle déploie tout le mystère du Christ pendant le cycle de l’année, de l’Incarnation et la Nativité jusqu’à l’Ascension, jusqu’au jour de la Pentecôte, et jusqu’à l’attente de la bienheureuse espérance et de l’avènement du Seigneur.

Tout en célébrant ainsi les mystères de la Rédemption, elle ouvre aux fidèles les richesses de la puissance et des mérites de son Seigneur ; de la sorte, ces mystères sont en quelque manière rendus présents tout au long du temps, les fidèles sont mis en contact avec eux et remplis par la grâce du salut.

103. En célébrant ce cycle annuel des mystères du Christ, la sainte Église vénère avec un particulier amour la bienheureuse Marie, mère de Dieu, qui est unie à son Fils dans l’œuvre salutaire par un lien indissoluble ; en Marie, l’Église admire et exalte le fruit le plus éminent de la Rédemption, et, comme dans une image très pure, elle contemple avec joie ce qu’elle-même désire et espère être tout entière.

104. En outre, l’Église a introduit dans le cycle annuel les mémoires des martyrs et des autres saints qui, élevés à la perfection par la grâce multiforme de Dieu et ayant déjà obtenu possession du salut éternel, chantent à Dieu dans le ciel une louange parfaite et intercèdent pour nous. Dans les anniversaires des saints, l’Église proclame le mystère pascal en ces saints qui ont souffert avec le Christ et sont glorifiés avec lui, et elle propose aux fidèles leurs exemples qui les attirent tous au Père par le Christ, et par leurs mérites elle implore les bienfaits de Dieu.

105. Enfin, aux divers temps de l’année, selon des disciplines traditionnelles, l’Église réalise la formation des fidèles par des activités spirituelles et corporelles, par l’instruction, la prière, les œuvres de pénitence et de miséricorde.

C’est pourquoi le Concile a jugé bon de décréter ce qui suit.

106. Revalorisation du dimanche

L’Église célèbre le mystère pascal, en vertu d’une tradition apostolique qui remonte au jour même de la résurrection du Christ, chaque huitième jour, qui est nommé à bon droit le jour du Seigneur, ou dimanche. Ce jour-là, en effet, les fidèles doivent se rassembler pour que, entendant la Parole de Dieu et participant à l’Eucharistie, ils fassent mémoire de la passion, de la résurrection et de la gloire du Seigneur Jésus, et rendent grâces à Dieu qui les « a régénérés pour une vivante espérance par la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts » (1 P 1, 3). Aussi, le jour dominical est-il le jour de fête primordial qu’il faut proposer et inculquer à la piété des fidèles, de sorte qu’il devienne aussi jour de joie et de cessation du travail. Les autres célébrations, à moins qu’elles ne soient véritablement de la plus haute importance, ne doivent pas l’emporter sur lui, car il est le fondement et le noyau de toute l’année liturgique.

107. Révision de l'année liturgique

L’année liturgique sera révisée de telle sorte que, en gardant ou en restituant les coutumes et les disciplines traditionnelles attachées aux temps sacrés, en se conformant aux conditions de notre époque, on maintienne leur caractère originel pour nourrir comme il faut la piété des fidèles par la célébration des mystères de la Rédemption chrétienne, mais surtout du mystère pascal. Les adaptations, selon les conditions locales, si elles étaient nécessaires, se feront conformément aux articles 39 et 40.

108. On orientera l’esprit des fidèles avant tout vers les fêtes du Seigneur, par lesquelles se célèbrent pendant l’année les mystères du salut. Par suite, le propre du temps recevra la place qui lui revient au-dessus des fêtes des saints, pour que le cycle entier des mystères du salut soit célébré comme il se doit.

109. Le Carême

Le double caractère du temps du Carême, qui, surtout par la commémoration ou la préparation du baptême et par la pénitence, invite plus instamment les fidèles à écouter la Parole de Dieu et à vaquer à la prière, et les dispose ainsi à célébrer le mystère pascal, ce double caractère, aussi bien dans la liturgie que dans la catéchèse liturgique, sera mis plus pleinement en lumière.

Par suite :

a) les éléments baptismaux de la liturgie quadragésimale seront employés plus abondamment ; et certains, selon l’opportunité, seront restitués à partir de la tradition antérieure ;

b) on en dira autant des éléments pénitentiels. En ce qui concerne la catéchèse, on inculquera aux fidèles, en même temps que les conséquences sociales du péché, cette nature propre de la pénitence, qui déteste le péché en tant qu’il est une offense à Dieu ; on ne passera pas sous silence le rôle de l’Église dans l’action pénitentielle, et on insistera sur la prière pour les pécheurs.

110. La pénitence du temps de Carême ne doit pas être seulement intérieure et individuelle, mais aussi extérieure et sociale. La pratique de la pénitence, selon les possibilités de notre époque et des diverses régions, et selon les conditions des fidèles, sera favorisée et, par les autorités mentionnées à l’article 22, recommandée.

Cependant, le jeûne pascal, le vendredi de la passion et de la mort du Seigneur, sera sacré ; il devra être partout observé et, selon l’opportunité, être même étendu au Samedi saint pour que l’on parvienne avec un cœur élevé et libéré aux joies de la résurrection du Seigneur.

111. La fête des saints

Selon la tradition, les saints sont l’objet d’un culte dans l’Église, et l’on y vénère leurs reliques authentiques et leurs images. Les fêtes des saints proclament les merveilles du Christ chez ses serviteurs et offrent aux fidèles des exemples opportuns à imiter. Pour que les fêtes de saints ne l’emportent pas sur les fêtes qui célèbrent les mystères mêmes du salut, le plus grand nombre d’entre elles seront laissées à la célébration de chaque église, nation ou famille religieuse particulière ; on n’étendra à l’Église universelle que les fêtes commémorant des saints qui présentent véritablement une importance universelle.



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Message par Francesco Mar 19 Avr 2011 - 1:46

Cependant, le jeûne pascal, le vendredi de la passion et de la mort du Seigneur, sera sacré ; il devra être partout observé et, selon l’opportunité, être même étendu au Samedi saint pour que l’on parvienne avec un cœur élevé et libéré aux joies de la résurrection du Seigneur.



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Message par Francesco Lun 25 Avr 2011 - 0:38

CHAPITRE VI :
La musique sacrée

112. Dignité de la musique sacrée

La tradition musicale de l’Église universelle constitue un trésor d’une valeur inestimable qui l’emporte sur les autres arts, du fait surtout que, chant sacré lié aux paroles, il fait partie nécessaire ou intégrante de la liturgie solennelle.

Certes, le chant sacré a été exalté tant par la Sainte Écriture [42] que par les Pères et par les Pontifes romains ; ceux-ci, à une époque récente, à la suite de saint Pie X, ont mis en lumière de façon plus précise la fonction ministérielle de la musique sacrée dans le service divin.

C’est pourquoi la musique sacrée sera d’autant plus sainte qu’elle sera en connexion plus étroite avec l’action liturgique, en donnant à la prière une expression plus agréable, en favorisant l’unanimité ou en rendant les rites sacrés plus solennels. Mais l’Église approuve toutes les formes d’art véritable, si elles sont dotées des qualités requises, et elle les admet pour le culte divin.

Le saint Concile, conservant donc les normes et les préceptes de la tradition et de la discipline ecclésiastiques, et considérant la fin de la musique sacrée, qui est la gloire de Dieu et la sanctification des fidèles, a statué ce qui suit.

113. La liturgie solennelle

L’action liturgique présente une forme plus noble lorsque les offices divins sont célébrés solennellement avec chant, que les ministres sacrés y interviennent et que le peuple y participe activement.

Quant à la langue à employer, on observera les prescriptions de l’article 36 ; pour la messe, de l’article 54 ; pour les sacrements, de l’article 63 ; pour l’office divin, de l’article 101.

114. Le trésor de la musique sacrée sera conservé et cultivé avec la plus grande sollicitude. Les Scholae cantorum seront assidûment développées, surtout auprès des églises cathédrales ; cependant les évêques et les autres pasteurs d’âmes veilleront avec zèle à ce que, dans n’importe quelle action sacrée qui doit s’accomplir avec chant, toute l’assemblée des fidèles puisse assurer la participation active qui lui revient en propre, conformément aux articles 28 et 30.

115. La formation musicale

On accordera une grande importance à l’enseignement et à la pratique de la musique dans les séminaires, les noviciats de religieux des deux sexes et leurs maisons d’études, et aussi dans les autres institutions et écoles catholiques ; pour assurer cette éducation, les maîtres chargés d’enseigner la musique sacrée seront formés avec soin.

On recommande en outre d’ériger, là où c’est opportun, des instituts supérieurs de musique sacrée.

Aux musiciens et chanteurs, surtout aux enfants, on donnera aussi une authentique formation liturgique.

116. Chant grégorien et polyphonie

L’Église reconnaît dans le chant grégorien le chant propre de la liturgie romaine ; c’est donc lui qui, dans les actions liturgiques, toutes choses égales d’ailleurs, doit occuper la première place.

Les autres genres de musique sacrée, mais surtout la polyphonie, ne sont nullement exclus de la célébration des offices divins, pourvu qu’ils s’accordent avec l’esprit de l’action liturgique, conformément à l’article 30.

117. L’édition des livres de chant grégorien

On achèvera l’édition typique des livres de chant grégorien ; bien plus, on procurera une édition plus critique des livres déjà édités postérieurement à la restauration de saint Pie X.

Il convient aussi que l’on procure une édition contenant des mélodies plus simples à l’usage des petites églises.

118. Le chant religieux populaire

Le chant religieux populaire sera intelligemment favorisé pour que, dans les exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques elles-mêmes, conformément aux normes et aux prescriptions des rubriques, les voix des fidèles puissent se faire entendre.

119. La musique sacrée dans les pays de mission

Puisque, dans certaines régions, surtout en pays de mission, on trouve des peuples possédant une tradition musicale propre qui tient une grande place dans leur vie religieuse et sociale, on accordera à cette musique l’estime qui lui est due et la place convenable, aussi bien en formant leur sens religieux qu’en adaptant le culte à leur génie dans l’esprit des articles 39 et 40.

C’est pourquoi, dans la formation musicale des missionnaires, on veillera avec soin à ce que, dans la mesure du possible, ils soient capables de promouvoir la musique traditionnelle de ces peuples, tant à l’école que dans les actions sacrées.

120. L’orgue et les autres instruments de musique

On estimera hautement, dans l’Église latine, l’orgue à tuyaux comme l’instrument traditionnel dont le son peut ajouter un éclat admirable aux cérémonies de l’Église et élever puissamment les âmes vers Dieu et le ciel.

Quant aux autres instruments, selon le jugement et le consentement de l’autorité territoriale compétente, conformément aux articles 22, 36 et 40, il est permis de les admettre dans le culte divin selon qu’ils sont ou peuvent devenir adaptés à un usage sacré, qu’ils s’accordent à la dignité du temple et qu’ils favorisent véritablement l’édification des fidèles.

121. Mission des compositeurs

Les musiciens, imprégnés d’esprit chrétien, comprendront qu’ils ont été appelés à cultiver la musique sacrée et à accroître son trésor.

Ils composeront les mélodies qui présentent les marques de la véritable musique sacrée et qui puissent être chantées non seulement par les grandes Scholae cantorum, mais qui conviennent aussi aux petites et favorisent la participation active de toute l’assemblée des fidèles.

Les textes destinés au chant sacré seront conformes à la doctrine catholique et même seront tirés de préférence des Saintes Écritures et des sources liturgiques.




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Message par Francesco Mar 26 Avr 2011 - 1:28

CHAPITRE VII :
L’art sacré et le matériel du culte

122. Dignité de l’art sacré

Parmi les plus nobles activités de l’esprit humain, on compte à très bon droit les beaux-arts, mais surtout l’art religieux et ce qui en est le sommet, l’art sacré. Par nature, ils visent à exprimer de quelque façon dans les œuvres humaines la beauté infinie de Dieu, et ils se consacrent d’autant plus à accroître sa louange et sa gloire qu’ils n’ont pas d’autre propos que de contribuer le plus possible, par leurs œuvres, à tourner les âmes humaines vers Dieu.

Aussi la vénérable Mère Église fut-elle toujours amie des beaux-arts, et elle n’a jamais cessé de requérir leur noble ministère, surtout afin que les objets servant au culte soient vraiment dignes, harmonieux et beaux, pour signifier et symboliser les réalités célestes, et elle n’a jamais cessé de former des artistes. L’Église s’est même toujours comportée en juge des beaux-arts, discernant parmi les œuvres des artistes celles qui s’accordaient avec la foi, la piété et les lois traditionnelles de la religion, et qui seraient susceptibles d’un usage sacré.

L’Église a veillé avec un zèle particulier à ce que les objets sacrés contribuent de façon digne et belle à l’éclat du culte, tout en admettant, soit dans les matériaux, soit dans les formes, soit dans la décoration, les changements introduits au cours des âges par les progrès de la technique.

Les Pères ont donc décidé en ces matières de décréter ce qui suit.

123. Les styles artistiques

L’Église n’a jamais considéré aucun style artistique comme lui appartenant en propre, mais, selon le caractère et les conditions des peuples, et selon les exigences des divers rites, elle a admis les genres de chaque époque, produisant au cours des siècles un trésor artistique qu’il faut conserver avec tout le soin possible. Que l’art de notre époque et celui de tous les peuples et de toutes les régions ait lui aussi, dans l’Église, liberté de s’exercer, pourvu qu’il serve les édifices et les rites sacrés avec le respect et l’honneur qui leur sont dus ; si bien qu’il soit à même de joindre sa voix à cet admirable concert de gloire que les plus grands hommes ont chanté en l’honneur de la foi catholique au cours des siècles passés.

124. Les Ordinaires veilleront à ce que, en promouvant et favorisant un art véritablement sacré, ils aient en vue une noble beauté plutôt que la seule somptuosité. Ce que l’on doit entendre aussi des vêtements et des ornements sacrés.

Les évêques veilleront aussi à ce que les œuvres artistiques qui sont inconciliables avec la foi et les mœurs ainsi qu’avec la piété chrétienne, qui blessent le sens vraiment religieux, ou par la dépravation des formes, ou par l’insuffisance, la médiocrité ou le mensonge de leur art, soient soigneusement écartées des maisons de Dieu et des autres lieux sacrés.

Dans la construction des édifices sacrés, on veillera attentivement à ce que ceux-ci se prêtent à l’accomplissement des actions liturgiques et favorisent la participation active des fidèles.

125. Les images sacrées

On maintiendra fermement la pratique de proposer dans les églises des images sacrées à la vénération des fidèles ; mais elles seront exposées en nombre restreint et dans une disposition appropriée, pour ne pas susciter l’étonnement du peuple chrétien et ne pas favoriser une dévotion mal réglée.

126. Pour juger les œuvres d’art, les Ordinaires des lieux entendront la Commission diocésaine d’art sacré et, le cas échéant, d’autres personnes particulièrement expertes, ainsi que les commissions mentionnées aux articles 44, 45, 46.

Les Ordinaires veilleront avec zèle à ce que le mobilier sacré ou les œuvres de prix, en tant qu’ornements de la maison de Dieu, ne soient pas aliénés ou détruits.

127. La formation des artistes

Les évêques, par eux-mêmes ou par des prêtres qualifiés, doués de compétence et d’amour de l’art, s’occuperont des artistes pour les imprégner de l’esprit de l’art sacré et de la liturgie.

De plus, on recommande la création d’écoles ou d’académies d’art sacré pour la formation des artistes dans les régions où on le jugera bon.

Mais tous les artistes qui, conduits par leur talent, veulent servir la gloire de Dieu dans la sainte Église, se rappelleront toujours qu’il s’agit d’imiter religieusement en quelque sorte le Dieu créateur, et de produire des œuvres destinées au culte catholique, à l’édification des fidèles ainsi qu’à leur piété et à leur formation religieuse.

128. Révision de la législation sur l’art sacré

Les canons et statuts ecclésiastiques qui concernent la réalisation matérielle de ce qui relève du culte divin, surtout quant à la structure digne et adaptée des édifices, la forme et la construction des autels, la noblesse, la disposition et la sécurité du tabernacle eucharistique, la situation adaptée et la dignité du baptistère, ainsi que la distribution harmonieuse des images sacrées, de la décoration et de l’ornementation, ces canons et statuts seront le plus tôt possible révisés, en même temps que les livres liturgiques, conformément à l’article 25 ; ce qui paraît mal accordé à la restauration de la liturgie sera amendé ou supprimé, et ce qui la favorise sera conservé ou introduit.

En ce domaine, surtout en ce qui concerne les matières et les formes du mobilier sacré et des vêtements, faculté est accordée aux conférences territoriales d’évêques d’opérer des adaptations aux nécessités et aux mœurs locales, conformément à l’article 22 de la présente Constitution.

129. La formation artistique des clercs

Les clercs, pendant le cours de leurs études philosophiques et théologiques, seront instruits aussi de l’histoire et de l’évolution de l’art sacré, ainsi que des sains principes sur lesquels doivent se fonder les œuvres d’art sacré, afin qu’ils apprécient et conservent les monuments vénérables de l’Église, et qu’ils soient capables de donner des conseils appropriés aux artistes dans la réalisation de leurs œuvres.

130. Les insignes pontificaux

Il convient que l’emploi des insignes pontificaux soit réservé aux personnages ecclésiastiques qui jouissent du caractère épiscopal ou d’une juridiction particulière.


Appendice :
Déclaration du IIe concile du Vatican sur la révision du calendrier

Le saint Concile œcuménique, deuxième du Vatican, estimant d’une grande importance les désirs de beaucoup en faveur de la fixation de la fête de Pâques à un dimanche déterminé et de la stabilisation du calendrier, après avoir attentivement pesé les conséquences possibles de l’introduction d’un nouveau calendrier, déclare ce qui suit :

1. Le saint Concile ne s’oppose pas à ce que la fête de Pâques soit fixée à un dimanche déterminé dans le calendrier grégorien, avec l’assentiment de ceux à qui importe cette question, surtout des frères séparés de la communion avec le Siège apostolique.

2. En outre, le saint Concile déclare qu’il ne s’oppose pas aux projets qui visent à introduire dans la société civile un calendrier perpétuel.

Mais parmi les divers systèmes qui sont imaginés pour établir un calendrier perpétuel et l’introduire dans la société civile, l’Église ne s’oppose pas à ceux-là seulement qui observent et sauvegardent la semaine de sept jours avec le dimanche, sans intercaler aucun jour hors de la semaine, de telle sorte que la succession soit laissée intacte, à moins que n’interviennent des motifs très graves dont le Siège apostolique aurait à juger.

Tout l’ensemble et chacun des points qui ont été édictés dans cette Constitution ont plu aux Pères du Concile. Et Nous, en vertu du pouvoir apostolique que Nous tenons du Christ, en union avec les vénérables Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et Nous ordonnons que ce qui a été ainsi établi en Concile soit promulgué pour la gloire de Dieu.

Rome, à Saint-Pierre, le 4 décembre 1963.

Moi, Paul, évêque de l’Église catholique.



(Suivent les signatures des Pères)




--------------------------------------------------------------------------------

[1] Secrète du 9e dimanche après la Pentecôte.

[2] Cf. He 13, 14.

[3] Cf. Ep 2,21-22.

[4] Ibid., 4, 13.

[5] Cf. Is 11,12.

[6] Cf. Jn 11, 52.

[7] Cf. Jn 10, 16.

[8] Cf. Is 61, 1 ; Lc 4, 18.

[9] Saint Ignace d’Antioche, Ad Ephesios 7, 2. Ed F. X. Funk, Patres Apostolici I, Tübingen, 1901, p. 218.

[10] Cf. 1 Tm 2, 5.

[11] Sacramentarium Veronense (Leonianum) ; Mohlberg, Rome, 1956, n. 1265, p. 162.

[12] Préface de Pâques.

[13] Oraison suivant la 2e leçon du Samedi saint, dans le missel romain, avant la réforme de la Semaine sainte.

[14] Cf. Mc 16, 15.

[15] Cf. Ac 26, 18.

[16] Cf. Rm 6, 4 ; Ep 2, 6 ; Col 3, 1 ; 2 Tm 2, 11.

[17] Cf. Jn 4, 23.

[18] Cf. 1 Co 11, 26.

[19] Conc. de Trente, sess. 13, 11 octobre 1551, Décret Dess. Eucharist. c. 5 : Conc. de Trente, Diariorum, Actorum, Epistolarum, Tractatuum nova collectio, ed. Soc. Goerresiana, t. VII. Actorum pars IV, Fribourg-en-Brisgau, 1961, p. 202.

[20] Conc. de Trente, sess. 22, 17 septembre 1562, doctr. Dess. Missae sacrif., c. 2 : Conc. de Trente, ed. cit., t. VIII. Actorum pars V, Fribourg-en-Brisgau, 1919, p. 960.

[21] Saint Augustin, In Io. Evang. Tract. VI, I, 7 : PL 35, 1428.

[22] Cf. Ap 21, 2 ; Col 3, 1 ; He 8, 2.

[23] Cf. Ph 3, 20 ; Col 3, 4.

[24] Cf. Jn 17, 3 ; Lc 24, 27 ; Ac 2, 38.

[25] Cf. Mt 28, 20.

[26] Postcommunion pour la Vigile et le dimanche de Pâques.

[27] Oraison de la messe du mardi de Pâques.

[28] Cf. 2 Co 6, 1.

[29] Cf. Mt 6, 6.

[30] Cf. 1 Th 5, 17.

[31] Cf. 1 Th 5, 17. Cf. 2 Co 4, 10-11.

[32] Secrète du lundi de Pentecôte.

[33] Saint Cyprien, De cath. eccl. unitate, 7 : csel (Hartel) III, 1, p. 215-216. –Cf. Épître 66, n. 8, 3 : ed. cit., III, 2, p. 732-733.

[34] Cf. Conc. de Trente, sess. 22, 17 septembre 1562, doctr. Dess. Missae sacrif., c. 8. – Conc. de Trente, ed. cit., VIII, 961.

[35] Cf. Saint Ignace, Ad Magn. 7 ; Ad Ph. 4 ; Ad Smyrn., 8 : Funk I, 236, 266, 281.

[36] Cf. Saint Augustin, In Io. Evang. Tract. XXVI, VI, 13 : PL 35, 1613.

[37] Bréviaire romain, Fête du Corps du Christ, Vêpres II, antiph. du Magnificat.

[38] Cf. Saint Cyrille d’Alex., Comment. in Io. Evang., liv. XI, c. XI-XII : PG 74, 557-564.

[39] Cf. 1 Tm 2, 1-2.

[40] Sess. 21, 16 juillet 1562. Doctrina de Communione sub utraque specie et parvulorum, c.1-3 : Conc. Trid., ed. cit., VIII, 698-699.

[41] Conc. de Trente, sess. 24, 11 novembre 1563, De reformatione, chap. 1 : Conc. de Trente, ed. cit., IX Actorum pars VI, Fribourg-en-Brisgau, 1924, p. 969. – Cf. Rituel romain, tit. VIII, c. II, n.6.

[42] Cf. Ep 5, 19 ; Col 3, 16.



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Message par Francesco Mer 27 Avr 2011 - 5:25

PAUL, ÉVÊQUE,
SERVITEUR DES SERVITEURS DE DIEU,
AVEC LES PÈRES DU SAINT CONCILE,
POUR QUE LE SOUVENIR S'EN MAINTIENNE À JAMAIS

CONSTITUTION PASTORALE
SUR L'ÉGLISE DANS LE MONDE DE CE TEMPS
GAUDIUM ET SPES



AVANT-PROPOS [1]

1. Étroite solidarité de l’Église avec l’ensemble de la famille humaine

Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur. Leur communauté, en effet, s’édifie avec des hommes, rassemblés dans le Christ, conduits par l’Esprit Saint dans leur marche vers le Royaume du Père, et porteurs d’un message de salut qu’il faut proposer à tous. La communauté des chrétiens se reconnaît donc réellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire.

2. À qui s’adresse le Concile

1. C’est pourquoi, après s’être efforcé de pénétrer plus avant dans le mystère de l’Église, le deuxième Concile du Vatican n’hésite pas à s’adresser maintenant, non plus aux seuls fils de l’Église et à tous ceux qui se réclament du Christ, mais à tous les hommes. À tous il veut exposer comment il envisage la présence et l’action de l’Église dans le monde d’aujourd’hui.

2. Le monde qu’il a ainsi en vue est celui des hommes, la famille humaine tout entière avec l’univers au sein duquel elle vit. C’est le théâtre où se joue l’histoire du genre humain, le monde marqué par l’effort de l’homme, ses défaites et ses victoires. Pour la foi des chrétiens, ce monde a été fondé et demeure conservé par l’amour du Créateur ; il est tombé certes, sous l’esclavage du péché, mais le Christ, par la Croix et la Résurrection, a brisé le pouvoir du Malin et l’a libéré pour qu’il soit transformé selon le dessein de Dieu et qu’il parvienne ainsi à son accomplissement.

3. Le service de l’homme

1. De nos jours, saisi d’admiration devant ses propres découvertes et son propre pouvoir, le genre humain s’interroge cependant, souvent avec angoisse, sur l’évolution présente du monde, sur la place et le rôle de l’homme dans l’univers, sur le sens de ses efforts individuels et collectifs, enfin sur la destinée ultime des choses et de l’humanité. Aussi le Concile, témoin et guide de la foi de tout le Peuple de Dieu rassemblé par le Christ, ne saurait donner une preuve plus parlante de solidarité, de respect et d’amour à l’ensemble de la famille humaine, à laquelle ce peuple appartient, qu’en dialoguant avec elle sur ces différents problèmes, en les éclairant à la lumière de l’Évangile, et en mettant à la disposition du genre humain la puissance salvatrice que l’Église, conduite par l’Esprit Saint, reçoit de son Fondateur. C’est en effet l’homme qu’il s’agit de sauver, la société humaine qu’il faut renouveler. C’est donc l’homme, l’homme considéré dans son unité et sa totalité, l’homme, corps et âme, cœur et conscience, pensée et volonté, qui constituera l’axe de tout notre exposé.

2. Voilà pourquoi, en proclamant la très noble vocation de l’homme et en affirmant qu’un germe divin est déposé en lui, ce saint Synode offre au genre humain la collaboration sincère de l’Église pour l’instauration d’une fraternité universelle qui réponde à cette vocation. Aucune ambition terrestre ne pousse l’Église ; elle ne vise qu’un seul but : continuer, sous l’impulsion de l’Esprit consolateur, l’œuvre même du Christ, venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité, pour sauver, non pour condamner, pour servir, non pour être servi [2].





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Message par Francesco Mer 27 Avr 2011 - 5:28

1. De nos jours, saisi d’admiration devant ses propres découvertes et son propre pouvoir, le genre humain s’interroge cependant, souvent avec angoisse, sur l’évolution présente du monde, sur la place et le rôle de l’homme dans l’univers, sur le sens de ses efforts individuels et collectifs, enfin sur la destinée ultime des choses et de l’humanité. Aussi le Concile, témoin et guide de la foi de tout le Peuple de Dieu rassemblé par le Christ, ne saurait donner une preuve plus parlante de solidarité, de respect et d’amour à l’ensemble de la famille humaine, à laquelle ce peuple appartient, qu’en dialoguant avec elle sur ces différents problèmes, en les éclairant à la lumière de l’Évangile, et en mettant à la disposition du genre humain la puissance salvatrice que l’Église, conduite par l’Esprit Saint, reçoit de son Fondateur. C’est en effet l’homme qu’il s’agit de sauver, la société humaine qu’il faut renouveler. C’est donc l’homme, l’homme considéré dans son unité et sa totalité, l’homme, corps et âme, cœur et conscience, pensée et volonté, qui constituera l’axe de tout notre exposé.

D'ou l'importance pour l'église du dialogue avec nos freres musulmans,boudhistes,etc...


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Message par Francesco Lun 2 Mai 2011 - 2:37

EXPOSÉ PRÉLIMINAIRE :
La condition humaine dans le monde d’aujourd’hui

4. Espoirs et angoisses

1. Pour mener à bien cette tâche, l’Église a le devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Évangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relations réciproques. Il importe donc de connaître et de comprendre ce monde dans lequel nous vivons, ses attentes, ses aspirations, son caractère souvent dramatique. Voici, tels qu’on peut les esquisser, quelques-uns des traits fondamentaux du monde actuel.

2. Le genre humain vit aujourd’hui un âge nouveau de son histoire, caractérisé par des changements profonds et rapides qui s’étendent peu à peu à l’ensemble du globe. Provoqués par l’homme, par son intelligence et son activité créatrice, ils rejaillissent sur l’homme lui-même, sur ses jugements, sur ses désirs, individuels et collectifs, sur ses manières de penser et d’agir, tant à l’égard des choses qu’à l’égard de ses semblables. À tel point que l’on peut déjà parler d’une véritable métamorphose sociale et culturelle dont les effets se répercutent jusque sur la vie religieuse.

3. Comme en toute crise de croissance, cette transformation ne va pas sans de sérieuses difficultés. Ainsi, tandis que l’homme étend si largement son pouvoir, il ne parvient pas toujours à s’en rendre maître. S’efforçant de pénétrer plus avant les ressorts les plus secrets de son être, il apparaît souvent plus incertain de lui-même. Il découvre peu à peu, et avec plus de clarté, les lois de la vie sociale, mais il hésite sur les orientations qu’il faut lui imprimer.

4. Jamais le genre humain n’a regorgé de tant de richesses, de tant de possibilités, d’une telle puissance économique, et pourtant une part considérable des habitants du globe sont encore tourmentés par la faim et la misère, et des multitudes d’êtres humains ne savent ni lire ni écrire. Jamais les hommes n’ont eu comme aujourd’hui un sens aussi vif de la liberté, mais, au même moment, surgissent de nouvelles formes d’asservissement social et psychique. Alors que le monde prend une conscience si forte de son unité, de la dépendance réciproque de tous dans une nécessaire solidarité, le voici violemment écartelé par l’opposition de forces qui se combattent : d’âpres dissensions politiques, sociales, économiques, raciales et idéologiques persistent encore, et le danger demeure d’une guerre capable de tout anéantir. L’échange des idées s’accroît ; mais les mots mêmes qui servent à exprimer des concepts de grande importance revêtent des acceptions fort différentes suivant la diversité des idéologies. Enfin, on recherche avec soin une organisation temporelle plus parfaite, sans que ce progrès s’accompagne d’un égal essor spirituel.

5. Marqués par une situation si complexe, un très grand nombre de nos contemporains ont beaucoup de mal à discerner les valeurs permanentes ; en même temps, ils ne savent comment les harmoniser avec les découvertes récentes. Une inquiétude les saisit et ils s’interrogent avec un mélange d’espoir et d’angoisse sur l’évolution actuelle du monde. Celle-ci jette à l’homme un défi ; mieux, elle l’oblige à répondre.

5. Une mutation profonde

1. L’ébranlement actuel des esprits et la transformation des conditions de vies sont liés à une mutation d’ensemble qui tend à la prédominance, dans la formation de l’esprit, des sciences mathématiques, naturelles ou humaines et, dans l’action, de la technique, fille des sciences. Cet esprit scientifique a façonné d’une manière différente du passé l’état culturel et les modes de penser. Les progrès de la technique vont jusqu’à transformer la face de la terre et, déjà, se lancent à la conquête de l’espace.

2. Sur le temps aussi, l’intelligence humaine étend en quelque sorte son empire : pour le passé, par la connaissance historique ; pour l’avenir, par la prospective et la planification. Les progrès des sciences biologiques, psychologiques et sociales ne permettent pas seulement à l’homme de se mieux connaître, mais lui fournissent aussi le moyen d’exercer une influence directe sur la vie des sociétés par l’emploi de techniques appropriées. En même temps, le genre humain se préoccupe, et de plus en plus, de prévoir désormais son propre développement démographique et de le contrôler.

3. Le mouvement même de l’histoire devient si rapide que chacun a peine à le suivre. Le destin de la communauté humaine devient un, et il ne se diversifie plus comme en autant d’histoires séparées entre elles. Bref, le genre humain passe d’une notion plutôt statique de l’ordre des choses à une conception plus dynamique et évolutive : de là naît, immense, une problématique nouvelle, qui provoque à de nouvelles analyses et à de nouvelles synthèses.

6. Changements dans l’ordre social

1. Du même coup, il se produit des changements, de jour en jour plus importants, dans les communautés locales traditionnelles (familles patriarcales, clans, tribus, villages), dans les différents groupes et les rapports sociaux.

2. Une société de type industriel s’étend peu à peu, amenant certains pays à une économie d’opulence et transformant radicalement les conceptions et les conditions séculaires de la vie en société. De la même façon, la civilisation urbaine et l’attirance qu’elle provoque s’intensifient, soit par la multiplication des villes et de leurs habitants, soit par l’expansion du mode de vie urbain au monde rural.

3. Des moyens de communication sociale nouveaux, et sans cesse plus perfectionnés, favorisent la connaissance des événements et la diffusion extrêmement rapide et universelle des idées et des sentiments, suscitant ainsi de nombreuses réactions en chaîne.

4. On ne doit pas négliger non plus le fait que tant d’hommes poussés par diverses raisons à émigrer sont amenés à changer de mode de vie.

5. En somme, les relations de l’homme avec ses semblables se multiplient sans cesse, tandis que la « socialisation » elle-même entraîne à son tour de nouveaux liens, sans favoriser toujours pour autant, comme il le faudrait, le plein développement de la personne et des relations vraiment personnelles, c’est-à-dire la « personnalisation ».

6. En vérité, cette évolution se manifeste surtout dans les nations qui bénéficient déjà des avantages du progrès économique et technique ; mais elle est aussi à l’œuvre chez les peuples en voie de développement qui souhaitent procurer à leurs pays les bienfaits de l’industrialisation et de l’urbanisation. Ces peuples, surtout s’ils sont attachés à des traditions plus anciennes, ressentent en même temps le besoin d’exercer leur liberté d’une façon plus adulte et plus personnelle.

7. Changements psychologiques, moraux, religieux

1. La transformation des mentalités et des structures conduit souvent à une remise en question des valeurs reçues, tout particulièrement chez les jeunes : fréquemment, ils ne supportent pas leur état ; bien plus, l’inquiétude en fait des révoltés, tandis que, conscients de leur importance dans la vie sociale, ils désirent y prendre au plus tôt leurs responsabilités. C’est pourquoi il n’est pas rare que parents et éducateurs éprouvent des difficultés croissantes dans l’accomplissement de leur tâche.

2. Les cadres de vie, les lois, les façons de penser et de sentir hérités du passé ne paraissent pas toujours adaptés à l’état actuel des choses : d’où le désarroi du comportement et même des règles de conduite.

3. Les conditions nouvelles affectent enfin la vie religieuse elle-même. D’une part, l’essor de l’esprit critique la purifie d’une conception magique du monde et des survivances superstitieuses, et exige une adhésion de plus en plus personnelle et active à la foi, nombreux sont ainsi ceux qui parviennent à un sens plus vivant de Dieu. D’autre part, des multitudes sans cesse plus denses s’éloignent en pratique de la religion. Refuser Dieu ou la religion, ne pas s’en soucier, n’est plus, comme en d’autres temps, un fait exceptionnel, lot de quelques individus : aujourd’hui en effet on présente volontiers un tel comportement comme une exigence du progrès scientifique ou de quelque nouvel humanisme. En de nombreuses régions, cette négation ou cette indifférence ne s’expriment pas seulement au niveau philosophique ; elles affectent aussi, et très largement, la littérature, l’art, l’interprétation des sciences humaines et de l’histoire, la législation elle-même : d’où le désarroi d’un grand nombre.

8. Les déséquilibres du monde moderne

1. Une évolution aussi rapide, accomplie souvent sans ordre et, plus encore, la prise de conscience de plus en plus aiguë des écartèlements dont souffre le monde, engendrent ou accroissent contradictions et déséquilibres.

2. Au niveau de la personne elle-même, un déséquilibre se fait assez souvent jour entre l’intelligence pratique moderne et une pensée spéculative qui ne parvient pas à dominer la somme de ses connaissances ni à les ordonner en des synthèses satisfaisantes. Déséquilibre également entre la préoccupation de l’efficacité concrète et les exigences de la conscience morale, et, non moins fréquemment, entre les conditions collectives de l’existence et les requêtes d’une pensée personnelle, et aussi, de la contemplation. Déséquilibre enfin entre la spécialisation de l’activité humaine et une vue générale des choses.

3. Tensions au sein de la famille, dues soit à la pesanteur des conditions démographiques, économiques et sociales, soit aux conflits des générations successives, soit aux nouveaux rapports sociaux qui s’établissent entre hommes et femmes.

4. D’importants déséquilibres naissent aussi entre les races, entre les diverses catégories sociales, entre pays riches, moins riches et pauvres ; enfin entre les institutions internationales nées de l’aspiration des peuples à la paix et les propagandes idéologiques ou les égoïsmes collectifs qui se manifestent au sein des nations et des autres groupes.

5. Défiances et inimitiés mutuelles, conflits et calamités s’ensuivent, dont l’homme lui-même est à la fois cause et victime.

9. Les aspirations de plus en plus universelles du genre humain

1. Pendant ce temps, la conviction grandit que le genre humain peut et doit non seulement renforcer sans cesse sa maîtrise sur la création, mais qu’il peut et doit en outre instituer un ordre politique, social et économique qui soit toujours plus au service de l’homme, et qui permette à chacun, à chaque groupe, d’affirmer sa dignité propre et de la développer.

2. D’où les âpres revendications d’un grand nombre qui, prenant nettement conscience des injustices et de l’inégalité de la distribution des biens, s’estiment lésés. Les nations en voie de développement, comme celles qui furent récemment promues à l’indépendance, veulent participer aux bienfaits de la civilisation moderne tant au plan économique qu’au plan politique, et jouer librement leur rôle sur la scène du monde. Et pourtant, entre ces nations et les autres nations plus riches, dont le développement est plus rapide, l’écart ne fait que croître, et, en même temps, très souvent, la dépendance, y compris la dépendance économique. Les peuples de la faim interpellent les peuples de l’opulence. Les femmes, là où elles ne l’ont pas encore obtenue, réclament la parité de droit et de fait avec les hommes. Les travailleurs, ouvriers et paysans, veulent non seulement gagner leur vie, mais développer leur personnalité par leur travail, mieux, participer à l’organisation de la vie économique, sociale, politique et culturelle. Pour la première fois dans l’histoire, l’humanité entière n’hésite plus à penser que les bienfaits de la civilisation peuvent et doivent réellement s’étendre à tous les peuples.

3. Mais sous toutes ces revendications se cache une aspiration plus profonde et plus universelle : les personnes et les groupes ont soif d’une vie pleine et libre, d’une vie digne de l’homme, qui mette à leur propre service toutes les immenses possibilités que leur offre le monde actuel. Quant aux nations, elles ne cessent d’accomplir de courageux efforts pour parvenir à une certaine forme de communauté universelle.

4. Ainsi le monde moderne apparaît à la fois comme puissant et faible, capable du meilleur et du pire, et le chemin s’ouvre devant lui de la liberté ou de la servitude, du progrès ou de la régression, de la fraternité ou de la haine. D’autre part, l’homme prend conscience que de lui dépend la bonne orientation des forces qu’il a mises en mouvement et qui peuvent l’écraser ou le servir. C’est pourquoi il s’interroge lui-même.

10. Les interrogations profondes du genre humain

1. En vérité, les déséquilibres qui travaillent le monde moderne sont liés à un déséquilibre plus fondamental qui prend racine dans le cœur même de l’homme. C’est en l’homme lui-même, en effet, que de nombreux éléments se combattent. D’une part, comme créa ture, il fait l’expérience de ses multiples limites ; d’autre part, il se sent illimité dans ses désirs et appelé à une vie supérieure. Sollicité de tant de façons, il est sans cesse contraint de choisir et de renoncer. Pire : faible et pécheur, il accomplit souvent ce qu’il ne veut pas et n’accomplit point ce qu’il voudrait [3]. En somme, c’est en lui-même qu’il souffre division, et c’est de là que naissent au sein de la société tant et de si grandes discordes. Beaucoup, il est vrai, dont la vie est imprégnée de matérialisme pratique, sont détournés par là d’une claire perception de cette situation dramatique ; ou bien, accablés par la misère, ils se trouvent empêchés d’y prêter attention. D’autres, en grand nombre, pensent trouver leur tranquillité dans les diverses explications du monde qui leur sont proposées. Certains attendent du seul effort de l’homme la libération véritable et plénière du genre humain et ils se persuadent que le règne à venir de l’homme sur la terre comblera tous les vœux de son cœur. Il en est d’autres qui, désespérant du sens de la vie, exaltent les audacieux qui, jugeant l’existence humaine dénuée par elle-même de toute signification, tentent de lui donner, par leur seule inspiration, toute sa signification. Néanmoins, le nombre croît de ceux qui, face à l’évolution présente du monde, se posent les questions les plus fondamentales ou les perçoivent avec une acuité nouvelle. Qu’est-ce que l’homme ? Que signifient la souffrance, le mal, la mort, qui subsistent malgré tant de progrès ? À quoi bon ces victoires payées d’un si grand prix ? Que peut apporter l’homme à la société ? Que peut-il en attendre ? Qu’adviendra-t-il après cette vie ?

2. L’Église, quant à elle, croit que le Christ, mort et ressuscité pour tous [4], offre à l’homme, par son Esprit, lumière et forces pour lui permettre de répondre à sa très haute vocation. Elle croit qu’il n’est pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes par lequel ils doivent être sauvés [5]. Elle croit aussi que la clé, le centre et la fin de toute histoire humaine se trouve en son Seigneur et Maître. Elle affirme en outre que, sous tous les changements, bien des choses demeurent qui ont leur fondement ultime dans le Christ, le même hier, aujourd’hui et à jamais [6]. C’est pourquoi, sous la lumière du Christ, image du Dieu invisible, premier-né de toute créature [7], le Concile se propose de s’adresser à tous, pour éclairer le mystère de l’homme et pour aider le genre humain à découvrir la solution des problèmes majeurs de notre temps.



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Message par Francesco Mer 4 Mai 2011 - 2:49

Première partie :
L’Église et la vocation humaine



11. Répondre aux appels de l’Esprit

1. Mû par la foi, se sachant conduit par l’Esprit du Seigneur qui remplit l’univers, le Peuple de Dieu s’efforce de discerner dans les événements, les exigences et les requêtes de notre temps, auxquels il participe avec les autres hommes, quels sont les signes véritables de la présence ou du dessein de Dieu. La foi, en effet, éclaire toutes choses d’une lumière nouvelle et nous fait connaître la volonté divine sur la vocation intégrale de l’homme, orientant ainsi l’esprit vers des solutions pleinement humaines.

2. Le Concile se propose avant tout de juger à cette lumière les valeurs les plus prisées par nos contemporains et de les relier à leur source divine. Car ces valeurs, dans la mesure où elles procèdent du génie humain, qui est un don de Dieu, sont fort bonnes ; mais il n’est pas rare que la corruption du cœur humain les détourne de l’ordre requis : c’est pourquoi elles ont besoin d’être purifiées.

3. Que pense l’Église de l’homme ? Quelles orientations semblent devoir être proposées pour l’édification de la société contemporaine ? Quelle signification dernière donner à l’activité de l’homme dans l’univers ? Ces questions réclament une réponse. La réciprocité des services que sont appelés à se rendre le Peuple de Dieu et le genre humain, dans lequel ce peuple est inséré, apparaîtra alors avec plus de netteté : ainsi se manifestera le caractère religieux et, par le fait même, souverainement humain de la mission de l’Église.





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Message par Francesco Ven 6 Mai 2011 - 0:20

CHAPITRE PREMIER :
La dignité de la personne humaine

12. L’homme à l’image de Dieu

1. Croyants et incroyants sont généralement d’accord sur ce point : tout sur terre doit être ordonné à l’homme comme à son centre et à son sommet.

2. Mais qu’est-ce que l’homme ? Sur lui-même, il a proposé et propose encore des opinions multiples, diverses et même opposées, suivant lesquelles, souvent, ou bien il s’exalte lui-même comme une norme absolue, ou bien il se rabaisse jusqu’au désespoir : d’où ses doutes et ses angoisses. Ces difficultés, l’Église les ressent à fond. Instruite par la Révélation divine, elle peut y apporter une réponse, où se trouve dessinée la condition véritable de l’homme, où sont mises au clair ses faiblesses, mais où peuvent en même temps être justement reconnues sa dignité et sa vocation.

3. La Bible, en effet, enseigne que l’homme a été créé « à l’image de Dieu », capable de connaître et d’aimer son Créateur, qu’il a été constitué seigneur de toutes les créatures terrestres [8] pour les dominer et pour s’en servir, en glorifiant Dieu [9]. « Qu’est-ce donc l’homme, pour que tu te souviennes de lui ? ou le fils de l’homme pour que tu te soucies de lui ? À peine le fis-tu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et de splendeur : tu l’établis sur l’œuvre de tes mains, tout fut mis par toi sous ses pieds » (Ps 8, 5-7).

4. Mais Dieu n’a pas créé l’homme solitaire : dès l’origine, « il les créa homme et femme » (Gn 1, 27). Cette société de l’homme et de la femme est l’expression première de la communion des personnes. Car l’homme, de par sa nature profonde, est un être social, et, sans relations avec autrui, il ne peut vivre ni épanouir ses qualités.

5. C’est pourquoi Dieu, lisons-nous encore dans le Bible, « regarda tout ce qu’il avait fait et le jugea très bon » (Gn 1, 31).

13. Le péché

1. Établi par Dieu dans un état de justice, l’homme, séduit par le Malin, dès le début de l’histoire, a abusé de sa liberté, en se dressant contre Dieu et en désirant parvenir à sa fin hors de Dieu. Ayant connu Dieu, « ils ne lui ont pas rendu gloire comme à un Dieu (...) mais leur cœur inintelligent s’est enténébré », et ils ont servi la créature de préférence au Créateur [10]. Ce que la Révélation divine nous découvre ainsi, notre propre expérience le confirme. Car l’homme, s’il regarde au-dedans de son cœur, se découvre enclin aussi au mal, submergé de multiples maux qui ne peuvent provenir de son Créateur, qui est bon. Refusant souvent de reconnaître Dieu comme son principe, l’homme a, par le fait même, brisé l’ordre qui l’orientait à sa fin dernière, et, en même temps, il a rompu toute harmonie, soit par rapport à lui-même, soit par rapport aux autres hommes et à toute la création.

2. C’est donc en lui-même que l’homme est divisé. Voici que toute la vie des hommes, individuelle et collective, se manifeste comme une lutte, combien dramatique, entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres. Bien plus, voici que l’homme se découvre incapable par lui-même de vaincre effectivement les assauts du mal ; et ainsi chacun se sent comme chargé de chaînes. Mais le Seigneur en personne est venu pour restaurer l’homme dans sa liberté et sa force, le rénovant intérieurement et jetant dehors le prince de ce monde (cf. Jn 12, 31), qui le retenait dans l’esclavage du péché [11]. Quant au péché, il amoindrit l’homme lui-même en l’empêchant d’atteindre sa plénitude.

Dans la lumière de cette Révélation, la sublimité de la vocation humaine, comme la profonde misère de l’homme, dont tous font l’expérience, trouvent leur signification ultime.

14. Constitution de l’homme

1. Corps et âme, mais vraiment un, l’homme est, dans sa condition corporelle même, un résumé de l’univers des choses qui trouvent ainsi, en lui, leur sommet, et peuvent librement louer leur Créateur [12]. Il est donc interdit à l’homme de dédaigner la vie corporelle. Mais, au contraire, il doit estimer et respecter son corps qui a été créé par Dieu et qui doit ressusciter au dernier jour. Toutefois, blessé par le péché, il ressent en lui les révoltes du corps. C’est donc la dignité même de l’homme qui exige de lui qu’il glorifie Dieu dans son corps [13], sans le laisser asservir aux mauvais penchants de son cœur.

2. En vérité, l’homme ne se trompe pas lorsqu’il se reconnaît supérieur aux éléments matériels et qu’il se considère comme irréductible, soit à une simple parcelle de la nature, soit à un élément anonyme de la cité humaine. Par son intériorité, il dépasse en effet l’univers des choses : c’est à ces profondeurs qu’il revient lorsqu’il fait retour en lui-même où l’attend ce Dieu qui scrute les cœurs [14] et où il décide personnellement de son propre sort sous le regard de Dieu. Ainsi, lorsqu’il reconnaît en lui une âme spirituelle et immortelle, il n’est pas le jouet d’une création imaginaire qui s’expliquerait seulement par les conditions physiques et sociales ; bien au contraire, il atteint le tréfonds même de la réalité.

15. Dignité de l’intelligence, vérité et sagesse

1. Participant à la lumière de l’intelligence divine, l’homme a raison de penser que, par sa propre intelligence, il dépasse l’univers des choses. Sans doute son génie au long des siècles, par une application laborieuse, a fait progresser les sciences empiriques, les techniques et les arts libéraux. De nos jours il a obtenu des victoires hors pair, notamment dans la découverte et la conquête du monde matériel. Toujours cependant il a cherché et trouvé une vérité plus profonde. Car l’intelligence ne se borne pas aux seuls phénomènes ; elle est capable d’atteindre, avec une authentique certitude, la réalité intelligible, en dépit de la part d’obscurité et de faiblesse que laisse en elle le péché.

2. Enfin, la nature intelligente de la personne trouve et doit trouver sa perfection dans la sagesse. Celle-ci attire avec force et douceur l’esprit de l’homme vers la recherche et l’amour du vrai et du bien ; l’homme qui s’en nourrit est conduit du monde visible à l’invisible.

3. Plus que toute autre, notre époque a besoin d’une telle sagesse, pour humaniser ses propres découvertes, quelles qu’elles soient. L’avenir du monde serait en péril si elle ne savait pas se donner des sages. Pourquoi ne pas ajouter cette remarque : de nombreux pays, pauvres en biens matériels, mais riches en sagesse, pourront puissamment aider les autres sur ce point.

4. Par le don de l’Esprit, l’homme parvient, dans la foi, à contempler et à goûter le mystère de la volonté divine [15].

16. Dignité de la conscience morale

1. Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela ». Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera [16]. La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre [17]. C’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain [18]. Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité. Toutefois, il arrive souvent que la conscience s’égare, par suite d’une ignorance invincible, sans perdre pour autant sa dignité. Ce que l’on ne peut dire lorsque l’homme se soucie peu de rechercher le vrai et le bien et lorsque l’habitude du péché rend peu à peu sa conscience presque aveugle.

17. Grandeur de la liberté Mais c’est toujours librement que l’homme se tourne vers le bien. Cette liberté, nos contemporains l’estiment grandement et ils la poursuivent avec ardeur. Et ils ont raison. Souvent cependant ils la chérissent d’une manière qui n’est pas droite, comme la licence de faire n’importe quoi, pourvu que cela plaise, même le mal. Mais la vraie liberté est en l’homme un signe privilégié de l’image divine. Car Dieu a voulu le laisser à son propre conseil [19] pour qu’il puisse de lui-même chercher son Créateur et, en adhérant librement à lui, s’achever ainsi dans une bienheureuse plénitude. La dignité de l’homme exige donc de lui qu’il agisse selon un choix conscient et libre, mû et déterminé par une conviction personnelle et non sous le seul effet de poussées instinctives ou d’une contrainte extérieure. L’homme parvient à cette dignité lorsque, se délivrant de toute servitude des passions, par le choix libre du bien, il marche vers sa destinée et prend soin de s’en procurer réellement les moyens par son ingéniosité. Ce n’est toutefois que par le secours de la grâce divine que la liberté humaine, blessée par le péché, peut s’ordonner à Dieu d’une manière effective et intégrale. Et chacun devra rendre compte de sa propre vie devant le tribunal de Dieu, selon le bien ou le mal accompli [20].

18. Le mystère de la mort

1. C’est en face de la mort que l’énigme de la condition humaine atteint son sommet. L’homme n’est pas seulement tourmenté par la souffrance et la déchéance progressive de son corps, mais plus encore, par la peur d’une destruction définitive. Et c’est par une inspiration juste de son cœur qu’il rejette et refuse cette ruine totale et ce définitif échec de sa personne. Le germe d’éternité qu’il porte en lui, irréductible à la seule matière, s’insurge contre la mort. Toutes les tentatives de la technique, si utiles qu’elles soient, sont impuissantes à calmer son anxiété : car le prolongement de la vie que la biologie procure ne peut satisfaire ce désir d’une vie ultérieure, invinciblement ancré dans son cœur.

2. Mais si toute imagination ici défaille, l’Église, instruite par la Révélation divine, affirme que Dieu a créé l’homme en vue d’une fin bienheureuse, au-delà des misères du temps présent. De plus, la foi chrétienne enseigne que cette mort corporelle, à laquelle l’homme aurait été soustrait s’il n’avait pas péché [21], sera un jour vaincue, lorsque le salut, perdu par la faute de l’homme, lui sera rendu par son tout-puissant et miséricordieux Sauveur. Car Dieu a appelé et appelle l’homme à adhérer à lui de tout son être, dans la communion éternelle d’une vie divine inaltérable. Cette victoire, le Christ l’a acquise en ressuscitant [22], libérant l’homme de la mort par sa propre mort. À partir des titres sérieux qu’elle offre à l’examen de tout homme, la foi est ainsi en mesure de répondre à son interrogation angoissée sur son propre avenir. Elle nous offre en même temps la possibilité d’une communion dans le Christ avec nos frères bien-aimés qui sont déjà morts, en nous donnant l’espérance qu’ils ont trouvé près de Dieu la véritable vie.

19. Formes et racines de l’athéisme

1. L’aspect le plus sublime de la dignité humaine se trouve dans cette vocation de l’homme à communier avec Dieu. Cette invitation que Dieu adresse à l’homme de dialoguer avec Lui commence avec l’existence humaine. Car, si l’homme existe, c’est que Dieu l’a créé par amour et, par amour, ne cesse de lui donner l’être ; et l’homme ne vit pleinement selon la vérité que s’il reconnaît librement cet amour et s’abandonne à son Créateur. Mais beaucoup de nos contemporains ne perçoivent pas du tout ou même rejettent explicitement le rapport intime et vital qui unit l’homme à Dieu : à tel point que l’athéisme compte parmi les faits les plus graves de ce temps et doit être soumis à un examen très attentif.

2. On désigne sous le nom d’athéisme des phénomènes entre eux très divers. En effet, tandis que certains athées nient Dieu expressément, d’autres pensent que l’homme ne peut absolument rien affirmer de lui. D’autres encore traitent le problème de Dieu de telle façon que ce problème semble dénué de sens. Beaucoup outrepassant indûment les limites des sciences positives, ou bien prétendent que la seule raison scientifique explique tout, ou bien, à l’inverse, ne reconnaissent comme définitive absolument aucune vérité. Certains font un tel cas de l’homme que la foi en Dieu s’en trouve comme énervée, plus préoccupés qu’ils sont, semble-t-il, d’affirmer l’homme que de nier Dieu. D’autres se représentent Dieu sous un jour tel que, en le repoussant, ils refusent un Dieu qui n’est en aucune façon celui de l’Évangile. D’autres n’abordent même pas le problème de Dieu : ils paraissent étrangers à toute inquiétude religieuse et ne voient pas pourquoi ils se soucieraient encore de religion. L’athéisme, en outre, naît souvent, soit d’une protestation révoltée contre le mal dans le monde, soit du fait que l’on attribue à tort à certains idéaux humains un tel caractère d’absolu qu’on en vient à les prendre pour Dieu. La civilisation moderne elle-même, non certes par son essence même, mais parce qu’elle se trouve trop engagée dans les réalités terrestres, peut rendre souvent plus difficile l’approche de Dieu.

3. Certes, ceux qui délibérément s’efforcent d’éliminer Dieu de leur cœur et d’écarter les problèmes religieux, en ne suivant pas le « dictamen » de leur conscience, ne sont pas exempts de faute. Mais les croyants eux-mêmes portent souvent à cet égard une certaine responsabilité. Car l’athéisme, considéré dans son ensemble, ne trouve pas son origine en lui-même ; il la trouve en diverses causes, parmi lesquelles il faut compter une réaction critique en face des religions et spécialement, en certaines régions, en face de la religion chrétienne. C’est pourquoi, dans cette genèse de l’athéisme, les croyants peuvent avoir une part qui n’est pas mince, dans la mesure où, par la négligence dans l’éducation de leur foi, par des présentations trompeuses de la doctrine et aussi par des défaillances de leur vie religieuse, morale et sociale, on peut dire d’eux qu’ils voilent l’authentique visage de Dieu et de la religion plus qu’ils ne le révèlent.

20. L’athéisme systématique

1. Souvent l’athéisme moderne présente aussi une forme systématique, qui, abstraction faite des autres causes, pousse le désir d’autonomie humaine à un point tel qu’il fait obstacle à toute dépendance à l’égard de Dieu. Ceux qui professent un athéisme de cette sorte soutiennent que la liberté consiste en ceci que l’homme est pour lui-même sa propre fin, le seul artisan et le démiurge de sa propre histoire. Ils prétendent que cette vue des choses est incompatible avec la reconnaissance d’un Seigneur, auteur et fin de toutes choses ou, au moins, qu’elle rend cette affirmation tout à fait superflue. Cette doctrine peut se trouver renforcée par le sentiment de puissance que le progrès technique actuel confère à l’homme.

2. Parmi les formes de l’athéisme contemporain, on ne doit pas passer sous silence celle qui attend la libération de l’homme surtout de sa libération économique et sociale. À cette libération s’opposerait, par sa nature même, la religion, dans la mesure, où, érigeant l’espérance de l’homme sur le mirage d’une vie future, elle le détournerait d’édifier la cité terrestre. C’est pourquoi les tenants d’une telle doctrine, là où ils deviennent les maîtres du pouvoir, attaquent la religion avec violence, utilisant pour la diffusion de l’athéisme, surtout en ce qui regarde l’éducation de la jeunesse, tous les moyens de pression dont le pouvoir public dispose.

21. L’attitude de l’Église en face de l’athéisme

1. L’Église, fidèle à la fois à Dieu et à l’homme, ne peut cesser de réprouver avec douleur et avec la plus grande fermeté, comme elle l’a fait dans le passé [23], ces doctrines et ces manières de faire funestes qui contredisent la raison et l’expérience commune et font déchoir l’homme de sa noblesse native.

2. Elle s’efforce cependant de saisir dans l’esprit des athées les causes cachées de la négation de Dieu et, bien consciente de la gravité des problèmes que l’athéisme soulève, poussée par son amour pour tous les hommes, elle estime qu’il lui faut soumettre ces motifs à un examen sérieux et approfondi.

3. L’Église tient que la reconnaissance de Dieu ne s’oppose en aucune façon à la dignité de l’homme, puisque cette dignité trouve en Dieu lui-même ce qui la fonde et ce qui l’achève. Car l’homme a été établi en société, intelligent et libre, par Dieu son Créateur. Mais surtout, comme fils, il est appelé à l’intimité même de Dieu et au partage de son propre bonheur. L’Église enseigne, en outre, que l’espérance eschatologique ne diminue pas l’importance des tâches terrestres, mais en soutient bien plutôt l’accomplissement par de nouveaux motifs. À l’opposé, lorsque manquent le support divin et l’espérance de la vie éternelle, la dignité de l’homme subit une très grave blessure, comme on le voit souvent aujourd’hui, et l’énigme de la vie et de la mort, de la faute et de la souffrance reste sans solution : ainsi, trop souvent, les hommes s’abîment dans le désespoir.

4. Pendant ce temps, tout homme demeure à ses propres yeux une question insoluble qu’il perçoit confusément. À certaines heures, en effet, principalement à l’occasion des grands événements de la vie, personne ne peut totalement éviter ce genre d’interrogation. Dieu seul peut pleinement y répondre et d’une manière irrécusable, lui qui nous invite à une réflexion plus profonde et à une recherche plus humble.

5. Quant au remède à l’athéisme, on doit l’attendre d’une part d’une présentation adéquate de la doctrine, d’autre part de la pureté de vie de l’Église et de ses membres. C’est à l’Église qu’il revient en effet de rendre présents et comme visibles Dieu le Père et son Fils incarné, en se renouvelant et en se purifiant sans cesse [24], sous la conduite de l’Esprit Saint. Il y faut surtout le témoignage d’une foi vivante et adulte, c’est-à-dire d’une foi formée à reconnaître lucidement les difficultés et capable de les surmonter. D’une telle foi, de très nombreux martyrs ont rendu et continuent de rendre un éclatant témoignage. Sa fécondité doit se manifester en pénétrant toute la vie des croyants, y compris leur vie profane, et en les entraînant à la justice et à l’amour, surtout au bénéfice des déshérités. Enfin ce qui contribue le plus à révéler la présence de Dieu, c’est l’amour fraternel des fidèles qui travaillent d’un cœur unanime pour la foi de l’Évangile [25] et qui se présentent comme un signe d’unité.

6. L’Église, tout en rejetant absolument l’athéisme, proclame toutefois, sans arrière-pensée, que tous les hommes, croyants et incroyants, doivent s’appliquer à la juste construction de ce monde, dans lequel ils vivent ensemble : ce qui, assurément, n’est possible que par un dialogue loyal et prudent. L’Église déplore donc les différences de traitement que certaines autorités civiles établissent injustement entre croyants et incroyants, au mépris des droits fondamentaux de la personne. Pour les croyants, elle réclame la liberté effective et la possibilité d’élever aussi dans ce monde le temple de Dieu. Quant aux athées, elle les invite avec humanité à examiner en toute objectivité l’Évangile du Christ.

7. Car l’Église sait parfaitement que son message est en accord avec le fond secret du cœur humain quand elle défend la dignité de la vocation de l’homme, et rend ainsi l’espoir à ceux qui n’osent plus croire à la grandeur de leur destin. Ce message, loin de diminuer l’homme, sert à son progrès en répandant lumière, vie et liberté et, en dehors de lui, rien ne peut combler le cœur humain : « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur ne connaît aucun répit jusqu’à ce qu’il trouve son repos en toi [26]. »

22. Le Christ, homme nouveau

1. En réalité, le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné. Adam, en effet, le premier homme, était la figure de celui qui devait venir [27], le Christ Seigneur. Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. Il n’est donc pas surprenant que les vérités ci-dessus trouvent en lui leur source et atteignent en lui leur point culminant.

2. « Image du Dieu invisible » (Col 1, 15) [28], il est l’Homme parfait qui a restauré dans la descendance d’Adam la ressemblance divine, altérée dès le premier péché. Parce qu’en lui la nature humaine a été assumée, non absorbée [29], par le fait même, cette nature a été élevée en nous aussi à une dignité sans égale. Car, par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme [30], il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché [31].

3. Agneau innocent, par son sang librement répandu, il nous a mérité la vie ; et, en lui, Dieu nous a réconciliés avec lui-même et entre nous [32], nous arrachant à l’esclavage du diable et du péché. En sorte que chacun de nous peut dire avec l’Apôtre : le Fils de Dieu « m’a aimé et il s’est livré lui-même pour moi » (Ga 2, 20). En souffrant pour nous, il ne nous a pas simplement donné l’exemple, afin que nous marchions sur ses pas [33], mais il a ouvert une route nouvelle : si nous la suivons, la vie et la mort deviennent saintes et acquièrent un sens nouveau.

4. Devenu conforme à l’image du Fils, premier-né d’une multitude de frères [34], le chrétien reçoit « les prémices de l’Esprit » (Rm 8, 23), qui le rendent capable d’accomplir la loi nouvelle de l’amour [35]. Par cet Esprit, « gage de l’héritage » (Ep 1, 14), c’est tout l’homme qui est intérieurement renouvelé, dans l’attente de « la rédemption du corps » (Rm 8, 23) : « Si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts demeure en vous, celui qui a ressuscité Jésus Christ d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels, par son Esprit qui habite en vous (Rm 8, 11) [36]. Certes, pour un chrétien, c’est une nécessité et un devoir de combattre le mal au prix de nombreuses tribulations et de subir la mort. Mais, associé au mystère pascal, devenant conforme au Christ dans la mort, fortifié par l’espérance, il va au-devant de la résurrection [37].

5. Et cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ, mais bien pour tous les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement, agit la grâce [38]. En effet, puisque le Christ est mort pour tous [39] et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal.

6. Telle est la qualité et la grandeur du mystère de l’homme, ce mystère que la Révélation chrétienne fait briller aux yeux des croyants. C’est donc par le Christ et dans le Christ que s’éclaire l’énigme de la douleur et de la mort qui, hors de son Évangile, nous écrase. Le Christ est ressuscité ; par sa mort, il a vaincu la mort, et il nous a abondamment donné la vie [40] pour que, devenus fils dans le Fils, nous clamions dans l’Esprit : Abba, Père [41]!



Dieu seul suffit,l'aimer,le suivre et faire sa volonté.
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Message par Francesco Ven 6 Mai 2011 - 0:31

Comme ce texte est beau et explique bien la vérité:
13. Le péché

1. Établi par Dieu dans un état de justice, l’homme, séduit par le Malin, dès le début de l’histoire, a abusé de sa liberté, en se dressant contre Dieu et en désirant parvenir à sa fin hors de Dieu. Ayant connu Dieu, « ils ne lui ont pas rendu gloire comme à un Dieu (...) mais leur cœur inintelligent s’est enténébré », et ils ont servi la créature de préférence au Créateur [10]. Ce que la Révélation divine nous découvre ainsi, notre propre expérience le confirme. Car l’homme, s’il regarde au-dedans de son cœur, se découvre enclin aussi au mal, submergé de multiples maux qui ne peuvent provenir de son Créateur, qui est bon. Refusant souvent de reconnaître Dieu comme son principe, l’homme a, par le fait même, brisé l’ordre qui l’orientait à sa fin dernière, et, en même temps, il a rompu toute harmonie, soit par rapport à lui-même, soit par rapport aux autres hommes et à toute la création.

2. C’est donc en lui-même que l’homme est divisé. Voici que toute la vie des hommes, individuelle et collective, se manifeste comme une lutte, combien dramatique, entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres. Bien plus, voici que l’homme se découvre incapable par lui-même de vaincre effectivement les assauts du mal ; et ainsi chacun se sent comme chargé de chaînes. Mais le Seigneur en personne est venu pour restaurer l’homme dans sa liberté et sa force, le rénovant intérieurement et jetant dehors le prince de ce monde (cf. Jn 12, 31), qui le retenait dans l’esclavage du péché [11]. Quant au péché, il amoindrit l’homme lui-même en l’empêchant d’atteindre sa plénitude.

Dans la lumière de cette Révélation, la sublimité de la vocation humaine, comme la profonde misère de l’homme, dont tous font l’expérience, trouvent leur signification ultime.

Qu'en pensez vous?



Celui ci aussi:
16. Dignité de la conscience morale

1. Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela ». Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera [16]. La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre [17]. C’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain [18]. Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité. Toutefois, il arrive souvent que la conscience s’égare, par suite d’une ignorance invincible, sans perdre pour autant sa dignité. Ce que l’on ne peut dire lorsque l’homme se soucie peu de rechercher le vrai et le bien et lorsque l’habitude du péché rend peu à peu sa conscience presque aveugle.



19. Formes et racines de l’athéisme

1. L’aspect le plus sublime de la dignité humaine se trouve dans cette vocation de l’homme à communier avec Dieu. Cette invitation que Dieu adresse à l’homme de dialoguer avec Lui commence avec l’existence humaine. Car, si l’homme existe, c’est que Dieu l’a créé par amour et, par amour, ne cesse de lui donner l’être ; et l’homme ne vit pleinement selon la vérité que s’il reconnaît librement cet amour et s’abandonne à son Créateur. Mais beaucoup de nos contemporains ne perçoivent pas du tout ou même rejettent explicitement le rapport intime et vital qui unit l’homme à Dieu : à tel point que l’athéisme compte parmi les faits les plus graves de ce temps et doit être soumis à un examen très attentif.

2. On désigne sous le nom d’athéisme des phénomènes entre eux très divers. En effet, tandis que certains athées nient Dieu expressément, d’autres pensent que l’homme ne peut absolument rien affirmer de lui. D’autres encore traitent le problème de Dieu de telle façon que ce problème semble dénué de sens. Beaucoup outrepassant indûment les limites des sciences positives, ou bien prétendent que la seule raison scientifique explique tout, ou bien, à l’inverse, ne reconnaissent comme définitive absolument aucune vérité. Certains font un tel cas de l’homme que la foi en Dieu s’en trouve comme énervée, plus préoccupés qu’ils sont, semble-t-il, d’affirmer l’homme que de nier Dieu. D’autres se représentent Dieu sous un jour tel que, en le repoussant, ils refusent un Dieu qui n’est en aucune façon celui de l’Évangile. D’autres n’abordent même pas le problème de Dieu : ils paraissent étrangers à toute inquiétude religieuse et ne voient pas pourquoi ils se soucieraient encore de religion. L’athéisme, en outre, naît souvent, soit d’une protestation révoltée contre le mal dans le monde, soit du fait que l’on attribue à tort à certains idéaux humains un tel caractère d’absolu qu’on en vient à les prendre pour Dieu. La civilisation moderne elle-même, non certes par son essence même, mais parce qu’elle se trouve trop engagée dans les réalités terrestres, peut rendre souvent plus difficile l’approche de Dieu.

3. Certes, ceux qui délibérément s’efforcent d’éliminer Dieu de leur cœur et d’écarter les problèmes religieux, en ne suivant pas le « dictamen » de leur conscience, ne sont pas exempts de faute. Mais les croyants eux-mêmes portent souvent à cet égard une certaine responsabilité. Car l’athéisme, considéré dans son ensemble, ne trouve pas son origine en lui-même ; il la trouve en diverses causes, parmi lesquelles il faut compter une réaction critique en face des religions et spécialement, en certaines régions, en face de la religion chrétienne. C’est pourquoi, dans cette genèse de l’athéisme, les croyants peuvent avoir une part qui n’est pas mince, dans la mesure où, par la négligence dans l’éducation de leur foi, par des présentations trompeuses de la doctrine et aussi par des défaillances de leur vie religieuse, morale et sociale, on peut dire d’eux qu’ils voilent l’authentique visage de Dieu et de la religion plus qu’ils ne le révèlent.

20. L’athéisme systématique

1. Souvent l’athéisme moderne présente aussi une forme systématique, qui, abstraction faite des autres causes, pousse le désir d’autonomie humaine à un point tel qu’il fait obstacle à toute dépendance à l’égard de Dieu. Ceux qui professent un athéisme de cette sorte soutiennent que la liberté consiste en ceci que l’homme est pour lui-même sa propre fin, le seul artisan et le démiurge de sa propre histoire. Ils prétendent que cette vue des choses est incompatible avec la reconnaissance d’un Seigneur, auteur et fin de toutes choses ou, au moins, qu’elle rend cette affirmation tout à fait superflue. Cette doctrine peut se trouver renforcée par le sentiment de puissance que le progrès technique actuel confère à l’homme.

2. Parmi les formes de l’athéisme contemporain, on ne doit pas passer sous silence celle qui attend la libération de l’homme surtout de sa libération économique et sociale. À cette libération s’opposerait, par sa nature même, la religion, dans la mesure, où, érigeant l’espérance de l’homme sur le mirage d’une vie future, elle le détournerait d’édifier la cité terrestre. C’est pourquoi les tenants d’une telle doctrine, là où ils deviennent les maîtres du pouvoir, attaquent la religion avec violence, utilisant pour la diffusion de l’athéisme, surtout en ce qui regarde l’éducation de la jeunesse, tous les moyens de pression dont le pouvoir public dispose.


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Message par admin2 Mar 10 Mai 2011 - 3:55

CHAPITRE II :
La communauté humaine

23. But poursuivi par le Concile

1. Parmi les principaux aspects du monde d’aujourd’hui, il faut compter la multiplication des relations entre les hommes que les progrès techniques actuels contribuent largement à développer. Toutefois le dialogue fraternel des hommes ne trouve pas son achèvement à ce niveau, mais plus profondément dans la communauté des personnes et celle-ci exige le respect réciproque de leur pleine dignité spirituelle. La Révélation chrétienne favorise puissamment l’essor de cette communion des personnes entre elles ; en même temps elle nous conduit à une intelligence plus pénétrante des lois de la vie sociale, que le Créateur a inscrites dans la nature spirituelle et morale de l’homme.

2. Mais comme de récents documents du Magistère ont abondamment expliqué la doctrine chrétienne sur la société humaine [42], le Concile s’en tient au rappel de quelques vérités majeures dont il expose les fondements à la lumière de la Révélation. Il insiste ensuite sur quelques conséquences qui revêtent une importance particulière en notre temps.

24. Caractère communautaire de la vocation humaine dans le plan de Dieu

1. Dieu, qui veille paternellement sur tous, a voulu que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des frères. Tous, en effet, ont été créés à l’image de Dieu, « qui a fait habiter sur toute la face de la terre tout le genre humain issu d’un principe unique » (Ac 17, 26), et tous sont appelés à une seule et même fin, qui est Dieu lui-même.

2. À cause de cela, l’amour de Dieu et du prochain est le premier et le plus grand commandement. L’Écriture, pour sa part, enseigne que l’amour de Dieu est inséparable de l’amour du prochain : « ... tout autre commandement se résume en cette parole : tu aimeras le prochain comme toi-même... La charité est donc la loi dans sa plénitude » (Rm 13, 9-10 ; cf. 1 Jn 4, 20). Il est bien évident que cela est d’une extrême importance pour des hommes de plus en plus dépendants les uns des autres et dans un monde sans cesse plus unifié.

3. Allons plus loin : quand le Seigneur Jésus prie le Père pour que « tous soient un..., comme nous nous sommes un » (Jn 17, 21-22), il ouvre des perspectives inaccessibles à la raison et il nous suggère qu’il y a une certaine ressemblance entre l’union des personnes divines et celle des fils de Dieu dans la vérité et dans l’amour. Cette ressemblance montre bien que l’homme, seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même, ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui-même [43].

25. Interdépendance de la personne et de la société

1. Le caractère social de l’homme fait apparaître qu’il y a interdépendance entre l’essor de la personne et le développement de la société elle-même. En effet, la personne humaine qui, de par sa nature même, a absolument besoin d’une vie sociale [44], est et doit être le principe, le sujet et la fin de toutes les institutions. La vie sociale n’est donc pas pour l’homme quelque chose de surajouté ; aussi c’est par l’échange avec autrui, par la réciprocité des services, par le dialogue avec ses frères que l’homme grandit selon toutes ses capacités et peut répondre à sa vocation.

2. Parmi les liens sociaux nécessaires à l’essor de l’homme, certains, comme la famille et la communauté politique, correspondent plus immédiatement à sa nature intime ; d’autres relèvent plutôt de sa libre volonté. De nos jours, sous l’influence de divers facteurs, les relations mutuelles et les interdépendances ne cessent de se multiplier : d’où des associations et des institutions variées, de droit public ou privé. Même si ce fait, qu’on nomme socialisation, n’est pas sans danger, il comporte cependant de nombreux avantages qui permettent d’affermir et d’accroître les qualités de la personne, et de garantir ses droits [45].

3. Mais si les personnes humaines reçoivent beaucoup de la vie sociale pour l’accomplissement de leur vocation, même religieuse, on ne peut cependant pas nier que les hommes, du fait des contextes sociaux dans lesquels ils vivent et baignent dès leur enfance, se trouvent souvent détournés du bien et portés au mal. Certes, les désordres, si souvent rencontrés dans l’ordre social, proviennent en partie des tensions existant au sein des structures économiques, politiques et sociales. Mais, plus radicalement, ils proviennent de l’orgueil et de l’égoïsme des hommes, qui pervertissent aussi le climat social. Là où l’ordre des choses a été vicié par les suites du péché, l’homme, déjà enclin au mal par naissance, éprouve de nouvelles incitations qui le poussent à pécher : sans efforts acharnés, sans l’aide de la grâce, il ne saurait les vaincre.

26. Promouvoir le bien commun

1. Parce que les liens humains s’intensifient et s’étendent peu à peu à l’univers entier, le bien commun, c’est-à-dire cet ensemble de conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres, d’atteindre leur perfection d’une façon plus totale et plus aisée, prend aujourd’hui une extension de plus en plus universelle, et par suite recouvre des droits et des devoirs qui concernent tout le genre humain. Tout groupe doit tenir compte des besoins et des légitimes aspirations des autres groupes, et plus encore du bien commun de l’ensemble de la famille humaine [46].

2. Mais en même temps grandit la conscience de l’éminente dignité de la personne humaine, supérieure à toutes choses et dont les droits et les devoirs sont universels et inviolables. Il faut donc rendre accessible à l’homme tout ce dont il a besoin pour mener une vie vraiment humaine, par exemple : nourriture, vêtement, habitat, droit de choisir librement son état de vie et de fonder une famille, droit à l’éducation, au travail, à la réputation, au respect, à une information convenable, droit d’agir selon la droite règle de sa conscience, droit à la sauvegarde de la vie privée et à une juste liberté, y compris en matière religieuse.

3. Aussi l’ordre social et son progrès doivent-ils toujours tourner au bien des personnes, puisque l’ordre des choses doit être subordonné à l’ordre des personnes et non l’inverse. Le Seigneur lui-même le suggère lorsqu’il a dit : « Le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat [47]. » Cet ordre doit sans cesse se développer, avoir pour base la vérité, s’édifier sur la justice, et être vivifié par l’amour ; il doit trouver dans la liberté un équilibre toujours plus humain [48]. Pour y parvenir, il faut travailler au renouvellement des mentalités et entreprendre de vastes transformations sociales.

4. L’Esprit de Dieu qui, par une providence admirable, conduit le cours des temps et rénove la face de la terre, est présent à cette évolution. Quant au ferment évangélique, c’est lui qui a suscité et suscite dans le cœur humain une exigence incoercible de dignité.

27. Respect de la personne humaine

1. Pour en venir à des conséquences pratiques et qui présentent un caractère d’urgence particulière, le Concile insiste sur le respect de l’homme : que chacun considère son prochain, sans aucune exception, comme « un autre lui-même», tienne compte avant tout de son existence et des moyens qui lui sont nécessaires pour vivre dignement [49], et se garde d’imiter ce riche qui ne prit nul souci du pauvre Lazare [50].

2. De nos jours surtout, nous avons l’impérieux devoir de nous faire le prochain de n’importe quel homme et, s’il se présente à nous, de le servir activement : qu’il s’agisse de ce vieillard abandonné de tous, ou de ce travailleur étranger, méprisé sans raison, ou de cet exilé, ou de cet enfant né d’une union illégitime qui supporte injustement le poids d’une faute qu’il n’a pas commise, ou de cet affamé qui interpelle notre conscience en nous rappelant la parole du Seigneur : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40).

3. De plus, tout ce qui s’oppose à la vie elle-même, comme toute espèce d’homicide, le génocide, l’avortement, l’euthanasie et même le suicide délibéré ; tout ce qui constitue une violation de l’intégrité de la personne humaine, comme les mutilations, la torture physique ou morale, les contraintes psychologiques ; tout ce qui est offense à la dignité de l’homme, comme les conditions de vie sous-humaines, les emprisonnements arbitraires, les déportations, l’esclavage, la prostitution, le commerce des femmes et des jeunes ; ou encore les conditions de travail dégradantes qui réduisent les travailleurs au rang de purs instruments de rapport, sans égard pour leur personnalité libre et responsable : toutes ces pratiques et d’autres analogues sont, en vérité, infâmes. Tandis qu’elles corrompent la civilisation, elles déshonorent ceux qui s’y livrent plus encore que ceux qui les subissent et insultent gravement à l’honneur du Créateur.

28. Respect et amour des adversaires

1. Le respect et l’amour doivent aussi s’étendre à ceux qui pensent ou agissent autrement que nous en matière sociale, politique ou religieuse. D’ailleurs, plus nous nous efforçons de pénétrer de l’intérieur, avec bienveillance et amour, leurs manières de voir, plus le dialogue avec eux deviendra aisé.

2. Certes, cet amour et cette bienveillance ne doivent en aucune façon nous rendre indifférents à l’égard de la vérité et du bien. Mieux, c’est l’amour même qui pousse les disciples du Christ à annoncer à tous les hommes la vérité qui sauve. Mais on doit distinguer entre l’erreur, toujours à rejeter, et celui qui se trompe, qui garde toujours sa dignité de personne, même s’il se fourvoie dans des notions fausses ou insuffisantes en matière religieuse [51]. Dieu seul juge et scrute les cœurs ; il nous interdit donc de juger de la culpabilité interne de quiconque [52].

3. L’enseignement du Christ va jusqu’à requérir le pardon des offenses [53] et étend le commandement de l’amour, qui est celui de la loi nouvelle, à tous nos ennemis : « Vous avez appris qu’il a été dit : tu aimeras ton prochain, tu haïras ton ennemi. Mais moi je vous dis : aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent et priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient » (Mt 5, 43-44).

29. Égalité essentielle de tous les hommes entre eux et justice sociale

1. Tous les hommes, doués d’une âme raisonnable et créés à l’image de Dieu, ont même nature et même origine ; tous, rachetés par le Christ, jouissent d’une même vocation et d’une même destinée divine : on doit donc, et toujours davantage, reconnaître leur égalité fondamentale.

2. Assurément, tous les hommes ne sont pas égaux quant à leur capacité physique qui est variée, ni quant à leurs forces intellectuelles et morales qui sont diverses. Mais toute forme de discrimination touchant les droits fondamentaux de la personne, qu’elle soit sociale ou culturelle, qu’elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur de la peau, la condition sociale, la langue ou la religion, doit être dépassée et éliminée, comme contraire au dessein de Dieu. En vérité, il est affligeant de constater que ces droits fondamentaux de la personne ne sont pas encore partout garantis. Il en est ainsi lorsque la femme est frustrée de la faculté de choisir librement son époux ou d’élire son état de vie, ou d’accéder à une éducation et une culture semblables à celles que l’on reconnaît à l’homme.

3. Au surplus, en dépit de légitimes différences entre les hommes, l’égale dignité des personnes exige que l’on parvienne à des conditions de vie justes et plus humaines. En effet, les inégalités économiques et sociales excessives entre les membres ou entre les peuples d’une seule famille humaine font scandale et font obstacle à la justice sociale, à l’équité, à la dignité de la personne humaine ainsi qu’à la paix sociale et internationale.

4. Que les institutions privées ou publiques s’efforcent de se mettre au service de la dignité et de la destinée humaines. Qu’en même temps elles luttent activement contre toute forme d’esclavage, social ou politique ; et qu’elles garantissent les droits fondamentaux des hommes sous tout régime politique. Et même s’il faut un temps passablement long pour parvenir au but souhaité, toutes ces institutions humaines doivent peu à peu répondre aux réalités spirituelles qui, de toutes, sont les plus hautes.

30. Nécessité de dépasser une éthique individualiste

1. L’ampleur et la rapidité des transformations réclament d’une manière pressante que personne, par inattention à l’évolution des choses ou par inertie, ne se contente d’une éthique individualiste. Lorsque chacun, contribuant au bien commun selon ses capacités propres et en tenant compte des besoins d’autrui, se préoccupe aussi, et effectivement, de l’essor des institutions publiques ou privées qui servent à améliorer les conditions de vie humaines, c’est alors et de plus en plus qu’il accomplit son devoir de justice et de charité. Or il y a des gens qui, tout en professant des idées larges et généreuses, continuent à vivre en pratique comme s’ils n’avaient cure des solidarités sociales. Bien plus, dans certains pays, beaucoup font peu de cas des lois et des prescriptions sociales. Un grand nombre ne craignent pas de se soustraire, par divers subterfuges et fraudes, aux justes impôts et aux autres aspects de la dette sociale. D’autres négligent certaines règles de la vie en société, comme celles qui ont trait à la sauvegarde de la santé ou à la conduite des véhicules, sans même se rendre compte que, par une telle insouciance, ils mettent en danger leur propre vie et celle d’autrui.

2. Que tous prennent très à cœur de compter les solidarités sociales parmi les principaux devoirs de l’homme d’aujourd’hui, et de les respecter. En effet, plus le monde s’unifie et plus il est manifeste que les obligations de l’homme dépassent les groupes particuliers pour s’étendre peu à peu à l’univers entier. Ce qui ne peut se faire que si les individus et les groupes cultivent en eux les valeurs morales et sociales et les répandent autour d’eux. Alors, avec le nécessaire secours de la grâce divine, surgiront des hommes vraiment nouveaux, artisans de l’humanité nouvelle.

31. Responsabilité et participation

1. Pour que chacun soit mieux armé pour faire face à ses responsabilités, tant envers lui-même qu’envers les différents groupes dont il fait partie, on aura soin d’assurer un plus large développement culturel, en utilisant les moyens considérables dont le genre humain dispose aujourd’hui. Avant tout, l’éducation des jeunes, quelle que soit leur origine sociale, doit être ordonnée de telle façon qu’elle puisse susciter des hommes et des femmes qui ne soient pas seulement cultivés, mais qui aient aussi une forte personnalité, car notre temps en a le plus grand besoin.

2. Mais l’homme parvient très difficilement à un tel sens de la responsabilité si les conditions de vie ne lui permettent pas de prendre conscience de sa dignité et de répondre à sa vocation en se dépensant au service de Dieu et de ses semblables. Car souvent la liberté humaine s’étiole lorsque l’homme est dans un état d’extrême indigence, comme elle se dégrade lorsque, se laissant aller à une vie de trop grande facilité, il s’enferme en lui-même comme dans une tour d’ivoire. Elle se fortifie en revanche lorsque l ’homme accepte les inévitables contraintes de la vie sociale, assume les exigences multiples de la solidarité humaine et s’engage au service de la communauté des hommes.

3. Aussi faut-il stimuler chez tous la volonté de prendre part aux entreprises communes. Et il faut louer la façon d’agir des nations où, dans une authentique liberté, le plus grand nombre possible de citoyens participe aux affaires publiques. Il faut toutefois tenir compte des conditions concrètes de chaque peuple et de la nécessaire fermeté des pouvoirs publics. Mais pour que tous les citoyens soient poussés à participer à la vie des différents groupes qui constituent le corps social, il faut qu’ils trouvent en ceux-ci des valeurs qui les attirent et qui les disposent à se mettre au service de leurs semblables. On peut légitimement penser que l’avenir est entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des raisons de vivre et d’espérer.

32. Le Verbe incarné et la solidarité humaine

1. De même que Dieu a créé les hommes non pour vivre en solitaires, mais pour qu’ils s’unissent en société, de même il lui a plus aussi « de sanctifier et de sauver les hommes non pas isolément, hors de tout lien mutuel ; il a voulu au contraire en faire un peuple qui le connaîtrait selon la vérité et le servirait dans la sainteté [54] ». Aussi, dès le début de l’histoire du salut, a-t-il choisi des hommes non seulement à titre individuel, mais en tant que membres d’une communauté. Et ces élus, Dieu leur a manifesté son dessein et les a appelés « son peuple » (Ex. 3, 7-12). C’est avec ce peuple qu’il a, en outre, conclu l’Alliance du Sinaï [55].

2. Ce caractère communautaire se parfait et s’achève dans l’œuvre de Jésus Christ. Car le Verbe incarné en personne a voulu entrer dans le jeu de cette solidarité. Il a prit part aux noces de Cana, il s’est invité chez Zachée, il a mangé avec les publicains et les pécheurs. C’est en évoquant les réalités les plus ordinaires de la vie sociale, en se servant des mots et des images de l’existence la plus quotidienne, qu’il a révélé aux hommes l’amour du Père et la magnificence de leur vocation. Il a sanctifié les liens humains, notamment soumis aux lois de sa patrie. Il a voulu mener la vie même d’un artisan de son temps et de sa région.

3. Dans sa prédication, il a clairement affirmé que des fils de Dieu ont l’obligation de se comporter entre eux comme des frères. Dans sa prière, il a demandé que tous ses disciples soient « un». Bien plus, lui-même s’est offert pour tous jusqu’à la mort, lui, le rédempteur de tous. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13). Quant à ses Apôtres, il leur a ordonné d’annoncer à toutes les nations le message évangélique, pour faire du genre humain la famille de Dieu, dans laquelle la plénitude de la loi serait l’amour.

4. Premier-né parmi beaucoup de frères, après sa mort et sa résurrection, par le don de son Esprit il a institué, entre tous ceux qui l’accueillent par la foi et la charité, une nouvelle communion fraternelle : elle se réalise en son propre Corps, qui est l’Église. En ce Corps, tous, membres les uns des autres, doivent s’entraider mutuellement, selon la diversité des dons reçus.

5. Cette solidarité devra sans cesse croître, jusqu’au jour où elle trouvera son couronnement : ce jour-là, les hommes, sauvés par la grâce, famille bien-aimée de Dieu et du Christ leur frère, rendront à Dieu une gloire parfaite.

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Message par admin2 Mar 10 Mai 2011 - 3:58

24. Caractère communautaire de la vocation humaine dans le plan de Dieu

1. Dieu, qui veille paternellement sur tous, a voulu que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des frères. Tous, en effet, ont été créés à l’image de Dieu, « qui a fait habiter sur toute la face de la terre tout le genre humain issu d’un principe unique » (Ac 17, 26), et tous sont appelés à une seule et même fin, qui est Dieu lui-même.

2. À cause de cela, l’amour de Dieu et du prochain est le premier et le plus grand commandement. L’Écriture, pour sa part, enseigne que l’amour de Dieu est inséparable de l’amour du prochain : « ... tout autre commandement se résume en cette parole : tu aimeras le prochain comme toi-même... La charité est donc la loi dans sa plénitude » (Rm 13, 9-10 ; cf. 1 Jn 4, 20). Il est bien évident que cela est d’une extrême importance pour des hommes de plus en plus dépendants les uns des autres et dans un monde sans cesse plus unifié.

Commandement majeur et tres important mais oh combien difficile a vivre...Dieu seul,il me semble,peut nous donner cette grace d'aimer les autres comme Dieu nous le demande....


3. De plus, tout ce qui s’oppose à la vie elle-même, comme toute espèce d’homicide, le génocide, l’avortement, l’euthanasie et même le suicide délibéré ; tout ce qui constitue une violation de l’intégrité de la personne humaine, comme les mutilations, la torture physique ou morale, les contraintes psychologiques ; tout ce qui est offense à la dignité de l’homme, comme les conditions de vie sous-humaines, les emprisonnements arbitraires, les déportations, l’esclavage, la prostitution, le commerce des femmes et des jeunes ; ou encore les conditions de travail dégradantes qui réduisent les travailleurs au rang de purs instruments de rapport, sans égard pour leur personnalité libre et responsable : toutes ces pratiques et d’autres analogues sont, en vérité, infâmes. Tandis qu’elles corrompent la civilisation, elles déshonorent ceux qui s’y livrent plus encore que ceux qui les subissent et insultent gravement à l’honneur du Créateur.

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Message par Francesco Dim 15 Mai 2011 - 1:22

CHAPITRE III :
L’activité humaine dans l’univers

33. Position du problème

1. Par son travail et son génie, l’homme s’est toujours efforcé de donner un plus large développement à sa vie. Mais aujourd’hui, aidé par la science et la technique, il a étendu sa maîtrise sur presque toute la nature, et il ne cesse de l’étendre ; et, grâce notamment à la multiplication des moyens d’échange de toutes sortes entre les nations, la famille humaine se reconnaît et se constitue peu à peu comme une communauté une au sein de l’univers. Il en résulte que l’homme se procure désormais par sa propre industrie de nombreux biens qu’il attendait autrefois avant tout de forces supérieures.

2. Devant cette immense entreprise, qui gagne déjà tout le genre humain, de nombreuses interrogations s’élèvent parmi les hommes : quels sont le sens et la valeur de cette laborieuse activité ? Quel usage faire de toutes ces richesses ? Quelle est la fin de ces efforts, individuels et collectifs ? L’Église, gardienne du dépôt de la parole divine, où elle puise les principes de l’ordre religieux et moral, n’a pas toujours, pour autant, une réponse immédiate à chacune de ces questions ; elle désire toutefois joindre la lumière de la Révélation à l’expérience de tous, pour éclairer le chemin où l’humanité vient de s’engager.

34. Valeur de l’activité humaine

1. Pour les croyants, une chose est certaine : considérée en elle-même, l’activité humaine, individuelle et collective, ce gigantesque effort par lequel les hommes, tout au long des siècles, s’acharnent à améliorer leurs conditions de vie, correspond au dessein de Dieu. L’homme, créé à l’image de Dieu, a en effet reçu la mission de soumettre la terre et tout ce qu’elle contient, de gouverner le cosmos en sainteté et justice [56] et, en reconnaissant Dieu comme Créateur de toutes choses, de lui référer son être ainsi que l’univers : en sorte que, tout étant soumis à l’homme, le nom même de Dieu soit glorifié par toute la terre [57].

2. Cet enseignement vaut aussi pour les activités les plus quotidiennes. Car ces hommes et ces femmes qui, tout en gagnant leur vie et celle de leur famille, mènent leurs activités de manière à bien servir la société, sont fondés à voir dans leur travail un prolongement de l’œuvre du Créateur, un service de leurs frères, un apport personnel à la réalisation du plan providentiel dans l’histoire [58].

3. Loin d’opposer les conquêtes du génie et du courage de l’homme à la puissance de Dieu et de considérer la créature raisonnable comme une sorte de rivale du Créateur, les chrétiens sont au contraire bien persuadés que les victoires du genre humain sont un signe de la grandeur divine et une conséquence de son dessein ineffable. Mais plus grandit le pouvoir de l’homme plus s’élargit le champ de ses responsabilités, personnelles et communautaires. On voit par là que le message chrétien ne détourne pas les hommes de la construction du monde et ne les incite pas à se désintéresser du sort de leurs semblables : il leur en fait au contraire un devoir plus pressant [59].

35. Normes de l’activité humaine

1. De même qu’elle procède de l’homme, l’activité humaine lui est ordonnée. De fait, par son action, l’homme ne transforme pas seulement les choses et la société, il se parfait lui-même. Il apprend bien des choses, il développe ses facultés, il sort de lui-même et se dépasse. Cet essor, bien conduit, est d’un tout autre prix que l’accumulation possible de richesses extérieures. L’homme vaut plus par ce qu’il est que par ce qu’il a [60]. De même, tout ce que font les hommes pour faire régner plus de justice, une fraternité plus étendue, un ordre plus humain dans les rapports sociaux, dépasse en valeur les progrès techniques. Car ceux-ci peuvent bien fournir la base matérielle de la promotion humaine, mais ils sont tout à fait impuissants, par eux seuls, à la réaliser.

2. Voici donc la règle de l’activité humaine : qu’elle soit conforme au bien authentique de l’humanité, selon le dessein et la volonté de Dieu, et qu’elle permette à l’homme, considéré comme individu ou comme membre de la société, de s’épanouir selon la plénitude de sa vocation.

36. Juste autonomie des réalités terrestres

1. Pourtant, un grand nombre de nos contemporains semblent redouter un lien étroit entre l’activité concrète et la religion : ils y voient un danger pour l’autonomie des hommes, des sociétés et des sciences.

2. Si, par autonomie des réalités terrestres, on veut dire que les choses créées et les sociétés elles-mêmes ont leurs lois et leurs valeurs propres, que l’homme doit peu à peu apprendre à connaître, à utiliser et à organiser, une telle exigence d’autonomie est pleinement légitime : non seulement elle est revendiquée par les hommes de notre temps, mais elle correspond à la volonté du Créateur. C’est en vertu de la création même que toutes choses sont établies selon leur ordonnance et leurs lois et leurs valeurs propres, que l’homme doit peu à peu apprendre à connaître, à utiliser et à organiser. Une telle exigence d’autonomie est pleinement légitime : non seulement elle est revendiquée par les hommes de notre temps, mais elle correspond à la volonté du Créateur. C’est en vertu de la création même que toutes choses sont établies selon leur consistance, leur vérité et leur excellence propres, avec leur ordonnance et leurs lois spécifiques. L’homme doit respecter tout cela et reconnaître les méthodes particulières à chacune des sciences et techniques. C’est pourquoi la recherche méthodique, dans tous les domaines du savoir, si elle est menée d’une manière vraiment scientifique et si elle suit les normes de la morale, ne sera jamais réellement opposée à la foi : les réalités profanes et celles de la foi trouvent leur origine dans le même Dieu [61]. Bien plus, celui qui s’efforce, avec persévérance et humilité, de pénétrer les secrets des choses, celui-là, même s’il n’en a pas conscience, est comme conduit par la main de Dieu, qui soutient tous les êtres et les fait ce qu’ils sont. À ce propos, qu’on nous permette de déplorer certaines attitudes qui ont existé parmi les chrétiens eux-mêmes, insuffisamment avertis de la légitime autonomie de la science. Sources de tensions et de conflits, elles ont conduit beaucoup d’esprits jusqu’à penser que science et foi s’opposaient [62].

3. Mais si, par « autonomie du temporel», on veut dire que les choses créées ne dépendent pas de Dieu et que l’homme peut en disposer sans référence au Créateur, la fausseté de tels propos ne peut échapper à quiconque reconnaît Dieu. En effet, la créature sans Créateur s’évanouit. Du reste, tous les croyants, à quelque religion qu’ils appartiennent, ont toujours entendu la voix de Dieu et sa manifestation, dans le langage des créatures. Et même, l’oubli de Dieu rend opaque la créature elle-même.

37. L’activité humaine détériorée par le péché

1. En accord avec l’expérience des siècles, l’Écriture enseigne à la famille humaine que le progrès, grand bien pour l’homme, entraîne aussi avec lui une sérieuse tentation. En effet, lorsque la hiérarchie des valeurs est troublée et que le mal et le bien s’entremêlent, les individus et groupes ne regardent plus que leurs intérêts propres et non ceux des autres. Aussi le monde ne se présente pas encore comme le lieu d’une réelle fraternité, tandis que le pouvoir accru de l’homme menace de détruire le genre humain lui-même.

2. Un dur combat contre les puissances des ténèbres passe à travers toute l’histoire des hommes ; commencé dès les origines, il durera, le Seigneur nous l’a dit [63] jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille, l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien ; et ce n’est qu’au prix de grands efforts, avec la grâce de Dieu, qu’il parvient à réaliser son unité intérieure.

3. C’est pourquoi l’Église du Christ reconnaît, certes, que le progrès humain peut servir au bonheur véritable des hommes, et elle fait ainsi confiance au dessein du Créateur ; mais elle ne peut pas cependant ne pas faire écho à la parole de l’Apôtre : « Ne vous modelez pas sur le monde présent » (Rm 12, 2), c’est-à-dire sur cet esprit de vanité et de malice qui change l’activité humaine, ordonnée au service de Dieu et de l’homme, en instrument de péché.

4. À qui demande comment une telle misère peut être surmontée, les chrétiens confessent que toutes les activités humaines, quotidiennement déviées par l’orgueil de l’homme et l’amour désordonné de soi, ont besoin d’être purifiées et amenées à leur perfection par la croix et la résurrection du Christ. Racheté par le Christ et devenu une nouvelle créature dans l’Esprit Saint, l’homme peut et doit, en effet, aimer ces choses que Dieu lui-même a créées. Car c’est de Dieu qu’il les reçoit : il les voit comme jaillissant de sa main et les respecte. Pour elles, il remercie son divin bienfaiteur, il en use et il en jouit dans un esprit de pauvreté et de liberté ; il est alors introduit dans la possession véritable du monde, comme quelqu’un qui n’a rien et qui possède tout [64]. « Car tout est à vous, mais vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu » (1 Co 3, 22-23).

38. L’activité humaine et son achèvement dans le mystère pascal

1. Le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui-même fait chair et est venu habiter la terre des hommes [65]. Homme parfait, il est entré dans l’histoire du monde, l’assumant et la récapitulant en lui [66]. C’est lui qui nous révèle que « Dieu est charité » (cf. 1 Jn 4, 8) et qui nous enseigne en même temps que la loi fondamentale de la perfection humaine, et donc de la transformation du monde, est le commandement nouveau de l’amour. À ceux qui croient à la divine charité, il apporte ainsi la certitude que la voie de l’amour est ouverte à tous les hommes et que l’effort qui tend à instaurer une fraternité universelle n’est pas vain. Il nous avertit aussi que cette charité ne doit pas seulement s’exercer dans des actions d’éclat, mais, et avant tout, dans le quotidien de la vie. En acceptant de mourir pour nous tous, pécheurs [67], il nous apprend, par son exemple, que nous devons aussi porter cette croix que la chair et le monde font peser sur les épaules de ceux qui poursuivent la justice et la paix. Constitué Seigneur par sa résurrection, le Christ à qui tout pouvoir a été donné, au ciel et sur la terre [68] agit désormais dans le cœur des hommes par la puissance de son Esprit ; il anime aussi, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à soumettre à cette fin la terre entière. Assurément les dons de l’Esprit sont divers : tandis qu’il appelle certains à témoigner ouvertement du désir de la demeure céleste et à garder vivant ce témoignage dans la famille humaine, il appelle les autres à se vouer au service terrestre des hommes, préparant par ce ministère la matière du Royaume des cieux. Mais de tous il fait des hommes libres pour que, renonçant à l’amour-propre et rassemblant toutes les énergies terrestres pour la vie humaine, ils s’élancent vers l’avenir, vers ce temps où l’humanité elle-même deviendra une offrande agréable à Dieu [69].

2. Le Seigneur a laissé aux siens les arrhes de cette espérance et un aliment pour la route : le sacrement de la foi, dans lequel des éléments de la nature, cultivés par l’homme, sont changés en son Corps et en son Sang glorieux. C’est le repas de la communion fraternelle, une anticipation du banquet céleste.

39. Terre nouvelle et cieux nouveaux

1. Nous ignorons le temps de l’achèvement de la terre et de l’humanité [70], nous ne connaissons pas le mode de transformation du cosmos. Elle passe, certes, la figure de ce monde déformée par le péché [71]; mais, nous l’avons appris, Dieu nous prépare une nouvelle terre où régnera la justice [72] et dont la béatitude comblera et dépassera tous les désirs de paix qui montent au cœur de l’homme [73]. Alors, la mort vaincue, les fils de Dieu ressusciteront dans le Christ, et ce qui fut semé dans la faiblesse et la corruption revêtira l’incorruptibilité [74]. La charité et ses œuvres demeureront [75] et toute cette création que Dieu a faite pour l’homme sera délivrée de l’esclavage de la vanité [76].

2. Certes, nous savons bien qu’il ne sert à rien à l’homme de gagner l’univers s’il vient à se perdre lui-même [77], mais l’attente de la nouvelle terre, loin d’affaiblir en nous le souci de cultiver cette terre, doit plutôt le réveiller : le corps de la nouvelle famille humaine y grandit, qui offre déjà quelque ébauche du siècle à venir. C’est pourquoi, s’il faut soigneusement distinguer le progrès terrestre de la croissance du règne du Christ, ce progrès a cependant beaucoup d’importance pour le Royaume de Dieu, dans la mesure où il peut contribuer à une meilleure organisation de la société humaine [78].

3. Car ces valeurs de dignité, de communion fraternelle et de liberté, tous ces fruits de notre nature et de notre industrie, que nous aurons propagés sur terre selon le commandement du Seigneur et dans son Esprit, nous les retrouverons plus tard, mais purifiés de toute souillure, illuminés, transfigurés, lorsque le Christ remettra à son Père « un Royaume éternel et universel : Royaume de vérité et de vie, Royaume de sainteté et de grâce, Royaume de justice, d’amour et de paix [79] ». Mystérieusement, le Royaume est déjà présent sur cette terre ; il atteindra sa perfection quand le Seigneur reviendra.



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Message par Francesco Dim 15 Mai 2011 - 1:25

37. L’activité humaine détériorée par le péché

1. En accord avec l’expérience des siècles, l’Écriture enseigne à la famille humaine que le progrès, grand bien pour l’homme, entraîne aussi avec lui une sérieuse tentation. En effet, lorsque la hiérarchie des valeurs est troublée et que le mal et le bien s’entremêlent, les individus et groupes ne regardent plus que leurs intérêts propres et non ceux des autres. Aussi le monde ne se présente pas encore comme le lieu d’une réelle fraternité, tandis que le pouvoir accru de l’homme menace de détruire le genre humain lui-même.

2. Un dur combat contre les puissances des ténèbres passe à travers toute l’histoire des hommes ; commencé dès les origines, il durera, le Seigneur nous l’a dit [63] jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille, l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien ; et ce n’est qu’au prix de grands efforts, avec la grâce de Dieu, qu’il parvient à réaliser son unité intérieure.

3. C’est pourquoi l’Église du Christ reconnaît, certes, que le progrès humain peut servir au bonheur véritable des hommes, et elle fait ainsi confiance au dessein du Créateur ; mais elle ne peut pas cependant ne pas faire écho à la parole de l’Apôtre : « Ne vous modelez pas sur le monde présent » (Rm 12, 2), c’est-à-dire sur cet esprit de vanité et de malice qui change l’activité humaine, ordonnée au service de Dieu et de l’homme, en instrument de péché.

4. À qui demande comment une telle misère peut être surmontée, les chrétiens confessent que toutes les activités humaines, quotidiennement déviées par l’orgueil de l’homme et l’amour désordonné de soi, ont besoin d’être purifiées et amenées à leur perfection par la croix et la résurrection du Christ. Racheté par le Christ et devenu une nouvelle créature dans l’Esprit Saint, l’homme peut et doit, en effet, aimer ces choses que Dieu lui-même a créées. Car c’est de Dieu qu’il les reçoit : il les voit comme jaillissant de sa main et les respecte. Pour elles, il remercie son divin bienfaiteur, il en use et il en jouit dans un esprit de pauvreté et de liberté ; il est alors introduit dans la possession véritable du monde, comme quelqu’un qui n’a rien et qui possède tout [64]. « Car tout est à vous, mais vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu » (1 Co 3, 22-23).



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Message par admin2 Ven 20 Mai 2011 - 2:45

CHAPITRE IV :
Le rôle de l’Église dans le monde de ce temps

40. Rapports mutuels de l’Église et du monde

1. Tout ce que nous avons dit sur la dignité de la personne humaine, sur la communauté des hommes, sur le sens profond de l’activité humaine, constitue le fondement du rapport qui existe entre l’Église et le monde, et la base de leur dialogue mutuel [80]. C’est pourquoi, en supposant acquis tout l’enseignement déjà fixé par le Concile sur le mystère de l’Église, ce chapitre va maintenant traiter de cette même Église en tant qu’elle est dans ce monde et qu’elle vit et agit avec lui.

2. Née de l’amour du Père éternel [81], fondée dans le temps par le Christ rédempteur, rassemblée dans l’Esprit Saint [82], l’Église poursuit une fin salvifique et eschatologique qui ne peut être pleinement atteinte que dans le siècle à venir. Mais, dès maintenant présente sur cette terre, elle se compose d’hommes, de membres de la cité terrestre, qui ont vocation de former, au sein même de l’histoire humaine, la famille des enfants de Dieu, qui doit croître sans cesse jusqu’à la venue du Seigneur. Unie en vue des biens célestes, riche de ces biens, cette famille « a été constituée et organisée en ce monde comme une société [83] » par le Christ, et elle a été dotée « de moyens capables d’assurer son union visible et sociale [84] ». À la fois « assemblée visible et communauté spirituelle [85] », l’Église fait ainsi route avec toute l’humanité et partage le sort terrestre du monde ; elle est comme le ferment et, pour ainsi dire, l’âme de la société humaine [86] appelée à être renouvelée dans le Christ et transformée en famille de Dieu.

3. À vrai dire, cette compénétration de la cité terrestre et de la cité céleste ne peut être perçue que par la foi ; bien plus, elle demeure le mystère de l’histoire humaine qui, jusqu’à la pleine révélation de la gloire des fils de Dieu, sera troublée par le péché. Mais l’Église, en poursuivant la fin salvifique qui lui est propre, ne communique pas seulement à l’homme la vie divine ; elle répand aussi, et d’une certaine façon sur le monde entier, la lumière que cette vie divine irradie, notamment en guérissant et en élevant la dignité de la personne humaine, en affermissant la cohésion de la société et en procurant à l’activité quotidienne des hommes un sens plus profond, la pénétrant d’une signification plus haute. Ainsi, par chacun de ses membres comme par toute la communauté qu’elle forme, l’Église croit pouvoir largement contribuer à humaniser toujours plus la famille des hommes et son histoire.

4. En outre, l’Église catholique fait grand cas de la contribution que les autres Églises chrétiennes ou communautés ecclésiales ont apportée et continuent d’apporter à la réalisation de ce même but ; et elle s’en réjouit. En même temps, elle est fermement convaincue que, pour préparer les voies à l’Évangile, le monde peut lui apporter une aide précieuse et diverse par les qualités et l’activité des individus ou des sociétés qui le composent. Voici quelques principes généraux concernant le bon développement des échanges entre l’Église et le monde et de leur aide mutuelle dans les domaines qui leur sont en quelque sorte communs.

41. Aide que l’Église veut offrir à tout homme

1. L’homme moderne est en marche vers un développement plus complet de sa personnalité, vers une découverte et une affirmation toujours croissantes de ses droits. L’Église, pour sa part, qui a reçu la mission de manifester le mystère de Dieu, de ce Dieu qui est la fin ultime de l’homme, révèle en même temps à l’homme le sens de sa propre existence, c’est-à-dire sa vérité essentielle. L’Église sait parfaitement que Dieu seul, dont elle est la servante, répond aux plus profonds désirs du cœur humain que jamais ne rassasient pleinement les nourritures terrestres. Elle sait aussi que l’homme, sans cesse sollicité par l’Esprit de Dieu, ne sera jamais tout à fait indifférent au problème religieux, comme le prouvent non seulement l’expérience des siècles passés, mais de multiples témoignages de notre temps. L’homme voudra toujours connaître, ne serait-ce que confusément, la signification de sa vie, de ses activités et de sa mort. Ces problèmes, la présence même de l’Église les lui rappelle. Or Dieu seul, qui a créé l’homme à son image et l’a racheté du péché, peut répondre à ces questions en plénitude. Il le fait par la révélation dans son Fils, qui s’est fait homme. Quiconque suit le Christ, homme parfait, devient lui-même plus homme.

2. Appuyée sur cette foi, l’Église peut soustraire la dignité de la nature humaine à toutes les fluctuations des opinions qui, par exemple, rabaissent exagérément le corps humain, ou au contraire l’exaltent sans mesure. Aucune loi humaine ne peut assurer la dignité personnelle et la liberté de l’homme comme le fait l’Évangile du Christ, confié à l’Église. Cet Évangile annonce et proclame la liberté des enfants de Dieu, rejette tout esclavage qui enfin de compte provient du péché [87], respecte scrupuleusement la dignité de la conscience et son libre choix, enseigne sans relâche à faire fructifier tous les talents humains au service de Dieu et pour le bien des hommes, enfin confie chacun à l’amour de tous [88]. Tout cela correspond à la loi fondamentale de l’économie chrétienne. Car, si le même Dieu est à la fois Créateur et Sauveur, Seigneur et de l’histoire humaine et de l’histoire du salut, cet ordre divin lui-même, loin de supprimer la juste autonomie de la créature, et en particulier de l’homme, la rétablit et la confirme au contraire dans sa dignité.

3. C’est pourquoi l’Église, en vertu de l’Évangile qui lui a été confié, proclame les droits des hommes, reconnaît et tient en grande estime le dynamisme de notre temps qui, partout, donne un nouvel élan à ces droits. Ce mouvement toutefois doit être imprégné de l’esprit de l’Évangile et garanti contre toute idée de fausse autonomie. Nous sommes, en effet, exposés à la tentation d’estimer que nos droits personnels ne sont pleinement maintenus que lorsque nous sommes dégagés de toute norme de la loi divine. Mais, en suivant cette voie, la dignité humaine, loin d’être sauvée, s’évanouit.

42. Aide que l’Église cherche à apporter à la société humaine

1. L’union de la famille humaine trouve une grande vigueur et son achèvement dans l’unité de la famille des fils de Dieu, fondée dans le Christ [89].

2. Certes, la mission propre que le Christ a confiée à son Église n’est ni d’ordre politique, ni d’ordre économique ou social : le but qu’il lui a assigné est d’ordre religieux [90]. Mais, précisément, de cette mission religieuse découlent une fonction, des lumières et des forces qui peuvent servir à constituer et à affermir la communauté des hommes selon la loi divine. De même, lorsqu’il le faut et compte tenu des circonstances de temps et de lieu, l’Église peut elle-même, et elle le doit, susciter des œuvres destinées au service de tous, notamment des indigents, comme les œuvres charitables et autres du même genre.

3. L’Église reconnaît aussi tout ce qui est bon dans le dynamisme social d’aujourd’hui, en particulier le mouvement vers l’unité, les progrès d’une saine socialisation et de la solidarité au plan civique et économique. En effet, promouvoir l’unité s’harmonise avec la mission profonde de l’Église, puisqu’elle est « dans le Christ, comme le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu, et de l’unité de tout le genre humain [91]». Sa propre réalité manifeste ainsi au monde qu’une véritable union sociale visible découle de l’union des esprits et des cœurs, à savoir de cette foi et de cette charité, sur lesquelles, dans l’Esprit Saint, son unité est indissolublement fondée. Car l’énergie que l’Église est capable d’insuffler à la société moderne se trouve dans cette foi et dans cette charité effectivement vécues et ne s’appuie pas sur une souveraineté extérieure qui s’exercerait par des moyens purement humains.

4. Comme de plus, de par sa mission et sa nature, l’Église n’est liée à aucune forme particulière de culture, ni à aucun système politique, économique ou social, par cette universalité même, l’Église peut être un lien très étroit entre les différentes communautés humaines et entre les différentes nations, pourvu qu’elles lui fassent confiance et lui reconnaissent en fait une authentique liberté pour l’accomplissement de sa mission. C’est pourquoi l’Église avertit ses fils, et même tous les hommes, qu’il leur faut dépasser, dans cet esprit de la famille des enfants de Dieu, toutes les dissensions entre nations et entre races et consolider de l’intérieur les légitimes associations humaines.

5. Tout ce qu’il y a de vrai, de bon, de juste, dans les institutions très variées que s’est données et que continue à se donner le genre humain, le Concile le considère donc avec un grand respect. Il déclare aussi que l’Église veut aider et promouvoir toutes ces institutions, pour autant qu’il dépend d’elle, et que cette tâche est compatible avec sa mission. Ce qu’elle désire par-dessus tout, c’est de pouvoir se développer librement, à l’avantage de tous, sous tout régime qui reconnaît les droits fondamentaux de la personne, de la famille, et les impératifs du bien commun.

43. Aide que l’Église, par les chrétiens, cherche à apporter à l’activité humaine

1. Le Concile exhorte les chrétiens, citoyens de l’une et de l’autre cité, à remplir avec zèle et fidélité leurs tâches terrestres, en se laissant conduire par l’esprit de l’Évangile. Ils s’éloignent de la vérité ceux qui, sachant que nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais que nous marchons vers la cité future [92] croient pouvoir, pour cela, négliger leurs tâches humaines, sans s’apercevoir que la foi même, compte tenu de la vocation de chacun, leur en fait un devoir plus pressant [93]. Mais ils ne se trompent pas moins ceux qui, à l’inverse, croient pouvoir se livrer entièrement à des activités terrestres en agissant comme si elles étaient tout à fait étrangères à leur vie religieuse – celle-ci se limitant alors pour eux à l’exercice du culte et à quelques obligations morales déterminées. Ce divorce entre la foi dont ils se réclament et le comportement quotidien d’un grand nombre est à compter parmi les plus graves erreurs de notre temps. Ce scandale, déjà dans l’Ancien Testament les prophètes le dénonçaient avec véhémence [94] et, dans le Nouveau Testament avec plus de force, Jésus Christ lui-même le menaçait de graves châtiments [95]. Que l’on ne crée donc pas d’opposition artificielle entre les activités professionnelles et sociales d’une part, la vie religieuse d’autre part. En manquant à ses obligations terrestres, le chrétien manque à ses obligations envers le prochain, bien plus, envers Dieu lui-même, et il met en danger son salut éternel. À l’exemple du Christ qui mena la vie d’un artisan, que les chrétiens se réjouissent plutôt de pouvoir mener toutes leurs activités terrestres en unissant dans une synthèse vitale tous les efforts humains, familiaux, professionnels, scientifiques, techniques, avec les valeurs religieuses, sous la souveraine ordonnance desquelles tout se trouve coordonné à la gloire de Dieu.

2. Aux laïcs reviennent en propre, quoique non exclusivement, les professions et les activités séculières. Lorsqu’ils agissent, soit individuellement, soit collectivement, comme citoyens du monde, ils auront donc à cœur, non seulement de respecter les lois propres à chaque discipline, mais d’y acquérir une véritable compétence. Ils aimeront collaborer avec ceux qui poursuivent les mêmes objectifs qu’eux. Conscients des exigences de leur foi et nourris de sa force, qu’ils n’hésitent pas, au moment opportun, à prendre de nouvelles initiatives et à en assurer la réalisation. C’est à leur conscience, préalablement formée, qu’il revient d’inscrire la loi divine dans la cité terrestre. Qu’ils attendent des prêtres lumières et forces spirituelles. Qu’ils ne pensent pas pour autant que leurs pasteurs aient une compétence telle qu’ils puissent leur fournir une solution concrète et immédiate à tout problème, même grave, qui se présente à eux, ou que telle soit leur mission. Mais plutôt, éclairés par la sagesse chrétienne, prêtant fidèlement attention à l’enseignement du Magistère [96], qu’ils prennent eux-mêmes leurs responsabilités.

3. Fréquemment, c’est leur vision chrétienne des choses qui les inclinera à telle ou telle solution, selon les circonstances. Mais d’autres fidèles, avec une égale sincérité, pourront en juger autrement, comme il advient souvent et à bon droit. S’il arrive que beaucoup lient facilement, même contre la volonté des intéressés, les options des uns ou des autres avec le message évangélique, on se souviendra en pareil cas que personne n’a le droit de revendiquer d’une manière exclusive pour son opinion l’autorité de l’Église. Que toujours, dans un dialogue sincère, ils cherchent à s’éclairer mutuellement, qu’ils gardent entre eux la charité et qu’ils aient avant tout le souci du bien commun.

4. Les laïcs, qui doivent activement participer à la vie totale de l’Église, ne doivent pas seulement s’en tenir à l’animation chrétienne du monde, mais ils sont aussi appelés à être, en toutes circonstances et au cœur même de la communauté humaine, les témoins du Christ.

5. Quant aux évêques, qui ont reçu la charge de diriger l’Église de Dieu, qu’ils prêchent avec leurs prêtres le message du Christ de telle façon que toutes les activités terrestres des fidèles puissent être baignées de la lumière de l’Évangile. En outre, que tous les pasteurs se souviennent que, par leur comportement quotidien et leur sollicitude [97], ils manifestent au monde un visage de l’Église d’après lequel les hommes jugent de la force et de la vérité du message chrétien. Par leur vie et par leur parole, unis aux religieux et à leurs fidèles, qu’ils fassent ainsi la preuve que l’Église, par sa seule présence, avec tous les dons qu’elle apporte, est une source inépuisable de ces énergies dont le monde d’aujourd’hui a le plus grand besoin. Qu’ils se mettent assidûment à l’étude, pour être capables d’assumer leurs responsabilités dans le dialogue avec le monde et avec des hommes de toute opinion. Mais surtout, qu’ils gardent dans leur cœur ces paroles du Concile : « Parce que le genre humain, aujourd’hui de plus en plus, tend à l’unité civile, économique et sociale, il est d’autant plus nécessaire que les prêtres, unissant leurs préoccupations et leurs moyens sous la conduite des évêques et du Souverain Pontife, écartent tout motif de dispersion pour amener l’humanité entière à l’unité de la famille de Dieu. [98] »

6. Bien que l’Église, par la vertu de l’Esprit Saint, soit restée l’épouse fidèle de son Seigneur et n’ait jamais cessé d’être dans le monde le signe du salut, elle sait fort bien toutefois que, au cours de sa longue histoire, parmi ses membres [99], clercs et laïcs, il n’en manque pas qui se sont montrés infidèles à l’Esprit de Dieu. De nos jours aussi, l’Église n’ignore pas quelle distance sépare le message qu’elle révèle et la faiblesse humaine de ceux auxquels cet Évangile est confié. Quel que soit le jugement de l’histoire sur ces défaillances, nous devons en être conscients et les combattre avec vigueur afin qu’elles ne nuisent pas à la diffusion de l’Évangile. Pour développer ses rapports avec le monde, l’Église sait également combien elle doit continuellement apprendre de l’expérience des siècles. Guidée par l’Esprit Saint, l’Église, notre Mère, ne cesse d’exhorter ses fils à se purifier et à se renouveler, « pour que le signe du Christ brille avec plus d’éclat sur le visage de l’Église [100] ».

44. Aide que l’Église reçoit du monde d’aujourd’hui

1. De même qu’il importe au monde de reconnaître l’Église comme une réalité sociale de l’histoire et comme son ferment, de même l’Église n’ignore pas tout ce qu’elle a reçu de l’histoire et de l’évolution du genre humain.

2. L’expérience des siècles passés, le progrès des sciences, les richesses cachées dans les diverses cultures, qui permettent de mieux connaître l’homme lui-même et ouvrent de nouvelles voies à la vérité, sont également utiles à l’Église. En effet, dès les débuts de son histoire, elle a appris à exprimer le message du Christ en se servant des concepts et des langues des divers peuples et, de plus, elle s’est efforcée de le mettre en valeur par la sagesse des philosophes : ceci afin d’adapter l’Évangile, dans les limites convenables, et à la compréhension de tous et aux exigences des sages. À vrai dire, cette manière appropriée de proclamer la parole révélée doit demeurer la loi de toute évangélisation. C’est de cette façon, en effet, que l’on peut susciter en toute nation la possibilité d’exprimer le message chrétien selon le mode qui lui convient, et que l’on promeut en même temps un échange vivant entre l’Église et les diverses cultures [101]. Pour accroître de tels échanges, l’Église, surtout de nos jours où les choses vont si vite et où les façons de penser sont extrêmement variées, a particulièrement besoin de l’apport de ceux qui vivent dans le monde, et en épousent les formes mentales, qu’il s’agisse des croyants ou des incroyants. Il revient à tout le Peuple de Dieu, notamment aux pasteurs et aux théologiens, avec l’aide de l’Esprit Saint, de scruter, de discerner et d’interpréter les multiples langages de notre temps et de les juger à la lumière de la parole divine, pour que la vérité révélée puisse être sans cesse mieux perçue, mieux comprise et présentée sous une forme plus adaptée.

3. Comme elle possède une structure sociale visible, signe de son unité dans le Christ, l’Église peut aussi être enrichie, et elle l’est effectivement, par le déroulement de la vie sociale : non pas comme s’il manquait quelque chose dans la constitution que le Christ lui a donnée, mais pour l’approfondir, la mieux exprimer et l’accommoder d’une manière plus heureuse à notre époque. L’Église constate avec reconnaissance qu’elle reçoit une aide variée de la part d’hommes de tout rang et de toute condition, aide qui profite aussi bien à la communauté qu’elle forme qu’à chacun de ses fils. En effet, tous ceux qui contribuent au développement de la communauté humaine au plan familial, culturel, économique et social, politique (tant au niveau national qu’au niveau international), apportent par le fait même, et en conformité avec le plan de Dieu, une aide non négligeable à la communauté ecclésiale, pour autant que celle-ci dépend du monde extérieur. Bien plus, l’Église reconnaît que, de l’opposition même de ses adversaires et de ses persécuteurs, elle a tiré de grands avantages et qu’elle peut continuer à le faire [102].

45. Le Christ, alpha et oméga

1. Qu’elle aide le monde ou qu’elle reçoive de lui, l’Église tend vers un but unique : que vienne le règne de Dieu et que s’établisse le salut du genre humain. D’ailleurs, tout le bien que le Peuple de Dieu, au temps de son pèlerinage terrestre, peut procurer à la famille humaine, découle de cette réalité que l’Église est « le sacrement universel du salut [103] » manifestant et actualisant tout à la fois le mystère de l’amour de Dieu pour l’homme.

2. Car le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui-même fait chair, afin que, homme parfait, il sauve tous les hommes et récapitule toutes choses en lui. Le Seigneur est le terme de l’histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l’histoire et de la civilisation, le centre du genre humain, la joie de tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations [104]. C’est lui que le Père a ressuscité d’entre les morts, a exalté et à fait siéger à sa droite, le constituant juge des vivants et des morts. Vivifiés et rassemblés en son Esprit, nous marchons vers la consommation de l’histoire humaine qui correspond pleinement à son dessein d’amour : « ramener toutes choses sous un seul chef, le Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre » (Ep 1, 10).

3. C’est le Seigneur lui-même qui le dit : « Voici que je viens bientôt et ma rétribution est avec moi, pour rendre à chacun selon ses œuvres. Je suis l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin» (Ap 22, 12-13).

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Message par admin2 Ven 20 Mai 2011 - 2:49

Aucune loi humaine ne peut assurer la dignité personnelle et la liberté de l’homme comme le fait l’Évangile du Christ, confié à l’Église. Cet Évangile annonce et proclame la liberté des enfants de Dieu, rejette tout esclavage qui enfin de compte provient du péché [87], respecte scrupuleusement la dignité de la conscience et son libre choix, enseigne sans relâche à faire fructifier tous les talents humains au service de Dieu et pour le bien des hommes, enfin confie chacun à l’amour de tous [88].
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Message par Francesco Mar 24 Mai 2011 - 2:12

Deuxième partie :
De quelques problèmes plus urgents



46. Introduction

1. Après avoir montré quelle est la dignité de la personne humaine et quel rôle individuel et social elle est appelée à remplir dans l’univers, le Concile, fort de la lumière de l’Évangile et de l’expérience humaine, attire maintenant l’attention de tous sur quelques questions particulièrement urgentes de ce temps qui affectent au plus haut point le genre humain.

2. Parmi les nombreux sujets qui suscitent aujourd’hui l’intérêt général, il faut notamment retenir ceux-ci : le mariage et la famille, la culture, la vie économico-sociale, la vie politique, la solidarité des peuples et la paix. Sur chacun d’eux, il convient de projeter la lumière des principes qui nous viennent du Christ ; ainsi les chrétiens seront-ils guidés et tous les hommes éclairés dans la recherche des solutions que réclament des problèmes si nombreux et si complexes.



CHAPITRE PREMIER :
Dignité du mariage et de la famille

47. Le mariage et la famille dans le monde d’aujourd’hui

1. La santé de la personne et de la société tant humaine que chrétienne est étroitement liée à la prospérité de la communauté conjugale et familiale. Aussi les chrétiens, en union avec tous ceux qui font grand cas de cette communauté, se réjouissent-ils sincèrement des soutiens divers qui font grandir aujourd’hui parmi les hommes l’estime de cette communauté d’amour et le respect de la vie, et qui aident les époux et les parents dans leur éminente mission. Ils en attendent en outre de meilleurs résultats et s’appliquent à les étendre.

2. La dignité de cette institution ne brille pourtant pas partout du même éclat puisqu’elle est ternie par la polygamie, l’épidémie du divorce, l’amour soi-disant libre, ou d’autres déformations. De plus, l’amour conjugal est trop souvent profané par l’égoïsme, l’hédonisme et par des pratiques illicites entravant la génération. Les conditions économiques, socio-psychologiques et civiles d’aujourd’hui introduisent aussi dans la famille de graves perturbations. Enfin, en certaines régions de l’univers, ce n’est pas sans inquiétude qu’on observe les problèmes posés par l’accroissement démographique. Tout cela angoisse les consciences. Et pourtant, un fait montre bien la vigueur et la solidité de l’institution matrimoniale et familiale : les transformations profondes de la société contemporaine, malgré les difficultés qu’elle provoquent, font très souvent apparaître, et de diverses façons, la nature véritable de cette institution.

3. C’est pourquoi le Concile, en mettant en meilleure lumière certains points de la doctrine de l’Église, se propose d’éclairer et d’encourager les chrétiens, ainsi que tous ceux qui s’efforcent de sauvegarder et de promouvoir la dignité originelle et la valeur privilégiée et sacrée de l’état de mariage.

48. Sainteté du mariage et de la famille

1. La communauté profonde de vie et d’amour que forme le couple a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur ; elle est établie sur l’alliance des conjoints, c’est-à-dire sur leur consentement personnel irrévocable. Une institution, que la loi divine confirme, naît ainsi, au regard même de la société, de l’acte humain par lequel les époux se donnent et se reçoivent mutuellement. En vue du bien des époux, des enfants et aussi de la société, ce lien sacré échappe à la fantaisie de l’homme. Car Dieu lui-même est l’auteur du mariage qui possède en propre des valeurs et des fins diverses [105] ; tout cela est d’une extrême importance pour la continuité du genre humain, pour le progrès personnel et le sort éternel de chacun des membres de la famille, pour la dignité, la stabilité, la paix et la prospérité de la famille et de la société humaine tout entière. Et c’est par sa nature même que l’institution du mariage et l’amour conjugal sont ordonnés à la procréation et à l’éducation qui, tel un sommet, en constituent le couronnement. Aussi l’homme et la femme qui, par l’alliance conjugale « ne sont plus deux, mais une seule chair » (Mt 19, 6), s’aident et se soutiennent mutuellement par l’union intime de leurs personnes et de leurs activités ; ils prennent ainsi conscience de leur unité et l’approfondissent sans cesse davantage. Cette union intime, don réciproque de deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent l’entière fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité [106].

2. Le Christ Seigneur a comblé de bénédictions cet amour aux multiples aspects, issu de la source divine de la charité, et constitué à l’image de son union avec l’Église. De même en effet que Dieu prit autrefois l’initiative d’une alliance d’amour et de fidélité avec son peuple [107], ainsi, maintenant, le Sauveur des hommes, Époux de l’Église [108], vient à la rencontre des époux chrétiens par le sacrement de mariage. Il continue de demeurer avec eux pour que les époux, par leur don mutuel, puissent s’aimer dans une fidélité perpétuelle, comme lui-même a aimé l’Église et s’est livré pour elle [109]. L’authentique amour conjugal est assumé dans l’amour divin et il est dirigé et enrichi par la puissance rédemptrice du Christ et l’action salvifique de l’Église, afin de conduire efficacement à Dieu les époux, de les aider et de les affermir dans leur mission sublime de père et de mère [110]. C’est pourquoi les époux chrétiens, pour accomplir dignement les devoirs de leur état, sont fortifiés et comme consacrés par un sacrement spécial [111]. En accomplissant leur mission conjugale et familiale avec la force de ce sacrement, pénétrés de l’Esprit du Christ qui imprègne toute leur vie de foi, d’espérance et de charité, ils parviennent de plus en plus à leur perfection personnelle et à leur sanctification mutuelle ; c’est ainsi qu’ensemble ils contribuent à la glorification de Dieu.

3. Précédés par l’exemple et la prière commune de leurs parents, les enfants, et même tous ceux qui vivent dans le cercle familial, s’ouvriront ainsi plus facilement à des sentiments d’humanité et trouveront plus aisément le chemin du salut et de la sainteté. Quant aux époux, grandis par la dignité de leur rôle de père et de mère, ils accompliront avec conscience le devoir d’éducation qui leur revient au premier chef, notamment au plan religieux.

4. Membres vivants de la famille, les enfants concourent, à leur manière, à la sanctification des parents. Par leur reconnaissance, leur piété filiale et leur confiance, ils répondront assurément aux bienfaits de leurs parents et, en bons fils, ils les assisteront dans les difficultés de l’existence et dans la solitude de la vieillesse. Le veuvage, assumé avec courage dans le sillage de la vocation conjugale, sera honoré de tous [112]. Les familles se communiqueront aussi avec générosité leurs richesses spirituelles. Alors, la famille chrétienne, parce qu’elle est issue d’un mariage, sera image et participation de l’alliance d’amour qui unit le Christ et l’Église [113], manifestera à tous les hommes la présence vivante du Sauveur dans le monde et la véritable nature de l’Église, tant par l’amour des époux, leur fécondité généreuse, l’unité et la fidélité du foyer, que par la coopération amicale de tous ses membres.

49. L’amour conjugal

1. À plusieurs reprises, la Parole de Dieu a invité les fiancés à entretenir et soutenir leurs fiançailles par une affection chaste, et les époux leur union par un amour sans faille [114]. Beaucoup de nos contemporains exaltent aussi l’amour authentique entre mari et femme, manifesté de différentes manières, selon les saines coutumes des peuples et des âges. Éminemment humain puisqu’il va d’une personne vers une autre personne en vertu d’un sentiment volontaire, cet amour enveloppe le bien de la personne tout entière ; il peut donc enrichir d’une dignité particulière les expressions du corps et de la vie psychique et les valoriser comme les éléments et les signes spécifiques de l’amitié conjugale. Cet amour, par un don spécial de sa grâce et de sa charité, le Seigneur a daigné le guérir, le parfaire et l’élever. Associant l’humain et le divin, un tel amour conduit les époux à un don libre et mutuel d’eux-mêmes qui se manifeste par des sentiments et des gestes de tendresse et il imprègne toute leur vie [115] ; bien plus, il s’achève lui-même et grandit par son généreux exercice. Il dépasse donc de loin l’inclination simplement érotique qui, cultivée pour elle-même, s’évanouit vite et d’une façon pitoyable.

2. Cette affection a sa manière particulière de s’exprimer et de s’accomplir par l’œuvre propre du mariage. En conséquence, les actes qui réalisent l’union intime et chaste des époux sont des actes honnêtes et dignes. Vécus d’une manière vraiment humaine, ils signifient et favorisent le don réciproque par lequel les époux s’enrichissent tous les deux dans la joie et la reconnaissance. Cet amour, ratifié par un engagement mutuel, et par-dessus tout consacré par le sacrement du Christ, demeure indissolublement fidèle, de corps et de pensée, pour le meilleur et pour le pire ; il exclut donc tout adultère et tout divorce. De même, l’égale dignité personnelle qu’il faut reconnaître à la femme et à l’homme dans l’amour plénier qu’ils se portent l’un à l’autre fait clairement apparaître l’unité du mariage, confirmée par le Seigneur. Pour faire face avec persévérance aux obligations de cette vocation chrétienne, une vertu peu commune est requise : c’est pourquoi les époux, rendus capables par la grâce de mener une vie sainte, ne cesseront d’entretenir en eux un amour fort, magnanime, prompt au sacrifice, et ils le demanderont dans leur prière.

3. Mais le véritable amour conjugal sera tenu en plus haute estime, et une saine opinion publique se formera à son égard, si les époux chrétiens donnent ici un témoignage éminent de fidélité et d’harmonie, comme le dévouement dans l’éducation de leurs enfants, et s’ils prennent leurs responsabilités dans le nécessaire renouveau culturel, psychologique et social en faveur du mariage et de la famille. Il faut instruire à temps les jeunes, et de manière appropriée, de préférence au sein de la famille, sur la dignité de l’amour conjugal, sa fonction, son exercice : ainsi formés à la chasteté, ils pourront le moment venu, s’engager dans le mariage après des fiançailles vécues dans la dignité.

50. Fécondité du mariage

1. Le mariage et l’amour conjugal sont d’eux-mêmes ordonnés à la procréation et à l’éducation. D’ailleurs, les enfants sont le don le plus excellent du mariage et ils contribuent grandement au bien des parents eux-mêmes. Dieu lui-même qui a dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul» (Gn 2, 18) et qui dès l’origine a fait l’être humain homme et femme (Mt 19, 4), a voulu lui donner une participation spéciale dans son œuvre créatrice ; aussi a-t-il béni l’homme et la femme, disant : « Soyez féconds et multipliez-vous » (Gn 1, 28). Dès lors, un amour conjugal vrai et bien compris, comme toute la structure de la vie familiale qui en découle, tendent, sans sous-estimer pour autant les autres fins du mariage, à rendre les époux disponibles pour coopérer courageusement à l’amour du Créateur et du Sauveur qui, par eux, veut sans cesse agrandir et enrichir sa propre famille.

2. Dans le devoir qui leur incombe de transmettre la vie et d’être des éducateurs (ce qu’il faut considérer comme leur mission propre), les époux savent qu’ils sont les coopérateurs de l’amour du Dieu Créateur et comme ses interprètes. Ils s’acquitteront donc de leur charge en toute responsabilité humaine et chrétienne, et, dans un respect plein de docilité à l’égard de Dieu, d’un commun accord et d’un commun effort, ils se formeront un jugement droit : ils prendront en considération à la fois et leur bien et celui des enfants déjà nés ou à naître ; ils discerneront les conditions aussi bien matérielles que spirituelles de leur époque et de leur situation ; ils tiendront compte enfin du bien de la communauté familiale, des besoins de la société temporelle et de l’Église elle-même. Ce jugement, ce sont en dernier ressort les époux eux-mêmes qui doivent l’arrêter devant Dieu. Dans leur manière d’agir, que les époux chrétiens sachent bien qu’ils ne peuvent pas se conduire à leur guise, mais qu’ils ont l’obligation de toujours suivre leur conscience, une conscience qui doit se conformer à la loi divine ; et qu’ils demeurent dociles au Magistère de l’Église, interprète autorisé de cette loi à la lumière de l’Évangile. Cette loi divine manifeste la pleine signification de l’amour conjugal, elle le protège et le conduit à son achèvement vraiment humain. Ainsi, lorsque les époux chrétiens, se fiant à la Providence de Dieu et nourrissant en eux l’esprit de sacrifice [116] , assument leur rôle procréateur et prennent généreusement leurs responsabilités humaines et chrétiennes, ils rendent gloire au Créateur, et ils tendent, dans le Christ, à la perfection. Parmi ceux qui remplissent ainsi la tâche que Dieu leur a confiée, il faut accorder une mention spéciale à ceux qui, d’un commun accord et d’une manière réfléchie, acceptent de grand cœur d’élever dignement même un plus grand nombre d’enfants [117].

3. Le mariage cependant n’est pas institué en vue de la seule procréation. Mais c’est le caractère même de l’alliance indissoluble qu’il établit entre les personnes, comme le bien des enfants, qui requiert que l’amour mutuel des époux s’exprime lui aussi dans sa rectitude, progresse et s’épanouisse. C’est pourquoi, même si, contrairement au vœu souvent très vif des époux, il n’y a pas d’enfant, le mariage, comme communauté et communion de toute la vie, demeure, et il garde sa valeur et son indissolubilité.

51. L’amour conjugal et le respect de la vie humaine

1. Le Concile ne l’ignore pas, les époux qui veulent conduire harmonieusement leur vie conjugale se heurtent souvent de nos jours à certaines conditions de vie et peuvent se trouver dans une situation où il ne leur est pas possible, au moins pour un temps, d’accroître le nombre de leurs enfants ; ce n’est point alors sans difficulté que sont maintenues la pratique d’un amour fidèle et la pleine communauté de vie. Là où l’intimité conjugale est interrompue, la fidélité peut courir des risques et le bien des enfants être compromis : car en ce cas sont mis en péril et l’éducation des enfants et le courage nécessaire pour en accepter d’autres ultérieurement.

2. Il en est qui osent apporter des solutions malhonnêtes à ces problèmes et même qui ne reculent pas devant le meurtre. Mais l’Église rappelle qu’il ne peut y avoir de véritable contradiction entre les lois divines qui régissent la transmission de la vie et celles qui favorisent l’amour conjugal authentique.

3. En effet, Dieu, maître de la vie, a confié aux hommes le noble ministère de la vie, et l’homme doit s’en acquitter d’une manière digne de lui. La vie doit donc être sauvegardée avec un soin extrême dès la conception : l’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables. La sexualité propre à l’homme, comme le pouvoir humain d’engendrer, l’emportent merveilleusement sur ce qui existe aux degrés inférieurs de la vie ; il s’ensuit que les actes spécifiques de la vie conjugale, accomplis selon l’authentique dignité humaine, doivent être eux-mêmes entourés d’un grand respect. Lorsqu’il s’agit de mettre en accord l’amour conjugal avec la transmission responsable de la vie, la moralité du comportement ne dépend donc pas de la seule sincérité de l’intention et de la seule appréciation des motifs ; mais elle doit être déterminée selon des critères objectifs, tirés de la nature même de la personne et de ses actes, critères qui respectent, dans un contexte d’amour véritable, la signification totale d’une donation réciproque et d’une procréation à la mesure de l’homme ; chose impossible si la vertu de chasteté conjugale n’est pas pratiquée d’un cœur loyal. En ce qui concerne la régulation des naissances, il n’est pas permis aux enfants de l’Église, fidèles à ces principes, d’emprunter des voies que le Magistère, dans l’explication de la loi divine, désapprouve [118].

4. Par ailleurs, que tous sachent bien que la vie humaine et la charge de la transmettre ne se limitent pas aux horizons de ce monde et n’y trouvent ni leur pleine dimension, ni leur plein sens, mais qu’elles sont toujours à mettre en référence avec la destinée éternelle des hommes.

52. La promotion du mariage et de la famille est le fait de tous

1. La famille est en quelque sorte une école d’enrichissement humain. Mais, pour qu’elle puisse atteindre la plénitude de sa vie et de sa mission, elle exige une communion des âmes empreinte d’affection, une mise en commun des pensées entre les époux et aussi une attentive coopération des parents dans l’éducation des enfants. La présence agissante du père importe grandement à leur formation ; mais il faut aussi permettre à la mère, dont les enfants, surtout les plus jeunes, ont tant besoin, de prendre soin de son foyer sans toutefois négliger la légitime promotion sociale de la femme. Que les enfants soient éduqués de telle manière qu’une fois adultes, avec une entière conscience de leur responsabilité, ils puissent suivre leur vocation, y compris une vocation religieuse, et choisir leur état de vie, et que, s’ils se marient, ils puissent fonder leur propre famille dans des conditions morales, sociales et économiques favorables. Il appartient aux parents ou aux tuteurs de guider les jeunes par des avis prudents, dans la fondation d’un foyer ; volontiers écoutés des jeunes, ils veilleront toutefois à n’exercer aucune contrainte, directe ou indirecte, sur eux, soit pour les pousser au mariage, soit pour choisir leur conjoint.

2. Ainsi la famille, lieu de rencontre de plusieurs générations qui s’aident mutuellement à acquérir une sagesse plus étendue et à harmoniser les droits des personnes avec les autres exigences de la vie sociale, constitue-t-elle le fondement de la société. Voilà pourquoi tous ceux qui exercent une influence sur les communautés et les groupes sociaux doivent s’appliquer efficacement à promouvoir le mariage et la famille. Que le pouvoir civil considère comme un devoir sacré de reconnaître leur véritable nature, de les protéger et de les faire progresser, de défendre la moralité publique et de favoriser la prospérité des foyers. Il faut garantir le droit de procréation des parents et le droit d’élever leurs enfants au sein de la famille. Une législation prévoyante et des initiatives variées doivent également défendre et procurer l’aide qui convient à ceux qui, par malheur, sont privés d’une famille.

3. Les chrétiens, tirant parti du temps présent [119], et discernant bien ce qui est éternel de ce qui change, devront activement promouvoir les valeurs du mariage et de la famille ; ils le feront et par le témoignage de leur vie personnelle et par une action concertée avec tous les hommes de bonne volonté. Ainsi, les difficultés écartées, ils pourvoiront aux besoins de la famille et lui assureront les avantages qui conviennent aux temps nouveaux. Pour y parvenir, le sens chrétien des fidèles, la droite conscience morale des hommes, comme la sagesse et la compétence de ceux qui s’appliquent aux sciences sacrées, seront d’un grand secours.

4. Les spécialistes des sciences, notamment biologiques, médicales, sociales et psychologiques, peuvent beaucoup pour la cause du mariage et de la famille et la paix des consciences si, par l’apport convergent de leurs études, ils s’appliquent à tirer davantage au clair les diverses conditions favorisant une saine régulation de la procréation humaine.

5. Il appartient aux prêtres, dûment informés en matière familiale, de soutenir la vocation des époux dans leur vie conjugale et familiale par les divers moyens de la pastorale, par la prédication de la parole divine, par le culte liturgique ou les autres secours spirituels, de les fortifier avec bonté et patience au milieu de leurs difficultés et de les réconforter avec charité pour qu’ils forment des familles vraiment rayonnantes.

6. Des œuvres variées, notamment les associations familiales, s’efforceront par la doctrine et par l’action d’affermir les jeunes gens et les époux, surtout ceux qui sont récemment mariés, et de les former à la vie familiale, sociale et apostolique.

7. Enfin, que les époux eux-mêmes créés à l’image d’un Dieu vivant et établis dans un ordre authentique de personnes, soient unis dans une même affection, dans une même pensée et dans une mutuelle sainteté [120], en sorte que, à la suite du Christ, principe de vie [121], ils deviennent, à travers les joies et les sacrifices de ce mystère de charité que le Seigneur a révélé au monde par sa mort et sa résurrection [122].



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Message par Francesco Mer 25 Mai 2011 - 0:28

CHAPITRE II :
L’essor de la culture

53. Introduction

1. C’est le propre de la personne humaine de n’accéder vraiment et pleinement à l’humanité que par la culture, c’est-à-dire en cultivant les biens et les valeurs de la nature. Toutes les fois qu’il est question de vie humaine, nature et culture sont aussi étroitement liées que possible.

2. Au sens large, le mot « culture » désigne tout ce par quoi l’homme affine et développe les multiples capacités de son esprit et de son corps ; s’efforce de soumettre l’univers par la connaissance et le travail ; humanise la vie sociale, aussi bien la vie familiale que l’ensemble de la vie civile, grâce au progrès des mœurs et des institutions ; traduit, communique et conserve enfin dans ses œuvres, au cours des temps, les grandes expériences spirituelles et les aspirations majeures de l’homme, afin qu’elles servent au progrès d’un grand nombre et même de tout le genre humain.

3. Il en résulte que la culture humaine comporte nécessairement un aspect historique et social et que le mot « culture » prend souvent un sens sociologique et même ethnologique. En ce sens, on parlera de la pluralité des cultures. Car des styles de vie divers et des échelles de valeurs différentes trouvent leur source dans la façon particulière que l’on a de se servir des choses, de travailler, de s’exprimer, de pratiquer sa religion, de se conduire, de légiférer, d’établir des institutions juridiques, d’enrichir les sciences et les arts et de cultiver le beau. Ainsi, à partir des usages hérités, se forme un patrimoine propre à chaque communauté humaine. De même, par là se constitue un milieu déterminé et historique dans lequel tout homme est inséré, quels que soient sa nation ou son siècle, et d’où il tire les valeurs qui lui permettront de promouvoir la civilisation.



Section 1. Situation de la culture dans le monde actuel

54. Nouveaux styles de vie

Les conditions de vie de l’homme moderne, au point de vue social et culturel, ont été profondément transformées, si bien que l’on peut parler d’un nouvel âge de l’histoire humaine [123]. Dès lors, des voies nouvelles s’ouvrent pour parfaire et étendre la culture. Elles ont été préparées par une poussée considérable des sciences naturelles, humaines et aussi sociales, par le développement des techniques et par l’essor et une meilleure organisation des moyens qui permettent aux hommes de communiquer entre eux. La culture moderne peut donc se caractériser ainsi : les sciences dites « exactes » développent au maximum le sens critique ; les recherches les plus récentes de la psychologie expliquent en profondeur l’activité humaine ; les disciplines historiques poussent fortement à envisager les choses sous leur aspect changeant et évolutif ; coutumes et manières de vivre tendent à s’uniformiser de plus en plus ; l’industrialisation, l’urbanisation et les autres causes qui favorisent la vie collective, créent de nouvelles formes de culture (culture de masse), d’où résultent des façons nouvelles de sentir, d’agir et d’utiliser ses loisirs. En même temps, l’accroissement des échanges entre les différentes nations et les groupes sociaux découvre plus largement à tous et à chacun les richesses des diverses cultures, et ainsi se prépare peu à peu un type de civilisation plus universel qui fait avancer l’unité du genre humain et l’exprime, dans la mesure même où il respecte mieux les particularités de chaque culture.

55. L’homme, promoteur de la culture

À quelque groupe ou nation qu’ils appartiennent, le nombre des hommes et des femmes qui prennent conscience d’être les artisans et les promoteurs de la culture de leur communauté croît sans cesse. Dans le monde entier progresse de plus en plus le sens de l’autonomie comme de la responsabilité ; ce qui, sans aucun doute, est de la plus haute importance pour la maturité spirituelle et morale du genre humain. On s’en aperçoit mieux encore si on ne perd pas de vue l’unification de l’univers et la mission qui nous est impartie de construire un monde meilleur dans la vérité et la justice. Nous sommes donc les témoins de la naissance d’un nouvel humanisme ; l’homme s’y définit avant tout par la responsabilité qu’il assume envers ses frères et devant l’histoire.

56. Difficultés et devoirs

1. Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que l’homme, se sentant responsable du progrès culturel, soit animé d’un plus grand espoir, mais envisage aussi avec quelque anxiété les nombreuses antinomies qu’il lui faut résoudre.

2. Que faut-il faire pour que la multiplication des échanges culturels, qui devraient aboutir à un dialogue vrai et fructueux entre les divers groupes et nations, ne bouleverse pas la vie des communautés, ne fasse pas échec à la sagesse ancestrale et ne mette pas en péril le génie propre de chaque peuple ?

3. Comment favoriser le dynamisme et l’expansion d’une culture nouvelle sans que disparaisse la fidélité vivante à l’héritage des traditions ? Cette question se pose avec une acuité particulière lorsqu’il s’agit d’harmoniser la culture, fruit du développement considérable des sciences et des techniques, avec la culture qui se nourrit d’études classiques, conformes aux différentes traditions.

4. Comment l’émiettement si rapide et croissant des disciplines spécialisées peut-il se concilier avec la nécessité d’en faire la synthèse et avec le devoir de sauvegarder dans l’humanité les puissances de contemplation et d’admiration qui conduisent à la sagesse ?

5. Que faire pour permettre aux multitudes de participer aux bienfaits de la culture, alors que la culture des élites ne cesse de s’élever et de se compliquer toujours ?

6. Comment, enfin, reconnaître comme légitime l’autonomie que la culture réclame pour elle-même, sans pour autant en venir à un humanisme purement terrestre et même hostile à la religion ?

7. C’est au cœur même de ces antinomies que la culture doit aujourd’hui progresser, de façon à épanouir intégralement et harmonieusement la personne humaine, de façon aussi à aider les hommes à accomplir les charges auxquelles tous sont appelés, et particulièrement les chrétiens, fraternellement unis au sein de l’unique famille humaine.



Section 2. Quelques principes relatifs à la promotion culturelle

57. Foi et culture

1. Les chrétiens, en marche vers la cité céleste, doivent rechercher et goûter les choses d’en haut [124], mais cela pourtant, loin de la diminuer, accroît plutôt la gravité de l’obligation qui est la leur de travailler avec tous les hommes à la construction d’un monde plus humain. Et, de fait, le mystère de la foi chrétienne leur fournit des stimulants et des soutiens inappréciables : ils leur permettent de s’adonner avec plus d’élan à cette tâche et surtout de découvrir l’entière signification des activités capables de donner à la culture sa place éminente dans la vocation intégrale de l’homme.

2. En effet, lorsqu’il cultive la terre de ses mains ou avec l’aide de moyens techniques, pour qu’elle produise des fruits et devienne une demeure digne de toute la famille humaine, et lorsqu’il prend part consciemment à la vie des groupes sociaux, l’homme réalise le plan de Dieu, manifesté au commencement des temps, de dominer la terre [125] et d’achever la création, et il se cultive lui-même. En même temps, il obéit au grand commandement du Christ de se dépenser au service de ses frères.

3. En outre, en s’appliquant aux diverses disciplines, philosophie, histoire, mathématiques, sciences naturelles, et en cultivant les arts, l’homme peut grandement contribuer à ouvrir la famille humaine aux plus nobles valeurs du vrai, du bien et du beau, et à une vue des choses ayant valeur universelle : il reçoit ainsi des clartés nouvelles de cette admirable Sagesse qui depuis toujours était auprès de Dieu, disposant toutes choses avec lui, jouant sur le globe de la terre et trouvant ses délices parmi les enfants des hommes [126].

4. Par le fait même, l’esprit humain, moins esclave des choses, peut plus facilement s’élever à l’adoration et à la contemplation du Créateur. Bien plus, il est préparé à reconnaître, sous l’impulsion de la grâce, le Verbe de Dieu qui, avant de se faire chair pour tout sauver et récapituler en lui, « était déjà dans le monde » comme la « vraie lumière qui éclaire tout homme » (Jn 1, 9-10) [127].

5. Certes, le progrès actuel des sciences et des techniques qui, en vertu de leur méthode, ne sauraient parvenir jusqu’aux profondeurs de la réalité, peut avantager un certain phénoménisme et un certain agnosticisme, lorsque les méthodes de recherche propres à ces disciplines sont prises, à tort, comme règle suprême pour la découverte de toute vérité. Et même on peut craindre que l’homme se fiant trop aux découvertes actuelles, en vienne à penser qu’il se suffit à lui-même et qu’il n’a plus à chercher de valeurs plus hautes.

6. Cependant ces conséquences fâcheuses ne découlent pas nécessairement de la culture moderne et de doivent pas nous exposer à la tentation de méconnaître ses valeurs positives. Parmi celles-ci, il convient de signaler : le goût des sciences et la fidélité sans défaillance à la vérité dans les recherches scientifiques, la nécessité de travailler en équipe dans des groupes spécialisés, le sens de la solidarité internationale, la conscience de plus en plus nette de la responsabilité que les savants ont d’aider et même de protéger les hommes, la volonté de procurer à tous des conditions de vie plus favorables, à ceux-là surtout qui sont privés de responsabilité ou qui souffrent d’indigence culturelle. Dans toutes ces valeurs, l’accueil du message évangélique pourra trouver une sorte de préparation, et la charité divine de celui qui est venu pour sauver le monde la fera aboutir.

58. Nombreux rapports entre la Bonne Nouvelle du Christ et la culture

1. Entre le message de salut et la culture, il y a de multiples liens. Car Dieu, en se révélant à son peuple jusqu’à sa pleine manifestation dans son Fils incarné, a parlé selon des types de culture propres à chaque époque.

2. De la même façon, l’Église, qui a connu au cours des temps des conditions d’existence variées, a utilisé les ressources des diverses cultures pour répandre et exposer par sa prédication le message du Christ à toutes les nations, pour mieux le découvrir et mieux l’approfondir, pour l’exprimer plus parfaitement dans la célébration liturgique comme dans la vie multiforme de la communauté des fidèles.

3. Mais en même temps, l’Église, envoyée à tous les peuples de tous les temps et de tous les lieux, n’est liée d’une manière exclusive et indissoluble à aucune race ou nation, à aucun genre de vie particulier, à aucune coutume ancienne ou récente. Constamment fidèle à sa propre tradition et tout à la fois consciente de l’universalité de sa mission, elle peut entrer en communion avec les diverses civilisations : d’où l’enrichissement qui en résulte pour elle-même et pour les différentes cultures.

4. La Bonne Nouvelle du Christ rénove constamment la vie et la culture de l’homme déchu ; elle combat et écarte les erreurs et les maux qui proviennent de la séduction permanente du péché. Elle ne cesse de purifier et d’élever la moralité des peuples. Par les richesses d’en haut, elle féconde comme de l’intérieur les qualités spirituelles et les dons propres à chaque peuple et à chaque âge, elle les fortifie, les parfait et les restaure dans le Christ [128]. Ainsi l’Église, en remplissant sa propre mission [129], concourt déjà, par là même, à l’œuvre civilisatrice et elle y pousse ; son action, même liturgique, contribue à former la liberté intérieure de l’homme.

59. Réaliser l’harmonie des différentes valeurs au sein des cultures

1. Pour les raisons que l’on vient de dire, l’Église rappelle à tous que la culture doit être subordonnée au développement intégral de la personne, au bien de la communauté et à celui du genre humain tout entier. Aussi convient-il de cultiver l’esprit en vue de développer les puissances d’admiration, de contemplation, d’aboutir à la formation d’un jugement personnel et d’élever le sens religieux, moral et social.

2. La culture, en effet, puisqu’elle découle immédiatement du caractère raisonnable et social de l’homme, a sans cesse besoin d’une juste liberté pour s’épanouir et d’une légitime autonomie d’action, en conformité avec ses propres principes. Elle a donc droit au respect et jouit d’une certaine inviolabilité, à condition, évidemment, de sauvegarder les droits de la personne et de la société, particulière ou universelle, dans les limites du bien commun.

3. Ce saint Synode, reprenant à son compte l’enseignement du premier Concile du Vatican, déclare qu’il existe « deux ordres de savoir » distincts, celui de la foi et celui de la raison, et que l’Église ne s’oppose certes pas à ce que « les arts et les disciplines humaines jouissent de leurs propres principes et de leur méthode en leurs domaines respectifs » ; c’est pourquoi, « reconnaissant cette juste liberté», l’Église affirme l’autonomie légitime de la culture et particulièrement celle des sciences [130].

4. Tout ceci exige que, l’ordre moral et l’intérêt commun étant saufs, l’homme puisse librement chercher la vérité, faire connaître et divulguer ses opinions et s’adonner aux arts de son choix. Cela demande enfin qu’il soit informé impartialement des événements de la vie publique [131].

5. Quant aux pouvoirs publics, il leur revient, non pas de déterminer le caractère propre de la civilisation, mais d’établir les conditions et de prendre les moyens susceptibles de favoriser la vie culturelle au bénéfice de tous, sans oublier les éléments minoritaires présents dans une nation [132]. Voilà pourquoi il faut éviter à tout prix que la culture, détournée de sa propre fin, soit asservie aux pouvoirs politiques et économiques.



Section 3. Quelques devoirs plus urgents des chrétiens par rapport à la culture

60. La reconnaissance du droit de tous à la culture et sa réalisation pratique

1. Puisqu’on a maintenant la possibilité de délivrer la plupart des hommes du fléau de l’ignorance, il est un devoir qui convient au plus haut point à notre temps, surtout pour les chrétiens : celui de travailler avec acharnement à ce que, tant en matière économique qu’en matière politique, tant au plan national qu’au plan international, des décisions fondamentales soient prises de nature à faire reconnaître partout et pour tous, en harmonie avec la dignité de la personne humaine, sans distinction de race, de sexe, de nation, de religion ou de condition sociale, le droit à la culture et d’assurer sa réalisation. Il faut donc procurer à chacun une quantité suffisante de biens culturels, surtout de ceux qui constituent la culture dite « de base», pour qu’un très grand nombre ne soient pas empêchés, par l’analphabétisme et le manque d’initiative, de coopérer de manière vraiment humaine au bien commun.

2. En conséquence, il faut tendre à donner à ceux qui en sont capables la possibilité de poursuivre des études supérieures ; et de telle façon que, dans la mesure du possible, ils occupent des fonctions, jouent un rôle et rendent des services dans la vie sociale qui correspondent soit à leurs aptitudes, soit à la compétence qu’ils auront acquise [133]. Ainsi tout homme comme les groupes sociaux de chaque peuple pourront atteindre leur plein épanouissement culturel, conformément à leurs dons et à leurs traditions.

3. Il faut en outre tout faire pour que chacun prenne conscience et du droit et du devoir qu’il a de se cultiver, non moins que de l’obligation qui lui incombe d’aider les autres à le faire. Il existe en effet, ici ou là, des conditions de vie et de travail qui contrarient les efforts des hommes vers la culture et qui en détruisent chez eux le goût. Ceci vaut à un titre spécial pour les agriculteurs et les ouvriers, auxquels il faut assurer des conditions de travail telles qu’elles ne les empêchent pas de se cultiver, mais bien plutôt les y poussent. Les femmes travaillent à présent dans presque tous les secteurs d’activité ; il convient cependant qu’elles puissent pleinement jouer leur rôle selon leurs aptitudes propres. Ce sera le devoir de tous de reconnaître la participation spécifique et nécessaire des femmes à la vie culturelle et de la promouvoir.

61. Formation à une culture intégrale

1. De nos jours, plus que par le passé, la difficulté est grande d’opérer la synthèse entre les différentes disciplines et branches du savoir. En effet, tandis que s’accroissent la masse et la diversité des éléments culturels, dans le même temps s’amenuise la faculté pour chaque homme de les percevoir et de les harmoniser entre eux, si bien que l’image de « l’homme universel » s’évanouit de plus en plus. Cependant continue de s’imposer à chaque homme le devoir de sauvegarder l’intégralité de sa personnalité, en qui prédominent les valeurs d’intelligence, de volonté, de conscience et de fraternité, valeurs qui ont toutes leur fondement en Dieu Créateur et qui ont été guéries et élevées d’une manière admirable dans le Christ.

2. La famille est au premier chef comme la mère nourricière de cette éducation : en elle, les enfants, enveloppés d’amour, découvrent plus aisément la hiérarchie des valeurs, tandis que des éléments d’une culture éprouvée s’impriment d’une manière presque inconsciente dans l’esprit des adolescents, au fur et à mesure qu’ils grandissent.

3. Pour cette même éducation, les sociétés actuelles disposent, en particulier grâce à la diffusion croissante des livres et aux nouveaux moyens de communication culturelle et sociale, de ressources opportunes qui peuvent faciliter l’universalité de la culture. En effet, avec la diminution plus ou moins généralisée du temps de travail, les occasions de se cultiver se multiplient pour la plupart des hommes. Que les loisirs soient bien employés, pour se détendre et pour fortifier la santé de l’esprit et du corps : en se livrant à des activités libres et à des études désintéressées ; à l’occasion de voyages en d’autres régions (tourisme) qui affinent l’intelligence et qui, de surcroît, enrichissent chacun par la connaissance de l’autre ; également par des exercices physiques et des activités sportives qui aident à conserver un bon équilibre psychique, individuellement et aussi collectivement, et à établir des relations fraternelles entre les hommes de toutes conditions, de toutes nations ou de races différentes. Que les chrétiens collaborent donc aux manifestations et aux actions culturelles collectives qui sont de leur temps, qu’ils les humanisent et les imprègnent d’esprit chrétien.

4. Cependant tous ces avantages ne sauraient parvenir à réaliser l’éducation culturelle intégrale de l’homme si, en même temps, on néglige de s’interroger sur la signification profonde de la culture et de la science pour la personne humaine.

62. Harmonie entre culture et christianisme

1. Bien que l’Église ait largement contribué au progrès de la culture, l’expérience montre toutefois que, pour des raisons contingentes, il n’est pas toujours facile de réaliser l’harmonie entre la culture et le christianisme.

2. Ces difficultés ne portent pas nécessairement préjudice à la vitalité de la foi, et même elles peuvent inciter à une plus exacte et plus profonde intelligence de celle-ci. En effet, les plus récentes recherches et découvertes des sciences, ainsi que celles de l’histoire et de la philosophie, soulèvent de nouvelles questions qui comportent des conséquences pour la vie même, et exigent de nouvelles recherches de la part des théologiens eux-mêmes. Dès lors, tout en respectant les méthodes et les règles propres aux sciences théologiques, ils sont invités à chercher sans cesse la manière la plus apte de communiquer la doctrine aux hommes de leur temps : car autre chose est le dépôt même ou les vérités de la foi, autre chose la façon selon laquelle ces vérités sont exprimées à condition toutefois d’en sauvegarder le sens et la signification [134]. Que, dans la pastorale, on ait une connaissance suffisante non seulement des principes de la théologie, mais aussi des découvertes scientifiques profanes, notamment de la psychologie et de la sociologie, et qu’on en fasse usage : de la sorte, les fidèles à leur tour seront amenés à une plus grande pureté et maturité dans leur vie de foi.

3. À leur manière aussi, la littérature et les arts ont une grande importance pour la vie de l’Église. Ils s’efforcent en effet d’exprimer la nature propre de l’homme, ses problèmes, ses tentatives pour se connaître et se perfectionner lui-même ainsi que le monde. Ils s’appliquent à découvrir sa place dans l’histoire et dans l’univers, à mettre en lumière les misères et les joies, les besoins et les énergies des hommes et à présenter l’ébauche d’une destinée humaine plus heureuse. Ainsi sont-ils capables d’élever la vie humaine qu’ils expriment sous des formes multiples, selon les temps et les lieux.

4. Il faut donc faire en sorte que ceux qui s’adonnent à ces arts se sentent compris par l’Église au sein même de leurs activités, et que, jouissant d’une liberté normale, ils établissent des échanges plus faciles avec la communauté chrétienne. Que les nouvelles formes d’art qui conviennent à nos contemporains, selon le génie des diverses nations et régions, soient aussi reconnues par l’Église. Et qu’on les accueille dans le sanctuaire lorsque, par des modes d’expression adaptés et conformes aux exigences de la liturgie, elles élèvent l’esprit vers Dieu [135].

5. Ainsi la gloire de Dieu éclate davantage ; la prédication de l’Évangile devient plus transparente à l’intelligence des hommes et apparaît comme connaturelle à leurs conditions d’existence.

6. Que les croyants vivent donc en très étroite union avec les autres hommes de leur temps et qu’ils s’efforcent de comprendre à fond leurs façons de penser et de sentir, telles qu’elles s’expriment par la culture. Qu’ils marient la connaissance des sciences et des théories nouvelles, comme des découvertes les plus récentes, avec les mœurs et l’enseignement de la doctrine chrétienne, pour que le sens religieux et la rectitude morale marchent de pair chez eux avec la connaissance scientifique et les incessants progrès techniques ; ils pourront ainsi apprécier et interpréter toutes choses avec une sensibilité authentiquement chrétienne.

7. Ceux qui s’appliquent aux sciences théologiques dans les séminaires et les universités aimeront collaborer avec les hommes versés dans les autres sciences, en mettant en commun leurs énergies et leurs points de vue. La recherche théologique, en même temps qu’elle approfondit la vérité révélée, ne doit pas perdre contact avec son temps, afin de faciliter une meilleure connaissance de la foi aux hommes cultivés dans les différentes branches du savoir. Cette bonne entente rendra les plus grands services à la formation des ministres sacrés : ils pourront présenter la doctrine de l’Église sur Dieu, l’homme et le monde d’une manière mieux adaptée à nos contemporains, qui accueilleront d’autant plus volontiers leur parole [136]. Bien plus, il faut souhaiter que de nombreux laïcs reçoivent une formation suffisante dans les sciences sacrées, et que plusieurs parmi eux se livrent à ces études ex professo et les approfondissent. Mais, pour qu’ils puissent mener leur tâche à bien, qu’on reconnaisse aux fidèles, aux clercs comme aux laïcs, une juste liberté de recherche et de pensée, comme une juste liberté de faire connaître humblement et courageusement leur manière de voir, dans le domaine de leur compétence [137].






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Message par Francesco Mer 25 Mai 2011 - 0:32

Section 1. Situation de la culture dans le monde actuel

54. Nouveaux styles de vie

Les conditions de vie de l’homme moderne, au point de vue social et culturel, ont été profondément transformées, si bien que l’on peut parler d’un nouvel âge de l’histoire humaine [123]. Dès lors, des voies nouvelles s’ouvrent pour parfaire et étendre la culture. Elles ont été préparées par une poussée considérable des sciences naturelles, humaines et aussi sociales, par le développement des techniques et par l’essor et une meilleure organisation des moyens qui permettent aux hommes de communiquer entre eux. La culture moderne peut donc se caractériser ainsi : les sciences dites « exactes » développent au maximum le sens critique ; les recherches les plus récentes de la psychologie expliquent en profondeur l’activité humaine ; les disciplines historiques poussent fortement à envisager les choses sous leur aspect changeant et évolutif ; coutumes et manières de vivre tendent à s’uniformiser de plus en plus ; l’industrialisation, l’urbanisation et les autres causes qui favorisent la vie collective, créent de nouvelles formes de culture (culture de masse), d’où résultent des façons nouvelles de sentir, d’agir et d’utiliser ses loisirs. En même temps, l’accroissement des échanges entre les différentes nations et les groupes sociaux découvre plus largement à tous et à chacun les richesses des diverses cultures, et ainsi se prépare peu à peu un type de civilisation plus universel qui fait avancer l’unité du genre humain et l’exprime, dans la mesure même où il respecte mieux les particularités de chaque culture.

55. L’homme, promoteur de la culture

À quelque groupe ou nation qu’ils appartiennent, le nombre des hommes et des femmes qui prennent conscience d’être les artisans et les promoteurs de la culture de leur communauté croît sans cesse. Dans le monde entier progresse de plus en plus le sens de l’autonomie comme de la responsabilité ; ce qui, sans aucun doute, est de la plus haute importance pour la maturité spirituelle et morale du genre humain. On s’en aperçoit mieux encore si on ne perd pas de vue l’unification de l’univers et la mission qui nous est impartie de construire un monde meilleur dans la vérité et la justice. Nous sommes donc les témoins de la naissance d’un nouvel humanisme ; l’homme s’y définit avant tout par la responsabilité qu’il assume envers ses frères et devant l’histoire.

56. Difficultés et devoirs

1. Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que l’homme, se sentant responsable du progrès culturel, soit animé d’un plus grand espoir, mais envisage aussi avec quelque anxiété les nombreuses antinomies qu’il lui faut résoudre.

2. Que faut-il faire pour que la multiplication des échanges culturels, qui devraient aboutir à un dialogue vrai et fructueux entre les divers groupes et nations, ne bouleverse pas la vie des communautés, ne fasse pas échec à la sagesse ancestrale et ne mette pas en péril le génie propre de chaque peuple ?

3. Comment favoriser le dynamisme et l’expansion d’une culture nouvelle sans que disparaisse la fidélité vivante à l’héritage des traditions ? Cette question se pose avec une acuité particulière lorsqu’il s’agit d’harmoniser la culture, fruit du développement considérable des sciences et des techniques, avec la culture qui se nourrit d’études classiques, conformes aux différentes traditions.

4. Comment l’émiettement si rapide et croissant des disciplines spécialisées peut-il se concilier avec la nécessité d’en faire la synthèse et avec le devoir de sauvegarder dans l’humanité les puissances de contemplation et d’admiration qui conduisent à la sagesse ?

5. Que faire pour permettre aux multitudes de participer aux bienfaits de la culture, alors que la culture des élites ne cesse de s’élever et de se compliquer toujours ?

6. Comment, enfin, reconnaître comme légitime l’autonomie que la culture réclame pour elle-même, sans pour autant en venir à un humanisme purement terrestre et même hostile à la religion ?

7. C’est au cœur même de ces antinomies que la culture doit aujourd’hui progresser, de façon à épanouir intégralement et harmonieusement la personne humaine, de façon aussi à aider les hommes à accomplir les charges auxquelles tous sont appelés, et particulièrement les chrétiens, fraternellement unis au sein de l’unique famille humaine.




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Message par Francesco Mer 1 Juin 2011 - 4:18

CHAPITRE III :
L’activité humaine dans l’univers

33. Position du problème

1. Par son travail et son génie, l’homme s’est toujours efforcé de donner un plus large développement à sa vie. Mais aujourd’hui, aidé par la science et la technique, il a étendu sa maîtrise sur presque toute la nature, et il ne cesse de l’étendre ; et, grâce notamment à la multiplication des moyens d’échange de toutes sortes entre les nations, la famille humaine se reconnaît et se constitue peu à peu comme une communauté une au sein de l’univers. Il en résulte que l’homme se procure désormais par sa propre industrie de nombreux biens qu’il attendait autrefois avant tout de forces supérieures.

2. Devant cette immense entreprise, qui gagne déjà tout le genre humain, de nombreuses interrogations s’élèvent parmi les hommes : quels sont le sens et la valeur de cette laborieuse activité ? Quel usage faire de toutes ces richesses ? Quelle est la fin de ces efforts, individuels et collectifs ? L’Église, gardienne du dépôt de la parole divine, où elle puise les principes de l’ordre religieux et moral, n’a pas toujours, pour autant, une réponse immédiate à chacune de ces questions ; elle désire toutefois joindre la lumière de la Révélation à l’expérience de tous, pour éclairer le chemin où l’humanité vient de s’engager.

34. Valeur de l’activité humaine

1. Pour les croyants, une chose est certaine : considérée en elle-même, l’activité humaine, individuelle et collective, ce gigantesque effort par lequel les hommes, tout au long des siècles, s’acharnent à améliorer leurs conditions de vie, correspond au dessein de Dieu. L’homme, créé à l’image de Dieu, a en effet reçu la mission de soumettre la terre et tout ce qu’elle contient, de gouverner le cosmos en sainteté et justice [56] et, en reconnaissant Dieu comme Créateur de toutes choses, de lui référer son être ainsi que l’univers : en sorte que, tout étant soumis à l’homme, le nom même de Dieu soit glorifié par toute la terre [57].

2. Cet enseignement vaut aussi pour les activités les plus quotidiennes. Car ces hommes et ces femmes qui, tout en gagnant leur vie et celle de leur famille, mènent leurs activités de manière à bien servir la société, sont fondés à voir dans leur travail un prolongement de l’œuvre du Créateur, un service de leurs frères, un apport personnel à la réalisation du plan providentiel dans l’histoire [58].

3. Loin d’opposer les conquêtes du génie et du courage de l’homme à la puissance de Dieu et de considérer la créature raisonnable comme une sorte de rivale du Créateur, les chrétiens sont au contraire bien persuadés que les victoires du genre humain sont un signe de la grandeur divine et une conséquence de son dessein ineffable. Mais plus grandit le pouvoir de l’homme plus s’élargit le champ de ses responsabilités, personnelles et communautaires. On voit par là que le message chrétien ne détourne pas les hommes de la construction du monde et ne les incite pas à se désintéresser du sort de leurs semblables : il leur en fait au contraire un devoir plus pressant [59].

35. Normes de l’activité humaine

1. De même qu’elle procède de l’homme, l’activité humaine lui est ordonnée. De fait, par son action, l’homme ne transforme pas seulement les choses et la société, il se parfait lui-même. Il apprend bien des choses, il développe ses facultés, il sort de lui-même et se dépasse. Cet essor, bien conduit, est d’un tout autre prix que l’accumulation possible de richesses extérieures. L’homme vaut plus par ce qu’il est que par ce qu’il a [60]. De même, tout ce que font les hommes pour faire régner plus de justice, une fraternité plus étendue, un ordre plus humain dans les rapports sociaux, dépasse en valeur les progrès techniques. Car ceux-ci peuvent bien fournir la base matérielle de la promotion humaine, mais ils sont tout à fait impuissants, par eux seuls, à la réaliser.

2. Voici donc la règle de l’activité humaine : qu’elle soit conforme au bien authentique de l’humanité, selon le dessein et la volonté de Dieu, et qu’elle permette à l’homme, considéré comme individu ou comme membre de la société, de s’épanouir selon la plénitude de sa vocation.

36. Juste autonomie des réalités terrestres

1. Pourtant, un grand nombre de nos contemporains semblent redouter un lien étroit entre l’activité concrète et la religion : ils y voient un danger pour l’autonomie des hommes, des sociétés et des sciences.

2. Si, par autonomie des réalités terrestres, on veut dire que les choses créées et les sociétés elles-mêmes ont leurs lois et leurs valeurs propres, que l’homme doit peu à peu apprendre à connaître, à utiliser et à organiser, une telle exigence d’autonomie est pleinement légitime : non seulement elle est revendiquée par les hommes de notre temps, mais elle correspond à la volonté du Créateur. C’est en vertu de la création même que toutes choses sont établies selon leur ordonnance et leurs lois et leurs valeurs propres, que l’homme doit peu à peu apprendre à connaître, à utiliser et à organiser. Une telle exigence d’autonomie est pleinement légitime : non seulement elle est revendiquée par les hommes de notre temps, mais elle correspond à la volonté du Créateur. C’est en vertu de la création même que toutes choses sont établies selon leur consistance, leur vérité et leur excellence propres, avec leur ordonnance et leurs lois spécifiques. L’homme doit respecter tout cela et reconnaître les méthodes particulières à chacune des sciences et techniques. C’est pourquoi la recherche méthodique, dans tous les domaines du savoir, si elle est menée d’une manière vraiment scientifique et si elle suit les normes de la morale, ne sera jamais réellement opposée à la foi : les réalités profanes et celles de la foi trouvent leur origine dans le même Dieu [61]. Bien plus, celui qui s’efforce, avec persévérance et humilité, de pénétrer les secrets des choses, celui-là, même s’il n’en a pas conscience, est comme conduit par la main de Dieu, qui soutient tous les êtres et les fait ce qu’ils sont. À ce propos, qu’on nous permette de déplorer certaines attitudes qui ont existé parmi les chrétiens eux-mêmes, insuffisamment avertis de la légitime autonomie de la science. Sources de tensions et de conflits, elles ont conduit beaucoup d’esprits jusqu’à penser que science et foi s’opposaient [62].

3. Mais si, par « autonomie du temporel», on veut dire que les choses créées ne dépendent pas de Dieu et que l’homme peut en disposer sans référence au Créateur, la fausseté de tels propos ne peut échapper à quiconque reconnaît Dieu. En effet, la créature sans Créateur s’évanouit. Du reste, tous les croyants, à quelque religion qu’ils appartiennent, ont toujours entendu la voix de Dieu et sa manifestation, dans le langage des créatures. Et même, l’oubli de Dieu rend opaque la créature elle-même.

37. L’activité humaine détériorée par le péché

1. En accord avec l’expérience des siècles, l’Écriture enseigne à la famille humaine que le progrès, grand bien pour l’homme, entraîne aussi avec lui une sérieuse tentation. En effet, lorsque la hiérarchie des valeurs est troublée et que le mal et le bien s’entremêlent, les individus et groupes ne regardent plus que leurs intérêts propres et non ceux des autres. Aussi le monde ne se présente pas encore comme le lieu d’une réelle fraternité, tandis que le pouvoir accru de l’homme menace de détruire le genre humain lui-même.

2. Un dur combat contre les puissances des ténèbres passe à travers toute l’histoire des hommes ; commencé dès les origines, il durera, le Seigneur nous l’a dit [63] jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille, l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien ; et ce n’est qu’au prix de grands efforts, avec la grâce de Dieu, qu’il parvient à réaliser son unité intérieure.

3. C’est pourquoi l’Église du Christ reconnaît, certes, que le progrès humain peut servir au bonheur véritable des hommes, et elle fait ainsi confiance au dessein du Créateur ; mais elle ne peut pas cependant ne pas faire écho à la parole de l’Apôtre : « Ne vous modelez pas sur le monde présent » (Rm 12, 2), c’est-à-dire sur cet esprit de vanité et de malice qui change l’activité humaine, ordonnée au service de Dieu et de l’homme, en instrument de péché.

4. À qui demande comment une telle misère peut être surmontée, les chrétiens confessent que toutes les activités humaines, quotidiennement déviées par l’orgueil de l’homme et l’amour désordonné de soi, ont besoin d’être purifiées et amenées à leur perfection par la croix et la résurrection du Christ. Racheté par le Christ et devenu une nouvelle créature dans l’Esprit Saint, l’homme peut et doit, en effet, aimer ces choses que Dieu lui-même a créées. Car c’est de Dieu qu’il les reçoit : il les voit comme jaillissant de sa main et les respecte. Pour elles, il remercie son divin bienfaiteur, il en use et il en jouit dans un esprit de pauvreté et de liberté ; il est alors introduit dans la possession véritable du monde, comme quelqu’un qui n’a rien et qui possède tout [64]. « Car tout est à vous, mais vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu » (1 Co 3, 22-23).

38. L’activité humaine et son achèvement dans le mystère pascal

1. Le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui-même fait chair et est venu habiter la terre des hommes [65]. Homme parfait, il est entré dans l’histoire du monde, l’assumant et la récapitulant en lui [66]. C’est lui qui nous révèle que « Dieu est charité » (cf. 1 Jn 4, 8) et qui nous enseigne en même temps que la loi fondamentale de la perfection humaine, et donc de la transformation du monde, est le commandement nouveau de l’amour. À ceux qui croient à la divine charité, il apporte ainsi la certitude que la voie de l’amour est ouverte à tous les hommes et que l’effort qui tend à instaurer une fraternité universelle n’est pas vain. Il nous avertit aussi que cette charité ne doit pas seulement s’exercer dans des actions d’éclat, mais, et avant tout, dans le quotidien de la vie. En acceptant de mourir pour nous tous, pécheurs [67], il nous apprend, par son exemple, que nous devons aussi porter cette croix que la chair et le monde font peser sur les épaules de ceux qui poursuivent la justice et la paix. Constitué Seigneur par sa résurrection, le Christ à qui tout pouvoir a été donné, au ciel et sur la terre [68] agit désormais dans le cœur des hommes par la puissance de son Esprit ; il anime aussi, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à soumettre à cette fin la terre entière. Assurément les dons de l’Esprit sont divers : tandis qu’il appelle certains à témoigner ouvertement du désir de la demeure céleste et à garder vivant ce témoignage dans la famille humaine, il appelle les autres à se vouer au service terrestre des hommes, préparant par ce ministère la matière du Royaume des cieux. Mais de tous il fait des hommes libres pour que, renonçant à l’amour-propre et rassemblant toutes les énergies terrestres pour la vie humaine, ils s’élancent vers l’avenir, vers ce temps où l’humanité elle-même deviendra une offrande agréable à Dieu [69].

2. Le Seigneur a laissé aux siens les arrhes de cette espérance et un aliment pour la route : le sacrement de la foi, dans lequel des éléments de la nature, cultivés par l’homme, sont changés en son Corps et en son Sang glorieux. C’est le repas de la communion fraternelle, une anticipation du banquet céleste.

39. Terre nouvelle et cieux nouveaux

1. Nous ignorons le temps de l’achèvement de la terre et de l’humanité [70], nous ne connaissons pas le mode de transformation du cosmos. Elle passe, certes, la figure de ce monde déformée par le péché [71]; mais, nous l’avons appris, Dieu nous prépare une nouvelle terre où régnera la justice [72] et dont la béatitude comblera et dépassera tous les désirs de paix qui montent au cœur de l’homme [73]. Alors, la mort vaincue, les fils de Dieu ressusciteront dans le Christ, et ce qui fut semé dans la faiblesse et la corruption revêtira l’incorruptibilité [74]. La charité et ses œuvres demeureront [75] et toute cette création que Dieu a faite pour l’homme sera délivrée de l’esclavage de la vanité [76].

2. Certes, nous savons bien qu’il ne sert à rien à l’homme de gagner l’univers s’il vient à se perdre lui-même [77], mais l’attente de la nouvelle terre, loin d’affaiblir en nous le souci de cultiver cette terre, doit plutôt le réveiller : le corps de la nouvelle famille humaine y grandit, qui offre déjà quelque ébauche du siècle à venir. C’est pourquoi, s’il faut soigneusement distinguer le progrès terrestre de la croissance du règne du Christ, ce progrès a cependant beaucoup d’importance pour le Royaume de Dieu, dans la mesure où il peut contribuer à une meilleure organisation de la société humaine [78].

3. Car ces valeurs de dignité, de communion fraternelle et de liberté, tous ces fruits de notre nature et de notre industrie, que nous aurons propagés sur terre selon le commandement du Seigneur et dans son Esprit, nous les retrouverons plus tard, mais purifiés de toute souillure, illuminés, transfigurés, lorsque le Christ remettra à son Père « un Royaume éternel et universel : Royaume de vérité et de vie, Royaume de sainteté et de grâce, Royaume de justice, d’amour et de paix [79] ». Mystérieusement, le Royaume est déjà présent sur cette terre ; il atteindra sa perfection quand le Seigneur reviendra.



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Message par Francesco Ven 3 Juin 2011 - 2:04

CHAPITRE IV :
Le rôle de l’Église dans le monde de ce temps

40. Rapports mutuels de l’Église et du monde

1. Tout ce que nous avons dit sur la dignité de la personne humaine, sur la communauté des hommes, sur le sens profond de l’activité humaine, constitue le fondement du rapport qui existe entre l’Église et le monde, et la base de leur dialogue mutuel [80]. C’est pourquoi, en supposant acquis tout l’enseignement déjà fixé par le Concile sur le mystère de l’Église, ce chapitre va maintenant traiter de cette même Église en tant qu’elle est dans ce monde et qu’elle vit et agit avec lui.

2. Née de l’amour du Père éternel [81], fondée dans le temps par le Christ rédempteur, rassemblée dans l’Esprit Saint [82], l’Église poursuit une fin salvifique et eschatologique qui ne peut être pleinement atteinte que dans le siècle à venir. Mais, dès maintenant présente sur cette terre, elle se compose d’hommes, de membres de la cité terrestre, qui ont vocation de former, au sein même de l’histoire humaine, la famille des enfants de Dieu, qui doit croître sans cesse jusqu’à la venue du Seigneur. Unie en vue des biens célestes, riche de ces biens, cette famille « a été constituée et organisée en ce monde comme une société [83] » par le Christ, et elle a été dotée « de moyens capables d’assurer son union visible et sociale [84] ». À la fois « assemblée visible et communauté spirituelle [85] », l’Église fait ainsi route avec toute l’humanité et partage le sort terrestre du monde ; elle est comme le ferment et, pour ainsi dire, l’âme de la société humaine [86] appelée à être renouvelée dans le Christ et transformée en famille de Dieu.

3. À vrai dire, cette compénétration de la cité terrestre et de la cité céleste ne peut être perçue que par la foi ; bien plus, elle demeure le mystère de l’histoire humaine qui, jusqu’à la pleine révélation de la gloire des fils de Dieu, sera troublée par le péché. Mais l’Église, en poursuivant la fin salvifique qui lui est propre, ne communique pas seulement à l’homme la vie divine ; elle répand aussi, et d’une certaine façon sur le monde entier, la lumière que cette vie divine irradie, notamment en guérissant et en élevant la dignité de la personne humaine, en affermissant la cohésion de la société et en procurant à l’activité quotidienne des hommes un sens plus profond, la pénétrant d’une signification plus haute. Ainsi, par chacun de ses membres comme par toute la communauté qu’elle forme, l’Église croit pouvoir largement contribuer à humaniser toujours plus la famille des hommes et son histoire.

4. En outre, l’Église catholique fait grand cas de la contribution que les autres Églises chrétiennes ou communautés ecclésiales ont apportée et continuent d’apporter à la réalisation de ce même but ; et elle s’en réjouit. En même temps, elle est fermement convaincue que, pour préparer les voies à l’Évangile, le monde peut lui apporter une aide précieuse et diverse par les qualités et l’activité des individus ou des sociétés qui le composent. Voici quelques principes généraux concernant le bon développement des échanges entre l’Église et le monde et de leur aide mutuelle dans les domaines qui leur sont en quelque sorte communs.

41. Aide que l’Église veut offrir à tout homme

1. L’homme moderne est en marche vers un développement plus complet de sa personnalité, vers une découverte et une affirmation toujours croissantes de ses droits. L’Église, pour sa part, qui a reçu la mission de manifester le mystère de Dieu, de ce Dieu qui est la fin ultime de l’homme, révèle en même temps à l’homme le sens de sa propre existence, c’est-à-dire sa vérité essentielle. L’Église sait parfaitement que Dieu seul, dont elle est la servante, répond aux plus profonds désirs du cœur humain que jamais ne rassasient pleinement les nourritures terrestres. Elle sait aussi que l’homme, sans cesse sollicité par l’Esprit de Dieu, ne sera jamais tout à fait indifférent au problème religieux, comme le prouvent non seulement l’expérience des siècles passés, mais de multiples témoignages de notre temps. L’homme voudra toujours connaître, ne serait-ce que confusément, la signification de sa vie, de ses activités et de sa mort. Ces problèmes, la présence même de l’Église les lui rappelle. Or Dieu seul, qui a créé l’homme à son image et l’a racheté du péché, peut répondre à ces questions en plénitude. Il le fait par la révélation dans son Fils, qui s’est fait homme. Quiconque suit le Christ, homme parfait, devient lui-même plus homme.

2. Appuyée sur cette foi, l’Église peut soustraire la dignité de la nature humaine à toutes les fluctuations des opinions qui, par exemple, rabaissent exagérément le corps humain, ou au contraire l’exaltent sans mesure. Aucune loi humaine ne peut assurer la dignité personnelle et la liberté de l’homme comme le fait l’Évangile du Christ, confié à l’Église. Cet Évangile annonce et proclame la liberté des enfants de Dieu, rejette tout esclavage qui enfin de compte provient du péché [87], respecte scrupuleusement la dignité de la conscience et son libre choix, enseigne sans relâche à faire fructifier tous les talents humains au service de Dieu et pour le bien des hommes, enfin confie chacun à l’amour de tous [88]. Tout cela correspond à la loi fondamentale de l’économie chrétienne. Car, si le même Dieu est à la fois Créateur et Sauveur, Seigneur et de l’histoire humaine et de l’histoire du salut, cet ordre divin lui-même, loin de supprimer la juste autonomie de la créature, et en particulier de l’homme, la rétablit et la confirme au contraire dans sa dignité.

3. C’est pourquoi l’Église, en vertu de l’Évangile qui lui a été confié, proclame les droits des hommes, reconnaît et tient en grande estime le dynamisme de notre temps qui, partout, donne un nouvel élan à ces droits. Ce mouvement toutefois doit être imprégné de l’esprit de l’Évangile et garanti contre toute idée de fausse autonomie. Nous sommes, en effet, exposés à la tentation d’estimer que nos droits personnels ne sont pleinement maintenus que lorsque nous sommes dégagés de toute norme de la loi divine. Mais, en suivant cette voie, la dignité humaine, loin d’être sauvée, s’évanouit.

42. Aide que l’Église cherche à apporter à la société humaine

1. L’union de la famille humaine trouve une grande vigueur et son achèvement dans l’unité de la famille des fils de Dieu, fondée dans le Christ [89].

2. Certes, la mission propre que le Christ a confiée à son Église n’est ni d’ordre politique, ni d’ordre économique ou social : le but qu’il lui a assigné est d’ordre religieux [90]. Mais, précisément, de cette mission religieuse découlent une fonction, des lumières et des forces qui peuvent servir à constituer et à affermir la communauté des hommes selon la loi divine. De même, lorsqu’il le faut et compte tenu des circonstances de temps et de lieu, l’Église peut elle-même, et elle le doit, susciter des œuvres destinées au service de tous, notamment des indigents, comme les œuvres charitables et autres du même genre.

3. L’Église reconnaît aussi tout ce qui est bon dans le dynamisme social d’aujourd’hui, en particulier le mouvement vers l’unité, les progrès d’une saine socialisation et de la solidarité au plan civique et économique. En effet, promouvoir l’unité s’harmonise avec la mission profonde de l’Église, puisqu’elle est « dans le Christ, comme le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu, et de l’unité de tout le genre humain [91]». Sa propre réalité manifeste ainsi au monde qu’une véritable union sociale visible découle de l’union des esprits et des cœurs, à savoir de cette foi et de cette charité, sur lesquelles, dans l’Esprit Saint, son unité est indissolublement fondée. Car l’énergie que l’Église est capable d’insuffler à la société moderne se trouve dans cette foi et dans cette charité effectivement vécues et ne s’appuie pas sur une souveraineté extérieure qui s’exercerait par des moyens purement humains.

4. Comme de plus, de par sa mission et sa nature, l’Église n’est liée à aucune forme particulière de culture, ni à aucun système politique, économique ou social, par cette universalité même, l’Église peut être un lien très étroit entre les différentes communautés humaines et entre les différentes nations, pourvu qu’elles lui fassent confiance et lui reconnaissent en fait une authentique liberté pour l’accomplissement de sa mission. C’est pourquoi l’Église avertit ses fils, et même tous les hommes, qu’il leur faut dépasser, dans cet esprit de la famille des enfants de Dieu, toutes les dissensions entre nations et entre races et consolider de l’intérieur les légitimes associations humaines.

5. Tout ce qu’il y a de vrai, de bon, de juste, dans les institutions très variées que s’est données et que continue à se donner le genre humain, le Concile le considère donc avec un grand respect. Il déclare aussi que l’Église veut aider et promouvoir toutes ces institutions, pour autant qu’il dépend d’elle, et que cette tâche est compatible avec sa mission. Ce qu’elle désire par-dessus tout, c’est de pouvoir se développer librement, à l’avantage de tous, sous tout régime qui reconnaît les droits fondamentaux de la personne, de la famille, et les impératifs du bien commun.

43. Aide que l’Église, par les chrétiens, cherche à apporter à l’activité humaine

1. Le Concile exhorte les chrétiens, citoyens de l’une et de l’autre cité, à remplir avec zèle et fidélité leurs tâches terrestres, en se laissant conduire par l’esprit de l’Évangile. Ils s’éloignent de la vérité ceux qui, sachant que nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais que nous marchons vers la cité future [92] croient pouvoir, pour cela, négliger leurs tâches humaines, sans s’apercevoir que la foi même, compte tenu de la vocation de chacun, leur en fait un devoir plus pressant [93]. Mais ils ne se trompent pas moins ceux qui, à l’inverse, croient pouvoir se livrer entièrement à des activités terrestres en agissant comme si elles étaient tout à fait étrangères à leur vie religieuse – celle-ci se limitant alors pour eux à l’exercice du culte et à quelques obligations morales déterminées. Ce divorce entre la foi dont ils se réclament et le comportement quotidien d’un grand nombre est à compter parmi les plus graves erreurs de notre temps. Ce scandale, déjà dans l’Ancien Testament les prophètes le dénonçaient avec véhémence [94] et, dans le Nouveau Testament avec plus de force, Jésus Christ lui-même le menaçait de graves châtiments [95]. Que l’on ne crée donc pas d’opposition artificielle entre les activités professionnelles et sociales d’une part, la vie religieuse d’autre part. En manquant à ses obligations terrestres, le chrétien manque à ses obligations envers le prochain, bien plus, envers Dieu lui-même, et il met en danger son salut éternel. À l’exemple du Christ qui mena la vie d’un artisan, que les chrétiens se réjouissent plutôt de pouvoir mener toutes leurs activités terrestres en unissant dans une synthèse vitale tous les efforts humains, familiaux, professionnels, scientifiques, techniques, avec les valeurs religieuses, sous la souveraine ordonnance desquelles tout se trouve coordonné à la gloire de Dieu.

2. Aux laïcs reviennent en propre, quoique non exclusivement, les professions et les activités séculières. Lorsqu’ils agissent, soit individuellement, soit collectivement, comme citoyens du monde, ils auront donc à cœur, non seulement de respecter les lois propres à chaque discipline, mais d’y acquérir une véritable compétence. Ils aimeront collaborer avec ceux qui poursuivent les mêmes objectifs qu’eux. Conscients des exigences de leur foi et nourris de sa force, qu’ils n’hésitent pas, au moment opportun, à prendre de nouvelles initiatives et à en assurer la réalisation. C’est à leur conscience, préalablement formée, qu’il revient d’inscrire la loi divine dans la cité terrestre. Qu’ils attendent des prêtres lumières et forces spirituelles. Qu’ils ne pensent pas pour autant que leurs pasteurs aient une compétence telle qu’ils puissent leur fournir une solution concrète et immédiate à tout problème, même grave, qui se présente à eux, ou que telle soit leur mission. Mais plutôt, éclairés par la sagesse chrétienne, prêtant fidèlement attention à l’enseignement du Magistère [96], qu’ils prennent eux-mêmes leurs responsabilités.

3. Fréquemment, c’est leur vision chrétienne des choses qui les inclinera à telle ou telle solution, selon les circonstances. Mais d’autres fidèles, avec une égale sincérité, pourront en juger autrement, comme il advient souvent et à bon droit. S’il arrive que beaucoup lient facilement, même contre la volonté des intéressés, les options des uns ou des autres avec le message évangélique, on se souviendra en pareil cas que personne n’a le droit de revendiquer d’une manière exclusive pour son opinion l’autorité de l’Église. Que toujours, dans un dialogue sincère, ils cherchent à s’éclairer mutuellement, qu’ils gardent entre eux la charité et qu’ils aient avant tout le souci du bien commun.

4. Les laïcs, qui doivent activement participer à la vie totale de l’Église, ne doivent pas seulement s’en tenir à l’animation chrétienne du monde, mais ils sont aussi appelés à être, en toutes circonstances et au cœur même de la communauté humaine, les témoins du Christ.

5. Quant aux évêques, qui ont reçu la charge de diriger l’Église de Dieu, qu’ils prêchent avec leurs prêtres le message du Christ de telle façon que toutes les activités terrestres des fidèles puissent être baignées de la lumière de l’Évangile. En outre, que tous les pasteurs se souviennent que, par leur comportement quotidien et leur sollicitude [97], ils manifestent au monde un visage de l’Église d’après lequel les hommes jugent de la force et de la vérité du message chrétien. Par leur vie et par leur parole, unis aux religieux et à leurs fidèles, qu’ils fassent ainsi la preuve que l’Église, par sa seule présence, avec tous les dons qu’elle apporte, est une source inépuisable de ces énergies dont le monde d’aujourd’hui a le plus grand besoin. Qu’ils se mettent assidûment à l’étude, pour être capables d’assumer leurs responsabilités dans le dialogue avec le monde et avec des hommes de toute opinion. Mais surtout, qu’ils gardent dans leur cœur ces paroles du Concile : « Parce que le genre humain, aujourd’hui de plus en plus, tend à l’unité civile, économique et sociale, il est d’autant plus nécessaire que les prêtres, unissant leurs préoccupations et leurs moyens sous la conduite des évêques et du Souverain Pontife, écartent tout motif de dispersion pour amener l’humanité entière à l’unité de la famille de Dieu. [98] »

6. Bien que l’Église, par la vertu de l’Esprit Saint, soit restée l’épouse fidèle de son Seigneur et n’ait jamais cessé d’être dans le monde le signe du salut, elle sait fort bien toutefois que, au cours de sa longue histoire, parmi ses membres [99], clercs et laïcs, il n’en manque pas qui se sont montrés infidèles à l’Esprit de Dieu. De nos jours aussi, l’Église n’ignore pas quelle distance sépare le message qu’elle révèle et la faiblesse humaine de ceux auxquels cet Évangile est confié. Quel que soit le jugement de l’histoire sur ces défaillances, nous devons en être conscients et les combattre avec vigueur afin qu’elles ne nuisent pas à la diffusion de l’Évangile. Pour développer ses rapports avec le monde, l’Église sait également combien elle doit continuellement apprendre de l’expérience des siècles. Guidée par l’Esprit Saint, l’Église, notre Mère, ne cesse d’exhorter ses fils à se purifier et à se renouveler, « pour que le signe du Christ brille avec plus d’éclat sur le visage de l’Église [100] ».

44. Aide que l’Église reçoit du monde d’aujourd’hui

1. De même qu’il importe au monde de reconnaître l’Église comme une réalité sociale de l’histoire et comme son ferment, de même l’Église n’ignore pas tout ce qu’elle a reçu de l’histoire et de l’évolution du genre humain.

2. L’expérience des siècles passés, le progrès des sciences, les richesses cachées dans les diverses cultures, qui permettent de mieux connaître l’homme lui-même et ouvrent de nouvelles voies à la vérité, sont également utiles à l’Église. En effet, dès les débuts de son histoire, elle a appris à exprimer le message du Christ en se servant des concepts et des langues des divers peuples et, de plus, elle s’est efforcée de le mettre en valeur par la sagesse des philosophes : ceci afin d’adapter l’Évangile, dans les limites convenables, et à la compréhension de tous et aux exigences des sages. À vrai dire, cette manière appropriée de proclamer la parole révélée doit demeurer la loi de toute évangélisation. C’est de cette façon, en effet, que l’on peut susciter en toute nation la possibilité d’exprimer le message chrétien selon le mode qui lui convient, et que l’on promeut en même temps un échange vivant entre l’Église et les diverses cultures [101]. Pour accroître de tels échanges, l’Église, surtout de nos jours où les choses vont si vite et où les façons de penser sont extrêmement variées, a particulièrement besoin de l’apport de ceux qui vivent dans le monde, et en épousent les formes mentales, qu’il s’agisse des croyants ou des incroyants. Il revient à tout le Peuple de Dieu, notamment aux pasteurs et aux théologiens, avec l’aide de l’Esprit Saint, de scruter, de discerner et d’interpréter les multiples langages de notre temps et de les juger à la lumière de la parole divine, pour que la vérité révélée puisse être sans cesse mieux perçue, mieux comprise et présentée sous une forme plus adaptée.

3. Comme elle possède une structure sociale visible, signe de son unité dans le Christ, l’Église peut aussi être enrichie, et elle l’est effectivement, par le déroulement de la vie sociale : non pas comme s’il manquait quelque chose dans la constitution que le Christ lui a donnée, mais pour l’approfondir, la mieux exprimer et l’accommoder d’une manière plus heureuse à notre époque. L’Église constate avec reconnaissance qu’elle reçoit une aide variée de la part d’hommes de tout rang et de toute condition, aide qui profite aussi bien à la communauté qu’elle forme qu’à chacun de ses fils. En effet, tous ceux qui contribuent au développement de la communauté humaine au plan familial, culturel, économique et social, politique (tant au niveau national qu’au niveau international), apportent par le fait même, et en conformité avec le plan de Dieu, une aide non négligeable à la communauté ecclésiale, pour autant que celle-ci dépend du monde extérieur. Bien plus, l’Église reconnaît que, de l’opposition même de ses adversaires et de ses persécuteurs, elle a tiré de grands avantages et qu’elle peut continuer à le faire [102].

45. Le Christ, alpha et oméga

1. Qu’elle aide le monde ou qu’elle reçoive de lui, l’Église tend vers un but unique : que vienne le règne de Dieu et que s’établisse le salut du genre humain. D’ailleurs, tout le bien que le Peuple de Dieu, au temps de son pèlerinage terrestre, peut procurer à la famille humaine, découle de cette réalité que l’Église est « le sacrement universel du salut [103] » manifestant et actualisant tout à la fois le mystère de l’amour de Dieu pour l’homme.

2. Car le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui-même fait chair, afin que, homme parfait, il sauve tous les hommes et récapitule toutes choses en lui. Le Seigneur est le terme de l’histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l’histoire et de la civilisation, le centre du genre humain, la joie de tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations [104]. C’est lui que le Père a ressuscité d’entre les morts, a exalté et à fait siéger à sa droite, le constituant juge des vivants et des morts. Vivifiés et rassemblés en son Esprit, nous marchons vers la consommation de l’histoire humaine qui correspond pleinement à son dessein d’amour : « ramener toutes choses sous un seul chef, le Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre » (Ep 1, 10).

3. C’est le Seigneur lui-même qui le dit : « Voici que je viens bientôt et ma rétribution est avec moi, pour rendre à chacun selon ses œuvres. Je suis l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin» (Ap 22, 12-13).





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