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Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi

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Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi Empty Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi

Message par MichelT Jeu 27 Fév 2014 - 18:22

Transmission de la foi par la famille – un bel exemple - Un manuel privée d`instruction chrétienne datant de l`an 841 écrit à Uzès par une princesse franque pour l`éducation de son fils Guillaume, fils aînée de Bernard, duc de Septimanie. Beauté du langage qui est très chrétien, très belles vertus morales, de beaux exemples pratiques.

Notons la grande connaissance des Écritures - Ancien Testament - Psaumes - Évangiles

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ICI UN BEL EXEMPLE D`ENSEIGNEMENT ET D`INSTRUCTION CHRÉTIENNE D`UNE MERE A SES FILS.

Le manuel de Dhuoda. (9 eme siècle – Royaumes francs)

Dhuoda – femme très chrétienne de la noblesse franque - .

In nomine Sanctae Trinitatis.

Incipit liber Dodanae Manualis quem ad filium suum
direxit Willelmum.

La plupart des parents ont, dans ce monde, la joie de
vivre avec leurs enfants. Mais moi, ô mon fils Guillaume,
je me vois éloignée de toi. L'anxiété que j'en éprouve et
le désir de ton bien m'ont portée à faire écrire pour toi
cet opuscule. Il est fait en mon nom, et je serai heureuse
qu'il t'apprenne ce que tu dois être pour ta mère absente.

Invocation en vers.

Dieu très haut, créateur de la lumière du ciel, toi qui
traces leur route aux astres, roi éternel, très saint, achève
dans ta clémence l`oeuvre que j'entreprends. Ignorante,
je cherche auprès de toi l`intelligence de ta volonté, pour
le présent et l'avenir. Toi qui es un dans ta trinité, tu
répands les prospérités sur ceux qui t'appartiennent, et tu
récompenses tes serviteurs suivant leur mérite. Le genou
fléchi, je te rends d'abondantes grâces. Viens à mon aide
et soutiens mes pas dans la droite voie. Les tiens reposent
sans fin dans ton royaume. Quoique indigne, fragile et
exilée, quoique née du limon et entraînée vers la tombe,
j'ai une compagne dévouée et fidèle qui atténue mes
épreuves. Toi qui contiens le centre et la circonférence
du ciel, toi qui enfermes dans ta main les mers et les continents,
je te confie mon fils Guillaume. Que toutes ses heures
soient heureuses, qu'il t'aime par dessus tout, et qu'il
gravisse d'un pas rapide, avec tes fils, les sommets du
bonheur. Que son intelligence veille toujours en toi.
Étends sa félicité dans les siècles. Qu'il ne tombe point
dans la colère et qu'il n'erre pas séparé des tiens. Que sa
course soit enchantée, et que sa vertu l'élève, brillant,
aux régions supérieures. Qu'il te demande tout ce qu'il lui
faut. Toi qui donnes sans dédain, enseigne-lui à te croire,
à t'aimer, à te louer avec effusion. Que ta grâce l'inonde.
Qu'il ait la paix et la sécurité du corps et de l'esprit, et
que lui et sa race y puisent leur durée. Éloigne d'eux la
colère. Quand il lira, qu'il le fasse à propos. Qu'il suive
les préceptes des saints et reçoive de toi son entendement.
Qu'il soit secourable , qu'il pratique les quatre vertus,
qu'il soit généreux et prudent, pieux et courageux. Qu'il
n'abandonne jamais la tempérance. Quoique ce soit une
mère indigne qui t'implore à tous ses moments, aie pitié
de mon fils. Je suis dévorée d'angoisses.

Ce faible ouvrage est une supplication par laquelle je te
recommande mon enfant en toutes choses, suprême dispensateur
de tous les biens. Le royaume et le pays sont
déchirés, mais tu demeures immuable. Puisse-t-on s'arrêter
aux résolutions les meilleures ! Un signe de toi
contient tout. L'immensité de la terre est à toi, et à toi
seul toute chose est soumise. Toi dont le règne est éternel,
aie pitié de mes fils. Que mes deux enfants, je t'en
conjure, vivent dans le siècle en te chérissant toujours.
Lecteur, si tu désires connaître le sens caché de cette
pièce, cherche parmi les premières lettres de mes vers
celles qui doivent t'en instruire. Elles t'apprendront rapidement
ce que j'ai voulu dire. Mère de deux garçons, je
te demande de prier le Créateur bienfaisant d'élever leur
père à la plus haute fortune, et de me réunir à eux dans
son royaume.
Commence ta recherche par la lettre D. C'est à la lettre
M. que se termine ma pensée.
Grâce au Christ, je vais aborder l'œuvre entreprise.


Prologue.

Beaucoup de gens ont des connaissances dont je suis
privée, moi et les femmes qui me ressemblent. Mais Celui
qui ouvre la bouche des muets et qui fait parler les enfants
m'est toujours présent. Malgré la faiblesse de mon intelligence,
je t'adresse ce Manuel. De même que le jeu des
échecs est le plus brillant des arts mondains pour un
jeune homme ; de même que le miroir d'une femme lui
montre ce qui doit disparaître, de son visage et ce qu'elle
doit y laisser voir pour plaire à son époux ; ainsi je
désire qu'au milieu du tourbillon du monde et du siècle,
tu lises fréquemment mon livre. Fais-le en souvenir
de moi, aussi souvent qu'on se regarde dans un miroir ou
qu'on joue aux échecs. Fais-le, quel que soit le nombre
croissant de tes autres livres, et avec l'aide de Dieu comprends-
le. Tu y trouveras ce que tu préfères connaitre,
en abrégé ; tu y trouveras aussi un miroir où tu pourras
considérer le salut de ton âme, afin de plaire non seulement
au siècle, mais encore à Celui qui t'a formé du
limon. Au milieu des soucis qui m'accablent, ô mon fils
Guillaume, je t'adresse des paroles de salut, et mon coeur
désire ardemment que tu lises ce qui a rapport à ta naissance.
Tu le trouveras au début de ce qui suit.


Préface.

La onzième année de l'avènement de l'empereur Louis,
et le 24 juin, j'épousai, dans le palais d'Aix-la-Chapelle,
ton père Bernard. La treizième année du règne de l'empereur
et le 29 novembre, je t'ai donné le jour. Tu es
mon premier-né et j'ai ardemment désiré ta naissance.
Au milieu des malheurs croissants de ce siècle, et comme
le royaume s'abîmait sous les révolutions et les discordes,
l'empereur Louis alla où nous allons tous, et mourut sans
achever la vingt-huitième année de son règne (2) . L'année
qui suivit sa mort, naquit ton frère. Sa naissance arrivaà Uzès le 22 mars
à Uzès le 22 mars. Ton père Bernard se le fit amener
en Aquitaine par Éléfant, évêque d'Uzès, et quelques
autres de ses fidèles, avant même qu'il eût reçu le baptême.
Les ordres de mon seigneur vous ont éloignés de
moi et m'ont fait faire un long séjour à Uzès, où je me suis
réjouie de ses prospérités. Mais le coeur plein de toi et de
ton frère, j'ai fait écrire pour toi ce petit livre, selon ma
faible intelligence Quoique mille obstacles s'opposent à ce que je te voie
un jour, te voir est le premier de mes soucis, le seul
devant Dieu. Si Dieu me donnait de la vertu, je renoncerais
à ce bonheur. Mais j'y aspire, parce que mes péchés
ont éloigné mon salut, et mon âme dépérit de mon désir.
Il est sans espoir, car j'ai appris que ton père Bernard
t'a confié au roi Charles. Je te recommande de te montrer
digne de cette faveur par ton zèle pour ce monarque.
Cependant, comme dit l'Écriture, cherche d'abord en tout
le royaume de Dieu, et le reste te viendra par surcroît.

CHAPITRE I.

De l'amour de Dieu.

Dieu doit être aimé et loué non seulement par les Vertus
supérieures, mais encore par toute créature humaine
qui marche sur la terre et tend à s'élever. Sois toujours,
mon fils, avec ceux qui aiment Dieu et s'efforcent de se
rapprocher de lui, afin que tu jouisses avec eux du royaume
éternel. Ni toi, ni ceux à qui tu montreras ce livre, ne me condamnez
pour la témérité de mon entreprise. Je ne cesse
pourtant de me la reprocher, car je ne suis que misère,
cendre et poussière. Les patriarches, les prophètes et les
saints n'ont pu, depuis la création , arriver à la pleine
intelligence de la parole de Dieu : que pourrai-je donc,
moi chétive et de basse naissance ?

CHAP 2

De la recherche de Dieu.

Toi et moi, mon fils, nous devons rechercher Dieu,
car nous existons et nous agissons dans sa volonté. Je
le recherche comme une chatte importune recherche les
miettes qui tombent de la table de son maître. Celui qui
fit parler un animal muet est assez puissant pour me donner
les lumières qui me manquent. Sa miséricorde est
infinie.

CHAP 3

De la grandeur de Dieu.

Il est grand, mon fils, le Dieu qui voit l`humble comme
le superbe. L'homme, dans sa faiblesse, veut s'élever,
mais alors Dieu s'éloigne de lui. Si l'homme s'humilie,
Dieu descend jusqu'à lui. Humilie-toi, et tu seras élevé.
Dieu voit nos actes depuis l'aube jusqu'au soir, c'est-à-dire
depuis notre naissance jusqu'à notre dernier soupir,
depuis Adam jusqu'au dernier homme. Il sait nos pensées
nos paroles et nos actions. Il connaît ceux qui lui
appartiennent, il les tire des bas-fonds pour leur donner
son royaume.

CHAP. 4

De la sublimité de Dieu.

Personne, comme dit Paul, ne peut pleinement connaitre la sublimité
et la grandeur de Dieu. Malgré ma faiblesse
et mon incapacité, j'entreprends de t'expliquer
cette sublimité. Un docteur de grand mérite s'exprime ainsi : « Le nom
de Dieu, Deus, contient deux syllabes et quatre lettres.
» Quand tu les liras, tu reconnaîtras que le mot
Deus a un sens admirable et caché. Quoique ignorante,
je commencerai par la première lettre. Écrite seule, elle
à deux sens qui jettent un jour très utile sur la signification
générale du mot Deus. Notre D, en effet, s'appelle
chez les Grecs A, delta. Suivant leur manière de compter,
A vaut 4. Suivant la tradition latine, notre D vaut 500.
Il y a là un saint mystère. Les nombres 1, 2, 3 et 4
restent tels par eux-mêmes, mais combinés entre eux ils se
transforment en d'autres nombres. D`habiles mathématic-
iens l'ont démontré. 5 fois 5 font 25. Si l'on double 25,
on a 50. 5 fois 50 multipliés par 2 font 500. Les deux
nombres 4 et 5, qui résultent de la manière dont les
Grecs et les Romains ont interprété la lettre D, sont donc
contenus dans le mot Deus avec leur sens le plus utile.
Cinq rappelle nos cinq sens : la vue, l'ouïe, le goût, l'odorat
et le tact. Quatre rappelle les quatre éléments des
corps : le chaud, le froid, l'humide et le sec. Il signifie
encore les quatre vertus : la justice, le courage, la prudence
et la tempérance. Il y aussi quatre évangiles et quatre
parties du monde, qui sont l'orient, l'occident, le
septentrion et le midi. Le nombre trois est un nombre
parfait, car il offre la plus haute expression de Dieu : le
Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il y a trois dons : la pureté
de la pensée, la sainteté du discours et la perfection de
l'oeuvre. Le nombre deux s'entend des deux vies, l'active
et la contemplative, ou des deux vertus, l'intelligence et
l'action. Nous avons deux devoirs : l'amour de Dieu et
l'amour du prochain. Le nombre un est préférable a tous
les autres, comme Dieu est préférable à tout. Rapproche
des vertus, des éléments et de nos cinq sens, les paroles
des saints évangiles et des Pères. En pensant bien, en
parlant bien, en agissant bien, crois que Dieu est un
dans sa trinité et triple dans son unité. Nul ne peut
mesurer Dieu. Il est loué par le choeur des étoiles du matin.
Il a posé les fondements de la terre et a resserré la mer
dans ses bornes. Il a vêtu la terre de nuées. S'il a pu tout
cela, il peut aussi, mon fils bien-aimé, te conduire à la
perfection.

Citation de Prudence.

Nous avons une étrange tendance à nous approprier ce
qui n'est qu'à Dieu. L'un dit : « mon royaume », sans réfléchir
que ce royaume et ses habitants sont à Dieu. Nabuchodonosor,
abaissé et désabusé, avouait que Dieu seul
est Roi. Un autre dit : « ma terre », et ne s'aperçoit pas
que la terre est au Seigneur, comme les oiseaux de l'air
et les poissons de la mer. Si je considère certains de mes
parents et des tiens, dont j'ai entendu lire les exploits ou que j'ai vus, peut-être
que leur puissance sur la terre n'a pas suffi à leur
donner une place auprès de Dieu. Aussi prié-je pour ceux
qui ne sont plus de ce monde. Je juge de leur avenir par
le mien, quoique chétive, quand la mort me prendra.
Toutes choses sont dans la volonté et le pouvoir de
Dieu.

Morale.

Vase fragile, qu'ajouterai-je ? Je vais emprunter les
pensées des autres. Quand même le ciel et la surface de
la terre se dérouleraient pour nous à travers l'espace
comme une peau de parchemin ; quand même les abîmes
de la mer nous apparaîtraient desséchés ; quand même
(ce qui est contraire à l'ordre de la nature) tous les habitants
de la terre, nés depuis l'origine jusqu'à présent,
auraient été ou seraient des écrivains faisant honneur à
l'humanité ; alors même nul ne pourrait comprendre la
grandeur, la largeur, la hauteur et la profonde sublimité
du Tout-Puissant, ni retracer sa divinité, sa science, sa
piété et sa clémence. Crains et aime Dieu de tout ton
être.

Crois que Dieu est dessus, dessous, dedans et dehors.
Il est supérieur, parce qu'il nous régit tous. Il est inférieur,
parce qu'il nous porte tous. Il est intérieur, parce
qu'il nous remplit tous de ses biens. Il est extérieur, parce
qu'il nous entoure tous d'un rempart inexpugnable.
Moi Dhuoda, ta mère, quoique méprisable par la petitesse
de mon entendement, je crois tel le Dieu qui est béni
dans les siècles. Amen.

Avertissement.

Je t'avertis encore, ô mon bel et aimable enfant, d'acquérir,
au milieu des préoccupations du siècle, les livres
qui contiennent sur Dieu ton créateur l'enseignement des
docteurs et des maîtres sacrés. Tu y trouveras plus et
mieux que ce qui est écrit ci-dessus. Implore et chéris
Dieu. Alors il sera pour toi le gardien, le duc, le comte,
la patrie, la voie, la vérité et la vie, te comblant des biens
de ce monde et apaisant tous tes ennemis. Pour toi, comme
il est écrit dans Job. ceins tes reins, sois humble de coeur
et chaste de corps.
Dhuoda doit t'être toujours présente, mon fils. Si je
viens à te manquer, il te restera mon livre, où tu pourras
me retrouver comme dans un miroir. Tu y apprendras tes
devoirs envers moi. Tu auras des docteurs dont l`enseignement
sera plus varié et plus élevé ; mais tu ne
trouveras que dans mon livre l'ardent amour de ta mère
pour sont premier-né. Lis-le, comprends-le. applique-le,
instruis ton jeune frère, dont j'ignore encore le nom,
lorsqu'il aura reçu la grâce du bapteme, instruis-le dans
le bien et aime-le. Montre-lui ce Manuel, entrepris par
moi et écrit pour toi, lorsqu'il saura parler ou lire, et
accompagne tes lectures de conseils. Car ton frère est ta
chair. Moi Dhuoda, votre mère, je vous avertis tous deux
d'élever vos coeurs quand vous souffrirez des épreuves du
monde. Regardez alors Dieu régnant aux cieux. Que le
Tout-Puissant, dont je fais de si fréquentes mentions
quoique indigne , vous rende heureux sur la terre avec
votre père Bernard mon seigneur. Quand vous aurez terminé
le cours de votre vie, qu'il vous introduise dans le ciel au
milieu des saints. Amen.


CHAP 8

De la Sainte Trinité.

La Sainte Trinité se compose du Père, du Fils et du
Saint-Esprit. Je n'ose ni ne puis, dans ce chapitre, traiter
ce sujet. Lis les ouvrages des Pères orthodoxes, et tu
y trouveras ce qu'est la Trinité. Quand tu l'auras trouvé,
grave-le fortement dans ton coeur et dans ta foi. Les
saints Pères, en effet, avant la venue du Christ, ont contemplé
la Sainte Trinité comme dans un miroir. L'un
d'eux, assis à l'ombre d'un chêne vert, vit venir à lui
trois hommes. Ils lui parurent semblables à la Sainte
Trinité, et il leur parla à tous trois comme à un seul. Il
les vit trois et les adora comme un seul. Les enfants
envoyés dans la fournaise adorèrent la figure de la Trinité
et méritèrent par là de sortir sains et saufs. Quoique
le nom de chacune des personnes de la Trinité la désigne
particulièrement, il en contient un qui les désigne toutes
les trois, il contient Dieu. Crois fermement ce que tu
trouveras dans mon livre, afin d'éviter le feu éternel et
d'être admis au rang des élus, avec les enfants échappés
de la fournaise. Amen.

CHAP 9

De la Foi, de l'Espérance et de la Charité.

Quoique la charité vienne la dernière dans cet intitulé,
qui est celui de tous les livres, elle est cependant la première
et la plus précieuse de ces trois vertus.
Les choses de la terre doivent t`éclairer sur les biens du
ciel. Tu te réjouiras d'obtenir les biens du siècle. Je t'engage a
régler tes désirs sur la possibilité de leur succès.
Mais il faut, avant les biens terrestres, rechercher ce qui
est nécessaire à ton âme. Dis avec le Psalmiste : « Que
ma part, Seigneur, soit dans la terre des vivants. »
Considère, mon fils, ce qui est élevé et sublime. Demande
par la foi, cherche par l'espérance, touche par la charité
celui qui s'appelle Dieu.
La charité est la vertu suprême et parfaite. Elle signifie
grâce et tendresse. Dieu est charité ; celui qui aime la
charité vit en Dieu, et Dieu vit en lui. Que le Seigneur
nous accorde le banquet et la demeure des bienheureux
à ton père, à vous nos fils. et à moi. Amen.


CHAP. 10

Du respect dans la prière.

La prière est dite oraison, parce qu'elle est la raison de
la bouche, oris ratio. Le respect, reverentia, s'adresse à
l'objet respectable, rem venerabilem, que nous devons
rechercher par un intime sentiment du coeur et par un pur
mouvement de la raison. Si nous avons une grâce à demander
à un grand de la terre, nous ne le ferons pas avec insolence,
mais avec humilité.. Combien plus devrons-nous
être respectueux en nous adressant au Créateur et au dispensateur
de toutes choses ! Moi, la tiède et négligente
Dhuoda, je ne me plais ni dans une longue, ni même dans
une courte prière. J'espère cependant en Celui qui a donné
à ses fidèles la permission de le prier. Pour toi, mon fils
Guillaume, prie Dieu en peu de mots, d'une prière ferme
et pure. Prie non seulement  l'église, mais partout où la
circonstance le voudra.

Prie de la bouche, crie du coeur, demande par tes oeuvres,
afin que Dieu te secoure le jour et la nuit. Prières à
dire au lit. Après ces prières, fais le signe de la croix sur
ton front et sur ton lit, en mémoire de la croix de Celui
qui t'a racheté. Que la bénédiction du Père, du Fils et du
Saint-Esprit descende et demeure sur toi perpétuellement et
sur ton frère. Que cette croix et cette bénédiction soient
toujours avec ceux dont la fragile Dhuoda fait plus haut
fréquente mention. Comme la rosée d'Hermon rafraîchit
la montagne de Sion, ou comme le parfum répandu sur la
tète d'Aaron embaume jusqu'à sa barbe, ainsi reçois la
grâce de Jésus de Nazareth, fils de Dieu. Qu'elle descende
et demeure sur toi partout où tu iras, et sur ton frère, qui
est sorti de mon sein après toi.

Lorsque, avec l'aide de Dieu, tu te lèveras le matin, ou
lorsque tu en auras le loisir à toute autre heure, dis trois
fois le nom de Dieu. Ensuite, l'oraison dominicale. En te
levant, chausse-toi, suivant la coutume, et prépare-toi par
l'évangile de paix. Chante les heures canoniques. Achève
ton office, car il est écrit : « Sept fois par jour je t'ai loué. »
Dis tes chapitres dans l'ordre où tu les sauras le mieux, ou
comme ils te viendront, mais achève-les toujours. Dis les
oraisons suivant les convenances des heures. Alors, au nom
du Dieu souverain, tu te rendras à l'accomplissement de
ton service temporel, et tu accompliras, soit les ordres de
ton seigneur et père Bernard, soit ceux de ton seigneur
Charles, à condition qu'ils n'aient rien de contraire aux
ordres de Dieu.
Lorsque tu sortiras, aie Dieu dans ta pensée, fais le
signe de la croix et dis : « Aie pitié de moi. Père céleste,
et dirige aujourd'hui mes pas dans tes sentiers, etc. »

CHAP. 12

Du respect que tu dois avoir pour ton père.

Je vais m'e [forcer de l'apprendre la crainte, l'amour et
la fidélité que tu dois à ton seigneur et père Bernard, présent
ou absent. Le docte et très sage Salomon t'avertit
d'honorer ton père. Afin de vivre longtemps, honore ton
père et prie pour lui assidûment. Sans lui, tu ne serais
pas. Obéis à ses avis. Soutiens sa vieillesse. Ne contriste
pas sa vie et ne le méprise pas dans ta force. Ne commets
jamais ce crime. Que la terre recouvre plutôt mon corps.
Mais je ne crois pas que cela arrive à ton père, et je ne parle
pas ainsi parce que je le crains. Il faut veiller à ce que la
pensée d'un tel forfait ne te vienne jamais à l'esprit. Souviens-
toi de la catastrophe des fils d'Héli, qui avaient méprisé
les ordres de leur père. Souviens-toi de l'arbre d'Absalon,
qui, rebelle a son père, s'accrocha par hasard à un
chêne et y fut percé de coups de lance. Son royaume terrestre
lui manqua à la fleur de l'âge. Parlerai-je de plusieurs
autres? Ils courent de grands dangers. Que ceux qui
font cette œuvre de mal évitent, s'ils peuvent, non mes
malédictions, mais les prédictions de l'Écriture, dont les
menaces sont terribles : « Maudit celui qui n'honore pas
son père «,etc. Quoique le châtiment que tu penses atteigne
ceux qui affligent leur père en leur manquant de respect,
il y en a beaucoup dans ce siècle qui tombent dans
ce crime. Ils ne se souviennent pas des actions passées,
et incriminent les présentes. Ils recueillent l'envie, la
haine, les désastres et les fureurs de leur âpreté. Ils perdent
sans rien gagner. Je te dis cela non pour l'avoir vu,
mais parce que je l'ai lu et entendu dire. Chacun doit prévoir
le temps où Dieu lui donnera des enfants. Voudra-t-il
alors les voir rebelles, orgueilleux et avides? Ne les souhaitera-
t-il pas doux, paisibles et soumis, afin de pouvoir se
réjouir à leur aspect ? Il aimera à se souvenir que, lui aussi,
avant d'être père, a été un fils obéissant. Il faut écouter là-dessus
les saints Pères et les lire fréquemment. Quoique, aux yeux des
hommes, dans le siècle, le pouvoir
royal et sa forme l'emportent sur tout le reste, et que,
suivant cette coutume, le premier mouvement des hommes
soit d'honorer d'abord le pouvoir suprême, conformément
au témoignage de celui qui a dit : « Soyez soumis au roi,
qui excelle sur toute créature humaine, ou aux chefs qu'il
envoie pour venger le mal et faire le bien » ; cependant,
cher fils, mon désir est que tu honores d'abord ton père.
Nul ne pourrait parvenir, auprès d'une autre et illustre
personne, au comble des honneurs, s'il n'est d'abord né
d'un père. Aime donc Dieu avant tout, comme je te l'enseigne
plus haut, et en second lieu aime, crains et chéris
ton père. Sache que tu lui dois ta condition dans le siècle.

Exemples relatifs aux premiers pères.

Nous lisons que Sem, fils de Noé, parvint à la prospérité
en aimant son père. Il en fut de même de Japhet. Il est
inutile de te parler de Cham ou de ses pareils. Il vaut
mieux nous occuper des bons. Isaac, en obéissant à son
père, fut béni par lui, et il en résulta pour lui et sa femme
de grands biens dans le siècle. Il a été, en effet, appelé
dans la sainte Écriture le rire, c'est-à-dire le joyeux. Et
si l`homme de bien est appelé le joyeux, l'homme inutile,
cruel et impudent sera certainement appelé le malheureux.
De même, Jacob, en aimant son père, a mérité de triompher
de mille épreuves. Considère, mon fils, quelle force ont
dans le siècle ceux qui méritent la bénédiction divine à
cause de leur père et de la soumission qu'ils lui témoignent.
Combats, demande et frappe, lutte vaillamment en toutes
choses, pour obtenir la félicité éternelle avec Jacob. La
figure de Jacob chasse le crime et détruit le vice, et ses
ennemis, sous le poids de sa mansuétude, se courbent sous
le joug comme les enfants de la même mère. Doté par le
Créateur d'une femme, d'une postérité et de toute sorte
de richesses, on le représente toujours comme ayant en
toutes choses plu à Dieu. Que dirai-je de Joseph, son fils,
qui aima tant son père et lui fut si soumis qu'il eût pu mourir
pour lui, si Dieu et les mérites de son père ne
l'avaient sauvé? Éloge de Joseph. Beaucoup d'autres, en
obéissant à Dieu et à leur père, sont parvenus au comble
de la prospérité. Exhortation. Souhaits.


Dernière édition par MichelT le Mer 2 Aoû 2017 - 3:17, édité 8 fois

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi Empty Re: Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi

Message par MichelT Jeu 27 Fév 2014 - 18:29

Manuel de la princesse Dhuoda - partie 2

Avertissement relatif à ton seigneur le roi Charles.

Puisque Dieu et ton père Bernard t'ont choisi pour servir
ton seigneur Charles dans la fleur de ta jeunesse, tiens
ce qui est de ta race, illustre des deux côtés. Ne te borne pas
à plaire aux yeux de ton maître, mais montre-lui du sens,
de la pureté et une grande fidélité.
Dévouement du serviteur d'Abraham, qui alla jusqu'en
Mésopotamie chercher une femme à Isaac. Dévouement de
Joab et d'Abner envers David. D'après l'Écriture, c'est
Dieu qui distribue à son gré l'honneur et le pouvoir. Il
faut servir fidèlement, sans tiédeur et sans paresse, ceux
qui en sont investis. "Celui qui résiste au pouvoir établi,
résiste à l'ordre de Dieu même. Aussi, mon fils, consacre
à ton devoir les forces de ton corps et de ton intelligence.
Ce sera ton avantage et celui des tiens. Que jamais la folie
de l'infidélité ne te soit reprochée ; que le mal ne germe
pas dans ton coeur et n'y monte pas au point de te rendre
infidèle à ton seigneur en quoi que ce soit. L'opinion est
dure et terrible aux traîtres. Je te crois, comme tes compagnons
d'armes, incapable de perfidie. Cet art malfaisant
n'a jamais paru dans tes ancêtres et ne paraîtra pas dans
leurs descendants.

Toi donc, mon fils Guillaume, toi qui es issu de leur
race, sois, envers ton seigneur, sincère, attentif, utile, et
le premier à t'offrir. Dans toutes les affaires qui intéresseront
le pouvoir royal, efforce-toi de te mettre en avant,
soit à l'intérieur, soit au dehors, mais fais-le avec sagesse.
Lis les vies ou les dires des saints pères d'autrefois, et tu
y trouveras comment tu dois être vis-à-vis de ton seigneur.
Étudie ses ordres pour les bien exécuter. Considère
ceux qui le servent fidèlement, et apprends d'eux ton
devoir. Instruit par leur exemple et avec l'aide de Dieu,
tu pourras plus aisément pratiquer ce que je t'ai retracé
plus haut. Souhaits.

CHAP 16

Du conseil.

Si Dieu te conduit à ce degré d'avancement, que tu mérites
d'être appelé au conseil parmi les grands, pèse avec
soin tes paroles et leur opportunité, et prends l'avis de
ceux qui préparent ton corps et ton esprit à un service
fidèle. Il est écrit : « Fais tout avec conseil, et tu ne t'en
repentiras pas. » Dans le conseil, tout se mêle, l'erreur qui nuit à l'utile,
et la hauteur de vues qui favorise le salut de l'âme, le
corps également, et peut amener des résultats durables
en toutes choses. Quelqu'un a dit : « Ce que j'ai dit est
chose décidée. » Lorsque les orfèvres ont commencé a
étendre l'or pour l'appliquer, ils attendent un jour, un
temps, ou une heure d'une température favorable, afin
que le métal resplendisse dans leur ouvrage d'un plus éblouissant éclat.
L'homme prudent doit raisonner en tout. La parole de
l'homme sensé est plus blanche que la neige, plus douce
que le miel, plus pure que l'or et l'argent. Sa grâce l'emporte
sur l'or et l'argent, son éloquence sur les grands, car
ses lèvres distillent le miel, et sa parole est chaste et
comme passée au feu. Il n'y a point de richesse où règne
la déraison, et rien ne manque là où combat assidûment
une langue éloquente.
Toi, mon fils, crois Dieu, crains-le et aime-le. Hâte-toi
d'attacher à lui la fleur de ta jeunesse. Demande-lui la
sagesse, et il te la donnera.
Je t'exhorte à ne pas seulement fréquenter les personnes
âgées, mais encore les jeunes gens qui aiment Dieu
et qui apprennent la sagesse, car la vieillesse tire sa force
de la jeunesse. Le sage a dit : « Ce que tu n'a pas recueilli
dans ta jeunesse, comment le trouveras-tu dans ta vieillesse
? » Exemples de Samuel et de Daniel, conseillers des
rois de leur pays et des princes étrangers.
Considère les anciens pères, considère Joseph vis-à-vis
de Pharaon, Daniel vis-à-vis de Nabuchodonosor, de Balthazar,
de Darius et des chefs des Perses et des Mèdes :
fidèles à leur devoir, ils furent toujours très utiles à leurs
maîtres dans le conseil. Exemples de Jéthro et d'Achior.
Dieu les a trouvés dignes du royaume des saints. Que te
dirai-je, mon fils, moi l'indigne, malheureuse et faible
Dhuoda, que tu ne trouves dans ces héros de l'Écriture ?
Je prie pour que Dieu soit avec ta jeunesse.

CHAP 17

Des conseillers.

Il est des gens qui se croient des conseillers et qui ne le
sont pas. Ils s'estiment des sages, et je suis peut-être plus
sage qu'eux, moi, indigne. Cependant ils devraient savoir
que plus d'humilité ne nuit pas au mérite. Certains hommes
donnent un bon conseil, mais le donnent mal, de
façon qu'il n'est avantageux ni pour eux ni pour autrui.
Pourquoi ? Parce qu'ils ne savent pas le présenter et le
faire valoir jusqu'au bout. D'autres donnent un mauvais
conseil, mais on ne l'emploie pas. La conduite des hommes
est contradictoire. Dans les siècles passés, beaucoup
d'hommes étaient dignes, utiles et loyaux. Il y en a peu
aujourd'hui. L'iniquité déborde et la charité disparait.
Dans ce désordre, on ne sait plus qui choisir pour conseiller
ni à qui croire, et l'on renonce à l'espoir de se fier
utilement à quelqu'un.

Lis si plus bas Dhuoda ne salue pas Guillaume.
Si cependant il faut se défier en cette matière, mon fils,
il est encore des hommes de vieille roche qui, avec l'aide
de Dieu, peuvent donner un bon conseil à leur seigneur.
Il est écrit : « N'y a-t-il plus de médecin en Égypte, de résine
à Galaad, d'eau en Chanaan, ou de conseiller en
Israël ? » Il en reste certainement. Le Seigneur connaît
celui qui éclaire le monde, l'ange de grand conseil, qui
apporte aux siens des paroles de salut. Il s'est manifesté
dans les anciens; il se manifeste dans les vivants. Puisse-t-
il te pénétrer toi-même et te faire atteindre au plus haut
degré de rectitude du conseil, sous le pouvoir de ton seigneur,
l'illustre roi dont tu seras le compagnon d'armes.


Avis particulier pour te ramener au sujet précédent.

Pour devenir tel, si, avec l'aide du Créateur, tu vis
assez longtemps, évite les méchants et fréquente les bons
et les pieux. Ne forme point de projet avec l'homme malfaisant,
lâche ou irascible. Ce genre d'homme ronge
comme la teigne, et sous sa domination il n'est point de
sécurité. La colère et l'envie sa compagne entraînent aisément
dans l'abîme. Que ton sort ne soit pas celui d'Achitophel
ou d'Aman, qui, pour avoir, par malice et orgueil,
donné de mauvais conseils à leurs maîtres, furent précipités
dans la mort du corps et de l'âme. Parmi les serviteurs
dévoués, imite Doeg l'Iduméen et l'humble Mardochée.
Conseils à Guillaume. Souhaits.

CHAP 19

Des proches de ton seigneur.

Si tu parviens à une situation telle que tu mérites de
servir utilement, avec les compagnons d'armes du prince,
à la cour royale et impériale, ou partout ailleurs, crains,
aime, respecte et chéris les parents et les proches de ton seigneur.
Ils participent à l'éclat du pouvoir royal, soit
par une filiation illustre, soit par un mariage qui est l'origine
de leurs dignités. Cherche en toute affaire leur avantage,
gère fidèlement leurs intérêts, et témoigne-leur une
parfaite obéissance de corps et d'esprit. Souviens-toi de
David à l'égard de Jonathan, fils du roi Saûl. Beaucoup
sont glorifiés dans les saintes Ecritures pour avoir obéi
fidèlement à leur seigneur et aux proches de leur seigneur.
De même, mon fils Guillaume, observe la règle des bons
serviteurs : sois fidèle à ton seigneur Charles et à ses
dignes parents de l'un et de l'autre sexe, issus du sang
royal. Il te sied d'agir ainsi, et, parmi tous ceux qui les
servent, je désire que tu te fasses remarquer par l'efficacité
de tes efforts et ta fidélité. Dieu les a choisis dans le
royaume, et il leur accorde une gloire semblable à celle
qu'il a promise à Abraham, à Isaac, à Jacob et à leur descendance.
Que le Très-Haut, dans sa toute puissante
bonté, leur donne d'être, en ce siècle, comme l'étaient
leurs aïeux, animés de l'esprit de concorde et amis de la
paix. Qu'il les fasse briller dans la prospérité. Qu'il leur
donne de gouverner et de protéger avec fermeté le monde
et le peuple, dans le service de Dieu et des saints. Que
leur bras défende le royaume contre les ennemis qui surgissent
de tous côtés et s'enfoncent en lui comme des
coins. Qu'ils consolident la sainte Église de Dieu dans la
vraie religion et dans le Christ. Qu'ils voient leurs descendants
plaire à Dieu, croître, fleurir et s'élever pendant le
cours d'un grand nombre d'années. Qu'alors, après une
longue carrière, ils s'éteignent dans le bonheur, et que
Dieu, au sortir de cette vie, les admette dans le royaume
des cieux avec leurs ancêtres. Que le dispensateur de tous
les biens t'y reçoive aussi pour prix de tes fidèles services
envers eux.

CHAP. XX.

Sur les grands.

Aime, chéris et sers fréquemment les grands, leurs conseillers
et leurs serviteurs fidèles, qui brillent à la cour.
Tu honoreras ainsi l'ensemble dans ses parties et les
parties dans l'ensemble. Étudie avec humilité l'exemple
de leur grandeur et suis fermement leurs traces.
Dans une cour aussi considérable que l'est, l'a été et le
sera la cour de nos rois, ceux qui désirent s'instruire ont
de nombreuses occasions de converser et de comparer.
L'un y peut apprendre de l'autre, s'il veut, l'humilité, la
charité, la chasteté, la patience, la mansuétude, la modestie,
la sobriété, la perspicacité, les autres vertus et le désir
du bien. Adolescent, apprends des personnes plus âgées et
plus expérimentées que toi tout ce que, avec l'aide de
Dieu, elles peuvent te livrer de bon. Conduis-toi, parmi
les parents, les pairs et les fidêles amis des grands, de
façon à éviter l'opprobre de l'infidélité envers ton seigneur,
et à vivre heureux dans l'amour des bonnes actions et de
l'honneur. Que Celui qui rend diserte pour le louer la
langue des enfants, te fasse pénétrer, par ton éloquence,
parmi les élus, avec les plus dignes et les plus nobles de
ceux qui craignent le Seigneur.

CHAP. XXI.

Il faut être serviable avec les petits comme
avec les grands.


Quoique mes conseils te soient peu nécessaires pour
suivre, avec les petits, les exemples des grands, parce que
c'est loin de moi que tu les vois, cependant ne doute pas
que les humbles ne puissent, à leur tour, être élevés au
comble de la grandeur. Aussi je t'exhorte à te mêler à eux
dans les grands comme dans les petits intérêts. Dieu a doté
de biens la terre comme le ciel. C'est pour les petits qu'il a
daigné se montrer aux enfers. Souverain créateur, il a
revêtu une forme d'esclave. Il élève les puissants pour les
précipiter dans l'abîme ; il exalte les humbles pour les
porter au sommet de la prospérité. Lui-même se fait à la
fois le plus petit et le plus grand de tous. Auteur du genre
humain, il ne refuse ses bienfaits ni aux petits ni aux
grands. Sans faire acception de personne, il est bon pour
tous ceux qui le craignent et accomplissent sa volonté. S'il
agit ainsi envers les petits, lui qui est si grand, que ne
devrons-nous pas faire envers les humbles, nous qui sommes
si peu de chose ? Quoique tu sois le moindre des
compagnons d'armes du prince, je t'exhorte à considérer
attentivement et à suivre, avec toute l'application dont tu
es capable, les grands exemples dont je t'ai parlé plus
haut. Regarde avec le même soin les grands et les illustres,
tes égaux et les grands, afin de pouvoir avancer avec
eux tous dans la voie du mérite, et réjouis-toi de ce qu'ils
te sont offerts en exemples d'obéissance et d'humilité.
Exemples. Prends soin d'imiter Ismaël, dont il est
écrit : « Sa main sera contre tous, et la main de tous contre
lui. » Tournant en bonne part ce verset, je t'exhorte à
être tel en toutes choses que ta main soit prompte aux
oeuvres justes, et que tu t'efforces de témoigner, non seulement
en paroles, mais encore par des actes, et dans la
mesure de tes moyens, ton obéissance et ta déférence
aux grands, aux petits, à tes égaux et aux humbles. Tu devras
leur parler à tous avec la même douceur. Il est
écrit de celui qui donne, que Dieu le chérit. Que ta main
soit volontiers serviable. Qu'elle soit contre tous pour
donner, et que la main de tous soit contre toi pour soulager
et secourir. Aime tous les hommes pour être aimé de tous.
Il est écrit dans la Science grammaticale du poète
Donat : « Je t'aime et je suis aimé de toi », etc. Déclinaison
des pronoms ego et illi, en manière d'arguments.
Aime, respecte, recueille et honore tes semblables, pour
mériter d'être payé de retour. Le psalmiste a tiré d'un
animal muet une édifiante comparaison : « De même que
le cerf recherche l'eau des fontaines, de même mon âme
a soif de Dieu. »

Développement d'un passage de Pline l'Ancien.
Quand les cerfs s'engagent en troupe dans la traversée
d'un bras de mer ou d'un fleuve, ils s'avancent l'un après
l'autre, laissant reposer leur tête, avec leurs cornes, sur la
croupe de leur compagnon, afin de traverser l'eau plus
aisément. Ils ont tant de sagacité et de prudence, que
lorsqu'ils sentent que le premier s'enfonce, ils le placent
au dernier rang, et choisissent le dernier pour aller
au premier rang, soutenir et réconforter les autres. Ils
font ainsi preuve, à chacun de ces changements, d'une
sollicitude fraternelle. Veillant toujours à ce qu'aucune
tête ne soit submergée, ils se donnent mille peines pour
découvrir et relever les plus faibles.
Le sens de cette description n'échappera pas aux doctes.
Elle montre que parmi les hommes doit régner une compassion
fraternelle, tant à l'égard des humbles qu'à
l'égard des puissants. Par l'élévation des têtes et des cornes,
on désigne les fidèles élevant sans cesse leur coeur
dans le Christ et tenant toujours leur esprit en lui. Le roi
qui est issu de la race de David et qui est venu parmi les
hommes pour le salut du genre humain, a élevé sa corne
au-dessus des tempêtes de la mer pour délivrer les siens.
Il a libéralement fait lever ceux qu'il a trouvés couchés
dans les ténèbres. Venu du haut du ciel, il les a visités et
les a élevés au faîte. C'est un exemple pour que, dans le
gouffre des passions et des convoitises, nous ne laissions pas
se refermer sur nous la boue et le limon, mais nous
tenions haut notre coeur.
Que dire des lions, des abeilles, ou des autres animaux?
Que dire encore de la vigne qui rampe à terre, ou de l'ormeau
qui s'élance dans les airs ? Qui est-ce qui règle ainsi
leur port à tous deux? Une foule de choses peuvent servir
de leçon aux hommes. Il est écrit : « Parle à la terre, et
elle te répondra. Interroge les chevaux, et ils t'instruiront ;
les oiseaux du ciel, et ils te renseigneront. Les poissons
de la mer eux-mêmes s'expliqueront. »

Citation de cinq vers barbares.

Dieu a donné toutes choses à l'homme et à la femme,
en créant le ciel, la terre, la mer, l'air, les abîmes et les
campagnes. Il leur a soumis tout cela et les a soumis à lui-même.
Cela signifie, mon fils, que pour compléter le nombre
des anges et pour l'associer à leur gloire, le Tout-Puissant
a daigné former l'homme du limon de la terre. Lui
accordant l'usage de toutes choses, il l'a choisi pour le
faire jouir avec lui des grandeurs de la gloire éternelle.
Il a voulu pour lui naître, souffrir et ressusciter, afin d'admettre
dans son royaume les petits et les grands, suivant
leur mérite. Souhaits pour que Guillaume aille rejoindre
celui qui a dit : « Laissez les petits venir à moi. » Le
royaume des cieux leur appartient.
CHAP 22

Du respect que tu dois aux prêtres.

Il faut révérer les prêtres parce qu'ils ont été élus ministres
de Dieu. Leurs fonctions sacrées en font les intercesseurs
pour nos péchés. De toute ton âme tu dois craindre
Dieu, honorer, chérir et vénérer ses prêtres. Ils oignent
avec l`huile ; ils baptisent le peuple dans la foi de la Sainte
Trinité ; ils l'unissent à la sainte Église de Dieu. Ils consacrent
le pain et le vin à l'image du corps et du sang du
Christ, ils préparent la table et nous donnent la communion
pour la rémission de nos péchés et le salut de notre
corps. On les appelle sacerdotes pour les sanctifier ou les
consacrer, car ils imitent celui qui a dit : « Soyez saints,
parce que je suis saint. » Ils briseront la force des nations
et ils mangeront les péchés du peuple. Ce sont des pasteurs
qui ne cessent de paître le troupeau du Seigneur
par leurs paroles et leurs exemples. Ils le poussent à
entrer au royaume de Dieu, en disant avec le Psalmiste :
« Venez, adorons et prosternons-nous, pleurons devant
celui qui nous a créés, car nous sommes son peuple et
ses brebis, et il est le Seigneur notre Dieu. »

Les prêtres sont appelés presbyteri, parce qu'ils sont
toujours préparés et prêts pour l'oeuvre de Dieu. En effet,
les particules prae et pro se placent devant les mots. Le
Psalmiste dit : « Praevidebam Dominum.» Cela signifie :
je voyais d'avance par la contemplation de ma pensée.
Les prêtres sont la voie par laquelle nous allons au ciel.
Ils sont appelés évêques, comme des surveillants qui nous
avertissent de toujours tendre en haut. Le mot évêque
vient du grec et signifie regarder sur. Les prêtres sont
appelés pontifes parce que par eux, comme par un pont, nous
traversons la rivière du mal et nous parvenons à
une nouvelle patrie par la pénitence. Ils sont, à l'exemple
du Très-Haut, les dépositaires de l'autorité ; dessus, dessous,
dedans et dehors. Dessus, parce qu'ils nous fortifient
en nous observant, et voient de loin. Dessous, parce qu'ils
sont les pieds qui apportent la paix, annonçant le bien et
prêchant le salut. Dedans, parce que nous sommes imbus,
instruits et remplis par l'exemple des plus dignes d'entre
eux. Dehors, parce qu'ils prient assiduement, étant près
de Dieu, pour que nous ne soyons pas saisis par les malins
esprits, et pour que nous soyons fortifiés , protégés, et
sauvés en Celui qui est apparu au monde pour rendre au
ciel l'homme perdu.
A l'exemple des saints Apôtres, les prêtres dignes de
vénération lient et délient. Ce sont des pêcheurs et des
chasseurs. Ils enlèveront leur proie aux mains étrangères,
c'est-à-dire aux esprits immondes, et la donneront au ciel
épurée par la pénitence. Ils dressent et ordonnent l'autel
sacré près de leur demeure. Les prêtres sont les gardiens
des vases, c'est-à-dire des âmes de Dieu. Les lèvres du
prêtre gardent la science et on y cherche la loi, parce qu'il
est l'ange du Seigneur. Quoi de plus sublime que les anges
et les archanges ?
Comme des colombes vigilantes, ils volent vers les fenêtres
célestes, dans le triomphe de leurs vertus, et méritent
d'être appelés les amis de Dieu. Brûlant du feu de la charité,
les prêtres ne cessent d'enseigner. Heureux et saints,
fleurissant dans le Christ, ils méritent, avec double gain,
d'obtenir le royaume du ciel. Honore les prêtres qui sont
dignes de respect. Quant à ceux qui ne sont pas à la hauteur
de leur état, ne les juge pas témérairement. Aie horreur
de critiquer leur vie en toutes choses, comme on le
fait trop souvent. Ce n'est pas à nous de reprendre les prêtres,
mon fils. Dieu connaît leurs coeurs et les nôtres. Tu
distingueras aisément les prêtres à leurs oeuvres. Suis les
meilleurs et les plus capables. Écoute, entends, fais et rappelle-
toi souvent ce qu'ils disent. Partout où tu les rencontreras,
prie-les et vénère-les, non pas tant eux-mêmes
que les anges qui les précèdent. Partage aussi souvent que
possible tes repas avec eux et avec les pèlerins, s'ils
sont dans le besoin. Ne crains pas de te remettre entre les
mains des prêtres honnêtes. A l'occasion, prends parmi
eux des conseillers, au-dessous des autres fidèles. Qu'ils
distribuent aux pauvres les mets de ta table. Vénère les
bons prêtres, car ils sont le patrimoine de Dieu, ses aides
et ses adorateurs. S'ils n'ont pas tous les mêmes moeurs,
ne les incrimine point, car il y a beaucoup de demeures
dans la maison de Dieu, et les étoiles du ciel ne brillent
pas du même éclat. Une étoile diffère de l'autre en clarté,
et il y a des justes qui brillent plus que d'autres. Il en est
ainsi des prêtres. Il n'est point d'homme qui ne pèche, à
moins que sa vie ne soit d'un jour. Les vrais prêtres et
les plus savants sont toujours avec Dieu. Fais-leur, du
mieux que tu pourras, avec des larmes et des soupirs, une
confession véritable, car la confession libère l'âme de la
mort. Remets ton esprit et ton corps dans la main des
prêtres. En te promenant ou en te reposant, dans toutes
tes actions, prie pour qu'ils daignent t'accorder leurs
prières auprès de Dieu, qui les a choisis comme les intercesseurs
des peuples. Consacre la moitié de tes jours à la
pénitence, pour mériter l'accomplissement des saintes
promesses de Dieu. Souhaits.

CHAP 23

Avertissement pour redresser les mauvaises moeurs.

Un grand et opiniâtre travail est nécessaire pour notre
éducation. En effet, les contraires sont ordonnés en médecine,
et il ne faut pas seulement lutter contre le mal séculier,
à cause de ses torches enflammées d'envie ; il faut
encore lutter contre le mal spirituel. Il en est qui semblent
fleurir dans les richesses du siècle, et cependant ils ne
cessent, par une malice occulte, d'envier et de déchirer.
Tu peux le constater par toi-même. Il est écrit dans les
Synonymes : « La malice cachée emprunte de douces paroles.
» Ce germe se développe dans le coeur humain sous la
persuasion du diable, auteur de la mort. Il est écrit : « Les
tentes des bandits sont nombreuses, et ils provoquent Dieu
avec audace. » Ce qui est le profit de l'un, en effet, est la
perte de l'autre. L'envie tue l'enfant et la colère l'adolescent.
Que ces sentiments demeurent loin de toi, mon fils.
Qui serait envieux s'il n'était enfant ? Celui qui ne
peut se passer des grandeurs n'est qu'un enfant. Peut-on
souffrir de n'être pas dans les dignités, si l'on n'est pas
aiguillonné par l'envie ? On se perd alors de corps et d'esprit.
C'est par l'envie du démon que la mort est entrée
sur la terre . Manoeuvres du démon
.
Citation de Prudence :

(Le poète vient de peindre Jésus marchant sur les eaux.)

« Celui qui frémit sous les chaînes le démon dans un antre a buchers.
Hors de lui et transporté de fureur,
S'élance suppliant, comme s'il avait senti l'approche
du Christ.
Chassée, la peste aux mille formes des démons lubriques
S'empare des excréments de son troupeau de porcs,
Et se plonge en délire dans les eaux noires. »

Le sens de ces vers est très clair : il désigne les méchants.
Tourne le dos à tous ceux que tu rencontreras, et
fuis loin d'eux. Tu as et tu auras des volumes à lire, à
dérouler, à étudier, à comprendre ; tu auras aussi des
docteurs pour t'éclairer : tu peux facilement apprendre
des uns et des autres la conduite convenable en ces circonstances.
Comme les colombes qui. en buvant une eau
de cristal, aperçoivent des éperviers et s'envolent pour
leur échapper, heureuses de parvenir en lieu sûr ; de
même, si tu lis les Pères, si tu suis les exemples des
grands et des conseillers fidèles à leur seigneur, non seulement
tu échapperas aux embûches cachées des malins
esprits, mais encore à celles de ce monde.
Quoique nous soyons chétifs et exilés, j'ai compté dans
ce nombre des grands celui qui se cache pour le monde
dans notre indignité et qui tend plus en bas qu'en haut.
Il est écrit c[ue l'on doit porter les noms des douze patriarches
écrits au front, et l'Écriture nous offre en exemple des
animaux qui ont six ailes et qui ont des yeux devant et derrière.
Je te prescris d'avoir en horreur et de fuir les méchants,
les déshonnêtes, les paresseux et les orgueilleux.
Pourquoi ? Parce qu'ils tendent leurs lacets, comme une
souricière, pour tromper; et qu'ils ne cessent de préparer
sur le chemin le scandale et les pierres d'achoppement,
pour s'y précipiter et y entraîner ceux qui leur ressemblent.
Conseils. Les noms des douze patriarches qu'il faut
porter au front, les yeux qu'il faut toujours avoir devant et
derrière, ce sont les vertus dont il faut se munir. Bienfaits
de ces vertus.

Tant que tu lutteras dans le tourbillon du siècle, mon
fils, je t'exhorte à rendre grâces à Dieu en toutes choses, dans
l'adversité comme dans la prospérité. Que la prospérité
et les exemples des méchants n'abattent point ton
^prit. Que l'adversité ne te trouve pas inégal et ne te jette
pas à terre. S'il arrive, ce qu'à Dieu ne plaise, que des
vices naissent en toi, oppose, comme il a été dit plus haut,
les contraires aux contraires. Car l'Apôtre dit : « Marchez
par l'esprit, et vous n'accomplirez point les désirs de la
chair. Car la chair désire contre l'esprit et l'esprit contre
la chair.  Exemple des Pères. Le combat est partout
aujourd'hui. Je crains que tu n'y sois entraîné avec tes
compagnons, parce que, suivant la parole de l'Apôtre, les
jours sont mauvais, et il s'élèvera des temps troublés. En
ces temps il y aura des hommes n'aimant qu'eux-mêmes,
cupides, avares, impudents, rebelles, et plaisant plus au
siècle qu'à Dieu. Déjà, ô douleur ! on en aperçoit, en de
nombreuses troupes qui se lèvent, regardant par le pays
si le moment est arrivé. Lève-toi et prie. Dis avec le Psalmiste
: « Juge, Seigneur, ceux qui me nuisent, et viens à
mon aide. » Conseils de vigilance.

CHAP 24

Utile avis contre l'orgueil.

Si l'orgueil naît en toi, pour l`empêcher de monter dans
ton coeur, dis-toi que Dieu résiste aux orgueilleux et les
jette dans l'abîme. Fuis l'orgueil, et emploie contre cette
peste mortelle une profonde humilité. .L'humble, vrai et
doux auteur du genre humain donne sa grâce aux humbles.
Combien est terrible le mal de l'orgueil, par lequel
le grand Lucifer, créé ange par Dieu, a été précipité dans
les ténèbres, comme avide des peines de la mort, et livré
pour jamais, avec tous les siens, au Tartare ! Sublimité de
l'humilité. Elle prend I`humble, descendant modestement
au-dessous même du degré où le méchant a été jeté par
l'orgueil, et de là elle l'élève peu à peu jusqu'au ciel. Les
humbles sont le repos de Dieu.

CHAP 26.

Travaille à acquérir les sept dons du Saint-Esprit.

Mon fils Guillaume, si tu es humble et paisible, tu pourras
recevoir de Dieu, par le septuple don de la grâce, la
grâce du Saint-Esprit. Par l'humilité et l'obéissance, tu
pourras aisément passer du joug des malins esprits sous le
joug du Christ. Apprends, .dans la vigueur de ta jeunesse,
à porter quotidiennement le joug du Christ dans ton esprit
et dans ton corps. Il faut trouver la délivrance à l'heure de
la mort. Prends garde que la mort ne soit ta perte. Aussi
je veux que tu sois, parmi tes compagnons d'armes temporels,
tel que tu puisses mériter, après cette vie, le royaume qui ne
finira pas, et le partager avec les serviteurs
et les soldats du Christ. Si tu combats avec cette vigilance,
non seulement tu seras digne de recevoir les sept
dons de la grâce du Saint-Esprit, mais encore tu pourras,
par la contemplation du bien, entrer dans la gloire des
huit béatitudes. Je veux que tu prospères toujours dans
ces vertus et ces dons. Les dons de l'Esprit de Dieu sont
au nombre de sept, comme il est écrit dans Isaïe : la
sagesse, l'intelligence, la prudence, la force, la science,
la piété et la crainte de Dieu. Quoiqu'il y ait trois sortes
d'esprits, celui des anges, celui des hommes, et celui des
animaux et des reptiles, on compte cependant, pour
diverses raisons, sept jours dans la semaine, sept temps
des révolutions des planètes, sept lampes sacrées dans
le Saint des Saints, sept dons de la grâce du Saint-
Esprit. Si tu chéris Dieu de tout ton coeur, si tu étudies
les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament , si tu
mets en pratique tes lectures, l'esprit de sagesse reposera
sur toi. Si tu scrutes les paroles du Seigneur, si tu comprends
la menaces des peines éternelles, le géhenne réservée
aux pécheurs et la gloire du royaume céleste
réservée aux bons, l'esprit d'intelligence reposera sur toi
Si, dans l'adversité comme dans la prospérité, tu t'avances
dans le droit chemin sans être abattu par le malheur
ni enorgueilli par le bonheur, et cherchant la volonté de
Dieu, afin qu'il te vienne en aide, alors l'esprit de prudence
reposera sur toi. Si tu es fort contre les vices, si tu
les abats et les comptes pour rien, tu auras l'esprit de
force. Si tu es humble de coeur et chaste de corps, tu
seras élevé et tu auras l'esprit de science. Si tu as pour
ton prochain une compassion fraternelle , si tu imites
les hospitaliers, si tu es le consolateur assidu des pauvres
et des affligés, tu auras l'esprit de piété. Si tu crains et
si tu aimes, avec le zèle de la fidélité, ton père et seigneur,
ou les grands ou tes autres pairs, en évitant de
tomber dans leurs péchés et leurs scandales, l'esprit de
la crainte de Dieu reposera sur toi.
L'Esprit de Dieu remplit la terre et souffle où il veut.
Les saints apôtres étaient enivrés de ce souffle, lorsqu'ils prêchaient
en tous lieux, pratiquant ce qu'ils prêchaient.
La mise en pratique de la parole divine est une grâce du
Saint-Esprit. L'Esprit est Dieu.
Demande ces vertus au Seigneur en l'Esprit Saint, et il
te les accordera. David et l'Esprit Saint. Si tes pensées sont
bonnes, et si tu conserves avec soin ton coeur pur, tu seras
entièrement renouvelé par l'Esprit Droit. Si tu parles
convenablement et si tu gardes tes lèvres de toute parole
mauvaise, l'Esprit Saint ne se retirera pas de toi. Si tu
accomplis dignement ce que tu as pensé et dit, tu seras fortifié
par l'Esprit Supérieur, résumé.

CHAP 27

Avis utile contre les vices.

Déjà, depuis le début de ce livre, nous nous sommes
efforcés de changer en mansuétude la témérité de l'orgueil
et l'enflure de l'arrogance. Maintenant, avec la grâce du
Saint-Esprit aux trois formes, nous allons opposer aux
autres vices, comme une flèche à une flèche, un mur
redoutable. Il faut veiller, mon fils, et combattre le bon
combat, pour que la rédemption du fils de Dieu ne périsse
pas en toi. Oppose, comme plus haut, les vertus aux vices,
afin d'être préservé de la compagnie des méchants.
CHAP 28

Il faut opposer les vertus aux vices.

Si, à l'instigation du démon, auteur de la mort, ton
coeur est tenté par la fornication ou quelque aiguillon de la chair,
opposes-y la chasteté, et rappelle-loi Joseph. Daniel,
et les autres, qui ont mérité d'être sauvés par leur prudence
et leur fidélité envers leurs seigneurs et leurs proches.
Dieu jugera les fornicateurs et les adultères. Fuis la
fornication, mon fils, et éloigne ton esprit des femmes
sans moeurs. Ne cours pas après tes désirs, mais chasse-les
de ta volonté. Si tu écoutes les courtisanes, elles te feront
tomber sous le glaive de tes ennemis. Cependant, si,
envoyées par Satan, elles ont souffleté ton esprit, combats,
prie, et dis avec le Prophète : « Ne me livre pas.
Seigneur, aux bêtes de la terre.... » La hardiesse des yeux
n'est pas seulement corporelle, elle est aussi intérieure.
Sans cela, Job n'aurait pas dit : « J'ai conclu un pacte
avec mes yeux, pour ne pas même penser à une vierge. »
Pour échapper au charme envahissant de ces tentations,
il faut prier Dieu et se fortifier par les grands témoignages.
Quoique les yeux de la chair roulent dans les os de
la tête pour la concupiscence , cependant tout combat à
l'intérieur. Il est écrit, en effet, de ceux qui s'abandonnant
aux voluptés, commettent les stupres charnels : « La
mort entre par leurs fenêtres (1). »
Au sujet de ceux qui observent la continence et foulent
aux pieds les désirs de la chair, tu trouveras écrit : « La
lampe de ton corps est ton oeil ». « Si ton oeil est pur, tout
ton corps sera pur. » La chasteté est la vie des anges. Combien
est court le moment du plaisir, qui fait perdre la vie
future, et combien sont grandes la force et la splendeur
d'une vie de chasteté, qui fait d'un mourant le concitoyen
des anges !

Les docteurs ne défendent pas de se marier, mais ils
s'efforcent d'arracher de notre coeur les désirs illicites.
Enoch, Noé, Abraham, Isaac, Jacob, Joseph, Moïse, furent
chastes, ainsi que les autres qui, dans le lit conjugal, ont
travaillé à conserver leur coeur pur en Jésus-Christ.
Toi, mon fils, si tu gardes ton corps chaste, soit dans
la virginité, qui est le don le plus éclatant, soit dans le
lit conjugal, tu seras pur du péché, et ton esprit se reposera
dans les Huit Béatitudes comme à un éternel banquet.

(1) Les yeux sont les fenêtres du corps.

CHAP 29

Sois patient d'esprit et de corps.

Si la peste de la rancune vient à troubler ton cœur de
colère, apaise-la de ton mieux. Il est écrit : « La colère
habite chez l'insensé. »
Citation de quatre vers barbares.
Effets nuisibles de la colère. Il faut la combattre.
Citation de quatre vers barbares.
Toi, mon fils, si la colère monte jusqu'à l'asile de ta
pensée, repousse-la. Exemple de Moïse.
Quelle heureuse cour que celle où l'on peut garder en
sûreté la pleine possession de son esprit et éviter ce qui
est nuisible au corps !

CHAP 30

Afin de triompher aisément des vices, lis des yeux et
retiens toujours dans ton coeur les Huit Béatitudes.


Je désire, mon cher fils, que tu parles rarement et que
tu évites la colère. Si tu entres en colère, qu'elle ne te
fasse pas pécher, pour que Dieu ne s'irrite pas contre toi,
et qu'elle ne t'éloigne pas de la voie de la justice. Bienheureux
les pacifiques. Conseils de charité. Nous sommes
sur la terre des pèlerins et des voyageurs : il faut nous
secourir mutuellement. 11 faut aimer les pauvres, car Dieu
les entend. La pauvreté et le besoin n'atteignent pas seulement
les petits : ils atteignent encore les puissants.
Tel vit au sein de la pauvreté, qui est riche parce qu'il n'a
pas de besoins. Son âme est aussi humble que ses ressources.
Tel autre est pauvre au milieu des richesses. Celui qui
envie le pauvre est riche. Celui qui désire être riche est
pauvre. Il fait comme l'ignorant qui veut devenir lettré et
qui ne le peut. Le riche et le pauvre mourront tous les deux
.
Richesse de l'humble qui met sa consolation dans le Saint-
Esprit. Humilité de David. Conforme-toi, mon fils, aux
exemples laissés par les maisons d'Abraham, d'Isaac, d'Israël,
de Moïse. d'Aaron et de Lévi, que je ne suis pas digne
de dénommer. Je t'engage à chérir les Huit Béatitudes, et
surtout l'avant-dernière.Il va en être question. Ne sois
pas un lecteur oublieux, et efforce-toi de pratiquer les vertus
dont elles sont le couronnement.

Crains le Seigneur. Heureux ceux qui le craignent.
Aime la pureté. Heureux ceux qui ont le coeur pur.
Aime les pauvres. Heureux les pauvres d`esprit.
Aime la justice. Fuis l'iniquité. On est même châtié
pour l'iniquité des autres quand on ne la réprime pas.
Exemple d'Héli. Toute iniquité retombe sur son auteur.
Les rois, les princes, les évêques et les autres prélats qui
vivent dans le mal ne se perdent pas seulement eux-mêmes,
ils entraînent encore dans l'abîme ceux qui les
approuvent. Que te servira, mon fils d’être de sang noble,
si l'iniquité vient à corrompre ton corps et à le précipiter
dans le deuil éternel ? Quel profit y aurait-il à gagner le
monde, mais à se perdre soi-même ? Le monde et ses désirs
passent rapidement. Quoique un homme ait sur ses vêtements
l'éclat de l'or, des pierres précieuses et de la pourpre,
il s'en ira chez les ombres vil et nu, n'emportant rien
avec lui, si ce n'est ses bonnes actions.

Heureux ceux qui ont soif de justice. Ceux-là mangent
le pain des anges. Tes bonnes oeuvres te le procureront.
Le bonheur entrera dans ta maison, et autour de ta table,
tes fils, comme les rejetons d'une plantation d'oliviers,
béniront le Seigneur.

Sois miséricordieux. Si tu fais partie d'un tribunal,
apportes-y de la mansuétude. Après le jugement, c'est la
clémence qui est préférable. Bienheureux les miséricordieux.
Sois doux.

Citation de trois vers barbares.

Exerce largement la charité. Que l'avarice, qui est la
servitude des idoles, ne soit pas même nommée chez toi.
Donne selon tes moyens ce que Dieu t'a départi. Donne
afin que tu reçoives. Celui qui donne aux pauvres ne manquera
de rien.

Honore d'abord le Seigneur par l'offre de tes prémices,
et donne le reste aux pauvres. Cache souvent ton
aumône dans le sein du pauvre, car elle priera pour toi.
L'aumône délivre l'âme de la mort et ne la laisse pas descendre
dans les ténèbres. Pourquoi ? Parce qu'elle efface
les péchés comme l'eau éteint le feu. Quoiqu'il y ait bien
des manières de rendre l'aumône efficace, je t'en recommande
spécialement trois. D'abord, donne ce que tu possèdes
à celui qui est dans le besoin et qui demande en secret.
Ensuite, pardonne à ceux qui t'auront fait du mal. En troisième
lieu châtie ceux qui sont en faute, tant par la
parole que par les verges, si cela est nécessaire.

CHAP 31

Aide les pauvres dans la mesure de tes moyens.

Prête l'oreille au pauvre, même importun. Car il souffre
dans son coeur, et sa bouche crie. Si tu étais écrasé par
une semblable misère, tu souhaiterais qu'on vînt à ton
aide. Celui qu'à présent on abreuve d'injures sera plus
tard honoré. Il est juste que lorsqu'on reçoit les tributs des
autres on se montre généreux. Aussi je t'exhorte à distribuer
toi-même aux indigents le manger, le boire et le vêtement.
La charité nous est imposée par notre commune origine.
Adam a dit de sa compagne : « Voici les os de mes os et la
chair de ma chair. » Chair vient de choir, car pauvres et
riches, tous retournent en poussière. Exhortation à une
compassion fraternelle envers les faibles et les malheureux.

(1) II, Tim.. IV, 2.
(2) P, improbis,
(3)1, Cor., IV, 21.
(4) P, dignis.
(5) P, inquit.
(6) I, Cor., IV, 21.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi Empty Re: Le manuel de Dhuoda - Royaumes Francs - année 841 - transmettre la foi

Message par MichelT Jeu 27 Fév 2014 - 18:37

Manuel de la Princesse Dhuoda - partie 3


CHAP 32

Des tribulations.

Les tribulations, les tristesses ou les angoisses des tentations
revêtent mille formes dans le siècle.

Les hommes charnels s'affligent pour des choses périssables
; les hommes qui vivent de l'esprit s'affligent parce
qu'ils craignent de perdre le ciel. Le chagrin des premiers
mène à la mort ; le chagrin des seconds à la vie éternelle.
Il y a des oiseaux qui n'ont qu'un chant de deuil. Cela
signifie que chacun de nous doit gémir doublement, d'abord
du bien qu'il a négligé de faire, ensuite du mal qu'il
a aimé. Dans ces deux voies est la lutte humaine, et l'on
n'y apprend pas les chants sonores. Il faut chasser la tristesse
inutile, mais s'attacher à celle qui est profitable à
notre âme. L'affliction de l'esprit est plus noble que l'affliction
de la chair, et la sévérité est préférable à l'oubli,
malgré la peine qu'elle peut causer. L'Apôtre a dit : « Nous
paraissons tristes, et pourtant nous vivons dans une joie
constante. »
Récit d'un songe : « Il me semblait être a cheval, courir,
assister à un festin ; je tenais les coupes et les plats dans
mes mains ; les plateaux étaient chargés de fruits savoureux
; j'allais et je venais. Il me semblait que j'étais un
spectateur des bancs des chevaliers. A mon réveil, ne
voyant rien, je ne pus rien saisir, et je demeurai -à jeun,
abattu, égaré, et tâtant autour de moi.
Et voici que lorsque les insensés et les négligents sont
forcés de quitter la fausse félicité des choses temporelles,
il ne leur reste rien que la vanité des chants funèbres. »
Tout est vanité. Avec le sommeil de la vanité, tu te prépares
des liens qui t'enserreront comme un filet. O le sommeil
dur et léthargique pour ceux qui vivent mal et
meurent sans se repentir ! Ils passent comme des navires
chargés de fruits, comme le foin (qui fleurit le matin et que
le soir voit sécher et jeter au feu. Quoique I `homme semble
vivre longtemps dans le siècle, sa vie est une toile courte
et déchirée.

Citations de Job.

« Mes jours ont passé plus vite que la toile n'est coupée
par le tisserand, et ils se sont consumés sans une lueur
d'espérance. » La vie de l'homme sur la terre n'est autre
chose qu'une tentation. Prospérité et abaissement de Job.
Il ne vit dans ses maux qu'une apparence, et retrouva une
heureuse réalité quand le bonheur lui fut rendu. Suite de
la distinction entre le faux et le vrai, qui est la principale
matière de ce chapitre. Le vrai, c'est de finir, comme Job,
sa vie en paix, et dans la joie de la purification. Job a lui-même,
pendant qu'il vivait, distingué, pour les négligents
et les hommes de bonne conduite, l'apparence de la réalité
: « Ils passent leurs jours dans la joie, voilà, l'apparence
; en un instant ils descendent aux enfers, voilà la
réalité. » Il faut craindre et adorer Celui qui frappe si terriblement
l`orgueil des rois, que la place de leur tombeau
devient introuvable. La terre engendre des vers qui dévorent
notre dépouille.
Où est l'homme, une fois que la terre l'a consumé ?
Sans doute, comme disent les docteurs, il sera là où il est
tombé, à l'orient, à l'occident, au nord ou au midi. Il y a,
dans ces quatre points cardinaux, un sens qu'il serait trop
long d'expliquer en détail, mais que des esprits habiles
trouvent aisément. Il est écrit que là où l'arbre tombera,
là il restera. L'arbre ici veut dire l'homme, et on connaît
à son fruit s'il est bon ou mauvais.
L'homme instruit par l'Esprit Saint mérite d'être comblé
de dons et de se couvrir de feuilles et de fruits. Il répand
un parfum suave, ses paroles sont ses feuilles et sa raison
est son fruit. On propage les bons arbres, mais on jette au
feu les mauvais. Le vrai arbre, la vraie vigne, c`est le
Christ. Les autres arbres sont ses rameaux, et c'est par lui
qu'ils portent des fruits. Il faut, mon fils, te greffer sur
lui. Énumération des fruits de l'Esprit Saint. Ces fruits,
mon fils, il faut t'en pénétrer entièrement et les méditer
sans cesse pour mériter la protection et l'assistance de
l'arbre véritable, au jour de la tribulation et du besoin.

CHAP 33

De la réconciliation avec Dieu si tu commets une faute»

Si tu as commis quelque injustice, mon fils, afflige-t'en
et hâte-toi de la réparer. Tourne-toi vers Celui qui voit
tout, et implore sa clémence. Paroles du publicain. Paraphrase
de ces paroles. Si tu les prends pour exemple
dans ton coeur, l'affliction, qui est l'apparence, s'éloignera
de toi, et la joie d'entrevoir les récompenses futures, qui
est la vérité, viendra en toi. Quelle félicité que celle que
l'oeil n'a pas vue, que l'oreille n'a pas entendue, et que n'a
jamais éprouvée un coeur humain !

CHAP. 34

Ce que tu dois faire dans les tentations.

Dans les tentations, comme dans tous les autres périls
qui menacent notre fragilité, il faut montrer ton courage
et assurer ta défense par ta prudence. Veille sur ton coeur
avec soin.

CHAP. 35

Des tribulations.

S'il t'arrive des tribulations, comme je l'ai dit, supporte-les
patiemment. Crie vers le Seigneur, et il t'entendra.

CHAP. 36

Des persécutions

Ne faiblis pas dans les persécutions. Bienheureux ceux
qui souffrent la persécution pour la justice. Si, pour tes
péchés, ta es persécuté, supporte patiemment ton mal en
Jésus-Christ.


CHAP. 37

Du besoin.

Si tu tombes dans le besoin, prends confiance et invoque
Dieu. Tu pourras en effet monter au premier rang, si
tel est le dessein de Dieu.


CHAP 38

Du malheur.

Le malheur est une privation quelconque. David a connu
le malheur. Pour que, dans les mauvais jours, tu n'oublies
pas les bons, invoque la protection divine. Souviens-toi
des malheurs de Joseph, de David, de Daniel, de Suzanne,
etc. En criant vers le Seigneur, non seulement ils ont été
exaucés, mais encore rendus aune prospérité plus grande
que celle qu'ils avaient connue.

Chap 39

De la maladie.

Si la maladie atteint ton corps, ne perds pas courage et
ne deviens pas triste, car elle est une leçon du Seigneur, et
cette leçon guérit et sauve le corps et ton âme. Dieu châtie
celui qu'il aime.

Pour beaucoup, la maladie est un bienfait, parce que
tant qu'ils sont en bonne santé, ils ne cessent de se complaire
dans les rapines, la luxure et les autres vices. C'est
parce qu'il a pitié d'eux que Dieu les visite. Il y a des
gens qui s'affligent d'une trop belle santé. Il était de ceux-là,
celui qui disait : « Tu m'as abandonné, Seigneur, et tu
viendras me visiter cette année. » Beaucoup se réjouissent
d'être malades. Il sentait bien l'utilité de la maladie, celui
qui disait : « Plus je suis malade, plus je suis fort. » La
santé et la maladie produisent les effets les plus différents.
Elles tournent à la gloire des uns, à la honte des autres.
Pour Pilate et Hérode,la maladie est le chemin du châtiment,
au double ; pour Lazare, pour la belle-mère de
Pierre, pour le fils du centurion, elle est le chemin de la
récompense.

Ce que nous avons dit du double des maux, nous le
dirons aussi du double des biens. Les justes brilleront et
avanceront comme les étoiles derrière les roseaux. Ils
recevront double vêtement pour l'éternité. Ils recevront
de la main de Dieu le règne de gloire et la couronne de
beauté, parce que Dieu les a scrutés comme de l'argent et
éprouvés comme de l'or. Conseils pour les imiter et pour
faire servir la santé du corps au salut de l'âme.

CHAP.40

Tu dois en tout glorifier en Dieu.

Tout le bien qui t`arrivera Mon fils. rapporte-le a Dieu
et non à toi ni à ton mérite. Que possède l'homme qui ne
lui ait été donné ? Et s'il l`a reçu, de quoi se glorifierait-il?
Si les richesses te viennent en abondance n'y incline pas
ton coeur, car elles passent.

CHAP. 51

Comparaison des vertus que te procurerons les sept dons
du Saint-Esprit et les Huit Béatitudes.


Ces Huit Béatitudes, et les sept dons du Saint-Esprit, je
t'en ai déjà parlé. J'ai voulu maintenant les analyser et
les éclaircir selon mes faibles moyens, pour les faire pénétrer-
dans ta jeune intelligence. J'ai préféré cette humble
méthode aftn que, peu capable encore d'une forte nourriture,
et comme au régime du lait, tu puisses peu à peu
t'élever des éléments aux connaissances supérieures et
goûter le mets suprême, Dieu. En m'occupant des Huit
Béatitudes, mon fils, je n'ai pas osé me conformer à l'ordre
et à la majesté du texte de l'Évangile, car je n'en suis pas
digne. Je ne me suis attachée qu'à mesurer mes explications
à ta jeunesse. Faible femme, je te donne en Jésus-
Christ, à toi enfant, du lait seulement. Je te donne à boire,
et non à manger.

Je commencerai par la simplicité d'esprit, pour que tu
puisses approcher dans toute la pureté de la conscience de
Celui de qui émanent les saintes richesses ; et pour que tu
parviennes à la perfection de l'homme dont le prophète a
dit : « Voici l'Homme : son nom est l'Orient. » L'Orient,
parce que, resplendissant dans le ciel, il a voulu accepter
notre pauvreté et nous racheter de son sang. Si nous en
sommes dignes, il fera inscrire notre nom dans le ciel
avec les saints

Chap 52


Comment tu peux rester immaculé avec l`aide de Dieu

Partie fragmentaire – il manque des pages il est intitule ; Lt
quomodo esse possis immaculâtus,juvante Deo, ostendo.
A la table de N il porte le duniéro XLl. ot le premier fragment
de ce ms. nous a conservé une partie de son titre :
Et quomodo esse possis ad
Les tables de N et de P placent ce chapitre après le ch;i]i.
XLIII. L'étude du texte du ^lanuel nionlre quïl faut le
placer avant.


CHAP 53

Avis pour que tu puisses devenir un homme parfait.


Heureux le juste qui pendant qu'il est encore sur la
terre, foule la boue et le limon. Son nom est déjà écrit au
royaume céleste.

Si tu veux mon savoir mon fils, quelles sont les vertus qui
Lui procure les inépuisables richesses du royaume de Dieu écoute le
prophète demandant à Dieu qui habitera son tabernacle et qui se reposera sur sa montagne sacrée.
Énumération des passages de l'Écriture où se trouvent les
réponses de Dieu. Ces réponses sont au nombre de 15, faisant
connaître chacune une vertu distincte. L'homme qui
possédera ces vertus obtiendra la récompense éternelle.

Ci) P, talis.
(2) P, aut.
(3) P, sancto.
(4) Paalni,, xiv, 1.
(5) P, Et.
(6) Ce chiffre ne sigûitîe rien, à moins qu'on ne le lise xv, qui est le
nombre des réponses.
(7) Les chiffres romains i, ii, m, etc., qui précèdent chaque réponse,
doivent se lire primo, secundo, tertio, etc.
(8) Psalm., xiY, 2.
(9) IbicL
(10) Psalm., XIV, 3. Ces quatre mots ne se trouvent que dans P.
(11) Pour egit.
(12) Psalm., XIV, 3.
(13) P, procûùno suo.
(14) Psalm., XIV, 3.
(15) Psalm., XIV, 4.
(16) Psalm., XIV, 5.
(17) Pour in proxirnum.
(18) P, non accepit. Psalm., xiv, 5.
(19) Souvenir de Eccli., iv, 9.
(20) Psalm.* xxin, 4.


CHAP 54

Des combinaisons du nombre sept dans leur rapport
avec le pardon des injures.


Les sept dons du Saint-Esprit et les huit béatitudes des
évangélistes forment un total de trois fois cinq. Les calculateurs
disent : « Sept fois un font sept ; sept fois deux
font quatorze. Ajoutez un et vous avez quinze. » De même,
tu dis: « Sept fois sept font quarante-neuf. Ajoutez un et
vous avez cinquante. » En ajoutant ainsi une unité à
d'autres nombres, tu arriveras sans retard à un nombre
puissant. Tu dis encore : « Sept fois onze font soixante-dix-
sept ; sept fois soixante-dix font quatre cent quatre-vingt-
dix. » Et de même : « Quatre fois un font quatre:
quatre fois deux font huit. Ajoutez-y sept et vous avez
quinze. « Au sujet de ces combinaisons . un sage dit de
même : « Prenons sept et huit. »
Tu dis encore : Trois fois trois font neuf. Ajoutez un et
vous avez dix. « Etc.
Il serait trop long, mon fils , de t'expliquer en détail
les différentes significations de ces calculs, mais je t'en
dirai quelques mots pour tu n'y demeures pas étranger.
Quand on dit sept fois sept, on provoque chacun de nous
à la plénitude de la réparation. Si l'on y ajoute une unité,
on exprime par ce total la grâce du Saint-Esprit, nous cor-

(1) Souvenir de Prov., xx, 9.
(2) Eccli., XXXI, 10.
(3) Eccli., XXXI, 10.
(4)Sou venir de Eccli. ^ vu, 36.

rigeant. pour la rémission de nos péchés, on nous faisant
faire réparation. C'est le pardon du psaume cinquantième,
que l'on récite dans l`année du jubilé, année de rémission
et d'absolution. Quand on dit sept fois onze . c est pour la
seule recommandation de ton corps, qu'obtiendra ta réparation
volontaire. Quand on dit sept fois soixante-dix ,
c'est pour que tu remettes aux autres les injures dont ils
se seront rendus coupables envers toi. Le calculateur dit :
« quatre-cent-quatre-vingt'dix » comme s'il disait : « celui-là
est mon frère plus qu'aucun de mes proches ou des autres
hommes. » ,
Il faut pardonner non seulement les actions , mais encore
les paroles dirigées contre toi.
En luttant à travers les quinze degrés des sept dons et
des huit béatitudes , tu t'élèveras peu à peu , mon fils , et
je t'y exhorte , au sommet de la perfection , ainsi qu'on
parvient au nombre cent en comptant de la main gauche à
la main droite. En effet, les plus habiles calculateurs comptent
les nombres avec les doigts de la main gauche jusqu'à
quatre-vingt-dix-neuf. Mais lorsqu'ils parviennent au centième
, ils arrêtent immédiatement la main gauche et
,joyeux , ils élèvent la main droite pour le nombre cent.
Sur ce calcul au moyen des deux mains , tu trouveras
écrit : « Ma tête reposera sur sa main gauche, et de la main
droite il me serrera contre lui. » Que représente ici la main
gauche, mon fils, sinon la vie présente, où chacun de nous
se fatigue ? Et que représente la main droite , sinon la patrie
céleste ? Que le Christ qui tonne du haut des cieux
daigne prolonger ta douce vie jusque dans son éternité ,
en t'inspirant le bien à travers les quatre-vingt-dix-neuf
degrés des calculateurs. Que celui qui a prolongé de quinze
ans la vie du roi Ezéchias , prolonge heureusement la
tienne , s'il est possible , pour de longues années. Que sa
volonté soit faite. Amen.
Avec la grâce de la sainte Trinité . qui vit dans les siècles
des siècles, et avec la grâce du Saint-Esprit, ici se terminent
ces béatitudes.


CHAP 55

Avis particulier et très utile sur notre double naissance.

Je me suis efforcée d'être ton guide en tout ce qui concerne
les choses temporelles, pour que tu puisses marcher
en sûreté et sans blâme dans la lutte du temps où tu vis,
et abstraction faite des grandeurs de la contemplation.
Maintenant, comme une seconde mère pour ton corps et
ton esprit, j'aborde le combat de ton âme ; je veux t'apprendre
à le poursuivre, avec l'aide de Dieu, jusqu'au bout
,et à renaître quotidiennement dans le Christ.
Les docteurs nous apprennent qu'il y a dans tout homme
deux naissances, l'une charnelle et l'autre spirituelle. La
naissance spirituelle est plus noble que celle de la chair.
L'une ne peut utilement exister sans l'autre dans le genre
humain. Afin qu'elles s'adaptent l'une à l'autre, l'Apôtre
dit : « Nous vivons avec elles et nous ne pouvons vivre sans
elles. « Quoique ce passage soit susceptible d'un autre
sens, je veux, pour diverses raisons, que tu t'en tiennes
à mon interprétation.


CHAP 56

Je désire que tu prospères dans la première naissance.

Au sujet de la naissance charnelle, nul n'ignore que
chacun de nous naît avec le péché.
Quoique les questions qui nous occupent aient été quelque
peu traitées suivant les principes des Grecs, tu trouveras
plus bas et en détail ce que je veux que tu apprennes.
L'enseignement de l'amour, en effet, vaut l'enseignement
le plus savant, et porte sur toutes choses de vives clartés.

CHAP. 57

Je t'avertis de persévérer dans la seconde naissance.

L'Évangile dit de la naissance spirituelle : « S'il ne
renaît de nouveau, nul ne pourra voir le royaume de Dieu.»
Il dit de la naissance charnelle : « Ce qui est né de la
chair est chair. » L'Apôtre t'apprend comment un homme
de la seconde naissance peut être le père de plusieurs autres.
Lis la vie de la bienheureuse Marie, mère d'un enfant
si haut placé; lis celle d'Augusta, mère de saint Symphorien,
citoyen d'Autun : tu verras comment elles ont été à
la fois, dans le Christ, des mères selon la chair et selon
l'esprit. Par l'Évangile, par la sainte prédication ou par
l'exemple des bonnes œuvres, beaucoup de chrétiens ne
cessent d'engendrer des fils à l'Église.

CHAP 58

De la première et de la seconde mort.
La première mort est le départ du corps pour des régions
heureuses ou funestes.
La seconde mort est la mort de l'âme.

CHAP.59

Considère la première mort.

Nul homme ne peut l'éviter. Paroles de Josué mourant

CHAP.60

Il faut lutter pour éviter la seconde Mort.

L'homme peut l'éviter, s'il lutte courageusement. Heureux
celui qui, au milieu des troubles de ce temps, saura
combattre pour mériter l'honneur des récompenses divines.
Pour rivaliser dignement avec eux, mon fils, tu dois fréquemment
lire et prier, suivant mes conseils, avec une
ferveur croissante dans le Christ.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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Message par MichelT Jeu 27 Fév 2014 - 18:50

Manuel de la princesse Dhuoda - partie 4


CHAP.61

Adonne-toi à la lecture et à la prière.

Dans les saintes lectures, tu trouveras ce que tu dois
demander à Dieu, ce que tu dois éviter et ce que tu dois
suivre. Tu y trouveras un enseignement pour tout. L'Apôtre
nous recommande l'assiduité dans la prière quand il
dit : « Priez sans cesse. » Jérémie, dans ses Lamenta.-
tions (1), dit de même : « Que la pupille de ton oeil ne se
taise point. » Est-ce donc qu'il faille toujours prier, ou que
les yeux profèrent des paroles? Non, mais il faut entendre
par là que tout ce que tu auras accompli de bien dans cette
vie, tout cela priera sans cesse pour toi. Si tu répands des
larmes sur tes erreurs et sur celles des autres, tes yeux
mêmes crieront certainement et prieront vers le Seigneur.

CHAP.62

Du passé, du présent et du futur.

Prie pour le passé, afin de ne pas oublier les fautes que
tu as pu y commettre. Prie pour le présent, afin d'éviter de
pécher. Prie pour le futur, afin de te garder du mal dans
l'avenir.


CHAP. 63

Prie pour tous les membres de l'Église.

CHAP. 64

Pour les évêques et les prêtres.

Prie d'abord pour les évêques et les prêtres, afin qu'ils
élèvent de pures prières, pour toi et le peuple entier, vers
le Seigneur.

CHAP. 65

Prie pour les rois et leur grandeur.

Prie pour eux et leur puissance, afin qu'ils maintiennent
ferme dans le Christ la religion de l'Église universelle, et
qu'ils gouvernent leur royaume terrestre de façon à mériter
le royaume des cieux.

Chap 66

Prie pour ton seigneur

Prie pour lui, afin que Dieu accroisse la force de son corps
et de son âme, lui fasse mépriser les obstacles, le rende
prudent et vigilant dans la prospérité, et le maintienne en
toutes choses dans le bonheur et l'éclat du rang suprême.
Prie pour lui, afln qu'il daigne conduire à son plus haut
développement, par la crainte et l`affection, la force de ta
jeunesse.

CHAP. 67.

Prie assidument pour ton père.

Prie assidument  pour ton père, et fais prier pour lui
par les diverses catégories d'ecclésiastiques, afin que Dieu
lui donne pendant sa vie la paix et la concorde, s'il est
possible, avec tous; qu'il fasse réussir ses desseins par la
patience et le courage, et, qu'après sa mort, il l'admette
dans le royaume céleste, grâce aux fruits de sa pénitence
et à la libéralité de ses aumônes. Amen.


CHAP 68

Prie aussi pour tous ceux, qui suivent.

Finis au« mots :
« Et pro onini populo sanrto Dei. »

Il faut prier pour ceux qui se nuisent par les discordes et
les procès, afin que la paix de Dieu, qui surpasse toute
opinion, garde leur coeur et leur intelligence, et les fasse
s'accorder en paroles et en actes, pour glorifier Dieu d'un
seul élan et d'une seule bouche. Amen.
Il faut prier pour ceux qui sont en chemin, afin que Dieu
leur accorde un heureux voyage ; pour les navigateurs, afin
qu'ils puissent entrer au port de salut ; pour les malades^
afin que Dieu leur donne le salut de l'âme et la guérison
du corps, et que, sortis de leur lit de douleur, ils puissent
louer et bénir Dieu dans les églises ; il faut prier pour les
affligés, les persécutés, les indigents, les victimes de la
misère, et pour les catégories que j'omets ici. Lis les oraisons
de la sixième férié, c'est-à-dire du vendredi saint.
Tu y verras qu'il faut prier pour le peuple entier. L'une
d'elles dit, en effet, « Et pro omnipopulo sanctn Bel. »

CHAP. 69

Prie pour tous les fidèles défunts, pour ceux de mérites
médiocres comme pour ceux de grande vertu.


Prie pour eux, afin que le Christ les secoure et daigne
recevoir leurs âmes dans le sein d'Abraham. Prie afin qu`ils
méritent de trouver le repos et le rafraîchissement dans
l'éternité. Dans les offices des défunts, comme disent les
docteurs, il y a, à leur usage, trois espèces de secours. En
premier lieu, à. l'intention de ceux qui possédaient de hautes
vertus, il y a les actions de grâces. En second lieu, à
l'intention de ceux dont les mérites étaient faibles, il y a
la propitiation.


CHAP. 70.

A l'intention des grands coupables, c'est par l’aumône
que tu dois intervenir.


En troisième lieu, pour les grands coupables, il faut
donner. Pourquoi? Parce que, s'ils n'y gagnent pas le salut,
ils peuvent du moins recevoir quelque repos par les mérites
des pauvres. Et cependant, comme on ne peut savoir à l'intention
duquel d'entre nous Dieu accepte nos offrandes, il
faut donner pour tous, et ces dons doivent être, sans exception,
reçus par les fidèles ministres de la sainte Église, à
moins, ce qu'à Dieu ne plaise, qu'ils ne soient à l'intention
de ceux qui ont dévié de la foi en la Sainte Trinité, ou qui,
abandonnant leur salut, ont fini leurs jours dans le pire. En
effet, Dieu connaît les coeurs de tous et il grave l'image des
siens. Nous ne devons désespérer de personne, mais prier
pour tous. Sans doute, au jour du jugement, le Dieu clément
a pitié de sa créature, car l'Apôtre, ému de compassion
pour les âmes des fidèles et des infidèles, disait, en poussant
de profonds gémissements : « Quand je reviendrai
parmi vous, puisse Dieu ne pas m'humilier en vous ; puissé-je
n'avoir pas à pleurer sur beaucoup de pécheurs impénitents
! » Il faut prier pour tous, surtout pour ceux qui ont
reçu la grâce du baptême, quoiqu'ils aient péché et soient
morts sans faire pénitence. Pour ceux-là, il faut doublement
pleurer et doublement prier.
Dialogue d'un esprit et d'un vieillard sur les peines des
défunts.
En effet, un esprit répondit à un vieillard qui l'interrogeait
: « Nous qui n'avons pas connu la Loi et qui n'avons
jamais reçu la grâce du baptême , nous souffrons des
peines un peu plus tolérables. » C'est comme s'il eût dit :
« Personne ne nous a guidés. » « Mais ceux qui ont connu
la puissance de Dieu, qui ont reçu le baptême et la foi de
la Sainte Trinité, et qui, après leur initiation, sont morts
sans le fruit de la pénitence, ceux-là souffrent des tourments
plus cruels que les nôtres. » Le vieillard dit alors :
« Et quelle est votre peine ? » La voix répondit : « Autant
il y a de distance du ciel à la terre, autant il y a de feu sur
ma tête et sous mes pieds. Moi et ceux de ma condition
nous sommes au milieu. Mais ceux dont j'ai parlé, plongés,
sous nos pieds, au plus profond de l'enfer, y souffrent
d'épouvantables tortures. » Alors le vieillard commença de
gémir et dit en sanglotant : « J'ai cinq frères, etc. »
Si quelqu'un pèche et ne se repent pas, que lui arrivera t-
il? Écoute l'Evangéliste, qui dit : « Liez-lui les mains et
envoyez-le dans les ténèbres extérieures. » Il faut prier
pour ceux qui tombent, afin qu'ils se relèvent, et pour ceux
qui sont debout, afin qu'ils ne tombent pas. Si tu tombes
dans une faute, ne désespère pas, mais fais pénitence et
confie-toi dans le Christ. Quand, avec l'aide de Dieu, tu te
seras relevé, ne cesse d'avertir les tiens de se relever
aussi.
Il faut prier pour tous, surtout pour ceux qui ont reçu la
foi du Christ, et non-seulement pour les étrangers, mais
encore, et plus ardemment, pour les membres de notre
famille. Je te dis cela pour parvenir au but que je désire :
je t'avertis, quoique près de la tombe, de prier pour tous
les défunts, mais surtout pour ceux dont tu descends dans
le siècle.

CHAP.71.

Prie pour les défunts parents de ton père.

Prie pour les parents de ton père, qui lui ont laissé leur
fortune en légitime héritage, et dont tu trouveras les noms
à la fin de ce livre. Quoique l'Écriture dise : « Un étranger
profitera du bien d'autrui, » ce ne sont pas des étrangers
qui possèdent l'héritage de ces défunts, c'est ton seigneur
et père Bernard. Si tu te conduis vis-à-vis de lui en fils
digne et soumis, il accroîtra pour toi le profit de ses fragiles
dignités. Si, grâce à la faveur divine, ton père peut
en distraire quelque chose et te le donner, prie encore
davantage pour que les âmes de ceux dont il tient ses
biens lui fassent obtenir une augmentation de richesse.
Les soins nombreux qui l'occupent ne lui laissent pas le
temps de prier pour ces âmes ; mais toi qui en as le pouvoir
et le loisir, fais-le sans relâche.

CHAP. 72

Prie pour le seigneur Théodoric et pour tous les autres
défunts, afin qu'ils reposent en paix.


Il ne faut pas oublier de prier, mon fils, pour celui qui,
te prenant dans mes bras, t'adopta pour fils dans le Christ
par le baptême de la régénération (1). Quand il
vivait, il s'appelait le seigneur Théodoric ; maintenant il
n'est plus. Il eût été en tout ton guide et ton ami si cela
lui eût été permis. Il a été reçu, sans nul doute, dans le
sein d'Abraham. Te laissant dans le siècle comme un enfant
premier-né, il a légué tous ses biens à notre maître et
seigneur (2), afin qu'ils te soient entièrement destinés.
Ordonne souvent, autant que tu le pourras, des prières
pour ses fautes, s'il en a commis et ne s'est pas repenti ;
ordonne-les nombreuses et particulières, aux offices de la
nuit, à matines, à vêpres, et aux autres heures ; ordonne-les
dans beaucoup de lieux, et que beaucoup de personnes
y prennent part. Que le sacrifice de la messe soit fréquemment
offert pour lui; que de saints prêtres y prient et que
des aumônes y soient distribuées aux pauvres. Indication
des prières que Guillaume doit dire quand il priera pour
Thédoric.
Il faut faire dire des messes et des offices, non-seulement
pour lui, mais encore pour tous les fidèles défunts. Nulle
prière ne vaut mieux, dans cette intention, que les libations
des sacrifices (c'est-à-dire le vin du calice, la messe).


CHAP. 73

Même sujet, et notamment pour ton père [Théodoric] .

Suis donc, mon fils, les avis que je te donne, et surtout
pense à l'âme du seigneur Théodoric, de bonne mémoire,
et agis pour le mieux à son intention. Pour le reste, prends
courage dans le Seigneur. Conseils.

CHAP. 74

Des divisions et des combinaisons des nombres.

Je me suis utilement servi, pour écrire le présent livre,
de divers autres ouvrages, mais la méthode qui m'a guidée,
c'est de choisir des matériaux appropriés à ta jeunesse, de
façon que tu sois guidé et conduit jusqu'au sommet parles
quinze échelons dont j'ai déjà parlé. Je désire que le nombre
de ces échelons, déroulé dans ton esprit, y suive le
même progrès que les heures accordées à ton existence
par la bonté de Dieu.

CHAP.75

De la signification des lettres du nom d'Adam.

De même que cinq fois trois font quinze, de même quinze
fois trois font quarante-cinq. Ajoutez un et vous avez
quarante-six. Ce nombre d'après les principes des Grecs,
est contenu tout entier dans les lettres du nom d'Adam.
En effet, l`alpha, qui est l'Orient, vaut un ; le delta, qui est
l'Occident, vaut quatre ; une seconde fois l`alpha, qui est
le Septentrion, vaut un ; et enfin le moida, qui est le Midi,
vaut quarante. Adam, par ses descendants, s'est étendu
dans ces quatre parties du monde. Mais un, plus quatre,
plus un, plus quarante, font quarante-six. Autant il y a de
jours dans ce chiffre, autant on mit d'années à construire
la maison du Seigneur à Jérusalem.

CHAP. 76

Des quinze bénédictions qui te sont offertes et qui
doivent toujours demeurer sur toi.


De même que un, plus deux, plus trois, plus quatre, font
dix, de même dix, plus vingt, plus trente, plus quarante,
font cent. Mais cent, plus deux-cents, plus trois-cents, plus
quatre-cents, forment le nombre mille. Mille, plus deux mille,
plus trois-mille, plus quatre-mille, font dix-mille.
Dix-mille, plus vingt-mille, plus trente-mille, plus quarante-
mille, font cent-mille. Tu peux dire encore, en t'élevant
davantage, cent-mille, plus deux-cent-mille, plus
trois-cent-mille, plus quatre-cent-mille, font un million.
Dans les éléments de ce calcul, se trouve un nombre
grand et parfait. C'est le nombre un, qui signifie Dieu.
Le prophète ;i dit : « Le Très Haut est grand et seul sur
toute la terre. » Quant au nombre deux, il faut y voir les
deux Testaments, ou les deux commandements : l'amour
de Dieu et l'amour du prochain. Le nombre trois désigne
le Dieu triple et parfait. Celui-là sera sauvé qui croira en
lui. Le nombre quatre signifie les quatre parties, les quatre
colonnes du monde, où partout est prêché le saint
Évangile. Le nombre cinq doit s'entendre des cinq vierges
sages, qui conservent à leurs cinq sens l`éclat de la virginité
et la blancheur de la chasteté. Le nombre six veut
dire les six urnes qui représentent les six âges du siècle.
Apprends à y discerner les gens de bien, et tourne-toi vers
le noble falerne. Dans le nombre sept, il faut voir les sept
candélabres ou les sept lampes qui éclairaient le temple
du Seigneur. Le nombre huit désigne les huit âmes qui
furent sauvées sur les eaux du déluge, c'est-à-dire ceux
qui, dans l'arche de l'Église, régénérés par l'eau du baptême,
méritent la palme de la huitième béatitude. Le
nombre neuf signifie les neuf choeurs des anges. Par le
nombre dix on doit entendre la dîme.
Depuis le premier homme créé jusqu'au dernier qui doit
être sauvé à la fin du monde, j'estime que tous doivent être ramenés
à la condition des anges. Dans cette récupération,
non-seulement les autres nations doivent être sauvées,
mais encore celle des juifs. Puisses-tu profiter de ce salut
dans l'avenir. Amen.
Revenons, mon fils, sur ces calculs. Comme les unités
des différents ordres (1) peuvent être décuplées par le seul
moyen de trois autres nombres (2j, et peuvent de même
devenir cent et mille fois plus grandes, ainsi les phalanges,
par la flexion que les plus habiles calculateurs impriment
à leurs doigts, arrivent, par une progression rapide,
à exprimer jusqu'à un million, pour le salut de la civilisation
tout entière (3). Le nombre de un million est le
plus parfait, S'il n'en était pas ainsi, les frères de Rebecca
ne lui auraient pas dit : « Puisses-tu croître, par ta descendance,
jusqu'à un million. »
Que le Dieu tout puissant te donne sa bénédiction.
Amen.

Chapitre 77

Même sujet.

Que Dieu te donne en abondance la rosée du ciel et la
graisse de la terre. Qu'il soit pour toi un puissant défenseur
contre tes ennemis. Énumération des bénédictions
que Dhuoda désire pour son fils. La dernière bénédiction
est ainsi conçue : Sois béni au début et à la fin de ta jeunesse,
sois béni dans ta vieillesse et jusqu'au port des
âmes. Atteins-y, entre un million, par une marche heureuse
et par le combat du salut. Amen.

CHAP. 78.

Des époques de ta vie.

Tu as déjà seize ans accomplis. Simon second fils avait
le même âge, j'écrirais pour lui un autre livre. Si je te
voyais parvenir à l'âge de trente ans, j'entrerais dans des
développements plus étendus et plus approfondis. Mais la
mort approche de moi et la détresse épuise mon corps.
Aussi, prévoyant que je n'irai pas jusque-là, je me suis
hâtée de composer le présent livre pour te servir à toi et à
ton frère. Je t'exhorte à y puiser toujours ta nourriture,
et à t'y désaltérer comme à un breuvage parfumé de miel.
La date de mon mariage avec ton père, la date de ta naissance,
aux approches des calendes de décembre, tu y trouveras
tout cela. Depuis le premier vers de ce livre jusqu'à
sa dernière syllabe, sache que tout est écrit en vue de ton
salut. Pour connaître les matières traitées, lis les titres
des chapitres : tu comprendras plus aisément le texte de
ces chapitres.
Les vers qui précèdent ou qui suivent, je les ai dictés
moi-même, avec tout le reste, pour ton esprit et ton corps,
et je ne cesserai de t'exhorter à les lire et à les apprendre
par coeur.
(1)

CHAP. 79.

Vers composé avec les lettres de ton nom.
(Résumé de l'enseignement de Dhuoda .)

Autant que possible, deviens fort et heureux, mon enfant
bien-aimé ; prends goût à lire les pages que j'ai fait écrire
pour toi ; tu y trouveras vite de la douceur.

La parole de Dieu est la vie : recherche-la avec soin, et
instruis-toi dans la doctrine sacrée. Alors ton esprit goûtera
les joies éternelles.

Que le Roi infini et puissant, lumineux et bon, daigne en
toutes choses nourrir ton esprit, cher enfant qui entre dans
l'adolescence ; qu'il te protège et te défende à toute heure.
Sois humble d'esprit et chaste de corps, sois prompt à
rendre service aux grands et aux petits, dans la mesure de
ton pouvoir.

Avant tout, crains et chéris Dieu de tout ton coeur, de
tout ton esprit, de toutes tes forces; et ensuite ton père,
en toutes choses.

Que l'enfant né de sa race, accroissant l'illustration de
ses parents, et brillant au milieu des nobles, ne cesse
de servir Dieu.

Aime les grands, considère les premiers de la cour, descends
jusqu'aux humbles, lie-toi avec les bons, garde-toi de
suivre les orgueilleux et les méchants.
Honore toujours les véritables ministres des rites sacrés, les
saints évêques ; recommande-toi partout, les mains
tendues et en toute simplicité, aux gardiens des autels.

Viens souvent en aide aux veuves et aux pupilles, distribue
aux pèlerins de quoi manger et boire, prépare-leur
des asiles, et donne des vêtements à ceux qui sont nus.

Sois, dans les causes, un juge équitable, ne recevant de
présents d'aucune main, et n'opprimant personne : ta rétribution,
c'est Dieu qui te la donnera.

Dans tes dons, sois généreux, toujours attentif et prudent,
sympathique et gracieux; cache-les avec soin, et
garde toujours ces mêmes dehors.

IL y a quelqu'un qui pèsera tout cela, et qui, attribuant
à chacun suivant ses mérites, ses actions, ses paroles et
ses œuvres, pourra te récompenser par les astres du ciel.
Eh bien, noble enfant, recherche ces soins avec ardeur,
pour en mériter la récompense, et méprise les bûchers de
bois sec et de poix (c'est-a-dire la mort).

Quoique ta jeunesse, fleurie de seize rameaux (seize ans),
achemine tes membres délicats vers un plus grand nombre
d'années,
Le moment où tu seras homme me semble bien éloigné.
Je voudrais te voir homme, si j'en avais le pouvoir, mais
je n'aurai pas ce bonheur.

Puisses-tu vivre pour Celui qui t'a créé dans sa bonté,
et, ta course achevée, participer à la récompense de ses
serviteurs.
Assurément, mou esprit se meut dans les ténèbres, mais
je t'exhorte pourtant à lire avec assiduité les pages de ce
livre et à les graver dans ta mémoire.
J'achève ces vers, avec l'aide de Dieu, quand tes seize
ans viennent de s'accomplir, au moment d'entrer dans le
mois de décembre, le jour de la fête de Saint André, et
dans l'Avent du Verbe. Fin des vers.

CHAP. 80

Après les paroles qui précèdent, il est traite de ta vie
publique.


Voilà terminées les paroles de ce livre, que j'ai dictées
avec joie, et que j'ai ordonné de transcrire pour ton utilité.
Mais je désire encore que, lorsque tu auras, avec l'aide
de Dieu, atteint l'âge d'homme, tu organises ta maison au
moyen d'une hiérarchie régulière. A l'instar de David,
qui, ayant tué d'un seul coup huit-cents ennemis, ne paraissait
pourtant qu'un vermisseau entre les vaillants officiers
dont il s'était entouré, accomplis toutes choses dans
ta vie publique, avec méthode et résolution.
Si je vivrai jusqu'à ce temps et si je le verrai, j'en suis
incertaine; incertaine de le mériter, incertaine de le pouvoir,
car, frêle et souffrante, je suis brisée par le choc des.
vagues. Quoique j'en sois réduite à peu d'espoir, cependant
tout est possible au Tout-Puissant. Si l'homme ne peut
toujours réaliser son désir, Dieu peut lui accorder cette
réalisation. Que sa volonté soit faite. Amen.

CHAP. 81

Je pleure, en faisant un retour sur moi-même.'Prie pour
le salut de mon âme pendant le temps qu'il me reste à
vivre, et après ma mort.

La douceur de mon trop grand amour et le regret de ta
beauté m'ont fait presque oublier de moi-même, et maintenant
que les portes de ce livre sont closes, il me prend le
désir d'y rentrer. Quoique indigne d'être comptée dans le
nombre de ceux pour lesquels on doit prier, ne cesse pas,
je t'en conjure, de prier pour le salut de mon âme. Sans
doute, je suis confondue dans la foule, mais tu m'en tireras
par ton affection (6).
Tu n'ignores pas les périls de toute sorte auxquels mon
constant état de souffrance, les événements, et l'obstacle
de ma faiblesse, ont livré mon frêle corps. Grâce à Dieu
et à la valeur de ton père Bernard, j'ai échappé à tous ces
dangers, mais mon esprit retourne vers ces violentes péripéties.
Dans ce passé, j'ai trop négligé les louanges de
Dieu. Ce que je devais faire pendant les sept heures, je ne
l'ai pas fait, demeurant sept fois sept fois inoccupée.
Aussi je te supplie de toutes mes forces de te complaire à
invoquer sans cesse pour mes fautes la miséricorde de
Dieu, afin qu'il daigne m'élever au ciel, moi brisée et accablée.
Tant que tu me sauras vivante, que ta tendresse plaide
ainsi pour moi, non-seulement par les veilles et les prières,
mais encore par les aumônes, afin que, lorsque la
mort m'aura délivrée de la chaîne de mes péchés, je sois
reçue avec bonté par le souverain juge.
Si tes fréquentes prières et celles des autres me sont
nécessaires à présent, elles me le seront bien davantage
encore après ma mort, dont je sens que l'heure est proche.
Mon esprit est déchiré de crainte et d'angoisse au sujet de
l'avenir de mon salut, et je suis incertaine de le mériter.
Pourquoi ? Parce que j'ai péché en pensées et en paroles.
Cependant, je ne désespérerai jamais de la miséricorde de
Dieu. Pour l'obtenir un jour, je ne laisse personne qui
puisse aussi bien plaider pour moi que toi-même, noble
enfant, et ceux qui naîtront de toi.
J'ai contracté beaucoup de dettes pour venir en aide à
mon seigneur et maître Bernard :je ne voulais pas que,
dans la Marche d'Espagne ou partout ailleurs, mes services
lui fissent défaut ; je ne voulais pas non plus qu'il se séparât
de toi ou de moi, comme c'est la coutume dans certaines
circonstances. Pour subvenir h des dépenses nombreuses,
j'ai dû faire souvent d'importants emprunts, non seulement
à des chrétiens, mais encore à des juifs. Autant
que j'ai pu, je les ai remboursés, et je les rembourserai
toujours autant que je pourrai. Mais, si après ma mort, il
demeure dû quelque chose, je te supplie de rechercher
avec soin mes débiteurs. Quand tu les auras trouvés, fais
payer tout exactement, d'abord avec les ressources de mon
héritage, s'il en reste, et ensuite avec celles que tu as en
propre, ou que tu auras, avec l'aide de Dieu, légitimement
acquises.
Qu'ajouterai-je ? Comment tu dois te conduire à l'égard de
ton jeune frère, je te l'ai dit plus haut, et je te le rappelle
encore. Je lui demande, s'il arrive à l'âge d'homme,
de prier pour moi. Je m'adresse à vous deux comme à un
seul, afin que vous offriez souvent pour moi les libations
des sacrifices et les victimes.
Lorsque mon Rédempteur me retirera de ce monde,
qu'il daigne, grâce à tes prières et à celles des autres, me
préparer le rafraîchissement et me recevoir au ciel avec
les saints.
C'est la fin du Manuel. Amen. Deo Gratias.


De l'ordre que tu dois suivre dans le chant des Psaumes.

Je t'ai, plus haut, recommandé de chanter les sept heures.
Je reviens à présent sur ce sujet, pour entrer dans le
détail de la manière dont tu dois le faire. Le chant des
psaumes, quand il est exécuté avec âme, ouvre au coeur le
chemin de Dieu. Alors il nous pénètre du mystère des prophéties
et des grâces de la ferveur. Cette ferveur nous
mène à Jésus. 11 est nécessaire que notre esprit se purifie
des souillures du siècle et se pénètre des choses divines
et célestes, pour que le ciel lui soit révélé. Dans cette vie
mortelle, il n'est rien dans quoi nous puissions plus intimement
pénétrer que les divines louanges des psaumes.
Aucun mortel, pourtant, ne peut en exprimer ni en comprendre
les vertus.
Énumération de ce que Guillaume trouvera dans les
psaumes : l'incarnation du Verbe, la Passion, la Résurrection,
l'Ascension, une pénétrante prière, une complète confession de ses péchés,
le moyen d'implorer dignement
la miséricorde divine, la raison cachée de tout ce qui lui
arrivera, l'aveu de sa faiblesse et de sa misère, ce qui lui
vaudra la clémence de Dieu, et enfin toutes les vertus.
Indication des psaumes que Guillaume devra chanter,
suivant ses besoins spirituels. Éloge du psaume : Beati
immaculati.
Tu n'as pas besoin d'éparpiller ton esprit dans beaucoup
de livres. Dans le psautier (1) seul, jusqu'à la fin de ta vie,
tu trouveras matière à lire, à étudier et à apprendre, car
il contient les prophètes, les évangiles, et tous les livres
apostoliques et divins.
N'oublie pas, dès que finiront les sept heures du jour, de
chanter le TeDeum.
Le chant des psaumes a tant de vertus, que tu dois les
chanter assidûment pour toi, pour ton père, pour tous les
vivants, pour les personnes qui te sont chères, pour tous
les fidèles défunts, et pour ceux dont la commémoration est
écrite plus haut. J'ajoute aussi : pour le salut de mon àme,
si tu ne redoutes pas de chanter pour moi les psaumes que
tu auras choisis, afin que, lorsque la fin de ma vie arrivera,
je ne sois pas à gauche avec les méchants, mais à droite
avec les bons. Amen.
Recours toujours à ce livre.
Sois toujours, noble enfant, fort et prospère dans le
Christ.

MichelT

Date d'inscription : 06/02/2010

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