John Henri Newman (1801-1890) - La raison au service de la foi
Page 1 sur 1
John Henri Newman (1801-1890) - La raison au service de la foi
John Henri Newman (1801-1890)
La raison au service de la foi(Auteur : Sylvie Marre - Parution F&L n° 247 de Février 2006)
Le XIXème siècle baigne dans le rationalisme. L’étude historico-critique des Écritures fait alors perdre l’expérience d’une lecture dégageant le sens spirituel de la Parole et cette saveur que l’on retrouvait dans l’exégèse des Pères de l’Église. De plus, le libéralisme de nos frères anglais conduit à un refus de l’autorité, du dogme et de la transcendance de Dieu. Le fidéisme de son côté donne un rôle illimité au surnaturel… Jean-Paul II écrit au sujet de John Henry Newman : « Dans un tel monde, Newman en est arrivé à une synthèse remarquable de la foi et de la raison qui étaient pour lui "comme deux ailes grâce auxquelles l’esprit de l’homme s’élève à la contemplation de la vérité". »
Enfance et famille
John Henry Newman naît en plein cœur de Londres, dans la Old Band Street, le 21 février 1801. Peu après, sa famille part s’installer à Ham, dans la banlieue. Son père est banquier et sa mère, Jemina Fourdainier, est descendante d’une famille française de Huguenots. Baptisé, il est inscrit sur les registres de l’Église anglicane. Sa demeure paternelle est imprégnée d’une atmosphère religieuse : il y découvre la Bible par les lectures familiales, elle est pour lui sa première nourriture spirituelle. John Henry est l’aîné de six enfants. Ses deux frères n’ont jamais partagé sa foi ni ses convictions religieuses, à l’opposée de ses sœurs qui sont restées pour lui une grande consolation. Son éducation scolaire est marquée par la formation du caractère, de la raison et de la volonté. C’est un élève particulièrement doué, même en musique, ce qui n’est pas étonnant vu sa grande sensibilité. Mais sa supériorité intellectuelle et son sérieux, peu commun pour un enfant, l’isolent de ses semblables ; souvent il se montre plongé dans ses pensées.
Ses "conversions"
Durant l’automne de l’année 1816, John Henry Newman vit un grand tournant qui lui permet de prendre une direction de vie et de pensée nouvelles, décisives pour tout le reste de son existence. Par l’influence d’un clergyman, sa foi ne s’est pas perdue dans un sentimentalisme éthéré, elle cesse d’être un amas d’impressions. Il conçoit alors les vérités du christianisme comme un don amoureux de Dieu à l’homme et se demande : Seigneur, que voulez-vous que je fasse ? Il parlera souvent de cet événement tout au long de sa vie, de sa conversion qui va le transformer jusqu’à faire de lui un tout autre homme. Plus tard sa demande de passer à l’Église catholique reste le fruit d’une évolution débutée en 1816.
En 1845, il prononce un adieu final à l’anglicanisme qu’il considère comme un organisme qui ne peut plus, selon sa réflexion théologique, justifier d’être en lui-même la véritable Église du Christ. Il déclare alors solennellement que seule l’Église romaine reste, au cours de l’histoire, la fidèle gardienne de la Tradition apostolique, la messagère du dépôt de la foi chrétienne. Jean-Paul II, dans sa lettre sur Newman, écrit : « En méditant sur le mystérieux plan de Dieu enveloppant sa vie, Newman conçut un sentiment profond et constant que Dieu l’avait créé pour lui rendre un service précis. La mission particulière qui lui a été confiée par Dieu garantit que John Henry Newman appartient à toutes les époques, tous les lieux, tous les peuples ». Sa mission est en effet d’allier foi et raison de telle sorte que chacune soit un appui pour atteindre à la contemplation de la vérité. Pour lui, la personne du Christ est cette lumière inaltérable sur laquelle s’attacher en tout temps. Avant d’arriver au catholicisme, Newman vit dans le milieu universitaire d’Oxford et connaît dans son entourage toutes les nombreuses formes de protestantisme. L’anglicanisme est pour lui une via media entre le catholicisme et le protestantisme dur. Jusqu’en 1845, il essaie de justifier cette voie moyenne dans laquelle on puise aussi dans le trésor des Pères de l’Église. À travers ces textes patristiques, il découvre progressivement les richesses de la catholicité et va jusqu’à dire que son église (anglicane) est une « coquille vide » où il manque Jésus, la Présence Réelle…. Sur le chemin de cette découverte, un autre lieu important pour Newman sera le Mouvement d’Oxford dont il fut le chef de file, mouvement d’universitaires réfléchissant sur la nature de l’Église, l’Église primitive… John Keble, autre anglican, déclenchera ce mouvement en s’insurgeant dans l’un de ses sermons contre le pouvoir civil supprimant des postes anglicans en Irlande. Par leurs fameux Tracts, les membres du mouvement veulent affirmer le pouvoir surnaturel de l’Église, son identité surnaturelle. Newman a un sens profond du pas en avant que son église, la Hight Church, doit faire vers un anglo-catholicisme.
Tribulations et incompréhensions
La conversion de Newman à l’Église catholique lui demandera d’immenses sacrifices. Il perd son poste à l’université d’Oxford, l’influence dont il jouit dans son pays, la majeure partie de ses revenus et presque la totalité de ses amis. Il dira : Quand j’étais protestant, ma vie était paisible mais ma prière bien malheureuse, et depuis ma conversion, c’est l’inverse. Au cours de son séjour à Rome, on lui fait faire de médiocres études de théologie qui le préparent à la prêtrise. Après un noviciat oratorien, devenu prêtre catholique en 1848, il rentre en Angleterre pour fonder le premier oratoire selon saint Philippe Néri dans ce pays. Son centre est établi à Birmingham et plus tard dans sa banlieue, à Edgbaston. Une polémique contre Achilli, ancien dominicain, l’entraîne dans un procès qu’il perd en 1853. De 1854 à 1858, il est recteur de l’Université Catholique de Dublin, mais celle-ci ne connaît pas un essor brillant. Il démissionne alors et crée en 1859, à Edgbaston, une école catholique pour les jeunes gens en classe supérieure. Il s’investit dans cette entreprise jusqu’à sa mort. Elle a été un point fort pour soutenir le catholicisme romain en Angleterre. L’Apologia pro Vita Sua (1864), l’un de ses ouvrages les plus connus, a été rédigé après certaines incompréhensions avec le romancier et pasteur anglican Charles Kingsley. Il a aussi été longuement suspecté par Rome, à la suite de diverses diffamations, de ne pas être fidèle au dépôt de la foi. Cette "apologie" est une analyse de quarante-cinq années de vie intime : remarquable autobiographie exposée avec une puissante dialectique qui a réhabilité Newman en partie auprès de Rome et qui lui a surtout conféré un grand respect de la part de ses adversaires. Peu favorable à l’ultramontanisme(1), il se rallie toutefois en 1870, année du Concile Vatican I, au dogme de l’infaillibilité papale, par esprit d’obéissance et de soumission. De 1868 à 1881, il édite la plupart de ses écrits. Le 12 mai 1879, Léon XIII le réhabilite totalement et le nomme cardinal avec exemption du devoir de résidence à Rome. Ce titre lui est conféré en reconnaissance de tout ce qu’il a apporté à l’Église catholique en dépit de toutes les souffrances et humiliations subies. Il décède le 11 août 1890, à l’âge de 89 ans, au sein même de l’Oratoire de Birmingham qu’il a lui-même fondé.
Son œuvre, une spiritualité de l’abandon
Newman nous fait part de sa pensée et de sa réflexion théologique dans les nombreux ouvrages qu’il a édités et de ses talents de fin prédicateur qui a le souci des âmes. Son œuvre comprend des sermons, des ouvrages théologiques, historiques, avec aussi une Autobiographie souvent mise en parallèle avec Les Confessions de saint Augustin. Il a aussi rédigé deux romans, des poèmes, des journaux intimes, des prières et méditations. Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains de langue anglaise. Cette conviction de la présence de Dieu dans sa vie est omniprésente dans toute son œuvre. Elle révèle qu’il vit sans cesse ce double mouvement d’abandon, se sachant entre les mains de son Créateur et se mettant en totale dépendance de son divin dessein sur lui. Cette attitude se fonde sur un acte de foi sans cesse renouvelé. Il écrit : Quoi qu’il en soit, où que j’aille, je ne serai jamais perdu, ni rejeté de Dieu… La providence de Dieu a été merveilleuse envers moi à travers toute mon existence. Cet abandon, reflet d’une grâce toute particulière, lui a sans cesse fait attendre le recours de Dieu dans la paix, quelles que soient les circonstances : calomnies, diffamations… : Ô mon Dieu, je veux me remettre sans réserve entre tes mains. Richesse ou pauvreté, chagrin ou joie, amitié ou isolement, bonne ou mauvaise réputation, vie douce ou pénible, Ta présence ou l’épreuve de Ton absence, tout sera bon s’il vient de Toi. Cette disposition, selon le cardinal Jean Honoré, « l’établit aux frontières de l’expérience mystique, malgré sa plainte si souvent rappelée de ne connaître que sécheresse et aridité dans son oraison », oraison à laquelle il s‘est toujours plus attaché (ses dernières années sont marquées par la fréquence de ses prières devant le tabernacle). Ce mouvement intime et profond d’abandon fait émaner de lui une atmosphère de douceur et de sérénité, se sachant toujours dans la main de Dieu, aimé et soutenu par Lui.
Message d’une brûlante actualité
La sainteté de Newman n’est pas le fruit d’une recherche de perfection stéréotypée et abstraite. Elle s’enracine dans le concret de son existence, dans la vie quotidienne, dans une relation intime avec Dieu en se laissant conduire par lui. Pour Newman, le signe d’une spiritualité qui ne relève pas de l’angélisme se situe dans la constance à garder jalousement l’attention à toute chose, petite ou grande (…), la plus grande mortification étant de bien faire chaque jour les devoirs ordinaires. Cette sainteté doit rester sans cesse au cœur de la conduite du chrétien, de son zèle apostolique. Aujourd’hui encore, d’après de nombreux témoignages, il reste ce guide « d’une multitude de cœurs reconnaissants en dehors même de sa confession. (…) Il a enseigné des principes de vie et d’action plutôt que des dogmes. » (Lord Coleridge). Il a marqué la pensée de l’Église, surtout au XXème siècle. Son influence sur le dernier Concile a souvent été soulignée ; Jean Guitton a défini Newman comme « le penseur invisible de Vatican II »(2). Newman parle toujours à notre esprit, il s’adresse à chaque cœur. Ses écrits mettent en lumière les vérités de la foi, sa vie reste le reflet d’un homme qui s’est laissé façonner par la grâce, qui s’est toujours placé en toute simplicité sous le regard de Dieu, en toute droiture et confiance filiale. En 1991, Jean- Paul II le déclare vénérable ; son procès de canonisation est ouvert.
Notes :
(1)– Ultramontanisme : littéralement : "au-delà des montagnes". Courant qui défend la suprématie de Rome dans le gouvernement de l’Église, par opposition au "gallicanisme" qui au XIXe siècle en France a donné lieu au Concordat : la nomination des évêques et des prêtres dépendait du gouvernement français auquel ils devaient allégeance.
(2)- cf aussi le contexte du Concile Vatican I (1870) connu pour ses deux questions qui sont au cœur de l’œuvre de Newman : la relation entre raison et foi / le rôle du pape dans l’Église (question de l’infaillibilité).
Pour en savoir plus : Cardinal Jean Honoré John Henry Newman, un homme de Dieu, Cerf 2003.
Keith Beaumont, Prier 15 jours avec le cardinal Newman, Nouvelle Cité 2005.
Newman, Choix de lettres, Téqui 1999
.source: feuetlumiere.org
La raison au service de la foi(Auteur : Sylvie Marre - Parution F&L n° 247 de Février 2006)
Le XIXème siècle baigne dans le rationalisme. L’étude historico-critique des Écritures fait alors perdre l’expérience d’une lecture dégageant le sens spirituel de la Parole et cette saveur que l’on retrouvait dans l’exégèse des Pères de l’Église. De plus, le libéralisme de nos frères anglais conduit à un refus de l’autorité, du dogme et de la transcendance de Dieu. Le fidéisme de son côté donne un rôle illimité au surnaturel… Jean-Paul II écrit au sujet de John Henry Newman : « Dans un tel monde, Newman en est arrivé à une synthèse remarquable de la foi et de la raison qui étaient pour lui "comme deux ailes grâce auxquelles l’esprit de l’homme s’élève à la contemplation de la vérité". »
Enfance et famille
John Henry Newman naît en plein cœur de Londres, dans la Old Band Street, le 21 février 1801. Peu après, sa famille part s’installer à Ham, dans la banlieue. Son père est banquier et sa mère, Jemina Fourdainier, est descendante d’une famille française de Huguenots. Baptisé, il est inscrit sur les registres de l’Église anglicane. Sa demeure paternelle est imprégnée d’une atmosphère religieuse : il y découvre la Bible par les lectures familiales, elle est pour lui sa première nourriture spirituelle. John Henry est l’aîné de six enfants. Ses deux frères n’ont jamais partagé sa foi ni ses convictions religieuses, à l’opposée de ses sœurs qui sont restées pour lui une grande consolation. Son éducation scolaire est marquée par la formation du caractère, de la raison et de la volonté. C’est un élève particulièrement doué, même en musique, ce qui n’est pas étonnant vu sa grande sensibilité. Mais sa supériorité intellectuelle et son sérieux, peu commun pour un enfant, l’isolent de ses semblables ; souvent il se montre plongé dans ses pensées.
Ses "conversions"
Durant l’automne de l’année 1816, John Henry Newman vit un grand tournant qui lui permet de prendre une direction de vie et de pensée nouvelles, décisives pour tout le reste de son existence. Par l’influence d’un clergyman, sa foi ne s’est pas perdue dans un sentimentalisme éthéré, elle cesse d’être un amas d’impressions. Il conçoit alors les vérités du christianisme comme un don amoureux de Dieu à l’homme et se demande : Seigneur, que voulez-vous que je fasse ? Il parlera souvent de cet événement tout au long de sa vie, de sa conversion qui va le transformer jusqu’à faire de lui un tout autre homme. Plus tard sa demande de passer à l’Église catholique reste le fruit d’une évolution débutée en 1816.
En 1845, il prononce un adieu final à l’anglicanisme qu’il considère comme un organisme qui ne peut plus, selon sa réflexion théologique, justifier d’être en lui-même la véritable Église du Christ. Il déclare alors solennellement que seule l’Église romaine reste, au cours de l’histoire, la fidèle gardienne de la Tradition apostolique, la messagère du dépôt de la foi chrétienne. Jean-Paul II, dans sa lettre sur Newman, écrit : « En méditant sur le mystérieux plan de Dieu enveloppant sa vie, Newman conçut un sentiment profond et constant que Dieu l’avait créé pour lui rendre un service précis. La mission particulière qui lui a été confiée par Dieu garantit que John Henry Newman appartient à toutes les époques, tous les lieux, tous les peuples ». Sa mission est en effet d’allier foi et raison de telle sorte que chacune soit un appui pour atteindre à la contemplation de la vérité. Pour lui, la personne du Christ est cette lumière inaltérable sur laquelle s’attacher en tout temps. Avant d’arriver au catholicisme, Newman vit dans le milieu universitaire d’Oxford et connaît dans son entourage toutes les nombreuses formes de protestantisme. L’anglicanisme est pour lui une via media entre le catholicisme et le protestantisme dur. Jusqu’en 1845, il essaie de justifier cette voie moyenne dans laquelle on puise aussi dans le trésor des Pères de l’Église. À travers ces textes patristiques, il découvre progressivement les richesses de la catholicité et va jusqu’à dire que son église (anglicane) est une « coquille vide » où il manque Jésus, la Présence Réelle…. Sur le chemin de cette découverte, un autre lieu important pour Newman sera le Mouvement d’Oxford dont il fut le chef de file, mouvement d’universitaires réfléchissant sur la nature de l’Église, l’Église primitive… John Keble, autre anglican, déclenchera ce mouvement en s’insurgeant dans l’un de ses sermons contre le pouvoir civil supprimant des postes anglicans en Irlande. Par leurs fameux Tracts, les membres du mouvement veulent affirmer le pouvoir surnaturel de l’Église, son identité surnaturelle. Newman a un sens profond du pas en avant que son église, la Hight Church, doit faire vers un anglo-catholicisme.
Tribulations et incompréhensions
La conversion de Newman à l’Église catholique lui demandera d’immenses sacrifices. Il perd son poste à l’université d’Oxford, l’influence dont il jouit dans son pays, la majeure partie de ses revenus et presque la totalité de ses amis. Il dira : Quand j’étais protestant, ma vie était paisible mais ma prière bien malheureuse, et depuis ma conversion, c’est l’inverse. Au cours de son séjour à Rome, on lui fait faire de médiocres études de théologie qui le préparent à la prêtrise. Après un noviciat oratorien, devenu prêtre catholique en 1848, il rentre en Angleterre pour fonder le premier oratoire selon saint Philippe Néri dans ce pays. Son centre est établi à Birmingham et plus tard dans sa banlieue, à Edgbaston. Une polémique contre Achilli, ancien dominicain, l’entraîne dans un procès qu’il perd en 1853. De 1854 à 1858, il est recteur de l’Université Catholique de Dublin, mais celle-ci ne connaît pas un essor brillant. Il démissionne alors et crée en 1859, à Edgbaston, une école catholique pour les jeunes gens en classe supérieure. Il s’investit dans cette entreprise jusqu’à sa mort. Elle a été un point fort pour soutenir le catholicisme romain en Angleterre. L’Apologia pro Vita Sua (1864), l’un de ses ouvrages les plus connus, a été rédigé après certaines incompréhensions avec le romancier et pasteur anglican Charles Kingsley. Il a aussi été longuement suspecté par Rome, à la suite de diverses diffamations, de ne pas être fidèle au dépôt de la foi. Cette "apologie" est une analyse de quarante-cinq années de vie intime : remarquable autobiographie exposée avec une puissante dialectique qui a réhabilité Newman en partie auprès de Rome et qui lui a surtout conféré un grand respect de la part de ses adversaires. Peu favorable à l’ultramontanisme(1), il se rallie toutefois en 1870, année du Concile Vatican I, au dogme de l’infaillibilité papale, par esprit d’obéissance et de soumission. De 1868 à 1881, il édite la plupart de ses écrits. Le 12 mai 1879, Léon XIII le réhabilite totalement et le nomme cardinal avec exemption du devoir de résidence à Rome. Ce titre lui est conféré en reconnaissance de tout ce qu’il a apporté à l’Église catholique en dépit de toutes les souffrances et humiliations subies. Il décède le 11 août 1890, à l’âge de 89 ans, au sein même de l’Oratoire de Birmingham qu’il a lui-même fondé.
Son œuvre, une spiritualité de l’abandon
Newman nous fait part de sa pensée et de sa réflexion théologique dans les nombreux ouvrages qu’il a édités et de ses talents de fin prédicateur qui a le souci des âmes. Son œuvre comprend des sermons, des ouvrages théologiques, historiques, avec aussi une Autobiographie souvent mise en parallèle avec Les Confessions de saint Augustin. Il a aussi rédigé deux romans, des poèmes, des journaux intimes, des prières et méditations. Il est considéré comme l’un des plus grands écrivains de langue anglaise. Cette conviction de la présence de Dieu dans sa vie est omniprésente dans toute son œuvre. Elle révèle qu’il vit sans cesse ce double mouvement d’abandon, se sachant entre les mains de son Créateur et se mettant en totale dépendance de son divin dessein sur lui. Cette attitude se fonde sur un acte de foi sans cesse renouvelé. Il écrit : Quoi qu’il en soit, où que j’aille, je ne serai jamais perdu, ni rejeté de Dieu… La providence de Dieu a été merveilleuse envers moi à travers toute mon existence. Cet abandon, reflet d’une grâce toute particulière, lui a sans cesse fait attendre le recours de Dieu dans la paix, quelles que soient les circonstances : calomnies, diffamations… : Ô mon Dieu, je veux me remettre sans réserve entre tes mains. Richesse ou pauvreté, chagrin ou joie, amitié ou isolement, bonne ou mauvaise réputation, vie douce ou pénible, Ta présence ou l’épreuve de Ton absence, tout sera bon s’il vient de Toi. Cette disposition, selon le cardinal Jean Honoré, « l’établit aux frontières de l’expérience mystique, malgré sa plainte si souvent rappelée de ne connaître que sécheresse et aridité dans son oraison », oraison à laquelle il s‘est toujours plus attaché (ses dernières années sont marquées par la fréquence de ses prières devant le tabernacle). Ce mouvement intime et profond d’abandon fait émaner de lui une atmosphère de douceur et de sérénité, se sachant toujours dans la main de Dieu, aimé et soutenu par Lui.
Message d’une brûlante actualité
La sainteté de Newman n’est pas le fruit d’une recherche de perfection stéréotypée et abstraite. Elle s’enracine dans le concret de son existence, dans la vie quotidienne, dans une relation intime avec Dieu en se laissant conduire par lui. Pour Newman, le signe d’une spiritualité qui ne relève pas de l’angélisme se situe dans la constance à garder jalousement l’attention à toute chose, petite ou grande (…), la plus grande mortification étant de bien faire chaque jour les devoirs ordinaires. Cette sainteté doit rester sans cesse au cœur de la conduite du chrétien, de son zèle apostolique. Aujourd’hui encore, d’après de nombreux témoignages, il reste ce guide « d’une multitude de cœurs reconnaissants en dehors même de sa confession. (…) Il a enseigné des principes de vie et d’action plutôt que des dogmes. » (Lord Coleridge). Il a marqué la pensée de l’Église, surtout au XXème siècle. Son influence sur le dernier Concile a souvent été soulignée ; Jean Guitton a défini Newman comme « le penseur invisible de Vatican II »(2). Newman parle toujours à notre esprit, il s’adresse à chaque cœur. Ses écrits mettent en lumière les vérités de la foi, sa vie reste le reflet d’un homme qui s’est laissé façonner par la grâce, qui s’est toujours placé en toute simplicité sous le regard de Dieu, en toute droiture et confiance filiale. En 1991, Jean- Paul II le déclare vénérable ; son procès de canonisation est ouvert.
Notes :
(1)– Ultramontanisme : littéralement : "au-delà des montagnes". Courant qui défend la suprématie de Rome dans le gouvernement de l’Église, par opposition au "gallicanisme" qui au XIXe siècle en France a donné lieu au Concordat : la nomination des évêques et des prêtres dépendait du gouvernement français auquel ils devaient allégeance.
(2)- cf aussi le contexte du Concile Vatican I (1870) connu pour ses deux questions qui sont au cœur de l’œuvre de Newman : la relation entre raison et foi / le rôle du pape dans l’Église (question de l’infaillibilité).
Pour en savoir plus : Cardinal Jean Honoré John Henry Newman, un homme de Dieu, Cerf 2003.
Keith Beaumont, Prier 15 jours avec le cardinal Newman, Nouvelle Cité 2005.
Newman, Choix de lettres, Téqui 1999
.source: feuetlumiere.org
MichelT- Date d'inscription : 06/02/2010
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum